TITRE VI
-
ACTIONNARIAT SALARIÉ

Art. 14
Diverses dispositions relatives à l'actionnariat salarié

Cet article, qui modifie le code du commerce et le code du travail, contient plusieurs dispositions disparates, visant toutes à faciliter le développement de l'actionnariat salarié.

I - Le dispositif proposé

Le paragraphe I concerne les dispositions modifiant le code du commerce.

La première d'entre elles (1°) tend à mieux associer les salariés aux augmentations de capital.

Il est d'abord prévu qu'à l'occasion de toute décision d'augmentation de capital, l'assemblée générale extraordinaire doit se prononcer sur un projet de résolution tendant à réaliser une augmentation de capital réservée aux adhérents du PEE.

Il est également prévu que, si les salariés détiennent plus de 3 % du capital de l'entreprise, une assemblée générale extraordinaire est convoquée tous les trois ans pour se prononcer sur un même projet de résolution.

La deuxième (2°) autorise, par dérogation aux dispositions de l'article L. 225-138 du code du commerce, les sociétés à émettre de nouvelles actions dans le cadre d'une augmentation de capital réservée aux adhérents du PEE, même si le capital social de l'entreprise n'est pas libéré.

La troisième (3°) n'introduit qu'une coordination avec la reconnaissance législative des plans d'épargne groupe.

La dernière (4° et 5°) tend à supprimer les plans d'actionnariat issus de la loi du 27 décembre 1973, tout en précisant que les dispositions relatives au paiement différé des actions, à leur incessibilité et aux cas de déblocage anticipés restent en vigueur pendant un délai de cinq ans à compter de la date de publication de la présente loi.

Le paragraphe II modifie le code du travail.

Outre une modification terminologique, il introduit la possibilité par l'assemblée générale d'attribuer des actions gratuites dans le cadre des augmentations de capital réservées aux adhérents du PEE prévues à l'article L.  443-5 du code du travail, cet avantage ne pouvant toutefois dépasser le montant global de la décote autorisée sur ces titres. Il précise également le régime social de la décote, en indiquant explicitement qu'elle n'est pas assujettie à la CSG et à la CRDS.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a complété, sur proposition de son rapporteur, le dispositif initial par deux types de dispositions.

Elle a d'abord autorisé que l'abondement de l'entreprise dans le cadre du PEE puisse être versé sous forme d'actions.

Elle a également modifié la méthode de calcul du prix de cession applicable aux titres non cotées dans le cadre d'une augmentation de capital réservée aux adhérents du PEE.

III - La position de votre commission

Votre commission ne peut que s'interroger sur les propositions présentées par cet article en faveur de l'actionnariat des salariés. Elle observe en effet qu'elles sont soit faibles, soit contestables.

La mise en place de nouveaux " rendez-vous obligatoires " au moment desquels est débattue l'opportunité de réaliser une augmentation de capital réservée aux adhérents du PEE se résume en définitive à une simple discussion. Il est bien difficile d'y retrouver la démarche volontariste attendue par votre rapporteur pour avis.

Les nouvelles dispositions en faveur de la distribution d'actions gratuites et du versement de l'abondement sous forme d'actions sont elles sujet à caution. Votre rapporteur pour avis considère en effet que l'actionnariat salarié doit s'inscrire dans une démarche volontaire et participative. On peut alors douter que ces nouvelles dispositions correspondent à ces exigences.

Aussi votre commission a souhaité substituer au mécanisme prévu par le présent article en proposant un amendement s'inspirant directement d'une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale par M. Edouard Balladur et les présidents des trois groupes politiques de l'opposition nationale et déjà adopté par le Sénat en décembre dernier. Il vise à ouvrir une voie nouvelle pour permettre aux salariés d'acquérir des actions de leur entreprise. Il devrait en outre permettre de consolider l'actionnariat salarié dans les entreprises où il existe déjà.

Il propose en fait un dispositif alternatif à celui prévu par le Gouvernement au présent article, qui paraît bien modeste en se limitant à l'institution d'un simple débat sur l'actionnariat salarié au sein des assemblées générales extraordinaires des sociétés.

Il prévoit de réserver aux salariés 5 % des actions nouvelles émises par les sociétés cotées à l'occasion de toute augmentation de capital. Ce dispositif n'est que facultatif pour les sociétés non cotées et relève alors d'une décision de l'assemblée générale extraordinaire.

Le mécanisme prévu est à la fois incitatif et souple :

- incitatif car le salarié bénéficie de conditions préférentielles harmonisées avec celles des dispositifs d'épargne salariale (décote variant de 20 % à 50 % selon la durée de blocage des actions notamment), mais aussi de possibilités spécifiques de financement de cette opération (grâce à la possibilité exceptionnelle de déblocage anticipé des sommes issues de la réserve spéciale de participation ou placées sur un plan d'épargne d'entreprise) ;

- souple car il repose sur la négociation, un accord d'entreprise devant en effet fixer les modalités de l'opération. Il respecte donc les spécificités de chaque entreprise et de chaque salarié, ces derniers étant bien entendu libres de participer ou non à l'augmentation de capital.

Votre commission s'est également interrogée sur l'opportunité de supprimer les plans d'actionnariat issus de la loi du 27 décembre 1973. Il est vrai que ce dispositif est très peu utilisé. Il semble cependant qu'il ait facilité dans certains cas le lancement de plans d'actionnariat à l'échelle internationale. C'est dans cette optique que votre rapporteur pour avis avait suggéré de les maintenir l'année passée et d'aligner leur régime sur celui du PEE afin de renforcer leur attractivité.

Toutefois, les dispositions du présent projet de loi ont pour partie permis de lever les ambiguïtés -en clarifiant notamment la notion de groupe- qui avaient pu justifier la mise en place des plans d'actionnariat. Dans ces conditions, leur maintien n'apparaît plus aujourd'hui nécessaire.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article additionnel après l'article 14
Modulation dérogatoire de l'aide de l'entreprise
en cas d'augmentation de capital réservée aux adhérents du PEE

Le présent article additionnel vise à introduire la possibilité d'un renforcement de l'aide de l'entreprise en cas d'une augmentation de capital réservée aux salariés adhérents au PEE telle que le prévoit actuellement le code du travail.

Il permet d'abord de moduler la décote sur le prix de souscription de l'action en fonction de la durée de blocage des actions. La décote pourrait alors varier de 20 % pour un blocage de 5 ans -ce qui est aujourd'hui le maximum autorisé par le code du travail- à un maximum de 50 % pour un blocage de 10 ans. Cela introduirait alors une sorte de " provision pour risque ".

Il permet également de moduler l'abondement de l'entreprise en fonction de cette durée de blocage. L'abondement annuel maximum passerait alors d'un maximum de 22.500 francs pour un blocage de 5 ans à un maximum de 30.000 francs pour un blocage de 10 ans.

Ces modulations dérogatoires doivent cependant nécessairement être fixées par un accord d'entreprise.

Cet article, qui a d'ailleurs déjà été adopté par le Sénat en décembre dernier, va donc dans le sens de favoriser une plus grande stabilité de l'actionnariat salarié, tout en limitant le risque financier pesant sur le salarié.

Votre commission vous propose d'insérer cet article additionnel par voie d'amendement.

Article additionnel après l'article 14
Introduction d'une possibilité de décote sur le prix de souscription
des actions d'une société non cotée lors d'une augmentation de capital réservée aux adhérents du PEE

Actuellement le régime applicable aux augmentations de capital réservées aux salariés, dans le cadre d'un PEE, diffère selon que l'entreprise est cotée ou non. Une décote de 20 % sur le prix de souscription de l'action est possible pour une société cotée, mais pas pour une société non cotée.

Le présent article additionnel, déjà adopté par le Sénat en décembre dernier, vise à mettre fin à cette différence de traitement en autorisant une décote de 20 % pour les entreprises non cotées, le présent projet de loi renforçant d'ailleurs les garanties sur les modes de valorisation des titres non cotés.

Votre commission vous propose d'insérer cet article additionnel par voie d'amendement.

Article additionnel après l'article 14
Assimilation des actions de son entreprise détenues
par un salarié à un bien professionnel

Actuellement, le patrimoine issu de l'actionnariat salarié est assujetti à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Or, il apparaît que, dans certains cas, l'actionnariat peut représenter une part importante du patrimoine du salarié. En outre, l'investissement du salarié en actions de son entreprise s'apparente à un investissement dans son " outil de travail ". L'actionnariat est en effet un moyen pour le salarié d'orienter la gestion de son entreprise et ainsi de mieux maîtriser son emploi et son avenir.

Le code général des impôts prévoit pourtant une exonération de l'ISF pour les biens professionnels des chefs d'entreprise, mais pas pour ceux des salariés. Il suffit que le chef d'entreprise détienne 25 % du capital de l'entreprise pour que ces titres soient exonérés d'ISF. Cette situation est inéquitable. Votre rapporteur pour avis estime que cette notion de biens professionnels devrait être étendue aux actions détenues par les salariés.

Le présent article additionnel, qui reprend l'une des dispositions adoptées par le Sénat le 16 décembre dernier, prévoit donc que les actions de son entreprise détenues par le salarié soient exonérées de l'ISF.

Cette exonération doit cependant être accompagnée de certaines conditions. Ainsi, l'exonération ne serait de droit qu'à la condition que cette détention des actions se fasse collectivement, par l'intermédiaire d'un FCPE, dans le cadre d'un PEE pour une durée minimale. Seules de telles conditions permettent en effet d'assurer que l'actionnariat salarié soit effectivement assimilable à un " outil de travail ".

Votre commission vous propose d'insérer cet article additionnel par voie d'amendement.

Article additionnel après l'article 14
Rétablissement du régime du rachat d'une entreprise par ses salariés

Les rachats d'entreprises par les salariés ont pu constituer un vecteur réel et durable de l'actionnariat salarié.

Le présent article additionnel, qui reprend le texte d'une des dispositions votées par le Sénat en décembre dernier, vise donc à rétablir ce régime dont la loi de finances pour 1992 avait organisé la disparition progressive.

Votre commission vous propose d'insérer cet article additionnel par voie d'amendement.

Article additionnel après l'article 14
Régime fiscal des cessions d'actions de sociétés non cotées
au profit de leurs salariés

La loi de finances pour 1999, dans son article 39, a introduit l'assujettissement à l'enregistrement de cessions d'actions de sociétés non cotées. Cela se traduit alors, en l'absence de constatation par un acte, par un droit d'enregistrement d'un taux de 1 %.

Une telle disposition risque d'entraver le développement de l'actionnariat salarié dans les sociétés non cotées.

Le présent article additionnel, reprenant un amendement déposé par Mme Annick Bocandé le 16 décembre dernier, prévoit donc une dérogation à cet enregistrement pour les cessions d'actions de sociétés non cotées dans le cadre de l'actionnariat salarié.

Votre commission vous propose d'insérer cet article additionnel par voie d'amendement.

Article additionnel après l'article 14
Missions du Conseil supérieur de la participation

Le présent article additionnel vise à préciser explicitement dans la loi que le champ du rapport du Conseil supérieur de la participation s'étend également à l'actionnariat salarié.

Il doit donner une base légale à un renforcement de l'action du Conseil, notamment en matière d'amélioration de l'information disponible, qui reste encore très lacunaire.

Votre commission vous propose d'insérer cet article additionnel par voie d'amendement.

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Votre commission a donné un avis favorable à l'adoption du projet de loi pour les dispositions dont elle s'est saisies et sous réserve de l'adoption des amendements qu'elle propose.

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