ESPAGNE



A l'occasion d'un recours en cassation, le Tribunal suprême a affirmé, le 21 septembre 1999, l'impossibilité pour la mère de ne pas déclarer son identité au moment de l'accouchement .

Cette décision constitue l'aboutissement d'une affaire commencée en septembre 1991, lorsqu'une femme signa, avant même son accouchement, un document par lequel elle s'engageait à remettre son enfant aux services sociaux de la communauté autonome afin qu'il fût adopté. Le Tribunal suprême a non seulement déclaré la nullité de cette décision d'adoption, mais il a affirmé l'inconstitutionnalité de l'article 47 de la loi sur l'état civil, qui permettait l'accouchement anonyme.

La récente décision du Tribunal suprême complète le dispositif de garantie de la connaissance des origines biologiques
. En effet, les enfants adoptés peuvent, à partir de leur majorité, prendre connaissance de l'identité de leurs parents biologiques. De même, les enfants conçus par procréation médicalement assistée peuvent obtenir des renseignements non identifiants sur les donneurs qui ont permis leur naissance.

I. L'ACCOUCHEMENT ANONYME

Par sa décision du 21 septembre 1999, le Tribunal suprême a supprimé la possibilité qu'offrait l'article 47 de la loi sur l'état civil de faire figurer la mention " De mère inconnue " sur les registres dans d'autres cas que celui des enfants trouvés . En effet, l'article 167 du règlement d'application de la loi sur l'état civil, qui prévoyait toutes les mentions obligatoires de l'acte de naissance, parmi lesquelles le nom de la mère, autorisait également le personnel médical à recourir au secret professionnel pour respecter le souhait d'anonymat de la mère.

Toutefois, l'accouchement anonyme n'empêchait pas l'établissement ultérieur de la filiation de l'enfant envers sa mère biologique à l'initiative de cette dernière. Il n'empêchait pas non plus l'enfant d'ouvrir une action en recherche de filiation maternelle. Cependant, l'adoption se déroulait de la même façon que s'il se fût agi d'un enfant né de parents inconnus.

Le Tribunal suprême a justifié sa décision en indiquant que la garantie de l'anonymat de la mère était en contradiction avec les principes de libre recherche de la paternité et d'égalité entre enfants naturels et enfants légitimes, ainsi que de dignité de la personne, tous garantis par la Constitution.

La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 47 de la loi sur l'état civil a rendu inapplicable l'article 167 du règlement correspondant. C'est pourquoi un règlement du ministère de la Justice du 10 novembre 1999 détermine les nouveaux formulaires de déclaration de naissance. Ces derniers comportent nécessairement un certain nombre d'informations sur la mère (nom, filiation, adresse...), ainsi que ses empreintes digitales.

II. L'ADOPTION

Depuis la réforme de 1981, il n'existe plus qu'une catégorie d'adoption, l'adoption simple ayant été supprimée. En principe (5( * )) l'adoption fait disparaître les liens de parenté avec la famille d'origine, et l'enfant adopté acquiert le statut d'enfant légitime. La décision judiciaire constitutive de l'adoption fait l'objet d'une mention marginale sur l'acte de naissance . Cette inscription mentionne l'identité du (ou des) adoptant(s) et précise les modifications de nom consécutives à l'adoption.

D'après le règlement de 1958 qui applique la loi de 1957 sur l'état civil, les renseignements relatifs à l'adoption sont soumis à un régime de publicité restreinte : aucune information révélant l'origine de l'adopté ou sa qualité de personne adoptée ne peut être donnée sans autorisation spéciale. L'octroi d'une telle autorisation suppose un " intérêt légitime et un motif fondé ". Toutefois, les parents adoptifs et la personne adoptée devenue majeure peuvent obtenir ces informations sans autorisation spéciale.

Pour éviter tout risque de diffusion des renseignements relatifs à la filiation d'origine, le ministère de la Justice a publié, en février 1999, une instruction permettant aux parents adoptifs de demander l'établissement d'un nouvel acte de naissance pour l'enfant adopté. Cette demande doit être effectuée avant la majorité de l'enfant. Le nouvel acte de naissance comporte les références de l'ancienne inscription, qui est alors annulée. Il fait l'objet du régime normal de publicité. Cette nouvelle disposition n'empêche pas l'adopté, une fois devenu majeur, ses parents adoptifs et des tiers munis d'une autorisation spéciale d'avoir accès aux enregistrements annulés, c'est-à-dire aux informations sur la filiation d'origine.

III. LA PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE

La loi n° 35 du 21 novembre 1988, relative aux techniques de procréation médicalement assistée, s'efforce de préserver le secret des origines génétiques . D'une manière générale, elle prévoit l'application des règles de filiation de droit commun et interdit la mention, dans les actes de l'état civil, de détails susceptibles de révéler que l'enfant a été conçu par procréation médicalement assistée. De plus, lorsqu'ils ont donné expressément leur consentement préalable pour qu'il soit recouru à un donneur extérieur au couple, ni le mari ni la femme (6( * )) ne peuvent contester le caractère légitime de la filiation de l'enfant.

1) La filiation maternelle

La mère d'un enfant est la femme qui l'a mis au monde, et plusieurs dispositions de la loi de 1988 visent à empêcher toute contestation de cette affirmation.

La loi énonce, à l'article 40, la nullité de tout contrat par lequel la mère renonce à la filiation maternelle en faveur du contractant ou d'un tiers, ce qui interdit implicitement la maternité de substitution.

De plus, elle comporte, à l'article 5, des dispositions relatives aux donneurs -qu'il s'agisse de dons de gamètes ou d'embryons- qui permettent d'appliquer le principe du secret des origines. Le don doit être anonyme et les données relatives à l'identité du donneur doivent être conservées dans les conditions de confidentialité les plus strictes qui soient et sous forme codée , d'une part, au Registre national des donneurs et, d'autre part, dans les fichiers des établissements recueillant les dons.

2) La filiation paternelle

Les prescriptions de l'article 5 de la loi de 1988, exposées plus haut, s'appliquent. Le père ne peut donc être que le mari de la mère ou l'homme qui a reconnu l'enfant.

3) L'accès aux informations sur les donneurs

Les enfants conçus par procréation médicalement assistée et leurs représentants légaux, ainsi que les femmes qui ont bénéficié de l'assistance médicale à la procréation, ont le droit d'obtenir des informations générales sur les donneurs, mais pas leur identité.

Cependant, ce principe souffre deux exceptions . L'identité du donneur peut être révélée :

- lorsque la vie de l'enfant est en danger et que la connaissance de l'identité du donneur permet d'éviter un tel danger ;

- lorsque la procédure pénale l'exige.

La loi précise que, même dans ces deux cas, la révélation de l'identité du donneur n'entraîne aucun lien de filiation avec l'enfant.

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