3. La question des cavaliers sociaux

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001 contient plusieurs articles sur la recevabilité sociale desquels votre rapporteur pour avis émet des doutes. Le texte de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale est pourtant clair : " Outre celles prévues au I, les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions affectant directement l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ".

Il en va ainsi par exemple de l'abrogation de la loi n° 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite, dite " loi Thomas ", ajoutée par les députés dans l'article 19 A. Le gouvernement avait toujours dit sa volonté de ne pas appliquer ce texte en refusant de prendre les décrets nécessaires. En dehors du procédé sur lequel votre rapporteur pour avis reviendra (cf. infra ), il résulte de cela que cette loi n'a aucune traduction financière pour la sécurité sociale, pas plus qu'elle ne contient de dispositions relatives au contrôle. Son abrogation ne paraît donc pas convenablement placée dans ce texte.

De même, l'article 36 bis introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative du gouvernement ne semble pas briller par son caractère financier puisqu'il consiste à permettre aux professionnels libéraux compétents pour effectuer certains prélèvements, aux établissements et centres de santé dépourvus de laboratoires d'analyses, de transmettre ces prélèvements à un laboratoire d'analyses médicales.

Plus lourde de conséquences est la question posée par la présence dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001 de différentes mesures relatives à la CRDS. Cette dernière relève-t-elle des lois de finances ou bien des lois de financement de la sécurité sociale ? La réponse semble assez claire et plaider, ainsi que l'a bien fait remarquer le rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, notre collègue Jérôme Cahuzac, pour un transfert en loi de finances. En effet, la CADES ne figure pas dans le champ de la loi de financement de la sécurité sociale et donc les recettes qui lui sont affectées non plus.

4. L'ONDAM, cet inconnu (article 44)

Les lois de financement de la sécurité sociale fournissent un cadre à la régulation globale des dépenses d'assurance maladie. Elles fixent notamment l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM). Cet objectif est ensuite réparti par le gouvernement en quatre enveloppes : celle des établissements hospitaliers, celle des cliniques privées, celle des établissements médico-sociaux, celle des dépenses de soins de ville. Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, seule cette dernière est gérée par les partenaires conventionnels au sein d'un objectif délégué.

L'existence de l'ONDAM constitue un indéniable progrès dans l'amélioration de la connaissance par la représentation nationale des choix effectués en la matière. Toutefois, et comme le souligne la Cour des comptes dans ses deux derniers rapports sur la sécurité sociale, il souffre de nombreuses insuffisances : le caractère parfois arbitraire de son champ, le degré différent d'encadrement des postes de dépenses qui le compose, les faiblesses dans les méthodes de préparation et les insuffisances rencontrées dans les modalités de suivi des objectifs. Dès lors, selon la Cour : " les insuffisances relevées dans les méthodes de préparation et le fait que la traduction chiffrée des objectifs de santé publique soit très grossière font que l'information présentée n'est pas encore totalement pertinente " .

La pertinence des données présentées chaque année au Parlement dans le cadre du vote de la loi de financement peut en effet être sérieusement mise en doute. Ces données ne permettent en aucune façon de comprendre avec précision l'évolution de l'ONDAM, des enveloppes qui le composent et des objectifs quantifiés nationaux qui en découlent.

a) Les insuffisances liées à la décomposition de l'ONDAM en enveloppes et au lien avec les objectifs quantifiés nationaux

Les différences de champ qui existent entre l'ONDAM et les OQN biaisent l'information qui est fournie au Parlement.

L'ONDAM voté par le Parlement et les enveloppes qui en sont déduites sont des objectifs de dépenses de l'ensemble des régimes d'assurance maladie. Il ne revêt pas un caractère impératif mais les décisions qui découlent de son adoption fixent des financements limitatifs ou comportent des mécanismes de régulation a posteriori qui visent à lui donner une portée impérative.

S'agissant des hôpitaux, par exemple, l'objectif voté par le Parlement comprend uniquement les dépenses prises en charge par l'assurance maladie, dites dépenses encadrées et versées aux établissements sous forme de dotation globale. Mais, suite à la promulgation de la loi de financement, plusieurs arrêtés sont publiés qui fixent le montant des dépenses autorisées des établissements sous dotation globale. Or les deux notions ne coïncident pas. Les dépenses autorisées incluent, outre les dépenses encadrées financées par la dotation globale, les dépenses financées par les recettes propres et subsidiaires des hôpitaux. Ainsi, pour 1999, l'objectif prévisionnel des dépenses encadrées pour les établissements sous dotation globale avait été fixé à 249 milliards de francs, et le montant des dépenses autorisées à 259 milliards de francs. Pour 2000, les montants correspondants étaient respectivement de 255,7 et 266,9 milliards de francs.

Dès lors, comme le note la Cour des comptes dans son rapport de septembre 2000 : " L'exacte information du Parlement supposerait qu'il ait connaissance non seulement, comme aujourd'hui, des dépenses encadrées, mais aussi des dépenses autorisées ". Votre rapporteur pour avis ne peut qu'approuver les observations de la Cour sur ce point.

En outre, à la suite des négociations entre les partenaires sociaux et les syndicats de personnels hospitaliers, la croissance des dépenses hospitalières autorisées pour 2000 a été portée de 2,5 à 3,2 %. Le financement de cette enveloppe est assuré par l'Etat, sans que l'ONDAM ait été revalorisé. Cette méthode faussera la comparaison entre exercices. Il serait souhaitable que, dans la loi de financement pour 2001, ces dépenses soient intégrées dans l'ONDAM, avec la " rétropolation " correspondante des montants 2000.

S'agissant de l'enveloppe médico-sociale des dépenses d'assurance maladie, les informations présentées au Parlement ne représentent pas l'ensemble des dépenses de ce secteur, puisqu'une partie du financement provient d'autres sources.

S'agissant des professionnels de santé, l'ONDAM ne comprend que les dépenses remboursées, alors que l'objectif des dépenses médicales est exprimé en dépenses remboursables. La différence porte sur les dépenses non présentées au remboursement ainsi que sur la part laissée à l'assuré.

A cet égard, votre rapporteur pour avis partage les conclusions de la Cour des comptes selon lesquelles : " il serait souhaitable que le Parlement dispose, à côté des données sur les enveloppes et entrant dans l'estimation de l'ONDAM soumis à son vote, d'estimations des dépenses totales de chaque secteur, ce qui lui donnerait une vue plus complète et lui permettrait de connaître et de suivre la proportion, dans ces dépenses totales, de ce qui est couvert par l'assurance maladie ".

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