ESPAGNE



Le code de procédure pénale , largement inspiré du code français d'instruction criminelle de 1808, date de 1882 . Plusieurs fois modifié depuis, il n'a pas encore fait l'objet de la grande réforme attendue depuis plusieurs années.

I - LA PROCEDURE D'INSTRUCTION

1) Les acteurs

a) Le ministère public

L'article 124 de la Constitution décrit ainsi sa mission : " Le ministère public, sans préjudice des fonctions confiées à d'autres organes, a pour mission de promouvoir l'action de la justice pour défendre la légalité, les droits des citoyens et l'intérêt public protégé par la loi, d'office ou à la demande des intéressés, de veiller à l'indépendance des tribunaux et de rechercher devant ceux-ci la satisfaction de l'intérêt social . "

Pendant la phase d'instruction, la compétence du ministère public apparaît assez limitée : il enregistre, au même titre que les autorités de police et les juges, les plaintes. Il est informé des plaintes qui ne lui ont pas été soumises et a l'obligation de déclencher l'action publique dès qu'il a connaissance d'une infraction.

Il ne détient pas le monopole du déclenchement des poursuites car tout citoyen espagnol, qu'il soit ou non victime, peut exercer cette action en vertu de l'article 125 de la Constitution " Les citoyens pourront exercer l'action populaire (...) ", repris par l'article 101 du code de procédure pénale selon lequel " L'action pénale est publique. Tous les citoyens espagnols pourront l'exercer conformément aux dispositions de la loi. "

Compte tenu de ses faibles effectifs, de la concentration de ses membres dans les capitales provinciales et de son manque de coordination avec la police judiciaire, le rôle du ministère public pendant la phase d'instruction est essentiellement passif et limité au contrôle de certains actes de l'instruction. Bien qu'il ait la possibilité, lorsqu'il a enregistré la plainte lui-même, de procéder aux actes d'investigation qui ne touchent pas aux droits fondamentaux, en pratique, il ne le fait pas.

b) La police judiciaire

L'article 126 de la Constitution stipule : " La police judiciaire dépend des juges, des tribunaux et du ministère public en ce qui concerne la recherche du délit ainsi que la découverte et l'arrestation du délinquant, dans les termes établis par la loi . "

L'article 282 du code de procédure pénale la charge d'enquêter sur les délits, de réaliser les enquêtes nécessaires, de découvrir les délinquants, de récolter tous les éléments de preuve qui pourraient disparaître et de mettre ces derniers à la disposition des autorités judiciaires.

A l'article suivant, le code de procédure pénale précise que la police judiciaire constitue un auxiliaire des juges et tribunaux compétents en matière pénale ainsi que du ministère public, et qu'elle doit suivre leurs instructions .

c) Le juge d'instruction

Depuis 1882, la procédure pénale espagnole a conservé au juge d'instruction les attributions de son homologue français. La prise en charge de toute la procédure d'instruction par le ministère public, évoquée à plusieurs reprises, n'a pas été introduite.

Jusqu'en 1988, le juge d'instruction pouvait statuer au fond après avoir instruit, lorsque l'infraction n'était pas passible d'une peine supérieure à six mois d'emprisonnement. La loi organique n° 7 du 28 décembre 1988 a tiré les conséquences d'une décision du Tribunal constitutionnel (qui lui-même appliquait la jurisprudence De Cubber de la Cour européenne des droits de l'homme) en supprimant cette exception au principe de la séparation de l'instruction et du jugement.

2) La légalité des poursuites

L'article 100 du code de procédure pénale dispose que " de tout délit et de toute contravention naît une action pénale en vue du châtiment du coupable (...) ". L'article 105 renforce cette affirmation en obligeant le ministère public à exercer l'action publique.

Cette règle est interprétée très rigoureusement, la jurisprudence étant unanime pour décider que les tribunaux doivent appliquer la loi, même lorsque la dépénalisation du fait est imminente.

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Après que le juge d'instruction a achevé son instruction, il rend un arrêt de conclusion, ce qui a pour effet de clore l'instruction, d'ouvrir la phase intermédiaire, c'est-à-dire la phase du procès qui se situe entre l'instruction et l'audience, et de saisir le tribunal du jugement. C'est en effet ce dernier qui décide s'il y a ou non lieu d'ouvrir le procès.

II - LES PRINCIPALES CARACTERISTIQUES DE LA PROCEDURE DE JUGEMENT

• Le procès pénal est de type accusatoire : la poursuite et le jugement ne relèvent pas du même organe.

• Les débats sont publics et la procédure est orale . Ces deux principes sont d'ailleurs inscrits dans la Constitution, à l'article 120 :

" 1. Les actes judiciaires seront publics, à l'exception des cas prévus par les lois sur la procédure.

" 2. La procédure sera principalement orale, surtout en matière criminelle (...). "

• Le caractère contradictoire de la procédure impose la comparution de l'accusé et sa participation au débat. En son absence, l'audience doit être suspendue. Le jugement par contumace n'est admis que pour les infractions les moins graves.



• En vertu du principe d'" immédiateté ", le jugement du tribunal ne peut se fonder que sur les allégations faites à l'audience et sur les pièces produites devant lui. Ainsi, la déclaration d'un témoin ne peut pas être remplacée par la lecture d'une de ses dépositions faites pendant l'instruction.



• Le code de procédure pénale prescrit que l'audience, une fois ouverte, doit se poursuivre sans interruption jusqu'à sa conclusion , ce qui n'empêche ni les pauses entre deux séances, ni les suspensions justifiées (nécessité de résoudre des questions incidentes par exemple).

III - L'ACTION CIVILE

Même si les poursuites ont été déclenchées par le ministère public, les personnes lésées par l'infraction sont supposées exercer également l'action civile , directement ou par l'intermédiaire du ministère public. Elles peuvent cependant renoncer expressément à leur droit à réparation ou décider de reporter l'exercice de l'action civile jusqu'après la fin du procès pénal.

En revanche, elles ne peuvent pas utiliser le procès pénal pour obtenir uniquement une décision sur l'action civile, ni exercer celle-ci devant les tribunaux civils pendant le déroulement du procès pénal.

IV - LES PROCEDURES SIMPLIFIEES

L'article 655 du code de procédure pénale prévoit la possibilité pour l'accusé de donner son accord à la peine demandée par le ministère public. Le tribunal, s'il en est d'accord, peut alors prononcer une sentence de conformité et condamner l'accusé à la peine proposée, sans qu'il y ait de débat.

L'accusé peut donner son accord pendant la phase intermédiaire ou au début de l'audience de jugement.

La sentence de conformité est exclue lorsque la peine requise est supérieure à six ans de prison.

En pratique, cette procédure est rarement utilisée. En outre, comme la sentence de conformité ne peut être prononcée qu'après la phase d'instruction, son intérêt en termes " économiques " apparaît limité.

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