Financement de la sécurité sociale pour 2017

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2017.

Discussion générale

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé .  - À mon tour, j'exprime mes condoléances au nom du Gouvernement à la suite de la disparition de Paul Vergès.

Je vous prie d'excuser Christian Eckert, retenu à l'Assemblée nationale, qui répondra tout à l'heure aux orateurs de la discussion générale.

Le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale de ce quinquennat donne la mesure des changements opérés depuis 2012 : la sécurité sociale était grevée de déficits, nous l'avons redressée année après année ; elle était affaiblie par le recul des droits sociaux, nous l'avons modernisée en innovant pour répondre à des besoins nouveaux ; nous avons réhabilité notre protection sociale et garanti sa pérennité.

En quatre ans, nous avons ramené le déficit du régime général de 17,5 à 3,7 milliards d'euros en 2016. Et en 2017, nous prévoyons un déficit de 400 millions d'euros - à comparer aux 500 milliards d'euros de dépenses... C'est quasiment un retour à l'équilibre, pour la première fois depuis 2001.

Réforme des retraites, meilleure prise en compte des situations familiales, amélioration de la pertinence des actes, maîtrise des coûts des médicaments, virage ambulatoire, meilleure efficacité de la dépense hospitalière : nous avons engagé des réformes de fond qui ont porté leurs fruits, sans recul social. La protection des Français a progressé. Le reste à charge diminue ; certains de nos concitoyens le voient plus que d'autres, mais il est passé de 9,3 à 8,4 % des dépenses de santé. C'est un niveau historiquement bas, le plus bas des pays de l'OCDE.

La prise en charge par l'assurance maladie obligatoire a augmenté et retrouvé son niveau du milieu des années 2000. Un million de Français supplémentaires bénéficient de la CMU ou de l'aide à la complémentaire santé ; 1,4 million de Français les plus modestes ne paient plus de franchise médicale ; 15 millions bénéficient aujourd'hui du tiers payant. Rétablissement des comptes, novelles protections : je regrette que la majorité sénatoriale refuse de reconnaître cette réalité (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), car elle devrait nous rassembler. J'avoue que je ne saisis pas votre logique.

Votre commission des affaires sociales - dans un travail certes constructif avec le Gouvernement, et je salue son président et son rapporteur général - a supprimé les tableaux d'équilibres ; l'an passé, vous nous demandiez de faire plus pour réduire le déficit : nous y sommes, mais vous le contestez, avec des arguments composites, pas toujours cohérents. Vous contestez les options politiques, certes ; vous dites que l'amélioration devrait tout à la loi Retraites du précédent quinquennat - y compris pour l'assurance maladie et la branche famille... Vous contestez l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) - c'est une nouveauté, mais sans produire un seul argument.

Et dans le même temps, vous proposez de priver la sécurité sociale de ressources nouvelles, en particulier en supprimant la mise à contribution des industriels du tabac ; vous supprimez la régulation des dépenses d'imagerie médicale, ou encore le financement pluriannuel de l'innovation, pourtant demandé par les industriels. Comme souvent, vous manifestez une grande appétence à réduire le déficit en général, mais êtes moins enthousiastes pour proposer des mesures réalistes et justes.

Pour notre part, nous poursuivons la dynamique engagée, qui garantit la pérennité des droits. La nouvelle donne ne saurait servir de prétexte à l'immobilisme, il faut aller plus loin. C'est l'extension de la retraite progressive des salariés à plusieurs employeurs, c'est l'Agence de recouvrement des impayés de pension alimentaire ou l'amélioration de la protection sociale des indépendants.

Nous renforçons encore l'accompagnement des personnes âgées et handicapées : 590 millions d'euros de mesures nouvelles pour les établissements, 4 100 places nouvelles pour les personnes handicapées, et 4 000 places nouvelles en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), dans le droit fil de la loi d'adaptation de la société au vieillissement, qui a mobilisé 740 millions d'euros en 2016. Toutes les mesures nouvelles sont intégralement financées par ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, j'appelle les départements à les mettre en oeuvre.

Nous poursuivons la transformation de notre système de santé, en faisant le choix du mouvement, de l'innovation, de la modernisation, au service d'un égal accès à la santé pour tous.

En 2012, nous avons constaté l'ampleur de la tâche... Notre système solidaire doit aujourd'hui faire face à de nombreux défis, dont celui du vieillissement. Il avait été malmené : le service public hospitalier rayé d'un trait de plume, la prévention au point mort, la résignation devant la désertification médicale. Avec la loi de modernisation de la santé, nous avons fait de la prévention le socle de notre politique de santé, nous avons conforté l'hôpital public et accompagné le virage ambulatoire.

Avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous lançons de nouvelles initiatives, par exemple sur l'accessibilité des soins dentaires, en revalorisant les soins conservateurs et en plafonnant les prothèses ; nous renforçons la protection universelle maladie, en particulier pour les saisonniers confrontés aux ruptures de droits.

La politique de prévention doit être poursuivie. Le nombre de fumeurs quotidiens diminue chez les lycéens, nous renforçons la lutte contre le tabagisme des jeunes en alignant la fiscalité du tabac à rouler sur celle des cigarettes, nous faisons contribuer davantage les industriels au Fonds de lutte contre le tabagisme.

Nous renforçons également le soutien à l'innovation - nouveaux traitements, nouveaux médicaments. Le temps de l'espoir est venu pour traiter un nombre croissant de maladies, mais les prix augmentent : il faut réguler et trouver des mécanismes de financement appropriés. C'est ce que nous faisons pour les plateformes de séquençage : 670 millions d'euros y seront consacrés, pour autoriser la personnalisation des traitements.

Avec ce texte, nous soutenons les professionnels de santé. Nous revalorisons les salaires et mettons en oeuvre la troisième étape du plan en direction des infirmiers - jusqu'à 3 400 euros.

La médecine de ville bénéficie de moyens nouveaux, gage de la mise en oeuvre du virage ambulatoire avec la revalorisation des tarifs, la consécration du choix politique, structurel, reconnaissant le rôle des professionnels libéraux. Nous améliorons les aides à l'installation ; l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement pour instituer des équipes de médecins libéraux remplaçants pour aider leurs collègues en zones sous-denses.

Des réformes de structures manqueraient, paraît-il, mais de quoi parle-t-on ? Nous les avons initiées, nombreuses, depuis 2012. Priorité à la prévention, recentrage de l'hôpital, renforcement du maillage territorial, garantie de l'accès aux soins, développement de l'innovation - alors que, de votre côté, nous n'avez guère progressé... Voyez les programmes de vos candidats, très proches en matière de santé.

M. Gilbert Barbier.  - Vous avez mal lu !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - J'y ai vu des équations comptables, des déremboursements massifs et la privatisation de notre système de santé. (Exclamations à droite)

M. Éric Doligé.  - Hors sujet !

Mme Catherine Procaccia.  - Vous n'êtes pas là pour commenter les programmes !

M. Henri de Raincourt.  - Participez à la primaire, c'est 2 euros.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Quarante euros d'amende pour un passage indu aux urgences ? Trente euros pour un rendez-vous non respecté ? Vous qui voulez simplifier et déréglementer... Vous promettez 6 à 20 milliards d'économies supplémentaires : c'est le retour au système américain d'avant l'Obamacare (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; exclamations à droite) alors que le président américain élu revient sur sa promesse de le supprimer... (Mouvements divers à droite) Ce serait la fin du modèle français.

Nous avons redressé les comptes sociaux, sans demander aux patients ou aux médecins de payer davantage ; nous avons modernisé et innové. Je souhaite que ce débat permette d'amplifier la dynamique. Nous verrons que ce texte répond à des projets de société différents, voire divergents de la société française... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes .  - Je me joins à l'hommage à notre collègue Vergès, je garde un souvenir lumineux de la séance qu'il avait présidée comme doyen en 2011. C'était un précurseur, un visionnaire au service de la planète : c'était un climato-humaniste.

Ce PLFSS traduit la politique familiale ambitieuse, socialement juste et budgétairement responsable que nous menons depuis 2012. Elle s'est adaptée à la transformation des structures familiales. La monoparentalité peut s'accompagner d'une plus grande vulnérabilité, situation aggravée en cas d'impayé de pension alimentaire  - un tiers des cas. S'intéresser aux familles monoparentales, c'est aussi faire progresser les droits des femmes et des enfants. Nous avons revalorisé l'allocation de soutien familial (ASF), généralisé la garantie contre les impayés de pensions alimentaires. Autre innovation sociale, l'Agence de recouvrement des impayés de pension alimentaire, annoncée par le président de la République ; dès janvier 2017, elle se verra confier le recouvrement des impayés dès le premier mois et un rôle d'intermédiation, sur décision du juge, en cas de violence ou de menaces. À compter de 2018, l'Agence pourra donner une force exécutoire aux accords amiables fixant une pension alimentaire pour les couples antérieurement pacsés ou en concubinage - en articulation avec la loi Justice du XXIe siècle. La CNAF mettra l'Agence en place en lien avec la MSA. C'est une réforme d'envergure.

Nous simplifions le versement du complément de mode de garde de la prestation d'accueil du jeune enfant. Entre 2012 et 2015, nous avons créé 70 000 places supplémentaires en crèche ; le soutien aux collectivités territoriales a été reconduit en 2016 dans les territoires prioritaires. J'ai présenté ce matin le plan action pour la petite enfance, dans le cadre d'une politique globale fondée sur les droits et les besoins de l'enfant. Une impulsion nouvelle est donnée aux maisons d'assistantes maternelles. Le plan contient des mesures pour dépasser les stéréotypes de genre et favoriser la mixité dans les métiers de la petite enfance. Le versement du complément de mode de garde est simplifié et sera articulé avec le prélèvement de l'impôt sur le revenu à la source.

La branche famille retrouve l'équilibre tandis que les prestations ont été améliorées au bénéfice des personnes qui en ont le plus besoin et ont joué un rôle d'amortisseur social que bien des pays nous envient. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements au centre) Vous avez réussi une chose, madame la ministre, c'est la médiatisation de ce PLFSS : sur tous les médias de France et de Navarre, qui n'a pas entendu que la sécurité sociale est à l'équilibre, qu'elle est sauvée...

M. Yves Daudigny.  - C'est vrai ! (On renchérit sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Vive la sécurité sociale !

M. Didier Guillaume.  - Exactement !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - L'assurance maladie en aurait presque fini avec le déficit.... Mieux, les retraites seraient à l'équilibre, voire en excédent pour des décennies ! (On se gausse à droite) Je n'ai pas le don de divination, mais je sais que ce résultat tient aux réformes que nous avons faites avant vous et contre vous ! (Applaudissements au centre et à droite)

Les voix dissidentes seraient disqualifiées parce que nous aurions une volonté « punitive », dites-vous : ce n'est pas notre intention, non plus que la privatisation de la sécurité sociale ! (Applaudissements à droite et au centre ; on évoque, sur les bancs du groupe socialiste et républicain, les programmes des candidats à la primaire de la droite et du centre) Nous sommes attachés autant que vous à la sécurité sociale, à la solidarité ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean Desessard.  - C'est mieux de le rappeler...

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Nous sommes des parlementaires mus par l'intérêt général, pas les porte-parole de tel candidat, de tel think tank ! Nous nous tiendrons aux actes, aux faits, aux chiffres, pour améliorer votre texte.

Nous reconnaissons d'autant mieux vos efforts d'économies que nous vous avons souvent demandé d'en faire davantage. Vous avez aussi joué des recettes...

Premier constat, la sécurité sociale n'est pas à l'équilibre, sauf à oublier les 3,5 milliards du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) qui fait bien partie de la sécurité sociale. La commission des affaires sociales ne conteste pas le redressement des comptes sociaux, mais nous disons que le processus n'est pas à son terme. L'assurance maladie se redresse, mais transfère une partie de son déficit sur les autres branches : c'est à ce prix que l'Ondam est tenu. Quant aux chiffres de la branche retraite, ils tiennent à des conjonctures de court-terme, pas aux données structurelles.

L'assurance maladie présente encore pour 2017 un déficit tendanciel de 8,3 milliards ; des mesures correctrices sont nécessaires. Or certaines ont pour partie un effet d'optique, avec un impact sur l'Ondam mais pas sur l'assurance maladie - les cotisations des professionnels de santé, pour 270 millions d'euros. D'autres ont un impact sur l'Ondam mais sont un transfert de charges - la mobilisation des réserves de la CNSA pour 230 millions d'euros. D'autres sont un simple changement comptable, comme les remises pharmaceutiques.

Pour beaucoup, l'assurance maladie est synonyme de sécurité sociale : est-ce pour cela que vous y avez concentré vos efforts de présentation ? Notre commission a rejeté les tableaux d'équilibre qui affichent un redressement qui n'est pas au rendez-vous.

Ces déficits persisteront si des mesures de fond ne sont pas mises en oeuvre. Nous vous en proposerons, en particulier la réforme de l'évaluation du médicament. L'Ondam doit être sincère, or la Cour des comptes a dit les imperfections de la méthode de construction de l'objectif, qui interdit un véritable pilotage à l'équilibre. Avec le mode de calcul précédent, les dépenses augmenteraient de 2,5 % en 2017 et non de 1,75 %... Et le Fonds pour l'innovation pharmaceutique fait sortir de l'Ondam le financement du médicament - 220 millions en 2017.

Vous insistez sur la nécessité d'un pacte de confiance avec l'hôpital, vous annoncez des mesures de revalorisation salariale et le renforcement de l'attractivité des carrières, mais prélevez dans le même temps 300 millions d'euros sur les fonds de formation !

Vous intervenez dans les négociations conventionnelles en cours, alors que le Gouvernement doit seulement fixer les axes de celles-ci. Il faut que les règles soient consensuelles et connues en début de négociation, nous y reviendrons.

Notre commission des affaires sociales soutient les expérimentations - pourvu qu'elles soient évaluées. Certaines mesures visent à lutter contre la désertification médicale, nous en débattrons. Les prélèvements sur les plateformes collaboratives ne sont pas inopportuns, nous en débattrons également.

Notre sécurité sociale, complexe, parfois inéquitable, n'est pas toujours soutenue ; pour rester notre patrimoine commun, la protection sociale doit innover, se moderniser pour préserver l'esprit de solidarité, partie intégrante de notre identité républicaine, partagée par tous ici ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social .  - (Applaudissements à droite) Je devrais saluer les mesures médico-sociales de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale : un Ondam à plus 2,2 % et la promesse de 590 millions d'euros supplémentaires pour les personnes âgées et personnes handicapées... J'applaudirais si le Gouvernement ne savait pas que ces mesures ne seront pas financées d'ici deux ans... L'Ondam médico-social tient aux réserves de la CNSA, voilà la réalité - réserves régulièrement ponctionnées : 50 millions d'euros en 2016, 50 millions d'euros de plus pour les services d'aide à domicile en 2017, 230 millions d'euros pour l'OGD 2017.

Un esprit chagrin verrait la volonté d'épuiser les trésors de guerre avant de passer la main... Ce qui obligerait le prochain Gouvernement, pour maintenir l'OGD, à revoir l'Ondam ou créer une nouvelle contribution de solidarité pour l?autonomie... Le devoir de solidarité risque de coûter plus cher à nos concitoyens.

Ce quinquennat n'a pas manqué d'intentions louables pour les personnes handicapées, mais votre bilan est bien mince. Peu de places d'accueil ont été créées. En cause, les lourdeurs administratives et les incertitudes dues au retard de la nouvelle tarification. Les recueils de bonnes pratiques professionnelles, sur l'autisme notamment, ne sont eux non plus toujours pas publiés. Vous demandez aux Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) de réviser intégralement d'ici 2018 leurs procédures d'orientation, tout en modifiant profondément leur financement et en leur annonçant la livraison d'un nouveau système d'information... Une gageure, pour des structures de petite taille déjà surchargées ! D'autant que leurs moyens sont maigres : 23 millions d'euros en tout...

L'article 46 du projet de loi de financement de la sécurité sociale illustre la cadence forcée que le Gouvernement veut imposer au secteur avec la généralisation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens. Or les établissements accueillant des personnes handicapées, contrairement aux Ehpad, n'ont pas encore appliqué de réforme tarifaire...

Notre commission a déposé plusieurs amendements pour tenir compte des remontées du terrain. Nous proposons ainsi de retarder la réaffectation des résultats, car la réforme est applicable sur sept ans : 15 % des établissements seront perdants. Il faut bâtir avec le secteur des relations de confiance, grâce à un véritable dialogue de gestion dont le principe serait inscrit dans la loi.

Les recettes de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie affichant un dynamisme insolent, on la transforme en tiroir-caisse, ponctionné au gré des besoins... Là encore, nous remettons un peu d'ordre.

Faisons en sorte que les réformes soient applicables et acceptables par tous. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Caroline Cayeux, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille .  - (Applaudissements à droite et au centre) Le retour à l'équilibre de nos comptes sociaux est un objectif partagé. Il interviendrait, pour la branche famille, dès 2017. Prudence, toutefois... Le Gouvernement avait bien tenté de nous rassurer l'an dernier. Or notre scepticisme s'est révélé fondé : en 2016, le dérapage est de 200 millions par rapport aux objectifs affichés. Le retour à l'équilibre annoncé pour 2017 ne résulte pas de nouvelles économies, et ne s'explique pas davantage par la conjoncture, morose. Il résulte en réalité d'un enfumage comptable - changements de périmètre, redistribution entre branches, recettes exceptionnelles, etc. - et d'une démographie moins dynamique.

Certes, le déficit de la branche famille, hérité de la crise, s'est réduit, mais au prix d'un matraquage sans précédent des familles. La modulation des allocations familiales représente ainsi une économie de 760 millions d'euros par an. S'y ajoute la baisse du plafond du quotient familial : 1 milliard par an.

Quant à la réforme du congé parental, censée réduire l'éloignement des mères du marché du travail, elle obéit en réalité à une logique comptable cynique : le Gouvernement escompte que les pères ne feront pas valoir leurs droits... C'est la même logique comptable qui a inspiré le décalage du versement de la prime à la naissance, qui met bien des familles en difficulté.

En tout, ce sont deux milliards d'euros prélevés sur les familles : quelle saignée... (M. Yves Daudigny s'exclame) Les prélèvements sur les classes moyennes n'ont que peu bénéficié aux plus modestes, car l'enveloppe globale s'est réduite. Le nombre de familles perdantes est supérieur au nombre de familles gagnantes ; un quart d'entre elles sont parmi les plus pauvres. Où donc est la justice sociale ?

Historiquement, notre politique familiale étaient destinée à compenser les charges liées à l'éducation des enfants, selon un principe de redistribution horizontale, quand la lutte contre la pauvreté recourait à d'autres outils. Depuis 2013, la vocation universelle de cette politique est mise à mal, et l'on peut craindre pour son acceptabilité sociale, s'il y a d'une part ceux qui la financent, de l'autre ceux qui en bénéficient...

M. Henri de Raincourt.  - C'est vrai.

Mme Caroline Cayeux, rapporteur.  - Cela se justifie d'autant moins que les objectifs de développement de solutions d'accueil pour les jeunes enfants n'ont pas été atteints : les chiffres sont même à la baisse pour l'accueil individuel et la préscolarisation.

Notre politique familiale nous a longtemps valu une démographie dynamique. Or la baisse du nombre de naissances s'accélère...

Je salue l'extension des missions des caisses d'allocations familiales à l'aide au recouvrement des pensions alimentaires, même s'il ne faut pas en exagérer l'importance. Il est également utile, à l'article 28, de faciliter la rémunération des salariés des particuliers employeurs et de simplifier le circuit de paiement du complément de libre choix du mode de garde. La commission vous proposera en revanche de supprimer les dispositions relatives au prélèvement à la source, le Sénat ne s'étant pas prononcé, et rejeter l'objectif de dépenses pour 2017, qui intègre des mesures d'économie que nous refusons. (Applaudissements à droite et au centre)

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

M. Gérard Roche, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse .  - Ce dernier PLFSS du quinquennat est l'occasion de faire le bilan de l'action du Gouvernement en matière de retraites, à l'aune des trois objectifs fixés par la réforme de 2014 : soutenabilité, équité, hausse du niveau de vie des retraités.

S'agissant du premier point, le Gouvernement nous annonce un retour à l'équilibre du régime de base, qui enregistrerait même un excédent de 1,6 milliard d'euros en 2017. C'est l'effet des réformes entreprises depuis 1993, et toutes ne se valent pas... La réforme de 2010 y a contribué puissamment, en augmentant les recettes grâce à la hausse de la durée de cotisation, et en diminuant les dépenses par le relèvement de l'âge de départ. En 2017, elle générera encore 5,9 milliards d'euros pour le seul régime général. À l'inverse, la réforme de 2014, en augmentant le taux de cotisation, n'a rapporté que 2 milliards par an, tout en pesant sur l'emploi. Son effet est en outre absorbé par l'élargissement en 2012 du dispositif pour carrières longues. Quant au rehaussement de la durée de cotisation à 43 ans, il aurait fallu l'anticiper de cinq ans, au lieu de le reporter à 2030... La part des pensions de retraite dans le PIB est de 14 %, l'un des taux les plus élevés en Europe. D'où la nécessité de retarder l'entrée dans la retraite.

On comprendrait encore si l'excédent du régime général compensait le déficit du Fonds de solidarité vieillesse. Tant s'en faut, puisqu'il atteindra 3,9 milliards d'euros en 2017. Vous le privez d'1,7 milliard d'euros, alors que le transfert du minimum contributif à la Cnav s'étalera sur trois ans...

Rien non plus sur la convergence entre régime général, régime des fonctionnaires et régimes spéciaux. Si ces régimes sont à l'équilibre, c'est au prix d'efforts considérables pour l'État : 58 milliards d'euros en 2016 pour les régimes de fonctionnaires, 6 milliards pour les régimes spéciaux. Si le taux de cotisation employeur était le même que dans le privé, les besoins excéderaient 20 milliards d'euros...

Cela nous amène à l'objectif d'équité. Le comité de suivi des retraites souligne que la différence des règles contribue au manque de transparence et au sentiment d'injustice. La mise en oeuvre, à partir de 2019, du « bonus-malus » dans les régimes complémentaires créera une nouvelle différence entre travailleurs du privé et agents de la fonction publique. Certes, une réforme des régimes spéciaux a été entreprise sous le précédent quinquennat, et l'augmentation de la durée d'assurance dans les régimes de la SNCF et de la RATP doit finalement entrer en vigueur le 1er janvier prochain. Toujours est-il que la prochaine réforme devra être courageuse à cet égard.

Le niveau de vie des retraités, enfin. Nous connaissons tous des gens qui vivent avec de petites pensions. Et pourtant, le revenu moyen des retraités est légèrement supérieur à celui des actifs, et les inégalités sont moindres parmi eux. Le taux de remplacement, cependant, continue de baisser : de 75,3 % pour la génération de 1949, il devrait se situer dans une fourchette comprise entre 53 et 68 % pour la génération de 1990. En cause, la modification des règles d'indexation. Il faut poursuivre la réflexion pour rendre le système moins sensible aux variations de la croissance : il y va de l'acceptabilité du système par les jeunes générations.

Ces remarques pour expliquer le vote négatif de notre commission sur les mesures autres que techniques. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles .  - La branche AT-MP est à l'équilibre depuis plusieurs années. Ce PLFSS prévoit un excédent de 696 millions d'euros en 2017 ; la dette de la branche sera intégralement apurée.

Cette évolution tient à un dialogue social de qualité au sein de la branche, et à l'augmentation régulière des cotisations employeurs - sur lesquelles repose presque exclusivement le financement de la branche.

Après une baisse significative des niveaux de sinistralité, le nombre annuel d'accidents du travail est stable, sous la barre des 900 000, dix fois moins qu'il y a cinquante ans. Preuve que les efforts de prévention des entreprises portent leurs fruits.

Le nombre de maladies professionnelles se stabilise lui aussi autour de 65 000, c'est heureux. Un nombre croissant de pathologies hors tableau sont reconnues, souvent des troubles psycho-sociaux en dépit du fait que leur origine et le degré d'incapacité qu'ils entraînent sont difficiles à déterminer. À la suite d'un rapport que j'avais rédigé avec M. Godefroy, la commission des affaires sociales s'est prononcée pour un assouplissement du taux d'incapacité exigé pour prétendre à la procédure complémentaire. Nous soulignions aussi que des maladies telles que le stress post-traumatique pouvaient être reliées à des événements professionnels. Le rapport du Gouvernement sur l'intégration au tableau des troubles psychiques et la modification des critères se fait attendre...

Le montant total des transferts vers les autres branches s'élèvera à deux milliards d'euros. C'est considérable. Ces dépenses incluent la dotation au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), dont l'État se désengage. La mission sénatoriale sur l'amiante préconisait un engagement de l'État d'un tiers... Même problème pour le Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata). Le projet de loi de financement de la sécurité sociale reconduit aussi la dotation à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles : un milliard d'euros, contre 300 millions d'euros en 2002, entièrement financés par les employeurs ! On peut raisonnablement douter des efforts faits pour réduire la sous-déclaration. Et tout cela est estimé au doigt mouillé... À cela s'ajoutent deux transferts annuels successifs de 0,05 point de cotisation de la branche AT-MP vers la branche maladie du régime général, sans véritable justification.

Les perspectives financières de la branche se fondent sur un relèvement des cotisations des employeurs à compter de 2018. Cherchez l'erreur ! La logique serait plutôt de les diminuer, vu l'accroissement des excédents, qui n'ont pas à venir renflouer les autres branches. Cela contredit les efforts visant à renforcer la logique assurantielle et l'autonomie de la branche.

Enfin, aucune mesure nouvelle de couverture de risques professionnels. Tout ceci explique que la commission des affaires sociales vous propose le rejet des objectifs de dépenses de la branche pour 2017. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis de la commission des finances .  - Ce débat illustre la fragilité de la trajectoire de nos finances publiques. Le Gouvernement compte en effet sur la sécurité sociale pour faire passer le déficit public sous les 3 % du PIB : les deux tiers des économies attendues en 2017 lui incomberaient, au lieu de la moitié lors des deux exercices précédents. Or par le passé, les économies enregistrées sur la sécurité sociale se sont révélées inférieures de moitié aux prévisions... Gare donc aux désillusions !

Le Gouvernement vante ses résultats. En quatre ans, entre 2012 et 2016, le déficit du régime général n'a pourtant reculé qu'autant qu'il l'avait fait entre 2010 et 2012... Depuis 2012, la réduction du déficit a reposé surtout sur la branche famille, au prix d'une mise sous conditions des prestations, et sur la branche vieillesse, grâce à la courageuse réforme de 2010 ! L'amélioration conjoncturelle constatée aujourd'hui ne doit donc pas être confondue avec une consolidation pérenne des comptes sociaux.

Le Haut Conseil des finances publiques a souligné à quel point les recettes prévisionnelles de ce budget reposaient sur des prévisions aléatoires. En dépenses, peu de mesures nouvelles nous sont proposées. Plus de quatre milliards d'euros sont attendus du renforcement du plan Ondam, mais sont déjà absorbés par l'augmentation des salaires. Le dispositif concernant l'économie numérique semble maladroit et peu productif. Le Gouvernement intègre surtout de fausses économies : il confond prévision budgétaire et volontarisme politique en affichant 1,6 milliard de baisse des dépenses de l'assurance-chômage, et il débudgétise le remboursement des médicaments innovants, alors qu'en la matière, nous sommes à un carrefour...

Le Gouvernement a dû revoir ses ambitions et relever l'Ondam - ce qui ne suffira pas à couvrir l'augmentation tendancielle des dépenses.

L'essentiel de l'effort repose, en fait, sur le renoncement à mettre en oeuvre jusqu'au bout le pacte de solidarité. La suppression totale de la C3S a été écartée, après bien des tergiversations. Baisser la CSG sur les retraités modestes, fort bien, mais pas en revenant sur une mesure de la loi Macron tout juste adoptée !

Enfin, qu'un gouvernement socialiste laisse en déshérence le FSV, qui assure le paiement des cotisations de retraite des chômeurs, en dit long sur la réalité du socialisme à la française... (Mme Catherine Génisson proteste)

La mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale concluait ainsi son rapport de juin 2016 : « Les résultats de la branche vieillesse et du FSV sont intrinsèquement liés, rendant illusoire la satisfaction d'un retour à l'équilibre de la première alors que le déficit du second demeure élevé. » Des faux-semblants ne font pas une politique capable de pérenniser la sécurité sociale à laquelle nos concitoyens sont si attachés. (Nouvelles protestations sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; applaudissements à droite et au centre)

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales .  - Le 25 octobre, madame la ministre, vous déclariez à l'Assemblée nationale avoir remis à flot la sécurité sociale et mis fin à des années d'errements budgétaires et de renoncement. La précédente majorité serait responsable de la crise mondiale qui a fait exploser les déficits sociaux, et serait étrangère aux mesures de 2010 qui contribuent aujourd'hui à l'amélioration des comptes ? Le Gouvernement laisserait les clés d'une maison remise en ordre ?

Il ne s'agit pas de nier que le déficit s'est réduit. Mais pourquoi ne pas dire que la réforme de 2010 - que vous avez combattue ! - contribue pour 6 milliards d'euros à cette amélioration ? Pour le reste, elle tient à des hausses de prélèvements et à la réduction d'avantages familiaux.

Cette trajectoire générerait des excédents à compter de 2019-2020 ? Le déficit actuel dépasse les 4 milliards ! Le plafond des transferts à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) ayant été épuisé, 20 milliards de dettes seront sans financement fin 2017.

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis.  - Très bien.

M. Alain Milon, président de la commission.  - Nous ne pouvons donc souscrire au satisfecit que s'accorde le Gouvernement. Les dépenses d'assurance maladie seront plus dynamiques en 2017 qu'en 2016 ; 700 millions de charges relevant de l'Ondam seront imputés sur d'autres périmètres, les transferts de la branche AT-MP vers l'assurance maladie atteindront des records... Trop d'opérations de tuyauterie qui masquent mal les tensions qui s'aggravent, dans les hôpitaux publics notamment, dont le déficit global atteindrait 600 millions d'euros.

Soumis à fortes pressions, le secteur hospitalier est engagé dans une recomposition territoriale majeure sans que les hypothèques en termes de financement et d'organisation aient été levées. Notre commission a donc supprimé la ponction sur le fonds de formation, fort peu opportun.

La branche famille avait pour vocation, tout en apportant des aides spécifiques aux familles modestes, d'offrir à chaque foyer une compensation de ses charges familiales. Avec vos réformes, cet élément fondateur de notre politique familiale est fragilisé.

S'agissant des retraites, le Gouvernement prétend avoir atteint l'équilibre pour plusieurs générations. C'est oublier que les déficits des régimes publics sont couverts par le budget de l'État, et que les prévisions reposent sur des hypothèses pour le moins optimistes. Notre approche serait « punitive », dit-on. Est-ce punitif que de dire que l'espérance de vie a progressé de sept ans depuis 1980, quand l'âge de départ à la retraite reculait de trois ans, voire quatre ou cinq, et que ce déséquilibre pèse sur les cotisations et les pensions ? Il faudra revoir les paramètres, avec pragmatisme.

Dans ces conditions, votre commission des affaires sociales vous propose de rejeter les objectifs de recettes et de dépenses de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Laurence Cohen .  - Merci au président Larcher et à Mmes les ministres pour leurs mots chaleureux à l'égard de notre camarade Paul Vergès.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale a été adopté à l'Assemblée nationale à une courte majorité. Qu'il est loin, le temps où, en 2011, nous votions des amendements communs de la gauche... Le Gouvernement prétend avoir « sauvé la sécu », mais c'est au prix d'une baisse drastique des dépenses qui met à mal le droit à la santé.

Votre vision est tronquée, puisqu'elle ne prend pas en compte le déficit du FSV, et optimiste, puisqu'elle se fonde sur des prévisions de croissance irréalistes. L'équilibre des comptes de la sécurité sociale n'est pas l'ennemi des droits sociaux, dites-vous, madame la ministre. Et de vous féliciter du remboursement à 100 % de l'IVG et de la contraception pour les mineurs, de l'amélioration du dépistage et de la prévention de certains cancers, de l'introduction du tiers-payant... Je ne conteste pas ces progrès, mais les 4 milliards d'économie annoncés ne renforceront pas les droits sociaux !

Ce sont encore les assurés et les professionnels qui subissent les conséquences de l'austérité, quand le Gouvernement dépense des milliards avec le CICE ou le crédit d'impôt recherche, qui ont encore à faire leurs preuves, comme l'ont montré Mmes Gonthier-Maurin et Beaufils dans leur rapport.

Est-il possible d'affirmer que l'on se soigne mieux aujourd'hui alors que beaucoup renoncent à se soigner faute d'argent, que les inégalités territoriales perdurent, que les urgences sont saturées ? Pas question de supprimer 22 000 postes hospitaliers, nous disiez-vous, vous en auriez créé 30 000. Au jour le jour, les personnels vivent pourtant ces suppressions, et leurs conséquences : 1 000 lits de chirurgie ferment chaque année dans les hôpitaux publics, on évalue à 100 000 le nombre d'emplois manquants, et les groupements hospitaliers de territoire n'amélioreront pas les choses...

Le virage ambulatoire ? Il faut prendre en compte les investissements nécessaires pour éviter les sorties non accompagnées. Votre cabinet a reçu l'association à la mémoire du professeur Megnien, qui s'était suicidé à l'hôpital Pompidou ; je remercie le président Milon d'avoir accepté que notre commission en fasse autant. La souffrance au travail touche toutes les professions de santé - j'en veux pour preuve la grève des infirmiers, dernièrement, qui dénoncent l'inertie du Gouvernement.

Comment être rassuré par ce PLFSS ? La branche maladie subit des économies drastiques pour respecter un Ondam pourtant loin des besoins. Et l'on détourne 300 millions d'euros de fonds de formation !

La branche AT-MP est à nouveau excédentaire, signe de la sous-déclaration chronique et de la non-reconnaissance des maladies professionnelles. Cela ne s'arrangera pas avec la réduction du nombre d'inspecteurs et de médecins du travail...

Le secteur médico-social souffre de la pénurie, et nous dénonçons le prélèvement de 230 millions sur la CNSA.

Quant à la branche famille, la modulation des allocations familiales remet en cause le principe d'universalité. La réforme du congé parental n'incite guère les pères à y recourir, et le plafond de la Gipa semble trop bas.

En matière de retraite, vous vous inscrivez dans les pas de la droite en remettant en cause les acquis sociaux - et la majorité sénatoriale voudrait aller encore plus loin !

Le groupe communiste a reçu de nombreuses organisations d'assurés non professionnelles : toutes sont inquiètes. Ces suppressions de postes à l'Urssaf ou dans les caisses d'allocations vieillesse ont des répercussions sur les moyens.

Nous soutenons les mesures sur les médicaments innovants mais pourquoi ne pas créer un pôle public du médicament afin de sortir le médicament du tout marché ?

Le PLFSS ne va pas assez loin. D'ailleurs les critiques de la droite sont modérées, à tel point que l'opposition et la majorité se battent sur la paternité des réformes !

Ambroise Croizat avait montré qu'il était possible de concevoir un meilleur système de santé. Allez voir le film La Sociale de Gilles Perret : il montre que la sécurité sociale est moins chère, plus égalitaire et plus efficace qu'un système privé.

Si l'archaïsme est de créer un système plus juste, alors je rejoins volontiers le camp des archaïques ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que du groupe écologiste)

M. Michel Amiel .  - Les PLFSS sont d'une rare complexité mais ont des conséquences pour chacun. Le texte manque d'ambition budgétaire. En dépit de la présentation du Gouvernement, le compte n'y est pas. Selon le Haut Conseil des finances publiques, la prévision de croissance économique est optimiste. La baisse du déficit est improbable, à cause des doutes sur la réalisation des économies sur lesquelles repose le chiffre fixé pour l'Ondam.

Un fonds de financement de l'innovation est créé. Les prix des traitements innovants sont difficiles à apprécier. Comment évaluer un médicament miraculeux qui sauve la vie ? On sait que le prix des médicaments est souvent estimé en fonction du pouvoir de financement de la sécurité sociale... Autant dire que sortir du tableau prévisionnel de I'Ondam l'essentiel des médicaments innovants relève de l'artifice comptable.

Ce budget témoigne d'une vision à court terme, fondée sur une débudgétisation et des artifices comptables. Une vision à long terme serait nécessaire.

Les progrès de la médecine reposent sur les nouvelles technologies. Ainsi on traite désormais les cancers comme des maladies chroniques. Je regrette que le fonds de l'innovation soit financé par des recettes non pérennes. Une meilleure coordination entre les laboratoires et la sécurité sociale est nécessaire.

Les inégalités de rémunération entre les hommes et les femmes liées notamment à la maternité perdurent. Le Gouvernement a annoncé un maintien à 100 % de la rémunération des médecins pendant le congé maternité, mais celle-ci ne concerne que les médecins liés par un contrat d'accès aux soins. Pourquoi oubliez-vous les médecins libéraux ? Comment expliquer que cette mesure soit présentée comme un outil de gestion de la profession et non comme un droit social ?

Mme Catherine Deroche.  - Très bien !

M. Michel Amiel.  - Pour que la sécurité sociale se porte bien, il faut aussi que les professionnels de santé se portent bien et que la souffrance au travail recule.

Notre vote dépendra du déroulement des débats. Le tout est de parvenir à un juste équilibre entre le coût de la santé et son prix (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Aline Archimbaud .  - La diminution du déficit de la branche maladie est une très bonne chose. La branche AT-MP est en excédent, ce n'est pas une raison pour qu'on diminue les cotisations ; mieux vaudrait l'utiliser pour faire face aux nouvelles pathologies : troubles musculo-squelettiques ou burn-out. Le nombre de maladies professionnelles augmente de 3,4 % par an depuis dix ans, sachant que ces pathologies restent sous-déclarées. Nous n'oublions pas que certains travailleurs malades de l'amiante, des pesticides ou d'autres produits chimiques n'arrivent pas à être suivis ou indemnisés.

La branche AT-MP ne peut pas être un livret d'épargne que l'on ponctionne pour compenser les déficits des autres branches.

De même, attention à la souffrance au travail des professionnels de santé. Nous saluons la détermination du Gouvernement à lutter contre les addictions, le tabac et l'alcool. Il importe de soutenir toutefois les buralistes : des aides sont prévues mais il faut encourager davantage la diversification, alors que les buralistes sont souvent les derniers commerces ouverts dans les campagnes.

Le groupe écologiste, comme chaque année, lancera des alertes et proposera des économies durables, en agissant contre des produits nocifs pour la santé, sachant que 80 % des dépenses de l'assurance maladie relèvent de maladies non contagieuses, comme le stress ou la pollution sur lesquelles nous pouvons agir. Voilà une piste d'économies gigantesques.

Entre un et deux millions de personnes n'ont pas ouvert leurs droits à la CMU-C. On ne peut miser sur le non-recours à ses droits pour équilibrer le budget, sauf à faire le lit des populismes.

Notre vote dépendra du sort réservé à nos amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste ainsi que du groupe socialiste et républicain)

M. Yves Daudigny .  - Dans quelques années, les observateurs trouveront que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale aura représenté un moment fort de notre politique sociale.

M. Henri de Raincourt.  - N'exagérons rien !

M. Yves Daudigny.  - Il marque le retour à l'équilibre des comptes. Ce texte s'inscrit dans le prolongement de la réforme de 1945, fondée sur la solidarité. Ce retour à l'équilibre met fin à une épouvantable injustice : nos petits-enfants n'auront pas à payer nos frais de santé, en plus des leurs.

Le déficit du régime général était de 23,9 milliards d'euros en 2010, il est prévu à 3,4 milliards en 2016 et, pour 2017, il est envisagé à hauteur de 400 millions. La branche famille revient à l'équilibre, les branches vieillesse et AT-MP sont excédentaires. Le déficit de la branche maladie est ramené de 4,1 à 2,6 milliards d'euros. Cette lecture des résultats du seul régime général ne porte aucune insulte à la vérité : là est bien le coeur de notre protection sociale. Le Fonds de solidarité vieillesse a été créé pour distinguer entre une prestation reposant sur le paiement de cotisations et des avantages relevant de la solidarité nationale.

La réduction de l'endettement de la sécurité sociale se poursuit à hauteur de dix milliards en 2017. La dette sociale s'éteindra en 2024, son encours s'élèvera à 135 milliards l'an prochain, tandis que le déficit de l'Acoss sera ramené à 16,3 milliards.

Ce bon résultat a été obtenu sans aucun déremboursement supplémentaire, ni nouvelle franchise, ni nouveau forfait. Le reste à charge continue de baisser. Nous soutenons le Gouvernement qui veut refonder la sécurité sociale sur la seule solidarité et accroître les remboursements de soins dentaires.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale poursuit des objectifs d'efficacité, de justice, d'équité : plafonnement des rémunérations éligibles à l'exonération de cotisations sociales accordées aux chômeurs créateurs et repreneurs d'entreprises ; responsabilité conjointe des réseaux du régime social des indépendants et de l'Acoss dans le recouvrement des cotisations dues par les travailleurs indépendants ; réduction du taux des cotisations des travailleurs indépendants à faibles revenus ; meilleure continuité des droits des frais de santé en cas de changement de situations professionnelles ; prorogation de la participation des organismes complémentaires au financement de nouveaux modes de rémunérations des médecins ; extension du droit de communication au bénéfice des agents des organismes de protection sociale.

Les deux seuils de revenu fiscal de référence sont revalorisés : les retraités touchant moins de 1018 euros voient leur CSG baisser.

Prévention, avec l'alignement des taxes sur le tabac à rouler sur les cigarettes et les hausses des taxes sur la distribution. Pour lutter contre les trafics, nous proposons d'aligner les sanctions des trafiquants de tabac sur celle des trafiquants de drogue, et d'autoriser les Centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues à dispenser des produits de substitution.

L'Ondam progressera de 2,1 % en 2017. Il faudra donc plus de 4 milliards d'économies puisque l'évolution tendancielle serait de 4,3 %. Cela ne doit pas masquer la progression des dépenses : l'Ondam progresse de 8,9 milliards par rapport à 2015 et l'Ondam hospitalier de 2,8 milliards.

Je soutiens le refus de la régulation à l'installation pour les médecins libéraux qui avait été introduit en commission à l'Assemblée nationale. Le contrat de praticien territorial est un dispositif efficace contre les déserts médicaux. Les pharmaciens peuvent vacciner contre la grippe. Très bien ! L'hôpital est un socle de notre système. Il avait été déstabilisé par la notion d'hôpital entreprise. Depuis 2012, sa mission de service public a été réaffirmée. Des recrutements ont eu lieu.

Quatre articles visent les nouveaux médicaments innovants, sources d'espoir pour les patients. Mais la constitution de deux périmètres de solidarité risque d'être pénalisante. Attention aussi à ne pas reproduire pour les bio-similaires la situation des génériques.

Le groupe socialiste votera ce texte courageux.

Soyons fiers du bilan, du renforcement de la justice. Vous avez créé une nouvelle donne sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Catherine Deroche .  - Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est l'occasion de dresser un bilan du quinquennat en la matière. Je note l'absence de grandes orientations pour adapter notre système au XXIe siècle. Le Gouvernement n'a cessé de repousser les réformes. Ainsi la réforme des retraites de 2014 est une non-réponse, comparée à la réforme de 2010. Le Gouvernement s'est contenté d'augmenter les cotisations sans s'attaquer à la multiplicité des régimes. L'extension des dispositifs de retraite anticipée pour carrières longues réduit encore les gains de la réforme.

Mme Nicole Bricq.  - Les intéressés apprécieront !

Mme Catherine Deroche.  - L'approche hospitalo-centrée est regrettable. La généralisation du tiers payant est un coup de grâce à la médecine libérale.

Entre frilosité et bureaucratie, ce texte ne sauve pas la sécurité sociale. Le déficit du FSV reste proche de 4 milliards, tandis que la dette sociale atteint un niveau préoccupant et ne sera pas remboursée avant 2024.

Le groupe Les Républicains est favorable à une protection sociale fondée sur la proximité. Nous proposerons des centres ambulatoires de proximité.

Il convient de soutenir la recherche d'excellence, là où le Gouvernement a multiplié les coups de rabot sans vision de fond. Le rétablissement du jour de carence, supprimé en 2014, est nécessaire.

Nous voulons aussi un système de retraite unique, transparent, grâce à un calcul universel par points, qui tiendrait mieux compte de la diversité des carrières. Une fusion des régimes est évidemment nécessaire.

Le rôle des responsables politiques n'est pas de rapiécer le système mais de définir une vision d'ensemble. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Olivier Cigolotti .  - Merci au président et aux rapporteurs pour la qualité de leur travail et leur sens de l'écoute. Le déficit des comptes sociaux s'élèvera à 6,9 milliards d'euros, contre 10,5 milliards en 2015. Ce résultat est inférieur de 2 milliards à la prévision, grâce à la branche maladie et la branche vieillesse.

Il ne fait pas de doute que le déficit se réduit, mais on est encore loin de l'équilibre ! Le Gouvernement occulte sciemment le déficit du FSV. Le retour à l'équilibre, initialement prévu pour 2017, devra attendre 2020 voire 2021.

Les Français sont inquiets : 84 % ne croient pas au retour à l'équilibre des comptes sociaux, alors qu'ils le jugent indispensable. Des réformes d'ampleur sont nécessaires. La présence médicale n'est plus assurée dans tous les départements. Le législateur doit s'attaquer à la désertification médicale, alors que les restes à charge demeurent élevés.

La branche famille est à l'équilibre. La branche AT-MP est excédentaire ; le déficit de la branche maladie se réduit à 2,6 milliards.

Les familles ont été ponctionnées : congé parental, allocations réduites sous conditions. Seules 20 % des places de crèche promises ont été prévues. On manque de recul pour apprécier si la garantie contre les impayés de pension alimentaire fonctionne.

L'Association des départements de France tire la sonnette d'alarme sur le financement du RSA, qui met en péril le budget de certains départements, avec de fortes disparités territoriales.

La hausse du minimum vieillesse pèse sur les salaires et donc l'emploi. La branche AT-MP sera en excédent de 600 millions ; mais le financement de cette branche repose presque uniquement sur les employeurs.

Où en sommes-nous de l'indemnisation des victimes de la Dépakine ? La Cour des comptes appelle à une réforme d'envergure : 40 % du déficit sont d'ordre structurel.

L'équilibre des comptes passera par un effort budgétaire accru. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Corinne Imbert .  - Ce PLFSS, dernier du quinquennat, est à l'image de l'action de ce Gouvernement : peu performant ! Le Gouvernement a enjolivé les comptes ! Il oublie le déficit du FSV, de 3,8 milliards d'euros. On est loin de l'équilibre annoncé... La dette sociale explose, à 154 milliards d'euros, soit 7 % du PIB.

Comment comprendre aussi que vous déposiez cinquante amendements sur votre propre texte ?

Depuis 2012, l'amélioration des comptes tient uniquement au matraquage fiscal. L'hypothèse de croissance est ambitieuse, ce qui met en péril l'atteinte des objectifs. La branche vieillesse sera à l'équilibre en 2017... grâce à la réforme de 2010 ! La Cour des comptes a alerté sur le risque de rechute dans dix ans. Soyons prudents. Les départs anticipés fragilisent l'équilibre.

La branche famille devrait aussi être à l'équilibre : grâce à la baisse du quotient familial ou à la mise sous conditions de ressources des allocations familiales. Mauvais coups pour les familles !

Certaines dépenses sont sorties de l'Ondam. Le texte prévoit un milliard de dépenses nouvelles, avec la revalorisation du point d'indice ou de la consultation.

De plus en plus de Français sont obligés de recourir à une sur-complémentaire pour se soigner.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, jonché de cadeaux fiscaux et électoraux, est digne d'une liste au Père Noël, sauf que le père François se cache désormais derrière la barbe du Père Noël ! (Sourires à droite) La baisse de la CSG pour les retraités n'est qu'un exemple.

Les pharmaciens d'officine pourront procéder à des vaccinations ? À chacun son métier, et vous avez d'ailleurs dû déposer un amendement pour apaiser les tensions. Pour vraiment améliorer la prévention, il faudrait cesser de viser uniquement les plus de 65 ans et les personnes à risque.

Sur les déserts médicaux, vous ne définissez pas les zones sur-denses et vous passez à côté du principal : il faut réajuster les parcours universitaires et travailler sur la chaîne de santé tout entière.

Les 35 heures ont été dévastatrices à l'hôpital. Nos politiques de santé sont portées par des personnels à l'engagement et à l'humanisme sans faille ; elles ont besoin de réformes structurelles et le financement de la sécurité sociale de réformes systémiques courageuses. Ce n'est pas le cas ici. Nous voterons comme notre commission des affaires sociales. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Très bien !

M. Gilbert Barbier .  - Vous vous tressez la couronne de laurier, madame la ministre, qui dans l'Antiquité célébrait la victoire, le génie et l'immortalité. À la télévision, à vous entendre, nous sommes passés grâce à vous de l'ombre à la lumière... À trop vouloir prouver on se disqualifie... Les Français ne vous croient pas.

Vous avez raboté, budget après budget, de préférence là où la résistance populaire était la moins forte ; vous avez une sainte horreur des médecins libéraux, des hôpitaux privés et pour cible préférée l'industrie pharmaceutique. En matière de politique familiale, ce n'est pas l'enfant qui vous intéresse mais le statut social de la mère : voyez votre mesure sur le congé maternité des femmes médecins... belle politique nataliste...

La CNAM, le Haut Conseil des finances publiques, la Cour des comptes jugent votre budget insincère et, d'après un hebdomadaire, le ministre du budget s'assiérait dessus... Surestimations, artifices, transferts et ponctions au-delà du raisonnable - notre rapporteur les a identifiés -, voilà à quel prix vous annoncez l'équilibre. Les dépenses présentent des risques de dérapage tandis que notre système crée de nouvelles inégalités entre patients : voilà ce que dit la Cour des comptes.

Les GHT ne sont pas la bonne réponse, nous avons trop de petits établissements qu'il faudrait avoir le courage de fermer... Mais chaque jour, nous apprenons la fermeture de telle spécialité par défaut de recrutement d'un chef de service. Les professionnels se tournent vers le privé.

La médecine se transforme, se spécialise de plus en plus ; c'est un enjeu pour nos territoires, où la qualité de l'offre varie considérablement. Il faut former plus de généralistes et plus de spécialistes, les aspirations des jeunes médecins ont changé. Il est de loin préférable de déverrouiller le numerus clausus que de recourir aux médecins étrangers.

Élargir les actes médicaux, vaccinations, examen des yeux, à d'autres professionnels de santé ? Faut-il en rire ? En 1793, on a autorisé les officiers de santé à pratiquer la médecine sans être docteurs en médecine : le charlatanisme a prospéré jusqu'à l'abrogation du décret en 1896...

À vouloir réduire mécaniquement les dépenses du secteur, vous enlevez des moyens à notre industrie du médicament et à sa recherche ; 1,6 milliard sont encore récupérés en 2017. Le taux de 0 % pour la médecine de ville n'est guère contraignant, car elle diminue ses dépenses. Pour préserver l'attractivité de la France, mieux vaut éviter ce type de montages...

Ce budget est comptable, de façade, il faut davantage pour un système de santé qui assure des soins de qualité à tous nos concitoyens. (Applaudissements à droite)

Mme Élisabeth Doineau .  - Madame la ministre, vous dites avoir sauvé la sécurité sociale : vous ne manquez pas d'audace, alors que les déficits perdurent, que les Français s'inquiètent de laisser la facture à leurs enfants et petits-enfants.

Le résultat affiché est en trompe-l'oeil, car issu d'une plomberie comptable dont les artifices n'ont pas échappé à la Cour des comptes : la branche maladie est déficitaire de 2,6 milliards d'euros, à quoi s'ajoutent les 3,8 milliards du FSV... et du milliard de dépenses non décompté dans l'Ondam. Et ce, malgré la mobilisation des réserves de la CNSA et des jeux d'écriture pour 700 millions. Avec les nouvelles dépenses nées de la nouvelle convention et de la revalorisation du point d'indice, l'Ondam serait plus crédible à 2,5 %. Vous le sous-estimez sciemment.

Le climat social est dégradé, les personnels hospitaliers manifestent, le secteur industriel est mis en difficulté. Face à la concurrence, nos contraintes administratives sont un repoussoir pour les industriels du médicament : pourquoi ne pas réformer de ce côté, comme le recommandait le rapport Barbier-Daudigny ? Les professionnels de la santé se plaignent de ne pas être suffisamment reconnus : pourquoi ne pas mieux les valoriser ? Les usagers, eux aussi, demandent des réformes plus profondes, qui diminuent leur reste à charge.

Quant aux déserts médicaux - qui touchent les zones rurales mais aussi certains quartiers des grandes villes - on ne les résorbera pas sans une politique d'ensemble, à laquelle les médecins n'adhéreront que s'ils participent à son élaboration - je le vois sur mon territoire. Une évaluation est nécessaire, avant un véritable plan Marshall, qui conjuguent les dispositifs selon une régulation choisie par les médecins.

L'article 49 diminue l'Ondam artificiellement, car l'objectif doit inclure l'innovation. L'expérimentation prévue à l'article 40 est opportune, reste qu'il est urgent de refonder nos politiques de soins psychiques et psychiatriques.

L'équilibre annoncé est en trompe-l'oeil, les réformes structurelles nécessaires sont, une fois encore, reportées. Ce PLFSS est plus que jamais équivoque. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean Desessard .  - Le Gouvernement se félicite du redressement des comptes. Certes, on peut se réjouir de certaines mesures, de la revalorisation des salaires des personnels hospitaliers, de l'extension du taux réduit ou nul de la CSG à 550 000 retraités ...

M. Jean Desessard.  - Mais (Sourires) comment ne pas s'inquiéter quand ces dépenses ne sont pas gagées, quand plusieurs milliards d'euros de pertes de recettes sont reportés à 2018 ?

Cela dit, la perspective de l'alternance n'est pas rassurante, tant les candidats de droite à la primaire font de la surenchère pour réduire les cotisations ou dégrader encore la couverture sociale des Français.

Le Gouvernement a modulé les allocations familiales en fonction des revenus. Nous regrettons la fin de l'universalité.

Mme Catherine Deroche.  - Très bien !

M. Jean Desessard.  - La suppression du quotient familial aurait été plus efficace pour faire des économies. (Exclamations à droite) Cette niche, injuste socialement, coûte 14 milliards d'euros, une somme qui pourrait aller à une allocation dès le premier enfant, prélude à un revenu universel.

Côté vieillesse, la stabilisation des dépenses s'explique par le recul de l'âge de la retraite initié par le gouvernement précédent et dramatiquement poursuivi par celui-ci. Comment accepter cette politique de recul quand 25 % des jeunes sont au chômage et qu'il est si difficile de trouver un travail au-delà de 65 ans ? Il faut désormais envisager le travail sur toute la vie. Des financements sont possibles : arrêt du CICE, fin des exonérations de cotisations sur les bas salaires, dépénalisation du cannabis - voté hier par plusieurs États américains.

Même s'il n'est pas le plus mauvais du quinquennat, ce dernier PLFSS est un rendez-vous manqué, encore un. Le rapport Sirugue proposait pourtant de refondre les minima sociaux. Nous devons proposer un système de protection sociale qui tienne compte de l'évolution de la société. Inspirons-nous de l'excellent rapport sénatorial sur le revenu universel : ce devrait être le fil rouge de la future réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste)

M. Jean-Louis Tourenne .  - Quelle merveilleuse leçon nous a été administrée par ceux qui ont commencé en 2002 à creuser le déficit - et nous reprochent aujourd'hui de ne pas avoir eu le temps de revenir à l'équilibre !

Il sera pourtant retrouvé en 2017, c'est une grande et belle nouvelle pour la solidarité ! Du jamais vu depuis Lionel Jospin ! À l'heure où l'Obamacare est menacé, nous devons nous réjouir de l'attachement des Français au système imaginé par le CNR et porté par Ambroise Croizat.

En 2016, les résultats sont meilleurs que les prévisions. Certains esprits chagrins contesteront les chiffres, chicaneront ici ou là - mais le fait est avéré : l'équilibre sera de retour, fruit d'une politique continue qui concilie rigueur et ouverture de droits supplémentaires. 17,5 milliards d'euros de déficit en 2011, 3,4 milliards en 2016, le quasi équilibre l'an prochain : quel chemin parcouru ! Les outils en ont été nombreux, du côté des économies comme de l'ouverture de droits nouveaux avec la Puma, d'un meilleur accompagnement des personnes âgées ou en situation de handicap ou de la lutte contre les déserts médicaux. Quant au reste à charge, il est passé de 9,3 % en 2011 à 8,4 % en 2016, soit 1,3 milliard d'euros de pouvoir d'achat rendu aux Français.

On taxe le Gouvernement de toutes les rages pour mieux le noyer. C'est oublier que le pays partait de loin : en 2012, dixit Jean-François Copé, nous étions en faillite... les comptes ont été redressés dans une plus grande équité et en préparant l'avenir. Méfions-nous des anathèmes et des procès d'intention qui apportent de l'eau au moulin de ceux qui prospèrent sur le discrédit de la politique. La démocratie a besoin de la critique mais aussi de sincérité et du respect mutuel.

Madame la ministre, je vous assure de notre gratitude admirative : si j'avais une couronne, je vous la poserais sur la tête ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; on ironise à droite)

M. Philippe Mouiller .  - Je salue le travail de nos rapporteurs qui éclaire la réalité des déficits et les difficultés de notre système de santé. Il y a de quoi relativiser votre satisfaction, votre enthousiasme, madame la ministre ! Le Haut Comité des finances publiques conforte nos doutes, qui évoque la fragilité de la trajectoire...

Le monde du handicap est inquiet. Vous ponctionnez encore la CNSA alors que les places en établissements manquent et que les appels à projets allongent les délais, au point que certains doivent s'exiler en Belgique - 8 500 personnes ont dû s'y résoudre. Je m'étonne que, malgré nos alertes, rien n'ait été fait. Vous prévoyez un énième rapport sur la prévention des départs. Nous le supprimerons car il est temps d'agir.

Les MDPH... Les crédits d'État sont transférés à la CNSA. L'État se désengage et prive le Parlement de moyens de contrôle. Les réserves de la CNSA diminuent, c'est inquiétant ; nous déplorons que les moyens n'aient pas été augmentés pour faire face à la généralisation de l'accompagnement pour tous, sachant que les départements ne peuvent faire davantage.

Si je salue l'article 30 bis, je suis choqué par l'article 45 quinquies qui prévoit un rapport sur le packing, pratique dont la Haute Autorité de santé a recommandé l'interdiction. Cette pratique inhumaine doit être proscrite. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Corinne Féret .  - Depuis 2012, le Gouvernement n'a eu de cesse de promouvoir la politique familiale, accentuant son caractère redistributif jusqu'à parvenir à l'équilibre l'an prochain.

L'allocation de rentrée scolaire a été revalorisée de 25 % pour 3 millions de foyers ; de nombreuses mesures ont été prises dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté, pour un total de 2,6 milliards d'euros au bénéfice de 2,7 millions de ménages, soit 1 000 euros par ménage. En 2018, le complément familial aura progressé de moitié, l'allocation de soutien familial du quart - pour respectivement 460 000 et 740 000 familles.

Les allocations familiales sont modulées en fonction des ressources, c'est une mesure de justice sociale qui préserve l'universalité puisque toutes les familles perçoivent ces allocations. Pour une meilleure contribution entre vie familiale et professionnelle, 70 000 places supplémentaires ont été créées en accueil collectif, et Laurence Rossignol vient de lancer un plan ambitieux.

La Gipa, généralisée depuis avril dernier, assure un montant minimal de 105 euros par enfant et un mécanisme pallie les retards de paiement de la pension alimentaire dès le premier mois. Avec la nouvelle agence, nous irons plus loin l'an prochain, dans l'intérêt des enfants. Les femmes victimes de violences pourront bénéficier de son intermédiation sur décision judiciaire : l'agence percevra directement la pension auprès de l'ancien conjoint avant de la leur reverser.

Le texte rend aussi plus simple le complément de mode de garde d'enfant.

La France concilie fort taux d'activité des femmes et forte natalité : le Gouvernement a su pérenniser cette particularité française, que nombre de pays nous envient. Oui, madame la ministre, la gauche a fait le job ! Personne ne peut nier que chaque PLFSS a amélioré la protection des Français. C'est le coeur de notre action, au service de toutes les familles de France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Daniel Chasseing .  - Le PLFSS étant une prérogative du Parlement, je tiens à saluer ceux qui en sont à l'origine : Jacques Chirac et Alain Juppé. (On s'amuse)

Mme Catherine Deroche.  - Tiens, tiens ! (Sourires)

M. Daniel Chasseing.  - L'équilibre ne sera pas atteint en 2017, quoi qu'en dise le Gouvernement. L'Ondam à 2,1 ? Ce sera très difficile avec les mesures salariales annoncées, qui sont légitimes, étant donné les conséquences des 35 heures à l'hôpital. La Cour des comptes escompte un retour à l'équilibre au mieux... en 2020.

Dans la branche AT-MP, les 2 milliards d'euros d'excédents sont le produit des investissements performants des entreprises - les accidents ont diminué. Il ne serait pas illogique de baisser leurs cotisations.

Côté retraites, l'équilibre est fragile. Il faut rappeler l'action heureuse des réformes Fillon. (Rires et marques de satisfaction à droite) Il faut mettre l'entreprise au centre des politiques de l'emploi, adapter la formation professionnelle. Je n'ai dans aucun programme la privatisation de la sécurité sociale.

Côté famille, il faut préserver l'universalité, mais je salue des avancées, comme la garantie contre les impayés de pension alimentaire.

L'Ondam médico-social progresse, mais il reste beaucoup à faire pour les personnes âgées et les personnes handicapées. Dans les établissements, les effectifs théoriques ne sont pas au complet, faute de crédits. La réforme « accompagnement pour tous » se met en place ; les structures du plan autisme ne sont pas encore là...

Sur les déserts médicaux, même si les facultés de médecine forment autant qu'avant, l'avenir passe par les maisons de santé et par le numérique. Sans mettre en cause la liberté d'installation, nous devons inventer d'autres mesures attractives, l'allongement de la durée des stages en milieu rural - les étudiants sont trop hospitalo-centrés. Il faut aussi intégrer davantage les maîtres de stage à l'université, revaloriser leur rétribution. Je crois aussi utile de revoir le numerus clausus. Nous sommes condamnés à réussir, sauf à acter la désertification.

Je salue le travail objectif et pragmatique de la commission, de son président et de son rapporteur général. Nous les suivrons, au service de notre sécurité sociale, l'un des socles de notre République. (Applaudissements à droite)

M. Georges Labazée .  - Dernier orateur du dernier PLFSS de la mandature, je veux vous féliciter, madame la ministre, pour votre engagement pour les personnes, âgées ou handicapées, en perte d'autonomie. Le secteur médico-social est devenu une priorité du Gouvernement, l'augmentation continue des moyens en témoigne, avec un OGD en hausse de 11 % depuis 2012 et un Ondam à 20,1 milliards en 2017.

L'ambition d'une prise en charge individualisée des personnes handicapées est portée par le plan accompagnement pour tous. Le grand chantier du vieillissement appelle la publication des décrets de la loi sur le vieillissement. Avec Gérard Roche, nous nous sommes inquiétés des ponctions sur la CNSA et de l'interprétation restrictive qu'elle faisait des crédits de 100 millions du plan d'aide à l'investissement : elle les réservait aux restructurations et mises aux normes, alors que le législateur avait souhaité que ces crédits financent la création de nouveaux établissements.

La ministre a donné les instructions nécessaires à la CNSA : merci.

À l'article 46, sur les financements complémentaires alloués aux Ehpad, je vous proposerai un amendement de compromis. Je comprends que l'on veuille laisser une plus grande latitude aux ARS, mais mieux vaut conserver une référence à l'exercice précédent, afin d'éviter que les établissements ne subissent le contrecoup d'une baisse éventuelle de l'Ondam médico-social.

Je veux dire à Mme la ministre la reconnaissance des parlementaires pour les grandes lois qu'elle a fait voter, qu'il s'agisse des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens des Ehpad, de leur tarification, ou du régime unique d'autorisation des services d'aide à domicile. Merci aussi d'avoir pris conscience des difficultés rencontrées par ces services au cours de leur restructuration. L'efficacité du fonds de restructuration dépendra de l'identification de priorités précises. Il est nécessaire de définir des objectifs chiffrés mais surtout une grille qualitative. Nul doute que nous y arriverons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Marisol Touraine, ministre .  - M. Eckert va vous répondre ; je vais devoir rejoindre l'Assemblée nationale, qui examine la mission « Santé » du projet de loi de finances - avec un amendement sur l'indemnisation des victimes de la Dépakine, monsieur Cigolotti.

La discussion générale a bien montré que nous avons des débats de fond, des choix différents, en matière de politique familiale, de retraite, d'hôpital public. Ces débats sont légitimes, démocratiques. Ils ne devraient pas nous empêcher de nous réjouir collectivement du rééquilibrage des comptes sociaux. J'ai vu que les primaires s'invitaient dans le débat. Tout est sanctuarisé, pas d'inquiétude à avoir, dit votre rapporteur général. Mais ce n'est pas ce que disent les candidats à la primaire !

Certains se sont offusqués du terme de « privatisation ». Comment appelez-vous la réduction de la prise en charge par la sécurité sociale et l'augmentation de la part des assurances privées, que préconisent vos candidats ? C'est écrit noir sur blanc dans leur programme ! Trouvez donc un autre mot... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics .  - Monsieur Vanlerenberghe, vous avez reconnu que le déficit du régime général s'est réduit. Nos prévisions seraient insincères ? Ce n'est pas l'analyse du Conseil d'État. La variable n'est pas tant de la croissance que la masse salariale. En 2016, nous avons dû la réévaluer à la hausse : 2,5 %, peut-être 2,6 % contre une prévision initiale de 2,3 %. Un peu d'humilité, donc. Les indices macroéconomiques que nous avons retenus sont tout à fait réalistes, la Commission européenne l'admet.

Certains ont critiqué le prétendu triomphalisme du Gouvernement. La caricature aussi est à proscrire, monsieur Barbier : vos propos étaient tout à fait excessifs.

Plusieurs d'entre vous ont parlé de cadeaux électoraux. Regrettez-vous donc l'augmentation du point d'indice dans la fonction publique hospitalière, après avoir pleuré sur la situation des personnels ? Si vous êtes contre, dites-le ! Êtes-vous contre la revalorisation du tarif de la consultation ? (On applaudit M. le ministre sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste) La réduction de la CSG pour les petites retraites, la baisse des cotisations des indépendants, êtes-vous pour ou contre ? Souhaitez-vous, en cas improbable d'alternance, revenir sur ces décisions ?

Certes, ce sont des dépenses pour l'avenir. Elles sont inscrites dans le PLFSS, d'où la revalorisation de l'Ondam à 2,1 %. Nous les assumons.

Sur l'endettement, j'ai entendu que la dette de la Cades ne serait pas éteinte en 2024. C'est faux, elle le sera. Et la faiblesse des taux d'intérêt n'y est pour rien : la dette se réduit parce que nous remboursons plus de dette que nous n'en créons.

Nous n'avons pas caché le déficit du FSV. Pour la première fois, il figure en clair dans les tableaux d'équilibre conformément aux recommandations de la Cour des comptes. Un peu de modestie : il sera de 3,8 milliards d'euros en 2017, contre 4,1 milliards en 2012 !

Nous avons opté pour une augmentation de la fiscalité du tabac à rouler. Ce n'est pas tant une mesure de rendement que de prévention. Là encore, nous l'assumons.

Deuxième proposition : une taxe sur les distributeurs. Les énormes profits réalisés par les fabricants se font à l'étranger, échappant à toute fiscalisation, alors que le chiffre d'affaires est réalisé en France. Les fabricants pourront assumer cette taxe, minime, d'un montant de 130 millions, le principal distributeur étant aussi l'une de leurs filiales.

J'ai signé ce matin avec la confédération nationale des buralistes un accord pour les cinq prochaines années, avec un accent sur la diversification, la concentration des aides sur les secteurs les plus défavorisés et une meilleure rémunération.

Un mot, enfin, sur l'économie collaborative. L'objectif est double : ne rien empêcher, ce qui irait contre l'évolution de la société et de l'économie, mais assurer une certaine équité vis-à-vis de l'économie traditionnelle. Tout texte est perfectible, on peut ainsi s'interroger sur le régime de rattachement des utilisateurs de plateformes. Mais nous ne saurions négliger ce dossier. Plus nous tarderons à prendre des décisions, plus il sera difficile de revenir sur des pratiques aujourd'hui à la limite du droit. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste)

La discussion générale est close.

Discussion des articles de la première partie

ARTICLE PREMIER

M. Dominique Watrin .  - Aucune solution durable ne semble avoir été trouvée aux maux dont on a accablé notre sécurité sociale. Ainsi, les réformes des retraites de 2003 et 2010 ont remis en cause des droits acquis sans reconnaître la pénibilité du travail. Si le comptable est satisfait, il n'en est pas de même de l'assuré social... Les pensions s'orientent à la baisse : la retraite moyenne pourrait, vers le milieu du siècle, ne représenter plus que 35 % du salaire moyen. La réforme de 2014 n'a pas fait mieux que les réformes Balladur et Fillon : le Gouvernement refuse toujours de prendre l'argent là où il est et de s'attaquer enfin au chômage massif.

Mme Stéphanie Riocreux .  - Nous voterons l'article premier et cette première partie avec conviction, car ils montrent que le rétablissement des comptes est inscrit dans la durée. Est-il si difficile de reconnaître la réussite du Gouvernement ? Cette posture n'est pas innocente, car elle mine la confiance envers notre sécurité sociale : 82 % des Français estiment que la préservation de notre système de santé doit être une priorité, mais le jugent menacé... Si vous ne souhaitez pas que la solidarité demeure une priorité, dites-le ! Mme la ministre a eu le courage de s'engager pour que vive la sécurité sociale, son bilan le prouve. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

L'article premier est adopté.

ARTICLE 2

M. Dominique Watrin .  - La sécurité sociale souffre de son endettement : 165,2 milliards, dont 138 milliards au titre de la seule Cades. La dette sociale ne sera pas éteinte avant dix à douze ans, et il faudra sans doute réémettre bientôt des titres et rallonger d'autant le délai... Les émissions de la Cades n'ont d'ailleurs pas été faites qu'en euros, d'où un renchérissement en cas d'appréciation du dollar ou de hausse des taux d'intérêt. Ce n'est qu'en augmentant les recettes et en créant des emplois de qualité que nous améliorerons durablement nos comptes sociaux.

Mme Évelyne Yonnet .  - Le groupe socialiste et républicain votera cet article 2, en félicitant le Gouvernement pour la rigueur de cet exercice, comme des précédents. Le déficit de la sécurité sociale sera contenu en-deçà des prévisions initiales, pour s'établir à 7,2 voire à 7,1 milliards d'euros, au lieu de 9,7 milliards. Il était de 28 milliards en 2010 et 17,5 milliards en 2012... La dette a baissé de 156 à 150 milliards d'euros. Parallèlement, la prise en charge des dépenses par la sécurité sociale augmente de 77 à 78 %, les dépenses de santé restant à la charge des ménages baissent de 9,1 à 8,4 %, la pénibilité et les carrières longues sont reconnues, les salariés précaires mieux protégés. Les femmes enceintes peuvent désormais se faire rembourser la totalité de leurs frais de grossesse et valider deux trimestres pour la retraite. Les familles modestes bénéficient de la hausse de l'allocation de rentrée scolaire et de la réduction des franchises médicales. Les travailleurs indépendants aux revenus modestes voient leurs cotisations baisser. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

L'article 2 est adopté, ainsi que l'annexe A.

La première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale est adoptée.

Discussion des articles de la deuxième partie

ARTICLE 3

M. le président.  - Amendement n°286, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

Mme Laurence Cohen.  - Cet amendement supprime la nouvelle ponction des réserves du Fonds pour l'emploi hospitalier et de l'Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH). Il y aurait 364 millions de trop, a dit la ministre devant notre commission. Cette décision revient pourtant à annuler 30 à 40 % de formations qualifiantes pour les professionnels de santé hospitaliers. Quelle garantie avons-nous que ces sommes iront au monde hospitalier, et non aux établissements privés ? Ce fonds permet aux établissements de financer des aménagements horaires, des formations, des aides à la mobilité ; son utilité n'est pas à démontrer.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Avis défavorable : l'année 2016 est presque finie, nous autorisons donc le transfert, mais pas pour 2017. De 300 millions, nous passons à 150 millions.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Défavorable. L'ANFH est structurellement excédentaire depuis 1998, ce qui lui a permis de constituer des réserves. L'Igas a même parlé de thésaurisation. Ces réserves dormantes ont vocation à être remises aux hôpitaux les plus en difficulté.

Mme Catherine Génisson.  - Nous ne voterons pas cet amendement, mais la formation professionnelle à l'hôpital est un sujet primordial. Je me réjouis des mesures prises pour les carrières des médecins et professionnels paramédicaux, mais il reste beaucoup à faire pour reconnaître la qualité de leur travail et leur investissement. Les attentes sont fortes. Si les formations proposées ne sont pas suivies, c'est à cause du manque de personnel dans certains services, et du taux d'absentéisme...

Mme Laurence Cohen.  - Quand on sait la souffrance des personnels de santé, l'explication du rapporteur général paraît un peu légère : il coupe la poire en deux...

Puisque la ministre est si audacieuse, que ne trouve-t-elle des solutions pour que ce fonds soit mieux utilisé ? Mme Génisson a mis l'accent, comme nous, sur la reconnaissance du travail des hospitaliers et la souffrance au travail. Je regrette d'autant plus que le groupe socialiste ne nous suive pas... Nous avons tous salué le courage des personnels lors des attentats, mais quand il s'agit de financer leur formation, il n'y a plus grand monde...

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales.  - Demander la suppression de cette contribution en novembre 2016 pour l'année qui s'achève est un peu hasardeux : l'argent est sans doute déjà dépensé. Pour 2017, c'est autre chose. Si le fonds est structurellement excédentaire, il faut baisser les cotisations, quitte à les augmenter ailleurs...

M. Jean Desessard.  - Nous avons tous été sensibles à l'argumentaire de Mme Cohen. Le rapporteur général a-t-il déposé un amendement concernant 2017 ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Je ne suis pas léger mais réaliste. 300 millions, ce n'est pas rien ! Comment revenir sur ce transfert alors que l'exercice est quasiment clos ?

Sur le fond, je suis d'accord avec Mme Génisson. Encore faut-il du temps pour se former...

Monsieur Desessard, la commission a déposé un amendement n°134 à l'article 53.

L'amendement n°286 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°436, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Remplacer les mots :

et les garanties

par les mots :

, les garanties et les sanctions

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Amendement quasiment rédactionnel, qui reprend les termes habituels en loi de finances.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - La commission ne l'a pas examiné. À titre personnel, avis favorable.

L'amendement n°436 est adopté.

M. René-Paul Savary, rapporteur.  - Je m'abstiendrai sur l'article 3, car l'alinéa 7 ponctionne 20 millions d'euros sur la CNSA, en cours d'exercice. Preuve que la CNSA est le tiroir-caisse pour financer tout et le reste... Ses réserves vont être très rapidement absorbées, à ce rythme.

M. Daniel Chasseing.  - Très bien.

Mme Laurence Cohen.  - C'est donc qu'on peut faire des choses en cours d'exercice...

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - La commission souhaite que l'article soit adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.