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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Sénateur en mission

Mises au point au sujet de votes

Droits et devoirs des demandeurs d'emploi (Urgence)

Discussion générale

Hommage à une délégation vietnamienne

Droits et devoirs des demandeurs d'emploi (Urgence - Suite)

Discussion générale (Suite)

Question préalable

Discussion des articles

Articles additionnels

Article premier

Modification à l'ordre du jour

Droits et devoirs des demandeurs d'emploi (Urgence - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article premier (Suite)

Article additionnel

Article 2

Articles additionnels

Explications de vote




SÉANCE

du mercredi 25 juin 2008

98e séance de la session ordinaire 2007-2008

présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président

La séance est ouverte à 15 h 5.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Sénateur en mission

M. le président.  - Par courrier en date du 24 juin 2008, le Premier ministre a fait part de sa décision de placer, en application de l'article L.O. 297 du code électoral, M. Charles Guené, sénateur de la Haute-Marne, en mission temporaire auprès de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Cette mission portera sur la place du vétérinaire libéral et sur son rôle dans le système français de surveillance et de gestion des risques tout au long de la filière animale.

Acte est donné de cette communication.

Mises au point au sujet de votes

M. Philippe Adnot.  - Le projet de loi constitutionnelle, adopté cette nuit, a fait l'objet d'un long examen où les positions ont évolué en fonction des amendements retenus ou des assurances obtenues du Gouvernement. J'ai été enregistré comme ayant voté l'ensemble de ce texte alors que je souhaitais m'abstenir car je regrette que l'opposition et la majorité ne disposent pas des mêmes droits au sein de la Haute assemblée, comme il était possible de le faire à l'occasion de cette révision.

M. le président.  - Je vous en donne acte.

M. Joël Bourdin.  - M. Dominati, qui a été déclaré votant pour, souhaitait s'abstenir sur l'ensemble du texte.

M. le président.  - Je vous en donne acte.

Droits et devoirs des demandeurs d'emploi (Urgence)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif aux droits et aux devoirs des demandeurs d'emploi.

Discussion générale

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.  - (Applaudissements à droite et au centre) Ce texte participe de l'engagement présidentiel pour le plein emploi, objectif central de l'action gouvernementale, premier combat pour le pouvoir d'achat, tant il est vrai qu'un emploi retrouvé, c'est un revenu supplémentaire dans le foyer, pour la famille. Nous voulons rétablir la relation dynamique au travail, nos résultats sont déjà bons : le taux de chômage s'établit à 7,2 %, au plus bas depuis vingt-cinq ans, le taux d'emploi atteint 65 % et l'année 2007 a été historique pour la création nette d'emplois. Ces bonnes nouvelles, cependant, ne suffisent pas et nous devons redoubler d'efforts pour atteindre le plein emploi en 2012. Plusieurs dispositions importantes ont été prises avec la loi relative au travail, à l'emploi et au pouvoir d'achat (Tepa), d'autres le seront prochainement avec la loi de modernisation de l'économie (LME).

Un deuxième levier réside dans le fonctionnement même du service public de l'emploi : il est bon que des emplois soient créés, mais il faut aussi les pourvoir et accompagner les demandeurs d'emplois dans leur recherche d'emploi. Car, si notre pays compte 1,9 million de chômeurs, nous enregistrons également des centaines de milliers d'emplois -approximativement 500 000- qui ne sont pas pourvus. Un service public de l'emploi efficace, qui prenne en compte la situation individuelle de chaque chômeur, peut faire la différence. Nous devons mieux adapter notre service public de l'emploi au marché du travail, faire du sur mesure pour accompagner chaque chômeur individuellement, en fonction de son parcours personnel : en un mot, moderniser notre service public de l'emploi.

Plusieurs chantiers importants ont été ouverts. L'accord interprofessionnel du 11 janvier 2008 améliore la sécurisation des parcours professionnels. La loi du 13 février 2008, que Mme Procaccia a brillamment rapportée, a lancé la fusion de l'ANPE et des Assedic. Avec Mme Lagarde, nous voulons aller plus loin pour améliorer le service rendu aux usagers du service public de l'emploi. Nous avons mis en place l'accompagnement personnalisé des séniors : à partir de 55 ans, chaque demandeur d'emploi bénéficie d'un suivi personnalisé par un conseiller, car nous savons combien il est plus difficile de retrouver un emploi après cet âge. Enfin, la réforme de la formation professionnelle est en marche, les négociations sont en cours.

Ces actions ont pour point commun de redéfinir la colonne vertébrale du service public de l'emploi, montée dans les années 1960 pour faire face au chômage de masse et qui a été maintenue depuis lors, avec ses défauts, en particulier son incapacité à pouvoir faire du sur mesure tel que l'exige le marché du travail aujourd'hui. Ce texte vise à dessiner les contours d'un service public de l'emploi moderne, où les droits et les devoirs des demandeurs d'emplois soient clairement définis. Tous les pays européens ont emprunté ce chemin, nous ne l'avons pas fait plus tôt par manque de courage politique : le temps est venu d'y engager notre pays et nous le faisons, en reprenant nombre d'idées formulées par les partenaires sociaux.

L'équilibre des droits et des devoirs des demandeurs d'emploi, ne doit pas être un tabou. Les demandeurs d'emploi ont droit à un service public de l'emploi efficace, qui les accompagne individuellement dans la recherche d'emploi, en mobilisant les fonds nécessaires à cet accompagnement personnalisé. Mais le demandeur d'emploi a aussi des devoirs, c'est tout l'objet de ce texte.

Ce sujet a été trop longtemps délaissé, tout comme la fusion de l'ANPE et des Assedic. Les partenaires sociaux, saisis en juin dernier par le Premier ministre, ne sont pas parvenus à trouver un accord, après avoir déjà échoué lors des négociations sur de précédentes conventions d'assurance chômage depuis 2000. Il apparaît qu'on ne peut demander aux partenaires sociaux de définir les devoirs des demandeurs d'emploi. Aussi le Gouvernement prend-il ses responsabilités, en définissant l'équilibre des droits et devoirs des demandeurs d'emplois, ainsi que la notion d'offre raisonnable d'emploi. Après une concertation approfondie avec les partenaires sociaux, nous sommes parvenus à un projet équilibré, qui prend en compte les réalités du marché du travail.

Nos concitoyens ont compris l'enjeu et plus de 60 % sont favorables à l'idée de définir plus clairement l'offre d'emploi raisonnable.

La réforme se fonde sur trois principes généraux. D'abord l'approche personnalisée : la procédure est aujourd'hui purement administrative, calcul des droits à l'indemnisation aux Assedic, puis entretien plus ou moins formel à l'ANPE. A aucun moment, dans les premiers entretiens, alors que chaque jour compte, on ne définit les engagements du service public, ni le champ dans lequel le demandeur d'emploi inscrit sa recherche. L'approche personnalisée est indispensable, car la situation d'un cadre célibataire de 30 ans en région parisienne n'a rien à voir avec celle d'une mère de famille de 50 ans qui élève des enfants et vit dans sa maison à la campagne. Il importe de prendre le temps pour définir le cadre de la recherche, en fonction des qualifications, de l'âge, de la situation familiale et géographique, et de préciser ce que sera pour l'intéressé une offre raisonnable d'emploi.

Ensuite, un bon équilibre entre les droits et les devoirs ; l'engagement est réciproque, il ne pèse pas uniquement sur le demandeur. Ce dernier est en droit d'attendre plus d'efficacité et de disponibilité. Dire cela n'est pas caricaturer les agents, qui ont accompli un énorme travail pour améliorer les choses. Mais la structure administrative et son mode de fonctionnement étaient source d'inertie. La fusion Assedic-Unedic a rendu possible la présente réforme. Et le service public de l'emploi rendra désormais des comptes, y compris devant la commission des affaires sociales si vous le souhaitez, afin que vous puissiez apprécier l'évolution année après année. Les agents s'engagent sur la formation, la fréquence des entretiens, le champ géographique... Le demandeur, quant à lui, doit accepter une offre d'emploi raisonnable. Tout cela est finalisé dans le projet professionnel qui responsabilise les deux parties. On passe d'une logique administrative à une logique personnalisée.

Enfin, l'offre d'emploi raisonnable ne doit plus être arbitraire. Aujourd'hui, elle ne répond à aucun critère objectif -contrairement aux autres motifs de radiation, bien définis. Elle donne lieu à interprétations variables. Il faut prendre la peine de préciser des critères objectifs.

Vous n'aimez pas la loi bavarde, nous non plus ! Le texte se veut clair et simple : une traduction efficace des principes que je viens d'énoncer. L'article premier est consacré au projet professionnel. Le demandeur indique ce qu'il considère comme une offre d'emploi raisonnable, qu'il s'engage à accepter. Il s'engage aussi à ne pas refuser plus de deux offres raisonnables, sachant que les critères évoluent dans le temps. En effet, chaque jour qui passe est un mauvais jour, qui rend plus difficile le retour à l'emploi : il faut absolument se fixer d'aboutir avant un an car après, le demandeur bascule dans le chômage de longue durée.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Il faut instiller du dynamisme dans la recherche d'emploi. Les trois premiers mois, l'offre raisonnable est celle qui correspond au projet personnalisé. Ensuite, c'est celle qui correspond aux compétences de la personne et garantit 95 % du salaire antérieur, car le compteur tourne et ce ne serait pas un service à rendre à l'intéressé que de le laisser s'endormir dans sa recherche. (M. Jean Desessard s'indigne) Après le choc du licenciement, on ne se remobilise pas tout de suite...

M. Guy Fischer.  - Et les entreprises ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - J'y viendrai. Après six mois, les critères deviennent 85 % du salaire antérieur et trente kilomètres ou une heure de transports en commun depuis le domicile. Nous n'avons pas souhaité prévoir une plus grande distance, au contraire de ce qu'ont fait des pays considérés comme des modèles sociaux -je pense à la Suède- car nous avons pris en compte le prix élevé du carburant. Notez que ce temps et cette distance sont la réalité quotidienne de 70 % des actifs en France.

Après un an, l'offre raisonnable d'emploi est celle qui assure une rémunération supérieure ou égale à l'indemnisation : c'est le bon sens, il faut une sortie par le haut.

Vous m'interrogerez sur les obligations des entreprises. Nous entendons veiller à ce que les offres soient effectives et correspondent aux données du bassin d'emploi. Les entreprises seront tenues de répondre aux candidatures, le silence est décourageant. Et, pour éviter tout dumping social, les salaires proposés devront correspondre à ceux pratiqués localement.

Temps partiel, intérim, CDD ou CDI : aucune obligation n'est prévue dans la loi, car tout dépend de la situation personnelle du demandeur d'emploi. C'est tout le sens de la personnalisation du projet.

L'article 2 traite des conséquences de deux refus : la suspension provisoire des allocations, la radiation durant deux mois. Nous l'assumons. Certes, les demandeurs d'emploi sont d'abord des victimes qui vivent une situation difficile. Mais il y a aussi une toute petite minorité qui profite du système ; et ce n'est pas parce que c'est une toute petite minorité qu'il ne faut rien faire.

M. Jean Desessard.  - Cela vaut pour les patrons !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Et ceux qui font tout pour retrouver sont découragés de voir que d'autres refusent ce qu'ils voudraient bien obtenir. Tous les pays européens se sont engagés sur cette voie, amélioration du service public et de l'accompagnement, équilibre des droits et devoirs de chacun.

Je remercie les sénateurs de tous les bancs qui ont beaucoup travaillé, au premier rang desquels M. Leclerc, dont la grande expertise a fourni améliorations nombreuses et éclaircissements précieux. Les échanges en commission ont été constructifs et ne nous ont pas enfermés les uns et les autres dans les caricatures.

Au-delà, j'attire votre attention sur ce que doit être l'évolution de nos politiques sociales au regard des défis du XXIe siècle. Nous avons trop souvent laissé se développer des politiques en apparence très généreuses, mais qui ne prenaient pas en compte les réalités individuelles : administratives et anonymes à l'excès, régies par une logique d'indemnisation plutôt que d'accompagnement, elles restaient le plus souvent inefficaces. Nous devons repenser cette approche. Si nous voulons que nos politiques sociales restent généreuses et acceptables pour l'ensemble des citoyens, nous devons nous employer à mieux clarifier les droits et les devoirs des demandeurs d'emploi et faire du sur mesure en les adaptant au parcours de chacun. A nous de les faire évoluer : ce projet y participe. (Applaudissements à droite et au centre)

Hommage à une délégation vietnamienne

M. le président.  - J'ai le plaisir et l'honneur de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d'une délégation de l'Assemblée nationale de la République socialiste du Vietnam, conduite par son président, M. Nguyên Phu Trong, et présente à Paris à l'invitation du Sénat.

Cette visite officielle, quelques mois après celle du Premier ministre vietnamien, témoigne des liens d'amitié qui unissent nos deux pays. Je me réjouis de l'intensité des relations entre nos deux assemblées qui entretiennent un dialogue régulier, renforcé par la signature, en 2003, d'un accord de coopération mutuellement enrichissant. Je profite de cette occasion pour saluer l'action dynamique de notre groupe interparlementaire France-Vietnam, présidé par notre collègue, le questeur Gérard Miquel. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent)

Droits et devoirs des demandeurs d'emploi (Urgence - Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Le texte que nous examinons aujourd'hui complète les réformes en cours du service public de l'emploi en définissant la notion, restée jusqu'ici floue, d'offre raisonnable d'emploi.

Comme le ministre l'a rappelé, le service public de l'emploi s'est beaucoup modernisé au cours des dernières années. Depuis 2006, date de la signature de son dernier contrat de progrès avec l'État, l'ANPE met en oeuvre une politique de suivi individualisé des demandeurs d'emploi, pris en charge, à compter du quatrième mois de chômage, par un conseiller « référent » qui les accompagne dans leur recherche d'emploi. Cette politique a été rendue possible par le renforcement des moyens humains de l'agence, qui compte aujourd'hui 28 000 agents, soit 55 % de plus qu'il y a dix ans alors que le nombre de demandeurs d'emploi a baissé d'environ un million sur la même période.

L'ANPE est par ailleurs engagée dans un processus de fusion avec les Assedic, conséquence logique des efforts de rapprochement entrepris, depuis 2004, entre les deux organismes, qui ont permis de multiplier les guichets uniques et d'élaborer un système informatique commun.

Le texte propose de préciser les droits et les devoirs des demandeurs d'emploi dans leurs rapports avec le nouvel opérateur qui résultera de la fusion, lequel se voit assigner la mission d'orienter et d'accompagner les demandeurs d'emploi dans leur recherche d'emploi. A cette fin, il élaborera avec chacun d'entre eux un projet personnalisé d'accès à l'emploi, le PPAE, qui précisera la nature et les caractéristiques des emplois recherchés. Le demandeur d'emploi pourra indiquer quel métier il souhaite exercer, s'il recherche un CDI ou un CDD, un emploi à temps plein ou à temps partiel. Ce document sera révisé périodiquement pour élargir le champ de la recherche d'emploi si celle-ci se révèle, au bout d'un temps, infructueuse.

Le demandeur d'emploi, outre cette participation à l'élaboration de son projet, devra accomplir des actes positifs et répétés de recherche d'emploi -disposition qui n'est pas nouvelle puisqu'elle a été introduite dans le code du travail par la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005. Il devra enfin accepter les offres raisonnables d'emploi qui lui sont faites.

Le coeur du projet de loi, vous l'aurez compris, réside donc dans la définition de critères objectifs et évolutifs de définition de l'offre raisonnable d'emploi. Elle doit, en premier lieu, être compatible avec les qualifications du salarié. La rémunération proposée, ensuite, pour une personne au chômage depuis plus de trois mois, doit atteindre 95 % au moins de son salaire antérieur ; au-delà de six mois de chômage, ce taux est ramené à 85 %, tandis qu'au-delà d'un an devient raisonnable une offre d'emploi rémunérée au moins au niveau du revenu de remplacement perçu par le demandeur d'emploi. Le troisième critère, enfin, tient à la distance entre le domicile du demandeur et le lieu de travail : au-delà de six mois de chômage, une offre d'emploi est raisonnable si elle entraîne un temps de trajet, en transports en commun, d'une heure au plus ou si la distance domicile-travail est d'au plus trente kilomètres. Si l'on raisonne sur un trajet aller-retour, le temps de transport peut donc atteindre deux heures ou la distance soixante kilomètres.

Ces critères nous rapprochent de ce que pratiquent nos partenaires européens, telle l'Allemagne qui, à l'époque du chancelier Schroeder, a voté la loi Hartz IV qui prévoit qu'un demandeur d'emploi inscrit au chômage depuis plus de six mois doit accepter un emploi rémunéré à hauteur de 70 % au moins de son salaire antérieur et demandant un temps de trajet aller-retour de deux heures et demie au plus.

Un demandeur d'emploi ne pourra refuser, sans motif légitime, deux offres raisonnables d'emploi. Après un deuxième refus, il s'exposera à une sanction prenant la forme d'une radiation de la liste des demandeurs d'emploi, entraînant la suspension du versement du revenu de remplacement et pouvant être suivie d'une sanction décidée par le préfet. (M. Jean Desessard s'indigne)

La commission des affaires sociales approuve pleinement ce texte qui, retenant des critères objectifs pour définir l'offre raisonnable d'emploi, aujourd'hui laissée en grande partie à l'appréciation de chaque conseiller ANPE, assure une meilleure égalité de traitement entre les demandeurs d'emploi et crée une incitation supplémentaire au retour rapide à l'emploi, bénéfique tant pour le demandeur que pour les entreprises, en même temps que pour les comptes de l'assurance chômage. Il permettra également de mieux sanctionner des abus qui, pour être peu fréquents, n'en sont pas moins choquants pour l'opinion publique et, en favorisant une meilleure rencontre entre l'offre et la demande, de réduire les difficultés de recrutement observées dans certains secteurs...

M. Jean Desessard.  - Lesquels ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur.   - ...notamment celles qui résultent d'une inadéquation entre la qualification des demandeurs d'emploi et les besoins des entreprises.

M. Jean Desessard.  - C'est la formation qui est en cause.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Une lourde responsabilité pèse donc sur le futur opérateur issu de la fusion de l'ANPE et des Assedic, et c'est pourquoi nous soutenons les efforts du Gouvernement, en insistant, tout d'abord, sur la nécessité d'une prise en charge précoce des demandeurs d'emploi. Le nouvel opérateur s'est donné pour objectif de faire bénéficier tous les chômeurs d'un suivi individualisé dès leur inscription. Il faut aller encore plus loin et permettre à des personnes qui ont encore un emploi, mais savent l'avenir de leur emploi compromis, de bénéficier d'un accompagnement anticipé. Devraient également avoir accès à ce service celles qui envisagent une évolution professionnelle.

Nous estimons en outre que l'effort de formation tout au long de la vie doit être accentué et l'offre de formation mieux adaptée aux besoins réels des employeurs : c'est sur elle qu'ont misé tous les pays qui ont réussi à sécuriser les parcours professionnels.

Votre commission des affaires sociales, estimant que ce texte équilibré n'impose aux demandeurs d'emploi que des obligations très mesurées au regard de ce que pratiquent nos voisins, vous invite à l'adopter. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.  - Avec l'accord de la commission, je souhaite disjoindre, pour la clarté de nos débats, la discussion de l'amendement n°11 tendant à supprimer le II de l'article premier. Nous éviterons ainsi un effet de tunnel.

Il en est ainsi décidé.

Mme Raymonde Le Texier.  - (Applaudissements à gauche) Il aura donc fallu attendre plus de deux siècles, depuis la Révolution française, et voir se succéder pas moins de cinq républiques pour qu'enfin un projet de loi s'attelle à introduire la raison dans la recherche d'emploi et surtout dans l'esprit des chômeurs ! (Sourires sur les bancs de gauche) Après Comment l'esprit vient aux femmes, voici donc Comment la raison vient aux chômeurs ! (Applaudissements à gauche ; Mme Debré applaudit aussi) Ce texte dit des « droits et devoirs des demandeurs d'emploi », créé une nouvelle notion, l'« offre raisonnable d'emploi ».

Est considérée comme raisonnable une offre pour un emploi situé à moins de deux heures ou trente kilomètres et proposant un salaire tout d'abord égal à l'ancienne rémunération, mais qui décroît au fil des mois passés au chômage pour finir au niveau du revenu de remplacement. Au-delà de six mois de recherche, les offres d'emploi sans rapport avec les qualifications et l'expérience professionnelle deviendront, elles aussi, « raisonnables ».

Le chômeur qui osera refuser deux de ces offres se verra non seulement privé de l'allocation chômage pour laquelle il avait pourtant cotisé mais sera également radié des listes de l'ANPE ! Renvoyé du chômage pour faute grave, il ne pourra même plus prétendre au titre de demandeur d'emploi ! Ce système permet d'afficher et des économies et des chiffres du chômage en baisse, ce qui est bon pour la communication. Quant au coût humain, on le passe par pertes et profits !

Pour faire avaler la pilule, vous avez trouvé l'idée d'offre « raisonnable », que vous avez préférée à celle d'offre « valable » : au pays de Descartes, ce qui est « raisonnable » est intouchable ! On ne saurait refuser une offre fondée sur la raison -à moins d'être dépourvu de raison...

M. Jean Desessard. - CQFD !

Mme Raymonde Le Texier.  - Je me réjouis d'ailleurs que ce gouvernement propose un texte fondé sur l'idée philosophique de raison, qui ne semblait pas être la référence majeure de ce quinquennat... (M. Desessard savoure)

M. Nicolas About, président de la commission.  - Oh !

Mme Raymonde Le Texier.  - La droite ressort cette idée à chaque fois que le rapport de force devient trop favorable aux demandeurs d'emplois !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Quelle vision...

Mme Raymonde Le Texier.  - Selon Mme Tuchszirer, chercheur au Centre d'étude de l'emploi, il s'agit d'augmenter la main-d'oeuvre disponible pour réduire la marge de manoeuvre de ceux qui offrent leur force de travail. L'objectif n'est pas de s'attaquer au chômage en profondeur mais d'équilibrer le rapport de force au profit des entreprises. Qu'importe si les salaires stagnent -ce n'est pas comme si les Français se souciaient de leur pouvoir d'achat !

M. Guy Fischer.  - Très bien !

Mme Raymonde Le Texier.  - Seulement, ces emplois structurellement non pourvus ne le sont pas par hasard ! Certains chefs d'entreprises le reconnaissent. Bas salaires, précarité généralisée, mais aussi conditions de travail difficiles et absence de considération. L'idée d'imposer ces emplois aux chômeurs en faisant fi de leur compatibilité, de leur qualification ou de leur expérience, sans parler de leurs aspirations -folle prétention que de vouloir faire un travail que l'on a choisi !- n'est pas nouvelle : en 2000, lors des discussions sur le plan d'aide au retour à l'emploi (Pare), le Medef avait déjà souhaité que l'on passe de la notion de « qualification » à celle de « capacité ».

Votre offre d'emploi n'est pas raisonnable, elle est imposée parce que disponible. Choisir son travail, ne pas subir des conditions de travail trop difficiles doit rester le privilège de quelques-uns.

S'inspirant de la théorie libérale du chômage, ce texte reprend l'idée du chômage comme trappe à inactivité et la théorie du chômage volontaire. Penser que plus on reste au chômage, plus il est difficile de sortir de cette inactivité, cela se tient. Mais penser que les demandeurs d'emploi choisissent le chômage, l'extrême précarité, la peur du lendemain, c'est un déni de réalité ! (M. Desessard applaudit, M. Fourcade s'en amuse) On ne choisit pas d'être chômeur, on le subit ! Encore faut-il avoir été confronté au marché du travail pour le savoir...

Votre texte sous-entend que le chômeur est responsable de sa situation, implicitement coupable d'avoir été déchu de son emploi : il n'y a pas de fumée sans feu. Il doit renoncer à un salaire décent et à des conditions de travail supportables pour pourvoir coûte que coûte les emplois disponibles, expier le crime originel en acceptant ce chemin de croix. Le principe des sanctions qui s'aggravent au gré des refus, des récidives du chômeur, renvoie de manière inquiétante à la notion de récidive en droit pénal...

Ne vous en déplaise, la main-d'oeuvre n'est pas la seule variable d'ajustement de l'entreprise. Même dans un secteur comme l'automobile, la part de la masse salariale ne représente aujourd'hui que 9 à 14 % des coûts de production !

La théorie du chômage volontaire transfère la responsabilité du chômage de l'entreprise au salarié, qui l'a bien cherché ; on exonère l'employeur de toute responsabilité en matière de gestion prévisionnelle des emplois, de formation, de précarité -aspects tous absents du texte.

Vous vous fourvoyez. Si le taux de chômage a effectivement diminué dans les pays scandinaves, le Royaume-Uni ou l'Allemagne, aucune étude n'attribue cette baisse aux contraintes imposées aux demandeurs d'emploi. A l'inverse, celles-ci, en maintenant les salaires au plus bas, nourrissent le phénomène de travailleurs pauvres. En Allemagne, le nombre de travailleurs pauvres a augmenté de 30 % en six ans ! « Chômeur sans droit ou travailleur sans toit ? La Démocratie te laisse le choix ». Est-ce votre ambition pour la France ?

Le retour durable à l'emploi dépend d'une croissance forte, ce que les dernières prévisions de l'Insee ne nous promettent guère, ainsi que de la sécurisation des parcours professionnels et de la formation.

Ce texte n'utilise que le levier de la sanction. De la formation, il n'est pas trace. Vous n'avez pas jugé utile d'attendre les conclusions des négociations annoncées. M. Bertrand cite volontiers le Danemark en exemple : la formation y a été déterminante dans la baisse du chômage.

M. Nicolas About, président de la commission.  - C'est un petit pays.

Mme Raymonde Le Texier.  - En France, sur deux millions de chômeurs inscrits, seuls 5 % ont bénéficié d'un programme de formation en 2007, et l'Unedic n'a utilisé que la moitié de son budget. Pourtant, 50 à 70 % de ceux qui ont suivi une formation retrouvent un emploi dans les trois mois ! Pourquoi n'axez-vous pas votre politique de l'emploi autour de la formation ? Serait-ce que le pactole de l'Unedic est destiné à d'autres fins, comme les retraites ?

M. Jean Desessard.  - La question est posée...

Mme Raymonde Le Texier.  - Ce projet de loi qui entend « remettre la France au travail » va-t-il favoriser l'activité économique et relancer la croissance ? Rien n'est moins sûr. En ne faisant peser la contrainte que sur le demandeur d'emploi, on n'incite pas l'entreprise à améliorer la qualité des emplois, à former les salariés, à prévoir les évolutions des métiers et carrières. C'est refuser l'innovation ! Triste symptôme d'une économie arc-boutée sur elle-même. Vous menez une politique de l'emploi à court terme, qui privilégie la recherche des profits et les résultats statistiques plutôt que les solutions durables.

Le premier critère à l'embauche, c'est la motivation. Tous les entrepreneurs vous le diront ! Or le demandeur d'emploi motivé par la crainte de la sanction et non le choix ne sera guère motivé... Ces futurs employés en souffriront, mais les entreprises aussi !

Enfin, un point de méthode : votre texte prétend s'attaquer au chômage, alors que toutes les négociations importantes sur le sujet sont encore à venir. Vous lancez le match avant que l'arbitre ne soit arrivé sur le terrain, avant même que les règles du jeu n'aient été fixées !

M. Jean Desessard.  - Cela aurait peut-être mieux réussi à l'équipe de France... (Sourires)

Mme Raymonde Le Texier.  - Toutes les organisations que nous avons auditionnées estiment que ce texte arrive trop tôt. Nous ne savons encore rien du nouvel organisme qui naîtra de la fusion ANPE-Unedic. Les négociations entre les partenaires sociaux sur la réforme de l'assurance chômage n'ont pas commencé. Serait-ce que la définition du revenu de remplacement et des prestations d'aide à la recherche d'emploi est accessoire ?

Idem pour les négociations sur la formation professionnelle et la gestion prévisionnelle des emplois.

La concertation n'a pas commencé mais la chasse aux fraudeurs et aux paresseux est lancée !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ce n'est pas notre vocabulaire.

Mme Raymonde Le Texier.  - Fraudeurs et paresseux qui ne concerneraient que 2 % des chômeurs. Pourtant, c'est à tous les chômeurs que ce texte s'appliquera.

Ne pensez-vous pas qu'il faudrait commencer par s'occuper des 98 % qui respectent les règles ? (Applaudissements à gauche)

M. Nicolas About, président de la commission.  - C'est ce que nous faisons !

Mme Raymonde Le Texier.  - Pourquoi le Gouvernement inverse-t-il ainsi les priorités ? Est-ce parce qu'englué dans les sondages, il fait ce qu'il sait faire, sur les traces du Président de la République, je veux dire stigmatiser, diviser, dresser les Français les uns contre les autres ? (Marques d'improbation à droite)

M. Guy Fischer.  - Mais oui !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ce qui est excessif est insignifiant...

Mme Raymonde Le Texier.  - Les filons de l'immigration et de l'insécurité ont déjà servi, le pouvoir d'achat ne suit pas, au point que le Gouvernement dépense des millions d'euros pour convaincre les Français que leur porte-monnaie n'est pas vide... Quoi de mieux, alors, que la stigmatisation des chômeurs considérés comme des paresseux ? On comprend que, dans ces conditions, toute négociation soit inutile ! Le temps du passage en force a de beaux jours devant lui !

Nous ne tirons aucune satisfaction de nos critiques. Nous croyons aux vertus du dialogue social, mais le texte les ignore. Nous aurions aimé débattre d'une politique globale de l'emploi, de la formation, notamment des jeunes qui sortent du système éducatif sans diplôme. Nous aurions aimé soutenir un renforcement de l'accompagnement des chômeurs, alors que le projet personnalisé de retour à l'emploi est vidé de son sens par l'offre raisonnable d'emploi. Nous souhaitons, nous aussi, le retour au plein emploi ; mais tenter d'atteindre cet objectif à marche forcée, par la contrainte, en favorisant les bas salaires, c'est aller inéluctablement vers une augmentation du nombre de travailleurs pauvres. (M. Guy Fischer le confirme)

L'emploi, oui, mais pas dans ces conditions ! Nous ne voulons pas de cette France de la stigmatisation que vous préparez, cette France où on oppose les bons citoyens et les mauvais qui profitent de la solidarité des premiers, cette France où ce sont toujours les plus modestes qu'on sacrifie. Le groupe socialiste votera contre ce projet de loi. (Applaudissements à gauche)

Mme Isabelle Debré.  - (Applaudissements à droite) Ce texte est important parce qu'il met en oeuvre les engagements du Président de la République tels qu'ils ont été approuvés à une large majorité par les Français (applaudissements à droite) ; aussi parce qu'il s'inscrit dans le droit fil de la politique du Gouvernement pour le retour au plein emploi.

Beaucoup a été fait dans la lutte contre le chômage. Les statistiques de l'Insee témoignent de la volonté du Gouvernement de mettre fin à cette anomalie qui fait de la France un des derniers pays d'Europe à être confronté au chômage de masse. Le taux de chômage a baissé de 1,2 point en un an, et le nombre de demandeurs d'emploi en France métropolitaine s'établit à deux millions. Je n'aurai pas la cruauté de rappeler d'autres chiffres...

M. Adrien Gouteyron.  - Dommage !

Mme Annie David.  - Quels chiffres ?

Mme Isabelle Debré.  - Sous le gouvernement Jospin, par exemple... Nous avons aujourd'hui les meilleurs résultats depuis 1980.

Une étape a été franchie avec la fusion ANPE-Assedic, que Mme Procaccia a excellemment rapportée, qui sera effective au 1er janvier 2009. Le nouvel opérateur sera le fer de lance d'un service public de l'emploi plus attentif à la situation des demandeurs d'emploi et plus performant. Nous lui avons assigné trois objectifs : améliorer le service rendu aux usagers, demandeurs d'emploi et entreprises, grâce au réseau de guichets uniques ; offrir une gamme de prestations complète aux demandeurs d'emploi, quel que soit leur statut ; organiser enfin un accompagnement renforcé grâce à la mutualisation des moyens et la présence de davantage d'agents sur le terrain.

Le présent projet de loi est la deuxième étape, qui rend clairs et précis les engagements réciproques du nouvel opérateur et du demandeur d'emploi, notamment en substituant à la notion d'offre valable d'emploi celle d'offre raisonnable d'emploi. Il sera ainsi mis fin aux différences d'interprétation, sources d'inégalité et d'inefficacité.

Le demandeur d'emploi aura davantage de droits. Il bénéficiera d'un suivi très personnalisé et d'un référent unique qui s'engagera à mettre tout en oeuvre pour faciliter son retour à l'emploi et à l'accompagner dans sa recherche d'un emploi durable. Un projet personnalisé sera élaboré, qui précisera les objectifs et les moyens à mettre en oeuvre pour les atteindre, notamment, si nécessaire, une formation. Le projet devra identifier la nature et les caractéristiques de l'emploi recherché, la zone géographique privilégiée, le niveau de salaire attendu. L'offre raisonnable d'emploi tiendra compte de la formation de l'intéressé, de ses compétences et qualifications, de sa situation professionnelle antérieure, mais aussi de sa situation personnelle et familiale. Notre ambition est d'offrir aux demandeurs d'emploi les meilleures chances de réinsertion grâce à une approche très fine de leurs besoins et une écoute personnalisée. Nous sommes nombreux ici à souhaiter une réforme profonde de la formation professionnelle (applaudissements au centre et à droite) afin d'offrir à chacun la possibilité de s'adapter aux évolutions des métiers et du marché du travail. Je souhaite que M. le ministre évoque cette question aujourd'hui.

Il ne s'agit pas de contraindre le demandeur d'emploi à accepter une offre sans rapport avec ses compétences mais de l'accompagner, parce que la dignité humaine l'exige, parce que la motivation individuelle est liée à la qualité du projet personnalisé - celui-ci ne devant pas être figé, la réalité du marché du travail l'impose.

Parce que le texte donne des droits, il exige le respect de certains devoirs. Nous sommes en droit d'attendre une motivation et un investissement personnel accrus dans la démarche de recherche d'emploi. Le demandeur d'emploi devra participer activement à l'élaboration du projet personnalisé, et se rendre disponible pour tout emploi correspondant à ses compétences. Est-il déraisonnable de lui demander, après trois ou six mois de recherche infructueuse, d'accepter un emploi qui correspond...

Mme Annie David.  - Non ! Qui est compatible !

Mme Isabelle Debré.  - ...à son expertise professionnelle, même s'il doit accepter une légère diminution de son salaire ? Est-il déraisonnable, après un an, de lui demander d'accepter un emploi payé à hauteur du revenu de remplacement qu'il perçoit ?

M. Jean Desessard.  - Oui !

Mme Isabelle Debré.  - Est-il déraisonnable d'exiger de lui qu'il accepte un emploi situé à trente kilomètres au plus de son domicile ou une heure au plus de transports en commun ? Je ne le crois pas.

Ce texte est équilibré, parce qu'il favorise le dialogue direct entre le demandeur d'emploi et son conseiller ; il est positif, parce qu'il recherche systématiquement le meilleur résultat ; il est incitatif, parce qu'il place chacun devant ses responsabilités. A l'heure où de nombreuses entreprises ne trouvent pas les salariés dont elles ont besoin pour compenser les départs à la retraite, où tant d'emplois ne sont pas pourvus dans le bâtiment, la restauration, l'informatique ou le gardiennage, où quinze métiers connaissent des difficultés de recrutement, ce projet de loi est une chance. Il offre aux entreprises de nouvelles perspectives et au pays la possibilité de retrouver le niveau d'emploi qu'il n'a pas connu depuis trente ans, de se mettre enfin au niveau des pays européens qui ont réformé avec pragmatisme leur marché du travail. Il est en parfaite cohérence avec les textes sur la fusion ANPE-Assedic et la modernisation du marché du travail.

Il s'inscrit dans un ensemble de réformes qui, allant de l'école à la formation professionnelle en passant par l'université et la recherche, conditionnent l'avenir de nos enfants. (Marques d'approbation à droite)

Mme Annie David.  - Sans aucun doute !

Mme Isabelle Debré.  - Le groupe UMP votera donc ce projet de loi. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Annie David.  - C'est une habitude pour les textes concernant les droits des salariés : vous avez déclaré l'urgence, que rien ne justifie.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ah bon.

Mme Annie David.  - Plusieurs orateurs ont vanté les mérites de la fusion entre l'ANPE et les Assedic. Pourtant, nous ne connaissons ni le statut ni le nom du nouvel organisme, puisque lors de son audition, M. Wauqiez a dit ne pas vouloir trahir le secret. Les parlementaires apprécieront !

S'il faut batailler contre le chômage, ce n'est pas avec ce texte que vous engagerez les hostilités. Au contraire : il stigmatise les demandeurs d'emplois et aborde le problème à l'envers, puisqu'il ne définit pas d'abord l'offre de services de la nouvelle institution.

Il y a urgence pour des milliers de nos concitoyens à sortir de la précarité, des petits boulots mal payés et du chômage dans lequel des employeurs peu scrupuleux les ont plongés. Mais votre texte néglige cette réalité. Il ignore le calendrier social en cours, comme la négociation sur la formation professionnelle, celle sur la pénibilité ou la nouvelle convention d'assurance chômage. L'urgence que vous avez déclarée ne sera d'aucun secours pour les demandeurs d'emploi.

Qui plus est, on nous demande de ne pas nous en mêler, tantôt parce qu'il y a un accord professionnel, tantôt parce que le Gouvernement prend ses responsabilités ! A quoi sert donc le Parlement ?

L'article premier définit l'offre raisonnable d'emploi, venue se substituer à l'offre valable d'emploi après l'annonce fracassante et médiatique du Président de la République.

Certes, la précision législative s'imposait, mais nous regrettons que vous en profitiez pour renforcer les obligations pesant sur les demandeurs d'emploi : ils devront désormais prouver une recherche active continue et répétée, accepter la dégressivité des droits, voire se résigner à un emploi très en deçà des qualifications et de l'ancienne rémunération, alors que le Conseil économique et social a clairement repoussé cette solution.

Vous allez jusqu'à brader ce que vous appelez le « capital humain », puisqu'un salarié privé d'emploi inscrit au chômage depuis plus d'un an ne pourrait refuser un emploi dont la rémunération serait égale à l'indemnisation perçue, au motif qu'un emploi sous-payé vaut mieux que rien.

Mieux pour qui ? Pour les salariés dont la compétence et la force de travail sont valorisées dans les limites des faibles allocations de substitution ? Pour les séniors licenciés à 55 ans parce que leur expérience coûte trop cher ? Mieux, pour les jeunes sans expérience ? Ou, bien mieux, pour l'employeur qui disposera enfin d'un salarié à moindre coût ?

Car il s'agit bien de poursuivre la politique libérale de l'offre, malgré son échec économique et social, en pesant sur les salaires. A terme, tous les salariés seront pénalisés.

Et je ne parle pas de la disposition scandaleuse autorisant à radier tout demandeur d'emploi qui refuserait un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation.

En somme, l'article premier contraint les demandeurs d'emploi à accepter les propositions faites. Ce n'est pas l'architecture de la nouvelle institution -temporairement dénommée « France emploi »- qui nous rassure, ni même la rédaction « conjointe » du projet personnalisé d'accès à l'emploi, car vous introduisez une égalité fallacieuse entre la nouvelle institution et les chômeurs.

Dans un instant, le rapporteur proposera de donner le ton de ce contrat, avec des sanctions en cas de désaccord initial. Il n'y a là rien de très nouveau, sauf l'apparition de l'offre raisonnable d'emploi et l'amendement de M. Leclerc.

Vous dites que ce texte devrait activement participer à la diminution du nombre de chômeurs, jusqu'à la barre symbolique des 5 % à l'horizon 2012, date de la prochaine élection présidentielle.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Il faut savoir rendre des comptes.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cela s'appelle un bilan.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Les chiffres sont bons : voilà ce qui vous gêne !

Mme Annie David.  - Lorsqu'il s'agit d'instrumentaliser les chiffres du chômage, votre gouvernement est orfèvre. Ainsi, vous prétendez avoir créé 300 000 emplois, un chiffre sans doute largement supérieur à la réalité. Vous vous gardez de préciser leur nature, car il s'agit principalement de contrats atypiques et précaires, à temps partiel imposé, souvent créés dans les services à la personne.

M. Jean Desessard.  - Des domestiques !

Mme Annie David.  - Or, l'emploi industriel a régressé de 0,4 % au cours du premier trimestre 2008, soit 12 100 postes supprimés. Et ce n'est pas l'offre « raisonnable » d'emploi qui inversera cette tendance ! Quels sont les emplois pourvus ? Quels contrats sont signés ? Pour quelle durée ? Quelle est leur sécurité juridique ou sanitaire ?

Vous passez tout cela sous silence, alors que le Conseil national de l'information statistique (Cnis) vient de vous remettre un rapport qui tend à enrichir les indicateurs existants pour mieux cerner la précarité des emplois et pour estimer les emplois insatisfaisants. Au moment où l'Organisation internationale du travail lance une campagne pour promouvoir le travail décent pour tous les salariés, l'emploi doit être analysé aussi sous un angle qualitatif.

Un article de presse en date du 10 juin a rappelé que, face a un taux de chômage atteignant 11 %, le gouvernement allemand a fait adopter les lois Hartz relatives au marché du travail, dont le quatrième volet a divisé par deux la durée d'indemnisation et contraignait les demandeurs à accepter toute offre de travail, qualifiée là-bas d'acceptable, même lorsqu'elle n'atteignait pas son niveau de qualification.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Nous n'en sommes pas là !

Mme Annie David.  - Résultats : 6 millions de travailleurs pauvres, soit 22 % des actifs, perçoivent moins de 70 % du revenu moyen allemand ; une personne sur huit est pauvre ; les inégalités se creusent malgré la baisse du taux de chômage et une forte croissance économique. En France, la croissance n'est même pas au rendez-vous !

Enfin, le taux de 5 % annoncé pour 2012 est une illusion qui résultera principalement de radiations massives. Lors de son audition, M. Geoffroy Roux de Bézieux, nouveau président de l'Unedic, a dit vouloir améliorer la productivité de la nouvelle institution, sans que l'on sache comment il comptait l'obtenir. Je crains que ce soit en multipliant les radiations, mais aussi par les bag jobs ! Je n'apprécie pas cet anglicisme, mais il est limpide.

Selon le professeur Boeri, il ne faut plus se focaliser sur les stocks du marché du travail mais sur le taux d'entrées dans le chômage. En disant ces mots, je pense à l'inhumanité avec laquelle ces femmes et ces hommes sont traités. La baisse du taux de chômage résulte de la démographie, qui ne doit rien à vos réformes.

Ce texte précise les devoirs des demandeurs d'emploi, mais il reste silencieux sur leurs droits. Le droit à la formation ? Encore faut-il y avoir accès, car votre gouvernement, d'ordinaire si prompt à créer des droits opposables, se limite à une simple éventualité. Les employeurs n'ont aucune obligation, alors que les droits des demandeurs d'emploi sont, pour une part, des obligations à la charge des employeurs. Je pense notamment à la transmission de toutes les offres d'emploi à l'ANPE, alors qu'elle en reçoit aujourd'hui 30 %. Nombre d'entreprises préfèrent les sociétés privées de placement et celles d'intérim, tout cela sans la moindre sanction.

Après avoir entendu les propos de notre collègue M. Dassault...

M. Guy Fischer.  - Scandaleux !

Mme Annie David.  - ...lors de l'audition de M. Wauquiez, je suis très inquiète pour le devenir des salariés jetés à la rue par des patrons voyous, dans l'indifférence du Gouvernement. Je vous épargnerai la liste trop longue des entreprises qui licencient sans vergogne, mais j'étais samedi aux côtés des ouvriers papetiers d'Altadis, employés dans ma commune, pour dénoncer une fermeture abusive. On est loin de la responsabilité sociale des entreprises, prônée par le Président Sarkozy et reprise dans le Grenelle de l'insertion, car votre texte s'inscrit dans votre projet de société consistant à passer d'un État social à un État libéral et pénal !

Je conclurai avec M. John Moizley, professeur à l'université de Nottingham : « un travailleur qui ne peut pas trouver d'emploi est un personnage infiniment plus tragique que n'importe quel Hamlet ou Oedipe ».

Vous l'avez compris : le groupe CRC ne votera pas ce texte. (Applaudissements à gauche)

M. Nicolas About, président de la commission.  - C'est rassurant.

M. Jean Desessard.  - Excellente intervention. Alors que j'hésitais, j'ai été convaincu !

M. Bernard Seillier.  - Durant la campagne présidentielle, le Président de la République s'est engagé à ramener en cinq ans le taux de chômage à 5 % et surtout à réduire le délai de recherche d'emploi à cinq mois. Malgré le nouveau choc pétrolier, notre taux de chômage n'a jamais atteint un niveau aussi bas depuis le début des années 1980 : il s'élève à 7,2 % cette année, soit 1,2 point de moins qu'il y a un an, c'est-à-dire 14 % de chômeurs en moins.

Cela n'est pas dû uniquement à l'augmentation du nombre de départs à la retraite et à l'évolution démographique puisqu'au premier trimestre, l'économie française a continué à créer de nombreux emplois : près de 70 000 dans le secteur marchand. La proportion de CDI est restée stable en 2007, à 86 %.

Pour ramener le taux de 7 % à 5 %, il faut un nouveau type de mobilisation, tant de la part des demandeurs d'emploi que des services chargés de les aider à trouver un emploi. La fusion entre l'ANPE et les Assedic, en redéployant les moyens du service public de l'emploi, devrait faire baisser le nombre de demandeurs d'emploi suivis par chaque conseiller. Ne serait-il pas opportun d'associer plus étroitement les services d'orientation de l'Afpa à l'organisme issu de cette fusion, ainsi que nous l'avions suggéré dans le rapport de la mission sénatoriale sur la formation professionnelle ? Un effort de formation des agents du nouveau service public de l'emploi sera également nécessaire pour appliquer efficacement et surtout humainement ce projet de loi.

L'une des clefs de la réduction du taux de chômage est d'associer accompagnement et stimulation du demandeur d'emploi. Cette double démarche se calque sur le principe exprimé dans le cinquième paragraphe du Préambule de la Constitution de 1946, repris dans celle de 1958 : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi. »

Mais au-delà de cette déclaration solennelle, il s'agit de mettre en place une procédure pratique, efficace et humaine de réciprocité d'obligations qui pèsent sur le citoyen et sur la Nation. C'est cette double démarche que s'efforce de mettre en oeuvre ce projet de loi : à un effort personnel pour travailler s'associe un accompagnement pour trouver un emploi. Il semble inspiré par le programme britannique du New Deal qui fait bénéficier d'un accompagnement personnalisé les personnes au chômage depuis plus de dix-huit mois, délai ramené à six mois pour les jeunes demandeurs d'emploi. Le temps de trajet considéré comme acceptable peut aller jusqu'à deux heures et un suivi des recherches d'emploi est par ailleurs effectué. Chaque demandeur d'emploi doit entreprendre dix démarches tous les quinze jours. Le demandeur peut réduire sa demande à un certain type d'emploi le premier trimestre. Au-delà toute proposition doit être acceptée.

Le projet français, moins brutal, repose sur une définition beaucoup plus précise du projet personnalisé d'accès à l'emploi par le demandeur d'emploi et le service public de l'emploi, projet à partir duquel, désormais, se définit l'offre raisonnable d'emploi. Il introduit également une progressivité dans l'abaissement des exigences en fonction de l'échec des premières tentatives. Les critères de détermination de l'offre d'emploi raisonnable évoluent dans le temps, partant du principe qu'il est normal d'élargir géographiquement le champ de la recherche et d'abaisser les prétentions salariales après une certaine durée de chômage.

Le débat porte sur la définition de l'offre raisonnable, et sur ce qui doit être considéré comme une offre d'emploi que le demandeur ne peut refuser. En ce qui concerne ce concept d'emploi raisonnable, et pour éviter un renouvellement de l'aventure malheureuse du CNE et la censure judiciaire, il faudra tenir compte de la réflexion menée en Europe sur la notion de qualité de l'emploi depuis les années 1990, notamment avec l'introduction du concept d'emploi inadéquat, puis celui d'emploi décent par le BIT.

Les agents du service public de l'emploi, déjà tenus de sanctionner le chômeur qui ne recherche pas activement un emploi, ne le font guère parce que les sanctions leur apparaissent trop lourdes et les offres insuffisamment adaptées à la qualification des demandeurs. La réforme proposée repose sur une logique d'engagements réciproques équilibrée : le service public de l'emploi s'engage à mettre en oeuvre toutes les actions nécessaires pour faciliter le retour à l'emploi et propose au demandeur d'emploi des offres considérées comme raisonnables. En contrepartie, ce dernier s'engage à accepter ces offres selon un processus se durcissant dans le temps, ce qui n'est pas en soi critiquable car le chômage est destructeur pour la personnalité.

Ce projet a le mérite de préciser la construction d'une offre d'emploi raisonnable en partant de la situation du demandeur : la nature et les caractéristiques de l'emploi recherché, la zone géographique dans laquelle le demandeur le recherche ainsi que le salaire attendu. L'offre d'emploi raisonnable ainsi définie dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi est adaptée à chaque demandeur en fonction de sa formation, de ses qualifications, de son expérience professionnelle et de sa situation personnelle et familiale.

L'enjeu est de taille car si l'on admet que la fixation d'exigences est conforme au principe constitutionnel qui veut que tout citoyen doit travailler, un autre principe, au paragraphe 11 du même Préambule, prévoit que « Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. »

Le premier critère, l'état de la personne, ne pose pas de problème. En revanche la formule : « Après un an de chômage, est considérée comme raisonnable l'offre d'un emploi rémunéré à hauteur du revenu de remplacement, tout en répondant aux mêmes conditions en termes d'éloignement géographique » pourrait sembler faire l'impasse sur l'absence d'emplois due à l'état de l'économie. L'expérience le démontrera. Cependant, le principe constitutionnel est respecté tant que le demandeur d'emploi à qui on ne peut rien reprocher continue à toucher un revenu de remplacement correspondant à son « droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence »

Les garanties d'indemnisation, et surtout de formation et d'accompagnement, seront déterminantes pour la régulation du système et pour faire de lui non seulement un système acceptable, ce qu'il me semble être aujourd'hui, mais encore un système exemplaire, ce qu'il peut être demain. Les dispositifs d'accompagnement doivent s'articuler avec l'insertion sociale ou professionnelle et la formation. Le Centre d'études de l'emploi relève que les dernières étapes de la décentralisation ont bouleversé le partage des compétences dans ces domaines. Notre rapport sénatorial de 2007 sur la formation professionnelle a souligné la nécessité d'une réorganisation importante pour mobiliser la formation professionnelle au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire les demandeurs d'emploi. Le succès de la réforme en matière de formation professionnelle sera déterminant pour la performance française en matière d'emploi.

Les maisons de l'emploi, lieux de convergence des politiques publiques et de l'initiative privée, participent à l'accompagnement des demandeurs d'emploi, soutiennent la création d'entreprises et contribuent aux prévisions en matière de besoins de main-d'oeuvre et de reconversion des territoires. Leur articulation avec le service rénové de l'emploi devra être précisée à la suite du rapport Anciaux.

Un mot sur les créations d'entreprises, et singulièrement des très petites entreprises, par des demandeurs d'emploi. Cette fécondité de l'activité humaine semble prometteuse, ainsi qu'a régulièrement l'occasion de le préciser l'Association pour le développement de l'initiative économique présidée par Maria Nowak. Les agents du service public et ceux qui y sont associés, en provenance d'entreprises privées spécialisées dans le placement et l'accompagnement, doivent être formés à l'accompagnement à la création d'entreprises des demandeurs d'emploi. C'est une catégorie d'offres d'emploi raisonnables qui mérite d'être prise en compte, comme je l'avais déjà souligné dans mon rapport « Pour un contrat d'accompagnement généralisé », rendu après la mission que j'avais effectuée en 2003 auprès de François Fillon, ministre des affaires sociales.

Je soutiens la réforme proposée en espérant qu'elle n'est qu'une première étape d'une réforme plus vaste qui réconcilie les dimensions économiques et sociales de nos activités grâce à une véritable économie politique. Les demandeurs d'emploi ont besoin d'être soutenus, compris et aidés, mais tous les citoyens ont aussi besoin d'être rassurés sur le sérieux du traitement du chômage. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Muguette Dini.  - Depuis quelques années, le service public de l'emploi est en pleine mutation. Son architecture générale ayant été élaborée à une époque de plein emploi, dans une économie encore protégée, elle est devenue obsolète et inadaptée à un chômage de masse, de longue durée, affectant les jeunes, les séniors, les travailleurs peu qualifiés, dans une économie ouverte de plus en plus globalisée. Il nous faut mettre en place un véritable système d'accompagnement des demandeurs d'emploi dans leurs recherches, tout en contrôlant qu'elles sont effectives.

Etre demandeur d'emploi comporte des droits mais aussi le devoir de tout faire pour se réinsérer dans l'emploi, sans pour autant accepter n'importe quoi. Le terme même de « demandeur d'emploi » n'est pas neutre et traduit une philosophie d'activation de l'indemnisation chômage. Il signifie qu'une personne involontairement privée d'emploi n'est pas passive mais, au contraire, agit pour retrouver un emploi correspondant à ses compétences et à ses prétentions salariales. C'est à ce titre que lui est versée une indemnité.

C'est pourquoi les deux récentes évolutions du SPE ont constitué de véritables avancées. La première a été la mise en place par l'ANPE, depuis 2006, d'une politique de suivi individualisé des demandeurs d'emploi. Ce suivi, formalisé dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi, est assuré par un « référent » pour tout demandeur d'emploi inscrit depuis plus de trois mois. Pour pouvoir mettre en place ce suivi, l'ANPE a vu ses moyens augmenter. Cette augmentation a-t-elle été suffisante ?

En effet, en dépit de la diminution du nombre de demandeurs d'emploi, les référents, surchargés, ne peuvent pas assurer le suivi personnalisé dans les meilleures conditions, une situation que devrait améliorer la seconde grande réforme dont vient de bénéficier le SPE avec la fusion entre l'ANPE et les Assedic.

Cette fusion remédiera en partie au manque de personnel, grâce à un redéploiement des moyens qui diminuera le nombre de demandeurs d'emploi, suivis par chaque conseiller.

Selon le Gouvernement, le nombre de demandeurs d'emploi suivi par conseiller devrait passer de 140 à 30.

Plutôt que de réformer les droits des demandeurs d'emploi, ce texte précise le contenu des droits existants et leur donne un caractère évolutif. Il précise en outre les relations entre les demandeurs d'emploi et le futur organisme issu de la fusion entre l'ANPE et les Assedic. Le nouvel opérateur orientera et accompagnera dans leur recherche les demandeurs d'emploi immédiatement disponibles à l'embauche. Ces derniers devront participer à la définition du projet personnalisé d'accès à l'emploi, accomplir des actes positifs et répétés de recherche d'emploi et accepter les offres raisonnables d'emploi qui leur seront proposées.

Le projet précise également le contenu du projet personnalisé d'accès à l'emploi (PPAE) qui est élaboré par le demandeur d'emploi et le service public de l'emploi. Le PPAE énoncera la nature et les caractéristiques des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le niveau de salaire attendu, mais aussi les actions que l'opérateur mettra en oeuvre, notamment en matière d'accompagnement, de formation et d'aide à la mobilité. C'est pourquoi nous voterons l'amendement de la commission qui prévoit que le PPAE tiendra compte de la formation, des qualifications, de l'expérience professionnelle, de la situation personnelle et familiale du demandeur d'emploi et de l'état du marché du travail local pour déterminer la nature et les caractéristiques des emplois recherchés, mais aussi la zone géographique privilégiée et le niveau de salaire attendu. Cette rédaction permet de mieux équilibrer les droits et les devoirs des demandeurs d'emploi.

Enfin, ce texte définit « l'offre raisonnable d'emploi ». Cette notion existait déjà dans le code du travail mais elle était assez floue, ce qui avait conduit à des interprétations disparates. Désormais, l'offre raisonnable d'emploi sera appréciée au regard des caractéristiques de l'emploi recherché, de la zone géographique privilégiée et du salaire attendu. Cette appréciation évoluera dans le temps afin d'élargir le champ de recherche géographique et de modérer les prétentions salariales en cas de réelles difficultés à retrouver un emploi dans la limite du raisonnable. Ainsi, un demandeur d'emploi ne sera pas tenu d'accepter une offre lui imposant un trajet de plus d'une heure et il ne sera pas radié pour avoir refusé un emploi rémunéré moins que l'indemnité de remplacement. En outre, le salaire ne pourra être inférieur à celui normalement pratiqué dans la région et la profession concernées et ne pourra contrevenir aux règles législatives et réglementaires relatives au salaire minimum. Dernière protection : l'offre devra être compatible avec la qualification du demandeur d'emploi. La définition de l'offre raisonnable d'emploi est donc équilibrée.

Le régime des sanctions prévu en cas de méconnaissance de ses devoirs par le demandeur d'emploi nous satisfait également. La radiation ne pourra dorénavant être prononcée, pour une durée de deux mois, qu'en cas de refus, sans motif légitime, de deux offres raisonnables d'emploi alors que jusqu'à présent, la radiation pouvait être prononcée dès le premier refus.

Le message est clair : il faut agir. Mais il est incomplet car il peut laisser croire que l'indispensable réforme des devoirs des demandeurs d'emploi est en marche, ce qui est inexact. Nous avons besoin d'une flexisécurité à la française. L'accord national interprofessionnel et la loi de modernisation du travail vont dans ce sens. Mais il nous faudrait contrebalancer la nécessaire flexibilité du droit du travail par une véritable sécurisation des parcours professionnels. Seule une réforme approfondie des droits des demandeurs d'emploi, comme celle qui a eu lieu aux Pays-Bas ou au Danemark, y parviendra. Il conviendrait de revaloriser l'indemnisation de remplacement quitte à ce que sa durée soit revue à la baisse. Les demandeurs d'emplois pourraient conserver leurs droits. En sécurisant les parcours professionnels, les droits des travailleurs seraient dissociés du statut de salarié. Nous regrettons que ce projet de loi n'aille pas en ce sens, même si nous comprenons le choix fait par le Gouvernement d'adopter une approche morcelée du dossier afin de laisser vivre les négociations. La prochaine convention d'assurance chômage pourra sans doute orienter notre système vers une flexisécurité à la française.

Considérant que ce projet de loi marque déjà une avancée significative, le groupe UC-UDF le votera. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean Desessard.  - L'intitulé de ce projet de loi est-il cohérent ? La notion de « droits et devoirs des demandeurs d'emploi » indique qu'il s'agit d'une catégorie qui aurait un statut bien particulier dans notre société. Pourquoi, par exemple, ne pas légiférer sur les droits et devoirs des dirigeants d'entreprises ? (Mme Debré rit)

M. Nicolas About, président de la commission.  - Pourquoi pas ?

M. Jean Desessard.  - Pourquoi ne pas se pencher sur les stocks options...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Nous l'avons fait !

M. Jean Desessard.  - ...vendues avec bénéfices par certains dirigeants alors que leur société est en difficulté, comme nous l'avons vu à EADS, sur les parachutes dorés, les résidences fiscales exotiques ?

Mme Isabelle Debré.  - C'est hors sujet !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Rien ne vous interdit de déposer une proposition de loi !

M. Jean Desessard.  - Pourquoi ne pas voter des textes sur la formation, les délocalisations, l'environnement, la santé au travail, l'harmonisation fiscale et sociale au niveau mondial ? L'intitulé même de ce projet de loi n'est donc pas neutre.

Dans la crise sociale et économique que nous traversons, n'aurait-il pas été préférable de légiférer sur la solidarité à l'égard des demandeurs d'emploi ?

M. Nicolas About, président de la commission.  - C'est ce que nous faisons !

M. Jean Desessard.  - Pourquoi donc nous proposer une telle loi ? On nous répond qu'elle est nécessaire car un certain nombre d'emplois ne sont pas pourvus, mais il n'existe pas d'études sérieuses pour étayer ces affirmations. Seules deux catégories d'emplois ont du mal à trouver preneurs : les métiers très qualifiés en médecine ou en informatique et les emplois pénibles dans le bâtiment ou les métiers de bouche, dont les horaires et les salaires sont peu attractifs.

M. Guy Fischer.  - Surtout les salaires !

M. Jean Desessard.  - Ce projet de loi ne s'adresse évidemment pas aux ingénieurs de haut niveau mais aux personnes peu ou pas qualifiées, auxquelles on veut imposer une insertion professionnelle, quelle qu'elle soit et où qu'elle soit. Mais de quel projet de société veut-on ? Ce texte veut aligner l'économie française et le monde du travail sur le système mondial néolibéral, qui marque une immense régression en termes de salaires, de conditions de travail et de durée du temps de travail. Mais vous faites une erreur d'analyse en estimant que le salut de l'économie française impose une remise en cause de nos droits sociaux.

Une autre voie serait pourtant possible avec la remise en cause du productivisme comme dogme économique car il s'agit d'un non-sens écologique et d'une aberration économique : à court terme, la moitié de nos activités sera consacrée à réparer les dégâts du productivisme. II serait temps de s'interroger sur nos besoins réels et de les adapter aux ressources. Sinon, nous courrons à la catastrophe économique, sociale et écologique.

En outre, nous devrions définir une solidarité nord-sud et est-ouest en développant une économie de proximité. Chaque pays doit trouver son propre développement, sans qu'aucun domine, ce qui permettrait de limiter l'immigration économique contrainte.

Chacun doit vivre décemment de son travail. Contrairement à la logique que sous-tend ce texte, il ne s'agit pas de travailler beaucoup pour pas grand-chose mais de créer un monde du travail moins pénible, moins stressant, moins culpabilisant. C'est aussi une question de santé publique. Le salaire du patron ne devrait pas être 500 fois supérieur à celui de l'ouvrier. Il faudrait bien sûr revenir sur la notion de temps de travail, de la place du travail dans la vie, parler du développement personnel des salariés et de l'utilité sociale du travail.

Mais avec ce texte qui stigmatise le demandeur d'emploi, qui le désigne comme coupable de ne pas travailler et le place en position de « chômeur fainéant », responsable de sa situation...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Pas du tout : nous voulons les aider !

M. Jean Desessard.  - ...nous sommes fort éloignés de cette logique. Les demandeurs d'emplois décrits dans ce projet de loi sont des individus coupables de n'avoir pas été assez efficaces, pas assez productifs.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ne dites pas cela ! Ils ne méritent pas ça !

M. Jean Desessard.  - A vous entendre, si le chômeur ne retrouve pas d'emploi, c'est parce qu'il ne le veut pas. Ce texte nie tout simplement les difficultés de la vie et la responsabilité de notre système économique. Il faut cesser de diaboliser les chômeurs en leur faisant payer l'incapacité du marché du travail à leur fournir un emploi digne et correspondant à leurs attentes. Arrêtez d'en faire des boucs émissaires !

A défaut de se pencher sur la réforme du marché du travail, ce projet de loi ose demander aux demandeurs d'emplois de revoir à la baisse leurs ambitions de travailleurs, la décence de leurs salaires, la dignité de leurs conditions de vies ! Et en leur demandant de s'adapter toujours plus, d'accepter toujours moins, vous vous apprêtez à faire d'eux une sorte d'armée de réserve qui servira de main-d'oeuvre d'ajustement à un marché de l'emploi toujours plus flexible et toujours moins sûr ! Ça n'est pas là ma conception d'un accompagnement efficace vers l'emploi. Sanctionner n'est pas aider ; c'est faire pression, précariser, exclure l'individu du système : c'est donner l'illusion de l'action.

Vous déchargez l'État de sa mission d'élever le niveau de formation des citoyens. C'est pourquoi nous proposerons de supprimer les sanctions. Plutôt que punir, il serait plus juste de mieux former les chômeurs, d'aider les plus éloignés de l'emploi et ceux qui subissent la désindustrialisation !

M. Paul Blanc.  - Vous n'êtes pas avare d'injonctions : « il faut que... » !

M. Jean Desessard.  - Le critère de distance raisonnable va créer des situations absurdes. Prenez le cas d'un chômeur de Roubaix à qui l'ANPE, ou plutôt le nouveau « machin » que vous obtenez par fusion (sourires), propose d'aller faire le ménage à la gare de Lille, donc à moins de trente kilomètres, mais à 4 heures du matin. A cette heure, l'embauché n'aurait pas d'autre choix que la voiture pour se rendre au travail : comment fera-t-il s'il n'en possède pas, ou bien encore avec le prix de l'essence ? S'il refuse cette offre « raisonnable », demanderez-vous qu'on le sanctionne ? Qu'on le radie ? Il y a 30 000 chômeurs dans le bassin lillois, dont 21 000 inscrits à l'ANPE : comment comptez-vous que l'ANPE détecte toutes les offres « raisonnables » ?

Le système français de protection contre le risque d'une perte involontaire d'emploi a été conçu à la fin des années 1950 par le général de Gaulle et les partenaires sociaux, qui ont choisi un régime assurantiel pour bien marquer que le salarié subissait la perte d'emploi tout en dépendant du marché du travail. C'est cette logique assurantielle que vous mettez en cause !

Les sanctions n'ont pas d'autre but que de radier le plus grand nombre possible de chômeurs des statistiques du chômage, mais ces chômeurs devront bénéficier de l'aide sociale et le problème restera entier : vous allez radier, mais la pauvreté augmentera ! Ce texte contraindra deux millions de chômeurs à plus de précarité. C'est donc au nom d'un système plus solidaire que nous combattrons ce texte ! (Applaudissements à gauche)

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Je remercie M. le rapporteur pour son travail important, en particulier sur la nature juridique du PPAE et sur les précautions à prendre lors de sa signature. Merci également à Mme Debré pour son soutien dynamique et ses suggestions en matière de formation professionnelle. Merci encore à M. Seillie d'avoir rappelé la filiation de cette réforme avec le Préambule de 1946, que chacun devrait avoir à l'esprit tant les principes qu'il énonce nous inspirent ! (Exclamations à gauche)

M. Jean Desessard.  - Vous remerciez à droite et au centre, mais nous, vous nous radiez !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Si vous êtes contre le Préambule de 1946, cela pourrait vous arriver !

Mme Debré a utilement rappelé les objectifs de la fusion de l'ANPE et des Assedic : le guichet unique vise d'abord l'amélioration du service aux usagers, laquelle commence à se vérifier sur le terrain car nous n'attendons pas l'an prochain pour agir.

M. Seillier a rappelé, avec la grande expérience qu'on lui connait, les enjeux de la formation : oui, ils sont essentiels, mais les précédents gouvernements n'ont pas eu le courage politique de réformer le système de formation professionnelle.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Eh oui !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Ce gouvernement s'y attèle, après que tant d'autres y ont renoncé !

Mme Isabelle Debré.  - Il était temps !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Aussi je ne doute pas que vous nous apportiez votre soutien ! Nous allons mettre fin aux dépenses qui ne vont pas directement à la formation de ceux qui en ont besoin : les demandeurs d'emploi, les séniors, les employés des TPE. Un groupe de travail a été confié à M. Pierre Ferracci, une conférence quadripartite tiendra sa première réunion le 10 juillet, sous la présidence de Mme Lagarde : la réforme est lancée !

Mme Isabelle Debré et M Jean-Pierre Fourcade.  - Très bien !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Les créations d'entreprises par des chômeurs sont encouragées : elles sont déjà très nombreuses, représentant un tiers des 320 000 créations enregistrées en 2007. La loi de modernisation de l'économie améliorera encore l'accompagnement des créateurs d'entreprise.

Madame Le Texier, merci pour votre intervention toute de pondération, de mesure et d'équilibre, d'où la caricature était bannie ! (Sourires à droite) Je ne sais pas qui, de Descartes ou de Molière, vous a le plus inspirée, mais j'ai bien reconnu dans votre discours la marque de Karl Marx et d'idées du XIXe siècle sur les rapports de force ! (Rires à droite, exclamations à gauche) Vous m'avez cependant choqué en présentant les métiers du bâtiment comme de second ordre et sans avenir : le secteur emploie 1,8 million de nos compatriotes ! Les autres métiers en tension sont la banque, l'assurance, l'informatique, les services à la personne ? Cessez de caricaturer ! (« Très bien ! » à droite)

Vous citez Carole Tuchszirer, cette chercheuse n'est pas réputée pour son ouverture et je préfère regarder du côté de la réalité concrète, sur le terrain. Ce qu'on y voit, c'est l'amélioration du service public de l'emploi, l'accompagnement des séniors, le meilleur suivi, l'aide à la mobilité professionnelle. Nous avons transposé des directives sur le marché du travail et le service public de l'emploi, je regrette que vous n'ayez pas voté ces textes !

Mme Raymonde Le Texier.  - Vous avez repoussé nos amendements !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Notre dispositif est équilibré : chaque demandeur d'emploi a droit à un accompagnement personnalisé, mais il y aura des contrôles sur les fraudes, quand bien même la fraude est très minoritaire -car rien ne nous autorise à dire : « Circulez, il n'y a rien à voir ! ».

Vous paraissez faire peu de cas des expériences à l'étranger : il ne se serait donc rien passé en Suède, au Danemark, en Belgique, en Italie, en Espagne ? Avec vous, ce n'est pas « L'élégance du hérisson », mais la politique de l'autruche ! (Rires à droite, exclamations sur les bancs socialistes) Votre attitude est des plus conservatrice, nous essayons, de notre côté, de mieux adapter le service public de l'emploi !

Monsieur Desessard...

M. Jean Desessard.  - Vous pouvez me ranger directement au XVIIe siècle, car c'est bien le registre de votre politique !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Si, au moins, cela pouvait vous apporter quelques Lumières ! (Rires à droite)

J'entends votre discours sur les choix de société. Oui, il faut mieux encadrer les stocks options, la loi Tepa s'y est employée. Oui, il faut encadrer aussi les « parachutes dorés », M. Bertrand y travaille, alors que rien n'a été fait jusqu'alors.

Comment évalue-t-on le nombre d'offres d'emplois non pourvues à environ 500 000 ? Par des bureaux test de l'ANPE et des Assedic et par des contrôles sur les offres d'emplois : leurs chiffres concordent avec une évaluation nationale datant de quelques années.

Je suis d'accord avec les grands principes, pour plus de solidarité entre le nord et le sud, l'ouest et l'est, pour le travail pour tous, pour le développement. Mais ces principes me paraissent éloignés du terrain ! La réponse n'est pas dans l'assistance seulement ! Nous devons veiller à l'équilibre entre les droits et les devoirs, ou bien nous courons le risque collectif de voir la majorité de nos compatriotes, qui font un effort, rejeter des dispositions qui leur paraîtront injustes parce que leurs propres efforts ne seront pas reconnus ! Alors oui, nous devons reconnaître ces efforts et lutter contre les abus, quand bien même une infime minorité abuserait ! (Applaudissements à droite)

Madame David, vous rappelez que l'objectif du plein emploi pour 2012 coïncide avec le mandat présidentiel : c'est bien la durée sur laquelle nous pouvions nous engager. Vous dites qu'il y a eu 300 000 créations d'emplois l'an passé, il y en a eu 380 000, selon l'Insee.

Vous avez raison, Madame David, d'évoquer les comparaisons internationales : l'Allemagne a effectivement mis en place un système plus dur et pour éviter les déviations qu'il comporte, nous avons fait le choix d'une organisation plus équilibrée...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Très bien.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - ...plus proche des modèles suédois, norvégien, danois.

Vous vous inquiétez des offres fictives : il est vrai que le service public de l'emploi devra être vigilant. Quant à la qualité des emplois, nous n'échangerons pas une amélioration des chiffres contre une hausse de la précarité. Deux indicateurs nous montrent qu'il n'en est rien : le nombre des CDD n'a pas monté en flèche ces derniers mois, ni le recours à l'intérim, tandis que la situation de l'emploi s'améliorait. Madame David, John Morley rappelle finalement un principe de bon sens : rien n'est pire que d'être sans emploi.

Je remercie Mme Dini pour son soutien. Oui, la fusion courageuse ouvre beaucoup de perspectives. En contrepartie d'un financement de 1,5 milliard d'euros, on attend légitimement des demandeurs qu'ils recherchent activement du travail.

Notre ambition est simple : mieux accompagner les demandeurs, mieux contrôler ceux qui profitent du système. (Applaudissements au centre et à droite)

La discussion générale est close.

Question préalable

M. le président.  - Motion n°4, présentée par Mme David et les membres du groupe CRC.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif aux droits et aux devoirs des demandeurs d'emploi (n° 390, 2007-2008) (urgence déclarée).

M. Guy Fischer.  - Ce projet de loi correspond pleinement à votre volonté de modeler une nouvelle société et de passer d'un État social à un État libéral et pénal.

Depuis un an, les remises en cause des droits des salariés se succèdent sans trêve : cinq textes, dont le dernier, à la mi-juillet, en pleine session extraordinaire, traitera de la démocratie sociale...

M. Nicolas About, président de la commission.  - C'est important.

M. Guy Fischer.  - ...et du temps de travail. La discussion ne prendra sûrement pas moins de deux semaines. Il y a eu avant cela la recodification, une véritable « histoire des droits amoindris ». Vous avez manqué à vos engagements, compliqué encore le code -il a doublé de volume- et amoindri la protection des salariés. Ensuite, ce fut la privatisation rampante du service public de l'emploi, avec la fusion. Vos déclarations de bonnes intentions ont été contredites par le contenu même du texte de loi. Demain, les demandeurs auront en face d'eux un agent de placement et de contrôle, qui tout à la fois inscrira, cherchera et radiera ! Ce que les salariés retiendront de ce projet de loi, c'est qu'il a été un outil supplémentaire dans la réduction du coût du travail et dans la réduction de leurs droits, mais aussi dans la précarisation croissante. Nous verrons les conclusions du rapport Seillier sur la pauvreté et la précarité, mais je sais bien que la décennie a été marquée par l'explosion de la précarité !

Le quatrième texte, celui d'aujourd'hui, vous inflige un très mauvais point en matière de dialogue social : vous avez décidé unilatéralement de passer outre l'avis des partenaires sociaux. Le cinquième texte viendra en discussion pendant la session extraordinaire. Vous mettrez fin aux 35 heures, préférant visiblement la semaine de 65 heures, comme vos amis libéraux européens. C'est un recul historique qui nous ramène avant 1936 !

Ces réformes ont été voulues par M. Sarkozy, mises en scène par M. Fillon, promues par M. Xavier Bertrand et par vous. Elles sont lourdes de conséquences et vos 4,5 millions d'euros de campagne publicitaire ne convaincront pas les Français que leur pouvoir d'achat a augmenté. L'outre-atlantisme du Président de la République l'incite à chercher son modèle social aux États-Unis : licenciement facile et immédiat, aides sociales limitées, etc. Jeudi dernier, les propos de M. Serge Dassault en commission des finances étaient éloquents : le problème serait que l'assistance et les aides diverses aux chômeurs sont trop élevées. Et d'ajouter, avec sa pondération coutumière : « on réduirait carrément les aides aux chômeurs, ce serait quand même plus efficace si on veut les faire travailler que de vouloir donner de l'argent sur les deniers de l'État ». Quant aux jeunes, il propose de les mettre en apprentissage dès 14 ans.

M. Nicolas About, président de la commission.  - C'était pour vous donner l'occasion de parler de lui.

M. Guy Fischer.  - Nous connaissons le sens de la mesure de M. Dassault. Lors de l'examen du projet de loi relatif à la modernisation du marché du travail...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Je me souviens de ses échanges avec M. Muzeau !

M. Guy Fischer.  - ...il avait déclaré que le licenciement ne devrait pas être encadré et prôné une généralisation des contrats les plus précaires, contrats de portages et de missions. Propos excessifs qui n'engagent que celui qui les tient ? Hélas, je crois qu'il s'agit là de la traduction, haut et fort, de ce que nombre de parlementaires UMP pensent tout bas.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Non !

M. Paul Blanc.  - Pas de procès d'intention ! (Rires)

M. Guy Fischer.  - Ce projet de loi repose sur la conviction qu'un chômeur trouverait plus facilement un emploi si on limitait et ses droits et ses indemnisations.

Dans le Rhône, je suis en opposition sur cette question avec M. Mercier. Je l'accuse de faire la « chasse aux pauvres »,

Mme Isabelle Debré.  - Il n'est pas là pour se défendre.

M. Guy Fischer.  - Le nombre de titulaires de droits sociaux diminue, bien sûr, puisqu'il fait tout pour.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Restez modéré.

Mme Isabelle Debré.  - Calmez-vous.

M. Jean Desessard.  - Continuez ! Ne vous laissez pas abattre !

M. Guy Fischer.  - Je déplore le déni de démocratie sociale qui a prévalu à l'élaboration de ce texte : aucune des cinq organisations syndicales représentatives des salariés n'a voulu parapher votre projet de loi. Toutes, de la CFE-CGC à la CGT, vous ont fait part de leur mécontentement et dénoncent un texte d'affichage, de stigmatisation et de culpabilisation, introduisant des dispositions qui risquent de porter la suspicion sur tous les chômeurs.

Un collectif de syndicats et d'associations a fait savoir qu'il s'opposait à ce projet de loi qui rend les chômeurs « responsables de leur situation ». Je remercie M. Leclerc de le signaler dans son rapport.

Je m'inscris en faux contre l'idée selon laquelle le Gouvernement devait intervenir parce qu'à deux reprises, les organisations syndicales ont refusé de négocier. Les organisations syndicales le nient catégoriquement. Quant à l'accord national interprofessionnel, vous reprochez aujourd'hui aux partenaires sociaux d'avoir écarté de la discussion une disposition qui, si elle avait été introduite, aurait hypothéqué la signature de l'accord... que vous vous réjouissez par ailleurs d'avoir obtenu ! Les partenaires s'étaient accordés pour discuter de l'offre raisonnable d'emploi en même temps que de la convention d'assurance chômage, soit fin 2008 !

Face à ce « refus de négocier », votre gouvernement a pris ses responsabilités, dites-vous. En fera-t-il de même pour la négociation sur la pénibilité, bloquée par le patronat ? Nous vous verrons à l'oeuvre.

La nouvelle institution résultant de la fusion ANPE-Assedic aura pour mission de garantir les droits et poser les devoirs des demandeurs d'emploi ; elle ne verra le jour qu'au début de l'année prochaine.

Il y a donc une grande incohérence à proposer maintenant ce texte, qui aurait mérité d'être discuté avec les partenaires sociaux, et singulièrement les organisations syndicales. Vous préférez nous soumettre un texte qui contient de nombreux devoirs et des droits presque insignifiants. Le recul est sans précédent. Vous aggravez encore la politique d'écrasement des salaires en instituant un dispositif qui, s'ajoutant à l'intérim et au temps partiel, poussera inévitablement davantage encore à la baisse. Le déclassement professionnel deviendra monnaie courante, et la condition sociale des salariées sera aspirée vers le bas et l'on verra se multiplier le nombre des travailleurs pauvres.

Que devient la responsabilité sociale de l'employeur, qui avait pourtant, depuis quelques années, émergé dans le débat ? La Commission européenne la définit comme l'intégration volontaire par l'entreprise de préoccupations sociales et environnementales, une charte de bonne conduite a même été édictée et des sociétés ont été chargées d'évaluer le respect des engagements pris. Mais les entreprises, déjà résolument engagées dans des politiques de réduction de la masse salariale qui pèsent sur leurs sous-traitants, tandis que les crédits de la formation professionnelle restent inemployés et que les stagiaires deviennent légion, font passer tout cela à la trappe. Et le silence du Medef est assourdissant. Pourquoi les entreprises seraient-elles vertueuses quand le Gouvernement lui-même manque à ses obligations ? Ainsi de la réforme du FCAATA (Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante), dont la mesure phare sera de limiter les contributions patronales et de piller la branche AT-MP !

On ne peut pas compter sur une simple charte, aussi pleine de bonnes intentions soit-elle, pour protéger les salariés. C'est sur la loi, cette arme du faible contre les puissants, qu'il faut s'appuyer.

M. Jean Desessard.  - Bien sûr ! C'est le b-a-ba du marxisme !

M. Guy Fischer.  - Où sont les mesures que vous proposez ? Où est-il question, dans ce texte, de la responsabilité de l'entreprise ? Non pas que nous soyons de fervents partisans du paternalisme étouffant du patronat d'antan -je l'ai connu, avec ses cités ouvrières, ses écoles, ses églises- mais nous regrettons que soit révolu le temps où l'entreprise était responsable de ses salariés avant et après leur temps d'activité. L'entreprise de casse ne date hélas pas d'hier, car j'ai souvenir que c'est un certain François Fillon, alors ministre du travail, qui a privé les salariés retraités de la participation des employeurs à leur mutuelle complémentaire d'entreprise. Il devient impératif de renouer avec un principe de reconnaissance du salarié et d'engager l'entreprise à tenir son rôle dans la société.

Déclarer l'urgence sur ce texte vous est bien utile : elle vous permet de contourner ce débat légitime. Quels seront les perdants ? Les chômeurs, les précaires, les titulaires de minima, dont vous n'hésitez pas à mettre la vie en bascule. J'invite donc mes collègues à voter cette question préalable, qui permettra au Gouvernement de retrouver le chemin du dialogue social. (Applaudissements à gauche)

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Ne perdons pas de vue que ce texte s'inscrit dans une politique dynamique de l'emploi, fondée sur l'accompagnement du demandeur d'emploi, dans le cadre d'une démarche personnalisée destinée à faciliter le retour à l'emploi dans les meilleurs délais. Car le facteur temps est essentiel : c'est avec le temps que la fatalité du chômage s'installe.

Vous prétendez nous donner des leçons en nous accusant d'arrogance envers des gens dont nous ignorerions les difficultés ? Si tel était le sens de notre action politique, comment expliquer que les électeurs aient la sottise de nous reconduire, échéance après échéance ?

Mme Raymonde Le Texier.  - Nous aussi sommes réélus !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Ce texte repose sur les performances dont saura faire preuve le nouvel opérateur. Les agents référents constituent le socle de la réussite. Ils témoignent que l'engagement est réciproque.

Le Préambule de 1946 institue des droits, mais aussi des devoirs, qui doivent permettre à chacun de s'insérer dans la société. Vous aurez compris que la commission est défavorable à cette motion. (Applaudissements à droite)

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Si le débat sur ce texte, monsieur Fischer, doit aboutir rapidement, c'est qu'il répond à un engagement du Président de la République et fonde le contrat social avec les électeurs.

Nous avons laissé le temps au dialogue avec les partenaires sociaux. Saisis du dossier dès longtemps, ils ont reçu, dès juin 2007, un courrier du Premier ministre. La réunion du 6 mai a hélas ! confirmé l'échec des négociations. Et je comprends cet échec. Car on ne peut pas tout demander au dialogue social. A chacun sa responsabilité : la démocratie sociale est celle des partenaires sociaux, la démocratie politique est la nôtre.

Sur la pénibilité, qui vous tient à coeur, je puis vous annoncer une bonne nouvelle. Un syndicat qui vous est cher, la CGT, vient de saluer les méthodes du Gouvernement, qui a su relancer le sujet -preuve que le volontarisme peut porter ses fruits. (M. Paul Blanc applaudit)

La motion n°4 n'est pas adoptée.

Discussion des articles

Articles additionnels

M. le président. - Amendement n°43, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé.

Après le troisième alinéa de l'article L. 3253-14 du code du travail, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« L'institution en charge de la gestion de garantie contre le risque de non-paiement est composée de membre des organisations représentatives des salariés et des employeurs.

« Les conditions d'application de cette disposition sont définies par un décret pris en Conseil d'État. »

Mme Annie David.  - Je présenterai en même temps l'amendement n°44 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°44 rectifié, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement s'engage à déposer sur le Bureau du Sénat, au plus tard le 1er octobre 2008, un rapport sur la situation financière de l'Association de garantie des salaires mentionnée à l'article L. 3253-14 du code du travail, ainsi que sur le bien-fondé d'une augmentation des cotisations constituant son financement.

Mme Annie David.  - Créée en application de la loi du 27 décembre 1973, l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) a pour mission de garantir les créances en cas de redressement ou de liquidation judiciaire des entreprises. Organisme patronal, elle tire ses ressources des cotisations patronales assises sur les rémunérations servant de base au calcul des contributions d'assurance chômage. Le taux de cotisation des employeurs est défini par son conseil d'administration.

Or, depuis 1973, celui-ci reste inchangé dans sa composition, et les organisations représentatives des salariés n'ont toujours pas accès aux postes de direction de cette association. Elle pourtant théoriquement partie à une délégation de mission consentie par l'Unedic. On comprend mal, dès lors, pourquoi les règles du paritarisme qui fondent l'Unedic ne s'appliqueraient pas à une association assumant une partie de ses missions.

Le sujet est d'autant plus grave que l'AGS est en crise et connait des difficultés financières importantes, qui s'expliquent par la forte réduction du taux de cotisation, passé de 0,45 % en septembre 2003 à 0,15 % en décembre 2007. Notre amendement n°44 rectifié prévoit donc un rapport sur la situation financière de l'AGS, tandis que l'amendement n°43 vise à mettre fin à une anomalie en permettant aux salariés d'être représentés au sein de l'AGS, conformément au préambule de la Constitution de 1946 qui prévoit que les travailleurs participent, par le biais de la représentation, à la démocratie sociale de notre pays.

M. Dominique Leclerc.  - Le budget de l'AGS repose sur des cotisations patronales. On ne voit pas pourquoi son fonctionnement devrait être paritaire. Défavorable, donc, à l'amendement n°43. Même avis sur le n°44. La situation de l'AGF est saine, on ne voit pas pourquoi il faudrait déposer un rapport.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Défavorable à ces deux amendements : l'assurance obligatoire à laquelle il fait référence est sans rapport avec l'objet de ce texte. Quant à la gestion paritaire, indépendamment de toute considération sur son bien-fondé, elle remettrait en cause l'équilibre d'une association qui fonctionne bien.

L'amendement n°43 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°44 rectifié.

Article premier

I. - L'article L. 5411-6 du code du travail est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 5411-6. - Le demandeur d'emploi immédiatement disponible pour occuper un emploi est orienté et accompagné dans sa recherche d'emploi par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1. Il est tenu de participer à la définition du projet personnalisé d'accès à l'emploi mentionné à l'article L. 5411-6-1, d'accomplir des actes positifs et répétés de recherche d'emploi et d'accepter les offres raisonnables d'emploi mentionnées à l'article L. 5411-6-2. »

II. - Après l'article L. 5411-6 du même code sont insérés quatre articles ainsi rédigés :

« Art. L. 5411-6-1. - Un projet personnalisé d'accès à l'emploi est élaboré conjointement par le demandeur d'emploi et l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1.

« Ce projet précise la nature et les caractéristiques des emplois recherchés, en tenant compte de la formation du demandeur d'emploi, de ses qualifications, de son expérience professionnelle, de sa situation personnelle et familiale ainsi que de la situation du marché du travail local. Il précise également la zone géographique privilégiée pour la recherche d'emploi et le niveau de salaire attendu.

« Le projet personnalisé d'accès à l'emploi retrace les actions que l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 s'engage à mettre en oeuvre dans le cadre du service public de l'emploi, notamment en matière d'accompagnement et, le cas échéant, de formation et d'aide à la mobilité.

« Art. L. 5411-6-2. - Les caractéristiques des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le salaire attendu, tels que mentionnés dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi, sont constitutifs de l'offre raisonnable d'emploi.

« Art. L. 5411-6-3. - Le projet personnalisé d'accès à l'emploi est actualisé périodiquement. Lors de cette actualisation, les éléments constitutifs de l'offre raisonnable d'emploi sont révisés notamment pour accroître les perspectives de retour à l'emploi.

« Lorsque le demandeur d'emploi est inscrit depuis plus de trois mois, est considérée comme raisonnable l'offre d'un emploi compatible avec ses qualifications et rémunéré à au moins 95 % du salaire antérieurement perçu. Ce taux est porté à 85 % après six mois d'inscription. Après un an d'inscription, est considérée comme raisonnable l'offre d'un emploi rémunéré au moins à hauteur du revenu de remplacement prévu à l'article L. 5421-1.

« Lorsque le demandeur d'emploi est inscrit depuis plus de six mois, est considérée comme raisonnable une offre d'emploi entraînant un temps de trajet en transport en commun, entre le domicile et le lieu de travail, d'une durée maximale d'une heure ou une distance à parcourir d'au plus trente kilomètres.

« Art. L. 5411-6-4. - Les dispositions de la présente section et du 2° de l'article L. 5412-1 ne peuvent obliger un demandeur d'emploi à accepter un niveau de salaire inférieur au salaire normalement pratiqué dans la région et dans la profession et s'appliquent sous réserve des autres dispositions légales et des stipulations conventionnelles en vigueur, notamment celles relatives au salaire minimum de croissance. »

Mme Annie David.  - Conforme aux desiderata du Président de la République, cet article énonce des devoirs pour les demandeurs d'emplois mais reste muet sur leurs droits... La notion d'offre valable d'emploi, reconnue par l'OIT, méritait d'être précisée en droit français mais vous le faites avec rigidité et dogmatisme, et votre offre raisonnable d'emploi est décriée par tous. M. Chérèque juge ridicule d'imposer à tous les chômeurs une règle identique ; Mme Simon, représentante de la CFTC, y voit une contradiction avec l'objectif d'accompagnement des chômeurs et rappelle que les partenaires sociaux demandent que l'offre valable d'emploi soit négociée dans le cadre de l'assurance chômage et définie contractuellement avec le service public de l'emploi.

Quant à l'élaboration du PPAE, chacun sait que le demandeur d'emploi ne sera pas sur un pied d'égalité avec l'institution ! L'offre raisonnable d'emploi n'est qu'un moyen de culpabiliser encore les demandeurs d'emplois et de porter sur eux la suspicion.

Pour vous, il serait raisonnable de contraindre un chômeur à travailler pour 447,91 euros ! La dégressivité des droits n'est pas la bonne solution, vous le savez. Rémunérer à hauteur des minima sociaux un acte de travail nécessitant la force, le savoir, l'implication et la volonté du salarié et créant de la plus-value, vous semble raisonnable ? « Raisonnable : qui agit conformément au bon sens », dit Larousse, qui définit la raison comme ce qui est « conforme à la justice et à l'équité ». Est-ce reconnaître sa pleine valeur au travail que de le brader contre un salaire indécent ? A un emploi « compatible » nous préférons la référence à un emploi « correspondant » -peut-être Mme Debré nous suivra-t-elle ?

Vous ne cherchez en réalité qu'à diminuer les aides sociales en attaquant les bénéficiaires. Les entreprises du CAC 40 pourront continuer leur politique de casse, guidée par la recherche de la rentabilité à deux chiffres. Ce texte ignore la responsabilité sociale des entreprises, mais cela ne nous surprend guère...

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit la seconde phrase du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 5411-6 du code du travail :

Il participe à la définition du projet personnalisé d'accès à l'emploi mentionné à l'article L. 5411-6-1.

M. Guy Fischer.  - Cet article fait de la signature et de la réactualisation du PPAE une obligation, et donc un préalable à l'ouverture et au maintien des droits. Vous faites de ce projet personnalisé un outil de régulation du nombre de demandeurs d'emploi indemnisés, car le refus de participer à sa rédaction entraînera la radiation. C'est nier sa raison d'être : si le projet est réellement personnalisé, le demandeur d'emploi doit pouvoir rencontrer son conseiller, faire valoir ses droits et ses exigences et, s'il y a accord, signer le PPAE. On peut toutefois imaginer qu'un demandeur d'emploi ne souhaite pas s'engager dans ce processus. Ainsi, les jeunes cadres et diplômés de grandes écoles de commerce comptent davantage sur leur réseau de relations que sur le service public de l'emploi. De jeunes docteurs, qui sont à bac+9 mais ne bénéficient pas de ce type de réseau, peinent d'ailleurs à trouver un emploi correctement rémunéré...

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cet amendement est à l'opposé du projet de loi et de la position de la commission, qui propose de rendre obligatoire la finalisation d'un PPAE. Avis défavorable.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Défavorable. Votre amendement reviendrait à supprimer toute obligation de chercher un emploi ! Sans doute va-t-il au-delà de votre pensée...

M. Guy Fischer.  - Cela n'a pas traversé mon esprit !

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

À la fin du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 5411-6 du code du travail, supprimer les mots :

et d'accepter les offres raisonnables d'emploi mentionnées à l'article L. 5411-6-2.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Cet article illustre toute l'ambiguïté de votre projet de loi. Qu'un demandeur d'emploi soit orienté et accompagné dans sa recherche d'emploi, bien ; qu'il soit tenu de participer à la définition du PPAE, soit. Cela peut être pour lui l'occasion de demander une action d'insertion ou de formation, alors que l'Unedic n'utilise que la moitié de son budget de formation, et que seuls 5 % des demandeurs d'emploi inscrits en bénéficient. Cela peut être aussi le moment de réaliser un bilan de compétences et d'infléchir son destin.

Que le demandeur d'emploi doive accomplir des actes positifs et répétés de recherche d'emploi, c'est de bon sens. A condition qu'il y ait des emplois disponibles dans sa qualification, dans le type de contrat souhaité. Ce serait faire un procès d'intention, à ce stade, que de voir dans ce texte des intentions cachées. Tout reste encore question de moyens et d'interprétation.

Un bémol, toutefois. Le rapport Boulanger précise que « la recherche active d'emploi est la contrepartie de l'indemnisation et du service rendu par l'opérateur ». C'est une regrettable confusion : l'indemnisation est un droit acquis par le versement de cotisations !

C'est avec l'offre raisonnable d'emploi que vos intentions apparaissent au grand jour. Les droits du demandeur d'emploi sont réduits, contrôlés, et supprimés s'il refuse plus de deux fois d'accepter n'importe quel emploi. La négociation d'une nouvelle convention d'assurance chômage menace tout le dispositif actuel. Tout se tient dans votre politique : volonté de réduire les allocations chômage pour consacrer les excédents de l'Unedic au financement des retraites ; traitement statistique du chômage, en orientant les chômeurs vers les secteurs en tension.

Tout le monde sait que si le bâtiment et la restauration sont en tension, c'est à cause des horaires démentiels, des conditions de travail et des faibles perspectives d'évolution. Les offres d'emploi dans ces secteurs représentent 20 % du total, ce qui est démesuré par rapport à leur poids économique. Le Gouvernement a-t-il l'intention de transformer les chômeurs en travailleurs pauvres ? Il ne peut, ni politiquement, ni socialement, afficher un objectif aussi... déraisonnable.

Beaucoup de demandeurs d'emploi seront contraints d'accepter ce qu'on leur propose pour des raisons financières ; mais on ne peut s'engager dans un emploi, même non qualifié, s'il est dénué de sens. « Faire l'impasse sur la dimension qualitative du travail, c'est revenir à une conception servile de celui-ci » a écrit l'économiste François Eymard-Duvernay.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - L'offre raisonnable d'emploi est le coeur du dispositif ; elle sera définie bien plus précisément que l'offre valable et sera élaborée conjointement par le demandeur d'emploi et l'opérateur. Avis défavorable.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - je remercie Mme Jarraud-Vergnolle de la présentation équilibrée qu'elle a faite du texte. Mais son amendement est contraire à la philosophie du projet de loi.

L'amendement n°18 n'est pas adopté.

M. Jean Desessard.  - On ne compte que 2 % non pas de véritables fraudeurs aux Assedic, je veux dire ceux qui font de fausses déclarations et que nous sommes tous d'accord pour sanctionner, mais 2 % de personnes qui se laissent aller dans le système, vivent de leur allocation et refusent tout ce qu'on leur propose. C'est pour eux que le texte est construit. On nous dit par ailleurs que 400 000 emplois ne sont pas pourvus. Quelqu'un peut-il m'expliquer comment ils le seront par les 2 % visés par le projet de loi ? Je n'arrive pas à résoudre cette équation !

L'amendement n°5 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer le II de cet article.

Mme Annie David.  - Le paragraphe Il consacre l'offre raisonnable d'emploi, stigmatise les chômeurs, et suppose -ce qui est insupportable- qu'il suffit de les menacer d'une baisse de leur indemnisation pour qu'enfin ils se décident à travailler.

Je regrette que le Gouvernement ait oublié de prendre connaissance du rapport Sécurisation des parcours professionnels présenté en 2007 par Mme Arnoult-Brill au nom du Conseil économique et social, un document qui prend le parfait contre-pied du projet de loi, notamment pour ce qui concerne la dégressivité des droits des demandeurs d'emploi. Selon ce rapport, il faudrait augmenter l'indemnisation des demandeurs d'emploi pour leur permettre de vivre en toute dignité. Nous en sommes loin. « Le Conseil considère que la question des ressources, qui ne peut être traitée indépendamment de son coût, constitue un élément essentiel de la sécurisation des parcours professionnel. Le maintien pendant une durée adaptée d'un niveau de ressources proche du salaire antérieur peut être de nature à accroître l'acceptabilité par le salarié d'une mobilité professionnelle et faciliter sa recherche d'emploi ». Voilà ce qu'on peut lire dans le rapport du CES, qui a été adopté à l'unanimité moins neuf abstentions.

S'inspirer de ce document aurait permis d'envoyer un signal fort aux partenaires sociaux, mais le Gouvernement n'est guère friand, ces temps-ci, de dialogue social. Le rapport du CES souligne aussi la nécessité de changer la représentation que les Français ont des demandeurs d'emplois. Encore faudrait-il que le Gouvernement et sa majorité présidentielle renoncent à des expressions assassines telles que « remettre la France au travail »... Je regrette par exemple que ni le rapport de la commission, ni le Gouvernement ne parlent de « salariés privés d'emploi », ce que sont, pour l'essentiel, les demandeurs d'emplois. Ces femmes et ces hommes ne se complaisent pas dans l'assistanat, ils demandent à travailler contre une juste rémunération -droit fondamental que le système libéral leur dénie chaque jour. Or, en l'état, le texte fait peser sur eux une présomption de non recherche d'emploi.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - La seule ambition de ce texte, c'est de favoriser le retour vers l'emploi le plus rapide possible des personnes qui ont la malchance d'être privées d'emploi. Supprimer le paragraphe II va à l'encontre de la recherche d'une plus grande efficacité. Les contrats d'objectifs de l'ANPE prennent déjà en compte cette démarche.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Je crains que l'amendement n'aille au-delà de ce qui est souhaité par ses auteurs : il supprimerait jusqu'à l'élaboration conjointe du projet professionnel. Ne serait-ce que pour cette raison : défavorable.

S'agissant des sanctions, nous visons les 5 % de situations abusives, en voici des exemples : un informaticien travaillant dans une PME qui refuse un emploi à la hot line d'une grande entreprise ; ou une personne travaillant à l'accueil d'une clinique, qui refuse un poste à l'accueil d'un laboratoire ; ou encore quelqu'un qui refuse un emploi similaire au motif qu'il est situé à vingt kilomètres de son domicile.

M. Jean Desessard.  - Je remercie M. le ministre de sa réponse... partielle. Le demandeur d'emploi n'est-il pas le mieux placé pour savoir ce qui lui convient ? On gagne plus quand on travaille que quand on ne travaille pas : si on refuse une offre, c'est généralement qu'on a de bonnes raisons de le faire.

L'essentiel, du point de vue économique, n'est-il pas que les offres soient pourvues ? Celles que vous avez évoquées ont peut-être fait le bonheur de trois autres demandeurs d'emploi ! Vous auriez dû poursuivre jusque là votre démonstration...

L'amendement n°19 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

À la fin du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, remplacer les mots :

l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1

par les mots :

le service public de l'emploi

Mme Raymonde Le Texier.  - Dans son désir de mettre en place le nouveau dispositif avant même la fin des négociations sur l'assurance chômage, le Gouvernement confie une mission à une institution dont l'existence est purement virtuelle !

L'instance provisoire chargée de la mettre en place n'a pas dépassé la phase des concertations. Il serait d'ailleurs intéressant que le ministre en tienne le Parlement informé.

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission.

Compléter le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail par les mots :

ou, en liaison avec elle, par tout organisme participant au service public de l'emploi

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - L'expression « service public de l'emploi » est trop imprécise, car trop vaste. Ainsi, une direction départementale de l'emploi participe à ce service public mais n'a pas vocation à établir le projet personnalisé.

Le code du travail confie explicitement à l'ANPE le soin d'établir ce projet, mais tout organisme participant au service de l'emploi peut le faire, en liaison avec elle. Le cas échéant, il pourrait s'agir d'une personne morale de droit privé.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Aux termes de l'amendement n°51 du Gouvernement, l'ANPE assurera cette responsabilité pendant la période intermédiaire. L'amendement n°6 est donc satisfait.

L'amendement n°6 est retiré.

L'amendement n°1 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le demandeur d'emploi peut, s'il le souhaite, se faire accompagner le jour de la signature de son projet personnalisé de retour à l'emploi, par la personne de son choix.

Mme Annie David.  - Les demandeurs d'emploi qui le souhaitent doivent pouvoir se faire assister par la personne de leur choix pour bénéficier de ses conseils et du recul dont l'intéressé lui-même peut manquer.

Nous proposons volontairement un mécanisme simple laissant toute latitude aux demandeurs, qui seraient confortés par cet amendement très équilibré.

Lorsque notre assemblée a discuté le projet de loi organisant la fusion de l'ANPE et des Assedic, nous avions proposé que les chômeurs bénéficient de nouveaux droits. Nous étions alors sans doute en avance d'un texte puisque c'est aujourd'hui que nous examinons leurs droits et devoirs...

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Vous vous inspirez des dispositions régissant l'entretien préalable au licenciement, cas de figure totalement différent puisqu'ici le demandeur d'emploi n'est pas confronté à une personne dont les intérêts divergents des siens. Pourquoi faudrait-il être assisté lorsqu'on parle à une personne chargée de vous aider ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Je comprends l'intention de Mme David. Il arrive que des demandeurs d'emploi se fassent accompagner informellement par un proche, mais je suis gêné que les agents du service public de l'emploi soient mis en accusation, ce qui me conduit à un avis défavorable.

Mme Annie David.  - L'amendement ne comporte rien de tel !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Cette idée le sous-tend.

Mme Annie David.  - Je n'ai accusé personne.

On ne se présente pas à l'entretien dans le même état d'esprit quelques semaines après avoir été licencié ou lorsque la durée même du chômage a joué son rôle dévalorisant.

Je propose simplement d'aider le demandeur à comprendre ce qui lui est proposé.

On ne peut créer sans cesse de nouveaux devoirs sans ajouter la moindre contrepartie ! Se faire accompagner par une personne est un droit légitime en toute circonstance.

M. Jean Desessard.  - Si j'ai bien compris M. le ministre, 95 % des intéressés cherchent du travail, 5 % abusent du dispositif.

En arrière-plan, la disposition proposée aborde la radiation... à terme. En effet, le PPAE a deux fonctions.

Tout d'abord, il aide le demandeur d'emploi à formuler sa demande. J'imagine qu'à cette occasion, les possibilités locales servent à l'orienter. M. le rapporteur dit qu'il a une beaucoup fréquenté les demandeurs d'emploi. Moi aussi ! J'ai notamment participé à des manifestations pour défendre leur dignité. Mais cette étape d'aide aux chômeurs, dont je me demande pourquoi on l'organise si tard, n'épuise pas le rôle du PPAE.

La seconde fonction de cet outil est la radiation. Un certain parallélisme s'impose donc entre le droit des chômeurs et le droit social dans l'entreprise : puisque la radiation est possible, pourquoi le demandeur d'emploi ne pourrait-il pas se faire assister ?

Le double rôle joué par l'agent explique pourquoi les associations de chômeurs refusaient le guichet unique.

On est là en peine contradiction : celui qui aide est en même temps celui qui sanctionne ! Vous ne voulez pas qu'une personne de son choix aide le demandeur d'emploi lors de la signature de son PPAE. Lui interdirez-vous aussi d'être défendu lors de sa radiation ?

M. Guy Fischer.  - Il s'agit de donner une possibilité, pas de la systématiser. Je pense par exemple aux imprimés de l'expérimentation du RSA : ils ne sont pas facile à comprendre et demandent réflexion !

La fusion avait aussi pour objectif d'augmenter la productivité et la rapidité exigées du personnel. Je me suis toujours élevé contre les conditions de travail aux Assedic, et notamment contre l'impossibilité de relations de qualité entre demandeurs d'emploi et personnel... Dans un amendement suivant, nous irons plus loin.

L'amendement n°21 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le demandeur d'emploi bénéficie, entre la rédaction de son projet personnalisé d'accès à l'emploi et la signature de celui-ci d'un délai de dix jours ouvrés durant lequel il bénéficie d'un droit à rétractation et peut demander à rencontrer son conseiller afin de  procéder à la rédaction d'un nouveau projet personnalisé de retour à l'emploi.

M. Guy Fischer.  - La lecture de l'exposé des motifs et du rapport donne l'impression que le Gouvernement a voulu construire une véritable relation contractuelle entre le salarié privé d'emploi et la nouvelle institution. Certains diront qu'il s'agit là d'une conséquence de l'inspiration nordique de ce projet de loi. La droite gouvernementale, après avoir recherché son inspiration en Angleterre ou en Irlande, regarde de près ce qui se passe en Suède ou au Danemark.

M. Robert Bret.  - Sauf pour les référendums.

M. Guy Fischer.  - Mais comparaison n'est pas raison. Il s'agit plutôt là d'une manifestation de l'individualisation des relations sociales et de l'interdépendance que vous provoquez, entre le droit privé général et le droit du travail qui en est une branche particulière. Depuis l'élection de M. Sarkozy à la Présidence de la République, cette théorie se développe, oubliant qu'employeurs et salariés, ou bien institutions et demandeurs d'emploi ne sont pas sur un pied d'égalité. Les salariés dépendent de l'employeur pour gagner leurs vies, les demandeurs d'emploi dépendent de l'institution pour tenter de retrouver un emploi ou de conserver les indemnités nécessaires à leur survie. Aussi le projet personnalisé, dès lors qu'il nécessite l'acceptation du demandeur d'emploi et de l'institution à travers l'agent qui la représente, requiert un caractère fondamental en droit contractuel : l'échange des volontés. Je n'imagine donc pas que vous puissiez rejeter cet amendement. Nous dénonçons ce glissement, particulièrement lorsqu'il a pour conséquence d'individualiser les relations de travail et donc de retirer à l'entreprise et à l'employeur toute responsabilité sociale. Il est insupportable que les salariés, les retraités et les demandeurs d'emplois soient contraints de subir tous les effets néfastes -et ils sont nombreux- de la relation contractuelle sans en avoir jamais un seul des avantages.

M. Jean Desessard.  - Exactement !

M. Guy Fischer.  - Notre amendement donne au demandeur d'emploi un délai de réflexion entre la rédaction de son projet personnalisé et son éventuelle acceptation. Une véritable relation contractuelle suppose un droit de rétractation.

M. Jean Desessard.  - Très bien !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - D'abord, il s'agit d'un engagement réciproque. Ensuite, le nouvel opérateur est là pour accompagner le demandeur d'emploi dans un projet personnalisé qui peut évoluer dans le temps.

Vous nous demandez ce que nous avons fait dans le passé. Le contrat de progrès État-ANPE date de 2006 et il a été demandé au nouvel opérateur de davantage cibler ses actions. Sa performance progresse mais je n'ai jamais entendu parler de « productivité ». Nous parlons de « meilleurs résultats » et c'est logique puisqu'on a demandé davantage de professionnalisation au nouvel opérateur.

Sur les moyens : nous avons la chance d'avoir un million de demandeurs d'emploi en moins et 50 % de moyens financiers en plus, l'objectif étant que chaque agent référent ait à s'occuper d'un nombre de plus en plus faible de demandeurs d'emploi. Pourquoi introduire un droit de rétractation dans cette démarche professionnelle ? Avis défavorable.

M. Jean Desessard.  - Il y a des sanctions tout de même !

Mme Annie David.  - On nous dit que ce PPAE est un engagement. C'est précisément pourquoi toutes les parties doivent signer en toute connaissance de cause et pourquoi un éventuel accompagnateur ainsi qu'un droit de rétractation sont indispensables. Le demandeur d'emploi peut s'apercevoir après réflexion ou discussion qu'il ne pourra pas respecter son projet personnalisé. Dans ce cas, il doit pouvoir retourner voir son agent référent Quand on achète une télévision ou un meuble à crédit, on a bien droit à un délai de rétractation ! Et on n'aurait pas ce droit pour une signature de PPAE qui peut amener à la radiation ?

Le rapporteur dit n'avoir jamais entendu parler de productivité. En commission, j'ai assisté à l'audition de M. Roux de Bézieux, patron de l'Unedic : il nous a parlé de l'amélioration de la productivité dans son institution...

Cet engagement du demandeur d'emploi sans accompagnement et sans rétractation possibles, est inquiétant.

M. Jean Desessard.  - Un des points forts du Président de la République, c'est la culture du résultat, y compris pour les ministres, et aussi pour le Sénat qui doit siéger jusqu'à fin juillet afin de produire plus. Je serais donc étonné s'il n'appliquait pas aussi cet impératif aux Assedic pour lesquels il aura des critères objectifs : combien de personnes avez-vous mis au travail, combien de chômeurs avez-vous sanctionnés ?

Monsieur le rapporteur, pourquoi refusez-vous cette commission de recours ? On ne sait même pas qui décidera la sanction : celui qui aura monté le dossier du PPAE ? Son chef ? Qui prendra la décision de cesser d'indemniser un chômeur, de lui interdire de payer son loyer, de nourrir ses enfants ? Qui aura le pouvoir de l'envoyer au bureau d'aide sociale ?

M. Robert Bret.  - Réponse ?

M. le président.  - La réponse, c'est un vote, le Gouvernement et le rapporteur ayant déjà donné leur avis.

L'amendement n°22 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« Est créée une commission de recours gracieux qui reçoit les recours des demandeurs d'emplois à l'encontre d'une décision de sanction. Des représentants des demandeurs d'emploi, des représentants des salariés, des représentants des employeurs, et à titre consultatif, les représentants de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du code du travail siègent dans cette commission.

« La commission compétente pour recevoir les demandes de recours gracieux se réunit au moins une fois par moins dans chacun des départements. Les demandeurs d'emplois qui exercent un recours gracieux peuvent se faire accompagner par la personne de leur choix. L'autorité compétente pour prononcer la sanction est tenue d'appliquer la décision adoptée par la commission des recours gracieux. La commission de recours gracieux communique sa décision sous un délai de sept jours.

« Cette commission est compétente pour connaître des litiges nés à l'occasion de la conclusion du projet personnalisé d'accès à l'emploi.

Mme Annie David.  - Je ne me fais pas trop d'illusions sur le sort qui est réservé à cet amendement, étant donné que le précédent a été rejeté alors que ni l'un ni l'autre ne sont révolutionnaires.

M. Jean Desessard.  - Il ne faut pas avoir peur d'être révolutionnaire !

Mme Annie David.  - Le demandeur d'emploi doit avoir le droit de contester son projet personnalisé : le recours gracieux aurait l'avantage d'éviter l'effet suspensif de l'allocation. Comment imaginer que la signature d'un PPAE ne donne jamais lieu à contestation ? Il convient donc de trouver un outil utile et souple, tant pour les demandeurs d'emploi que pour la nouvelle institution.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - M. Desessard a anticipé sur le sort réservé à cet amendement. (Sourires) Vous ne semblez pas avoir écouté ce que j'ai dit à propos de l'article 2 : 90 % de ce qui figure dans cette loi est déjà inscrit dans le code du travail. Seule la mesure qui veut que deux refus d'emplois entrainent une sanction est réellement novatrice. Tout le reste est déjà dans le code, y compris la procédure de recours auprès du directeur départemental puis du préfet qui décide, ou non, de sanctionner après l'avis consultatif d'une commission tripartite. L'avis est donc défavorable.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Pour les mêmes raisons, même avis. En outre, la question des sanctions sera abordée à l'article 2.

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°24, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Remplacer le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le projet personnalisé tient compte de la formation du demandeur d'emploi, de ses qualifications et de ses compétences acquises au cour de ses expériences professionnelles.

« Le demandeur d'emploi précise également dans son projet personnalisé la nature,  la durée d'engagement et  la forme contractuelle de l'emploi qu'il recherche.

Mme Annie David.  - Nous ne sommes pas opposés au PPAE mais à son contenu. Les notions de zones géographiques privilégiées et de marché du travail local contredisent le principe de projet personnalisé. En quoi le sera-t-il si vous opposez au demandeur d'emploi la situation du marché local de l'emploi ?

Il convient donc de préciser que le projet personnalisé tient compte des qualifications et des compétences acquises lors des expériences professionnelles passées, même s'il n'y a pas eu de validation des acquis. En outre, il faut permettre au demandeur d'emploi de préciser, lors de l'élaboration de son projet personnalisé, le type de contrat espéré, sa nature et sa durée, afin d'éviter au demandeur d'emploi qu'on lui impose n'importe quelle offre. Nous sommes opposés à la logique libérale selon laquelle mieux vaut un emploi à temps partiel ou mal payé que pas d'emploi du tout. Lors de l'examen du projet de loi relatif à la modernisation du marché du travail, M. Xavier Bertrand a dit et répété qu'il voulait limiter les temps partiel subis. Nous sommes en total accord avec lui et c'est pourquoi nous voulons que le demandeur d'emploi qui refuse un contrat à temps partiel ou à durée déterminée puisse le préciser dans son projet personnalisé. Les organisations syndicales, qui ont toutes refusé de parapher ce texte, ont d'ailleurs regretté que le Gouvernement ignore cette question cruciale.

Demain, l'une des principales missions de la nouvelle institution ne sera-t-elle pas de proposer aux demandeurs d'emploi des bad jobs, ces emplois à temps très partiels, physiques, sous-payés et sans évolution de carrière ? Le patronat, lui, ne s'y est pas trompé, et il vous a apporté son soutien, trop content de pouvoir bénéficier d'une main-d'oeuvre à moindre coût.

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission.

Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail :

« Ce projet précise, en tenant compte de la formation du demandeur d'emploi, de ses qualifications, de son expérience professionnelle, de sa situation personnelle et familiale ainsi que de la situation du marché du travail local, la nature et les caractéristiques des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée pour la recherche d'emploi et le niveau de salaire attendu.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Il convient de réécrire le deuxième alinéa de cet article afin que les trois critères constitutifs de l'offre raisonnable d'emploi, que sont la nature de l'emploi, la zone géographique et le niveau de salaire, soient définis en tenant compte de la formation, des qualifications, de l'expérience et de la situation personnelle et familiale de chaque demandeur d'emploi.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, remplacer les mots :

des emplois recherchés

par les mots

de l'emploi recherché

Mme Annie David.  - Le diable se cache dans les détails et la rédaction de cet article en est un nouvel exemple puisqu'il précise que le projet personnalisé définit les caractéristiques des emplois recherchés. Ce pluriel démontre que votre seul objectif est de faire sortir les chômeurs des statistiques, quitte à les contraindre à accepter plusieurs emplois à temps partiel. Vous privilégiez l'employabilité au dépend de la qualité de l'emploi. D'ailleurs, votre politique libérale conduit à un affaiblissement général des droits pour les demandeurs d'emplois comme pour tous les salariés : trappes à bas salaires, dérégulations, refus de pérenniser les emplois alors que les profits flambent.

Nous avons des a priori, dites-vous. Soit, mais le recours au pluriel n'est pas neutre : vous témoignez ainsi du peu de crédit que vous apportez à votre propre politique pour permettre à un demandeur d'emploi de retrouver un parcours professionnel classique.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, après le mot :

recherchés

insérer les mots :

ainsi que la catégorie et la durée du contrat de travail

Mme Raymonde Le Texier.  - La définition de la nature du contrat et des caractéristiques des emplois recherchés étant assez vague, notre rapporteur en a précisé les termes. Le PPAE indiquera quel métier ou quel type de fonction recherche le demandeur d'emploi, s'il souhaite un CDD ou un CDI, un emploi à temps plein ou partiel. Ces souhaits seront opposables à l'opérateur qui ne pourra sanctionner un demandeur d'emploi ne répondant pas à ces critères.

Notre rapporteur a également soulevé la question de l'opposabilité : elle va de soi tant que l'offre « raisonnable » n'entre pas en scène, c'est-à-dire pendant les trois premiers mois de chômage. Mais à l'issue de cette période, lorsqu'après six mois ou un an les demandeurs d'emploi devront accepter un emploi rémunéré au niveau de leur allocation, ne correspondant pas à leur qualification et éloigné de leur domicile, cette opposabilité sera-t-elle encore de mise ? Bref, l'interprétation de notre rapporteur est-elle permanente ou temporaire ?

Pour les contrats courts, les aides à la mobilité géographique de l'ANPE sont distribuées avec parcimonie et le problème devient aujourd'hui crucial en raison du prix des carburants. Les zones rurales seront donc particulièrement pénalisées.

M. le président.  - Amendement n°26, présenté par Mme David et les membres du groupe  CRC.

Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, après les mots :

expérience professionnelle,

insérer les mots :

des connaissances et compétences acquises par le salarié au cours de son parcours professionnel,

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Nous proposons à nos collègues de l'UMP un amendement de la seconde chance afin que le projet personnalisé prenne en compte les compétences ou les techniques acquises par le salarié au cours des emplois qu'il a précédemment exercés et qui n'auraient pas bénéficié d'une validation des acquis de l'expérience.

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après le mot :

familiale

supprimer la fin de la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Nous supprimons la référence au marché local de l'emploi, car elle pourrait limiter les offres d'emploi proposées au demandeur. En fait, vous ne vous placez pas du côté du demandeur d'emploi, qui peut vouloir changer de métier ou de zone géographique, mais du côté du patronat, qui veut bénéficier, dans son bassin d'emplois, d'une main-d'oeuvre disponible au moindre coût. La logique est la même pour les universités : vous leur accordez de l'autonomie et la capacité de définir des diplômes adaptés au marché local du travail, pour le plus grand profit des employeurs locaux. Et que se passera-t-il pour les jeunes, pour ainsi dire cantonnés au marché local, si l'emploi disparaît, comme cela s'est produit pour la chimie, la papeterie ou l'électronique, secteurs vers lesquels nous avons orienté tant de jeunes avant que les entreprises ne préfèrent s'installer à l'étranger, hors de toute contrainte ?

M. le président.  - Amendement n°28, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Dans la seconde phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, remplacer le mot :

privilégiée

par les mots :

déterminée par le demandeur d'emploi

Mme Annie David.  - Le demandeur d'emploi doit pouvoir indiquer la zone géographique de son choix, ou bien le PPAE n'est qu'une contrainte qu'on lui impose plutôt qu'un outil qu'on lui propose pour le retour à l'emploi. Mais vous préférez en faire un instrument au service de l'employeur et du « précariat », cette nouvelle forme de salariat que vous privilégiez. Pourquoi vouloir imposer une zone géographique au demandeur d'emploi ? Dans mon département, par exemple, si un demandeur d'emploi préfère travailler en Isère et qu'on lui propose la région Paca, pourquoi ne pas lui laisser le choix ?

M. le président.  - Amendement n°29, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après les mots :

recherche d'emploi

supprimer la fin de la dernière phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail.

M. Guy Fischer.  - La nouvelle institution, en étroite collaboration avec l'employeur, déterminera la rémunération. On voit de plus en plus d'annonces, sur Internet en particulier, où toutes les compétences et expériences requises sont détaillées, mais sans indication de la rémunération proposée. C'est, toute proportion gardée, comme ces annonces immobilières à la fin du Figaro Magazine, bien léchées mais sans le prix !

M. Jean Desessard.  - Vous avez de bien curieuses lectures ! (Rires)

M. Guy Fischer.  - J'ai l'esprit large !

Les offres d'emplois de l'ANPE, elles, mentionnent obligatoirement la rémunération proposée, c'est même un critère pour que le placement se fasse dans les meilleures conditions. Monsieur le ministre, vous nous avez assurés que la loi de modernisation du service public de l'emploi conforterait ce service : il n'en n'est rien puisque l'organisme qui succède à l'ANPE reprend au privé des pratiques qui jouent contre les demandeurs d'emploi. Ce sera à eux de proposer leur rémunération ; on verra donc une sorte d'enchère inversée, où l'emportera le candidat qui se sera proposé pour le moins cher ! Vous rêvez d'un monde sans code du travail, où chacun négocierait seul son temps de travail, sa rémunération et ses jours de congés ; nous y sommes bientôt avec les 65 heures, et demain les mesures de la LME !

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

À la fin du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, remplacer le mot :

attendu

par les mots :

correspondant aux qualifications du demandeur d'emploi

Mme Raymonde Le Texier.  - La notion de salaire « attendu » est floue, d'autant que le PPAE prévoit qu'il peut descendre jusqu'au niveau des allocations. Nous précisons que ce salaire doit correspondre aux qualifications du demandeur d'emploi.

M. le président.  - Sous-amendement n°52 à l'amendement n°2 rectifié de M. Leclerc, au nom de la commission, présenté par M. Desessard.

Dans le second alinéa de l'amendement n°2, après les mots :

emplois recherchés

insérer les mots :

ou des formations à mettre en oeuvre

M. Jean Desessard.  - Le PPAE, au-delà de l'emploi recherché, doit pouvoir mentionner les formations utiles à l'obtention de cet emploi.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Le PPAE mentionnant déjà les engagements en matière d'accompagnement et, le cas échéant, en matière de formation et d'aide à la mobilité, le sous-amendement n°52 est satisfait : avis défavorable.

Avis défavorable à l'amendement n°24. Nous avons largement débattu en commission sur le pluriel ou le singulier du terme emploi, sans savoir véritablement ce qui serait le plus favorable au demandeur d'emploi : sagesse à l'amendement n°25.

Le PPAE précisant les caractéristiques de l'emploi recherché, l'amendement n°7 est satisfait : avis défavorable.

L'amendement n°26 apporte une précision inutile : avis défavorable.

La référence au marché local du travail protège le demandeur d'emploi, en évitant qu'on ne lui propose un emploi éloigné de son domicile : avis défavorable à l'amendement n°27.

Sur le n°28, pourquoi s'interdire d'envisager une offre très intéressante hors de la zone géographique définie, si le demandeur est d'accord ? Défavorable, comme au n°29, car le salaire souhaité est déterminé dans le projet personnalisé. Retrait ou rejet du n°8. Le sous-amendement de M. Desessard sera satisfait à l'alinéa suivant.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Avis défavorable au n°24, qui constitue une régression. Le n°2 est une précision rédactionnelle utile, avis favorable. Le sous-amendement n°52 sera satisfait. Je vais surprendre Mme David, qui me voit comme un ultralibéral le couteau entre les dents (rires et exclamations à gauche) : sagesse sur le n°25. Je valide donc le raisonnement. Sagesse aussi sur le n°7 qui me semble néanmoins redondant. Favorable au n°26 également : je ne vois pas de problème à intégrer cette précision -un peu redondante mais enfin...

Défavorable au n°27, la référence au marché local du travail est une bonne garantie pour le demandeur d'emploi ; et au n°28, car le projet est le produit d'une codéfinition. Le n°29 n'est pas favorable au demandeur. Enfin, l'amendement n°8 restreindrait les marges de manoeuvre du demandeur d'emploi.

L'amendement n°24 n'est pas adopté.

Mme Annie David.  - Je vais sous-amender l'amendement n°2, car l'adoption de ce dernier ferait tomber le n°25.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Je rectifie le n°2 pour intégrer la rédaction de Mme David, et en particulier les termes « emploi recherché ». (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. le président.  - Ce sera le n°2 rectifié, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission.

Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail :

« Ce projet précise, en tenant compte de la formation du demandeur d'emploi, de ses qualifications, de son expérience professionnelle, de sa situation personnelle et familiale ainsi que de la situation du marché du travail local, la nature et les caractéristiques de l'emploi recherché, la zone géographique privilégiée pour la recherche d'emploi et le niveau de salaire attendu.

Le sous-amendement n°52 est retiré.

L'amendement n°2 rectifié est adopté.

Les amendements n°s25, 7, 26, 27, 28, 29 et 8 deviennent sans objet.

M. le président.  - Amendement n°30, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Remplacer le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail par trois alinéas ainsi rédigés :

« L'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du code du travail précise dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi les actions qu'elle s'engage à mettre en oeuvre dans le cadre de ses missions de service public.

« L'institution détermine l'accompagnement qu'elle apporte au demandeur d'emploi, l'aide à la mobilité, ainsi que les formations auxquelles le demandeur d'emploi a droit.

« Le demandeur d'emploi qui estime que l'institution a manqué aux obligations mentionnées aux deux alinéas précédents peut demander à rencontrer son conseiller. Si à l'issue de cette rencontre le demandeur d'emploi estime que l'institution manque à ses obligations, il peut saisir la commission de recours.

M. Robert Bret.  - Tout le monde connait l'adage : il n'y a pas de devoirs sans droits. Mais si l'on voit les devoirs des salariés privés d'emplois, où sont leurs droits ? C'est l'une des principales critiques des organisations syndicales mais le Gouvernement reste sourd à leurs appels, tout occupé qu'il est d'adresser un signal à son aile la plus radicale.

Il a procédé dans la précipitation à un certain nombre de réformes relatives aux demandeurs d'emploi, sans se soucier de cohérence. Il crée une institution nouvelle avant même d'avoir entamé avec les partenaires sociaux les discussions relatives à la future convention d'assurance chômage. Cette institution doit garantir des droits -mais on saura lesquels à la fin de l'année seulement. Le rapport Boulanger, qui vous a largement inspiré, se borne lui aussi à recommander de développer une offre de service en direction des demandeurs d'emploi, sans jamais formuler une seule proposition ! Notre amendement est de bon sens, il renforce les obligations à l'égard du demandeur. Par parallélisme des formes, nous proposons que le chômeur puisse demander une révision de son projet personnalisé, si l'accompagnement lui semble inadapté ou si l'institution ne remplit pas ses missions.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après les mots :

service public de l'emploi

rédiger comme suit la fin du dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail :

en matière d'accompagnement, de formation et d'aide à la mobilité.

Mme Raymonde Le Texier.  - « Notamment » et « le cas échéant » sont des obstacles à la bonne application des lois. Si toutes les chances ne sont pas offertes au demandeur, autant intituler le texte « offre d'emploi raisonnable » et n'en parlons plus. La formation est fondamentale ; l'Unedic indique que 70 % des demandeurs qui ont suivi une formation ont retrouvé un emploi dans les trois mois suivants.

M. le président.  - Amendement n°31, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Dans le troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-1 du code du travail, supprimer les mots :

et, le cas échéant

Mme Annie David.  - La rédaction nous inquiète : la formation n'est plus un droit, mais une simple possibilité.

Depuis quelques mois la formation professionnelle est attaquée et mise à mal par le Gouvernement et sa majorité ; elle est souvent considérée par le patronat comme un coût pour l'entreprise, non un investissement ou un outil de développement. Le Gouvernement tire ici toutes les conséquences des critiques formulées par le Medef et impose aujourd'hui aux demandeurs d'emploi ce qu'il compte généraliser demain à l'ensemble des travailleurs. C'est un ballon d'essai -mais vous jouez contre votre camp !

Nous savons d'avance que le Gouvernement se désengagera, avec cette conséquence que la négociation sera renvoyée à la branche. Il est vrai vous ne craignez pas de rompre ainsi le principe d'égalité, puisqu'au contraire vous faites tout pour diviser les salariés, tant est grande votre obsession d'en finir enfin avec les obligations pesant sur les employeurs. Le droit « mutable » ou « portatif » que vous vantez tant ne leur sera qu'une nouvelle occasion de réduire leur participation financière à la formation des salariés.

Je saisis l'occasion pour redire ici mon opposition au transfert au nouvel opérateur des personnels de l'Afpa, prélude à son démantèlement.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - L'amendement n°30 stigmatise les agences de l'ANPE. Et quel serait le rôle de la commission de recours ? Défavorable. L'amendement n°9 n'apporte pas de garanties supplémentaires aux demandeurs d'emploi. Il est encore plus restrictif que le projet de loi. Défavorable. Même avis sur l'amendement n°31 : pourquoi l'offre de formation devrait-elle être systématique ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Défavorable à l'amendement n°30, qui fait référence à une commission de recours dont nous avons déjà rejeté le principe. Même avis sur l'amendement n°9 : la suppression de cette locution interdirait de mener des actions ailleurs que dans les trois domaines mentionnés. Même avis sur l'amendement n°31, même si je comprends vos préoccupations. Encore une fois, l'adjonction de cette locution permet d'étendre le champ du dispositif à des actions complémentaires. Je puis réaffirmer devant vous, au nom du Gouvernement, la détermination de notre engagement en faveur de la formation. Je serai attentif à la préservation de son pilotage national.

L'amendement n°30 n'est pas adopté.

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

M. Jean Desessard.  - Le rapporteur a rejeté l'amendement que j'avais déposé pour rappeler l'exigence de formation, au motif qu'elle était inscrite dans le projet. Nous y sommes. Cependant, l'expression « le cas échéant » est équivoque : soit l'on entend marquer que si le demandeur d'emploi n'a pas besoin de formation, et qu'il est prêt à travailler, il est inutile de la lui proposer, ce qui est bien normal, soit, et il me semble que là réside bien plutôt la crainte de Mme David, elle peut signifier qu'un chômeur demandeur d'une formation pourrait se la voir refuser. Si telle n'est pas votre intention, il serait bon de trouver une formule propre à lever cette amphibologie...

Mme Annie David.  - Vous serez vigilant, dites-vous, quant à la responsabilité du Gouvernement sur la formation. Fort bien. Mais la rédaction que vous proposez signifie-t-elle qu'un demandeur pourrait se voir refuser une formation ? Pourra-t-on, par exemple, opposer un refus à un chômeur qui souhaiterait se réorienter et demanderait une formation ne correspondant pas aux besoins du marché local ? Votre texte serait par là en recul sur le droit existant.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Dans le cadre du PPAE, chacun saura faire preuve de bonne volonté...

L'amendement n°31 n'est pas adopté.

La séance est suspendue à 19 h 40.

présidence de M. Adrien Gouteyron,vice-président

La séance reprend à 21 h 45.

Modification à l'ordre du jour

M. le président.  - Par lettre en date de ce jour, M. le Secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement a modifié l'ordre du jour prioritaire de nos séances des jeudi 26 et vendredi 27 juin 2008 en inscrivant, dès la fin de soirée de demain 26 juin, deux conventions internationales en forme simplifiée et la suite du projet de loi instituant un droit d'accueil pour les élèves.

L'ordre du jour de ces séances s'établira donc comme suit :

JEUDI 26 JUIN

A 9 heures 30 et l'après-midi, après les questions d'actualité au Gouvernement :

- Projet de loi instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles pendant le temps scolaire obligatoire.

A 21 heures 30 :

- Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur le Livre blanc sur la défense ;

- Deux conventions internationales, examinées selon la procédure simplifiée : accord relatif aux services de transport aérien avec Madagascar et accord multilatéral relatif à la création d un espace aérien commun européen ;

- Suite du projet de loi instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles pendant le temps scolaire obligatoire.

Éventuellement, VENDREDI 27 JUIN

A 9 heures 30 et à 15 heures :

- Suite du projet de loi instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles pendant le temps scolaire obligatoire.

Acte est donné de cette communication.

Droits et devoirs des demandeurs d'emploi (Urgence - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article premier (Suite)

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-2 du code du travail.

Mme Raymonde Le Texier.  - La définition de l'offre dite raisonnable d'emploi ne recoupe pas le contenu du projet personnalisé d'accès à l'emploi. Ont disparu de la définition la formation du demandeur d'emploi, ses qualifications, son expérience professionnelle, sa situation personnelle et familiale, la situation du marché du travail local. Ne subsistent donc que les caractéristiques des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le salaire attendu. Si la situation personnelle et familiale n'est plus prise en compte, ni la situation du marché du travail local, la zone géographique privilégiée devient extensive : le manque de travail dans la zone la plus accessible implique la mobilité du demandeur d'emploi.

Quelles seront les conditions de cette mobilité pour une mère célibataire qui doit faire garer ses enfants et payer le transport pour se rendre à un CDD à temps partiel payé au Smic horaire ? Quelles seront les conditions d'éducation de jeunes laissés à eux-mêmes parce que leurs parents doivent travailler à plusieurs heures de transport, ou occuper deux emplois sous-payés ?

L'élimination de l'expérience, de la formation et des qualifications implique la dévalorisation du demandeur d'emploi sur le marché du travail. Pourquoi la nation a-t-elle financé ses études ? II est économiquement incohérent d'obliger une personne qualifiée à accepter un emploi déqualifié, avec une baisse de salaire, et de contraindre le chômeur à l'accepter par la définition de l'offre raisonnable d'emploi. Les employeurs peuvent y trouver leur compte, pas les salariés ni les contribuables. Les emplois qualifiés qui ne sont pas pourvus aujourd'hui ne le seront pas demain si la formation n'est pas développée. Le demandeur d'emploi qui sera pris à ce piège subira une baisse de son revenu, donc de son pouvoir d'achat. Votre loi est en contradiction avec votre campagne publicitaire sur le pouvoir d'achat qui, outre qu'elle coûte cher, est mensongère.

M. le président.  - Amendement identique n°32, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Mme Annie David.  - La partie de ce projet de loi que nous vous proposons de supprimer est relative à la définition même de l'offre raisonnable d'emploi que vous rattachez artificiellement au projet personnalisé. La greffe prend mal, et l'on aurait très bien pu concevoir un projet personnalisé de retour à l'emploi, sans l'enfermer dans le carcan du « marché du travail local ». Vous avez tranché entre les aspirations des citoyens et l'économie alors qu'ils ne devraient pas être de simples variables d'ajustement dans les plans comptables des entreprises. Ce que les demandeurs d'emploi veulent, c'est un CDI à temps plein, rémunéré à la hauteur de leur engagement. C'est tout l'inverse que vous leur proposez.

Ce qui vous importe, c'est de remettre la France au travail, comme si elle avait cessé de l'être, comme si les Français n'étaient pas parmi les salariés les plus productifs d'Europe ; comme si la France n'était pas le deuxième pays en terme d'installation d'entreprises, juste derrière l'Irlande, que je salue et félicite pour son refus du traité de Lisbonne, prononcé pour tous les peuples que vous privez de référendum. Vous voulez faire croire que tout va mal pour imposer vos recettes miracles faites de rigueur et de sacrifices, sauf pour les patrons du CAC 40 dont les rémunérations sont parmi les plus importantes d'Europe. Les sanctions visent les demandeurs d'emplois, que l'économie spéculative rejette et plonge dans la misère.

M. le président.  - Amendement n°33, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit le début du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-2 du code du travail :

La nature, la durée d'engagement et la forme contractuelle de l'emploi recherché sont constitutifs...

M. Guy Fischer.  - Nous avons entendu le ministre nous dire que ce projet de loi était une avancée pour les demandeurs d'emploi, qu'il serait en quelque sorte une garantie supplémentaire et non un outil supplémentaire dans la liste déjà longue des mesures de précarisation. Dans ces conditions, cet amendement devrait recueillir votre assentiment puisqu'il n'a pour objet que d'autoriser le demandeur d'emploi à préciser la durée, la nature et le type de contrat qu'il recherche.

A défaut, rien dans le projet de loi ne le protège d'éventuelles sanctions s'il refusait une offre considérée comme raisonnable, qui consisterait en un ou plusieurs contrats précaires. Protéger les demandeurs d'emploi des offres les moins raisonnables importe aussi beaucoup aux organisations syndicales à qui vous avez affirmé, par la voix de Mme Carrère-Gée, qu'un chômeur ne pourrait être sanctionné s'il refusait un temps partiel ou un contrat atypique. Nous proposons donc au Gouvernement de confirmer ces propos et de le préciser dans la loi : si telle est toujours sa position, ça va mieux en le disant.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Est-il bien raisonnable de vouloir supprimer tous les éléments qui constituent l'offre raisonnable d'emploi ? Dans le PPAE, il est précisé si le demandeur cherche un emploi partiel ou à temps complet, en CDD ou en CDI.

Défavorable donc aux amendements n°s10 et 32 ; le n°33 est inutile.

M. le président.  - Je salue tout particulièrement le ministre.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Un vrai département prend enfin le pouvoir ! (Sourires)

M. Jean Desessard.  - Oui, mais pour donner des lentilles aux chômeurs ! (Rires)

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Nous avons retiré les cailloux !

Défavorable aux amendements n°s10 et 32, ainsi qu'au n°33, qui retire une garantie aux chômeurs.

M. Jean Desessard.  - Je voudrais poser une question pratique au Gouvernement. J'ai cru comprendre qu'y figurait un Haut Commissaire chargé de lutter contre la pauvreté, qui avait proposé l'instauration d'un RSA. Comme le texte d'aujourd'hui est en urgence, je suppose que le Gouvernement a bien réfléchi à ce qu'il voulait faire et, en particulier, à l'articulation entre la fin de l'indemnisation et la mise en place de ce RSA. Alors, qu'est-ce qui va se passer ?

Les amendements identiques n°s10 et 32 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°33.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail.

Mme Raymonde Le Texier.  - Je crains que mes origines alto-ligériennes ne suffisent pas à attirer votre bienveillante attention sur cet amendement... (Sourires)

Voici l'offre raisonnable d'emploi en forme de noeud coulant : les qualités et les souhaits du demandeur d'emploi ne sont progressivement plus pris en compte, le PPEA part en fumée, c'est l'épée de Damoclès. Avant même le troisième mois, on se servira de l'offre raisonnable d'emploi pour faire pression sur le chômeur, qui risque de renoncer à ses prétentions légitimes par une forme d'autocensure.

Au bout de trois mois, l'offre raisonnable d'emploi se déploie pleinement. Le PPAE est actualisé, c'est-à-dire révisé à la baisse. Au bout de six mois, le chômeur doit accepter un emploi non compatible avec sa qualification, avec un temps de trajet important, un salaire amputé de 15 %. On peut désormais proposer CDD, temps partiels imposés et morcelés, contrats saisonniers. Au bout d'un an, le chômeur est contraint d'accepter un salaire équivalent à son allocation. C'est l'exacte définition de la coercition : le chômeur n'a aucun intérêt pécuniaire à accepter cet emploi, sinon pour éviter la sanction ! Cette mesure est une véritable trappe à bas salaires.

La garantie que le salaire ne peut être inférieur au salaire normalement pratiqué dans la région et dans la profession est un trompe-l'oeil, car le Smic est calculé sur un taux horaire ! (M. Jean Desessard approuve) Le Smic net à temps plein est de 1 027,99 euros : tentez donc de faire vivre une famille avec ça !

Vous augmentez délibérément le nombre des travailleurs pauvres. Certes, ils pourront toujours devenir auto-entrepreneurs, et concurrencer les artisans... Le projet de loi ne prévoit ni aide à la mobilité, ni formation. II s'agit bien d'obliger la personne à accepter n'importe quel emploi précaire sous payé, dans n'importe quelles conditions. Socialement choquant, politiquement démagogique, cet article est dangereux dans la situation instable que notre pays traverse. Nous y sommes tout à fait opposés.

M. le président.  - Amendement identique n°34, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Mme Annie David.  - A vous lire, il faudrait, pour inciter les demandeurs d'emploi à reprendre une activité, diminuer progressivement mais sûrement le salaire proposé. Les salariés privés d'emplois seraient plus prompts à accepter une première offre rémunérée au moins à 95 % du salaire précédent... Preuve que vous estimez que les chômeurs sont responsables de leur situation. Les prétentions salariales du demandeur d'emploi ne dureront qu'un temps, puisque très vite, ce sera le retour à l'automaticité de la sanction !

Le discours sur la valeur travail est décidément bien enterré : d'outil de reconnaissance, le salaire devient outil de pression et de sanction. Les employeurs risquent de jouer la montre pour embaucher à moindre coût. Le salaire deviendra outil de spéculation et de précarisation. Le Gouvernement aura alors beau jeu de faire une énième loi sur le pouvoir d'achat, ou de lancer une campagne de publicité !

Le Gouvernement annonce vouloir revenir sur les dispenses de recherche d'emploi pour les séniors, alors que leur niveau d'emploi n'a jamais été aussi faible. Ce serait une double peine : au sentiment d'inutilité, on ajoute la diminution des droits ! Vous feriez payer aux séniors les fautes des employeurs. Mais vous avez bien supprimé la contribution Delalande...

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Nous sommes au coeur du projet de loi : les critères évolutifs dans le temps permettent d'apprécier si l'offre raisonnable d'emploi entre dans le cadre du PPAE. Avis défavorable.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Défavorable, pour les mêmes raisons : c'est l'un des piliers du dispositif.

L'amendement n°11, identique à l'amendement n°34, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail :

« Art. 5411-6-3. - Le projet personnalisé d'accès à l'emploi est actualisé périodiquement. Le demandeur d'emploi peut demander qu'à l'occasion de cette actualisation, soit procédé à une modification de son projet personnalisé.

« Lorsque le demandeur d'emploi est inscrit depuis plus de six mois, est considérée comme raisonnable une offre d'emploi correspondant à la nature, la durée d'engagement et  la forme contractuelle de l'emploi recherché ainsi qu'a  ses qualifications ou équivalente à l'emploi précédemment occupé. La rémunération proposée ne peut être inférieure au salaire antérieurement perçu ou, si celui-ci était inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance, elle doit être au moins équivalente au salaire minimum interprofessionnel de croissance.

« Lorsque le demandeur d'emploi est inscrit depuis plus de douze mois, est considérée comme raisonnable une offre d'emploi correspondant à la nature, la durée d'engagement et la forme contractuelle de l'emploi recherché ainsi qu'à ses qualifications ou équivalente à l'emploi précédemment occupé. L'offre proposée ne peut entraîner un temps de trajet en transport en commun, entre le domicile et le lieu de travail, supérieur à une heure, ou un trajet au moins égal à une distance à parcourir de trente kilomètres. La rémunération proposée ne peut être inférieure à 85 % du salaire antérieurement perçu ou, si celui-ci était inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance, elle doit être au moins équivalente au salaire minimum interprofessionnel de croissance.

« Lorsque le demandeur d'emploi est inscrit depuis plus de vingt-quatre mois, est considérée comme raisonnable une offre d'emploi correspondant à la nature, la durée d'engagement et la forme contractuelle de l'emploi recherché ainsi qu'à ses qualifications ou équivalente à l'emploi précédemment occupé. L'offre proposée ne peut entraîner un temps de trajet en transport en commun, entre le domicile et le lieu de travail, supérieur à une heure, ou un trajet au moins égal à une distance à parcourir de trente kilomètres. La rémunération proposée ne peut être inférieure  au revenu de remplacement prévu à l'article L.5421-1 si celle-ci est inférieure au salaire minimum interprofessionnel de croissance. A défaut, elle doit être au moins égale au salaire minimum interprofessionnel de croissance.

M. Robert Bret.  - Le Gouvernement ne voit rien d'immoral à sanctionner les demandeurs d'emplois alors que l'offre est rare et parfois inadaptée. Cet amendement transforme la révision périodique automatique du projet personnalisé en faculté ouverte au demandeur d'emploi. Il doit s'agir d'une véritable co-rédaction. Cette révision ne doit pas être l'occasion de renforcer les sanctions ! On s'étonnera que celles-ci soient automatiques et générales, comme si vous reprochiez aux demandeurs d'emplois de se complaire tous dans l'assistanat...

Bien qu'opposé à la dégressivité des droits, nous proposons de modifier les paliers afin d'éviter de priver les demandeurs d'emploi des indemnités auxquelles ils ont droit.

M. le président.  - Amendement n°37, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail, remplacer les mots :

plus de trois mois

par les mots :

plus de six mois

M. Robert Bret.  - Trois mois ne suffisent pas pour mesurer les effets du projet personnalisé. Avant de s'empresser de punir, donnons une réelle chance au demandeur d'emploi.

M. Jean Desessard.  - Très bien.

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail.

Mme Annie David.  - En une phrase, vous contredisez toute votre belle rhétorique sur la personnalisation du PPAE. A vous croire, le projet ne serait pas un document type sous la forme d'un contrat de gré à gré, mais bien une co-rédaction. Nous pourrions accepter un tel projet si l'élaboration en était laissée aux personnes concernées, comme le demandent les partenaires sociaux, mais ce n'est pas le cas.

Cet amendement devrait rencontrer un écho favorable auprès de tous ceux, ici, qui préfèrent le sur-mesure au prêt-à-porter.

M. le président.  - Amendement n°36, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail, remplacer les mots :

compatible avec

par les mots :

correspondant à

M. Guy Fischer.  - Le texte permet de contraindre un demandeur d'emploi à accepter un travail dans le même champ d'intervention, mais avec une moindre rémunération -par exemple, un ingénieur à accepter un poste de technicien. Compatible, mais non identique... L'important étant pour le Gouvernement de faire sortir des statistiques du chômage le plus grand nombre possible de demandeurs d'emplois en recourant à la notion maintenant bien connue d'employabilité. J'ai même entendu en commission dire que cette disposition n'avait aucun inconvénient du moment qu'elle permettait au demandeur d'emploi de retrouver du travail...

Mais le travail n'est pas une simple occupation, c'est l'échange d'une rémunération contre une activité, un savoir-faire et des compétences. N'importe quel travail ne remplace pas un emploi. De surcroît, cette disposition évite au Gouvernement de répondre aux exigences légitimes de maintien dans l'emploi.

J'ajoute, pour reprendre l'exemple de l'ingénieur, que la situation du technicien s'en trouvera aggravée, et ainsi de suite ; il y a là un processus de sous-qualification en cascade, qui pèsera d'autant plus lourd en bas de l'échelle. Comme le dit le dicton provençal : « Si les chats gardent les chèvres, qui attrapera les souris ? » (On apprécie)

M. Robert Bret.  - Vous n'êtes pas obligés de répondre tout de suite ! (Sourires)

M. Guy Fischer.  - C'est un bien mauvais signal que vous envoyez aux salariés que vous incitez par ailleurs à se former et à progresser ; à quoi leur serviront les compétences qu'ils auront acquises en cas de perte d'emploi ?

M. le président.  - Amendement n°38, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

A la fin de la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail, remplacer les mots :

à au moins 95 % du salaire antérieurement perçu

par les mots :

par un salaire au moins identique au salaire antérieurement perçu ou, si celui-ci était inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance, par un salaire au moins équivalent au salaire minimum interprofessionnel de croissance.

Amendement n°39, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Compléter la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail par les mots :

reconstitué, le cas échéant, sur la base d'un équivalent temps plein

Mme Annie David.  - L' amendement 38 de justice sociale a peu de chance d'être adopté dès lors que le Gouvernement n'a de cesse, depuis un an, de vouloir réduire le coût du travail. D'autres voies existent cependant que celles défendues par le Medef.

Pour bon nombre de salariés, la réalité professionnelle est faite de précarité, de petits boulots et de temps partiel, une réalité qui se conjugue trop souvent au féminin ou concerne les salariés les moins formés. La précarité s'ajoute à la précarité.

Le texte aurait pour effet de rendre l'offre d'emploi opposable au salarié dés lors que la rémunération proposée serait égale à 95 % du salaire antérieurement perçu. C'est considérer qu'il faut diminuer le montant du salaire pour permettre le retour à l'emploi et, comme le patronat, que le coût du travail est trop élevé en France. C'est aggraver les conditions de vie de nos concitoyens ; 95 % d'un salaire à temps partiel, c'est 95 % de pas grand-chose.

Notre amendement 39 met un peu d'égalité dans un projet de loi qui en manque cruellement. Il améliorerait les conditions de vie de nos concitoyens et limiterait le risque, déjà élevé, de voir cette mesure entraîner une baisse généralisée des rémunérations. On devine que les organisations patronales ont trouvées là raison à signature...

Selon une étude de l'Insee de décembre 2006, la proportion de salariés qui ont vécu un déclassement est passée de 3 % dans les années 1980 à 7 % dans les années 2000, le phénomène n'étant plus marginal depuis 1998. La mobilité descendante est devenue un moyen de conserver un emploi ou d'en retrouver un plus rapidement. Dans cette course à l'abîme, les femmes sont en première ligne, avec un taux de 11,5 %. L'Insee cite les femmes travaillant dans l'industrie qui, perdant leur emploi, migrent vers des emplois de service de moindre qualification. De cette mobilité descendante que le Gouvernement entend institutionnaliser, nous ne voulons pas. La dégressivité proposée est dangereuse pour les demandeurs d'emploi, mais aussi pour tous les salariés.

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit la deuxième phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail :

Ce taux est porté à 85 % au bout de douze mois d'inscription.

M. Robert Bret.  - Avec le texte, l'offre raisonnable devient dégradable dans le temps, avec des effets dramatiques pour le demandeur d'emploi, mais aussi pour l'ensemble des salariés. Le Gouvernement fait comme si des situations conjoncturelles particulières pouvaient justifier une diminution durable de la rémunération. Et tout cela, alors que la France est devenue un pays de bas salaires, pour satisfaire les exigences d'un patronat toujours plus avide de profits. L'argent que vous prenez au salarié, vous le mettez immédiatement dans la poche du patronat. Et les entreprises développeront toutes sortes de stratégies pour pouvoir embaucher au prix le plus bas. Alors que les revenus du travail ne sont pas assez élevés par rapport aux minima sociaux, vous allez aggraver encore la situation.

La loi LME favorise le hard discount ; vous avez inventé le travail discount, ce qui est en décalage total avec le discours du Président de la République sur la revalorisation du travail rémunéré à sa juste valeur. La rémunération serait-elle soluble dans le temps ? Curieuse conception !

Chaque jour, une entreprise ferme ou délocalise, pour satisfaire les appétits d'actionnaires qui ne jurent que par des rentabilités à deux chiffres. Nous refusons de plonger plus encore le salarié dans la précarité au bout de six mois -quatre mois dans le dispositif actuel.

M. le président.  - Amendement n°41, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit la dernière phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail :

Après un an d'inscription, est considérée comme raisonnable l'offre d'emploi dont la rémunération est égale au salaire minimum interprofessionnel de croissance.

Amendement n°42, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-4 du code du travail :

« Art. L. 5411-6-4. - Les dispositions de la présente section  et du 2° de l'article L. 5412-1 ne peuvent obliger un demandeur d'emploi à accepter un niveau de salaire inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance. »

Mme Annie David.  - Il ne fait pas de doute que vous cherchez, sous couvert de renforcer les droits et devoirs des demandeurs d'emploi, à satisfaire le désir ancien et toujours réaffirmé du patronat de voir réduit le coût du travail qui serait, selon Mme Parisot, l'obstacle principal à l'emploi et à l'évolution des salaires. Ce qui, de notre point de vue, est faux ; de nombreuses publications, dont certaines gouvernementales, nous donnent raison. Le rapport remis par la conférence pour l'emploi en octobre 2007 procède à une étude comparée sur le sujet. On y lit que « le coup du travail élevé n'est pas un handicap majeur à la compétitivité extérieure » et, plus loin, que « de manière générale, les pays ayant un coût de travail élevé sont également ceux dont la productivité moyenne du travail est élevée ». Et de conclure que « la France occupe à cet égard une position médiane au sein des pays de l'OCDE ».

Un document de l'Insee de 2006 le confirme et prouve, schéma à l'appui, que le coût du travail en France est même inférieur, si l'on compare le revenu brut mensuel moyen des salariés à temps complet dans l'industrie et les services, à ce qu'il est en Autriche, en Finlande, en Suède, en Belgique, et même en Allemagne, pays que vous citez souvent en exemple.

La réduction du coût du travail n'est que l'exigence d'un patronat uniquement soucieux de ses actionnaires. La baisse progressive du salaire de référence apparaît ainsi comme une sanction, alors que l'institution ne peut s'engager à présenter au moins deux offres raisonnables d'emploi. Combien d'offres sont-elles proposées, qui ne correspondent pas à la situation des demandeurs d'emploi ?

M. le président. - Amendement n°17, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail par les mots :

, sous réserve que des moyens de transports en commun existent pour ce trajet aux horaires de début et de fin de l'emploi en question

M. Jean Desessard.  - Le projet de loi impose aux demandeurs d'emploi de passer quotidiennement jusqu'à deux heures dans les transports.

Or, la mobilité obligatoire ne doit pas faire abstraction de toute exigence économique ou écologique. Ainsi, un demandeur d'emploi doit pouvoir légitimement refuser une offre dont les horaires ne sont pas compatibles avec ceux des transports en commun. Il en va de même en l'absence de toute liaison par ce moyen de transport entre le domicile et le lieu de travail.

Certes, on m'objectera qu'il peut acquérir une voiture, mais il s'agit là d'une dépense somptuaire pour qui n'est pas certain de garder l'emploi plus de trois mois.

M. le président.  - Amendement n°50, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 5411-6-3 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :

Les frais de trajet occasionnés par le déplacement domicile-travail ne devront pas excéder 10 % du salaire net proposé par l'offre d'emploi.

M. Jean Desessard.  - Nous devons imaginer les conséquences de ce projet de loi pour la réalité quotidienne des demandeurs d'emploi. Il serait désinvolte de leur imposer des déplacements sans prendre en compte le coût induit, surtout avec la hausse du prix des carburants, qui n'est pas finie !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Les amendements n°s35 et 37 affaibliraient le dispositif, alors que les critères qualifiant une offre raisonnable sont moins rigoureux envers les demandeurs d'emploi que ceux appliqués notamment en Allemagne. Avis défavorable.

L'amendement n°20 relève d'une analyse analogue, car il faut élargir le champ de la recherche lorsqu'elle n'aboutit pas.

De même, la commission repousse l'amendement n°36, car le demandeur d'emploi doit pouvoir évoluer sur le plan professionnel, sans compromettre les qualifications et compétences inscrites dans le PPAE.

L'amendement n°38 tend, lui aussi, à empêcher l'évolution des critères d'un emploi raisonnable. Est-il choquant qu'une personne inscrite à l'ANPE depuis un certain temps accepte un salaire égal à 95 % de sa rémunération antérieure ?

L'amendement n°39 est semblable au précédent, mais il s'agit cette fois du travail à temps partiel. L'avis est évidemment défavorable.

De façon analogue, la commission repousse l'amendement n°40.

L'amendement n°41 est explicitement satisfait par le dernier paragraphe de l'article premier. Il en va de même pour l'amendement n°42. On ne peut obliger personne à accepter un emploi dont la rémunération est inférieure au Smic.

Les amendements n°s17 et 50 sont d'actualité, mais le Gouvernement a annoncé qu'il prendrait des dispositions pour aider les salariés à faire face dans des conditions acceptables aux dépenses de transport. D'où l'avis défavorable de la commission.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n°35, car il faut éviter la constitution progressive d'un chômage de longue durée. Pour les mêmes raisons, il repousse les amendements n°s20 et 37.

Si l'amendement n°36 avaient été en vigueur, il aurait empêché une femme de 45 ans réceptionnant les sacs en plastique dans une PME d'évoluer, comme elle le souhaitait, vers le métier d'aide-soignante après un licenciement collectif. Une prise en charge accompagnée d'une offre de formation lui a permis de rebondir. Effectivement, ce ne sont pas les chats qui gardent les chèvres, en Haute-Loire, peut-être parce que nous sommes plus raisonnables qu'en Provence. (Rires)

Le Gouvernement repousse l'amendement n°38, pour les mêmes raisons.

L'amendement n°39 aboutirait à une situation ubuesque : un ancien salarié employé à mi-temps avant son licenciement pourrait ainsi retrouver un emploi à mi-temps, mais avec une rémunération doublée !

Avis défavorable à l'amendement n°40 pour la même raison que les amendements n°s35 et 37.

Le respect du Smic étant garanti à l'article premier, les amendements n°s41 et 42 sont inutiles.

Le coût de la mobilité, évoqué à l'appui de l'amendement n°17, peut correspondre à une difficulté réelle pour certains demandeurs d'emploi. Il convient d'améliorer encore les dispositifs spécifiques d'aide, qui sont insuffisants. Nous avons déjà introduit des contributions aux permis de conduire et le prêt de voiture, par le biais de certaines associations. Il faut persévérer dans cette direction. Avis défavorable.

L'amendement n°50 concerne également la mobilité. Contrairement à la plupart des pays européens, la France imposera de faibles contraintes en ce domaine, si bien que le coût des transports restera raisonnable.

L'amendement n°35 n'est pas adopté.

Mme Annie David.  - Si le respect du Smic ne peut être mis en cause, pourquoi écrire à l'antépénultième paragraphe du même article premier qu'après un an d'inscription, une offre d'emploi est raisonnable dès lors que sa rémunération atteint au moins le revenu de remplacement prévu à l'article L. 5421-1 ? RMI et allocation sociale de solidarité sont inférieurs au Smic. Les propos tenus par M. le ministre sont clairs, pas la rédaction du projet de loi !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Le travail proposé peut être à temps partiel.

L'amendement n°20 n'est pas adopté.

L'amendement n°37 n'est pas adopté.

Mme Annie David.  - De la réponse du président About, je conclus qu'un demandeur d'emploi à qui on propose un temps partiel dont la rémunération est égale aux minima sociaux est obligé de l'accepter. C'est favoriser la précarité à outrance !

M. Nicolas About, président de la commission  - Si c'est ce qu'il a demandé !

Mme Annie David.  - Non ! Le texte dit : « Après un an d'inscription, est considérée comme raisonnable l'offre d'un emploi rémunéré au moins à hauteur du revenu de remplacement prévu à l'article L.5421-1 ». Il sera obligé d'accepter !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Il n'y aura aucune obligation d'accepter un temps partiel si cela ne figure pas dans le PPAE. Ce qui est intangible, c'est la définition du Smic horaire. Si vous touchiez 1 600 euros d'allocations chômage, vous devez accepter un salaire de 85 % de cette somme. Et il y aura toujours la garantie du Smic comme socle, et la condition que cela ne tire pas les salaires vers le bas dans le bassin d'emplois. Mais on n'obligera personne à accepter un temps partiel.

M. Jean Desessard.  - Les ministres passent... Alors mieux vaut que soit écrit dans la loi qu'il s'agit du Smic mensuel.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Ce qui est dit figure au Journal officiel !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Il s'agit du Smic horaire. Et ce n'est pas le ministre qui compte, c'est la loi et la continuité de la République.

M. Jean Desessard.  - Si c'est le Smic horaire, cela peut s'établir au niveau de l'ASS. Il n'est écrit nulle part que cela interdit le temps partiel. On dira au chômeur que huit ou neuf heures de travail, c'est mieux que rien. Ensuite, le RSA va se greffer là-dessus ! Et on en arrivera bien au travail précaire !

M. Guy Fischer.  - On y est déjà !

L'amendement n°36 n'est pas adopté.

Mme Annie David.  - En commission, la représentante du Conseil d'État a bien insisté sur la nécessité d'adopter des textes clairs, sous peine de s'exposer aux jugements et à la jurisprudence de ce Conseil. Vous dites que le temps partiel ne sera pas imposé s'il n'a pas été prévu dans le PPAE. C'est oublier que ce projet personnalisé sera revu périodiquement. Quand il verra son salaire réduit à chaque révision, le demandeur d'emploi sera obligé d'accepter le temps partiel.

Cette appellation de PPAE est étrange car la majorité des demandeurs d'emploi sont des travailleurs privés d'emploi. L'expression adéquate aurait été : projet personnalisé de retour à l'emploi.

Tant que les choses ne sont pas clairement définies dans la loi, il y aura des contentieux et le Conseil d'État n'est pas prêt de chômer !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Je ne veux pas qu'il subsiste la moindre ambiguïté afin de ne pas poser de problèmes au Conseil d'État. Trois points sont indépendants de la volonté du demandeur d'emploi : ce sont les seuils des trois mois, six mois et un an. Mais il y a des critères qui ne peuvent pas lui être imposés : la nature du contrat par exemple et, donc, le temps partiel. Cela ne figure pas dans le projet de loi parce que nous n'y avons fait figurer que ce qui peut lui être imposé. Il ne doit donc demeurer aucune ambigüité : le temps partiel ne peut pas être imposé, ce n'est pas dans la loi !

L'amendement n°38 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s39 et 40.

M. Guy Fischer.  - Au bout d'un an, si le demandeur d'emploi refuse une offre, il bascule dans l'ASS ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Même au bout d'un an, s'il a prévu dans son PPAE un contrat à temps plein, on ne pourra lui proposer que du temps plein, avec une rémunération au moins égale au Smic. C'est explicitement écrit dans le projet de loi.

L'amendement n°41 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s17, 50 et 42.

L'article premier est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°45, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant l'article L. 5323-1 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Tout employeur qui dispose d'un emploi à pourvoir est tenu de présenter en priorité cette offre d'emploi à l'institution mentionnée à l'article 5312-1. »

Mme Annie David.  - Je ne suis toujours pas convaincue...

J'en viens à cet amendement. Si la liberté des uns s'arrête où commence celle des autres, les droits des uns trouvent leur origine dans les devoirs des autres : cela s'appelle la responsabilité sociale et fonde tout notre système républicain depuis qu'au sortir de la guerre de 1939, nos constituants ont décidé de faire de notre société une république sociale, reposant sur des droits collectifs importants et sur une notion qui fait notre spécificité, la solidarité nationale. Solidarité des jeunes à l'égard des plus âgés, des biens portant à l'égard des malades, des travailleurs à l'égard des salariés involontairement privés d'emplois. Mais également des entreprises envers les travailleurs : ceux-ci contribuant à leur richesse, elles doivent en retour leur donner les moyens de vivre. Or, si vous renforcez les obligations des demandeurs d'emplois, vous ne renforcez aucun de leurs droits et n'en créez pas de nouveau. Notre amendement crée, pour les employeurs, l'obligation de déposer leurs offres d'emploi à la nouvelle institution. Il serait en effet injuste de sanctionner les demandeurs d'emplois, alors que seules 30 % des offres d'emplois sont transmises à l'ANPE : la grande majorité échappe au service public pour être déposées sur des structures privées, notamment dématérialisées comme Internet, ou bien sont confiées aux réseaux de connaissances personnelles. Si l'on exige beaucoup des demandeurs d'emplois, on doit leur accorder beaucoup de droits...

Mais avec la réforme du service public de l'emploi, vous avez pris une autre option, celle de privilégier les structures privées contre les structures publiques. Il y a quelques mois, M. Boulanger, inspecteur général des affaires sociales, remettait à Mme Lagarde « une contribution à la préparation de la convention tripartite entre l'État, l'Unedic et la nouvelle institution créée par la loi du 13 février 2008 ». Le groupe CRC ne partage pas les conclusions de ce document, conclusions qui ont inspiré votre projet de loi. J'en veux pour exemple la proposition de tripler -ce n'est pas rien- le nombre de demandeurs d'emplois dont le placement serait confié à des organismes de droit privé. Les craintes de privatisation rampante du service public, que mon groupe avait formulées lors de la discussion sur la modernisation du marché du travail, se sont malheureusement confirmées. M. Boulanger préconise le recours aux sociétés privées de placement, tout en précisant : « il n'existe pas de preuve générale que le secteur privé soit plus efficace que le secteur public ».

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Cet amendement tend à réintroduire dans la loi le monopole de l'ANPE alors que la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005 l'a supprimé.

Il n'est pas question d'imposer au nouvel opérateur une productivité plus grande. En revanche, il a une obligation de résultat car nous voulons que les demandeurs d'emploi se réinsèrent le plus rapidement possible dans le monde du travail. Le nouvel opérateur devra se montrer à la hauteur de cet enjeu : c'est un des aspects essentiels du service public. Avis défavorable.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Indépendamment de ce que l'on peut penser sur le fond, il y a une convention de l'Organisation internationale du travail qui exclut de rétablir le monopole de placement de l'ANPE : avis défavorable.

Mme Annie David.  - Comme vous voulez que cette nouvelle institution soit à la hauteur de vos attentes, pourquoi ne pas prévoir qu'elle regroupera l'ensemble des offres d'emploi ? Ainsi, les demandeurs d'emplois seraient réellement informés de toutes les offres.

L'amendement n°45 n'est pas adopté.

Article 2

L'article L. 5412-1 du code du travail est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 5412-1. - Est radiée de la liste des demandeurs d'emploi, dans des conditions déterminées par un décret en Conseil d'État, la personne qui :

« 1° Soit ne peut justifier de l'accomplissement d'actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi, de créer ou de reprendre une entreprise ;

« 2° Soit, sans motif légitime, refuse à deux reprises une offre raisonnable d'emploi mentionnée à l'article L. 5411-6-2 ;

« 3° Soit, sans motif légitime :

« a) Refuse de suivre une action de formation ou d'aide à la recherche d'emploi proposée par l'un des organismes mentionnés à l'article L. 5311-2 et s'inscrivant dans le cadre du projet personnalisé d'accès à l'emploi ;

« b) Refuse de répondre à toute convocation des services et organismes mentionnés à l'article L. 5311-2 ou mandatés par ces services et organismes ;

« c) Refuse de se soumettre à une visite médicale auprès des services médicaux de main-d'oeuvre destinée à vérifier son aptitude au travail ou à certains types d'emploi ;

« d) Refuse une proposition de contrat d'apprentissage ou de contrat de professionnalisation ;

« e) Refuse une action d'insertion ou une offre de contrat aidé prévues aux chapitres II et IV du titre III du livre Ier de la présente partie ;

« 4° Soit a fait de fausses déclarations pour être ou demeurer inscrite sur cette liste. ».

Mme Annie David.  - Ce projet de loi est néfaste et c'est pour cela que, ce soir, je parle beaucoup : pour mes collègues mais aussi pour tous les chômeurs démunis de leurs droits.

Avec cet article, vous stigmatisez les demandeurs d'emploi. Vous voulez inciter à retourner au travail les demandeurs d'emplois qui sont, à vous entendre, responsables de leur situation. En renforçant les sanctions, vous pensez qu'ils trouveraient plus rapidement un travail. Belle preuve de confiance à leur égard ! Nous regrettons que cet article ne sanctionne pas les manquements de la future institution à l'égard des salariés privés d'emploi. Aucune sanction n'est également prévue à l'encontre des entreprises qui manquent à leurs obligations à l'égard des demandeurs d'emploi comme celles qui embauchent les salariés en fonction de leurs origines, celles qui refusent les demandeurs d'emploi envoyés par l'ANPE ou qui déposent des annonces qui ne peuvent être pourvues.

Vous préférez nous soumettre un texte qui durcit les sanctions en direction des demandeurs d'emplois qui refuseraient volontairement toutes les offres qui leurs sont faites, alors même qu'ils ne représentent que 2 % des inscrits, alors que vous refusez de poursuivre les employeurs indélicats, sans parler de l'éventuelle dépénalisation du droit des affaires ou de la suppression des peines en cas d'abus de bien sociaux. Pour démontrer que les demandeurs d'emploi sont responsables de leur situation, vous vous référez aux métiers en tension alors que nous savons bien que les offres d'emploi ne sont globalement pas si nombreuses. Il faudrait que les demandeurs d'emploi acceptent de travailler dans des métiers qu'ils n'ont pas choisis parce ces derniers manquent de bras ! Mais vous êtes-vous demandé pourquoi ? Les conditions de travail et de salaire ne sont-elles pas en cause ?

A l'heure où les spécialistes parlent de stress au travail, de santé, où le drame de l'amiante éclate au grand jour, c'est de ce côté-là qu'il faut chercher. Jeudi dernier, M. Dassault a souhaité que l'Unedic soit plus productive, à croire qu'il s'agit de mener une politique de classe avec des lois d'exceptions pour les puissants et des sanctions pour les plus faibles. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Jean Desessard applaudit aussi)

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

Supprimer cet article.

M. Jean Desessard.  - Non, les chômeurs ne sont pas responsables de leur situation ! Supprimons donc cet article pour éviter les sanctions à leur encontre, alors qu'ils sont déjà assez sanctionnés, isolés, exclus. Votre logique est fausse et insultante pour les demandeurs d'emploi. Arrêtez de brandir l'épouvantail de chômeurs fainéants ! Ces femmes et ces hommes veulent bénéficier d'une reconnaissance financière et surtout sociale. Il y a quelques mois, nous avons eu un débat sur les stagiaires et nous avons eu maints exemples de jeunes qui acceptaient des stages pendant des années payés 300 euros par mois pour pouvoir accéder au marché du travail. Les gens aspirent au travail pour s'insérer dans la société et gagner leur vie. Alors, la notion de chômeurs fainéants est très relative.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Très !

M. Jean Desessard.  - Il y aurait pourtant une solution toute simple : embaucher des salariés là où les besoins sont les plus criants : dans les hôpitaux, dans l'éducation nationale, à la justice ! Tentez l'expérience : vous verrez que beaucoup répondront à l'appel ! Mais ne demandez pas aux chômeurs d'accepter n'importe quelle offre d'emploi à n'importe quelle condition.

Connaissez-vous la différence entre un diplôme et un concours ? Si l'on travaille, on est quasiment sûr d'obtenir un diplôme. En revanche, le concours n'offre qu'un nombre de places limité et ceux qui arrivent derrière, même s'ils sont particulièrement performants, ne sont pas pris. Eh bien, même si je le déplore, le marché du travail s'apparente beaucoup plus à un concours qu'à un diplôme. Vous aurez beau dire aux chômeurs, faites des efforts, acceptez de gagner moins, faites plus de kilomètres, s'il n'y a pas de travail, ils resteront sur le côté du chemin.

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 5412-1 du code du travail, après les mots :

Conseil d'État

insérer les mots :

pris après avis des organisations syndicales de salariés et des organisations d'employeurs

Mme Raymonde Le Texier.  - Nous proposons de maintenir une clause du code du travail qui a inexplicablement disparu dans ce projet de loi. Il serait pourtant tout à fait logique que les organisations représentatives d'employeurs et de salariés soient consultées sur le projet de décret précisant les conditions de radiation. Pouvez-vous nous éclairer sur cette suppression ?

M. le président.  - Amendement n°46, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer le 1° du texte proposé par cet article pour l'article L. 5412-1 du code du travail.

Mme Annie David.  - Il convient de supprimer la possibilité de radier un demandeur d'emploi si celui-ci ne peut justifier de l'accomplissement d'actes répétés et positifs en vue de retrouver un emploi, de créer ou de reprendre une entreprise. Nous dénonçons cette méfiance à l'égard des demandeurs d'emplois d'autant que personne ne peut se satisfaire d'une rémunération de 420 euros par mois, surtout dans l'actuel contexte inflationniste.

Vous voulez radier un demandeur d'emploi non parce qu'il n'aurait pas effectué des « actes positifs et répétés » de recherche d'emploi, mais parce qu'il ne parviendrait pas à en fournir la preuve. Comment faire ? Une simple copie des courriers envoyés suffirait-elle ? Mais un demandeur d'emploi pourrait très bien rédiger des courriers sans jamais les envoyer ! Faudrait-il que le demandeur d'emploi en apporte la preuve grâce à un accusé de réception ? A quatre euros la lettre, cela fait cher l'offre de service et je ne suis pas sûre que l'employeur éventuel apprécierait un tel courrier. Les réponses des entreprises aux demandes d'emplois seraient une preuve indiscutable, encore faudrait-il qu'elles répondent !

Pourquoi alors ne pas prévoir que le nouvel organisme centralise les lettres de motivation, les envoie et reçoive les réponses qu'il retournerait aux demandeurs d'emploi ? Vous avez refusé cette solution en laissant au seul demandeur d'emploi la charge de la preuve de sa recherche d'emploi, ce qui permet de le radier d'autant plus aisément puisque cette preuve n'est pas aisée à apporter.

Quant à la reprise d'une entreprise, il serait temps que la majorité cesse ses simagrées : aux demandeurs d'emploi, aux jeunes des banlieues, aux séniors vous leur dites : créez votre entreprise. D'ailleurs, la loi de modernisation de l'économie que nous allons examiner regorge de telles incitations, qui ont l'avantage d'individualiser les problèmes et d'empêcher un quelconque appel à la solidarité nationale qui d'ailleurs s'étiole.

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le 2° du texte proposé par cet article pour l'article L. 5412-1 du code du travail.

Mme Raymonde Le Texier.  - Nous ne souhaitons pas que le refus d'une offre « raisonnable » d'emploi soit sanctionné par la radiation du demandeur d'emploi. Notre rôle n'est pas de vous aider à rédiger ce texte, mais la rédaction actuelle laisse un doute sur le fait que la radiation intervienne au deuxième refus d'une offre « raisonnable » d'emploi, ou bien ultérieurement. L'usage de l'impératif enlève toute marge d'appréciation aux agents du service public de l'emploi : ils ne pourront tenir aucun compte de la situation familiale du demandeur d'emploi, lequel, après six mois de chômage, sera tenu d'accepter l'offre d'emploi quelle qu'elle soit, dans un rayon de trente kilomètres. La notion de motif « légitime » de refus, pourtant mise en avant, est vidée de tout contenu.

M. le président.  - Amendement identique n°47, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

M. Guy Fischer.  - Avec l'offre « raisonnable » d'emploi, dont le caractère « raisonnable » est décidé par l'institution bien plus que par le demandeur d'emploi, vous allez obliger celui-ci à devoir accepter une rémunération inférieure au Smic, ou bien à être radié du chômage. Je me suis déjà inquiété auprès de Mme Lagarde, du nombre croissant de grilles salariales débutant en dessous du Smic ; Mme Lagarde a trouvé cela normal, et maintenant, avec ce texte, vous institutionnalisez la précarité. Des milliers de chômeurs, vont devoir choisir entre la radiation, ou un salaire dont vous fixez le plancher au salaire de remplacement.

Nous débattrons prochainement du revenu de solidarité active (RSA), que le Gouvernement entend voir remplacer les minima sociaux, ce qui n'est pas une mauvaise chose. Mais, quelles que soient vos dénégations, et votre façon de me tacler dès que je vous rappelle les choses, et en dépit même des chiffres sur le recul du temps partiel, la précarité s'étend et s'étendra encore -j'aimerais avoir tort, mais je crains ne pas me tromper- avec les salaires bien en dessous du Smic que vous encouragez là !

En fait, vous êtes en mission commandée par le Président de la République, qui veut une sanction après deux refus d'offres d'emploi : il a pris langue avec le Medef...

M. Jean Desessard.  - On le voit souvent avec Mme Parisot !

M. Guy Fischer.  - Ils sont inséparables ! Tout est bon, et surtout les radiations, pour passer sous la barre des 5 % en 2012 !

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission.

Avant le deuxième alinéa (a) du 3° du texte proposé par cet article pour l'article L. 5412-1 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...) Refuse de définir ou d'actualiser le projet personnalisé d'accès à l'emploi prévu à l'article L. 5411-6-1 ;

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Le refus pour un demandeur d'emploi, de participer à l'élaboration du PPAE, ou à son actualisation, doit être sanctionné par une radiation. Il y aura des cas de mauvaise volonté, les agents doivent pouvoir faire pression pour défendre le PPAE, clé de voûte du nouveau dispositif d'accompagnement.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par Mme Le Texier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le d et le e du 3° du texte proposé par cet article pour l'article L. 5412-1 du code du travail.

Mme Raymonde Le Texier.  - Le refus de formation ne doit pas être un motif de radiation. La formation doit être accessible à tous, mais elle ne doit pas être une obligation. Le Danemark passe pour un modèle, à juste titre, considérons leur expérience d'un peu plus près. Le ministre danois de l'emploi, avec qui j'ai eu la chance de converser il y a peu, nous disait que dans certains cas, la mise en situation d'emploi doit précéder la formation, parce qu'elle est rejetée et qu'elle ne peut intervenir qu'en second, après une phase d'emploi où l'on reprend confiance en soi. Nous connaissons de tels cas, en particulier de jeunes très éloignés de l'emploi, qui refusent d'aller à la mission locale, parce qu'ils ne veulent pas retourner en formation et qu'ils veulent d'abord du travail. La radiation pour refus de formation n'est donc pas souhaitable, il faut plus de souplesse, et ne pas traiter les demandeurs d'emploi comme des objets statistiques !

M. le président.  - Amendement identique n°48, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Mme Annie David.  - La radiation pour refus de formation, risque d'accroître la précarité. Le salaire d'un apprenti de plus de 21 ans, après un an d'apprentissage, atteint péniblement 53 % du Smic, soit 693,71 euros. Vous ne laissez pas d'autre choix à un demandeur d'emploi que de vendre sa force de travail pour un salaire de misère ! Vous nous répondrez que ce salaire progresse dans le temps, mais il n'atteint que 78 % du Smic après trois ans, soit 1 020 euros. Et il faut faire face à des frais fixes qui ne cessent d'augmenter, comment pensez-vous que ces salariés s'en sortiront ?

Le patronat, lui, ne peut que s'en réjouir : il disposera d'une main-d'oeuvre à très bon marché, et il sera exonéré de charges sociales ! Les caisses de la sécurité sociale sont vides, les plans de rigueur se suivent, mais vous continuez d'exonérer toujours plus les employeurs !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Ce texte organise un passage de l'offre valable, à l'offre raisonnable d'emploi, sur des critères acceptés par le service public de l'emploi et le demandeur d'emploi dans le cadre du PPAE, qui définit un engagement réciproque, des droits et des devoirs.

Je ne peux donc être favorable à l'amendement n°16. La seule nouveauté que nous introduisons est la radiation faisant suite au refus de deux offres raisonnables car des sanctions, qui vont de la radiation de quinze jours au premier manquement à une radiation pouvant aller de deux à six mois en cas de refus répété de formation ou d'offre d'emploi, sont déjà prévues à l'article 5412-1 du code du travail. Le processus est donc très graduel et ne fait que décaler l'indemnisation dans le temps puisque le demandeur retrouve, à sa réinscription, l'intégralité de ses droits. La commission consultative rend un avis avant le prononcé de la sanction et il existe en outre des possibilités de recours auprès du directeur départemental adjoint.

Défavorable à l'amendement n°12 : la consultation du comité supérieur de l'emploi est déjà obligatoire pour tous les décrets relatifs aux politiques de l'emploi. Même avis sur le n°46 qui entend supprimer l'obligation de recherche d'emploi, laquelle fait partie des motifs du premier groupe dans la grille de radiation. Défavorable aux amendements identiques n°s13 et 47 : le refus de deux offres sans motif légitime doit être assorti d'une sanction. Même avis, enfin, sur les amendements identiques n°s14 et 48 : les dispositions auxquelles ils font référence existent déjà dans le code du travail.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Défavorable à l'amendement n°16, qui supprime toute une partie du dispositif. Je ne me lancerais pas dans une dissertation sur l'esprit de l'éducation selon Jules Ferry : il y aura bientôt d'autres occasions.

Sagesse sur l'amendement n°12. La première rédaction prévoyait explicitement une concertation avec les partenaires sociaux, mais la loi du 21 février 2007 en ayant fait une obligation, cette mention est désormais superflue. Défavorable au n°46, dont Mme David a eu l'honnêteté de reconnaître elle-même qu'il revient sur le droit existant. Même avis sur les amendements identiques n°s13 et 47. Je n'ai, pour ma part, pas de doute quant à la bonne application du dispositif par le service public de l'emploi. Évitons, un jour comme aujourd'hui, de tacler... Favorable à l'amendement n°3 du rapporteur. Défavorable, enfin, aux amendements identiques n°s14 et 48, qui visent des dispositions déjà existantes.

L'amendement n°16 n'est pas adopté.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Le ministre a émis un avis de sagesse sur l'amendement n°12, mais pour la beauté des textes, la commission estime préférable d'éviter les dispositions redondantes. Son avis reste défavorable.

L'amendement n°12 n'est pas adopté.

L'amendement n°46 n'est pas adopté, non plus que les amendements identiques n°13 et n°47.

Mme Annie David.  - Avant même la mise en place du PPAE, l'amendement du rapporteur, au motif que quelques rares individus pourraient ne pas vouloir s'engager, prévoit déjà des sanctions. C'est un procès d'intention fait à l'ensemble des demandeurs d'emploi, qui trahit une philosophie choquante.

L'amendement n°3 est adopté.

Les amendements identiques n°14 et 48 ne sont pas adoptés.

L'article 2, modifié, est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°49, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après l'article 2, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur concomitamment à la mise en oeuvre de la nouvelle offre de service par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du code du travail et au plus tard douze mois à compter de sa promulgation.

Mme Annie David.  - Le projet personnalisé d'accès à l'emploi ne peut en aucun cas être efficient s'il n'est pas couplé avec l'offre de service qui sera proposée par la nouvelle institution et dont le contenu dépend de la conclusion de la négociation relative à l'assurance chômage. Nous avons du mal à comprendre que ce texte entre en application alors que le dispositif n'entrera en vigueur qu'au 1er janvier 2009.

Il convient donc de préciser que les dispositions de la loi entreront en vigueur concomitamment à la mise en oeuvre de la nouvelle offre de service par le nouvel opérateur et, afin de ne pas risquer de priver d'efficacité des dispositions législatives, au plus tard douze mois à compter de sa promulgation.

M. le président.  - Amendement n°51, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 2, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Jusqu'à la date de création de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du code du travail et prévue par l'article 9 de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi, l'Agence nationale pour l'emploi se substitue à l'institution susmentionnée pour l'application des dispositions de la présente loi.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Cet amendement répondra aux inquiétudes de Mme Le Texier puisqu'il organise la période intermédiaire.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable à l'amendement n°49 : depuis 2006 qu'existent les contrats de progrès, l'ANPE a appris à faire. Favorable au n°51 du Gouvernement.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Défavorable au n°49 : le dispositif ne surgira pas du néant en 2009. Il prend appui sur l'existant pour s'améliorer au fur et à mesure.

L'amendement n°49 n' est pas adopté.

Mme Raymonde Le Texier.  - En règle générale, les conseillers à l'ANPE suivent environ 150 personnes. Il leur faut aussi entretenir des contacts avec les entreprises, et pas seulement par téléphone : ils doivent aller voir sur place. Je ne vois donc pas comment, concrètement, ils pourraient faire ce que vous leur demandez avec ce projet de loi. Comment voyez-vous les choses ?

L'amendement n°51 est adopté et devient un article additionnel.

Explications de vote

Mme Annie David.  - Je vous épargnerai la répétition de ce que nous avons dit tout au long de la soirée. Ce projet de loi est tout à fait cohérent avec la logique libérale que vous mettez en oeuvre d'un texte l'autre et qui va amplifier la précarité pour le plus grand nombre. Nous avons mené une opposition constructive en essayant d'améliorer ce qui pouvait l'être ; nous avons eu un amendement adopté, je m'en réjouis, mais cela ne suffira pas à nous faire voter pour un texte que nous réprouvons.

Je vous souhaite à tous de ne jamais vous retrouver dans la situation d'avoir à subir les dispositions que vous allez adopter !

Mme Raymonde Le Texier.  - Ce projet de loi sous-entend que les chômeurs ne sont pas innocents de leur sort. Outre qu'ils sont mis en grande difficulté par leur licenciement, ils subissent l'opprobre et le soupçon de ne rien faire pour retravailler. Toutes les études montrent pourtant que les contraintes ne sont d'aucune utilité si, en face, il n'y a pas de vrais emplois à proposer. A moins qu'on ne se résigne à ramener ces travailleurs au rang de ce que l'on appelait autrefois sous-prolétariat.

Ce texte est donc constitué d'obligations, d'injonctions et de menaces qui ne serviront pas à développer l'économie, mais plutôt à réaliser des économies sur les dépenses sociales au détriment des plus pauvres. Son objectif n'est pas de favoriser la création d'emplois mais de diminuer le nombre d'allocataires de l'assurance chômage par tous les moyens possibles, même au prix d'une petite démagogie.

C'est la croissance qui fait les emplois, et la croissance n'est pas au rendez-vous. On peut incriminer la conjoncture et les excès du capitalisme financier, celui que M. Bébéar appelle le « capitalisme du désastre ». On peut raconter que les caisses sont vides après avoir promis monts et merveilles. Mais tout cela ne fait pas une politique économique digne de ce nom.

Jusqu'ici, c'est la consommation qui tirait le peu de croissance de notre économie. Or, malgré un rebond au moins de mai, elle suit une tendance à la baisse. La croissance aussi. Et nous ne la retrouverons pas en augmentant le nombre des travailleurs pauvres, le nombre de ceux qui s'échinent pour ne pas gagner de quoi vivre. Et sont touchés, par contagion, les petits entrepreneurs, les commerçants et les artisans. Aucune perspective n'est offerte, sinon une aggravation de la condition de nos concitoyens, aggravation à laquelle contribue ce texte, de manière modeste mais significative.

Quant aux salariés, on leur a promis qu'ils pourraient travailler plus pour gagner plus. Ce texte leur intime l'ordre, en toutes lettres, de travailler plus pour gagner moins, avec la menace terrifiante de ne plus rien gagner du tout.

Nous exprimons notre totale désapprobation d'une politique qui laisse filer les profits spéculatifs contre le partage équitables des richesses, d'une politique entièrement soumise au libéralisme le plus doctrinaire, loin de tout réalisme, loin de ce « bon sens » dont vous vous réclamez.

Vous nous trouvez durs avec ce texte, mais c'est qu'il est dur avec les Français ! Vous nous dites qu'il ne faut pas tomber dans la caricature, pourtant, sous le vernis de la raison, ce texte frôle la caricature. Vous nous dites que ce texte, c'est ce que les Français attendaient. Ils n'attendent pas plus de précarité et plus de bas salaires. Ils n'attendent pas de voir la baisse du chômage sur le petit théâtre de la politique, mais juste de pouvoir vivre décemment des fruits de leur travail. Ce texte ne les y aidera probablement pas.

« La croissance, j'irai la chercher avec les dents », avait lancé M. Sarkozy pendant la campagne. Malheureusement, cela ne suffira pas. La croissance et son corollaire, l'emploi, ne reviendront dans notre pays qu'avec une politique favorisant l'investissement productif, la recherche, les travaux d'infrastructure, les emplois convenables et des salaires corrects. Vous accomplissez méthodiquement l'inverse, ce qui justifie notre opposition à ce texte.

Le groupe socialiste votera contre ce projet de loi.

M. Bernard Seillier.  - Je répète tout le bien que je pense de ce texte. Je m'étonne de la position prise par certains collègues, dont je connais la profonde humanité : qu'apporte le PPAE sinon un accompagnement, une relation dans le temps entre un agent du service public et un demandeur d'emploi ? Voilà une relation humaine qui s'inscrit dans la durée. L'humanité est secrétée par la procédure même que ce projet de loi met en oeuvre !

La grande majorité du RDSE votera pour ce progrès humain.

M. Jean Desessard.  - Je remercie le président pour la bonne tenue de ce débat, ainsi que le rapporteur et le ministre, qui ont pris le temps de bien nous expliquer. J'ai admiré les contributions des sénateurs UMP, ainsi que leurs passionnants amendements. (Sourires)

M. Nicolas About, président de la commission  - Qui ne dit mot consent !

M. Jean Desessard.  - Il y a une divergence profonde entre la gauche et la droite.

M. Nicolas About, président de la commission  - Quand la gauche est au pouvoir, elle ne change pas grand-chose sur les sanctions !

M. Jean Desessard.  - La gauche dit que le problème de l'emploi relève d'abord de l'économie ! Elle s'intéresse donc à des plans d'accès à l'emploi, à la santé, à l'éducation, à la justice, à l'environnement...

M. Nicolas About, président de la commission  - Et elle a trois millions de chômeurs.

M. Jean Desessard.  - Vous dites qu'il y a 500 000 emplois non pourvus et que 5 % des chômeurs ne sont pas prêts à travailler. Pourquoi tous les autres chômeurs n'occupent-ils pas ces emplois ? Vous ne vous interrogez pas sur les bas salaires, sur la pénibilité du travail, sur les horaires, sur la formation. Faut-il vraiment que, dans les entreprises, le ménage soit fait à 7 heures du matin parce que les cadres n'acceptent pas que l'on passe l'aspirateur à 10 heures dans leurs bureaux ? Faut-il renvoyer vendeurs et serveurs aux heures où il y a moins de clients ?

M. Nicolas About, président de la commission.  - Oui.

M. Jean Desessard.  - Vous voulez adapter l'économie française, les conditions de travail, à la compétition internationale. Est-ce cela votre projet « humain » pour les travailleurs ?

Vous croyez que vous allez enrichir la France. Au contraire ! Les pauvres vont s'appauvrir. Peut-être les riches s'enrichiront-ils, mais ils vont résider fiscalement ailleurs ! (Mme David approuve) Quand les pauvres s'appauvrissent, c'est tout le pays qui s'appauvrit.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Je remercie chacun pour la qualité de ce débat : sur un sujet aussi sensible que notre politique sociale et de solidarité, les échanges ont été constructifs et respectueux. Ce fut un honneur pour moi de présenter mon premier projet de loi devant le Sénat. Merci au rapporteur, dont le travail a beaucoup enrichi le texte. Merci au président About, qui m'a prodigué tout au long du débat de sages conseils.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Flatteur !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.  - Merci à tous ceux qui ont contribué au débat. Merci au président Gouteyron, élu, lui aussi, d'un territoire qui m'est cher.

Ce projet de loi s'insère dans un dispositif d'ensemble qui vise à améliorer le fonctionnement du service public de l'emploi. Il s'agit de substituer une logique de sur mesure, prenant en compte la diversité des trajectoires, à la logique administrative et anonyme qui a prévalu dans la gestion du chômage de masse.

Il faut trouver un équilibre entre l'accompagnement des demandeurs d'emploi et le contrôle de ceux, certes minoritaires, qui abusent du système. C'est à ce prix que nous pourrons conserver une politique sociale généreuse. C'est une question d'équité, car il s'agit de l'argent de l'ensemble de nos compatriotes.

Nous obtenons les meilleurs résultats depuis trente ans en matière de politique de l'emploi. Il reste d'autres pages à écrire : la mise en oeuvre du service public de l'emploi, la réforme de la formation professionnelle, le retour vers l'emploi des séniors et des jeunes, exclus depuis trop longtemps du marché du travail. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Nicolas About, président de la commission.  - Je remercie à mon tour la présidence. Au nom de tous les sénateurs, je remercie également le ministre, qui a réservé son premier texte au Sénat, pour la grande qualité de sa prestation, la clarté de ses interventions et son respect envers tous les membres de l'assemblée. (Applaudissements à droite et au centre)

L'ensemble du projet de loi est adopté.

M. le président.  - Je m'associe aux éloges de M. About et je remercie tous les intervenants pour ce débat de qualité.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 26 juin 2008, à 9 h 30.

La séance est levée à minuit cinq.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du jeudi 26 juin 2008

Séance publique

A 9 heures 30

1. Discussion du projet de loi (n°389, 2007-2008) instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire obligatoire. (Urgence déclarée)

Rapport (n°408, 2007-2008) de M. Philippe RICHERT, fait au nom de la commission des affaires culturelles.

A 15 heures

2. Questions d'actualité au Gouvernement.

3. Suite de la discussion du projet de loi instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire obligatoire. (Urgence déclarée)

A 21 heures 30

4. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur le Livre blanc sur la défense.

5. Projet de loi (n°276, 2007-2008), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord relatif aux services de transport aérien entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Madagascar.

Rapport (n° 383, 2007-2008) de M. André Vantomme, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

6. Projet de loi (n° 278, 2007-2008), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord multilatéral entre la Communauté européenne et ses États membres, la République d'Albanie, l'ancienne République yougoslave de Macédoine, la Bosnie-et-Herzégovine, la République de Bulgarie, la République de Croatie, la République d'Islande, la République du Monténégro, le Royaume de Norvège, la Roumanie, la République de Serbie et la Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo sur la création d'un espace aérien commun européen.

Rapport (n°384, 2007-2008) de M. Philippe Nogrix, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

7. Suite de la discussion du projet de loi instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire obligatoire. (Urgence déclarée)

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DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- M. le Premier Ministre un projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de l'Australie concernant la coopération en matière de défense et le statut des forces ;

- M. Gérard Roujas un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le Comité international des poids et mesures portant amendement de l'accord du 25 avril 1969 relatif au siège du Bureau international des poids et mesures et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (n°466, 2005-2006) ;

- MM. François Marc et Michel Moreigne un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le bilan des activités de contrôle sur les services du Premier ministre ;

- M. André Ferrand un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur les administrations chargées de l'immigration économique ;

- M. Josselin de Rohan, Mme Josette Durrieu, MM. Jean-Pierre Fourcade, Robert Hue, Yves Pozzo di Borgo et Roger Romani un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées à la suite d'une mission en Russie effectuée du 21 au 25 avril 2008 par une délégation chargée d'étudier la situation intérieure, ainsi que le rôle et la place de la Russie sur la scène internationale ;

- M. André Trillard un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et la République d'Albanie, d'autre part (n°227, 2007-2008) ;

- M. François-Noël Buffet un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la protection du secret des sources des journalistes (n°341, 2007-2008) ;

- M. Henri Revol, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, un rapport sur l'évolution du secteur de la micro/nanoélectronique, établi par M. Claude Saunier, sénateur, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ;

- M. Marcel-Pierre Cléach une proposition de loi tendant à allonger le délai de prescription de l'action publique pour les diffamations, injures ou provocations commises par l'intermédiaire d'Internet ;

- Mme Michèle André, MM. Alain Milon et Henri de Richemont un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires sociales et de la commission des lois Constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale par le groupe de travail sur la maternité pour autrui.