Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à dix-huit questions orales.

Présence postale en zone rurale

M. Georges Mouly.  - J'avais appelé l'attention de votre collègue, ministre de l'économie et des finances, sur les problèmes posés par la libéralisation du secteur postal et par le financement du service universel. Par un courrier du 28 septembre 2007, elle m'avait indiqué son attachement à un service universel de qualité sur l'ensemble du territoire et affirmé que le Gouvernement rechercherait des solutions efficaces de financement des obligations de ce service universel afin de garantir l'égalité de traitement de tous les citoyens quel que soit leur lieu de résidence. C'est un enjeu de cohésion sociale et territoriale, notamment en milieu rural.

Les modalités de fonctionnement du Fonds postal national de péréquation territoriale sont enfin connues grâce à la signature de la première convention triennale de présence postale. Mais, alors que La Poste a estimé le coût d'une présence postale intégrant une dimension d'aménagement du territoire à 360 millions d'euros par an, seulement 140 millions sont annoncés. Les élus ruraux sont déjà inquiets des multiples réorganisations des activités postales, souvent mises en oeuvre sans information préalable, malgré l'existence des commissions départementales de la présence postale territoriale, malgré la charte des services publics et malgré diverses conventions de partenariat. Si de surcroît l'opérateur doit puiser dans sa trésorerie pour assurer ses obligations d'aménagement du territoire, leur inquiétude ne pourra que grandir.

Ces maires sont conscients de la nécessité d'une réorganisation mais ils déplorent que les réaménagements se réalisent souvent sans concertation ni information, parfois au détriment de la qualité du service rendu. Dans mon département par exemple, même si j'entretiens d'excellentes relations de travail avec la direction départementale, l'insatisfaction des élus mis devant le fait accompli est grande avec, ici une fermeture temporaire pour manque de personnel, là une réorganisation de l'effectif qui laisse craindre une fermeture ou un service réduit de moindre qualité.

On peut s'interroger sur la juste place réservée aux décideurs locaux alors même que les finances locales sont mises à contribution pour le maintien de la présence territoriale. On peut s'interroger sur le financement de cette présence et sur le maintien du réseau des trésoreries, alors que, dans mon département, un arrêté du 26 décembre 2007 portant réorganisation des postes comptables des services déconcentrés supprime quatre trésoreries.

Le Gouvernement nous avait assuré que la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique garantirait un service fiscal de proximité dans les zones rurales. Selon la brochure du ministère, « cette fusion ne remet pas en cause le rôle des trésoreries dans les communes rurales, bien au contraire ». Toutefois, on constate un écart entre le discours et la réalité vécue par les maires : de nombreux élus ont le sentiment d'être un guichet plus qu'un partenaire.

La commune est pourtant l'échelon pertinent pour appréhender le service au public dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité. S'il faut certes rechercher la meilleure efficacité économique et sociale, la cohésion sociale et le développement équilibré du territoire restent les fondements du service public.

Le Gouvernement entend-il rechercher des solutions de financement efficaces, afin que soit garantie l'égalité de traitement de tous les citoyens ? Comment faire en sorte que les élus soient associés en amont des décisions, même à titre informatif ? Comment s'assurer que les discours rassurants des responsables seront mis en oeuvre sur le terrain ?

M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme.  - Le Gouvernement veille à l'égalité d'accès de tous les citoyens aux services postaux, qu'ils soient situés en zone urbaine ou en zone rurale. Moi-même élu d'un département rural, je suis très sensible à la question.

La loi de régulation des activités postales du 20 mai 2005 interdit que plus de 10 % de la population d'un département se trouve éloignée de plus de cinq kilomètres ou de plus de vingt minutes d'un accès au réseau de La Poste. Le contrat de présence postale territoriale, conclu le 19 novembre 2007 par Mme Lagarde avec le président de l'Association des maires de France et le président de La Poste, encadre jusqu'en 2010 les obligations de l'opérateur en matière de présence territoriale. Chaque commission départementale de présence postale territoriale sera informée du montant de la dotation départementale du fonds afin de proposer sa répartition. Au total, 420 millions seront consacrés au maintien de la présence postale. En 2008, le fonds financera plus du tiers de la mission d'aménagement du territoire, le solde étant pris en charge par l'entreprise. Il y aura une véritable péréquation au profit des zones prioritaires de chaque département.

La présence postale territoriale, avec ses dix sept mille points de présence, sera maintenue. En prévoyant le financement d'agences postales communales en partenariat avec les mairies ou de Relais Poste chez les commerçants, ce contrat fait évoluer le réseau postal tout en maintenant un réseau de proximité : la création d'un relais poste permet par exemple d'effectuer des opérations de guichet après 18 heures, voire le dimanche. Cette évolution n'est cependant encouragée que si elle correspond à la volonté partagée des élus et de La Poste.

Le contrat d'objectif 2008-2012, en cours de finalisation entre l'État et La Poste, sera centré sur la mise en oeuvre des missions de service public assignées à l'opérateur postal, ainsi que sur les modalités de financement. Le Gouvernement reste mobilisé sur ce dossier important.

M. Georges Mouly.  - Merci de ces précisions. En cas de réorganisation, les élus doivent être informés et doivent pouvoir en discuter.

Devenir de l'Imprimerie nationale à Choisy-le-Roi

Mme Odette Terrade.  - Depuis 2003, l'État a entrepris un plan de restructuration de l'Imprimerie Nationale, qui s'est traduit par la suppression de neuf cents emplois, l'abandon d'une partie de ses activités -pourtant essentielle- et Ia délocalisation sur le site de Choisy-le-Roi, dont la cession des bâtiments est déjà envisagée. Des méthodes qui ne sont pas sans rappeler celles dénoncées par le Président de la République concernant Mittal Steel... Des engagements avaient pourtant été pris par le ministre de l'économie de l'époque, aujourd'hui Président de la République.

Le plan de sauvegarde de l'emploi, mis en place en 2005 avec les syndicats et la direction, qui prévoyait le reclassement de tous les employés et le maintien du statut des ouvriers sous décret, est aujourd'hui remis en cause par le ministère et la direction : les engagements pris sont bafoués, et les salariés en font les frais !

L'entreprise, dont l'État est actionnaire à 100 %, n'aurait plus les moyens de financer ce plan. Pourtant, 131 des 197 millions de recapitalisation devaient couvrir les coûts sociaux, sans compter les 85 millions issus de la vente du bâtiment de la rue de la Convention et d'autres actifs.

Comme je l'avais demandé à Mme Lagarde, une réunion tripartite à été tenue. Mais, selon les représentants des salariés du site de Choisy que j'ai rencontrés hier, le médiateur qui a été nommé n'a pas les moyens de tenir les engagements pris. Les salariés, qui s'inquiètent de leur avenir, veulent connaître les conditions de reprise de l'Imprimerie par le seul repreneur connu à ce jour, qui déclare pour sa part ne pas disposer des éléments nécessaires à sa décision !

Les filiales telles que Darling, l'lstra et Evey-Rotative, que certains salariés avaient été incités à rejoindre, sont aujourd'hui soit en dépôt de bilan, soit en redressement ou liquidation judiciaire. Le travail promis n'a pas été au rendez-vous : l'Imprimerie Nationale a sous-traité les commandes, mais pas à ses propres filiales !

Après l'affaire de la vente et du rachat des bâtiments de la rue de la Convention, sur laquelle notre groupe a demandé une commission d'enquête, tout cela ressemble à la casse pure et simple d'une entreprise d'État, à la manière du pire des « patrons voyous » ! Alors que Mme Lagarde a récemment plaidé pour le maintien de l'emploi dans de grandes entreprises de métallurgie françaises, alors qu'on annonce un soutien de l'État à une entreprise privée pour préserver une activité en France, le devenir du site de Choisy-le-Roi reste flou.

Que comptez-vous faire pour tenir la parole de l'État ? Qu'en est-il du repreneur potentiel ? Que vont devenir les cent vingt employés, en grève depuis seize jours ? Que va devenir le site de Choisy-le-Roi ? Les salariés attendent votre réponse.

M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme.  - L'État est très attentif à la situation du site de Choisy-le-Roi, qui entre aujourd'hui dans sa troisième semaine de blocage par des salariés grévistes. La cession de ce site est prévue depuis 2005, date à laquelle la Commission européenne a autorisé une aide publique de 200 millions à cette entreprise, à condition qu'elle se recentre sur son coeur de métier et cède ses autres activités, dont celle, très déficitaire, de Choisy. En 2007, le repreneur offrant les meilleures garanties industrielles et financières pour l'avenir du site a été sélectionné après une large recherche, et a proposé de reprendre une partie des emplois. La direction a donc entamé un processus d'information et de négociation sur les conditions de la reprise et le plan de sauvegarde de l'emploi.

La grève commencée le 21 janvier dénonçait un manque de dialogue et de concertation et réclamait la tenue d'une réunion avec les représentants de l'État. Il y a une semaine, les organisations syndicales, la direction et des représentants du ministère de l'économie et des finances et de la direction du travail et de l'emploi se sont réunis et ont désigné un médiateur, nommé par l'État, chargé de faciliter la reprise du dialogue social. Ce dernier a déjà rencontré plusieurs fois les représentants du personnel et la direction afin de préciser le contenu du plan social et les conditions de la reprise, sur laquelle les salariés ne s'estimaient pas assez informés. Il a été garanti que le plan de sauvegarde de l'emploi disposerait de moyens financiers per capita équivalents à ceux engagés au titre du plan précédent. L'État a également confirmé qu'il mobiliserait les mêmes dispositifs pour faciliter le reclassement dans les fonctions publiques.

Il faut que le dialogue social reprenne, avec l'assistance active du médiateur, afin que tous reviennent à la table des négociations. Chaque nouveau jour de blocage fragilise la situation économique et les chances de reprise, et risque donc de compromettre le maintien à Choisy des quarante emplois concernés.

Mme Odette Terrade. - J'espère que votre réponse apaisera les salariés, mais la visite que j'ai effectuée hier à Choisy m'en fait douter. Les syndicats ne sont pas informés des plan de reprise que vous évoquez, le repreneur potentiel manque lui aussi d'informations, et un autre repreneur, mieux placé jusqu'ici, aurait finalement été écarté. Le médiateur reconnaît qu'il manque de moyens. L'État doit s'assurer du respect des engagements donnés. La confiance des salariés envers la direction, qui semble n'avoir fait que fermer des sites, est ébranlée. Il faut tenir compte de leurs qualifications et de leur statut, ainsi que de la nécessaire sécurité dans l'impression des documents officiels.

Où sont passés les crédits votés en 2005 pour le plan de sauvegarde de l'emploi ? Le blocage est apparu aux salariés comme la seule façon de se faire entendre. Il ne faut pas les rendre responsable des difficultés de l'entreprise.

Ligne grande vitesse Perpignan-Barcelone

M. Roland Courteau. - La presse régionale titrait, voici quelques mois : « Le projet de ligne grande vitesse Montpellier-Perpignan avance au rythme d'un tortillard. » Tout est dit. En 1990, la mission Querrien annonçait un délai de dix ans. Dix-huit ans plus tard, on ne sait toujours pas si les travaux débuteront dans moins de dix ans, vingt ou trente ans. Vous comprenez, madame le secrétaire d'État, notre profonde lassitude doublée d'une certaine irritation envers les prédécesseurs de M. le secrétaire d'État aux transports : 1990, mission Querrien ; 1995, approbation de l'avant-projet sommaire ; 2001, qualification du projet d'intérêt général. Entre-temps, il y eut les sommets franco-espagnols d'Albi en 1992, de Tolède en 1993, de Foix en 1994. La mise en service de la section Montpellier-Perpignan était alors prévue pour 2002-2005. Sans compter les innombrables réunions de travail, sur le terrain, au Sénat ou au ministère des transports...

En 2006, le ministre chargé des transports me faisait savoir, ici-même, qu'il convenait de lancer d'autres études, en explorant des scénarios alternatifs, pour une ligne mixte fret-voyageurs. Le fret aurait été oublié alors que, dès 1995, avec l'accord de Madrid, on savait que la section Perpignan-Figueras serait mixte. Et nous prévoyions, dès 1996-1997, un fort accroissement des échanges avec l'Espagne. J'en avais fait état, en qualité de rapporteur du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la France et l'Espagne pour la réalisation de la section Perpignan-Figueras. Huit mille cinq cents poids lourds empruntent l'autoroute A9 chaque jour, soit trois millions par an. Dans dix ans, ils seront quinze mille par jour et six millions par an. Quand aboutirons-nous à un véritable équilibre rail-route ?

Beaucoup de temps a été perdu. Il y a urgence à réaliser la section de ligne à grande vitesse entre Montpellier et Perpignan, avec une gare TGV à Narbonne. (M. Paul Blanc approuve) Je remercie Paul Blanc pour son soutien. Les études préalables au débat public sont engagées et constituent une première étape. Mais que ne les a-t-on réalisées plus tôt ? D'autant qu'elles risquent de remettre en cause les orientations de l'avant-projet sommaire ou certaines parties du projet d'intérêt général, d'où de nouveaux délais.

Au regard des enjeux économiques et environnementaux, ainsi que des retards accumulés, qui engendrent de fortes impatiences de l'Espagne, je demande au Gouvernement de considérer ce projet comme la priorité des priorités et de noter que, selon nous, le meilleur site d'implantation d'une gare TGV ne peut être que Narbonne. Pouvez-vous, madame le secrétaire d'État, nous préciser l'évolution de ce dossier et m'indiquer s'il sera bien inscrit à l'ordre du jour du prochain comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires ? Le Premier ministre s'y est engagé en évoquant, sur ce projet, « la culture du résultat ». Et la presse régionale a relevé les propos du ministre Borloo, à la sortie du tunnel du Perthus, selon lesquels « nous allons faire Perpignan-Montpellier... à toute blinde ». Pouvez-vous me dire quelle est l'équivalence en temps de cette expression ? (Sourires et applaudissements à gauche)

M. Paul Blanc. - Dix ans !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Je ne me hasarderai pas à traduire les expressions des uns ou des autres... (Sourires) Je vous prie d'excuser l'absence de M. Bussereau, qui se trouve justement en déplacement, avec le Président de la République, pour un projet lié à la grande vitesse.

Je comprends votre inquiétude au sujet de la réalisation du futur tronçon à grande vitesse Montpellier-Perpignan et des conséquences du retard pris par les Espagnols pour le tronçon Figueras-Barcelone. Les conclusions prises à l'issue du sommet franco-espagnol du 10 janvier à Paris devraient vous rassurer quant à la volonté de la France de maintenir le calendrier prévu pour l'arc languedocien. La programmation tient compte des perspectives d'évolution des trafics et des niveaux de saturation prévisibles des différentes sections.

Le contournement ferroviaire de Nîmes et de Montpellier sera engagé dans le cadre d'un contrat de partenariat public-privé. La consultation doit être lancée en 2008 et la mise en service pourrait être envisagée pour 2013. Un programme d'aménagement de la ligne Perpignan-Montpellier suivra le même calendrier. Les procédures nécessaires à la construction d'une nouvelle ligne à grande vitesse seront réalisées parallèlement, sous réserve des conclusions du débat public lancé cette année. Par ailleurs, à la suite du Grenelle de l'environnement, une impulsion nouvelle sera donnée au programme des lignes à grande vitesse et à l'utilisation du transport ferroviaire et du transport collectif. Lors d'un déplacement à Nîmes le 19 octobre dernier, le Premier ministre, a confirmé que le projet d'une ligne ferroviaire à grande vitesse entre Nîmes-Perpignan serait dans les priorités immédiates du Gouvernement et du prochain CIACT au printemps. (M. Paul Blanc approuve)

Lignes ferroviaires auvergnates

Mme Michèle André. - Ma question s'adresse au secrétaire d'État aux transports, mais votre engagement, madame le secrétaire d'État, après le Grenelle de l'environnement, en faveur du rail dans le cadre du développement durable me laisse espérer une réponse attentive, à défaut de positive. Ce matin les médias bruissent de la prochaine automotrice grande vitesse (AGV). En Auvergne, nous espérons toujours une ligne à grande vitesse entre Paris et Clermont-Ferrand, soit quatre cents kilomètres en moins de trois heures, pour 2018-2020. A court terme, nous nous soucions plutôt du réseau secondaire alors que se produisent de nombreux ralentissements et des fermetures, notamment celle de la ligne Clermont-Ferrand-Montluçon. Les résultats ? Des centaines de camions sur les routes départementales, des salariés obligés de prendre leur voiture pour se rendre au travail, des familles qui doivent se débrouiller pour les lycéens et les collégiens !

C'est toute une région qui est délaissée et qui regarde le progrès à la télévision... Les élus sont révoltés. Quels investissements sont prévus pour maintenir ces lignes secondaires ? La région a beaucoup investi pour développer les TER. Le Gouvernement compte-t-il nous soutenir ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Ce sujet relève effectivement du Grenelle de l'environnement, dont les conclusions invitaient le Gouvernement à réfléchir à une extension du réseau à grande vitesse, mais citaient aussi comme enjeu la mise à niveau du réseau existant. Il y sera consacré 400 millions d'euros supplémentaires par an. Fin 2005, le constat de l'état très dégradé des infrastructures a débouché sur le plan de rénovation 2006-2010, doté de 1 800 millions d'euros, en premier lieu pour la régénération des lignes les plus fréquentées.

Les régions accompagnent cet effort dans les contrats de projets 2007-2013. Ainsi, en Auvergne les ralentissements seront supprimés et les lignes de desserte régionale modernisées : 100 millions d'euros sur les lignes Clermont-Aurillac, Clermont-Le Puy et Montluçon-Vierzon, par exemple.

Pour les lignes à très faible trafic, Lapeyrouse-Volvic, Montluçon-Eygurande -un aller-retour par jour- il faudra trouver un meilleur équilibre économique, car la maintenance standardisée du réseau ferré national est adaptée à des trafics importants, à haut niveau de prestation. Il faut réfléchir à l'organisation de la desserte voyageurs par d'autres itinéraires : Montluçon-Clermont par Gannat, par exemple, ou par d'autres solutions.

Mme Michèle André. - Relier Montluçon depuis Clermont prendra beaucoup plus de temps...Je vous remercie de m'avoir répondu mais vos propos sont désespérants !

Desserte ferroviaire des Arcs-Draguignan

M. Pierre-Yves Collombat. - La gare des Arcs-Draguignan, qui dessert cinquante-deux communes varoises, dont la communauté d'agglomération dracénoise et le golfe de Saint-Tropez, est habituée à voir passer les TGV. Les élus et les usagers sont tenus pour quantité négligeable par la direction de la SNCF. Les courriers que j'adresse à celle-ci ne font même pas l'objet d'un accusé de réception ! Le réaménagement des bâtiments, le rehaussement des quais sont toujours sur la voie de garage ! La communauté d'agglomération a procédé à l'aménagement, coûteux, des abords de la gare. Les nouveaux horaires entrés en application le 9 décembre 2007, concoctés sans aucune concertation, sont la goutte d'eau qui fait déborder le vase.

En provenance ou à destination de Lyon, un seul TGV sur les cinq qui passent aux Arcs s'y arrête. Et encore, à une heure qui ne permet pas aux Varois d'utiliser le train pour affaires professionnelles. Il ne leur reste que l'avion au départ de Nice.

Le Grenelle de l'environnement propose, la SNCF dispose. Pour relier Paris par TGV direct, il y a le 10 h 42 et le 11 h 17 ; mais rien l'après-midi. Dans l'autre sens, deux TGV arrivent en gare des Arcs à 1 h 42 d'intervalle en début d'après midi. Nouveauté des nouveautés, le 13 h 50, pourtant très utilisé, quoi qu'en dise la SNCF, qui ment éhontément, a été remplacé par un autre... qui ne s'arrête pas aux Arcs. La situation jusqu'ici n'était pas brillante, mais maintenant c'est le Pot au noir.

Les cinquante-deux communes concernées existent-elles pour vous ? La SNCF est-elle toujours chargée d'une mission de service public ? A-t-elle des comptes à rendre aux représentants de la Nation et au Gouvernement ? Ces modifications ont-elles un lien avec le choix du tracé de la nouvelle ligne à grande vitesse, qui serait donc déjà opéré ? Si le tracé dit « des grandes métropoles » est adopté, Les Arcs devront se contenter de regarder passer les TGV. Autant les y préparer.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - La SNCF, RFF et les conseils régionaux de Rhône-Alpes et de Provence-Alpes-Côte-d'Azur travaillent depuis plusieurs années à la refonte du cadencement des dessertes TGV, TER et fret, afin d'accompagner la croissance du trafic. Un TGV entre Marseille et Saint-Raphaël ne peut s'arrêter qu'une fois : soit à Toulon, soit aux Arcs Draguignan. C'est Toulon, beaucoup plus fréquenté - neuf cent mille voyageurs contre cent mille aux Arcs en 2007-, qui a été privilégié. Le trafic entre Les Arcs-Draguignan et Paris est saisonnier et la SNCF a donc prévu d'avril à septembre 2008 un troisième aller et retour quotidien, l'après-midi. La SNCF suit de très près l'évolution du trafic sur cette destination et étudie la possibilité d'un TGV supplémentaire dans le sens Paris-Draguignan d'octobre à mars. Sur la liaison avec Lyon, le trafic est très faible, et en baisse. Les arrêts aux Arcs-Draguignan ont donc été reportés sur un TGV Nice-Lyon-Lille. Un bilan sera établi à la mi-2008.

Les modifications horaires sont bien sûr sans lien avec les études de tracé de la ligne à grande vitesse, objet d'une large concertation ; les collectivités concernées siègent au comité d'orientation. Les résultats devraient être disponibles à la mi-2008 et après avoir pris connaissance des avis des collectivités, le Gouvernement prendra sa décision.

M. Pierre-Yves Collombat. - Tout va très bien madame la marquise... Pas besoin d'avoir fait de hautes études pour constater que les voyageurs sont plus nombreux à Toulon qu'à Draguignan. Mais qui exerce la tutelle sur qui, de la SNCF et du Gouvernement, en matière d'aménagement du territoire ? Les horaires actuels conviennent aux retraités, aux inactifs, pas aux personnes en déplacement professionnel. La SNCF se moque de nous, j'espérais que vous le lui feriez savoir combien nous prisons peu cet humour.

RN 124

M. Aymeri de Montesquiou. - Auch n'est pas reliée à Toulouse par une 2x2 voies, contrairement aux autres préfectures de la région, Cahors, Albi, Montauban, Foix, Tarbes... Le Gers ne compte que vingt kilomètres de voie rapide : vingt kilomètres de bonheur fractionné ! Nous attendons avec impatience la mise à niveau des trente et un kilomètres restant entre Toulouse et Auch. Les retards s'ajoutent aux retards ; le contrat de plan État-région prévoyait pourtant une livraison en 2006. J'ajoute que cette réalisation était aussi promise à titre de compensation des nuisances liées à l'itinéraire à très grand gabarit. Une fois de plus, l'État n'a pas tenu ses engagements. Il manque plus de 175 millions d'euros pour achever les tronçons Auch-Aubiet, la déviation de Gimont et Gimont-l'Isle-Jourdain. Il ne suffit pas de les inscrire dans le plan de développement et de modernisation des itinéraires (PDMI) : l'État, responsable de tous les retards accumulés, doit s'engager de façon irrévocable. Madame la ministre, l'aménagement du territoire et l'égalité des chances sont en jeu ! Quel sera le calendrier des travaux ? Le financement est-il assuré ? La RN 124 doit enfin devenir une route express !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Entre Auch et Toulouse, près de vingt kilomètres ont été aménagés à 2x2 voies dans le cadre du contrat de plan État-région et trente-cinq nouveaux kilomètres seront mis en service avant la fin 2009 : section entre Toulouse et l'Isle-Jourdain afin d'avoir un aménagement continu à 2x2 voies et section Aubiet-Auch.

Quant aux autres aménagements de la RN 124, le financement de la déviation de Gimont et du tronçon entre Gimont et l'Isle-Jourdain devra être recherché dans le cadre de la nouvelle programmation des investissements sur le réseau routier national. M. Perben, alors ministre, avait donné aux préfets de région mandat de consulter les élus le 26 février 2007, tâche dont le préfet de Midi-Pyrénées s'est acquitté officiellement le 17 mars 2007.

Le processus sera finalisé après que le Gouvernement aura tiré toutes les conclusions du Grenelle de l'environnement.

M. Aymeri de Montesquiou. - Madame le ministre, la réponse que l'on vous fait lire (Mme la secrétaire d'État s'exclame) ne saurait en rien me satisfaire. Vingt kilomètres de voie rapide pour tout le Gers, c'est inacceptable en termes de développement du territoire et d'égalité des chances. Comment un département peut-il se développer avec un réseau routier aussi faible ? L'État avait pris des engagements. La réponse que vous m'avez faite est inacceptable et j'envie beaucoup votre département où l'on en est à construire des murs antibruit contre les autoroutes. Je reposerai donc cette question en espérant que M. Bussereau, dont je comprends parfaitement l'absence aujourd'hui, m'apportera une véritable réponse.

CV anonymes

Mme Bariza Khiari. - Lors de la cérémonie de clôture de l'année européenne de l'égalité des chances du 17 décembre dernier, le président de la Halde, Louis Schweitzer, a remis dix-sept propositions pour lutter plus efficacement contre les discriminations. Parmi elles, se trouve la généralisation du CV anonyme, que le Parlement avait votée pour les entreprises de plus de cinquante salariés dans la loi du 31 décembre 2006 sur l'égalité des chances, mais qui n'a pu être mise en oeuvre, faute de décret d'application. Il est fort regrettable que ce Gouvernement et celui qui l'a précédé ne jugent pas utile de respecter la volonté du Parlement quand le CV anonyme représenterait un outil républicain pour mieux lutter contre les discriminations, notamment indirectes, à l'emploi. Celui-ci permet, en effet, de gommer les différences raciales et sociales à l'étape du recrutement, étape où les discriminations sont les plus fortes. Il est logique d'étendre l'anonymat, que notre tradition de méritocratie républicaine impose aux concours, aux CV. Avec cette mesure, l'on combat le conformisme des recruteurs et l'on diversifie le recrutement -l'expérience conduite chez Axa depuis 2005, soit avant le vote de la loi, pour les emplois de commerciaux l'a prouvé-, plus efficacement qu'avec une politique de quotas et de discriminations positives qui contribue à stigmatiser davantage encore des populations.

Quand le Gouvernement compte-t-il publier le décret d'application ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Xavier Bertrand, retenu à l'Assemblée nationale pour l'examen d'une proposition de loi. L'article 24 de la loi du 31 mars 2006 sur l'égalité des chances, adopté à l'initiative du président About, oblige les employeurs de plus de cinquante salariés à examiner les informations communiquées par écrit par les candidats à un emploi dans des conditions préservant leur anonymat afin d'éviter une discrimination au premier contact, discrimination que laissent supposer certaines enquêtes. Le législateur, souhaitant laisser le temps à la négociation sociale d'aboutir, a renvoyé la mise en oeuvre de cette mesure à un décret en Conseil d'État. En effet, les partenaires sociaux négociaient parallèlement l'accord national interprofessionnel sur la diversité, signé le 12 octobre 2006 par la CFTC, la CGT, la CGT-FO, la CFDT, le Medef, la CGPME et l'UPA et déposé le 23 mars 2007 à la direction générale du travail. Selon cet accord, chaque entreprise, après information des représentants du personnel, doit faire en sorte que les recrutements, quels qu'ils soient, soient exempts de toute forme de discrimination, notamment en préservant l'anonymat des candidatures. Le bilan de cette expérience, qui devait être dressé avant le 31 décembre 2007, n'a pas été réalisé. Toutefois, les partenaires sociaux ont demandé l'extension de l'accord national interprofessionnel, demande qui sera examinée le 12 février prochain pour une publication rapide de l'arrêté d'extension. A cette occasion, M. Xavier Bertrand rappellera aux partenaires sociaux que le Gouvernement attend beaucoup du bilan des expérimentations déjà menées. Madame, comme le président de la Halde l'y a invité le 17 décembre dernier, le Gouvernement continuera de privilégier la négociation entre partenaires sociaux.

Mme Bariza Khiari. - Merci pour cette réponse précise. La contractualisation est une bonne chose, mais je crains qu'elle n'aboutisse pas. Je vous reposerai donc cette question dans quelques mois.

Madame Boutin, j'espère fort que la lutte contre les discriminations à l'emploi, terrain sur lequel tant de temps a été perdu, sera l'un des axes prioritaires du plan banlieue et que le Gouvernement prendra enfin les décisions qui s'imposent pour dissiper le doute sérieux qui plane sur sa volonté réelle de lutter contre les discriminations.

Accès des handicapés aux logements sociaux

Mme Bernadette Dupont. - J'attire l'attention de Mme la ministre du logement sur les difficultés d'application du droit au logement opposable, le Dalo, pour les personnes handicapées dans les logements sociaux. L'article L. 111-7 du code de la construction et de l'habitation, qui résulte de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, impose de rendre accessibles les logements aux personnes handicapées, ce qui surenchérit le coût de construction des habitations, coût déjà augmenté en raison de la rareté du foncier. Parallèlement, l'institution par la loi du 5 mars 2007 d'un droit au logement opposable permet aux personnes handicapées, dont les faibles ressources interdisent souvent l'accès au logement conventionnel, de saisir les commissions de médiation pour obtenir l'attribution d'un logement social.

Que compte faire le Gouvernement pour mettre en cohérence les revenus des personnes handicapées et le coût du logement et rendre applicable le Dalo ?

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.  - Madame Khiari, rassurez-vous, le Gouvernement est déterminé à lutter contre les discriminations qui sont inacceptables dans une république vivante !

M. le président. - Très bien !

Mme Christine Boutin, ministre. - Madame Dupont, je suis comme vous persuadée qu'il faut donner aux personnes handicapées accès à un logement social. Nous y parviendrons par une action conjointe de l'ensemble des acteurs publics.

Le coût des travaux de mise en accessibilité, prévus par la loi du 11 février 2005, est partiellement pris en charge par l'État, les organismes HLM pouvant déduire du montant de la taxe foncière sur les propriétés bâties les dépenses engagées à ce titre. Pour les constructions neuves, la réglementation impose désormais que les logements soient entièrement accessibles. Ainsi, l'intégration de ces nouvelles normes ne représente pas un coût d'opération supplémentaire. Je ne nie pas que ces normes surenchérissent le coût des constructions, mais cet effort est normal dans un pays où l'on ne veut plus de discriminations à l'endroit des personnes handicapées.

S'agissant de l'adéquation entre les ressources des personnes handicapées et le coût du logement HLM, une personne bénéficiaire de l'allocation adulte handicapée perçoit, au 1er janvier 2008, une aide d'un montant maximal de 628,10 euros par mois, qui peut être complétée par une majoration pour la vie autonome de 104,77 euros par mois. Au 31 décembre 2006, un peu plus de sept cent soixante dix mille personnes étaient concernées par l'allocation, dont plus de cent dix mille percevaient la majoration pour vie autonome. En moyenne, la dépense de logement s'élève à 375 euros par mois dans un logement social de deux pièces. Une fois déduite l'aide au logement, qui s'élève à 252 euros par mois pour une personne seule sans ressource imposable, le reste-à-charge est donc compris entre 50 et 100 euros par mois. Les personnes handicapées ont priorité pour les attributions des logements sociaux, priorité renforcée par la loi du 5 mars 2007. En la matière, ce sont des partenariats locaux, notamment à travers les maisons départementales des personnes handicapées, qui permettront d'apporter des réponses adaptées.

Je ne fais pas mystère de mon soutien militant et convaincu à la loi Dalo, mais les demandes émanant des six catégories prioritaires ne seront pas toutes satisfaites d'ici la fin de l'année. Au cours des semaines à venir, je vous proposerai donc des mesures pour atténuer l'insuffisance de l'offre. Bien sûr, les personnes handicapées sont prioritaires.

À force de persévérance, nous mettrons fin à ce scandale d'une France qui ne loge pas tous ses enfants !

Mme Bernadette Dupont. - Je note votre volonté de faire avancer les choses, mais les personnes handicapées ne peuvent habiter dans des immeubles anciens, impossibles à aménager. Dans une ville comme celle où j'habite, les constructions neuves ne valent guère mieux. L'insuffisance de logements accessibles est donc avérée.

Par ailleurs, je me demande si l'aide versée aux organismes aux fins d'accessibilité épargne toute répercussion du surcoût vers les locataires.

Entretien du patrimoine culturel

Mme Catherine Dumas. - En 1986, les colonnes de Buren, érigées dans la cour d'honneur du Palais Royal, avaient suscité un vif émoi. Vingt ans plus tard, elles ont acquis ici une légitimité patrimoniale incontestable et font partie des circuits touristiques parisiens. Pourtant, la polémique réapparaît, à l'initiative du créateur de cette oeuvre dénaturée par l'absence de l'écrin d'eau et de lumière initialement prévu.

Cette colère très médiatisée semble avoir porté ses fruits, puisque la rénovation de cet ensemble doit être accélérée, pour débuter au printemps. Selon M. Michel Clément, directeur de l'architecture et du patrimoine au ministère de la culture, cette opération s'inscrit dans un vaste plan de rénovation du Palais Royal, qui coûterait 14 millions d'euros dont 3,2 millions dévolus à la cour d'honneur.

Ce grand programme est rassurant, mais on pourrait s'interroger sur l'apport d'un partenariat public-privé, si efficace dans les pays anglo-saxons. L'État doit assurer le devenir de toutes les oeuvres acquises par commande publique. Comment envisage-t--il d'assumer cette responsabilité sur l'ensemble du territoire ?

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.  - Installée en 1986, l'oeuvre de Daniel Buren « les deux plateaux », communément appelée « les colonnes de Buren », symbolise l'intégration de l'art contemporain dans les plus beaux lieux de notre patrimoine. Depuis 1994, elle est classée au titre des monuments historiques.

Malgré la rénovation complète effectuée en 1994, l'intense fréquentation publique du site a sérieusement altéré cette oeuvre, si bien que la restauration lourde de toute la cour d'honneur est indispensable. Cette opération -à savoir, la restauration de façade sur la rue de Rivoli, la restauration de la cour d'honneur, des galeries qui l'entourent, outre les péristyles de Joinville et de Beaujolais- associe chacune des institutions publiques occupant ces bâtiments prestigieux : la Comédie Française, le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel. Le ministère de la culture y consacrera 14 millions d'euros jusqu'en 2011. Par ailleurs, la Comédie Française aménage des salles de répétition sous la cour d'honneur.

J'ai accéléré le calendrier initial afin que la restauration des deux plateaux soit engagée dès 2008 et non en 2009. J'ai demandé à mes services de veiller à la meilleure articulation possible de ce chantier d'une dizaine de mois avec l'aménagement des salles de répétition. Lorsque j'ai rencontré Daniel Buren, le 18 janvier, je lui ai confirmé que l'intégrité des deux plateaux serait préservée. Il sera évidemment associé à sa réalisation ainsi qu'à l'élaboration du protocole d'entretien de son oeuvre, à laquelle tout le monde est attaché malgré quelques polémiques.

L'idée du partenariat public-privé est intéressante ; nous y pensons pour la future philharmonie. Dans le cas d'espèce, nous espérons que des partenaires privés participeront à cette restauration d'intérêt collectif.

Mme Catherine Dumas. - Merci. Je me félicite de constater la prise de conscience par l'État de son rôle dans l'entretien du patrimoine culturel.

Aménagement de l'île Seguin

M. Jean-Pierre Fourcade. - L'aménagement des cinquante-deux hectares délaissés par Renault sur le territoire de Boulogne-Billancourt est réalisé par Val-de-Seine-aménagement, une société d'économie mixte dont les actionnaires sont les villes de Boulogne-Billancourt et de Sèvres, le département des Hauts-de-Seine, la Caisse des dépôts et consignations, la caisse d'épargne de Paris et le groupe Dexia.

Dans le cadre d'une zone d'aménagement concerté qui englobe les anciens terrains Renault et le quartier sensible du pont de Sèvres, la société d'aménagement réalise notamment des équipements publics et des logements sociaux. Une convention publique d'aménagement a été signée avec Boulogne-Billancourt en 2004, après une large concertation au sein de la ville, du département et de la région.

À ce jour, sont engagés 45 % du programme de construction, qui totalise huit cent quarante-deux mille mètres carrés de surface hors oeuvre. Dans cet ensemble, trois programmes sont juxtaposés. La réhabilitation du quartier du pont de Sèvres fait l'objet d'un contrat signé avec l'Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) mais bloqué depuis six mois par le président du conseil général des Hauts-de-Seine. Le deuxième programme concerne le trapèze de Billancourt : l'opération se déroule sans problème avec le concours de vingt-sept cabinets d'architectes. Le programme retenu pour l'île Seguin est le moins avancé.

Cette île devrait recevoir des équipements scientifiques et culturels et des éléments d'accueil tournés vers l'international. À ce jour, trois programmes ont été engagés, avec promesses de vente et versements d'acomptes : un grand hôtel, une résidence pour chercheurs et artistes, l'université américaine de Paris. J'ajoute que l'île Seguin a été acquise auprès de Renault pour 54 millions d'euros et que la vente des droits fonciers pour les trois programmes représente une recette de 30 millions.

C'est donc avec stupeur que j'ai pris connaissance de l'interview publiée fin janvier dans un grand quotidien, dans laquelle M. Benhamou, conseiller culturel du Président de la République, affirmait que le chef de l'État souhaite utiliser toute l'île pour un grand jardin de sculptures contemporaines, annulant ainsi les programmes déjà lancés. M. Benhamou ajoutait que le coût de cette réalisation, soit 200 millions d'euros, serait financée « par le conseil général, les élus locaux et les collectivités territoriales ». Ce projet se substituerait à celui proposé par M. de Villepin, alors Premier ministre, et par M. Donnedieu de Vabres, son ministre de la culture, pour installer un centre européen de création contemporaine. L'État devait alors participer à concurrence de 50 millions d'euros.

Je vous poserai donc trois questions.

Est-il concevable qu'au mépris de l'autonomie des collectivités territoriales, un conseiller du Président de la République annonce un projet dont il n'a ni la maîtrise ni le financement ?

Quelle est l'intention du Gouvernement quant à l'utilisation de la pointe aval de l'île Seguin, pour laquelle ni les maires, ni le président-directeur général de la société d'aménagement n'ont été ni sollicités ni même informés ?

Comme le député de Boulogne-Billancourt a écrit dans sa lettre de candidature aux élections municipales souhaiter « relancer la proposition de Nicolas Sarkozy, d'une île Seguin dédiée à la culture et à l'environnement avec un musée-jardin mondial », je souhaite savoir si le Gouvernement a progressé dans sa réflexion sur ce sujet et s'il envisage de formuler des propositions aux collectivités territoriales qui en assument la programmation.

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.  - En effet, il est envisagé de créer sur l'île Seguin un centre européen de création contemporaine, à l'instar d'initiatives équivalentes dans d'autres pays européens.

Ce projet, conçu en partenariat avec le conseil général des Hauts-de-Seine et la ville de Boulogne-Billancourt, s'inscrit dans l'aménagement général de l'île Seguin par les collectivités territoriales concernées. Chargé d'une mission à cet effet, M. Daniel Janicot a remis aux partenaires un projet de préfiguration pour la pointe de l'île, concernant l'emprise initialement envisagée pour le musée souhaité par M. François Pinault.

La réflexion se poursuit ; aucune décision n'a été prise. Bien sûr, l'existant sera préservé. L'aménagement sera élaboré en concertation avec le département des Hauts-de-Seine et la ville de Boulogne-Billancourt.

M. Jean-Pierre Fourcade. - Je vous remercie pour ces indications.

On ne peut jeter à la rivière les projets déjà lancés pour cette île, car ce serait un gaspillage dont nous n'avons nul besoin.

Je suis bien sûr disponible pour étudier un grand projet d'art contemporain.

Enfin, j'ai noté avec intérêt que les élus locaux seraient consultés sur l'évolution des réflexions du Gouvernement. J'en prends acte avec beaucoup de satisfaction.

Réseau consulaire

M. Richard Yung. - Je félicite les agents du ministère des affaires étrangères et les militaires pour avoir aussi bien accompli, ce week-end, leur mission de protéger et d'évacuer de N'Djamena, au Tchad, plus de mille de nos compatriotes et d'étrangers devant l'avancée des combats dans cette ville.

Le réseau consulaire doit évoluer, au gré de nos intérêts fondamentaux, en particulier en Asie. Depuis cinq ans, trente et un consulats ont été fermés ou regroupés, cinq seulement ont ouvert. La communauté française s'inquiète, par exemple à Haïfa, où les autorités parlent de regrouper les services à Jérusalem et Tel-Aviv. Pour les Français de l'étranger, le consulat est un peu la maison de la France, l'équivalent de la mairie et de la préfecture, le lieu où l'on se sent entendu et en sécurité.

Or, nous déplorons que l'évolution en cours ne soit nullement concertée avec les Français de l'étranger ni avec leurs élus : l'administration nous met devant le fait accompli, forte de son droit régalien. Monsieur le ministre, quelles sont vos intentions pour la carte consulaire dans les prochaines années ?

En cinq ans, dix-sept consulats à gestion simplifiée ont été ouverts : ils accomplissent des tâches administratives spécialisées mais leurs services sont fermés au public, en particulier à nos compatriotes résidant à l'étranger. Quel bilan en faites-vous ? Le nôtre n'est guère positif. Ils sont censés assurer une présence diplomatique française, mais on se demande en quoi l'analyse politique à Port-Gentil ou à Porto, est différente de celle réalisée dans la capitale. Inversement, comme ils ne sont plus ouverts au public, nos compatriotes doivent se rendre au consulat général pour leurs démarches administratives, par exemple pour le passeport biométrique. Enfin, la réforme devait économiser les moyens : on se demande comment, puisque l'équipe consulaire est maintenue. Monsieur le ministre quel avenir pour ces consulats à gestion simplifiée ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie.  - Nous nous posons aussi ces questions, de façon lucide, dans le cadre de la revue générale des politiques publiques (RGPP). La réforme des consulats est en marche, elle passe par certains regroupements de services consulaires par pôles de compétences : les visas et l'état civil par exemple. Elle s'accompagne de la mise en place du registre mondial des Français établis hors de France (Racine), où chaque Français dispose d'un numéro consulaire unique.

Les consulats à gestion simplifiée maintiennent une présence française de haut niveau, tout en rationnalisant certaines tâches administratives, la spécialisation est utile et rend de grands services, en particulier lorsque le lien avec l'administration centrale est aisé. La rationalisation passe également par un rapprochement avec les services consulaires de nos partenaires européens, en vue notamment d'une mutualisation des moyens.

Le redéploiement des services, dans son ensemble, n'a pas entraîné leur diminution : en vingt ans, on est passé de deux cent trente-huit à deux cent trente-cinq consulats. Les consulats à gestion simplifiée soulagent certains de nos services consulaires, par exemple pour la gestion des visas en Afrique subsaharienne. La RGPP engrangera de nouveaux progrès, dans le sens d'un meilleur service consulaire, au plus proche de nos intérêts fondamentaux.

M. Richard Yung. - Vous ne me répondez pas sur les économies réalisées, qui étaient l'argument pour la fermeture des services au public. Pour les Français de l'étranger, ce qui compte d'abord c'est la distance géographique. Quand on habite Stuttgart et qu'on doit faire un passeport biométrique, il faut deux allers-retours à Munich, distante de deux cents kilomètres.

J'ajoute que tout irait beaucoup mieux s'il existait une réelle concertation, si le ministère des affaires étrangères informait voire consultait les Français de l'étranger.

M. le président.  - J'ai envie de citer, pour apporter de l'eau au moulin de M. Yung, le consulat français de Haïfa, que le ministère envisage de fermer alors même que la France a engagé un effort important dans cette ville en y construisant, avec la participation de la ville de Marseille, celle de notre département, celle de notre région et même celle du Sénat, un centre franco-israélien qui porte le nom de Gaston Defferre.

Maison de la francophonie

Mme Catherine Tasca.  - L'idée de regrouper sur un site unique, dans une « maison de la francophonie », toutes les institutions de la francophonie ayant leur siège à Paris, pour permettre à l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) de remplir ses missions avec cohérence, avait été lancée par le président Chirac, au sommet de Beyrouth, en octobre 2002. Les services de l'État, sollicités, avaient alors retenu un bâtiment des Domaines, avenue de Ségur. Une convention avait même été signée, en 2006, avec l'OIF.

Il est donc regrettable que l'été dernier, sur l'avis de certains parlementaires, amplifié par une campagne de presse, le Président de la République ait demandé au Gouvernement de retirer le projet de loi visant à ratifier cette convention, qui devait venir devant le Parlement le 30 juillet. Cette décision tardive de suspendre un projet dont l'utilité ne peut être mise en doute est d'autant plus dommageable qu'à fin 2007, aucune décision nouvelle n'avait été prise, mettant ainsi en cause la parole et l'engagement de la France à un moment où, grâce à l'action du président Abou Diouf, l'ensemble institutionnel francophone prenait un nouveau départ.

Jusqu'à quand ce projet sera-t-il différé ? La francophonie reste-t-elle un axe majeur de notre politique étrangère ? Comment justifier la remise en cause, depuis un an et demi, d'un engagement international de la France ?

Dans le département des Yvelines, les populations venues de tous les horizons de la francophonie sont attentives à tous les signes que nous adressons. Inquiètes de notre politique d'immigration, elles attendent des marques de solidarité. Or, ce retard est vécu comme un recul et jette le doute sur la bonne volonté du Gouvernement. La confiance de la communauté francophone, forte de cinquante-cinq États membres, treize observateurs et 10 % de la population mondiale, est entamée. Il est donc urgent d'aboutir à une solution. S'il en existe une nouvelle, quelles seront les conditions de sa mise en oeuvre ? La convention signée en 2006 prévoyait une mise à disposition gratuite de l'immeuble sur trente ans. Pouvez-vous garantir qu'elle sera au moins reprise à l'identique ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie  - Votre question tombe à point nommé. La polémique de l'été dernier s'est déclenchée alors que j'entrais à peine en fonctions. Je me souviens avoir été alors interpellé par plusieurs parlementaires, parmi lesquels M. Gouteyron.

L'économie générale du projet de l'avenue de Ségur ayant été remise en cause à la fois par la création du nouveau ministère de l'écologie et par les surcoûts liés au désamiantage du site, le Gouvernement avait décidé de retirer le projet de l'ordre du jour du Parlement. Au même moment, le 23 juillet, le Président de la République recevait le secrétaire général de la francophonie, M. Abou Diouf, et lui confirmait l'engagement de la France sur le regroupement à Paris de tous les opérateurs de la francophonie. Il confiait au Premier ministre le soin de trouver un autre lieu avant fin 2007, lequel diligentait une mission conjointe des inspections des finances et des affaires étrangères qui lui remettait, en novembre dernier, un rapport, sur le fondement duquel le comité interministériel du 21 décembre retenait un site sur lequel devait être recueilli l'avis de l'OIF. L'immeuble, situé au 19-21 de l'avenue Bosquet, présente l'avantage, pour une surface utilisable de 6 000 m2, d'être libre immédiatement et de ne nécessiter que de modestes travaux de rénovation et d'aménagement. Le Président de la République en a présenté le projet, le 8 janvier, au secrétaire général de la francophonie, que j'ai eu l'honneur de conduire personnellement sur les lieux la semaine dernière. La réponse écrite qu'il a fait parvenir au Président de la République témoigne de son entière satisfaction pour le choix de cet « emplacement prestigieux », preuve de la « détermination et de la volonté » de notre pays de « soutenir une francophonie ambitieuse et efficace ».

Le coût, monsieur Gouteyron, en est très inférieur à celui du projet de l'avenue de Ségur, et les délais sensiblement plus courts, puisque la livraison est possible avant fin 2009.

M. Adrien Gouteyron.  - Le Parlement a joué son rôle.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État.  - La nouvelle convention sera signée à brève échéance et un projet de loi de ratification présenté au Parlement à la session de printemps.

Mme Catherine Tasca.  - Je salue ce happy end à un épisode troublant. C'est un privilège pour notre pays que d'accueillir l'OIT dans sa capitale.

J'ai noté vos précisions sur le lieu et le calendrier, mais vous n'en avez pas donné sur le coût, sur lequel j'espère que le Parlement sera informé le moment venu. J'aimerais également savoir si le nouveau site permettra, comme cela était le cas avenue de Ségur, de prévoir un espace de conférence et d'exposition qui donnera à la maison de la francophonie la dimension culturelle qui lui est indispensable.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État.  - La réponse est oui. Une salle est prévue à cet effet. Quant à la question du financement, le Parlement en sera informé en toute transparence.

Respect de l'encellulement individuel

Mme Anne-Marie Payet.  - J'aimerais attirer l'attention de Mme la garde des sceaux sur le phénomène de surpopulation carcérale de plus en plus inquiétant qui frappe les cent quatre vingt douze prisons françaises.

Le constat est sans appel dans les maisons d'arrêt où, contrairement aux établissements pour peine, la règle de l'encellulement individuel est généralement détournée, durcissant ainsi les conditions de vie des détenus et du personnel qui y travaille.

A la Réunion la situation est particulièrement alarmante. Le taux d'occupation est de 105 % pour la prison du Port, que j'ai visitée récemment avec beaucoup d'émotion, y ayant rencontré, encadrés par un personnel dont je salue la compétence, de tout jeunes adolescents à peine sortis de l'enfance et condamnés pour la plupart d'entre eux pour crimes graves. Il est de 174 % pour la maison d'arrêt de Saint-Pierre et de 212 % pour celle de Saint-Denis.

Il est vrai que la loi d'orientation et de programmation pour la justice de septembre 2002 prévoit la création de treize mille deux cents places nouvelles, et que l'engagement du Président de la République durant la campagne présidentielle a été clair : un seul détenu pour une place.

Les propositions du comité d'orientation installé en juillet 2007 pour préparer la loi pénitentiaire, tendent à mieux préserver les liens familiaux, à améliorer le respect des droits des détenus, et surtout à faire de la création de postes de travaux d'intérêt général, alternative à la prison, une obligation pour les collectivités. Je souscris sans réserve à ces orientations. Mais les réformes à venir seront-elles suffisantes pour garantir, dans un délai raisonnable, le respect de la règle de l'encellulement individuel prévue à l'article 716 du code de procédure pénale ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.  - La surpopulation carcérale ne concerne pas l'ensemble des établissements pénitentiaires mais certaines maisons d'arrêt : les établissements pour peine y échappent. La première façon d'y remédier est de construire des places supplémentaires grâce à la loi de septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice qui en prévoit treize mille deux cents nouvelles. En 2012, la capacité d'accueil sera de soixante-trois mille places contre cinquante mille six cent quatre-vingt treize au 1er janvier 2008.

Il faut examiner cette question avec pragmatisme. Selon l'évolution constatée aux Pays-Bas et en Allemagne, la prise en compte de l'intérêt des détenus peut conduire à écarter l'encellulement individuel, notamment proscrit dans le cadre de la prévention du suicide, et du suivi des primo-incarcérés. Des impératifs de gestion, la prise en charge de complices dans une même affaire pénale ou la prévention de violences en détention peuvent aussi conduire à l'écarter. En outre certains détenus ne souhaitent pas être seuls en cellule et une consultation des détenus sur leur souhait en la matière est à l'étude. La ministre de la justice présentera au Parlement au printemps le projet de loi pénitentiaire qui renforcera les droits des détenus et développera les aménagements de peine.

La ministre souhaite enfin souligner la qualité du personnel de l'administration pénitentiaire, son professionnalisme et son humanité.

Mme Anne-Marie Payet. - J'avais bien fait la distinction entre les établissements pour peine et les maisons d'arrêt. Je vous remercie de votre réponse. Les alternatives à l'incarcération et les aménagements de peine sont en effet un moyen d'humaniser les conditions de détention, et de donner une seconde chance aux détenus.

Carte judiciaire de la Savoie

M. Thierry Repentin. - La réforme de la carte judiciaire en Savoie prévoit de supprimer les tribunaux d'instance de Saint-Jean-de-Maurienne et de Moûtiers. Je tiens à souligner la spécificité géographique du ressort du tribunal de grande instance d'Albertville qui s'étale sur deux vallées, la Maurienne et la Tarentaise, sur un secteur de montagne regroupant deux tiers des domaines skiables de notre pays, à laquelle s'ajoute notamment le contentieux lié au droit des étrangers au point de passage de Modane-Fourneaux, avec l'Italie. La suppression de ces tribunaux d'instance accroîtra considérablement les distances et les temps de trajet des justiciables, souvent parmi les plus défavorisés de nos concitoyens. Les élus de ces territoires, toutes tendances politiques confondues, se sont élevés contre ces suppressions lors d'une manifestation le 12 janvier dernier dans le chef lieu d'arrondissement de Maurienne. La possible création d'une maison de la justice et du droit à Saint-Jean-de-Maurienne ne remplacera pas le tribunal dans ses missions. Dire le contraire serait faire injure aux magistrats et à la population.

En outre, les élus, le Barreau et les fonctionnaires du TGI ne comprennent pas l'absence de création d'un pôle d'instruction à Albertville où le tribunal dispose de cinq parquetiers et de deux juges d'instruction, création justifiée par le grand nombre et la complexité des dossiers ouverts, par la présence de locaux adaptés à ce nouveau service, et par l'activité économique -notamment industrielle et touristique- toujours croissante du ressort. Le tribunal pourrait également être renforcé par l'installation d'un juge pour enfants. En matière pénale, le nombre annuel de procédures s'élève à environ vingt mille.

De même, compte tenu de la géographie montagnarde du ressort d'Albertville, la décision de transférer le contentieux commercial et le registre du commerce et des sociétés d'Albertville vers Chambéry se traduira par un éloignement du service et par des dépenses supplémentaires de déplacement. Des propositions ont été faites afin de maintenir le tribunal du conseil des prud'hommes d'Aix-les-Bains : élargissement du périmètre de la juridiction, fusion, au sein de cette cité, des conseils de prud'hommes d'Aix et de Chambéry.

Je vous demande solennellement de reconsidérer la réforme annoncée en prenant en compte la spécificité du ressort du tribunal d'Albertville, ainsi que celle des territoires de montagne, en l'occurrence la Maurienne et la Tarentaise, avant toute décision définitive qui se traduirait par un délitement du service public de la justice et un accès plus difficile à ce service pour les populations des montagnes et des territoires ruraux en question.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.  - Je vous confirme que les deux tribunaux d'instance de Moutiers et Saint-Jean-de-Maurienne seront, à compter du 1er janvier 2010, rattachés au tribunal d'instance d'Albertville. En effet, le tribunal d'instance de Saint-Jean-de-Maurienne, juridiction de très faible activité - deux cent cinquante-cinq affaires civiles nouvelles par an en moyenne de 2004 à 2006 pour un niveau moyen d'activité de six cent quinze affaires par an et par magistrat- compte parmi les cent soixante-neuf tribunaux dont l'activité ne justifie pas l'emploi d'un juge à plein temps. Le tribunal d'instance de Moutiers a également une faible activité avec quatre cent soixante-deux affaires civiles nouvelles par an, en moyenne pendant la même période. Dans ces conditions, la continuité du service, l'accueil du justiciable et la sécurité du tribunal ne peuvent être assurés de manière satisfaisante. En outre, la ministre de la justice a souhaité que les tribunaux d'instance représentent désormais une activité suffisante pour deux magistrats, afin de rompre l'isolement du juge. Il n'est pas concevable d'avoir des juges d'instance, souvent nommés à la sortie de l'école nationale de la magistrature, seuls dans leur tribunal, sans possibilité d'échanges avec des magistrats expérimentés. Le ministère a bien évidemment tenu compte des impératifs de l'aménagement du territoire. Le rattachement du ressort des tribunaux de Saint-Jean-de-Maurienne et de Moutiers au tribunal d'instance d'Albertville a tenu compte de son accessibilité pour le justiciable : Moutiers est à moins de trente kilomètres d'Albertville soit un temps de trajet par voie expresse inférieur à trente minutes, et le tribunal d'instance de Saint-Jean-de-Maurienne, à soixante et un kilomètres d'Albertville, est distant de moins d'une heure de trajet par la voie expresse. L'accès à la justice dans le ressort du tribunal de grande instance d'Albertville n'est donc pas compromis pour le justiciable.

Par ailleurs, l'avis relatif aux conseils de prud'hommes, publié au Journal officiel du 22 novembre dernier, ne fait pas état de modifications pour le département de la Savoie. Les conseils d'Albertville, d'Aix-les-Bains et de Chambéry ne sont donc pas susceptibles d'être regroupés.

La compétence commerciale de vingt-trois tribunaux de grande instance sera transférée, à compter du 1er janvier 2009, aux tribunaux de commerce, et le tribunal de commerce de Chambéry deviendra compétent pour le ressort du tribunal de grande instance d'Albertville.

La loi du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale, prévoit qu'à compter du 1er janvier 2010, toutes les affaires d'instruction seront confiées à un collège composé de trois juges d'instruction. La localisation des pôles de l'instruction a donc pris en compte la mise en oeuvre de la collégialité à partir de 2010. Dans le département de la Savoie, le tribunal de grande instance d'Albertville connaît, en matière d'instruction, une activité inférieure à celle de Chambéry : le nombre d'ouvertures d'informations a été en moyenne, entre 2004 et 2006, de soixante dossiers nouveaux par an et par juge d'instruction, ce qui représente un temps plein de 1,67 juge d'instruction. Il a donc été décidé de localiser le pôle de l'instruction au tribunal de grande instance de Chambéry dont l'activité en matière d'instruction représente un temps plein de 1,72 juge d'instruction. Néanmoins, jusqu'au 1er janvier 2010, les affaires ne relevant pas de la compétence du pôle de l'instruction demeureront instruites par le juge d'instruction du tribunal de grande instance d'Albertville. Et le tribunal correctionnel d'Albertville reste compétent pour les affaires qui seront instruites par le pôle de l'instruction de Chambéry.

Enfin, la nécessité de créer un poste de juge des enfants à Albertville n'a pas été présentée au ministère par les responsables de juridictions.

Une commission présidée par le secrétaire général du ministère et l'inspecteur général des services judiciaires est chargée de faire au garde des Sceaux des propositions quant à l'évolution des maisons de la justice et du droit. C'est dans ce cadre que vos préoccupations en matière d'organisation judiciaire pour le ressort d'Albertville semblent devoir désormais s'inscrire.

M. Thierry Repentin. - Je tiens à dire ma complète déception quant à l'attitude de la garde des Sceaux qui n'est pas venue annoncer elle-même ses décisions dans nos départements puisqu'elle a cru bon de s'arrêter à Lyon ! Elle est plus disponible pour tel ou tel rendez-vous mondain, un défilé de John Galliano par exemple, que pour rencontrer les élus ou pour répondre à un parlementaire...

Sur le fond, elle botte en touche. Mais le ballon finit toujours par revenir sur le terrain, celui de la justice. A partir de 2010, dans notre pays, pour aller au tribunal il faudra soit deux stations de métro, soit deux heures de trajet. C'est inacceptable !

Suicide des jeunes

M. Adrien Gouteyron. - C'est aujourd'hui la journée nationale de prévention du suicide. Mme Bachelot participe à un colloque à ce sujet mais vous avez toute compétence pour me répondre, monsieur le secrétaire d'État.

En France, le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les 15-25 ans : tous les ans, environ quarante mille adolescents attentent à leurs jours et entre huit cents et neuf cents en meurent. L'augmentation des tentatives de suicide authentifiées comme telles est inquiétante. Selon Marie Choquet, psychologue « sur une période de six à sept ans, chaque adolescent connaîtra un copain de son d'âge qui aura fait une tentative de suicide et, parfois, en sera mort. »

Près de 15 % des 11-18 ans sont dans une situation de grande souffrance psychique qui donne lieu à des phénomènes comme l'absentéisme scolaire ou l'automutilation. Hélas, l'adolescent demeure pourtant le grand oublié des politiques publiques. Le jeune entre deux âges est encore trop rarement le destinataire des programmes de prévention. De plus, le dispositif psychiatrique et médico-social étant complètement saturé, il faut attendre de trois mois à un an avant d'obtenir un rendez-vous dans un centre.

Nous ne pouvons laisser les parents seuls avec leurs interrogations ou leur angoisse et, dans le cas où l'irréparable a été accompli, avec un terrible sentiment de culpabilité. Face à ce fléau, quelles réponses donner aux parents démunis lorsqu'un de leurs enfants menace de se tuer ? Comment éviter ces tentatives ou ces suicides et éviter les récidives ?

Un tabou entoure encore le suicide. En 2000, et pour cinq ans, la France s'est dotée d'un programme national de prévention du suicide mobilisant les centres hospitaliers et les associations.

Les actions visent un dépistage des facteurs de risque et une meilleure connaissance des facteurs précurseurs et déclenchants de la crise suicidaire. Pouvez-vous nous en dresser le bilan ?

Il faut renforcer la prise en charge des jeunes suicidaires : un jeune qui a tenté de se suicider répète souvent son geste. Je connais le désarroi, la douleur de parents confrontés à ce drame. J'espère que votre réponse sera à la mesure de la gravité du sujet.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.  - Le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les 15-24 ans après les accidents de la route. Selon l'Inserm, 567 jeunes sont morts par suicide en 2005, contre 1 030 en 1993. Le suicide des jeunes est inacceptable. Le grand nombre de tentatives de suicide, notamment chez les jeunes filles, est très préoccupant.

Le suicide est une cause de décès évitable. La politique de prévention mise en place depuis 1998 vise notamment à renforcer l'information et la formation des professionnels en contact avec les jeunes, à diminuer l'accès aux moyens létaux, à améliorer la prise en charge des suicidants dans les établissements de santé, et à approfondir la connaissance épidémiologique du phénomène.

Des lieux d'accueil et d'écoute destinés aux jeunes ont été développés, des intervenants ont été formés, notamment en milieu scolaire. Le ministère de la santé a consacré 1,5 million au financement de cette stratégie entre 2000 et 2005, qui s'ajoutent aux 20 millions dépensés en région sur la période 2000-2004.

Le plan psychiatrie et santé mentale 2005-2008 prévoit la création de lits d'hospitalisation à temps complet en psychiatrie infanto-juvénile. Cette année, 21 millions seront affectés à l'amélioration des structures hospitalières et 45 millions à la création de postes, notamment en pédopsychiatrie.

Un nouveau plan national d'action 2008-2012 sera présenté en 2008. Mme Bachelot-Narquin installera prochainement un comité de pilotage pluridisciplinaire qui proposera des mesures sur le repérage, la prise en charge et la prévention du suicide, en particulier chez les jeunes.

Les maisons des adolescents, espace dédié à l'accueil et l'écoute des jeunes, jouent également un rôle important et apportent des réponses de santé adaptées. L'objectif d'au moins une maison par département doit être atteint.

Enfin, Mme Bachelot-Narquin a pris connaissance avec intérêt du rapport de la Défenseure des enfants dont les recommandations sont examinées avec attention.

M. Adrien Gouteyron.  - Je me réjouis de cette volonté du Gouvernement et des moyens qu'il entend mettre en oeuvre pour lutter contre ce fléau. Je souhaite que les crédits promis et les mesures annoncées se concrétisent. Je rends hommage aux élus locaux, conseils généraux et villes, qui mettent souvent en place des lieux d'écoute, ainsi qu'aux associations. Il faut tout coordonner pour que l'action publique soit efficace. Il est normal que le Parlement débatte d'un sujet aussi important.

Pénurie de médecins en milieu rural

M. Dominique Mortemousque.  - Selon le rapport sur la sécurité sociale 2007 de la Cour des comptes, « la France souffre moins d'un manque de médecins que de leur répartition inadaptée sur le territoire, entre spécialités et entre secteurs ». En milieu rural, beaucoup de médecins ne trouvent pas de successeurs. Cette pénurie crée une véritable psychose dans nos campagnes et nombre de personnes âgées vivent dans l'angoisse de ne pouvoir être soignées. Quelles mesures comptez-vous prendre pour palier ce déséquilibre de l'offre de soins et améliorer les conditions d'exercice des professionnels de santé en milieu rural ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.  - L'accès aux soins de premier recours, et en particulier au médecin généraliste, est un droit pour tous. Il est inadmissible que certains de nos concitoyens en soient exclus. Malgré un nombre important de professionnels de santé, la répartition sur le territoire est trop variable. Les zones rurales mais également périurbaines sont les plus désavantagées.

Les mutations socio-culturelles doivent trouver un écho dans une nouvelle organisation professionnelle. Une première synthèse des travaux des États généraux de l'organisation de la santé, voulus par Mme Bachelot-Narquin, sera rendue le 8 février. Je sais que la ministre tient beaucoup à l'expression de vos avis au sein de ce débat.

Le numerus clausus des études médicales a été augmenté de deux cents dès cette année pour porter à sept mille trois cents le nombre d'étudiants reçus en deuxième année, avec un rééquilibrage en faveur des régions sous-dotées comme le nord-ouest, le nord-est, l'ouest et l'outre-mer. Dans le sud-est et en Ile-de-France, le numerus clausus n'augmente pas. Par ailleurs, la loi relative au statut d'enseignant dans la filière universitaire de médecine générale, votée à l'initiative du sénateur Giraud, contribue à la valorisation du métier de médecin généraliste.

Ces éléments seront complétés par les conclusions des États généraux de l'organisation de la santé et de la mission conduite par Gérard Larcher, attendue fin mars. En effet, l'accès aux soins exige une meilleure complémentarité entre la ville et l'hôpital.

M. Dominique Mortemousque.  - Dans le cadre de la loi aménagement et développement durable du territoire, nous avons prévu des incitations fiscales pour les médecins. Les résultats ne sont pas au rendez-vous. J'espère que l'on reviendra sur cet état de fait préoccupant.

Défibrillateurs automatisés dans les lieux publics et responsabilité des maires

Mme Patricia Schillinger.  - Le décret du 4 mai 2007 autorise désormais toute personne, même non médecin, à utiliser des défibrillateurs entièrement automatisés. En France, quarante à soixante mille personnes décèdent chaque année à la suite d'un arrêt cardio-respiratoire, soit près de deux cents morts par jour. L'installation de défibrillateurs permettra de sauver de nombreuses vies. En effet, le taux de survie est estimé à seulement 2 à 4 % en France, contre 20 à 50 % aux États-Unis ou dans les pays anglo-saxons où les défibrillateurs sont à la disposition du grand public.

L'appareil, extrêmement sûr, parle pour informer les utilisateurs puis délivre un choc électrique. Pour être efficace, la défibrillation doit être réalisée dans les cinq premières minutes suivant l'accident, alors que le délai d'intervention des urgences est en moyenne de sept à neuf minutes. Or à chaque minute de perdue, les chances de survie diminuent de 10 %...

Le Samu et les pompiers sont les plus qualifiés pour désigner aux collectivités locales les endroits où installer les appareils. Il est également impératif de mettre en place une formation aux gestes de premiers secours dans les établissements scolaires et les centres de formation. Envisagez-vous d'intégrer cette formation dans les programmes scolaires ?

Quid enfin de la responsabilité du maire ? La famille du défunt pourrait-elle présenter un recours si elle estime n'avoir pas été suffisamment informée des lieux d'installation du matériel et des gestes à effectuer ? Le maire peut-il être tenu à une obligation de moyens ? Vu le coût de ces appareils, il est illusoire d'imaginer qu'il y aura rapidement des défibrillateurs dans toutes les communes. Un utilisateur étranger qui ne comprendrait pas les ordres dictés par l'appareil pourrait-il tenir l'élu de la commune pour responsable ? Pour éviter toute procédure abusive, pouvez-vous préciser le cadre juridique qui s'applique ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.  - L'accident cardio-circulatoire entraîne chaque année en France le décès d'environ cinquante mille personnes : 10 à 30 % de ces accidents surviennent sur la voie publique et 1 à 2 % se produisent au travail ou dans des enceintes sportives. Trois à quatre cents jeunes sportifs décèdent dans ces circonstances chaque année.

Les défibrillateurs sont utilisés en cas d'arrêts cardiovasculaires dus à une fibrillation ventriculaire, ce qui représentent 40 % des arrêts cardiaques. En mai dernier, un décret a autorisé toute personne, même non médecin, à utiliser les défibrillateurs automatiques ou semi-automatiques.

Leur utilisation ne doit retarder ni le massage cardiaque, ni l'appel au centre 15 et l'intervention des équipes médicalisées de secours.

Cette mesure a été décidée par le ministère de la santé en concertation avec les professionnels de l'urgence et les collectivités locales. Il est conseillé de placer ces équipements dans les lieux publics de grand passage, notamment les gares, les galeries marchandes, les rues commerciales, les stades. Les communes doivent, avec les équipes de secours habituées à traiter ces accidents, choisir les lieux les plus adaptés.

Il est également prévu de noter les modalités d'utilisation des défibrillateurs à l'aide d'une fiche de saisine commune à toutes les équipes de secours afin de disposer de données fiables sur leur emploi, l'intervention des secours ainsi que le devenir des patients. Cela permettra d'adapter les actions entreprises.

En outre, le ministère a décidé d'aider les clubs sportifs à acquérir ce matériel en le finançant à hauteur de 50 %. Mme Bachelot-Narquin a prévu d'acheter cinquante défibrillateurs pour les principales administrations, pour un coût total de plus de 2 millions d'euros. Les services du ministère étudient certains aspects juridiques de la mise en place de ces équipements. Leur acquisition, bien que très fortement recommandée, n'étant pas une obligation légale, un maire ne saurait être poursuivi en cas d'absence de ce matériel dans sa commune.

Une action de formation, insérée progressivement dans les programmes scolaires, a été organisée dans les écoles, collèges et lycées avec le ministère de l'éducation nationale, la sécurité civile et les centres d'enseignement aux soins d'urgence (Cesu).

L'ensemble de ces mesures devrait porter ses fruits à terme et ramener la France au niveau des pays anglo-saxons, en avance sur ce point.

Mme Patricia Schillinger.  - Vous avez répondu à certaines de mes questions mais il y a urgence à agir. J'interpelle le Président de la République pour que ce projet devienne européen et qu'un défibrillateur soit accessible dans chaque commune.

Or certains sites touristiques sont situés dans des petites communes, qui doivent pouvoir s'équiper. L'égalité doit s'appliquer à tous les niveaux : pour le financement, la formation, les écoles... Nous parlons de secourisme depuis des années. Donnons-nous en les moyens aujourd'hui.

Service minimum dans les écoles

M. Pierre Martin.  - On sait que 83 % des parents sont favorables au service minimum d'accueil dans les écoles, qui a pu être expérimenté le 24 janvier alors que 34 % des enseignants étaient en grève. Sans remettre en cause le droit de grève, il s'agit d'assurer le droit des parents de travailler en ne renvoyant pas les enfants chez eux. Un accueil est désormais obligatoire dans les lycées et les collèges, mais je ne trouve pas de disposition semblable pour les écoles primaires et élémentaires. Pouvez-vous, monsieur le ministre, me donner des précisions sur ce point ?

Il faut noter que la grève a des conséquences indirectes sur les transports scolaires. Une journée coûte 100 000 euros à un département comme la Somme. A quoi cela sert-il si les enfants restent chez eux ? N'étant souvent pas prévenus, les parents, ignorant si les enseignants seront présents, gardent par précaution leurs enfants chez eux. Les maires ne sont pas davantage informés. Comment, dans ces conditions, peuvent-ils organiser le service minimum d'accueil ?

Les situations varient beaucoup entre les communes, ce qui explique que seules 10 % d'entre elles ont mis en place ce service. Dans certains établissements, tous les enseignants sont grévistes, dans d'autres une partie seulement, et parfois aucun. Il y a également des disparités entre les zones rurales et urbaines. En ville, il est possible d'accueillir les enfants dans les lieux prévus pour les activités post et périscolaires et les garderies. Cela n'est pas le cas à la campagne, où les enseignants peuvent refuser de prêter leur classe.

Et comment, en cas de grève des fonctionnaires de la cantine, servir le déjeuner dans les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) et les regroupements pédagogiques concentrés (RPC) ? Pour ce qui est des groupements de communes, le transfert de compétences peut être total ou limité au fonctionnement de la cantine. Il peut donc y avoir conflit pour l'organisation du service minimum d'accueil si l'une des communes refuse que ses locaux soient utilisés.

Je terminerai par une question sur la responsabilité des maires. Vous savez qu'il suffit d'un but mal fixé pour qu'elle soit engagée en cas d'accident. Que se passera-t-il les jours de grève ?

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale.  - Monsieur Martin, vous êtes bien placé pour parler des écoles puisque vous en avez été un brillant directeur !

Le service minimum d'accueil représente une nouvelle liberté pour les familles et une évolution des modalités d'exercice du droit de grève qui ne pénalise pas les usagers. Le test mené le 24 janvier a surtout bénéficié aux familles modestes, monoparentales, à celles qui ne peuvent payer une garde d'enfant privée. C'est une mesure de justice sociale que deux mille soixante sept communes ont expérimentée -dont quarante-neuf dans la Somme-, soit neuf millions d'habitants et 30 % des villes de plus de cent mille habitants. L'obligation faite aux directeurs d'école d'accueillir les enfants en cas de grève date du 26 mars 1981. Il s'agit d'une disposition mort-née puisqu'elle a été supprimée en juin 1981, date à laquelle la nouvelle majorité socialiste l'a abrogée !

Comment le maire pourra-t-il être certain de la qualité des personnels qu'il emploie pour cet accueil, de la même manière qu'il s'assure de la qualité des animateurs de centre de loisirs ou des surveillants d'études ? Le financement apporté par l'Etat, qui s'élève à 15 euros de l'heure, permet de faire appel soit à du personnel municipal soit à des agents recrutés à cette fin.

La question de la responsabilité du maire est classique, bien qu'il ne soit pas toujours facile d'y répondre. Elle se pose dans les mêmes termes que pour les locaux fréquentés par les enfants avant ou après la classe lorsque la commune organise un accueil hors temps scolaire. Les règles sont les mêmes, seul varie le nombre d'élèves accueillis.

Enfin -question qui dénote le spécialiste !- vous souhaitez savoir qui, de la communauté de communes ou de la commune où se trouvent les locaux, est responsable en cas de divergence sur l'opportunité d'appliquer le service minimum d'accueil. S'ils le souhaitent, les maires sont autorisés à organiser cet accueil dans tout autre bâtiment de leur commune.

Sachez que 72 % des électeurs souhaitent que le maire organise un service minimum -je le signale en cette période électorale... Celui-ci va rentrer dans les moeurs et se généraliser. Nous prendrons, pour cela, les précautions que vous nous indiquez, monsieur le sénateur.

M. Pierre Martin.  - Je reste sceptique sur la question de la qualification des personnes assurant l'accueil. Les employés des centres de loisirs sans hébergement (CLSH) sont des étudiants, disponibles pendant les vacances, mais difficilement les jours de grève. Et on ne peut laisser les enfants jouer dehors toute la journée.

Il faut approfondir la réflexion pour trouver de bonnes solutions, afin d'améliorer les conditions d'accueil dans le cadre du service minimum et de préserver la liberté du travail des parents.