ANGLETERRE ET PAYS DE GALLES



Il n'existe pas de code de procédure pénale. Les règles de la procédure, qui sont établies par de nombreux textes épars dont le plus récent est le Criminal Procedure and Investigations Act de 1996, ont été profondément modifiées depuis quelques années.

Parmi les nouvelles dispositions figurent notamment :

- le fait que le droit au silence du suspect ou de l'accusé ait été restreint, la Cour et l'accusation pouvant désormais tirer des conclusions de son silence devant le jury ;

- l'échange des éléments du dossier, et donc des preuves, entre la police et la défense ;

- l'obligation faite à l'accusé d'indiquer le mode de défense qu'il entend utiliser avant son renvoi devant un tribunal.

I - LA PROCEDURE D'INSTRUCTION

1) Les acteurs

a) La police

La police n'est pas placée sous l'autorité du ministre de l'Intérieur. Jusqu'à l'entrée en vigueur du Police and Magistrates' Courts Act de 1994, ce dernier ne pouvait qu'émettre des circulaires à son intention. Toutefois, la loi de 1994 tend à limiter l'autonomie des forces de police. En effet, le ministre de l'Intérieur peut désormais :

- demander à une autorité locale la démission d'un chef de police ;

- avoir recours aux services d'inspection afin qu'ils contrôlent une force de police ;

- redessiner les aires de compétence des forces de police ;

- leur fournir des services et les obliger à utiliser certains équipements...

La police exerce une double mission : la recherche des preuves et le déclenchement des poursuites. Elle ne détient pas le monopole de l'action publique.

Aucune autorité ne peut contraindre la police à intenter des poursuites qu'elle ne souhaite pas engager. Une fois les poursuites déclenchées, la police doit transmettre l'affaire au Crown Prosecution Service .

b) Le ministère public

Le Crown Prosecution Service (CPS), mis en place en 1985 par le Prosecution of Offences Act pour contrôler les dossiers d'accusation que la police constitue, agit en toute opportunité pour demander à la police de continuer ou d'arrêter l'enquête après qu'elle lui a transmis le dossier. Le CPS continue ou arrête les poursuites qui ont été initialement déclenchées par la police . Si la police n'entame pas les poursuites, le CPS ne doit en principe pas intervenir.

Toutefois, aussi bien la victime que n'importe quel particulier ont le droit de saisir directement les tribunaux. Dans ce cas, le CPS peut décider de conduire les poursuites, mais il n'y est pas obligé. Il peut également les arrêter s'il estime qu'elles ne sont pas fondées.

Le CPS agit sous l'autorité du directeur des poursuites qui a pour mission, outre la prise en charge de la conduite des poursuites entamées par la police, l'engagement et la conduite des poursuites des affaires importantes ou complexes. Toutefois, ce droit est rarement utilisé.

Le directeur des poursuites est nommé par l' Attorney General et placé sous son autorité. L' Attorney General , bien qu'ayant rang de ministre, est indépendant du gouvernement (il ne siège pas au conseil des ministres) et responsable devant le Parlement. Il engage et dirige les poursuites relatives aux infractions d'une exceptionnelle gravité ou complexité, et notamment aux infractions en rapport avec la sécurité de l'Etat. Par ailleurs, certaines infractions ne peuvent être poursuivies sans son consentement préalable (ex. terrorisme).

c) Le juge

Le juge qui intervient pendant la phase policière est un magistrate, c'est-à-dire un juge non professionnel. Il n'est pas chargé de surveiller l'enquête, mais intervient ponctuellement afin d'autoriser la police à effectuer certains actes. Le cas échéant, il délivre les mandats d'arrêt, de perquisition, de saisie ou autorise la prolongation des gardes à vue.

2) L'opportunité des poursuites

Le principe qui prévaut est celui de l'opportunité des poursuites : l'obligation de poursuivre ne s'impose que lorsque " il apparaît que l'infraction ou les circonstances de sa commission ont un caractère tel que la poursuite est requise dans l'intérêt public ".

Afin d'aider la police et le CPS dans leurs décisions, un code de conduite et un document définissant les critères de la poursuite ont été établis. De ces textes, il ressort que doivent être pris en compte :

- la gravité de l'infraction ;

- l'ancienneté de cette infraction, la poursuite ne devant plus être engagée passé un délai de trois ans après l'infraction ou dix ans pour un meurtre ;

- l'âge ou l'état de santé du délinquant ;

- un éventuel retrait de plainte.

Par ailleurs, le classement sans suite sous condition est largement utilisé.

Toutefois, en cas de classement, tout citoyen, et pas seulement la victime, est autorisé à engager directement les poursuites. En pratique, l'action lancée par de simples citoyens, qui devront donc assumer la totalité des frais de procédure et rassembler eux-mêmes les preuves, est très rare.

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Lorsque l'accusé est inculpé d'une infraction grave et doit, à ce titre, être jugé devant la Crown Court , une enquête préliminaire ( committal proceedings ) doit être menée par le magistrate . Cette enquête a pour but de déterminer si les charges qui pèsent contre l'inculpé sont fondées et, le cas échéant, s'il doit être renvoyé devant la Crown Court . Elle doit avoir lieu dans les soixante-dix jours de la première comparution et le procès en Crown Court doit en principe commencer dans les cent douze jours de la décision de renvoi.

Cette enquête préliminaire se présentait à l'origine sous la forme d'une procédure orale lors de laquelle les témoins pouvaient être interrogés contradictoirement par l'avocat de l'accusé. Cette procédure ayant été jugée lourde et coûteuse, en 1967 une seconde forme d'enquête préliminaire autorisant le ministère public à soumettre les preuves non contestées sous forme de dépositions écrites fut admise. Bien que cette dernière procédure ait été, dès lors, utilisée dans la grande majorité des cas, il semble qu'elle n'ait pas amélioré le coût et la complexité de l'enquête préliminaire. Aussi, devant la recrudescence des affaires devant être examinées en enquête préliminaire, fut-il décidé lors de l'examen du C riminal and Public Order Act de 1994 de remplacer les committal proceedings par une procédure écrite, dite de transfer for trial .

Cependant, face aux critiques formulées à l'encontre du transfer for trial , jugé à son tour complexe, bureaucratique et rigide, les committal proceedings furent rétablis et modifiés par le Criminal Procedure and Investigations Act de 1996.

Si l'enquête préliminaire, procédure orale, se déroule toujours en présence de l'accusé, désormais seules les preuves écrites peuvent être examinées et aucun témoignage ne peut être entendu à ce stade de la procédure.

II - LES PRINCIPALES CARACTERISQUES DE LA PROCEDURE DE JUGEMENT

Ces caractéristiques valent aussi bien pour les procès devant la Crown Court (pour les infractions graves) que devant les magistrates' courts (pour les infractions moins graves).

Le procès pénal est de type accusatoire : le juge n'a aucun lien avec l'accusation et ne participe pas à l'élaboration de la preuve ; il dirige les débats, tranche les questions de droit et s'assure de la loyauté des procédés utilisés pour la recherche de la preuve ; il ne peut interroger les témoins.

Les débats sont publics et la procédure est orale et contradictoire : il n'existe rien de comparable au dossier français, les procès-verbaux des témoins ne sont pas communiqués à la Cour ; le témoignage des personnes comparaissant à l'audience constitue la seule preuve recevable. A de rares exceptions près, le procès ne peut avoir lieu qu'en présence de l'accusé.

Le CPS ne peut pas faire appel de la décision du tribunal.

III - L'ACTION CIVILE

La victime n'a pas le droit d'être informée de la progression des poursuites ou du procès. Si les poursuites ont été engagées par la police et le CPS, elle ne peut intervenir que pour apporter son témoignage. Elle n'a pas le pouvoir de demander elle-même des dommages-intérêts. Le procureur peut le faire, mais le juge peut refuser sur décision motivée.

IV - LES PROCEDURES SIMPLIFIEES

Les infractions les moins graves donnent systématiquement lieu à une procédure simplifiée puisque les affaires portées devant les magistrates' courts font par nature l'objet d'une procédure sommaire devant avoir lieu dans les soixante-dix jours de la première comparution.

Cependant, qu'il s'agisse des affaires examinées par les magistrates' courts ou par la Crown Court , le fait de plaider coupable simplifie et accélère notablement la procédure. En effet, lorsque l'accusé plaide coupable, aucune discussion sur la preuve n'a lieu et la culpabilité est automatiquement reconnue. Dans cette hypothèse, devant la Crown Court , la présence du jury n'étant pas nécessaire, la cour siège à juge unique.

La décision de l'accusé de plaider coupable résulte le plus souvent d'une transaction pénale, plea bargaining ou sentence discounting (3( * )) .

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