Moratoire sur l'utilisation des armes de quatrième catégorie (Suite)

Discussion générale (Suite)

Mme Cécile Cukierman .  - Tirant les leçons du drame de Ferguson, le président Obama vient d'interdire l'équipement des forces de l'ordre en équipements militaires. La France pourrait s'inspirer de cet exemple.

Les Flash-Ball et Taser ont officiellement pour fonction de tenir à distance les attroupements violents et de neutraliser les personnes dangereuses pour elles-mêmes ou pour autrui - dissuader et éviter l'usage des armes à feu. Toutefois ces armes, qui posent un risque sanitaire, sont de plus en plus employées à des fins offensives, loin des cas de légitime défense ou d'absolue nécessité. Ces armes qui équipent les forces de l'ordre et les polices municipales sont devenues une cause permanente de dérapages, voire de bavures. Il est nécessaire d'encadrer leur usage pour retisser le contrat de confiance, indispensable en République, entre la police et la population.

C'est aussi le droit imprescriptible de manifester qui est en jeu. Je regrette que la commission des lois n'ait pas auditionné les associations de défense des droits de l'homme, qui ont alerté sur les dérives dans l'usage de ces armes par les forces de l'ordre, à l'instar du Réseau d'aide et d'intervention pour les droits de l'homme (Raidh).

M. Courtois dans son rapport s'est fait le relais des syndicats de policiers et des représentants du ministère de l'intérieur... Mais quelques pages plus loin il demande communication des chiffres des incidents liés à ces armes, preuve que plus de transparence est nécessaire et que cette proposition de loi n'est pas l'oeuvre de gentils rêveurs... La classification a changé, nous en avons pris acte en déposant deux amendements sur le texte. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. François Fortassin .  - De l'autre côté de l'Atlantique, les forces de l'ordre avaient accès à des armes d'assaut, des véhicules blindés, des uniformes de camouflage... Ce mélange des genres entre armée et forces de l'ordre a provoqué un schisme avec la population.

Nous n'en sommes pas là mais être armé n'est pas anodin. L'utilisation de la force peut avoir des conséquences dramatiques, tant il est parfois difficile de répondre avec la bonne mesure à la violence, semble-t-il croissante, de certaines bandes ou individus.

Cette proposition de loi instaure un moratoire sur les Flash-Ball, armes certes non létales, mais qui peuvent occasionner des blessures graves. Pour autant les forces de l'ordre ne doivent pas être mises en danger. Pour la première fois, un policier a été condamné pour avoir blessé au visage au Flash-Ball un jeune de 16 ans. Le droit de manifester est une liberté fondamentale ; la liberté est la règle et sa restriction l'exception. L'action des forces de l'ordre est déjà très encadrée. Le moratoire n'est pas la solution à ce problème qui relève plus de la formation ou de la déontologie - et de la responsabilité des manifestants. Ne réduisons pas l'éventail des ripostes graduées disponibles. Ne fragilisons pas non plus notre doctrine qui vise à éviter le contact. Le monopole de la violence physique légitime, comme le disait Max Weber, doit rester à l'État. Ne transformons pas les forces de l'ordre en chair à canon. (Applaudissements sur les bancs du RDSE)

M. David Rachline .  - L'usage de la violence légitime dont peuvent faire preuve les forces de l'ordre est, selon la devise qui gravait les canons de Louis XIV, l'ultima ratio en cette période un peu de latin ne fait pas de mal - que l'État peut utiliser pour se protéger et protéger les citoyens.

Il est facile de discuter de cette proposition de loi confortablement assis dans nos fauteuils alors que, sur le terrain, les forces de l'ordre ont à faire face à des situations délicates et difficiles à apprécier.

Il est nécessaire que les forces de l'ordre disposent d'un arsenal de ripostes pour s'adapter à la violence de ceux qui les affrontent. Nous ne voulons pas de moratoire, mais rejoignons le souhait du rapporteur de renforcer la formation des policiers et des gendarmes. Mais cela demande du temps, donc de l'argent, et les gouvernements UMPS successifs ont diminué le nombre de policiers... et ceux-ci sont confrontés à de multiples tâches.

La violence légitime que les forces de l'ordre sont habilitées à exercer doit disposer de moyens appropriés, face à la grande violence illégitime qui leur est de plus en plus souvent opposée.

Je regrette aussi que l'on n'ait pas entendu les auteurs de cette proposition de loi pour dénoncer la répression contre les manifestants au mariage pour tous, où des moyens disproportionnés ont été employés face à des familles avec enfants et poussettes...

Mme Éliane Assassi.  - Je peux vous faire la liste des violences policières !

M. David Rachline.  - Je profite de cette tribune pour saluer l'action de nos forces de l'ordre en toutes circonstances.

M. Claude Kern .  - Entre souci de protection des populations et adéquation des mesures d'ordre public à mettre en oeuvre, l'équilibre est difficile à trouver.

En 2013, le Défenseur des droits avait prôné un meilleur encadrement des armes incapacitantes. Notre groupe avait interpellé le gouvernement, sans réponse.

Cette proposition de loi rouvre le débat, mais elle est malheureusement simpliste.

Sur la forme, sa rédaction est impropre. Elle fait référence à une nomenclature dépassée. Une nouvelle nomenclature fondée sur la dangerosité est apparue. Il n'existe pas de stricte correspondance entre les deux.

Sur le fond, nous trouvons que ce texte manque de pondération. Il faut un équilibre entre protection des citoyens et protection des forces de l'ordre ; or ce texte fragilise ces dernières.

La stratégie du maintien de l'ordre consiste à éviter autant que faire se peut le contact physique. Cette préoccupation, née au fil des expériences et des évènements, se heurte à des manifestants parfois très agressifs et radicalisés, tapis au sein de populations pacifiques.

Le principe qui gouverne l'action de nos forces est celui de la gradation des moyens mis en oeuvre conformément au cadre juridique, qui permet une adaptation permanente et une prise en compte différenciée des comportements au sein des attroupements.

Or, le présent texte interdit des armes de force intermédiaire de catégorie B mais maintient le recours d'armes létales de catégorie A. Où est la logique ?

La gradation des moyens permet de s'adapter aux situations ; or ce texte la restreint, alors que les LBD 40 ou le Taser ont l'avantage de cibler précisément les fauteurs de trouble.

Le risque zéro n'existe pas, et la tâche des forces de l'ordre est complexe. Il faut sans doute évoluer, d'où le groupe de travail commun à la police et à la gendarmerie lancé par le ministre de l'intérieur et l'appel d'offres pour rendre plus précis l'équipement des LBD 40. Une réflexion plus large est indispensable pour faire la lumière sur les incidents passés.

Ce texte n'offre aucune autre piste que celle du moratoire. La formation doit être encouragée. Le groupe UDI-UC ne pourra le voter. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Michel Delebarre .  - Cette proposition de loi instaure un moratoire sur l'utilisation et la commercialisation d'armes de quatrième catégorie et encadre leur utilisation par les forces de l'ordre. Celles-ci peuvent faire usage de la force dans des conditions précisées par le code de la sécurité intérieure, dont l'article L. 211-9 permet à un préfet, un maire ou un Officier de Police Judiciaire (OPJ) de faire des sommations de dispersion à un rassemblement de personnes sur la voie publique ou dans un lieu public sous la seule condition que celui-ci leur paraisse «susceptible de troubler l'ordre public ». L'article 2 du texte restreint davantage ces conditions.

Les deux articles visent une « quatrième catégorie », ils ne tiennent ce faisant pas compte de la réforme de 2012, qui crée une nouvelle nomenclature alphabétique. Sont en réalité visés les pistolets de type Taser et les lanceurs de balles de défense, armes dites non létales ou sublétales ou encore semi-létales.

Ce texte a le mérite de soulever une question primordiale : comment assurer au mieux la protection de nos forces de l'ordre tout en garantissant le droit de manifester ?

Tout accident, sans exception, est éminemment regrettable. Mais le maintien de l'ordre n'est pas une science exacte... Chaque année, plus de 12 000 forces de l'ordre sont blessées en mission. Le modèle français de maintien de l'ordre, je le rappelle, repose sur la dissuasion et l'évitement du contact.

Les armes non létales sont utiles. Le Conseil de l'Europe a condamné la Turquie pour atteinte aux droits de l'homme, car elle n'a équipé ses policiers que d'armes à feu... Nos équipements, déjà variés, ont de plus évolué pour garantir la gradation de l'utilisation de la force.

Le gouvernement a pris la mesure du problème : à la suite des incidents de Sivens, les grenades ne pourront plus être utilisées par un unique fonctionnaire, mais par un binôme, avec un lanceur et un superviseur, pour rendre le tir plus précis. Les opérations de maintien de l'ordre à risque seront filmées. L'utilisation des armes de catégorie B doit rester encadrée, même à un niveau non constitutionnel, au maximum pour éviter les drames et préserver les libertés individuelles.

La solution réside dans la formation des policiers et gendarmes. L'écart entre deux séances est actuellement de trois ans : c'est trop. Le matériel peut en outre gagner en précision et en fiabilité.

Je remercie le rapporteur pour son travail. Le groupe socialiste s'abstiendra.

Mme Esther Benbassa .  - Depuis plusieurs années, les écologistes souhaitent encadrer, voire interdire, ces armes. Je salue le travail de Mme Dominique Voynet, ancienne sénatrice, MM. Yves Cochet, Noël Mamère et François de Rugy qui ont déjà déposé des propositions de loi en 2009 et 2010 sur ce sujet à l'Assemblée nationale. Elles sont déjà caduques.

Il est temps que la représentation nationale se saisisse d'un problème récurrent. Plus de dix personnes ont été blessées à l'oeil - au-dessus de la ligne d'épaules donc - depuis l'équipement de nos forces de l'ordre de Flash-Ball.

À Marseille, un homme touché au thorax est mort d'une crise cardiaque. Plus les tirs sont rapprochés, plus ils sont dangereux. Plus les tirs sont lointains, moins ils sont précis. Il en va de même pour le Taser.

Le Comité contre la torture des Nations unies a souligné que le Taser crée des douleurs aiguës et a assimilé le Taser à une forme de torture, ce que nos engagements internationaux réprouvent.

Selon le rapport d'Amnesty International, 334 personnes seraient mortes aux États-Unis depuis 2001 après avoir reçu des décharges de Taser.

Les formations de l'ordre sont insuffisantes, d'où la proposition de suspendre l'usage de ces armes ; le respect du droit fondamental de manifester en dépend. Le décès tragique de Rémi Fraisse - lié à une grenade offensive - témoigne de l'urgence d'agir. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Mathieu Darnaud .  - Cette proposition de loi pose la question de l'emploi de la force et de la confiance placée dans ceux qui sont en première ligne pour préserver l'ordre républicain. (Mme Éliane Assassi proteste)

Je salue le travail remarquable du rapporteur. Nous serions un pays de non-droit dans lequel les policiers agiraient comme des cow-boys ? Non, l'usage de ces armes est strictement encadré par le code de la sécurité intérieure et le code pénal.

Si des drames sont à déplorer, nous n'avons nullement à rougir de l'efficacité de nos policiers et gendarmes. Grâce à la doctrine établie par le préfet Grimaud dans les années soixante, le bilan de la gestion des menaces à l'ordre public est très positif.

Avec l'article premier, les forces de l'ordre auraient le choix entre la passivité et le contact. L'article 2 enjoint les forces de l'ordre à l'attentisme, ce n'est pas acceptable.

Le Taser X26 et le Flash-Ball superpro sont performants et utiles. Au ministère de l'intérieur de proposer des sessions de formation plus fréquentes et plus proches de la réalité.

Accompagnons les fonctionnaires qui sont en première ligne dans leur mission de protection de la République. (Applaudissements des bancs du RDSE jusqu'à la droite)

Mme Nicole Duranton .  - L'actualité démontre outre-Atlantique les conséquences d'un marché libre des armes et de leur utilisation non encadrée par les forces de l'ordre...

Cette proposition de loi se réfère à une classification obsolète des armes, qui répondent désormais à une nomenclature alphabétique.

Tous les policiers ne sont pas armés : 82 % des policiers municipaux sont armés, 32 % seulement disposent d'une arme à feu. Les conditions d'armement sont strictement encadrées par le code de la sécurité intérieure.

L'usage des armes par les forces de l'ordre n'a de plus rien d'hasardeux. Elle obéit à une logique de légitime défense. Des conditions de formation obligatoire existent selon les secteurs, et à la discrétion du maire, il peut être nécessaire d'armer les policiers et d'aider les élus à le financer, car un gilet pare-balles coûte entre 700 et 1 000 euros...

À Évreux, la protection des 50 000 habitants est assurée par 22 policiers municipaux, 7 agents de surveillance de la voie publique, 2 agents de vidéosurveillance et 4 agents administratifs. La ville dispose de 6 Flash-Ball et d'autres armes de catégorie B, qui n'ont jamais été utilisées !

Je suis défavorable au désarmement des policiers municipaux.

Mme Éliane Assassi.  - Nous demandons un moratoire, pas le désarmement !

Mme Nicole Duranton.  - La protection de la population et des hommes et des femmes qui l'assurent est indispensable. Intéressons-nous plutôt à la circulation clandestine des armes dans notre pays. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État .  - Merci pour la contribution de chacun, à ce débat serein et apaisé.

Quelques précisions : la formation des policiers à l'utilisation du Flash-Ball est obligatoire. Elle s'accomplit par une formation qualifiante de plusieurs jours et des stages d'habilitation périodique tous les deux ans. Faute d'avoir suivi le stage, les fonctionnaires perdent leur habilitation. Idem pour l'usage du Taser avec un stage tous les trois ans.

Le ministre de l'intérieur est désireux de rapprocher ces formations des conditions réelles d'utilisation de ces armes - par exemple, sur cibles mouvantes. Je tenais à vous en informer. (Mme Esther Benbassa applaudit)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Antoine Lefèvre .  - Cet article se réfère à une classification obsolète depuis plus de trois ans. En janvier 2011, en tant que rapporteur, j'avais appelé l'attention du gouvernement sur le contrôle de l'utilisation de ces armes, et notamment la traçabilité de leurs usages. Les auteurs de la proposition de loi s'inspirent des recommandations du Défenseur des droits. Ce texte aboutirait cependant à désarmer les forces de l'ordre. Renforçons plutôt la transparence sur l'utilisation des armes intermédiaires, indispensables face à certains manifestants, parfois armés d'armes de guerre.

Je ne voterai pas l'article premier, non plus que le suivant.

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

quatrième catégorie

par les mots :

catégorie B

Mme Éliane Assassi.  - Cet amendement tient compte de l'évolution législative.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur.  - Avis défavorable, compte tenu de l'avis de la commission sur la proposition de loi ici-même...

Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Alain Bertrand.  - Dans nos campagnes, nous connaissons aussi des problèmes de sécurité... Or le ministre de l'intérieur est représenté par la ministre de la ville ! (Sourires) Vous êtes donc aussi la ministre de la campagne ! (Même mouvement) Je veux rendre hommage aux policiers et aux gendarmes de nos campagnes et aux polices municipales qui remplissent tout un tas de missions.

D'ailleurs, dans ma petite ville, il existe une police que j'appelle « de tranquillité » ! C'est elle qui accomplit notamment les opérations « tranquillité vacances ». Elle fait la ronde dans les quartiers, s'inquiète des éventuels cambriolages. Si elle découvre une fenêtre ouverte et qu'elle doit intervenir, la chemisette bleue, le treillis et les rangers ne suffisent pas, il faut des armes ! (On approuve sur certains bancs à droite)

De même, la police municipale se rend à toute heure du jour et de la nuit sur n'importe quel rond-point pour voir si tout va bien... Là, elle peut tomber sur des individus dangereux ! Comme le disent les jeunes, nous ne vivons pas dans le monde des Bisounours. Exercer une mission de sécurité requiert des moyens et de la formation.

Les intentions du groupe CRC sont bonnes, mais il n'y a pas d'un côté les méchants policiers et de l'autre les gentils citoyens. Dieu sait si j'ai manifesté dans ma vie ; je l'ai toujours fait calmement, en restant citoyen à 100 %. Le droit de manifester est celui de défiler dans le calme et l'ordre. Le groupe RDSE ne votera pas cet amendement non plus que cette proposition de loi.

MM. Alain Fouché et Alain Gournac.  - Très bien !

M. Alain Fouché.  - Une police doit être armée et formée, c'est indispensable. Je ne voterai pas ce texte.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

L'article premier n'est pas adopté.

ARTICLE 2

Mme la présidente.  - Amendement n°2, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

quatrième catégorie

par les mots :

catégorie B

Mme Éliane Assassi.  - Même objet que le précédent.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°2 n'est pas adopté.

Mme Éliane Assassi.  - Je remercie Mme la ministre pour la modération de ses propos et son souci de laisser le débat ouvert.

Outre un intervenant que je ne nommerai pas, (M. David Rachline fait un signe) je veux saluer ceux qui sont intervenus, même si je déplore le manque de rigueur intellectuelle de certains. Qu'on ne fasse pas croire que nous n'avons pas confiance dans nos forces de l'ordre. Ancienne rapporteure pour avis de la commission des lois pour le budget de la sécurité intérieure, j'ai déjà eu l'occasion de travailler avec tous les acteurs et les associations quelles qu'elles soient. Nous reviendrons sur ce sujet à l'occasion du projet de loi à venir. Encore une fois, merci à tous, sauf un !

M. David Rachline.  - Moi aussi, je vous aime !

Mme Esther Benbassa.  - C'est un texte de notre groupe écologiste qui avait ouvert le débat. Nous devons discuter de la formation des policiers et de leur doctrine d'emploi de leurs équipements - pour qu'ils ne soient pas utilisés à mauvais escient.

Mme Assassi et le groupe CRC partagent nos préoccupations. Continuons la discussion sur cette question majeure de société. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

M. Alain Gournac.  - Alors que nos forces de l'ordre sont présentes, partout sur le territoire, pour nous protéger, je veux leur rendre hommage. Les cadences imposées par le plan Vigipirate sont très lourdes.

Moi, j'aime la police et la gendarmerie nationale ; je suis gendarme ! (Mouvements divers)

Regardez ce qui s'est passé sur ce terrain d'aviation qui se fera ou ne se fera pas et la violence phénoménale des attaques portées contre les forces de l'ordre - j'ai vu trois vidéos ! - Et quand j'aime, je soutiens !

Mme Éliane Assassi.  - Qui vous dit que je ne soutiens pas les forces de l'ordre !

M. Alain Gournac.  - Je voterai ce texte des deux mains !

M. Marc Laménie.  - D'un côté, je comprends les avis défavorables de la commission des lois et de Mme la ministre. De l'autre, cette proposition de loi a le mérite d'évoquer un problème de société.

Je rejoins aussi M. Bertrand : l'insécurité est partout, même si on parle plus souvent des quartiers urbains sensibles. M. Gournac aussi a raison : nous soutenons tous nos forces de l'ordre, gendarmes, policiers nationaux et policiers municipaux, sans oublier les sapeurs-pompiers.

Je me range aux avis du rapporteur et de la ministre.

M. Jean Desessard.  - M. Gournac aime les policiers et les gendarmes. Bien sûr ! J'aime aussi les cheminots, les postiers et les infirmières sans doute...

M. Antoine Lefèvre.  - M. Gournac a le droit d'aimer les gens !

M. Jean Desessard.  - ... Évidemment ! Attention aux dérives sécuritaires : à Montreuil, un adolescent, qui sortait de son lycée pour manifester pacifiquement a reçu une balle de Flash-Ball qui lui a détruit un oeil pour avoir remué une poubelle !

La sécurité, ce n'est pas seulement le fruit du travail des policiers, cela passe aussi par la justice sociale. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Et le problème est réglé !

Mme Cécile Cukierman.  - Je me réjouis de la qualité des débats que nous avons eus en commission et ici-même, en dépit de l'emportement de certains - le vernis tombe dès que l'on gratte un peu... (Exclamations à droite)

Nous avons manqué une occasion d'avancer dans le bon sens pour la protection de toutes et tous.

Personne n'a le monopole de la confiance dans notre police - dont la droite a diminué drastiquement les effectifs.

Les policiers nous ont fait part de leurs conditions de travail ; elles sont difficiles, et c'est précisément la fatigue qui pousse à la bavure. Et dans un monde où l'insécurité est partout présente, dans un monde ultra sécuritaire, cela ne va pas s'arranger...

Chaque vie compte : celle d'un policier, celle d'un gendarme mais celle aussi d'un jeune ou d'un moins jeune. Une vie détruite est une vie détruite.

M. Alain Fouché.  - Les policiers aussi perdent la vie.

Mme Éliane Assassi.  - C'est ce que Mme Cukierman vient de dire.

Mme Cécile Cukierman.  - La question posée est celle de l'utilisation de ces armes, souvent malencontreuse, aux dépens des victimes.

Notre texte, qui risque fort d'être rejeté, aura au moins eu le mérite de soulever le problème. Enfin, disposerons-nous de statistiques ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Alain Fouché.  - Dans notre pays, je veux le dire avec modération, dans les médias les policiers sont souvent pointés du doigt comme les méchants. Le groupe écologiste n'a pas le monopole du coeur.

Les manifestants sont parfois très violents, le préfet recommande aux forces de l'ordre la plus grande prudence. Elles doivent être armées.

M. David Rachline.  - Je comprends mieux pourquoi le PC obtient 3 % aux élections. (Mme Éliane Assassi proteste vigoureusement) Il est complètement déconnecté des réalités ! (On proteste derechef sur les bancs CRC) Il s'attaque de manière totalement idéologique à la police à un moment où la population a besoin d'elle. À un moment, il faut cesser d'être du côté des délinquants pour être auprès de la majorité silencieuse ; ces Français, blancs et catholiques, attaqués parce qu'ils sont Français, blancs et catholiques.

Mme Cécile Cukierman.  - Certains se font agresser parce qu'ils sont homosexuels !

M. David Rachline.  - Voilà le résultat d'années de laxisme.

Mme Éliane Assassi.  - Scandaleux !

M. Martial Bourquin.  - Dans ma ville de 15 000 habitants, la politique de sécurité repose sur le triptyque : éducation, prévention et sécurité. Il ne faut pas mettre l'accent seulement sur le sécuritaire au détriment des deux autres piliers. Cela menacerait la cohésion sociale.

M. Antoine Lefèvre.  - On n'a pas dit le contraire !

M. Martial Bourquin.  - Parfois, la nuit, il y a des problèmes aigus de violence.

M. Alain Fouché.  - Oui, pas de fausse naïveté.

M. Martial Bourquin.  - Nous devons y répondre. La police respecte déjà un règlement très strict, elle patiente avant de sortir les armes dont il est question ici.

J'ai fait le choix de ne pas armer la police municipale. En cas d'affrontement, la gendarmerie et la police nationale l'épaulent.

En cas d'accident, des recours sont toujours possibles. Nos forces de l'ordre sont mises à rude épreuve. Je suis heureux de retrouver enfin des effectifs à la hauteur dans ma ville. Ne soyons pas angéliques. Un État de droit a besoin d'une police formée qui puisse remplir ses prérogatives et ses devoirs. Le groupe socialiste ne votera pas ce texte.

M. Alain Fouché.  - D'accord.

M. Michel Forissier.  - Je suis maire d'une ville de 32 000 habitants depuis 2001. Le taux de délinquance a chuté de 74 pour 1 000 à 45 pour 1 000. Ce n'est pas si mal ! Nous avons atteint ce résultat avec une politique de prévention.

Le problème n'est pas l'armement - il est indispensable en ces temps de Vigipirate  - mais la formation et l'entraînement des forces de l'ordre.

M. Alain Bertrand.  - M. Desessard, nous sommes loin d'être insensibles au cas que vous avez cité, mais dans la vie, il y a toujours des accidents...

M. Jean Desessard.  - Le lycéen a perdu un oeil !

M. Alain Bertrand.  - Cela peut arriver avec l'utilisation d'un bâton en plastique !

J'ai été très choqué par la violence des manifestations pour défendre une zone humide dans mon département. Des casseurs s'étaient mêlés à des militants de bonne foi. Nos forces de police doivent les réprimer avec une très grande fermeté.

L'article 2 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Tous les articles de la proposition de loi ayant été rejetés, la proposition de loi n'est pas adoptée.