Questions cribles sur l'avenir des territoires ruraux

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur l'avenir des territoires ruraux.

L'auteur de la question et le ministre disposent chacun de deux minutes. Une réplique d'une minute au maximum peut être présentée soit par l'auteur de la question, soit par un membre de son groupe politique.

M. Michel Teston.  - A l'issue des assises de la ruralité, le chef de l'État a prononcé le 9 février un discours sur la nouvelle économie rurale, mais deux constats nous font douter qu'il souhaite passer aux actes.

Tout d'abord, il n'y a jamais eu autant de textes défavorables aux territoires ruraux que depuis 2002, a fortiori depuis 2007. Ainsi, la révision générale des politiques publiques (RGPP) supprime des postes dans les gendarmeries au moment où la nouvelle carte judiciaire complique l'accès à la justice. Dans les services publics industriels et commerciaux, on réduit la desserte des gares et on transforme à un rythme accéléré les bureaux de poste en agences postales ou en relais postaux.

Parallèlement, l'État ne fait rien pour améliorer la présence médicale ou paramédicale, alors que la loi Hôpital, patients, santé, territoires (HPST) poursuit le démantèlement du système de soins.

Comment ne pas rappeler qu'il a fallu attendre le grand emprunt pour voir l'État s'engager en faveur du haut et du très haut débit ? Au demeurant, les entreprises et les habitants des territoires ruraux figureront encore en 2020 parmi les 30 % non desservis.

La seconde raison de notre scepticisme tient au fait que le Président de la République a passé sous silence la charte sur l'organisation de l'offre de services publics et au public en milieu rural, signée en juillet 2006 par M. de Villepin, alors Premier ministre. Ignorée depuis la fin du printemps 2007, cette charte pourrait contribuer à maintenir des services rendus à la population, mais elle doit devenir contraignante.

Le Gouvernement est-il disposé à le faire ? Est-il prêt aux actes concrets assurant l'avenir des territoires ruraux ?

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.  - Au moins, vous ne donnez ni dans la modération, ni dans l'optimisme.

M. Daniel Raoul.  - Il est objectif.

M. Michel Mercier, ministre.  - Vous avez dressé un tableau excessif.

Les assises des territoires ruraux et les conclusions que le Président de la République en a tirées dans le discours prononcé à Morée apportent des réponses pragmatiques et concrètes.

Ainsi, le Président de la République a annoncé que les crédits seraient disponibles chaque année pour des maisons médicales pluridisciplinaires, dont 250 ouvriront en trois ans. Un internat sera créé pour former des médecins généralistes ruraux. Ces décisions seront consacrées par un comité interministériel d'aménagement du territoire qui se réunira d'ici le mois d'avril sous la présidence du Premier ministre.

Simultanément, la charte sur l'organisation de l'offre de services publics et au public en milieu rural sera rendue opposable.

Enfin, les territoires ruraux disposeront tous de liaisons internet à haut débit.

Plutôt qu'une énième loi sur les territoires ruraux, je veux que la population constate sur place des améliorations concrètes.

M. Jean-Jacques Lozach.  - Si l'avenir des services publics est à l'image des vingt dernières années, il est sinistre car l'égalité des chances et la péréquation régressent.

Vous avez ignoré le rapport que MM. Belot et François-Poncet ont consacré en 2004 à la péréquation. Le 18 février, j'ai entendu Mme Lagarde déclarer que les Hauts-de-Seine devaient aider la Creuse. Je l'entends depuis vingt ans, mais cette obligation doit être imposée par la loi !

Le recul de la péréquation explique la déception suscitée par le discours du Président de la République.

M. Gérard Le Cam.  - L'avenir des territoires ruraux est devenu récemment une préoccupation majeure du Gouvernement : l'association des maires ruraux a regretté « des délais trop courts et une organisation précipitée ».

En 2004, M. Gaymard a présenté la loi relative aux territoires ruraux comme le texte qui allait relancer le monde rural. Ce fut un échec cuisant.

Aujourd'hui, M. Mercier veut des territoires d'innovation, mais sa rhétorique délicieuse ne dissimule guère l'énormité des atteintes portées par la droite au monde rural. Vous pouvez toujours afficher de beaux objectifs, la réalité est que vous avez affaibli ces territoires, qui vous sont si chers. Heureusement, nombre de collectivités territoriales ont servi d'amortisseur face à la destruction des services publics par l'État. Et c'est à ces collectivités que le Gouvernement s'attaque en les dépouillant de leurs ressources et de leurs compétences !

La présence postale se réduit à des points de contact n'offrant aucun service bancaire. L'État se désengage de la desserte des territoires enclavés. La fracture numérique touche 31 % de la population et 70 % du territoire ; les espaces ruraux sont les grands oubliés. Les soins ne sont plus assurés lorsque 182 blocs opératoires sont menacés, lorsque la fermeture de maternités touche les zones rurales de plein fouet.

Monsieur le ministre, êtes-vous disposé à pratiquer une politique prenant le contre-pied de ce que fait votre Gouvernement, pour assurer enfin aux territoires ruraux un avenir qui ne soit pas la désertification ? (Applaudissements à gauche)

M. Michel Mercier, ministre.  - Vous avez raison sur un point : les territoires ruraux constituent une préoccupation majeure du Gouvernement, qui élabore la politique la plus concrète possible après les assises auxquelles 90 000 personnes ont participé. Il ne s'agit pas de proposer une nouvelle loi, mais de prendre des mesures concrètes.

En matière de présence postale, je répète que la France est le seul pays où la loi garantisse l'existence de 17 000 points de contact.

M. René-Pierre Signé.  - Jusqu'à quand ?

M. Michel Mercier, ministre.  - Jusqu'à ce que vous votiez une loi y mettant fin, ce que nous ne vous proposerons jamais, car la présence postale est un véritable besoin pour la population !

Contre la fracture numérique, le Gouvernement mobilisera le grand emprunt. Une mission a été confiée sur ce point au sénateur Maurey. Nous recevons très vite les premiers projets émanant des collectivités territoriales. (Applaudissements à droite)

Mme Mireille Schurch.  - Avec 96 médecins généralistes pour 100 000 habitants, l'Allier a la couverture la plus faible de l'Auvergne ; et c'est le conseil général qui propose une bourse pour attirer de jeunes médecins ! Comment le centre hospitalier de Montluçon pourra-t-il retrouver l'équilibre avec un déficit supérieur à 7 millions d'euros ? En deux ans, 15 % des bureaux de poste ont été fermés. Le tribunal de commerce de Moulins a disparu. On ne compte plus les suppressions de train, alors que la ligne nationale reliant Paris à Ussel est abandonnée.

Le Conseil d'État a qualifié d'erreur manifeste la fermeture du tribunal de grande instance de Moulins ; les habitants de l'Allier pourraient en faire autant à propos de vos mesures qui dessinent un avenir sombre pour nos départements ruraux !

M. Claude Biwer.  - Le Président de la République a annoncé une série de mesures en faveur des territoires ruraux, cinq ans après le vote d'une loi sur le développement de ces mêmes territoires, qui n'a pas obtenu les résultats espérés.

En effet, la réalité du monde rural est marquée en premier lieu par la dépendance envers les transports individuels. Pensez-vous que la taxe carbone ou le covoiturage apportent des solutions pertinentes au besoin de parcourir dix kilomètres pour aller à la pharmacie ou chez le boucher ?

Le monde rural souffre d'une atonie économique, car trop d'administrations interviennent en appui à la création ou à l'implantation d'entreprises. Tout cela devrait être simplifié. Le Gouvernement pourrait-il accompagner les collectivités territoriales qui réalisent de louables efforts d'implantation ? Je souhaite qu'une véritable péréquation soit organisée. Mieux : il faudrait instituer des zones franches rurales.

En matière d'offre de soins, pourquoi ne pas jouer sur le numerus clausus ? Enfin, les infrastructures routières et ferroviaires, le haut débit sont indispensables. Merci des solutions que vous voudrez bien apporter.

M. Michel Mercier, ministre.  - Vous avez posé suffisamment de questions pour occuper toute une séance... (Sourires)

Le Gouvernement est prêt à agir sur la péréquation, je l'ai dit lors du débat sur la taxe professionnelle, et devant la commission des finances du Sénat. Dans son discours de Morée, le Président de la République s'est engagé à améliorer l'équité des dotations de l'État aux collectivités locales. La prochaine loi de finances sera l'occasion de faire un premier pas.

En matière d'accès aux soins, l'augmentation du numerus clausus ne produirait pas d'effets avant dix ans ! Mieux vaut un système de bourses pour attirer les étudiants en milieu rural : le Président de la République en a annoncé 400. La formation à travers les internats ruraux, les maisons pluridisciplinaires sont d'autres pistes. N'oublions pas que sur dix diplômés en médecine, un seul s'installe comme médecin libéral ! (M. Jean-Paul Emorine applaudit)

M. Claude Biwer.  - J'ai conscience que ces évolutions prendront du temps, mais elles répondent à des besoins manifestes. Les inquiétudes, les espoirs sont réels. Une meilleure équité dans la DGF serait bienvenue. Il faut souvent de longues années avant que les lois votées soient appliquées... Nous espérons une action rapide ! (Applaudissements sur les bancs UC)

M. François Fortassin.  - Monsieur le ministre, je vous donne acte d'avoir lancé les assises des territoires ruraux, qui ont rassemblé plus de 80 000 personnes, et dont le Président de la République a annoncé les principales préconisations à Morée : accessibilité améliorée des zones rurales, initiatives innovantes dans le transport individuel, développement économique, consommation de produits locaux et circuits courts, amélioration des services publics, soutien au très haut débit, modernisation des commerces et de l'artisanat, pour laquelle il est souvent difficile de mobiliser le Fisac. Une idée : on pourrait couvrir les parkings des supermarchés et les grands entrepôts de panneaux photovoltaïques, dont les bénéfices seraient reversés au Fisac départemental pour soutenir les commerces dans les bourgs ruraux.

Quels moyens comptez-vous mettre en oeuvre pour honorer ces engagements ? Faute de quoi, le discours du Président de la République n'aurait été qu'une brillante allocution à quelques semaines d'élections qui s'annoncent difficiles pour lui... (Applaudissements à gauche)

M. Michel Mercier, ministre.  - Merci d'avoir rappelé les ambitions du Président de la République pour le monde rural ! Je reçois tout à l'heure une entreprise qui pense s'installer dans l'un des départements les plus touchés par la crise, et qui fabrique précisément des panneaux photovoltaïques souples pour les toits d'usines et de grands magasins : vous aurez peut-être satisfaction !

Le Ciadt se réunira fin avril pour acter et financer un certain nombre de mesures. Nous avons l'obligation de réussir ! Certaines sont d'application immédiate, comme les pôles d'excellence rurale : 190 dossiers ont été déposés ! Les opérateurs de téléphonie mobile se sont engagés, sous l'autorité de l'Arcep, à couvrir toutes les zones rurales en 3G d'ici 2013. Le sénateur Maurey est par ailleurs chargé de faire des propositions, au-delà du grand emprunt, pour financer le très haut débit.

M. François Fortassin.  - Le ministre ne m'a que partiellement répondu... Pour équiper le territoire national en fibre optique, il faudrait tout le grand emprunt ! Je ne doute pas que M. Maurey fera preuve d'imagination...

M. Rémy Pointereau.  - L'avenir des territoires ruraux passe par des mesures nouvelles, mais aussi par l'amélioration des dispositifs existants. Les zones de revitalisation rurale (ZRR) contribuent depuis 1995 à créer de l'activité dans nos territoires grâce à des exonérations fiscales et sociales. Si nous voulons tous attirer des entreprises dans nos territoires, la priorité est d'abord de retenir les activités et les emplois existants. Or l'exonération fiscale sur les bénéfices en ZRR ne profite qu'aux entreprises nouvelles, définies de manière fort restrictive. Un jeune qui reprend une entreprise locale ne participerait-il pas à la revitalisation du territoire ? Un récent rapport des corps d'inspection de l'État propose ainsi d'étendre l'exonération fiscale à ceux qui reprennent une entreprise ou étendent son activité. Monsieur le ministre, vous avez montré votre capacité d'écoute dans le cadre des assises des territoires ruraux. Vous cherchiez des mesures de bon sens : je vous en fournis une ! (Applaudissements à droite)

M. Michel Mercier, ministre.  - Le dispositif des ZRR, qui coûte 400 millions par an en exonérations sociales et 100 millions en exonérations fiscales, peut en effet être amélioré. La transmission des entreprises est un sujet essentiel pour le maintien des artisans et des PME en zone rurale. Le Président de la République a confié à M. Novelli et à moi-même le soin de trouver une solution ; nous y travaillons avec le ministère de l'économie. Le Ciadt d'avril permettra d'avancer sur ce sujet essentiel.

M. Rémy Pointereau.  - Je suis satisfait de cette réponse. Il faut libérer les énergies dans nos territoires. La boîte à outils est là, mais il faut assouplir les dispositifs ! Les ZRR répondent à des besoins, mais souffrent d'un manque de notoriété. Une meilleure communication, ainsi qu'une évaluation, seraient facteurs de lisibilité.

Mme Josette Durrieu.  - L'espace rural, c'est 70 % du territoire, 14 millions d'habitants, 4 millions de foyers, un quart des emplois industriels. Comment assurer l'accès de tous au haut débit, qui est un enjeu majeur ? Sur les 4,5 milliards du Fonds national pour le numérique, seul un milliard sera consacré à l'espace rural peu dense : c'est très insuffisant ! La répartition ? 250 millions pour la desserte de 750 000 foyers en cinq ans ; 750 millions pour des projets d'initiative publique. Il faut bien distinguer desserte et collecte. Pour les Hautes-Pyrénées, nous avons signé la semaine dernière un contrat : 29 millions pour l'équipement et l'investissement ; coût global : 60 millions.

Dans quelle proportion l'État prend-il en charge la dépense pour la collecte et s'agira-t-il de prêts ou de subventions ? Comment l'intègrera-t-il dans les projets d'infrastructure engagés ? Quels seront les critères de sélection des projets par le Fonds national ? Quelle place sera donnée au numérique à l'école, à l'expérimentation, à la santé et la télémédecine, à l'information géographique ? Internet est un puissant levier économique, social et territorial. On n'a pas le droit de susciter de faux espoirs, on a l'obligation de satisfaire une demande légitime et de respecter un droit. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Michel Mercier, ministre.  - Merci de vos questions précises qui montrent votre grande connaissance du problème.

M. Simon Sutour.  - J'espère qu'il y en aura autant à mon égard.

M. Michel Mercier, ministre.  - Je vous écouterais volontiers tous et vous répondrais volontiers à tous mais le temps me manque et je suis sans cesse interrompu par M. Signé... (Sourires)

L'objectif du Gouvernement, c'est le très haut débit pour tous mais cela ne se fera pas en cinq minutes d'un coup de baguette magique. Dès juillet dernier, le Premier ministre a demandé aux préfets d'établir avec les élus locaux et les opérateurs des schémas de couverture numérique. Une aide de 3 millions a été accordée aux préfets pour bâtir ces schémas. Quant aux 750 millions du grand emprunt ils serviront à amorcer la pompe mais seront évidemment insuffisants. Nous sommes en phase de consultation avec les élus mais il est clair que nous voulons que les territoires ruraux soient desservis, non pas après les autres, mais en même temps que les autres et nous viendrons vous en parler régulièrement.

M. Michel Boutant.  - Il y a une réelle incompréhension entre le Gouvernement et le monde rural, sacrifié sur l'autel de la rentabilité. Comment, sans péréquation, la ressource fiscale de 20 % de la population pourrait-elle permettre d'équiper 80 % du territoire ? Alors, qu'en même temps, les collectivités du monde rural sont amenées à contribuer au financement de grands équipements nationaux comme les TGV... Vous scindez ainsi la France en deux parties dont l'une se contente de suivre le progrès de loin. Avec la réforme territoriale vous cassez son initiative, vous abandonnez et désespérez un monde rural déjà mis à mal par les crises du lait, des fruits et légumes et des prix agricoles en général. (Applaudissements à gauche)

M. Jacques Blanc.  - Je vous invite, au nom de ma Lozère, à organiser le prochain Ciadt dans ce territoire de montagne.

L'avenir des territoires ruraux est aussi conditionné par la politique européenne. Nous sommes dans la période clé où se prépare le budget d'après 2013. Le traité de Lisbonne avait fait de la cohésion territoriale une priorité. Comment cela se concrétisera-t-il dans ce budget ? Il est capital de réaffirmer l'exigence d'une politique prenant en compte non seulement les besoins des pays entrants mais aussi les disparités infrarégionales et les handicaps naturels dont souffrent certains territoires, notamment les zones de montagne.

A Saragosse, monsieur le ministre, vous avez rencontré vos homologues européens. Pouvez-vous réaffirmer la volonté de la France de défendre une politique de cohésion territoriale au niveau européen ? Dans le passé, l'Europe a eu une telle politique. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre. (Applaudissements sur certains bancs à droite)

M. Michel Mercier, ministre.  - Les fonds structurels sont importants pour la France et, même si elle est contributeur net, elle bénéficiera de ces fonds à hauteur de 14 milliards d'ici 2013. A Saragosse, nous avons affirmé la position française : toutes les régions doivent pouvoir bénéficier de ces fonds structurels. Les ministres des 27 pays se sont tous prononcés pour le maintien de la politique de cohésion territoriale et pour l'accès de toutes les régions aux fonds structurels. La politique territoriale est une ambition nouvelle en Europe, notamment pour les pays nordiques. Il nous faut maintenant la faire partager.

M. Jacques Blanc.  - Merci pour le combat que vous devez mener. La Lozère est prête à devenir le laboratoire expérimental d'un programme européen. Nous devons nous mobiliser, avec le Comité des régions d'Europe pour voir traduire dans le budget communautaire la volonté inscrite dans le traité de Lisbonne de faire de la politique de cohésion territoriale une chance pour le monde rural et les régions de montagne.

M. Simon Sutour.  - Quatorze milliards d'euros, dont 800 millions pour le Languedoc-Roussillon pour la période 2007-2013, voilà ce que les territoires français et en particulier les territoires les plus fragiles comme les zones rurales, risquent de perdre à partir de 2014 si l'on en croit le document non officiel de la Commission européenne qui préfigure les orientations du budget pour 2014-2020. Le détricotage des politiques communes est en marche, fonds de cohésion et politique agricole sont en grand danger.

Si pour l'heure aucun chiffre n'est avancé, il semble néanmoins que la Commission européenne présidée par M. Barroso, dont la nomination à un second mandat a été soutenue par le gouvernement français, liquide purement et simplement la politique régionale européenne et, par là même, le concept de cohésion économique, sociale et territoriale. En éliminant l'objectif « compétitivité régionale et emploi », elle propose, ni plus ni moins, de supprimer les fonds européens dans seize États membres sur 27, soit dans 200 régions sur 273. Il y a un paradoxe entre la consécration par le traité de Lisbonne du principe de cohésion territoriale et le fait que la Commission souhaite aujourd'hui renier ce principe fondamental dans les budgets qui permettent justement de financer cet objectif. Comment est-il possible pour les régions fragiles, en retard de développement, frappées par la crise ou en reconversion industrielle de « rattraper » leur retard et se remettre à niveau si elles ne sont pas justement aidées par le Feder, le FSE et le Feader ?

L'efficacité des fonds européens n'est plus à démontrer. Leur suppression agrandirait le fossé qui se creuse entre nos concitoyens et Bruxelles. La suppression de la politique de cohésion serait l'estocade portée aux territoires ruraux !

Le Gouvernement a-t-il conscience de ce danger ? Qu'attend-il pour agir ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Michel Mercier, ministre.  - Le document auquel vous faites allusion n'est pas officiel. Ce n'est donc pas un document, et c'est tant mieux.

Le gouvernement français, ni aucun autre, n'a pas demandé la suppression de la politique de cohésion territoriale. Le Gouvernement y est très attaché, y compris parce qu'il s'agit d'une des rares politiques européennes qui soit visible aux yeux de nos concitoyens. L'Europe est souvent décriée : là elle agit concrètement. Je suis allé à Saragosse affirmer notre volonté d'une politique de cohésion territoriale pour toutes les régions.

M. Simon Sutour.  - Au nom de la commission des affaires européennes, je suis allé avec Yann Gaillard voir le directeur du budget à Bruxelles. En réalité, tout dépend du pourcentage du PIB affecté à cette politique de cohésion. On en est à 1,13 % du PIB. Avec cela, on ne pourra rien faire ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Je vous remercie, monsieur le ministre (applaudissements à droite et au centre) d'avoir bien voulu répondre à ces questions qui seront retransmises sur France 3, tard dans la nuit... parce que nous sommes concurrencés par les Jeux olympiques.

La séance est suspendue à 17 h 45.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président

La séance reprend à 18 h 5.