Avis n° 68 (2000-2001) de M. Jacques OUDIN , fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2000

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N° 68

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 novembre 2000

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

Par M. Jacques OUDIN,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier,Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2606 , 2631, 2633 et T.A. 567

Sénat : 64 et 67 (2000-2001).

Sécurité sociale .

AVERTISSEMENT

Le président de votre commission des finances a adressé le 4 juillet dernier un questionnaire portant sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Il comprenait 38 questions elles-mêmes subdivisées.

Le 8 novembre 2000, votre rapporteur pour avis n'a obtenu que deux réponses sur cinq.

Estimant que la représentation nationale a le droit d'obtenir réponse aux questions posées, votre rapporteur pour avis condamne cet état de fait qui révèle un mépris du Parlement.

Vous trouverez en annexe du présent avis la liste des questions auxquelles il n'a pas été répondu.

INTRODUCTION

Ce cinquième projet de loi de financement de la sécurité sociale est à l'image de l'instrument : imparfait et décevant.

*

Votre rapporteur pour avis ne peut que regretter l'opacité des comptes de la sécurité sociale qui dépendent de conventions variant chaque année et fixées par le gouvernement lui-même.

A cet égard, que dire de l'absence de loi de financement rectificative qui aurait permis de discuter de l'affectation des surplus de recettes sociales de 2000 et de prendre des mesures propres à maîtriser l'évolution des dépenses ?

De même, il convient de déplorer que les dépenses maladie dérapent deux fois plus vite que l'engagement de la France dans le cadre du programme pluriannuel de finances publiques.

Votre rapporteur pour avis souhaite aussi dénoncer les nombreux transferts croisés de ressources et de charges entre l'Etat et les organismes de protection sociale et au sein de ces derniers. Le Parlement ne vote ainsi pas les dépenses du FOREC (85 milliards de francs, en hausse de 27 % par rapport à 2000) qui ne sont retracées ni dans la loi de financement ni dans la loi de finances.

Il regrette que le FOREC, un an après sa création, ainsi que le fonds de réserve pour les retraites, deux ans après sa création, n'aient toujours aucune existence faute de décrets d'application.

Il condamne l'absence de compensation pour la CADES des baisses de CRDS qui représentent plus de 50 milliards de francs de pertes de recettes pour cet organisme qui verse chaque année à l'Etat 12,5 milliards de francs. Il entend ainsi rappeler que la mesure proposée par le gouvernement revient à prolonger de deux ans la durée de perception de la CRDS.

Enfin, il souhaite vivement critiquer les modalités et présenter la ristourne de CSG. Il esquissera les grandes lignes d'un dispositif alternatif sous la forme d'un crédit d'impôt remboursable consenti jusqu'à 1,8 SMIC et plus favorable aux familles.

*

Au delà de ces remarques relatives au projet de loi de financement pour 2001 tel qu'il vous est soumis, votre rapporteur pour avis souhaite insister sur deux points qui vont au delà des différentes mesures proposées.

En premier lieu, il s'interroge sur la politique en matière d'assurance maladie et de vieillesse. La hausse irrépressible des dépenses d'assurance maladie est aujourd'hui un état de fait contre lequel le gouvernement n'entend pas s'engager. Il en portera la responsabilité, non seulement en raison des conséquences de ce laisser-aller sur les finances publiques, mais aussi en raison de son absence totale de réflexion sur le contenu de ces dépenses. A quoi servent-elles ? Il ne paraît pas malsain qu'à un moment ou un autre le Parlement se saisisse de la question, ainsi que de propositions de réforme comme celle de la régionalisation.

De même, l'urgence - pour ne pas dire que le délai est déjà dépassé - d'actes clairs et suivis d'effets en matière de retraite n'est plus à démontrer. Et le gouvernement répond par des études, des consultations qui n'en finissent plus, une absence de mode clair de revalorisation des pensions, un fonds de réserve qui attend la définition de ses objectifs, de ses modes de gestion, de son horizon temporel, de ses règles de contrôle, etc,

En second lieu votre rapporteur pour avis entend dire toute son inquiétude devant l'utilisation qui est faite de l'outil des lois de financement. De toute évidence, cet outil a déjà atteint ses limites. Il conviendra rapidement de l'améliorer et progresser sur des domaines qu'il était impossible de traiter en 1995 comme la création d'un article d'équilibre, la révision des agrégats, la systématisation de lois rectificatives, une meilleure part donnée à la santé publique, une meilleure coordination avec les lois de finances, etc.

Les réflexions sur la réforme annoncée de l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances doivent être l'occasion de mettre cette question sur la table.

CHAPITRE PREMIER :

DES COMPTES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE À LA QUESTION DE L'AVENIR DES LOIS DE FINANCEMENT

I. L'AMÉLIORATION DU SOLDE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE : L'ABSENCE DE POLITIQUE VOLONTAIRE

" On peut remarquer que [les transferts croisés de recettes et de dépenses entre branches et fonds] f[on]t perdre une grande partie de leur signification aux soldes des branches du régime général. Il convient d'avoir cette remarque présente à l'esprit dans la lecture des commentaires de ces soldes. "
Avant-propos du secrétaire général au rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2000.

La presse s'en est fait l'écho, les esprits en ont été marqués, le gouvernement s'en est lui-même félicité : la sécurité sociale a renoué avec les excédents en 2000 et maintiendra ce solde positif l'année prochaine, malgré les mesures consenties avec largesse et générosité par le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La réalité est à la fois plus rude et plus amère.

D'abord, il n'y a pas lieu de se réjouir fort alors que les méthodes de calcul de ce solde symbolique - celui du régime général - restent sujettes à variations, à conventions librement accordées à eux-mêmes par ceux qui les publient. Selon que l'on prenne ou non en compte les dépenses à venir occasionnées par la loi de financement, selon que l'on intègre ou non les versements au titre du fonds de réserve pour les retraites ou bien la prise en charge totale par la CNAF de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (MARS), selon que l'on raisonne en comptabilité de caisse ou en comptabilité d'exercice, les résultats varient de plusieurs milliards de francs. Il faut donc plutôt parler de tendance favorable que de triompher sur un excédent.

Surtout, de quel excédent s'agit-il ? Il est le résultat des plus forts prélèvements sociaux que la France ait jamais connu, en partie en raison de la croissance économique, en partie à cause des hausses et créations successives de prélèvements en faveur de la sécurité sociale depuis 1997. Le taux de prélèvements obligatoires sociaux dans le PIB est ainsi passé de 20,3 % en 1997 à 21,3 % en 2000. Un point de PIB aura ainsi été prélevé en plus de la hausse normale due à la croissance économique et à l'inflation. 95 milliards de francs de hausse " volontaire " qui viennent s'ajouter à la hausse " naturelle ".

Par ailleurs, comment clamer sa réussite quand on devrait reconnaître son incapacité à maîtriser les dépenses ? Certes, la hausse de ces dernières a pu être plus que compensée par celle des recettes, c'est-à-dire des prélèvements. Mais demain, le jour où ces derniers ne pourront plus grimper, où la croissance sera inférieure à son niveau actuel, où le poids des retraites augmentera, où la prise en charge de la dépendance sera devenue une obligation nationale, où il faudra financer les nouvelles techniques médicales, comment ferons-nous ? En quoi la croissance économique d'aujourd'hui a-t-elle été mise à profit pour préparer l'avenir ? Si on ne maîtrise pas les dépenses quand tout va bien, que se passera-t-il le jour où tout ira moins bien ? Il ne faut pas oublier que 100 milliards de francs supplémentaires au moins auront été dépensés pour la santé des Français entre 1996 et 2001, soit au moins 20 milliards de francs par an de dépenses en plus. Le Parlement a-t-il débattu d'orientations pour affecter ces sommes ? Les Français ont-ils été consultés pour savoir comment utiliser cet argent que pourtant ils consentent à dépenser en plus pour leur santé ? Ces sommes vont-elles à la recherche, à la lutte contre les nouvelles maladies, au financement des innovations médicales et médicamenteuses, à une meilleure couverture des soins dentaires ou des prothèses ? Ou bien ces sommes se fondent-elles dans les inégalités de dotations hospitalières, les remboursements de médicaments aux effets contestables, le financement de grands programmes informatiques à la valeur ajoutée douteuse, les gaspillages divers et variés ?

C'est cela que votre rapporteur pour avis conteste. Il n'accepte pas que les prélèvements sociaux augmentent pour éponger des dépenses croissant sans cesse sans débat sur leur utilisation, sans réforme pour préparer l'avenir du système de protection sociale, sans décision sur le système de retraites, sans réflexion collective sur la santé publique.

A. LE RETOUR À L'ÉQUILIBRE

1. Les dépenses en hausse

a) Les dépenses du régime général

Le régime général connaît une hausse constante de ses dépenses, qui atteindront en 2000 près de 1.350 milliards de francs. De 1999 à 2000, les dépenses du régime général auront augmenté de 100 milliards de francs, dont 65 milliards de francs pour la maladie, soit une proportion supérieure au poids de celle-ci dans les dépenses totales.

Les dépenses du régime général

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

CNAMTS maladie

593,3

609,9

644,1

666,6

CNAMTS AT

44,1

45,3

47,2

48,6

CNAVTS

385,6

399,8

414,6

427,2

CNAF

254,5

262,6

265,7

273

Total

1.277,5

1.317,6

1.371,6

1.415,4

Total consolidé

1.252,6

1.292,6

1.348,2

1.391,7

Source : CCSS 09 2000

La branche la plus importante reste bien entendu l'assurance maladie qui représente à elle seule en 2000, 47 % des dépenses du régime général. Viennent ensuite la vieillesse (30,2 % ), la famille (19,3 %) et les accidents du travail (3,5 %).

Le rythme d'évolution des dépenses du régime général est élevé puisqu'il était de 4,3 % en 2000 et qu'il devrait rester de 3,2 % en 2001. Rapporté au PIB en valeur, le rythme lui est supérieur en 2000 mais inférieur en 2001.

Rythme d'évolution des dépenses
du régime général

(en %)

1998/1997

1999/1998

2000/1999

2001/2000

CNAMTS maladie

+ 3,5

+ 2,8

+ 5,6

+ 3,5

CNAMTS AT

+ 0,6

+ 2,6

+ 4,3

+ 2,8

CNAVTS

+ 3,8

+ 3,7

+ 3,7

+ 3,1

CNAF

- 1

+ 3,2

+ 1,2

+ 2,7

Total

+ 2,6

+ 3,1

+ 4,1

+ 3,2

Total consolidé

+ 2,9

+ 3,2

+ 4,3

+ 3,2

Source : CCSS 09 2000

Qu'il s'agisse de 2000 ou de 2001, la branche maladie se distingue par son rythme le plus élevé de croissance des dépenses avec 5,6 % en 2000, soit 1,4 point de plus que le PIB en valeur. Pour 2001, le rythme prévisionnel est de 3,5 %.

Le rapport de septembre 2000 de la commission des comptes de la sécurité sociale analyse ainsi cette évolution : " Les dépenses continueraient de progresser moins vite que les recettes : elles croîtraient de 4,3 % en 2000 avant de ralentir en 2001 (+ 3,2 %). La moindre revalorisation des pensions et de la BMAF en 2000 qu'en 1999 et le ralentissement des prestations sous condition de ressources qu'occasionne l'amélioration de la conjoncture pèsent certes en 2000 sur les prestations des branches vieillesse et famille. Mais les aléas de liquidation qui affectent les années 1999 et 2000 entraîneront en 2000 une accélération sensible des prestations de la branche maladie. En 2001, des phénomènes de sens inverse conduisent au ralentissement prévisionnel des prestations : la revalorisation des pensions et de la BMAF accélère de plus d'un point, mais la fixation de l'ONDAM au taux de 3,5 % par rapport à une base 2000 qui n'intègre pas la totalité du dépassement conduit à un net infléchissement des prestations maladie. " On sent donc bien que les prévisions 2001 de la commission des comptes sont optimistes et devraient se heurter aux hypothèses plus dépensières du projet de loi de financement pour 2001.

b) Les objectifs de dépenses de la loi de financement

L'objectif de dépenses des régimes obligatoires de base de la loi de financement pour 1999 a été dépassé de 8,1 milliards de francs en exécution en raison de la hausse des dépenses d'assurance maladie et de l'absence de compensation complète par l'Etat de la MARS. De 1998 à 1999, le champ des dépenses de la loi de financement a ainsi augmenté de 52,4 milliards de francs soit une hausse de 3 %.

Des dépenses des régimes obligatoires de base
Objectifs et réalisations

(en milliards de francs)


Branche

Maladie-maternité-invalidité-décès

Vieillesse-veuvage

Accidents du travail

Famille

Total des dépenses

Réalisations LFSS pour 1998 (sept. 1999) (1)

687,0

735,5

51,1

253,3

1.744,8

Objectifs LFSS pour 1999 (2)

697,8

781,4

53,0

256,9

1.789,1

Prévisions d'exécution (sept. 1999)

709,8

779,1

53,5

264,3

1.806,6

Réalisations connues en juillet 2000 (3)

705,8

777,8

52,7

260,9

1.797,2

Réalisations 1999/ réalisations 1998 (3)(1) (en %)

2,7

3,2

3,1

3,1

3,0

Ecart entre les réalisations et les objectifs (3) - (2)

8,0

- 3,6

- 0,3

+ 4,0

8,1

Source : Cour des comptes

Pour 2001, le total des agrégats de la loi de financement est en hausse de 4,1 % et de 76,6 milliards de francs, dont 35,9 milliards de francs pour la seule assurance maladie (+ 4,9 %). Si l'évolution totale restait en dessous de celle du PIB en valeur anticipée pour 2001, les dépenses de maladie le dépasseraient encore une fois (0,1 point de plus). Comme les prévisions de croissance sont plutôt optimistes et que celles d'assurance maladie nous ont habitués aux mauvaises nouvelles, tout porte à croire que cette tendance ne sera pas démentie en exécution. Il faut ajouter que les mesures adoptées à l'Assemblée nationale ont dégradé de 1,5 milliard de francs les objectifs de dépenses de la branche vieillesse soit 1,35 milliard de francs pour les revalorisations des petites retraites agricoles, 100 millions de francs pour l'extension de l'assurance veuvage et autant pour le coup de pouce de 0,5 point sur le minimum vieillesse.

Prévisions d'évolutions des dépenses

(en milliards de francs)

maladie

accidents du travail

vieillesse

famille

Total

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2000

733,3

54,7

803,3

265

1.856,3

Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (*)


769,2


56,2


830,4


277,1


1.932,9

Ecart

+ 35,9

+ 1,5

+ 27,1

+ 12,1

+ 76,6

Taux de croissance (en %)

4,9

2,7

3,4

4,6

4,1

(*) après modification de l'Assemblée nationale.

2. Les recettes en hausse

a) Les recettes du régime général

Les recettes du régime général sont marquées par un niveau très important de 1.351 milliards de francs en 2000 et une prévision pour 2001 qui s'élève à près de 1.392 milliards de francs. De 1999 à 2001, le régime général aura vu ses recettes croître de 100 milliards de francs.

Les recettes du régime général

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

CNAMTS maladie

577,4

601

638

665,9

CNAMTS AT

45,7

46,3

49,3

52

CNAVTS

385,4

403,5

415,2

430,6

CNAF

252,5

267,4

272,5

282,3

Total

1.261

1.318,3

1.375

1.430,8

Total consolidé

1.236,2

1.293,3

1.351,6

1.391,7

Source : CCSS 09 2000

Bien évidemment, l'importance respective de chaque branche se lit aussi dans la part des recettes du régime général qu'elle représente. Ainsi, la maladie concentre à elle seule 46,4 % des recettes du régime général, la vieillesse 30,2 %, la famille 19,8 % et les accidents du travail 3,6 %.

Le rythme d'évolution des recettes est très différencié. Certes, il est marqué par une très forte progression puisque les recettes augmenteront encore de 4,1 % en 2001 après une hausse de 4,5 % en 2000 et 4,6 % en 2001. Cependant, les évolutions sont constatées entre les branches, la maladie ayant une hausse supérieure à celle des autres branches en 2000 et 2001 ce qui n'était pas le cas précédemment.

Rythme d'évolution des recettes du régime général

1997/1998

1998/1999

1999/2000

2000/2001

CNAMTS maladie

+ 3,3

+ 4,1

+ 6,2

+ 4,4

CNAMTS AT

+ 3,5

+ 1,3

+ 6,4

+ 5,4

CNAVTS

+ 5,2

+ 4,7

+ 2,9

+ 3,7

CNAF

+ 4,1

+ 5,9

+ 1,9

+ 3,6

Total

+ 4,1

+ 4,5

+ 4,3

+ 4,1

Total consolidé

+ 4,4

+ 4,6

+ 4,5

+ 4,1

Source : CCSS 09 2000

Il apparaît cependant que les recettes de 2000 sont gonflées par des effets statistiques comme la prise en compte de la régularisation de 3,1 milliards de francs de CSG au profit de la CNAMTS, les retards de décembre 1999 (31 décembre et grève des postes) pour 2,5 milliards de francs, et les 1,2 milliard de francs versés par l'industrie pharmaceutique. En sens inverse, l'Etat a réduit de 4,5 milliards de francs sa prise en charge de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (MARS) ce qui explique le plus faible taux d'évolution des recettes de la CNAF ; enfin, la conjoncture a ralenti les décaissements du FSV au titre des périodes de chômage. En 2001, la hausse des recettes est minorée encore pour ces deux raisons, dont 2,1 milliards de francs au titre de la MARS.

La hausse des recettes du régime général devrait plutôt porter sur les cotisations, en raison de la progression attendue de 5,7 % de la masse salariale pour 2001.

Recettes du régime général de 1999 à 2001

(en milliards de francs)

1999

2000 prév.

2001 prév.

milliards

évol. En %

milliards

évol. En %

milliards

évol. En %

Cotisations (1)

873,4

1,8

923,9

5,8

969,9

5,0

Impôts et taxes affectés (2)

284,0

12,1

301,6

6,2

311,9

3,4

Autres recettes (3)

160,9

7,4

149,4

- 7,1

149,1

- 0,2

Total Recettes

1.318,3

4,5

1.374,9

4,3

1.430,8

4,1

Total Dépenses

1.317,6

3,1

1.371,6

4,1

1.415,1

3,2

Solde du Régime général (4)

0,7

3,3

15,7

Source : CCSS 09 2000

(1) Y compris les exonérations prises en charge

(2) CSG Taxes diverses (assurances automobiles, alcools, tabac, publicité pharmaceutique) en métropole. Impôts de 1 % sur les revenus des capitaux et les valeurs mobilières.

(3) Transferts, subventions de l'Etat, recours contre tiers, recettes diverses, recettes DOM (yc cotisations et CSG).

(4) Variation du fonds de roulement

Les recettes du régime général devraient rester encore aux deux tiers dépendantes des cotisations, tandis que la part relative des impôts et taxes affectés se stabilise. Cependant, cette répartition devrait se voir modifiée en 2001 par les tuyauteries rendues nécessaires par le financement des 35 heures et la compensation de la ristourne dégressive de CSG.

Structure des recettes du régime général en 1999, 2000 et 2001 (prévisions)

Source : CCSS 092000

b) Les prévisions de recettes de la loi de financement

Le dynamisme des prévisions de recettes de la loi de financement ne se dément pas. En exécution, les recettes de 1999 s'élèvent à 1807,9 milliards de francs, soit 8,7 milliards de plus que ce qui avait été prévu par le Parlement, et une hausse de 71,5 milliards de francs, soit 4,1 % par rapport aux réalisations de 1998.

De 2000 à 2001, le champ des recettes devrait augmenter de 89,5 milliards de francs, soit une progression de 4,75 % par rapport aux prévisions d'exécution. Il faut remarquer une nouvelle fois la progression des impôts et taxes affectés (37,4 milliards de francs en plus, soit une hausse de 7,15 %), liée aux nouveaux transferts de ressources organisés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, notamment pour le financement des 35 heures. La discussion à l'Assemblée nationale a revalorisé de 1,9 milliard de francs les prévisions de recettes en matière d'impôts et taxes affectés, en raison de la suppression des frais de recouvrement de la CSG et de la CRDS (130 millions de francs), de la hausse de la taxe sur les grossistes répartiteurs (450 millions de francs) et de l'affectation de 1,35 milliard de francs de C3S au Budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA).

Evolution des recettes des lois de financements

(en milliards de francs)

1997 (exécuté) (1)

1998 (exécuté) (1)

1999 (exécuté) (1)

2000 (révisé) (2)

2001 (prév.) (3)

2001/2000 Ecart

2001/1997 Ecart

2001/1997 Evolution annuelle moyenne (en %)

Cotisations effectives

1.154,9

1.042,8

1.061,8.

1.050,7

1.085,2

+ 34,5

- 69,7

- 1,5

Impôts et taxes affectés

221

401,2

442,7

514,7

554

+ 39,3

333

37,5

Sous-Total : Cotisations et impôts

1.375,9

1.444

1.504,5

1.565,4

1.639,2

+ 73,8

263,3

4,7

Cotisations fictives

181,2

187,1

195,9

199,1

201,3

+ 2,2

20,1

2,8

Contributions publiques

68,6

66,6

68,5

72,4

67,8

- 4,6

- 0,8

- 0,3

Transferts reçus

4,8

4,8

4,3

1,7

2,6

+ 0,9

- 2,2

- 11,5

Revenus des capitaux

1,4

1,4

1,5

1,7

3,2

+ 1,5

1,8

32,1

Autres ressources

32,6

32,5

33,4

42,2

58,3

+ 16,1

25,7

19,7

Total

1.664,5

1.736,4

1.807,9

1.882,9

1.972,4

+ 89,5

307,9

4,6

(1) Cour des comptes.

(2) Annexe b au projet de loi de financement pour 2001.

(3) Projet de loi de financement pour 2001 modifié par l'Assemblée nationale.

3. Les différences de soldes

a) Le solde tendanciel : excédent

L'année 2000 et la prévision d'exécution pour l'année 2001 s'inscrivent dans le contexte général d'amélioration des comptes sociaux. Ainsi, le compte tendanciel de la sécurité sociale, c'est-à-dire avant prise en compte des mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, montre-t-il un excédent de plus de 15 milliards de francs, qui succède à un excédent de 3,3 milliards de francs pour 2000.

Solde tendanciel du régime général

(en milliards de francs)

1997

1998

1999

2000

2001 (p)

Maladie

- 14,1

- 15,9

- 8,9

- 6,1

- 0,8

Accidents du travail

0,3

1,5

1,1

2,1

3,4

Vieillesse

- 5,2

- 0,2

3,7

0,6

3,4

Famille

- 14,5

- 1,9

4,8

6,8

9,4

Régime général

- 33,8

- 16,5

0,7

3,3

15,4

Source : CCSS 09 2000

L'amélioration est bien évidemment distincte selon les branches du régime général. L'assurance maladie conserve un déficit élevé, même s'il est en constante baisse. La branche famille affiche l'excédent le plus haut, en raison notamment du dynamisme de ses recettes. La branche vieillesse équilibre juste son compte après un versement de 2,9 milliards de francs au fonds de réserve pur les retraites. Quant à la branche accidents du travail, elle conserve son excédent structurel.

La prévision tendancielle pour 2001 marque une prolongation de l'amélioration. Elle porte sur toutes les branches, mais serait surtout caractérisée par le retour à l'équilibre de la branche assurance maladie, sous réserve d'un respect de l'ONDAM, condition dont chacun connaît la fragilité, mais qui pourrait être respectée en raison, d'une part, des rebasages successifs et, d'autre part, du taux élevé retenu pour 2001.

En réalité, la principale incertitude porte sur l'environnement macro-économique. Comme à l'habitude, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 reprend les hypothèses déterminées par le gouvernement pour le projet de loi de finances. Or plusieurs économistes ont pu émettre des doutes sur la fiabilité de ces hypothèses, notamment s'agissant de la masse salariale, élément clef pour l'évolution des recettes des régimes sociaux. Ainsi, alors que le gouvernement prévoit une hausse de 3,7 % du pouvoir d'achat du revenu disponible brut en 2001 (contre 2,8 % en 2000), le groupe technique de la Commission économique de la nation est plus réservé, les hypothèses retenues allant de 2,3 % (Natexis, Banques populaires) à 3,2 % (BIPE), la moyenne se situant aux alentours de 2,7 %, soit un point de moins que la prévision du gouvernement !

Principaux éléments de cadrage macroéconomique
1999 - 2000 - 2001

(en moyenne annuelle, en %, sauf indications contraires)

1999

2000 (prév.)

2001 (prév.)

Environnement international

PIB :

Monde

3,4

4,7

4,0

OCDE (1)

2,8

3,8

2,9

Etats-Unis

4,2

5,1

3,1

Japon

0,3

1,5

1,3

Zone Euro

Allemagne

1,5

3,0

3,1

Italie

1,4

3,1

3,2

Espagne

3,7

4,2

4,2

Cours de l'euro/dollar

1,070

0,950

1,0

France

PIB (en volume)

3,2

3,2 à 3,6

3,0 à 3,6

PIB (en valeur, centre de fourchette)

4,2

4,8

Montant du PIB (en milliards de francs)

8.188

9.188

9.624

Pouvoir d'achat du revenu disponible

2,2

2,8

3,7

Consommation des ménages (en volume)

2,1

2,7

3,5

Investissement des entreprises (en volume)

7,6

6,6

6,9

Prix à la consommation des ménages

Ensemble (en moyenne annuelle)

0,5

1,5

1,3

Hors tabac (en moyenne annuelle)

0,5

1,4

1,2

Massa salariale secteur privé (2)

4,1

5,4

5,7

Salaire moyen par tête

1,8

2,1

3,1

Effectifs salariés

2,3

3,2

2,5

Exportations

3,7

12,2

7,7

Importations

3,6

12,6

7,6

Solde de la balance commerciale FAB/FAB (milliards)

112

69

89

Source : CCSS 09 2000

Par ailleurs, pour la première fois, le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale a présenté l'ensemble des comptes en droits constatés. Ainsi, l'analyse de la différence entre le solde du régime général en comptabilité de caisse et en comptabilité d'exercice fait apparaître un écart assez important pour l'année 1998, dû à la mise en place des procédures, qui tendra à se réduire. Les mécanismes de régularisation de la CSG ont introduit un biais statistique, 3,1 milliards de francs venant gonfler le solde 2000 en encaissements / décaissements.

Le solde du régime général en droits constatés
et en encaissements/décaissements

(en milliards de francs)

1998

1999

2000 (p)

2001 (p)

Solde en droits constatés

- 9,5

3,3

2,6

20,9

Solde en encaissements/ décaissement

- 16,5

0,7

3,3

15,4

Ecart

7,0

2,6

- 0,7

5,5

Source : CCSS 09 2000

b) Le solde après prise en compte des mesures : déficit

Il n'existe pas à proprement parler de solde et d'article d'équilibre de la loi de financement de la sécurité sociale (voir infra ).

En revanche, les mesures inscrites dans la loi de financement adoptée par le Parlement ont un effet sur les comptes tendanciels des différents régimes, à commencer par ceux du régime général.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, dans sa rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, dégrade ainsi le solde tendanciel du régime général de 11 milliards de francs. Cependant, cet impact de la loi de financement pour 2001 reste théorique puisqu'il se fonde sur un solde tendanciel ayant déjà pris en compte certaines mesures " par anticipation ", comme la prise en charge de la MARS par la CNAF (2,1 milliards de francs). Par ailleurs, les documents fournis par le gouvernement ne prenaient pas en compte le coût pour la CNAMTS des transferts de charge que lui impose l'Etat au titre des appartements de coordination thérapeutique (ACT) et des consultations en alcoologie des centres d'hébergement et de réadaptation sociale (CCHRS), soit 160 millions de francs. La dégradation réelle est donc d'au moins 13,25 milliards de francs.

Tableau d'équilibre du régime général

(millions de francs)

Maladie

du travail

Vieillesse

Famille

Total

SOLDES DU COMPTE TENDANCIEL

- 800

3.400

3.400

9.400

15.400

SOLDE TENDANCIEL HORS MARS

- 800

3.400

3.400

11.500

17.500

MESURES

- 250

- 1.610

- 1.650

- 9.740

- 13.260

provision pour la réduction du temps de travail à l'hôpital


- 500


-


-


-


- 500

prise en charge des ACT et des consultations en Alcoologie des CHRS


- 160


- 160

dotation au fonds d'action sociale de la CNAM

- 100

-

-

-

- 100

prise en compte dans l'ONDAM de l'alignement des taux de remboursement de la CANAM sur ceux du Régime général



1.080



-



-



-



1080

modification des règles d'affectation du 2 % capital

- 920

-

-

- 1.490

- 2.410

augmentation de la taxe sur les grossistes répartiteurs

+ 450

+ 450

" coup de pouce " de 0,5 % sur les pensions

- 100

- 110

- 1.850

-

- 2.060

transfert FSV

-

-

+ 300

-

+ 300

extension de l'assurance-veuvage

- 100

- 100

dotation au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante


-


- 1.500


-


-


- 1.500

modulation de l'aide à la garde d'enfant par une assistante maternelle


-


-


-


- 650


- 650

allocation de présence parentale pour enfant malade

-

-

-

- 220

- 220

réforme des aides au logement

-

-

-

- 800

- 800

dotation au fonds d'action sociale de la branche famille


-


-


-


- 1.700


- 1.700

prise en charge totale de la MARS

-

-

-

- 2.100

- 2.100

cumul APE/revenus d'activité

-

-

-

120

110

prise en charge des majorations pour enfant des pensions de retraite


-


-


-


- 2.900


- 2.900

SOLDE APRES MESURES

- 1.050

1.790

1.850

1.760

4.240

B. QUELLE POLITIQUE POUR QUEL ÉQUILIBRE ?

1. Les dépenses : quel bénéfice pour les Français ?

a) La hausse
(1) Les écarts de hausse des dépenses

L'analyse des écarts entre les prévisions de dépenses du régime général pour 2000 fait apparaître une forte accélération des dépenses. Prévues il y a un an pour augmenter de 2,3 %, elles auront crû effectivement de 4,1 % selon les dernières prévisions, soit 14,8 milliards de francs de dépenses supplémentaires .

Différences de prévisions pour 2000
sur les dépenses du régime général

(en milliards de francs)

CCSS 09 999

CCSS 05 2000

CCSS 09 2000

CNAMTS

634,4

636,3

644,1

CNAMTS AT

47,3

47,9

47,2

CNAVTS

409,5

412,7

414,6

CNAF

265,6

264,2

265,7

Total

1.356,8

1.361,1

1.371,6

Rythme/1999

+ 2,3 %

+ 2,6 %

+ 4,1 %

L'essentiel des dépassements a évidemment porté sur les dépenses de maladie (9,7 milliards de plus), mais aussi sur la vieillesse (5,1 milliards de plus), quand les dépenses des accidents du travail et de la branche famille respectaient les prévisions. Si on enlève le surcoût non remboursé de la MARS, cela montre une baisse structurelle des dépenses de la branche famille. Pour la maladie, l'écart s'expliquerait selon la commission des comptes par une sous-estimation des effets de reports de dépenses de 1999 sur 2000. Enfin, les dépenses en hausse de la branche vieillesse viendraient pour 1,8 milliard de francs des compensations démographiques.

Pour 2001, la tendance haussière ne devrait pas se démentir ainsi que le montrent les objectifs de dépenses de la loi de financement (76,6 milliards de francs supplémentaires dont 35,9 milliards pour la maladie) et les prévisions de comptes du régime général.

Depuis la création des lois de financement, les dépenses comprises dans l'objectif national des dépenses d'assurance maladie auront ainsi augmenté de 100 milliards de francs.

Le gouvernement reconnaît que le dynamisme de certaines dépenses freine le rétablissement des comptes des administrations de sécurité sociale

Dans le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2001, le gouvernement détaille les comptes des administrations de sécurité sociale pour déplorer :

" Certaines dépenses restent dynamiques et freinent l'amélioration des comptes :

- les dépenses d'assurance maladie incluses dans l'ONDAM devraient continuer à progresser sur un rythme soutenu, tout en décélérant en 2001. En 2000, le dépassement de l'objectif devrait atteindre, selon toute vraisemblance, environ 13 milliards de francs. Ce sont toujours les prescriptions des médecins libéraux et salariés qui affichent le plus grand dynamisme. Les dépenses hospitalières enregistrent par ailleurs l'effet des protocoles conclus avec les praticiens hospitaliers et les personnels non médicaux début 2000. Hors ONDAM, on enregistre surtout la montée en charge de la partie complémentaire de la couverture maladie universelle, qui ne pèse cependant pas sur les comptes de l'assurance maladie ;

- les dépenses d'assurance chômage cesseraient de baisser en 2001 du fait des mesures attendues d'amélioration des prestations ;

- les prestations logement et famille sont dynamisées par les mesures adoptées à l'occasion des conférences de la famille de 1999 et 2000 : report de l'âge de versement des prestations familiales jusqu'à 21 ans, réforme des allocations logement, développement rapide des capacités d'accueil des modes de garde collectifs. "

Source : Rapport économique, social et financier , annexe au projet de loi de finances pour 2001, pages 187 et 188.

(2) Les dépenses nouvelles du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001

Le projet de loi de financement prévoit plus de 14,3 milliards de francs de dépenses nouvelles pour le régime général :

• 500 millions de francs de provision pour la réduction du temps de travail à l'hôpital ;

• 100 millions de francs de dotation au fonds d'action sociale de la CNAMTS ;

• 1,08 milliard de francs de prise en compte dans l'ONDAM de l'alignement des taux de remboursement de la CANAM sur ceux du régime général ;

• 160 millions de francs de transferts de dépenses de l'Etat vers la CNAMTS ;

• 2,06 milliards de francs de coût de la revalorisation supplémentaire de 0,5 point des pensions ;

• 100 millions de francs d'extension du bénéfice de l'assistance veuvage ;

• 1,5 milliard de francs de dotation du fonds des victimes de l'amiante ;

• 650 millions de francs de modulation de l'aide de garde d'enfant par une assistante maternelle ;

• 220 millions de francs d'allocation de présence parentale pour enfant malade ;

• 800 millions de francs pour la réforme des aides au logement ;

• 1,7 milliard de francs de dotation au fonds d'action sociale de la branche famille ;

• 2,1 milliards de francs de pertes de recettes pour la prise en charge de la totalité de la MARS ;

• 2,9 milliards de francs de prise en charge des majorations pour enfant des pensions de retraite.

• Il faut ôter de ces dépenses nouvelles les 300 millions de francs de moindres dépenses pour la branche vieillesse liées aux transferts vers le FSV, et les 120 millions de moindres dépenses pour la branche famille liées aux modifications du régime de cumul de l'Allocation parentale d'éducation (APE) et des revenus d'activité.

b) Pour quoi faire ?
(1) L'utilisation prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001

Le projet de loi de financement brouille les cartes en ne faisant pas apparaître les véritables destinations des crédits et donc les véritables hausses de dépenses.

Il augmente les dépenses du régime général de 41,4 milliards de francs.

Il dégrade le solde tendanciel du même régime général de plus de 14,3 milliards de francs.

Il augmente les dépenses des autres régimes obligatoires de base de sécurité sociale de 20,9 milliards de francs.

A ces mesures nouvelles qui touchent le régime général et les régimes de base, il convient d'ajouter celles qui touchent les autres organismes dépendants de la loi de financement, mais qui ne sont pas recensées dans les objectifs de dépenses. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, en lien avec le projet de loi de finances, augmente ainsi les dépenses du FOREC de 18 milliards de francs (soit une hausse de 27 %).

Il met à la charge du FSV 3,2 milliards de francs de dépenses supplémentaires, que ne compense pas la baisse tendancielle de ses dépenses de 1,3 milliard.

Ces différentes mesures représentent ainsi plus de 96,5 milliards de francs de dépenses nouvelles qui dénotent les priorités du gouvernement :

• l'évolution naturelle des dépenses de sécurité sociale ;

• les 35 heures ;

• la création de nouvelles prestations ;

• les transferts de charges vers la branche famille et la branche maladie ;

• les transferts de charges vers le FSV.

(2) Quel bénéfice pour les Français ?

Les unes ou les autres de ces dépenses supplémentaires peuvent se justifier, s'expliquer. Votre rapporteur pour avis regrette seulement que ces dépenses ne correspondent pas à des choix mieux expliqués aux Français. Ceux-ci veulent-ils par exemple que 85 milliards de francs de recettes publiques, tirées de prélèvements obligatoires, aillent au financement des aides au passage aux 35 heures ? Veulent-ils sans plus de précision affecter 76,6 milliards de francs de dépenses supplémentaires aux objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ? Les réponses à ces questions ne vont pas de soi et votre rapporteur pour avis regrette pour sa part qu'elles ne soient pas posées en ces termes au Parlement et aux Français par l'architecture actuelle des lois de financement de la sécurité sociale.

Il se demande aussi quel gain de santé publique et de bien-être toutes ces dépenses représentent Certes, on ne peut que se réjouir de voir que l'organisation mondiale de la santé a décerné à la France la palme des meilleurs soins de santé dans le monde en juin dernier, se réjouir encore de la voir classée troisième dans la même étude s'agissant des guérisons, se réjouir toujours d'une quatrième place concernant les performances médicales rapportées aux effets sur le niveau de santé de la population, se réjouir un peu moins de la voir descendre à la 12 ème place quand on rapporte les guérisons à l'espérance de vie. Ainsi, l'espérance de vie à la naissance des Français stagne-t-elle depuis 1997 pour les hommes et a-t-elle diminué en 1998 par rapport à 1997 pour les femmes 1 ( * ) .

Tout ceci pour se demander si la France n'aurait pas besoin d'une réflexion profonde sur sa politique de santé publique.

Votre rapporteur pour avis ne peut que regretter que la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale ne soit pas le rendez-vous qu'il attendait et espérait pour discuter, peut-être avec une périodicité moins rapprochée, des priorités de santé publique de la France. Qui devrait en débattre ? qui a la légitimité pour en décider ? qui devrait se faire l'écho des attentes des Français en la matière, et elles sont nombreuses ? Qui, sinon le Parlement qui aujourd'hui discute et vote les lois de financement sans se demander, sinon à l'occasion d'un rapport annexé sans valeur législative, à quoi servent vraiment les chiffres sur lesquels les uns et les autres s'opposent.

2. Les recettes : toujours plus et toujours plus compliquées

a) La hausse
(1) Les écarts de prévision pour le régime général

L'analyse des écarts entre les prévisions de recettes de 2000 faites par la commission des comptes de septembre 1999, celle de mai 2000 et celles de septembre 2000 met en lumière des éléments intéressants. Il convient de noter que le rythme d'évolution est ainsi passé de 3 % prévus en septembre 1999 à 4,3 % prévus en septembre 2000. La " cagnotte sociale " s'évalue ainsi à plus de 12 milliards de francs.


Prévisions pour 2000 sur les recettes du régime général

(en milliards de francs)

CCSS 09 1999

CCSS 05 2000

CCSS 09 2000

CNAMS

630,7

635,1

638

CNAMTS AT

47,9

48,8

49,3

CNAVTS

416

413,4

415

CNAF

268,2

268,8

272,5

Total

1.362,8

1.366,1

1.375

Rythme / 1999

+ 3 %

+ 3,3 %

+ 4,3 %

Les écarts ont principalement bénéficié à l'assurance maladie (7,3 milliards de francs) et à la branche famille (4,3 milliards de francs). Cette dernière bénéficie en effet de 2,1 milliards de francs de remboursement par l'Etat d'une partie de la MARS. S'agissant de l'ensemble des recettes, elles ont profité de la réévaluation de la prévision d'évaluation de la masse salariale, à laquelle s'ajoute un effet report de recettes de 1999 sur 2000.

(2) La tendance haussière des prélèvements sociaux

Les prélèvements sociaux connaissent une progression inexorable depuis leur tassement de 1995. De 1997 à 2000, ils seront passés de 20,4 % du PIB à 21,3 %.

Certes, la structure interne des prélèvements sociaux a changé, donnant une plus grande place aux impôts et taxes affectés au détriment des cotisations sociales. Il n'en reste pas moins que l'essentiel des hausses de prélèvements sur longue durée est allé aux administrations de sécurité sociale, la part des prélèvements affectés à l'Etat par rapport à l'ensemble des prélèvements s'étant quant à elle réduite.

Structure des prélèvements obligatoires en France 1990-1999 (en % du PIB)

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

Impôts indirects

9,5

9,2

8,9

8,9

9,1

9,1

9,5

9,5

9,4

9,4

principalement TVA et TIPP)

soit en % des PO

22 %

21 %

21 %

21 %

21 %

21 %

21 %

21 %

21 %

21 %

Autres impôts Etat et CL

14,1

14,4

14,1

14,0

14,0

14,3

14,8

15,1

15,0

15,4

dont IR + TH

4,3

4,7

4,8

4,7

4,4

4,3

4,3

4,0

4,0

4,2

dont IS

2,2

1,8

1,4

1,4

1,5

1,6

1,8

2,2

2,1

2,6

Impôts finançant la sécurité sociale

0,8

1,1

1,0

1,3

1,9

2,0

2,0

2,7

4,7

4,9

Total des impôts directs

14,9

15,5

15,1

15,3

15,9

16,3

16,8

17,8

19,7

20,3

soit en % des PO

34 %

35 %

35 %

36 %

37 %

37 %

38 %

40 %

44 %

44 %

Cotisations sociales

19,3

19,2

18,6

18,7

18,4

18,3

18,4

17,7

15,9

16,0

soit en % des PO

44 %

44 %

44 %

44 %

42 %

42 %

41 %

39 %

35 %

35 %

Total des prélèvements obligatoires

43,7

43,9

42,6

42,9

43,4

43,7

44,7

45,0

45,0

45,7

Source : Conseil des impôts

(3) Les modifications de recettes

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoit plusieurs mesures propres à modifier les recettes des organismes de sécurité sociale :

• 450 millions de francs de hausse de la taxe sur les grossistes et répartiteurs pharmaceutiques ;

• 7,4 milliards de francs de droits sur les tabacs affectés au FOREC ;

• 2,2 milliards de francs de produit supplémentaire de la CSB affectés au FOREC ;

• 4,2 milliards de francs de produit supplémentaire de la TGAP affectés au FOREC ;

• 6,4 milliards de francs de produit supplémentaire des droits sur les alcools affectés au FOREC ;

• 4 milliards de francs de produit de la taxe sur les conventions d'assurance affectés au FOREC ;

• 4 milliards de francs de produit de la taxe sur les véhicules de société affectés au FOREC ;

• une perte de 1,5 milliard de francs pour la CNAF en raison du transfert au FSV du produit de prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine ;

• une perte de 7 milliards de francs de CSG pour le FSV au bénéfice de la CNAMTS ;

• une perte de 5,7 milliards de francs pour le FSV de droits sur les alcools ;

• une perte de 900 millions de francs de produit du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine pour la CNAMTS au profit du FSV, et une perte de 5,6 milliards de francs de droits sur les tabacs au profit du FOREC, avec à l'inverse un gain de 7 milliards de francs de CSG ;

• 8,5 milliards de francs de compensation des ristournes consenties sur la CSG par le biais de la taxe sur les conventions d'assurance ;

Au total, le champ de la protection sociale voit ses prélèvements augmenter de 11,1 milliards de francs transférés par l'Etat au FOREC et de 450 millions de francs de hausse de taxes. Ils viennent s'ajouter à la longue liste des prélèvements créés et augmentés en matière sociale depuis 1997.

Nouveaux prélèvements obligatoires en matière sociale depuis 1997

17 mesures sont intervenues depuis 1997 pour augmenter ou élargir un prélèvement obligatoire social :

1. substitution de la CSG aux cotisations sociales maladie qui s'est traduite par une hausse des prélèvements sur les revenus du patrimoine (4,5 milliards de francs) (LFSS 1998) ;

2. passage de 6 à 8 % du taux de la taxe sur les contrats de prévoyance supplémentaire (LFSS 1998) ;

3. déplafonnement des cotisations d'allocations familiales des non salariés (LFSS 1998) ;

4. augmentation de la taxe sur la publicité pharmaceutique (LFSS 1998) ;

5. création de la taxe sur les ventes directes de médicaments (LFSS 1998) ;

6. création de la taxe de santé publique sur les tabacs (LFSS 1998) ;

7. extension de l'assiette des prélèvements sur les revenus du patrimoine et les produits de placement (LFSS 1998) ;

8. reversement sanction sur le chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques n'ayant pas signé d'accord de limitation (LFSS 1999) ;

9. contribution assise sur le chiffre d'affaires santé des organismes de protection sociale complémentaire (loi CMU de mai 1999) ;

10. taxation des heures supplémentaires des entreprises n'ayant pas signé d'accords de réduction du temps de travail (seconde loi 35 heures) ; annulée par le Conseil constitutionnel ;

11. création d'une cotisation sociale sur les bénéfices des entreprises (LFSS 2000) ;

12. élargissement de la taxe générale sur les activités polluantes (LFSS 2000) ;

13. affectation des droits sur les tabacs détenus par l'Etat au FOREC (PLFSS 2001) ;

14. affectation de la taxe sur les véhicules de société au FOREC (PLFSS 2001) ;

15. affectation d'une partie de la taxe sur les conventions d'assurance (PLFSS 2001) ;

16. réforme de la clause de sauvegarde (PLFSS 2001) ;

17. augmentation de la contribution due par les laboratoires et les grossistes répartiteurs sur les ventes en gros aux officines pharmaceutiques (PLFSS 2001).

A ces 17 affectations, créations ou extensions, se sont ajoutés les excédents de recettes tirés de la croissance économique.

b) Pour quoi faire ?

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoit donc plusieurs mesures qui affectent les recettes. Ces dernières poursuivent deux objectifs :

• financer les 35 heures dont le coût s'élèvera à 85 milliards de francs en 2001 ;

• boucler l'architecture de la ristourne de CSG en organisant de nouveaux transferts de recettes ;

• alimenter de manière ponctuelle et imparfaite le fonds de réserve pour les retraites, en réduisant ses recettes potentielles par une ponction de la première section du FSV et en lui affectant des recettes liées aux ventes UMTS qui ne constitueront jamais une ressource pérenne.

Au bout du compte, le projet de loi de financement ne fait que tirer les conséquences sur les recettes de mesures mauvaises et dangereuses. Votre rapporteur pour avis vous proposera, en accord avec la commission des affaires sociales, de les supprimer complètement.

3. Quel lien avec la politique du gouvernement en matière de finances publiques ?

a) L'amélioration des soldes est mécanique

Le gouvernement cherche à faire croire que le redressement des comptes de la sécurité sociale est à mettre à son actif. Votre rapporteur pour avis ne peut que s'inscrire en faux contre cette affirmation.

D'abord, il convient de rappeler que sans une progression des recettes supérieure à celle des dépenses, la sécurité sociale serait toujours en déficit. La croissance économique est pour une grande part responsable de cet état de fait, mais il convient d'y ajouter les nouveaux prélèvements sociaux. Or, l'année dernière, Mme Martine Aubry expliquait que le redressement s'était fait sans hausse de cotisation, oubliant par ce raccourci l'ensemble des créations et augmentations de prélèvements qu'elle pouvait mettre à son actif, sans compter les transferts massifs de recettes de l'Etat vers le champ de la loi de financement. La seule part qu'a prise le gouvernement dans le redressement des comptes est ainsi d'avoir augmenté les prélèvements sociaux. Pour le reste des recettes, il n'a pu que constater avec plaisir les effets positifs de la bonne santé économique du pays.

Cet attentisme des recettes qui consiste à en créer de nouvelles et à encaisser celles données par la croissance doit être bien sûr critiqué : le gouvernement n'a pas su saisir l'occasion unique fournie par la croissance pour amorcer une baisse des prélèvements sociaux, juste contrepartie des hausses introduites par ailleurs.

Ceci se justifie bien entendu par l'évolution des dépenses. Ces dernières n'ont cessé de croître engendrant des besoins de recettes toujours plus importants. Ainsi, sur les 55,6 milliards de recettes supplémentaires attendues pour 2001 pour le régime général, 54,6 milliards iront financer des dépenses supplémentaires, dont 43,5 milliards résultent de l'évolution naturelle des comptes et 11,1 milliards de la dégradation des soldes introduite par la loi de financement. Le milliard restant ira à l'affichage d'un excédent de façade du régime général. Quant au contribuable social, il ne retrouvera rien. Comment dire après que le gouvernement maîtrise les comptes et redresse la sécurité sociale ?

Le retour à l'excédent de la sécurité sociale est une bonne nouvelle, fruit d'une croissance heureusement assez forte pour éponger la dérive des dépenses. Votre rapporteur pour avis remarquera seulement que si la croissance venait à faiblir voire à baisser, et les recettes avec, les dépenses, elles, ne failliraient pas. Le déficit non plus.

b) L'incohérence de la politique du gouvernement en matière de finances publiques

Ceci amène à s'interroger sur la cohérence du gouvernement en matière de finances publiques.

(1) La hausse des prélèvements obligatoires concerne surtout les prélèvements sociaux

Ainsi, alors que le gouvernement annonce sa volonté de réduire les prélèvements, force est de constater quels prélèvements sociaux augmentent pour représenter la première source de prélèvements dans la structure française.

Les prélèvements obligatoires des administrations
publiques et des institutions européennes

(en points de PIB)

1998

1999

2000

2001

Total P.O.

44,9

45,7

45,2

44,7

Dont Etat*

17,2

17,9

17,3*

17,0*

dont cotisations

0,4

0,4

0,4

0,4

Dont ODAC

0,8

0,8

0,8

0,8

dont CRDS

0,3

0,3

0,3

0,3

Dont administrations publiques locales

5,7

5,5

5,2

5,0

Dont administrations de sécurité sociale*

20,6

20,9

21,4*

21,4*

dont CSG

3,9

4,0

4,0

3,9

dont cotisations sociales

15,8

16,0

15,8

15,8

Dont institutions européennes

0,6

0,6

0,6

0,6

*NB : En 2000, la majeure partie des droits de consommation sur les tabacs est transférée de l'Etat vers les administrations de sécurité sociale, représentant près de 0,4 point de PIB, pour contribuer au financement des allégements de charges désormais assurés par le FOREC.

Source : Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances 2001.

On en arrive ainsi à ce paradoxe qui veut qu'alors que dans leur ensemble les prélèvements diminueront en 2001, les prélèvements sociaux, eux, augmenteront.

(2) La hausse des dépenses des ASSO est plus rapide que celle de l'ensemble des APU

La deuxième contradiction de la politique économique du gouvernement est que, alors qu'il se targue de maîtriser la dépense publique, le rythme de progression des dépenses sociales reste à un niveau très élevé puisque d'ailleurs la part de ces dernières dans l'ensemble des dépenses publiques croît, passant de 44 à 45 % entre 2000 et 2001.

Structure institutionnelle de la dépense publique
1999-2001 (hors transferts)

(en pourcentage)

1999

2000

2001

Etat

32

32

31

ODAC

6

6

6

ASSO

44

44

45

APUL

18

18

18

Source : Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances 2001.

(3) Le laxisme des dépenses d'assurance maladie explique le non respect du programme pluriannuel de finances publiques

Enfin il faut noter, et dénoncer, les conséquences de ce laxisme en matière de dépenses sociales. Il est surtout patent s'agissant des dépenses d'assurance maladie. Alors que le programme pluriannuel de finances publiques prévoyait une hausse de ces dernières de 1,5 % sur 2000/2001, elles augmenteront de près du double (2,9 %).

Dépenses des administrations publique :
comparaison avec le programme pluriannuel des finances publiques

2000

2001

Moyenne 2000-2001

Evolutions en volume

Programme pluriannuel

Prévisions d'exécution

Programme pluriannuel

PLF et PLFSS 2001

Programme pluriannuel

PLF et PLFSS 2001

Administrations publiques

1,3

1,0

1,1

1,9

1,2

1,4

Etat (norme budgétaire)

0

0

0,3

0,3

0,2

0,2

Prestations, transferts sociaux

2,1

2,0

1,6

3,0

1,8

2,5

Dépenses maladie

1,5

3,3

1,5

2,6

1,5

2,9

Administrations publiques locales

1,9

2,1

2,0

2,0

2,0

2,0

Source : Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances 2001.

Ainsi, l'assurance maladie apparaît-elle comme un des points noirs de la crédibilité française en matière de finances publiques. Il faut espérer que l'élaboration du prochain programme pluriannuel non seulement rectifiera cette tendance mais en plus sera suivie d'effet.

C. LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT POUR 2001 : DE L'ILLUSION À LA CONFUSION

1. L'illusion

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 apparaît à maints égards comme un exercice d'illusionnisme. Le gouvernement veut faire croire qu'il retrouve le excédents, mais il les gaspille ; il veut faire croire qu'il engage des réformes, mais il les oublie complètement ; il veut faire croire qu'il réduit les prélèvements, mais il les reporte et les augmente. L'excédent : gaspillé !

Ainsi, les excédents se retrouvent gaspillés . L'illusion réside ainsi dans l'affichage de soldes positifs conventionnels et variables alors que ceux-ci sont en fait utilisés et gaspillés. Il s'agit d'abord de la différence entre le solde tendanciel des régimes de sécurité sociale et le solde après imputation du coût des mesures du projet de loi de financement. La seule dégradation de ce solde est en elle même condamnable dans la mesure où le passif de la sécurité sociale est lourd : la dette sociale à rembourser et l'avenir des retraites justifieraient à eux seuls un effort particulier. Au lieu de quoi, le gouvernement se lance dans le financement de grandes réformes inutiles et coûteuses comme les 35 heures et ponctionne les excédents là où ils se trouvent. L'autre illustration du gaspillage se retrouve dans le rapprochement de l'utilisation des recettes supplémentaires totales d'un exercice à l'autre et de leur utilisation. Elles sont toutes, à un milliard de francs près, utilisées pour des dépenses, qu'il s'agisse de hausses volontaires ou bien de hausses mécaniques. A quoi auront donc servi les recettes éphémères de la croissance économique ? A de nouvelles dépenses sans réflexion ni vision. L'excédent de 4 milliards de francs de la sécurité sociale prévu pour 2001 n'est alors plus une source de triomphalisme mais le minimum de solde positif qu'il fallait bien conserver pour s'en féliciter.

Dans le même temps, évidemment, les réformes sont oubliées . La seule vraie réforme proposée dans le présent projet de loi de financement consiste en la création du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Pour le reste, le gouvernement avance la réforme de la CSG et de la CRDS, celle des prestations familiales et celle des retraites. La confrontation avec la réalité est cependant plus rude. Il n'y a pas de réforme de la CSG mais une complexification dangereuse remettant en cause le principe même du lien qui unit les salariés à leur protection sociale maladie. De plus, cette " réforme " apportera inégalités, injustices, désillusions (cf. infra ). S'agissant de la CRDS, la " réforme " consiste à reporter sur les autres redevables la charge de l'exonération, inégalitaire et injuste, en leur faisant verser pendant deux ans supplémentaires la CRDS. Par ailleurs, la mesure fragilise la CADES qui n'en avait guère besoin (cf infra ). En matière de retraites, le texte du projet de loi de financement règle certes le litige opposant l'Etat à l'AGIRC et à l'ARRCO, litige né du non respect de la parole donné en 1984. Mais sinon, il ne traite ni des régimes par répartition et de mesures propres à en assurer l'équilibre ou, au moins, la visibilité, ni du fonds de réserve toujours en attente de substances (cf infra ). Quant à la maladie, le gouvernement ne cherche même pas à donner une quelconque illusion. La plupart des articles consacrés à la branche maladie pourraient plus sûrement d'ailleurs figurer dans un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social. Ce n'est pas cela qu'attendent l'ensemble des parties prenantes au système de santé.

Enfin, les prélèvements ne cessent d'être augmentés . On aurait pu penser que le gouvernement profiterait de la croissance économique pour réformer le système social. Ce n'est pas le cas. En aurait-il alors profité pour réduire les prélèvements ? Non. Il semble en réalité parfaitement décidé à leur faire poursuivre leur courbe ascendante, estimant peut-être qu'un prélèvement ne doit jamais baisser et surtout que la particularité française en la matière ne doit pas être mise en cause.

2. La confusion

Entretenant l'illusion sur les volontés du gouvernement, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 tombe ainsi dans la confusion la plus totale amenant à s'interroger sur le sens même de l'élaboration d'un solde de la sécurité sociale.

a) Comment s'y retrouver ?

La confusion est totale dans l'architecture du financement de la sécurité sociale, qu'il s'agisse des recettes et dépenses qui font l'objet de tours de passe-passe ou des relations financières avec l'Etat.

(1) Le passe-passe des recettes et des dépenses

Les transferts de recettes et dépenses se poursuivent et accentuent la confusion. Ainsi, chacun y gagne et y perd dans le jeu des transferts :

Les transferts de recettes en 2001

(en milliards de francs)

CNAMTS

FOREC

2 % patrimoine (FSV)

- 0,9

droits tabacs (Etat, CNAMTS)

+ 8,7

0,15 point CSG (FSV)

+ 7

droits alcools (FSV)

+ 5,7

droits tabacs (FOREC)

- 5,6

taxe véhicules de société (Etat)

+ 4

CSG

- 5,9

taxe convention d'assurance (Etat)

+ 4

taxe convention d'assurance (Etat)

+ 5,9

Total

+ 0,5

Total

+ 22,4

ETAT

droits tabacs

- 3,1

taxe véhicule de société

- 4

taxe convention d'assurance

- 12,5

Total

- 19,6

FSV

CNAF

2 % patrimoine (CNAF et CNAMTS)

+ 8,4

2 % du patrimoine (FSV)

- 1,5

majo.pensions (CNAF)

+ 2,9

majo. Pensions (FSV)

- 2,9

0,15 pt CSG (CNAMTS)

- 7

taxe convention d'assurance (Etat)

+ 1,2

droits alcools (FOREC)

- 5,7

CSG

- 1,2

CSG

- 1,3

taxe convention d'assurance (Etat)

+ 1,3

Total

- 7,4

Total

- 4,4

(2) La complexité des relations financières avec l'Etat

On ne peut pas dire que la clarté soit la vertu première des rapports entre les organismes de protection sociale ainsi que le montre le graphique suivant, tiré du rapport de notre collègue M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale 2 ( * ) .

GRAPHIQUE FLUX DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE (hors Etat et BAPSA)

RESSOURCES AFFECTÉES FONDS DE FINANCEMENT RÉGIMES DE BASE

Contributions pharma

MALADIE

CNAM

CANAM

Autres régimes

Taxe auto

Fonds préretraite amiante

Droits tabacs

Taxe assurance

Taxe véhicules sociétés

FOREC

Droits alcools

ACCIDENTS DU TRAVAIL

TGAP

FSV

CSB

FAMILLE - CNAF

CSG

VIEILLESSE

CNAV

Autres régimes

Fonds de réserve

Taxe prévoyance

C3S

Prélèvement social 2 %

UMTS

CADES

CRDS

b) Existe-t-il un solde de la sécurité sociale ?

Finalement, le problème des lois de financement est que l'on ne peut pas vraiment dire qu'il existe un solde de la sécurité sociale.

(1) Quel sens donner à la loi de financement en matière de solde ?

Votre rapporteur pour avis ne peut qu'être frappé de l'ampleur et de la fréquence des mouvements affectant les recettes de la sécurité sociale depuis 1997.

Cette boulimie de changement et cette tuyauterie incessante sont bien sûr le fruit de l'absence de concordance entre le rythme des dépenses et le rythme des recettes. En effet, comme le fait justement remarquer l'introduction du rapport de septembre 2000 de la commission des comptes de la sécurité sociale, les recettes de la branche famille, assises sur la CSG, sont extrêmement dynamiques alors que ses dépenses ont plutôt tendance à stagner. A l'inverse, les recettes de la branche vieillesse, calées, elles, sur les cotisations sociales plafonnées, augmentent moins alors que les dépenses de ce risque sont amenées à croître dans les années à venir.

Au bout du compte, les transferts divers et variés de recettes et de dépenses ne seraient que la conséquence d'ajustements rendus nécessaires par ces différences. Le secrétaire général de la commission des comptes indique ainsi : " il n'y a pas lieu de critiquer une telle gestion qui est inévitable et souhaitable même si elle paraît parfois artificielle. " 3 ( * )

Votre rapporteur pour avis ne partage pas du tout cette opinion du secrétaire général. Il n'est ni inévitable ni souhaitable de procéder à une telle confusion des mesures. Il faut la critiquer avec force parce qu'elle révèle une incapacité profonde à préparer notre protection sociale aux enjeux qui se présenteront à elle dans l'avenir. Comment ne pas critiquer le bonneteau des lois de financement ? Comment ne pas reprocher au gouvernement de préférer des tours de passe-passe plutôt que de préparer l'avenir ? Comment se satisfaire d'une illusion d'excédents, d'une réalité de dérive des dépenses et de croissance des prélèvements dans une opacité générale de mauvais aloi ?

(2) Où sont les dépenses du FOREC ?

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis tient à dénoncer cette situation ubuesque où d'un côté l'Etat débudgétise largua manu vers la sécurité sociale et la loi de financement alors que cette dernière ne reprend que les recettes ainsi transférées mais pas les dépenses. Où les dépenses du FOREC sont-elles retracées et adoptées ? celles du FSV ? celles du fonds de financement de la CMU ? les futures dépenses du fonds de réserve ?

Cette situation n'est plus acceptable dans la mesure où ces fonds prennent l'essor qu'on leur connaît. Il conviendra nécessairement d'aborder cette question dans la réforme engagée de la procédure budgétaire et de l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances.

(3) La cohabitation des différents soldes sociaux.

La sphère des finances sociales met en jeu plusieurs soldes qui se concurrencent, revêtent chacun une signification différente mais dont la multiplicité brouille l'intégralité du message. Il y a celui du régime général, encore qu'il convienne de distinguer le solde tendanciel du solde après prise ne compte des mesures de la loi de financement de l'année ; il y a le solde des administrations de sécurité sociale ; il y a enfin la différence intuitive que l'on peut faire entre les agrégats de la loi de financement ; il y a surtout la consolidation des soldes des organismes inclus dans le champ de la loi de financement.

Consolidations des soldes des régimes et organismes couverts
par le projet de loi de financement

(en milliards de francs)

Opérations courantes des régimes de base dont :

7,2

- régime général

8,8

- CNRACL

- 0,5

- CANCAVA

- 0,4

- ORGANIC

- 1,1

- CAMR

- 0,7

Fonds de solidarité vieillesse

- 1,1

Fonds de réserve des retraites

+ 31,8

Total

37,9

Solde des opérations en capital du régime général

- 4,4

Total incluant les opérations en capital du régime général

33,5

Source : annexe c au projet de loi de financement pour 2001 et avis de M. Jérôme Cahuzac au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (n°2631, XIème législature).

La lecture de ce tableau montre d'une part que si on retire le fonds de réserve qui n'a pas de dépenses l'excédent est presque nul, d'autre part que si la loi de financement ne dégradait pas le solde de l'exercice par des mesures nouvelles et des pertes de recettes (notamment pour le FSV), l'excédent serait bien plus élevé : 11 milliards de francs au titre du régime général, 10 milliards au titre du FSV.

La loi de financement pour 2001 dégradera ainsi les soldes sociaux. Elle n'est pas la loi de financement du retour à l'excédent ou celle des réformes. Elle est la loi du gaspillage et des occasions manquées.

II. LES LOIS DE FINANCEMENT : UN INSTRUMENT À PARFAIRE

A. UNE LOI DE FINANCEMENT VIDÉE DE SON SENS

1. En attendant les décrets

Constatation rituelle, le contraste entre la rapidité, pour ne pas dire la précipitation, avec laquelle est discuté et préparé le projet de loi de financement de la sécurité sociale et la lenteur, pour ne pas dire l'immobilisme, avec laquelle les administrations centrales prennent les textes d'application, devient confondant. De tous bords, les parlementaires ne savent plus comment dénoncer cet état de fait qui devrait entraîner une réelle interrogation sur les méthodes de travail des uns et des autres.

Le bilan de l'application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 est à proprement parler stupéfiant et l'on en viendrait presque à préférer que l'annexe b1 n'existe pas afin de ne pas se rendre compte de l'étendue des retards :

Dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 encore en attente de textes réglementaires d'application 4 ( * )

Article 2

" Une circulaire ministérielle en cours de signature précisera les modalités d'articulation de la doctrine fiscale telle que résultant de l'instruction du 31 mai 2000 précitée avec les nouvelles rédactions des articles L. 242-1 et L. 136-2 (5° et 5° bis du II) du code de la sécurité sociale, issues des dispositions de l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

Cette circulaire sera suivie d'une lettre circulaire de l'ACOSS, à l'attention de l'URSSAF. "

Article 7

" Une circulaire n° 00064 (publiée au bulletin officiel des douanes n° 6421 du 4 avril 2000) émanant de la direction générale des douanes et des droits indirects décrit les modalités de mise en oeuvre de la taxe pour les composantes relevant de sa compétence.

Concernant celle dont l'application est confiée au ministère de l'environnement (TGAP sur les installations classées), un décret, donnant une énumération des installations classées et abrogeant les textes réglementaires relatifs aux taxes qu'elle a remplacées, est en cours d'examen au Conseil d'Etat. "

Article 8

" Ce dispositif d'exonération partielle de cotisations en faveur des jeunes agriculteurs a fait l'objet d'une insertion au code rural (article L. 731-13). En outre, un décret en cours de préparation déterminera les conditions de sa mise en oeuvre, en prévoyant notamment les dérogations pouvant être apportées aux limites d'âge, ainsi que le plafond des exonérations et le montant minimal des cotisations. "

Article 20

" En application de cet article, un décret en Conseil d'Etat doit être adopté afin de fixer les conditions de régularisation de cotisations pour les périodes visées. L'ensemble des départements ministériels a émis un avis favorable au projet de texte qui est soumis au Conseil d'Etat, en vue d'une publication à l'automne 2000. "

Article 21

" Le décret organisant le transfert à l'assurance maladie de la charge des CDAG sera publié prochainement. "

Article 23

" Cet article introduit dans le code de la santé publique une définition des centres de santé et précise qu'ils ne peuvent être créés que par des organismes à but non lucratif ou par des collectivités territoriales. Les règles d'agrément de ces centres sont précisées par décret. Cet agrément vaut autorisation de dispenser des soins aux assurés sociaux. L'article prévoit également qu'un décret détermine les conditions dans lesquelles ces centres de santé bénéficient de la subvention prévue à l'article L. 162.32 du code de la sécurité sociale et peuvent faire bénéficier les assurés sociaux de la dispense d'avance de frais.

Ces deux textes ont été élaborés et soumis à concertation. Ils devraient être publiés prochainement.

L'article prévoit enfin que les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les centres de santé sont définis par un accord national négocié entre les caisses nationales d'assurance maladie et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives, et soumis à l'approbation de l'Etat. Cet accord n'a pas été conclu pour le moment. "

Article 24

" Ces nouvelles dispositions n'impliquaient l'adoption d'aucun texte réglementaire d'application à l'exception d'un décret définissant les conditions dans lesquelles le niveau de participation des caisses peut être majoré dans le cadre de l'adhésion au contrat de bonne pratique. Le décret est en cours d'élaboration. "

Article 26

" Le décret d'application de cette mesure qui met en oeuvre cet article est en cours d'examen au Conseil d'Etat et devrait faire l'objet d'une publication au Journal officiel dans le courant du troisième trimestre 2000. "

Article 32

" Le décret (en Conseil d'Etat) prévu à cet article est en cours d'examen par le Conseil d'Etat et devrait être publié au Journal officiel avant la fin de l'année 2000. Il définit notamment les conditions d'inscription sur la liste, la composition et le fonctionnement de la commission mentionnée à l'article L. 165-1, ainsi que les procédures relatives à l'établissement de la liste et à la fixation des tarifs et prix. "

Article 33

" Les projets de décrets précisant l'un les règles de fonctionnement du secteur, l'autre le contrat type sont en cours d'élaboration et seront soumis à l'avis des organismes consultatifs concernés au cours du dernier trimestre. En l'attente de la parution de ces textes, les dispositions prévues par le contrat national tripartite et le contrat type qui lui est annexé demeurent applicables.

Les modalités de mise en oeuvre de la caisse pivot sont actuellement étudiées dans le cadre de réunions de travail avec les caisses nationales et organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire d'assurance maladie et les fédérations de cliniques. Un projet de texte devrait être élaboré rapidement et publié avant la fin de l'année, lorsque le cahier des charges techniques du dispositif aura été validé.

Enfin, la publication du décret relatif aux " sanctions " devrait intervenir au cours du 1 er trimestre 2001. Dans l'attente de la parution de ce décret, les dispositions prévues à ce titre dans le contrat national tripartite continuent de s'appliquer. "

Article 37

" Cet article rend nécessaire une modification de l'article R. 351-12 du code de la sécurité sociale fixant les modalités de validation des périodes assimilées à des périodes d'assurance, dont font désormais partie les périodes de stage de rééducation professionnelle. Un projet de texte est soumis au Conseil d'Etat, en vue d'une publication à l'automne 2000. "

Article 38

" La mise en oeuvre de cette mesure fait l'objet d'un décret soumis au Conseil d'Etat. "

Source : annexe b1 au projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001

D'une manière assez peu étonnante, les mesures d'application les plus rapidement prises concernent les prélèvements obligatoires.

Votre rapporteur pour avis ne peut que déplorer encore une fois ces retards et appeler à la plus grande vigilance, à la fois dans les mesures proposées dont on peut se rendre compte souvent qu'elles ne sont pas prêtes techniquement, et dans le suivi des textes. Sur de nombreux points, il aurait certainement été plus judicieux et efficace de décaler d'un an la mesure quitte à préparer les décrets pour les publier dès la promulgation de la loi. Sans parler de l'intérêt que présenterait un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative qui pourrait contenir des dispositions pas encore " mûres " au moment de la discussion du PLFSS.

2. Pour une loi de financement rectificative

Les textes organiques relatifs aux lois de financement ont expressément prévu la possibilité d'un PLFSS rectificative au II de l'article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale :

" La loi de financement de l'année et les lois de financement rectificatives ont le caractère de lois de financement de la sécurité sociale.

Seules des lois de financement peuvent modifier les dispositions prises en vertu des 1° à 5°. "

La formule, pour lapidaire qu'elle puisse sembler, est en fait extrêmement précise. En effet, le deuxième alinéa renvoie à l'ensemble des dispositions figurant au I de l'article LO 111-3 qui définissent le domaine des lois de financement et, finalement, leurs raisons d'être :

" 1° approuve les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale ;

2° prévoit, par catégorie, les recettes de l'ensemble des régimes de base et des organismes créés pour concourir à leur financement ;

3° fixe, par branche, les objectifs de dépenses de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres ;

4° fixe, pour l'ensemble de régimes obligatoires de base, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ;

5° fixe, pour l'ensemble des régimes obligatoires de base visés au 3° ou des organismes ayant pour mission de concourir à leur financement qui peuvent légalement recourir à des ressources non permanentes, les limites dans lesquelles ses besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources. "

On pourrait ainsi imaginer que la remise en cause d'un de ces éléments contraigne le gouvernement à déposer un projet de loi de financement rectificative. Il n'en est rien. Qu'il s'agisse d'un dépassement manifeste des objectifs de dépenses, de la disparition d'une recette majeure, ou de remise en cause des conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale, phénomènes pourtant survenus à de nombreuses reprises depuis 1996, rien ne semble justifier pour le gouvernement le dépôt d'un collectif social. Cette situation n'est bien entendu pas satisfaisante, puisque finalement elle autorise le gouvernement, par d'autres voies que les lois de financement pourtant créées à cet effet, à gérer comme bon lui semble, sans tenir compte des objectifs fixés et des prévisions réalisées. En refusant tout collectif social, le gouvernement révèle le peu de considération qu'il a pour les lois de financement et les votes du Parlement.

Car les occasions n'ont pas manqué, ne serait-ce qu'au premier semestre 2000, comme l'a bien montré le rapport d'étape de notre commission des affaires sociales 5 ( * ) : le 13 janvier 2000, le Conseil constitutionnel a annulé la taxation des heures supplémentaires censée financer à hauteur de 7 milliards de francs les 35 heures ; en février, le gouvernement a donné son accord à la création à la CNAMTS de 600 emplois pérennes et 2.000 contrats à durée déterminée, à la CNAF de 900 emplois pérennes ; le 13 mars, il a conclu un accord sur le statut professionnel des praticiens hospitaliers ; le 14 mars, il a conclu un accord sur la modernisation du service public hospitalier ; le 3 mai, il a signé un accord avec les internes. L'ONDAM a donc été dégradé de manière réglementaire et le FOREC a pu voir son équilibre mis en cause sans que le gouvernement juge bon de faire discuter par le Parlement d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative.

3. La question des cavaliers sociaux

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001 contient plusieurs articles sur la recevabilité sociale desquels votre rapporteur pour avis émet des doutes. Le texte de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale est pourtant clair : " Outre celles prévues au I, les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions affectant directement l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ".

Il en va ainsi par exemple de l'abrogation de la loi n° 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite, dite " loi Thomas ", ajoutée par les députés dans l'article 19 A. Le gouvernement avait toujours dit sa volonté de ne pas appliquer ce texte en refusant de prendre les décrets nécessaires. En dehors du procédé sur lequel votre rapporteur pour avis reviendra (cf. infra ), il résulte de cela que cette loi n'a aucune traduction financière pour la sécurité sociale, pas plus qu'elle ne contient de dispositions relatives au contrôle. Son abrogation ne paraît donc pas convenablement placée dans ce texte.

De même, l'article 36 bis introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative du gouvernement ne semble pas briller par son caractère financier puisqu'il consiste à permettre aux professionnels libéraux compétents pour effectuer certains prélèvements, aux établissements et centres de santé dépourvus de laboratoires d'analyses, de transmettre ces prélèvements à un laboratoire d'analyses médicales.

Plus lourde de conséquences est la question posée par la présence dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001 de différentes mesures relatives à la CRDS. Cette dernière relève-t-elle des lois de finances ou bien des lois de financement de la sécurité sociale ? La réponse semble assez claire et plaider, ainsi que l'a bien fait remarquer le rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, notre collègue Jérôme Cahuzac, pour un transfert en loi de finances. En effet, la CADES ne figure pas dans le champ de la loi de financement de la sécurité sociale et donc les recettes qui lui sont affectées non plus.

4. L'ONDAM, cet inconnu (article 44)

Les lois de financement de la sécurité sociale fournissent un cadre à la régulation globale des dépenses d'assurance maladie. Elles fixent notamment l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM). Cet objectif est ensuite réparti par le gouvernement en quatre enveloppes : celle des établissements hospitaliers, celle des cliniques privées, celle des établissements médico-sociaux, celle des dépenses de soins de ville. Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, seule cette dernière est gérée par les partenaires conventionnels au sein d'un objectif délégué.

L'existence de l'ONDAM constitue un indéniable progrès dans l'amélioration de la connaissance par la représentation nationale des choix effectués en la matière. Toutefois, et comme le souligne la Cour des comptes dans ses deux derniers rapports sur la sécurité sociale, il souffre de nombreuses insuffisances : le caractère parfois arbitraire de son champ, le degré différent d'encadrement des postes de dépenses qui le compose, les faiblesses dans les méthodes de préparation et les insuffisances rencontrées dans les modalités de suivi des objectifs. Dès lors, selon la Cour : " les insuffisances relevées dans les méthodes de préparation et le fait que la traduction chiffrée des objectifs de santé publique soit très grossière font que l'information présentée n'est pas encore totalement pertinente " .

La pertinence des données présentées chaque année au Parlement dans le cadre du vote de la loi de financement peut en effet être sérieusement mise en doute. Ces données ne permettent en aucune façon de comprendre avec précision l'évolution de l'ONDAM, des enveloppes qui le composent et des objectifs quantifiés nationaux qui en découlent.

a) Les insuffisances liées à la décomposition de l'ONDAM en enveloppes et au lien avec les objectifs quantifiés nationaux

Les différences de champ qui existent entre l'ONDAM et les OQN biaisent l'information qui est fournie au Parlement.

L'ONDAM voté par le Parlement et les enveloppes qui en sont déduites sont des objectifs de dépenses de l'ensemble des régimes d'assurance maladie. Il ne revêt pas un caractère impératif mais les décisions qui découlent de son adoption fixent des financements limitatifs ou comportent des mécanismes de régulation a posteriori qui visent à lui donner une portée impérative.

S'agissant des hôpitaux, par exemple, l'objectif voté par le Parlement comprend uniquement les dépenses prises en charge par l'assurance maladie, dites dépenses encadrées et versées aux établissements sous forme de dotation globale. Mais, suite à la promulgation de la loi de financement, plusieurs arrêtés sont publiés qui fixent le montant des dépenses autorisées des établissements sous dotation globale. Or les deux notions ne coïncident pas. Les dépenses autorisées incluent, outre les dépenses encadrées financées par la dotation globale, les dépenses financées par les recettes propres et subsidiaires des hôpitaux. Ainsi, pour 1999, l'objectif prévisionnel des dépenses encadrées pour les établissements sous dotation globale avait été fixé à 249 milliards de francs, et le montant des dépenses autorisées à 259 milliards de francs. Pour 2000, les montants correspondants étaient respectivement de 255,7 et 266,9 milliards de francs.

Dès lors, comme le note la Cour des comptes dans son rapport de septembre 2000 : " L'exacte information du Parlement supposerait qu'il ait connaissance non seulement, comme aujourd'hui, des dépenses encadrées, mais aussi des dépenses autorisées ". Votre rapporteur pour avis ne peut qu'approuver les observations de la Cour sur ce point.

En outre, à la suite des négociations entre les partenaires sociaux et les syndicats de personnels hospitaliers, la croissance des dépenses hospitalières autorisées pour 2000 a été portée de 2,5 à 3,2 %. Le financement de cette enveloppe est assuré par l'Etat, sans que l'ONDAM ait été revalorisé. Cette méthode faussera la comparaison entre exercices. Il serait souhaitable que, dans la loi de financement pour 2001, ces dépenses soient intégrées dans l'ONDAM, avec la " rétropolation " correspondante des montants 2000.

S'agissant de l'enveloppe médico-sociale des dépenses d'assurance maladie, les informations présentées au Parlement ne représentent pas l'ensemble des dépenses de ce secteur, puisqu'une partie du financement provient d'autres sources.

S'agissant des professionnels de santé, l'ONDAM ne comprend que les dépenses remboursées, alors que l'objectif des dépenses médicales est exprimé en dépenses remboursables. La différence porte sur les dépenses non présentées au remboursement ainsi que sur la part laissée à l'assuré.

A cet égard, votre rapporteur pour avis partage les conclusions de la Cour des comptes selon lesquelles : " il serait souhaitable que le Parlement dispose, à côté des données sur les enveloppes et entrant dans l'estimation de l'ONDAM soumis à son vote, d'estimations des dépenses totales de chaque secteur, ce qui lui donnerait une vue plus complète et lui permettrait de connaître et de suivre la proportion, dans ces dépenses totales, de ce qui est couvert par l'assurance maladie ".

b) Des changements de périmètre et de méthode affectent la pertinence de l'ONDAM voté par le Parlement

Les opérations de " rebasage " de l'ONDAM qui interviennent chaque année faussent la signification de certaines informations fournies au Parlement. Selon la Cour des comptes, " sous ce vocable, il faut distinguer plusieurs choses : des changements de contenu de l'ONDAM et des transferts entre enveloppes, des modifications de calculs des taux d'évolution (pour tenir compte des écarts entre estimations et objectifs), et enfin la prise en compte de la remise versée par l'industrie pharmaceutique ".

(1) Les modifications dans le contenu de l'ONDAM et les transferts entre enveloppes

Chaque année, le contenu de l'ONDAM est modifié et des transferts entre enveloppes sont effectués. Ces modifications découlent soit :

- de l'inclusion dans l'ONDAM de dépenses de l'Etat : pour 2000, inclusion des centres de diagnostics anonymes et gratuits, de la prise en charge des toxicomanes et des centres de planification et d'éducation familiale (soit un total de 102 millions de francs) ;

- de transferts de dépenses de certains fonds de l'assurance maladie vers l'ONDAM : transfert de certaines dépenses de fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires et transfert du coût des affectations de longue durée du fonds national d'action sanitaire et social (pour un total de 900 millions de francs).

Certains de ces transferts améliorent la cohérence de l'ONDAM mais d'autres en accroissent l'hétérogénéité.

Si l'on intègre les transferts, les taux d'évolution d'une année sur l'autre peuvent être modifiés : l'évolution prévue entre l'objectif de 1998 et celui de 1999 était de 2,73 % et, si l'on tient compte du rebasage de 2,66 %. Surtout, pour les soins de ville, l'évolution d'objectif à objectif était de 2,67 % contre 1,9 % seulement, si l'on tient compte du rebasage lié au transfert.

Il serait donc utile que le Parlement puisse mesurer l'effet du changement de périmètre de l'ONDAM et donc dispose d'éléments sur l'évolution de l'ONDAM, à périmètre constant d'une année sur l'autre.

(2) La modification du calcul du taux d'évolution

Les premières années, le taux d'évolution de l'ONDAM était fixé par référence au montant de l'ONDAM voté pour l'année précédente et non aux dépenses effectives pendant cette année. Cependant, l'objectif ayant été dépassé chaque année, et compte tenu de l'effet mécanique de l'accumulation des dépassements, le gouvernement a décidé de modifier la procédure de fixation de l'ONDAM pour 2000.

Ainsi, depuis la loi de financement pour 2000, le gouvernement propose un taux d'évolution déduit du montant des dépenses de l'année précédente, tel qu'il est évalué par la commission des comptes de la sécurité sociale.

Pour 2000, le " rebasage " s'effectue en trois temps :

- prévision d'exécution de l'objectif par la commission des comptes de la sécurité sociale, soit 671,5 milliards de francs ;

- déduction des effets sur 2000 de l'allongement des délais de liquidation et de paiement, doit 2,4 milliards de francs ;

- intégration de la marge de manoeuvre fixée pour 2000, soit 600 millions de francs.

L'ONDAM rebasé pour 2000 s'élève donc à 669,7 milliards de francs.

Dans ces conditions, le taux de progression s'élèvera bien à 3,5 % en 2001. Mais si l'on retient les modalités de calcul du taux appliquées jusqu'à l'année dernière, c'est-à-dire en rapportant l'objectif proposé à l'objectif voté l'année précédente, l'augmentation atteint 5,3 %.

Il s'agit donc purement et simplement pour le gouvernement, face à l'ampleur de la dérive des dépenses maladie, de " passer l'éponge ", c'est-à-dire de renoncer à rattraper en 2000 le dérapage observé en 1999, de même en 2001. En pratique, en effet, l'enveloppe de dépenses maladie qui sera soumise au Parlement sera assise non pas sur les 658,3 milliards votés l'an dernier mais sur les dépenses effectives de cette année soit 669,7 milliards de francs qui correspond à l'objectif rebasé.

Seul le montant de l'objectif figure dans la loi de financement, et c'est donc ce que vote le Parlement, et non un taux de croissance. Après coup, on constate les dépenses, et souvent un dépassement, en les rapprochant de l'exercice voté : dépassement de 11,3 milliards de francs en 1999 et de 13 milliards de francs en 2000.

Ce recours à la méthode du " rebasage " apparaît certes inévitable dans la mesure où les objectifs votés en début d'année se sont révélés inférieurs aux dépenses réelles. Il est difficile en effet d'ignorer les dépassements constatés et de fixer des objectifs qui chaque année s'éloigneraient davantage de la réalité. Pourtant, l'utilisation de cette méthode soulève des questions primordiales. Pourquoi l'objectif des dépenses serait-il davantage respecté ? Quel était alors le sens du vote du Parlement en 2000 ? Pourquoi n'avoir pas proposé de loi de financement rectificative ?

Objectif national de dépenses d'assurance maladie

(en milliards de francs)

1997

1998

1999

2000

2001

Objectif voté

600,2

613,8

629,9

658,3

693,3

Objectif " rebasé "

-

613,3

639,8

669,7

-

Objectif réalisé

599,5

623,6

641,2

671,5*

-

Evolution votée (en %)

+ 1,7

+ 2,3

+ 2,6

+ 4,5

+ 5,3*

Evolution " rebasée " (en %)

-

+ 2,4

+ 1

+ 2,5

+ 3,5*

Evolution réalisée (en %)

+ 1,5

+ 4

+ 2,8

+ 4,7

-

* Prévisions.

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale et projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Le graphique ci-après permet de se rendre compte des divergences entre les différents ONDAM (voté, réalisé, théorique non rebasé et théorique non dépassé).

ONDAM
(en milliards de francs)

(3) La prise en compte de la remise versée par l'industrie pharmaceutique

A partir de celui voté en 1999, l'ONDAM 2000 est défini en retranchant des dépenses les remises conventionnelles versées par les entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques au titre du dépassement de l'objectif conventionnel d'évolution de leur chiffre d'affaires (clause de sauvegarde), dans le cadre des accords signés avec le comité économique du médicament.

Cette diminution des dépenses est enregistrée sur l'enveloppe de soins de ville, qui comprend le poste médicaments. Mais le montant de la remise n'est fixée qu'après la fin de l'année. Au titre de 1998, il a été fixé en avril 1999 à 1,2 milliard de francs. Son versement a été constaté dans les comptes de l'ACOSS en 1999. Ainsi, le Parlement votant en décembre 1998 l'ONDAM pour 1999 l'a fixé à 629,9 milliards de francs, alors qu'un dépassement de la prévision lié à la progression des dépenses de médicaments était prévisible. En fait, l'objectif réel, déduction faite de la remise, était de 628,7 milliards de francs et ne pouvait être connu de la représentation nationale. Il en ira évidemment de même pour 2001.

ONDAM et " clause de sauvegarde "

2000*

2001

Evolution (en %)

Objectif fixé

669,7

693,3

+ 3,5

Clause de sauvegarde

0,9

2 à 2,8

-

Objectif net

670,6

695,3 à 696,1

+ 3,7 à 3,8

* Données " rebasées "

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale et projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

c) Des insuffisances liées aux méthodes de préparation de l'ONDAM

L'élaboration de l'ONDAM se fait selon une procédure proche de celle du budget. Dans le cadre de l'équilibre des finances publiques, la variable déterminante de l'évolution de l'ONDAM est le taux d'évolution prévisionnel des dépenses de rémunération des personnels hospitaliers.

Pour la préparation de l'ONDAM 2000, des difficultés liées à la fixation de l'enveloppe médico-sociale et à la prise en compte de la CMU sont apparues et ont donc affaibli la préparation de l'ONDAM. Ainsi, s'agissant de l'enveloppe médico-sociale, les dépenses de ce secteur sont opposables depuis la loi de financement pour 1999. Or, en l'absence d'un mécanisme de caisse-pivot identique à celui employé pour le secteur hospitalier, l'opposabilité ne peut encore être appliquée, ce qui conduit à imputer les dépassements constatés sur les mesures nouvelles.

S'agissant de la CMU, le défaut de préparation concerne surtout le manque d'instruments dont disposent les pouvoirs publics en matière d'analyse des comportements tant des offreurs de soins que des ménages vis-à-vis de la mise en place d'une réforme d'envergure.

Au total, votre rapporteur pour avis s'interroge sur le sens de l'ONDAM. Cette variable focalise l'attention mais n'a aucune réalité. Elle a un contenu variable. Elle est calculée de manière biaisée. Elle n'est jamais respectée. A quoi sert-il donc encore d'en débattre ?

B. LES LIENS ETROITS ENTRE PROJETS DE LOI DE FINANCES ET DE FINANCEMENT

1. L'articulation formelle des deux textes

La réforme constitutionnelle de 1995 a constitué une avancée démocratique et financière majeure dans la mesure où elle a pour la première fois permis au Parlement d'avoir son mot à dire à la fois sur le niveau de recettes dont bénéficient, en prévision, les organismes de sécurité sociale, mais aussi sur le niveau souhaitable de leurs dépenses. Parallèlement, elle devait aussi être l'occasion de débattre des grandes orientations de santé publique. Cependant, la coexistence entre ces deux grands textes financiers que sont les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale n'apparaît pas, à l'usage, satisfaisante.

Comparaisons et ressemblances

Les comparaisons sont légion entre les deux textes, tant l'influence formelle des lois de finances se fait sentir sur les lois de financement. Cela se lit avec évidence dans la procédure d'examen devant le Parlement, qu'il s'agisse des délais et de la sanction de leur non-respect ou du rôle de chaque assemblée. Cependant, au-delà de ces ressemblances de forme, les différences de fond sont essentielles et expliquent en grande partie les difficultés de coordination entre les deux textes.

La portée normative des deux catégories de textes diffèrent ainsi grandement. La loi de finances est une autorisation limitative, sauf exceptions dûment mentionnées, de dépenser. La loi de financement n'est qu'un objectif de dépenses. La loi de finances est une prévision de recettes assortie d'une autorisation, alors que la loi de financement ne contient pas cette dernière. La loi de finances prévoit un article d'équilibre, alors que la loi de financement n'en comprend pas, et de façon délibérée, l'équilibre dépendant en partie des décisions des partenaires sociaux. De même, la structure des deux textes diffère : les lois de finances contiennent deux parties à la teneur précisément détaillée par l'ordonnance organique ; les lois de financement n'ont aucune obligation de cette nature ; recettes et dépenses de la loi de financement ne recouvrent pas le même champ ; elle vise des organismes très diversifiés, alors que la loi de finances ne concerne que l'Etat.

En réalité, les lois de financement n'ont pas résolu le problème de l'éclatement des finances publiques et de l'absence, dans le débat parlementaire, de leur présentation consolidée, alors même que les exigences européennes en rendaient, mais pas seulement elles, indispensable l'appréhension. De même, elles n'ont pas résolu non plus la question de l'éclatement du produit des impositions de toutes natures, alors même que les citoyens ressentent plus fortement leur concentration et leur alourdissement. Mieux, de ces deux points de vue, l'établissement des lois de financement a mis en lumière deux difficultés du droit financier public français et les a rendues moins supportables pour les parlementaires, légitimement frustrés d'une vision consolidée des finances publiques et des prélèvements votés.

La réforme en cours de l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances 6 ( * ) peut ainsi être l'occasion d'une amélioration de cette situation, même si la nature actuelle des prévisions de recettes et des objectifs de dépenses de la loi de financement empêchent de réellement remédier aux défauts mentionnés précédemment.

Les liens entre le budget de l'Etat et les organismes de sécurité sociale, entre lois de finances et lois de financement sont de plusieurs natures. Il existe un lien technique indispensable par le biais d'un socle commun d'hypothèses macro-économiques : heureusement, les deux textes partagent les mêmes hypothèses de croissance, d'inflation, d'évolution de la masse salariale, etc. Par ailleurs, les liens sont de nature fiscale. La loi de financement retrace la prévision du premier impôt payé par les Français, la CSG, ainsi que d'autres impôts chaque année plus nombreux. Par ailleurs, elle tient compte de l'ensemble des transferts budgétaires existants de l'Etat vers les organismes de sécurité sociale. Employeur, l'Etat verse des cotisations. Redistributeur, l'Etat verse des compensations aux régimes qu'il prive de recettes. Régulateur, l'Etat verse des subventions aux régimes en situation difficile. Lui-même régime de retraite, l'Etat contribue aux mécanismes de compensations entre régimes. Distributeur de prestations sociales, l'Etat utilise les organismes sociaux pour instruire les demandes et verser les prestations. L'ensemble de ces mouvements se traduit par des flux à l'importance budgétaire croissante dont il conviendrait d'avoir une vision claire. Enfin, les projets de loi de financement de la sécurité sociale sont un des éléments de la stratégie française de finances publiques telle que notifiée à nos partenaires de l'Union européenne. Au même titre que les projets de loi de finances, ils s'inscrivent donc dans une stratégie globale qui doit être cohérente.

Votre commission est depuis longtemps attachée à un éclaircissement des liens entre les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale. Il convient de saisir l'opportunité d'une réforme de l'ordonnance organique pour procéder aux ajustements possibles du côté des finances de l'Etat. Il s'agira par exemple de préciser le rôle prééminent des lois de finances en matière d'autorisation unique de perception des impositions de toute nature. Par ailleurs, des progrès sont aussi possibles dans l'information parlementaire, au stade du projet de loi de finances, sur l'intégralité du produit des recettes issues de prélèvements obligatoires dont bénéficient les organismes de sécurité sociale afin que l'examen des stratégies fiscales soit éclairé par une connaissance de la totalité des prélèvements obligatoires. De même, le rapport d'orientation budgétaire qui serait transmis, voire soumis, au Parlement, devrait être un document consolidé retraçant l'ensemble des finances publiques et non pas seulement la situation budgétaire qui ne saurait s'apprécier sans une mise en perspective. Un ou plusieurs programmes clairement identifiés, ou, à défaut, une annexe informative, pourraient récapituler de manière exhaustive l'ensemble des flux financiers entre l'Etat et les organismes de sécurité sociale. Une annexe explicative, solution a minima , répondrait au moins au désir du Conseil constitutionnel quand il remarquait dans sa décision relative à la loi de finances rectificative pour 1998 7 ( * ) que les annexes doivent " mettre le Parlement en mesure de tenir compte, au cours de l'examen du projet de loi de finances, des incidences économiques et fiscales des mesures figurant dans la loi de financement de la sécurité sociale. " Enfin, l'introduction d'une obligation de sincérité et d'exhaustivité des lois de finances permettrait de limiter au maximum les tentations et possibilités de " jouer " sur l'examen concomitant des deux textes, sur les obligations figurant dans l'un et le renvoi à plus tard de la coordination dans l'autre, etc. Sincères, les lois de finances devront tenir compte des lois de financement, en attendant que l'introduction d'une disposition similaire dans la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale ne " boucle la boucle ", à moins que le juge constitutionnel ne le fasse progressivement de lui-même.

2. Les nombreux passages d'un texte à l'autre

La lecture commune du projet de loi de finances et du projet de loi de financement pour 2001 fait apparaître de nombreux passages de l'un à l'autre.

Il s'agit au premier chef de différentes mesures relatives aux recettes, qui figurent à l'article 17 du projet de loi de finances. Dans le cadre du financement du passage aux 35 heures, l'Etat procède à un nouveau transfert de ressources fiscales vers le FOREC. Ce dernier devrait ainsi bénéficier en 2001 de 14,1 % du produit de la taxe sur les conventions d'assurance (pour 4 milliards de francs), de la taxe sur les véhicules de sociétés (4 milliards de francs), de droits sur les alcools (11 milliards au titre de 2000, 11,5 milliards au titre de 2001) et de 3,1 milliards supplémentaires du produit des droits sur les tabacs antérieurement affecté à l'Etat 8 ( * ) .

Dans le cadre de la compensation de la ristourne consentie sur la CSG 9 ( * ) , l'Etat a procédé par ailleurs à d'autres transferts de ressources fiscales vers la sécurité sociale. La CNAMTS, la CNAF et le FSV se partageront 26,5 % du produit de la taxe sur les conventions d'assurance (pour un montant total de 7,5 milliards de francs).

L'article 24 du projet de loi de finances effectue un prélèvement, qui a tendance à devenir traditionnel, sur le produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) au profit du BAPSA pour un montant total de 1,35 milliard de francs. Quant à l'article 25, il allège les cotisations sociales agricoles et prévoit donc une baisse de 104 millions de francs de ressources pour le BAPSA.

Enfin, l'article 23 du projet de loi de finances crée un compte d'affectation spéciale n° 902-33 " Fonds de provisionnement des charges de retraites et de désendettement de l'Etat ", destiné à accueillir le produit de l'attribution des autorisations d'établissement et d'exploitation de réseaux de troisième génération de téléphonie mobile (dites licences UMTS). De même, l'article 25 du projet de loi de financement complète l'énumération des ressources du fonds de réserve pour les retraites en prévoyant celles des licences UMTS.

Du côté des dépenses, outre les dépenses traditionnelles liées aux charges sociales de l'Etat employeur (265,4 milliards de francs en 2001), aux transferts de trésorerie liés à certaines politiques sociales de l'Etat (versements du RMI et de l'AAH), et les subventions budgétaires aux régimes sociaux (30 milliards de francs en 2001), les liens sont nombreux.

Ainsi, l'article projet de loi de finances pour 2001 prend acte, enfin, de la prise en charge par l'Etat de la subvention versée auparavant par la CNAMTS au Fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leur famille (pour un montant en 2001 de 1,12 milliard de francs).

De manière implicite, par son absence d'inscription dans le projet de loi de finances et sa prise en compte dans les comptes prévisionnels de la CNAF, le financement de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire, conformément aux annonces du Premier ministre lors de la conférence sur la famille de juillet 1999, est pris en charge par la CNAF.

L'Etat transfère de nouvelles dépenses vers la CNAMTS dans l'article 37 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, avec les frais liés aux appartements de coordination thérapeutique (74 millions de francs) et aux consultations en alcoologie des centres d'hébergement et de réadaptation sociale (89 millions de francs). Il convient de rappeler que la loi de financement pour 1999 avait déjà prévu la prise en charge par la CNAMTS des dépenses de dépistage de certaines maladies, et que celle pour 2000 avait fait de même pour les dépenses de dépistage des centres de dépistage anonymes et gratuits et les centres de planification ou d'éducation familiale (les décrets ne sont toujours pas parus...) et pour les dépenses liées au cures de désintoxication réalisées avec hébergement dans un établissement de santé.

Par ailleurs, alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 crée de nouveaux fonds dans le secteur de l'hospitalisation, le budget de l'Etat comporte toujours le fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux créé par la loi de finances pour 1998.

Dans le cadre du règlement du litige entre l'Etat et l'Agirc / Arrco sur la prise en charge des cotisations versées aux régimes complémentaires au titre des périodes de chômage et de préretraites indemnisées par l'Etat, l'article 22 du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit que le FSV prendra à sa charge les montants correspondants à l'apurement de la dette de l'Etat (pour 2,85 milliards de francs) puis prendra à sa charge le coût réel des cotisations.

3. Les problèmes

La première difficulté, récurrente, réside bien entendu dans l'articulation formelle des deux textes. Le discours du gouvernement sur les finances publiques est brouillé : comment apprécier l'évolution des dépenses et recettes de l'Etat quand il procède à d'aussi massifs mouvements de débudgétisation vers le champ, bien plus flou et plus souple, de la loi de financement de la sécurité sociale ?

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis demeure réservé à l'égard des engagements que prend l'Etat mais qu'il fait supporter à des organismes publics situés hors du champ des lois de finances : ainsi de la prise en charge par le FSV des cotisations retraites des chômeurs et préretraités indemnisés par l'Etat. Il ne s'agit pas d'en contester le principe -l'Etat avait une dette, il doit l'apurer-, mais la méthode : il est bien difficile de se rendre compte à la lecture du budget que l'Etat a souscrit un engagement supplémentaire qui se traduira par des charges publiques de près de 3 milliards de francs. Peu importe ensuite de savoir s'il sera financé par l'utilisation, pourtant déjà prévue en faveur du fonds de réserve, du solde du FSV ou bien par des hausses de prélèvements.

Et puis comment ne pas mentionner le scandale absolu que représente le silence complet et sidérant du gouvernement sur les sommes dont il bénéficiera en provenance de l'Unedic aux termes des accords en cours de conclusion. La représentation nationale comprend aisément que faute de statut juridique encore précis, le gouvernement ne procède pas encore, à la date de parution de cet avis, à des coordinations par amendements au cours de la discussion parlementaire. Mais il n'est pas admissible qu'il taise complètement ses intentions en la matière : qui bénéficiera de ces sommes, le budget de l'Etat ? le fonds de réserve pour les retraites ? un autre organisme ? Ce silence ne saurait se prolonger. Il est éloquent sur la manière dont le gouvernement traite la représentation nationale quand il s'agit de discuter de l'affectation de ressources. Votre rapporteur pour avis avait pourtant cru que les conséquences déplorables du feuilleton de l'année dernière au sujet des réévaluations de recettes auraient suffi au gouvernement pour comprendre que l'époque n'est plus au silence et à la dissimulation.

Cette année encore, le projet de loi de finances ne tient pas compte de dépenses pourtant certaines, figurant dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. C'est à se demander s'il existe une bonne coordination des administrations centrales et des membres du gouvernement sur ces questions. A moins que la parole de l'Etat n'engage que ceux qui l'écoutent. Alors que le fonds de prise en charge des victimes de l'amiante doit recevoir 500 millions de francs de subvention du budget de l'Etat, les bleus sont muets sur ce point. Alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une revalorisation des pensions de 2,2 % à laquelle s'ajouterait une suppression de la CRDS sur les pensions les plus modestes, le projet de loi de finances ne tient compte ni de l'une ni de l'autre pour le BAPSA.

Votre rapporteur pour avis n'ose pourtant pas penser qu'il n'existe pas de réunion de coordination entre la direction du budget et celle de la sécurité sociale qui permettrait d'harmoniser les textes. Pour quelles raisons alors, le Parlement doit-il chaque année dénoncer ces incohérences, ces atteintes au principe d'universalité de la loi de finances ? Tant que de telles erreurs inadmissibles subsisteront, chaque année les parlementaires pourront s'étonner d'un BAPSA qui ne respecte pas en exécution les prévisions d'équilibre, ou bien des charges de trésorerie supportées par les caisses, dans l'attente du remboursement par l'Etat des dettes correspondant à ses engagements. Si la décision est annoncée, c'est qu'elle est prise : la future loi de finances rectificative de 2001 ne doit pas servir à des ouvertures de crédits pourtant décidées avant même le dépôt du projet de loi de finances initial. Faudra-t-il chaque année une commission d'enquête pour dénoncer ces pratiques qui devraient relever d'un autre temps ?

L'ensemble de ces remarques souligne, si besoin en était, la nécessité d'une clarification et d'une démarche plus transparente. Chacun reconnaît aisément que les différences de nature et d'objet des deux textes rendent les choses délicates. Mais des efforts pourraient être faits par chacun, en coordonnant mieux le travail gouvernemental de préparation, en informant mieux le Parlement 10 ( * ) , en intégrant, comme souhaite le faire votre commission, cet aspect dans la future réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances.

*

Au total, l'on sent bien que la situation n'est pas satisfaisante. Les lois de financement sont soit très lentement appliquées, soit franchement vidées de leur sens par le gouvernement. Dans le même temps, la lecture croisée des deux textes financiers majeurs dont le Parlement a à connaître révèle incohérences et imperfections.

L'outil des lois de financement représente certainement un progrès sur la voie de la clarification des liens entre l'Etat et la sécurité sociale, de la compréhension par les différents acteurs, de la responsabilisation du Parlement en matière sociale. Mais ce progrès se paie encore de lourds dysfonctionnements. Beaucoup sont imputables au gouvernement, et la réforme de l'ordonnance organique devrait apporter un peu de clarté. D'autres viennent des acteurs du système de santé. D'autres enfin, sont à mettre sur le compte du Parlement. Il ne s'agit pas de revoir complètement les procédures instaurées en 1995 et 1996. En revanche, il faut changer les comportements, les méthodes comptables, les façons de travailler, améliorer l'information, pratiquer les comparaisons, ne pas hésiter à revenir devant le législateur, réfléchir à l'avenir des modes de régulation. Ce sont ces inflexions, plus qu'une réforme globale, qui sont urgentes si on veut donner aux lois de financement tout leur sens et leur permettre de jouer pleinement le rôle qui leur a été assigné de pilotage de la sécurité sociale et de recherche de l'adéquation entre les besoins des Français et les possibilités financières.

CHAPITRE II :

LES RECETTES :
FINANCER LES 35 HEURES ET " TUER " LA CSG

I. LE FINANCEMENT DES 35 HEURES

A. À LA RECHERCHE DU FOREC ET DE SON FINANCEMENT

1. Le FOREC existe-t-il ?

a) Les 35 heures auraient dû être financées par le FOREC dès cette année

L'article 5 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000 a créé un fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, dénommé FOREC , dont les dispositions figurent aux articles L. 131-8 et suivants du code de la sécurité sociale.

Le FOREC a pour objet de financer :

- d'une part, les allégements de charges sociales patronales, qui ont été prétendument " réformées " ;

- et, d'autre part, les aides à la réduction du temps de travail.

La création du FOREC résulte donc directement de la décision du gouvernement d'imposer la durée hebdomadaire du travail à 35 heures, tant aux entreprises qu'aux salariés.

Pour " sauver " les 35 heures, le gouvernement a dû, en effet, se rallier aux allégement de charges sociales sur les bas salaires, nouvelle orientation que le gouvernement issu des élections législatives de 1993 avait donnée à la politique de l'emploi.

Il reconnaissait ainsi a posteriori , et bien tardivement, la pertinence des positions défendues par le Sénat, même si votre rapporteur pour avis considère que l'adoption de la proposition de loi déposée, en son temps, par M. Christian Poncelet aurait permis de donner plus d'ampleur aux créations d'emplois résultant de l'allégement du coût du travail peu qualifié.

b) Une existence jusqu'à présent virtuelle

La réduction du temps de travail est le dispositif sans doute le plus symbolique de l'action du gouvernement, et a été menée au pas de charge.

Pourtant, curieusement, le FOREC n'a toujours, pour l'instant, qu'une existence virtuelle.

En effet, les décrets d'application de l'article 5 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 précitée n'ont toujours pas été publiés , ni le directeur ni les membres du conseil d'administration nommés, ni les conventions financières régissant les relations Etat/FOREC et FOREC/sécurité sociale rédigées.

Les règles de fonctionnement du FOREC

Le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale est un établissement public national à caractère administratif. Il peut donc faire l'objet de contrôles par la Cour des comptes.

Ses règles de fonctionnement comme ses personnels relèvent d'un statut de droit public.

Un décret en Conseil d'Etat doit fixer :

- la composition du conseil d'administration, qui sera constitué de représentants de l'Etat ;

- la composition du conseil de surveillance, qui comprendra, notamment, des membres du Parlement et des représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national ;

- les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds.

Le statut du fonds de financement est semblable à celui du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et à celui du fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie (CMU). En effet, comme eux, le FOREC gère des transferts financiers entre l'Etat et les organismes sociaux.

Il est prévu que les frais d'assiette et de recouvrement des impôts, droits, taxes et contributions constituant les recettes du fonds, sont à la charge de ce dernier, en proportion du produit qui lui est affecté. Leur montant est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale.

Par ailleurs, sont prévues des conventions entre le fonds de financement et les organismes de protection sociale, d'une part, et le fonds de financement et l'Etat, d'autre part, afin de régler leurs relations financières respectives.

Ces conventions sont notamment destinées à garantir la neutralité en trésorerie des flux financiers pour les organismes de sécurité sociale. Il s'agit en effet d'éviter un éventuel décalage entre le bénéfice de l'exonération de cotisations patronales et sa compensation par le fonds.

En raison de l'absence, à la date d'aujourd'hui, de publication de ces décrets, les ressources du FOREC sont versées à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et centralisées par elle, à titre transitoire, et jusqu'à la création effective du fonds de financement.

Les circuits financiers de remontée des recettes fiscales

L'annexe f au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 précise que, dans l'attente de la mise en place du FOREC, pour laquelle le gouvernement se garde bien de fixer une date, des circuits financiers ont été mis en place à titre transitoire :

- sont recouvrées par les services des douanes les recettes suivantes : les droits de consommation sur les tabacs et les alcools, ainsi que l'ensemble des composantes de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), à l'exception de la part sur les installations classées, recouvrée par les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) ;

- la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés (CSB) est collectée par les trésoreries générales.

Ce retard dans la publication des textes d'application du FOREC est pour le moins étrange s'agissant d'une mesure aussi emblématique pour le gouvernement, et ne laisse pas d'étonner, y compris au sein des services de l'Etat. Ainsi le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, M. Didier Migaud, avait-il reproduit, dans son rapport établi à l'occasion du collectif du printemps 2000 11 ( * ) , une réponse du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, indiquant : " il paraît indispensable de lancer la procédure en Conseil d'Etat au plus tard courant juillet et nommer un directeur en septembre, dernier délai pour lui laisser trois mois pour préparer le budget 2001 et les conventions ".

Ce " dernier délai " est aujourd'hui dépassé : au début du mois de novembre, le décret précisant les modalités d'organisation, de fonctionnement et de gestion du FOREC est, paraît-il, toujours en cours d'examen par le Conseil d'Etat.

2. Comme prévu, le financement du FOREC n'a pas été assuré en 2000

a) Des prévisions gouvernementales inexactes

L'année dernière, votre rapporteur pour avis notait que " le volet recettes du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale est la source de très vives interrogations et inquiétudes pour [lui] , en raison de son caractère extrêmement incertain ".

Il convient de constater la justesse de ces propos, au regard de l'inadéquation constatée, en cours d'année, entre les dépenses très lourdes du FOREC et ses ressources.

Les prévisions initiales du gouvernement relatives à l'équilibre du FOREC en 2000 s'établissaient de la façon suivante :

Or, ces prévisions ne se sont pas réalisées , pour au moins deux raisons :

1) Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 99-423 DC du 13 janvier 2000 portant sur la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, dite loi " Aubry II ", a annulé la disposition de ladite loi prévoyant la taxation des heures supplémentaires, privant ainsi le FOREC d'une recette de 7 milliards de francs.

2) Le montant des ressources du FOREC a différé des prévisions : le produit du droit de consommation sur les tabacs s'est révélé plus élevé que prévu (40,7 milliards de francs au lieu de 39,5 milliards de francs), alors que celui de la TGAP et de la CSB s'est établi à un niveau plus bas (respectivement, 2,8 milliards de francs au lieu de 3,25 milliards de francs, et 3,8 milliards de francs au lieu de 4,25 milliards de francs).

Il est dès lors devenu indispensable, pour le gouvernement, de " boucler " le financement des 35 heures pour 2000 , en assurant l'équilibre du FOREC ex post , faute d'avoir pu le faire ex ante , comme le Sénat l'avait d'ailleurs démontré lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

Il convient en effet de rappeler que l'équilibre du FOREC est une obligation légale.

b) Comment boucler le financement des 35 heures en 2000 ?

En dépit du déséquilibre initial du FOREC, le gouvernement n'a pas jugé bon de déposer un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2000. Il n'a donc pas voulu prêter attention aux recommandations de la commission des affaires sociales du Sénat.

Du reste, cette situation a suscité des inquiétudes y compris à l'Assemblée nationale. Ainsi, dans son rapport précité sur le collectif budgétaire du printemps dernier, M. Didier Migaud estimait qu'il existait " un élément d'incertitude sur l'équilibre du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale ". Il s'était notamment " interrogé sur l'absence d'ouverture de crédits, dans le présent projet de loi [le collectif] , visant à garantir l'équilibre financier du FOREC, qui constitue une obligation légale ".

En réponse au rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie avait indiqué que " le déséquilibre du FOREC est prévisionnel à ce stade de l'année et il ne saurait être question de traduire dans le droit les conséquences d'une simple prévision. Le point sera examiné différemment lors du collectif de fin d'année ". Or, en cours d'exécution, ces prévisions n'ont fait que se confirmer.

Par ailleurs, à cette époque, les choix du gouvernement n'étaient pas arrêtés, le ministère ajoutant : " plusieurs solutions techniques sont possibles pour assurer l'équilibre du fonds, que ce soit en relevant les taxes prévues par la loi, en y affectant de nouvelles recettes ou en réduisant ses charges ".

Or, il convient de constater que le gouvernement a finalement choisi la deuxième de ces solutions, sans pour autant, d'ailleurs, écarter tout à fait la première. Il a en effet décidé, pour " boucler " le financement des 35  heures en 2000, d'affecter au FOREC des recettes complémentaires, de façon rétroactive.

Mais, en raison des multiples flux financiers existant entre l'Etat et la sécurité sociale, la décision d'affecter une recette provenant du budget général doit être prise par la loi de finances. L'article 17 du projet de loi de finances pour 2001 prévoit donc d'affecter la totalité du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés " aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale et aux organismes créés pour concourir à leur financement ", laissant le soin au projet de loi de financement de la sécurité sociale de déterminer la répartition de ce produit

Ainsi, l'article 11 du présent projet de loi de financement prévoit :

- d'affecter au FOREC la quasi-totalité, soit 96,8 %, du droit de consommation sur les tabacs manufacturés 12 ( * ) ; toutefois, cette affectation ne prenant effet qu'au 1 er janvier 2001, il sera nécessaire, pour équilibrer le FOREC en 2000, de prévoir dans le prochain projet de loi de finances rectificative une disposition qui procède à cette affectation à titre rétroactif : le montant du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés continuant de bénéficier au budget de l'Etat est évalué à 3,1 milliards de francs ;

- de verser au FOREC, à titre rétroactif, la totalité du produit des droits sur les boissons (droit de consommation sur les produits intermédiaires ; droit de circulation sur les vins, cidres, poirés et hydromels ; droit sur les bières et les boissons non alcoolisées ; et 55 % du produit du droit de consommation sur les alcools 13 ( * ) ) actuellement affecté au fonds de solidarité vieillesse, pour un montant aujourd'hui estimé à 5,4 milliards de francs.

Le financement des 35 heures, qui ne sera finalement bouclé qu'après des contorsions législatives et, probablement, des charges importantes de trésorerie pour les régimes de sécurité sociale en raison des retards inexcusables de l'Etat, devrait donc s'établir de la façon suivante en 2000 :

Le coût des 35 heures sera donc plus élevé que prévu, s'établissant à 67 milliards de francs en 2000, au lieu de 64,5 milliards de francs.

B. LE FINANCEMENT DES 35 HEURES : TABAGISME, ALCOOLISME ET POLLUTION

1. Les prévisions de financement pour 2001

a) Des dépenses croissantes

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale évalue à 85 milliards de francs le coût de la réduction du temps de travail en 2001, après 67 milliards de francs en 2000, une fois entrées en vigueur les mesures destinées à assurer l'équilibre financier du FOREC au cours du présent exercice, soit une augmentation de près de 27%.

Votre rapporteur pour avis rappelle que le FOREC supporte trois types de dépenses :

- la " ristourne dégressive " de cotisations patronales sur les bas salaires jusqu'à 1,3 SMIC ;

- l'extension jusqu'à 1,8 SMIC de l'allégement des cotisations patronales, au bénéfice des seules entreprises passées aux 35 heures ;

- et les aides à la réduction du temps de travail : l'aide incitative, instaurée par la loi " Aubry I ", et l'aide pérenne, introduite par la loi " Aubry II ".

Il convient toutefois de préciser que deux mesures existantes sont transférées au FOREC, en 2001, par l'article 10 du présent projet de loi de financement :

- l'allégement de cotisations patronales de sécurité sociale en faveur de l'aménagement et de la réduction conventionnels du temps de travail, instauré par la loi n° 96-502 du 11 juin 1996, dite " de Robien ", dont les dispositions avaient été reprises aux articles 39 et 39-1 de la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle ; si l'accès à ce dispositif a cessé à compter de l'entrée en vigueur de la loi " Aubry I " du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation à la réduction du temps de travail, les crédits qui lui sont alloués étaient inscrits, jusqu'à présent, à l'article 20 du chapitre 44-77 du budget de l'emploi ;

- les exonérations de cotisations d'allocations familiales concernant les salariés des exploitants agricoles, des entreprises agricoles en zone de revitalisation rurale et des entreprises relevant de certains régimes spéciaux (visées aux articles L. 241-6-2 et L. 241-6-4 du code de la sécurité sociale, et L. 741-5 et L. 741-6 du code rural), l'article 58 du projet de loi de finances pour 2001 prévoyant de supprimer les autres cas particuliers où ces mesures demeuraient applicables, notamment au bénéfice des entreprises non agricoles.

Ces deux transferts engendrent une augmentation des dépenses du FOREC de 3,7 milliards de francs en 2001, de telle sorte que, à " périmètre constant ", la hausse de leur montant n'en reste pas moins de 21,3 % par rapport à 2000.

b) Les recettes : une " tuyauterie " de plus en plus sophistiquée

L'impératif que constitue, pour le gouvernement, la nécessité d'équilibrer le FOREC le conduit à rendre plus complexe encore l'" usine à gaz " qu'il avait échafaudée l'année dernière.

Il propose en effet d'y ajouter quelques " tuyaux " en 2001.

Or, ce procédé est vivement critiqué au sein même de la majorité plurielle. Ainsi M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, déplore-t-il que " les circuits de financement de la sécurité sociale sont rendus compliqués par l'existence de plusieurs fonds qui nécessitent de mettre en place des mécanismes assez baroques de transferts financiers 14 ( * ) ".

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, n'est guère plus indulgent, et note, non sans ironie : " l'ensemble du dispositif conduit à modifier sensiblement l'équilibre du FOREC. La conclusion de l'ensemble est que le financement du FOREC gagne sans doute en montant ce qu'il perd en clarté 15 ( * ) ".

Votre rapporteur pour avis partage cette analyse, la " tuyauterie " mise en place par le gouvernement ayant uniquement pour objectif de trouver le moyen de financer un dispositif particulièrement coûteux.

Il convient de rappeler les recettes dont bénéficiera le FOREC en 2001 :

1) la quasi-totalité du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés ;

2) une grande partie du produit des droits de consommation sur les boissons, dont l'intégralité de celui du droit sur les alcools jusqu'alors affecté au FSV ;

3) le produit de la TGAP, dont l'assiette sera élargie à la taxation de la consommation d'énergie 16 ( * ) ;

4) le produit de la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés (CSB) ;

5) le produit de deux nouvelles recettes affectées : l'intégralité de la taxe sur les véhicules de société, et une part de la taxe sur les conventions d'assurance 17 ( * ) .

Il convient de noter que la contribution du budget de l'Etat au FOREC, qui s'établissait à 4,3 milliards de francs en 2000, est supprimée en 2001.

Le tableau ci-après retrace le plan de financement des 35 heures prévu pour 2001 :

Toutefois, la plus grande incertitude demeure sur le coût de la réduction du temps de travail à terme, c'est-à-dire lorsque l'ensemble des entreprises sera passé aux 35 heures, à partir du 1 er janvier 2002. M. Jérôme Cahuzac, note ainsi, dans son avis précité, que " pour l'avenir, l'administration n'a pas été en mesure de fournir un tableau prévisionnel de l'équilibre du FOREC en rythme de croisière. Il n'est donc pas possible, aujourd'hui, d'assurer que les modalités de financement retenues pour 2001 permettront de faire face aux dépenses du FOREC en rythme normal, qui étaient estimées, l'an passé, à 105 milliards de francs par an, soit encore 20 milliards de francs de plus que prévu pour 2001 ".

Il faudrait donc s'attendre à voir se renouveler l'année prochaine un même exercice de tentative de bouclage équilibriste du FOREC.

2. Des affectations de recettes sans lien avec l'objet de la mesure à financer

Votre rapporteur pour avis ne peut que constater l'absence totale de cohérence, au sein du FOREC, entre les affectations proposées de recettes à des dépenses dont l'objet est sans lien avec l'origine des ressources.

Cette " tuyauterie " paraît contraire à l'un des principes de base du droit budgétaire français, la non-affectation des recettes aux dépenses. Si ce principe s'applique au budget de l'Etat, il ne devrait pas être étranger, à ce point, aux divers fonds de financement, puisque ceux-ci ont vocation à isoler des politiques publiques et les moyens qui leur sont affectés, en principe dans un but de visibilité et donc de simplification de la présentation des actions de l'Etat.

Or, le FOREC est une illustration, presque caricaturale, de la " tuyauterie ".

Pourtant, au-delà des principes, votre rapporteur pour avis considère que cette situation est source de risques réels.

En effet, quel devrait être l'objet de l'imposition des tabacs, des alcools, ou des activités polluantes ? Logiquement, du point de vue de la rationalité économique, ce type d'imposition a un but dissuasif : réduire la consommation de produits qui peuvent être dangereux pour la santé, ou inciter à l'utilisation d'énergies propres protectrices de l'environnement, afin d'acquitter une imposition moins importante.

Or, l'affectation du produit de ce type d'impôts au FOREC va à l'encontre de ces objectifs.

Au contraire, en effet, la réduction du temps de travail coûtant excessivement cher - 85 milliards de francs en 2001, 105 milliards de francs estimés à terme - le gouvernement a intérêt à maximiser le produit de ces impôts, c'est-à-dire à espérer que les recettes fiscales en résultant soient les plus importantes possibles.

L'affectation à des dépenses pérennes considérables d'impôts aussi sensibles transforme la nature de ces derniers : l'objectif de santé publique ou de protection de l'environnement passe au second plan, le rendement fiscal devenant prioritaire.

C'est du reste la même analyse qu'a récemment faite le Conseil économique et social dans un projet d'avis sur le suivi de l'effet de serre, à propos de l'extension projetée de la TGAP. Comme l'a indiqué le président de la section des activités productives, de la recherche et de la technologie du Conseil économique et social, " la taxation des entreprises est justifiée dès lors qu'elle sert à l'effort de réduction des émissions de gaz polluants, sinon, il s'agit d'un impôt, un simple droit à polluer acheté par les entreprises sans retour pour la collectivité ". Le produit de la TGAP devrait, logiquement, être affecté à la lutte contre l'effet de serre. Votre rapporteur pour avis reconnaît s'interroger sur la contribution des 35 heures à la réduction de l'effet de serre...

M. Alfred Recours, l'année dernière, partageait ce sentiment, mais semble avoir changé d'avis - ou dissimulé sa véritable opinion ? - cette année.

Les contradictions de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale

M. Alfred Recours, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, estimait que : " il apparaît indispensable que les recettes spécifiques collectées sur les ventes de tabac soient clairement affectées à la santé ", et poursuivait : " le droit de consommation sur les tabacs devrait être intégralement affecté à la sécurité sociale, pour lui permettre de faire face aux dépenses générées par les pathologies attribuables au tabac ainsi que de financer des actions de prévention et d'éducation sanitaire ".

Pourtant, cette année, il écrit dans son rapport précité que la fin de l'affectation du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés au budget de l'Etat constitue une " simplification méritoire ", " conformément à une des propositions du rapport qu'il avait remis au Premier ministre sur ce sujet en octobre 1999 ".

Or, votre rapporteur pour avis s'interroge sur le lien réel entre le FOREC et la sécurité sociale, les 35 heures étant un dispositif de la politique de l'emploi, et sur les conséquences qu'aura l'affectation du droit de consommation sur les tabacs à ce fonds sur la lutte contre les effets néfastes du tabagisme ou en faveur des " actions de prévention et d'éducation sanitaire " !

Les modalités de financement de la réduction du temps de travail retenues par le gouvernement ont finalement pour conséquence, dans un objectif de rendement, d'encourager l'alcoolisme, le tabagisme et la pollution , comme le montre le graphique ci-après :

Ainsi, en 2001, le coût des 35 heures sera supporté, à hauteur de 71 milliards de francs, soit 83,5 % du total, par les droits de consommation sur les tabacs manufacturés et sur les alcools, ainsi que par la TGAP.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

1. Le coût de la politique de l'emploi devient illisible

M. Alfred Recours note, dans son rapport précité, que " l'empilement des mécanismes rend l'ensemble du dispositif peu lisible pour les non spécialistes normalement constitués ", dénonçant, plus loin, le caractère " proprement ahurissant des flux de financement de la sécurité sociale ", et concluant : " on ne peut que souhaiter, pour les années à venir et les prochains débats sur les projets de loi de financement de la sécurité sociale, une simplification de ces multiples flux qui ne permettent ni au citoyen, ni au décideur politique, de savoir qui finance quoi en matière de sécurité sociale ".

Cette question est en effet fondamentale.

Votre rapporteur pour avis considère que le financement de la réduction du temps de travail n'a pas sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale. Les 35 heures, en effet, constituent - et c'est d'ailleurs bien ainsi que le gouvernement les a présentées - un dispositif de la politique de l'emploi. Elles devraient à ce titre être supportées par le budget de l'Etat.

En effet, le gouvernement n'avait pas besoin de créer ce fonds de financement pour supporter le coût des 35 heures. Pourquoi a-t-il souhaité que la réduction du temps de travail soit financée en dehors du budget de l'Etat ?

En décidant de créer un fonds distinct du budget général, le gouvernement a procédé à une débudgétisation massive, extrêmement préjudiciable à la sincérité des comptes publics , alors que, dans le même temps, il proclame ses bonnes intentions en la matière. Ainsi note-t-il, dans l'exposé des motifs du projet de loi de finances pour 2001, que ce dernier " comporte, dans un souci de clarté, des modifications de périmètre qui font l'objet d'une charte de débudgétisation ", tandis qu'il annonce plus loin " la poursuite de la clarification des relations entre l'Etat et la sécurité sociale " !

Cette débudgétisation massive lui permet aussi de contenir en apparence les dépenses de l'Etat qui, sinon, auraient augmenté, avec les 35 heures, dans des proportions incompatibles avec nos engagements européens. Le gouvernement se sert donc des liens entre lois de finances et lois de financement pour piloter certains indicateurs stratégiques, comme le rythme d'évolution des dépenses, au prix de complexités, de contorsions comptables et de biais fiscaux majeurs.

De plus, le coût de la politique de l'emploi devient illisible, comme l'a fort opportunément rappelé notre collègue Joseph Ostermann, rapporteur spécial du budget de l'emploi.

Il convient donc, pour l'appréhender dans sa réalité, d'ajouter les charges du FOREC (85 milliards de francs) aux crédits inscrits sur la section emploi du budget de l'Etat (111,83 milliards de francs) : le coût de la politique de l'emploi s'établit ainsi à 196,83 milliards de francs en 2001.

2. Les effets sur l'emploi sont incertains

Dans leur rapport consacré à l'application de la loi de financement de la sécurité sociale, nos collègues Charles Descours, Jacques Machet et Alain Vasselle estimaient que " le nombre d'emplois créé par les 35 heures ne sera jamais connu " 18 ( * ) .

Ils appuyaient leur démonstration sur le fait que la loi " Aubry II " prévoit seulement un vague " engagement de création d'emplois ", ajoutant que les services compétents de l'Etat, en l'occurrence les directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, disposaient d'une marge de manoeuvre certaine pour apprécier le respect des engagements de créations d'emplois contenus dans les accords.

Ils rappelaient pourtant que " la communication gouvernementale [...] rapproche souvent le nombre d'emplois créés de manière générale des engagements de créations d'emplois ".

Votre rapporteur pour avis partage entièrement cette analyse, du reste confirmée par l'examen des informations communiquées par le gouvernement.

En effet, l'exploitation des informations transmises par les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle faisait apparaître les résultats suivants, au 31 août 2000 :

Ainsi, à cette date, plus de 222.000 emplois auraient été créés ou préservés grâce à la réduction du temps de travail.

Dans ce total, le ministère de l'emploi et de la solidarité n'est pas capable de distinguer clairement les emplois créés, d'une part, et les emplois préservés, d'autre part.

Surtout, quand il s'y essaie, il ne peut que mentionner des engagements soit de créations soit de préservations d'emplois, et non des effets certains.

Par ailleurs, dans ses commentaires, le ministère indique, s'agissant du second des tableaux présentés ci-dessus, que " dans la mesure où certains emplois auraient de toute façon été créés ou maintenus, les effets nets de la réduction du temps de travail sur l'emploi sont moins importants ". Les effets d'aubaine interviennent donc de façon certaine, et rendent encore plus délicate l'estimation des 35 heures sur l'emploi.

D'autant plus que, comme le précise lui-même le ministère, " les engagements d'emplois peuvent être remplis sous la forme d'une hausse de la durée du travail de salariés à temps partiel ".

Bref, la réduction du temps de travail a des effets pour le moins incertains sur l'emploi.

Cette incertitude est d'ailleurs à l'origine de divergences d'appréciation au sein même des services de l'Etat sur les effets des 35 heures.

Le ministère de l'emploi et de la solidarité, on l'a vu, estime à plus de 220.000 le nombre d'emplois créés ou préservés grâce aux 35 heures. Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie est, quant à lui beaucoup moins optimiste.

Le rapport économique, social et financier accompagnant le projet de loi de finances pour 2001 prévoit en effet que " de 1999 à 2001, la réduction du temps de travail pourrait conduire à créer entre 220.000 et 280.000 emplois ". L'utilisation du conditionnel comme la marge assez importante en termes de créations d'emplois montrent que la plus grande prudence est de mise.

Il note également que " la diffusion des 35 heures a été accélérée par le dispositif incitatif de la 1 ère loi et le rythme de progression du nombre de salariés couverts fléchirait un peu en 2000 et 2001 ; ce nombre passerait de plus de 5.000.000 fin 2000 à environ 7.000.000 fin 2001 ".

Pourtant, il estime à environ 770.000 le nombre d'emplois salariés créés dans le secteur marchand au cours des années 2000 et 2001. Autrement dit, les créations d'emplois résulteront bien davantage de la croissance que des 35 heures !

3. Des effets néfastes sur l'environnement économique

Si les 35 heures ont des effets incertains sur l'emploi, en revanche elles ont des effets déjà perceptibles sur l'environnement économique du secteur productif. Des effets négatifs.

a) La réduction du temps de travail pénalise la compétitivité des entreprises

Le passage de la durée hebdomadaire du travail de 39 heures à 35 heures sans baisse de salaire entraîne mécaniquement une hausse du coût horaire de 11,4 %, ce qui ne peut que détériorer le compétitivité des entreprises.

Or, la revalorisation sensible du taux horaire du SMIC, de 3,2 %, intervenue le 1 er juillet dernier, s'applique à l'ensemble des entreprises, y compris celles qui ne sont pas encore passées aux 35 heures, soit parce qu'elles n'ont pas signé d'accord, soit parce que, ayant moins de 20 salariés, elles ne seront concernées par la réduction du temps de travail qu'à partir du 1 er janvier 2002.

Les 35 heures vont donc directement pénaliser les petites entreprises, en renchérissant le coût du travail, alors qu'elles ne les appliquent pas encore !

Il convient par ailleurs de rappeler que, pour les entreprises ayant réduit leur temps de travail, la loi " Aubry II " a mis en place le système complexe de la garantie mensuelle devant permettre aux salariés payés au SMIC de ne pas voir leur rémunération diminuer, en réduisant l'écart entre le salaire minimum horaire appliqué aux 35 heures et le SMIC mensuel. Mais, pour des raisons politiques évidentes, il ne faut pas douter que le taux horaire du SMIC et son montant mensuel ne se rejoignent au cours des prochaines années, grâce, notamment, à des " coups de pouce " réguliers.

Or, dans une étude très instructive parue dans sa revue mensuelle de juillet 2000, Économie et statistique , l'INSEE indique qu' " une augmentation de 10 % du SMIC détruirait environ 290.000 emplois, à long terme ". Cette évolution entraînerait de nombreuses destructions d'emplois, s'accompagnant d'une nette diminution de la production et d'une dégradation des comptes publics consécutive à des ressources en cotisations sociales plus faibles mais à des dépenses plus importantes sous forme de prestations.

A la même époque, l'OCDE estimait que la forte croissance attendue en France en 2000 et 2001 pourrait être freinée par des tensions sur le marché du travail, liées notamment à la réduction du temps de travail.

b) La réduction du temps de travail comporte des risques inflationnistes

L'OCDE jugeait également que les emplois résultant de la réduction du temps de travail risquaient, à court terme, d'entraîner une hausse de l'inflation, en raison de la hausse des salaires qu'elle pourrait susciter : " la réduction de la durée du travail et la gestion du salaire minimum doivent être menées avec prudence et pragmatisme " concluait-elle.

Certes, la modération salariale prévaut actuellement en France depuis l'adoption des lois " Aubry ", mais elle est essentiellement contrainte. Elle pénalise ainsi la demande, relativement forte en raison de la bonne tenue de la conjoncture, et suscite des tensions sociales, alors que, dans le même temps, les capacités d'offre sont bridées.

Les 35 heures sont ainsi à l'origine d'une situation paradoxale : soit elles suscitent des hausses de salaires, ce qui provoque des tensions inflationnistes, soit elles fondent une modération salariale, ce qui pénalise l'appareil de production !

c) La réduction du temps de travail tend à réduire la capacité de production des entreprises

Il est pour le moins paradoxal de constater la concomitance actuelle du chômage, certes en réduction, mais dont le taux reste encore à 9,6 % de la population active, et des difficultés croissantes à recruter, les entreprises étant confrontées à de réelles pénuries de main-d'oeuvre 19 ( * ) .

Les 35 heures, en effet, créent une réelle contrainte d'offre dans l'économie française.

C'est d'ailleurs dans ce contexte qu'est apparu un débat sur l'application des 35 heures aux petites et moyennes entreprises (PME).

Ce débat a d'ailleurs été initié par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Laurent Fabius, qui avait d'abord considéré qu'il fallait aborder la question des 35 heures dans les PME " avec souplesse ", puis qui, observant que la croissance plafonnait en France, estimait qu'il convient de ne pas " céder à la vieille tentation malthusienne consistant à réduire notre capacité de produire " 20 ( * ) . Il ajoutait : " la mise en oeuvre [des 35 heures] doit prendre en compte la diversité des situations concrètes ; nous devons veiller à ce que les entreprises, notamment les PME, ne se heurtent pas à une impossibilité de produire davantage en raison de difficultés d'embauche ou de formation ".

Sans doute le ministre n'a-t-il pas été insensible aux analyses de l'OCDE qui, dans son étude précitée de juillet 2000, estimait que la loi " Aubry II ", " si elle n'est pas mise en place avec la souplesse suffisante ", pourrait " peser sur les coûts de production et la compétitivité des entreprises ". Les PME, notamment, auront du mal à dégager des gains de productivité, ce qui aura de graves conséquences pour elles : " les entreprises de moins de 20 salariés ont une marge de manoeuvre réduite pour embaucher ou réorganiser le travail et les 35 heures pourraient bien se traduire soit par une baisse de production, soit par un coût plus élevé ".

Votre rapporteur pour avis considère qu'il est nécessaire, au titre de la souplesse réclamée par le ministre lui-même, de modifier la législation sur la réduction du temps de travail.

Il ne peut, dès lors, être que favorable à la proposition de loi présentée par notre collègue Alain Gournac, visant à reporter à 2004 l'abaissement de la durée du travail pour les entreprises de moins de 20 salariés, et à assouplir les règles de recours aux heures supplémentaires.

d) La réduction du temps de travail nuit à l'attractivité de la France

D'après une étude récente du cabinet de consultants Ernst et Young, 65 % des dirigeants de filiales françaises de multinationales estiment que, si leur groupe devait investir en Europe aujourd'hui, il ne choisirait pas la France.

En dépit des atouts de notre pays, ces dirigeants citent, parmi ses principaux handicaps, le poids des prélèvements fiscaux et sociaux, pour 93 % d'entre eux, les rigidités sociales, pour 85 %, les 35 heures, pour 84 %, les lourdeurs administratives, pour 62 %, et la fiscalité des stock-options, pour 58 %. De surcroît, 44 % des entreprises interrogées envisagent de délocaliser à l'étranger une partie de leurs activités implantées en France.

Les 35 heures occupent ainsi la troisième place sur la liste des principaux handicaps français.

Il est clair, en effet, que, à l'heure où l'on parle de plus en plus du phénomène de la " fuite des cerveaux ", la réduction du temps de travail dégrade l'image de la France à l'étranger.

Ainsi, seulement 40 % des cadres dirigeants des entreprises concernées ont une image positive de la France. Cette situation résulte en partie de " la communication inefficace sur les 35 heures, totalement incomprise à l'étranger ". En revanche, 80 % d'entre eux ont une image positive des autres pays européens.

*

S'agissant des 35 heures et du FOREC, votre rapporteur pour avis ne peut donc admettre :

• que, présenté comme une mesure emblématique du gouvernement actuel, le FOREC n'existe toujours pas et que son financement ne soit finalement pas prévu ;

•  que, justifié en apparence par un souci de " clarification des flux entre l'Etat et la sécurité sociale ", le FOREC devienne un moyen de cacher la hausse des dépenses publiques et complexifie encore davantage les finances sociales ;

•  que, pour 85 milliards de francs en 2001 et plus de 100 par la suite, l'Etat grève les finances publiques, perturbe la vie économique, fragilise la croissance, pour un simple effet " marketing " ;

•  que, alors que certaines taxes ont un but citoyen et devraient servir à empêcher certains comportements, elles se retrouvent détournées de leur objet et, en quelque sorte, promues au rang de financeur d'une mesure non finançable.

C'est pourquoi, convaincu que le rapport avantages/inconvénients penche en faveur des seconds, il vous proposera de supprimer les articles 10 et 11 du présent projet de loi de financement.

II. LA RISTOURNE DÉGRESSIVE DE LA CSG

La contribution sociale généralisée a été mise en place en 1990 afin de créer une alternative au financement par les cotisations sociales de la protection sociale, accusé d'alourdir le coût du travail et de nuire à l'emploi tout en faisant trop dépendre l'équilibre de la sécurité sociale de l'évolution de la masse salariale donc de la croissance économique. Son taux a considérablement varié depuis sa création, toujours dans le sens de l'augmentation.

Evolution du taux de la CSG depuis 1990

1991-1993

Au 01/07/1993

Au 01/01/1997

Au 01/01/1998

Revenus d'activité

1,1 %

2,4 % *

3,4 %

7,5 %

Revenus de remplacement

1,1 %

2,4 %*

3,4 %

6,2 %

Revenus de placement

1,1 %*

2,4 %*

3,4 %*

7,5 % *

Revenus du patrimoine

1,1 %*

2,4 %*

3,4 %*

7,5 % *

Source : Conseil des impôts

* Hausse sans contrepartie en matière de cotisations sociales

Cet impôt est aujourd'hui le premier prélèvement obligatoire de France, représentant pour 2000 plus de 370 milliards de francs.

Rendement de la CSG *

(en milliards de francs)

1999

2000

2001

Total

356,5

370,2

387,1

dont maladie

239,1

247,9

259,2

CNAF

53,8

56,1

58,6

FSV

63,6

66 ?3

69,3

* avant mesures du PLFSS 2001

Source : CSSS 09 2000

Il est aussi le prélèvement le moins bien accepté : un sondage de la SOFRES en juin 1999 indiquait que 73 % des Français ne trouvaient pas normale son existence, contre 71 % pour l'impôt sur les successions, 66 % pour la TVA, 25 % pour l'impôt sur le revenu et 22 % pour les impôts locaux 21 ( * ) .

A. LE DISPOSITIF DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT

1. Une baisse inscrite dans un contexte global

Le 31 août 2000, le gouvernement a proposé un plan global d'allégements de prélèvements obligatoires, étalé sur trois ans. Il comprend plusieurs mesures extrêmement différentes les unes des autres, pour un montant total de 120 milliards de francs, dont 57 milliards en 2001.

Ce plan met l'accent sur quatre points : l'allégement de l'impôt, l'encouragement de l'emploi, l'amélioration de la fiscalité pétrolière et la simplification de l'impôt.

Sur l'impôt, il propose ainsi la réduction progressive du barème de l'impôt sur le revenu, la réduction de l'impôt sur les sociétés, des mesures en faveur des énergies renouvelables et la suppression de la part salaire dans la taxe professionnelle.

Sur l'encouragement de l'emploi et la réduction des trappes à inactivité, il propose la réduction de la CSG et de la CRDS et l'aménagement de la décote.

Sur la fiscalité pétrolière, il suggère une baisse de la taxe sur le fioul domestique, la création d'une contribution des entreprises pétrolières, un rééquilibrage de la fiscalité du gazole et l'amélioration du remboursement aux routiers et transporteurs.

Enfin, au titre de la clarification, le gouvernement entend simplifier et supprimer diverses taxes ainsi que supprimer la vignette automobile des particuliers.

Plan d'allègement des impôts 2001-2003

(en milliards de francs)

2001

2002

2003

2004

Allègement de l'impôt

- 32,5

- 29,4

- 17,4

- 79,3

Engagement à l'emploi

- 9,6

- 8,5

- 8,5

- 26,6

Amélioration de la fiscalité pétrolière

0

+ 2,4

+ 2,4

+ 4,8

Simplification de l'impôt

- 15

- 2

- 1,5

- 18,5

Total

- 57,1

- 37,5

- 25

- 119,6

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

2. Une baisse dégressive

L'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 contient les dispositions législatives organisant la ristourne dégressive de CSG.

La CSG et la CRDS

L'instauration de la contribution sociale généralisée (CSG) par la loi du 28 décembre 1990 marque une évolution profonde dans le financement de la protection sociale, faisant porter le financement de certaines dépenses (prestations familiales, prestations maladie hors indemnités journalières, minima sociaux) sur un ensemble plus large de revenus que les seuls salaires. En fait, la CSG se présente comme un ensemble de trois contributions différentes, cette distinction provenant essentiellement du souhait de faciliter son recouvrement : la contribution portant sur les revenus d'activité et de remplacement prélevée comme les cotisations sociales ; la contribution portant sur les revenus du patrimoine prélevée comme l'impôt sur le revenu par voie de rôle : enfin, la contribution sur les produits de placement prelevée comme le prélèvement libératoire.

Fixée initialement au taux de 1,1 % en 1991, la CSG passe ensuite à 2,4 % au 1 er juillet 1993. A la différence des cotisations sociales, ce nouveau prélèvement est non déductible des revenus imposables. Par ailleurs; si l'instauration en 1991 de la CSG avait été compensée par une baisse des cotisations sociales, les 1,3 % supplémentaires instaurés en 1993 n'ont pas donné lieu à compensation.

Les lois de financement de la sécurité sociale de 1997 et 1998 instituent un transfert des cotisations maladies vers la CSG. En 1997, le taux de la CSG sur les revenus d'activité est porté à 3,4 % (avec une baisse des cotisations maladie de 1,3 point). En 1998, son taux passe à 7,5 % pour les revenus d'activité (compensé par une baisse des cotisations maladie de 4,75 points). Pour les revenus de remplacement (chômage, préretraites et retraites), le taux de la CSG passe à 6,2 % en 1998 (avec des mécanismes d'exonérations, notamment pour les retraités non imposables). Les montants des augmentations de CSG liés au basculement des cotisations maladie sont déductibles du revenu imposable, à la différence des 2,4 premiers points de CSG qui demeurent imposables.

Les augmentations de CSG en 1997 et 1998 se sont accompagnées d'un élargissement de l'assiette à de nombreux produits de placement, à l'exception des intérêts des livrets A et assimilés et des plus-values de valeurs mobilières sous seuil de cession.

La CRDS a été instaurée à compter du 1 er février 1996. Cette nouvelle contribution, affectée à la CADES, est prélevée au taux uniforme de 0,5 % (avec comme la CSG un abattement de 5 % pour frais professionnels sur les revenus d'activité). Son assiette est quasi identique à celle de la CSG actuelle pour les revenus d'activité et du patrimoine et légèrement plus étendue pour les revenus de remplacement : les prestations familiales et les aides au logement sont soumises à la CRDS (à partir de 1977). Les minima sociaux ne sont soumis ni à la CSG, ni à la CRDS.

Source : INSEE, " L'évolution de la redistributivité du système socio-fiscal entre 1990 et 1998 ", in Portrait social 2000.

Le champ de la ristourne est défini au A des paragraphes I et II. Le I indique ainsi que sont visés l'ensemble des revenus tirés de l'activité professionnelle salariée : les traitements, indemnités, émoluments, salaires, sommes allouées au titre de l'intéressement, contributions patronales de retraite et de prévoyance complémentaire, indemnités de licenciement et de mise à la retraite, indemnités journalières, compléments de rémunération versés par l'employeur, allocations reçues dans le carde d'un congé parental d'éducation. L'assiette est donc large. Elle est bornée par un plafond défini à l'origine à 1,3 fois le salaire minimum de croissance (169 fois le taux horaire). L'Assemblée nationale a relevé ce plafond à 1,4 fois le SMIC. L'article établit un mécanisme de proratisation en cas de temps partiel selon le nombre d'heures travaillées. Le mécanisme s'applique aussi aux salariés dont la rémunération ne dépend pas d'un volume horaire et aux agents publics. Pour les non salariés (A du II), comme pour les employeurs et travailleurs indépendants et les revenus agricoles, la référence est faite au temps de travail sur l'année, soit 1,4 SMIC annuel (1,4 fois 2.028 fois le taux horaire). L'article prévoit aussi les cas particuliers des employés de maisons, des agents publics ayant commencé ou cessé leur activité, et des pluriactifs.

La réduction est calculée au B des I et II. Il s'agit de l'application d'un coefficient variable à la différence entre le plafond et les revenus concernés et proratisés.

Le coefficient correspond au rapport entre le taux réel des contributions dues en pourcentage du SMIC mensuel et la différence entre le plafond et le SMIC mensuel. Ce coefficient varie donc en fonction du niveau de salaire : il est de 19 % à 1,4 SMIC et de 25,33 % pour 1,3 SMIC. Il varie aussi selon la catégorie de revenus, car ces derniers ne sont pas tous soumis au même taux réel de prélèvements.

Coefficients de réduction dégressive de CSG et CRDS

Catégorie de revenus

Taux réel
CSG et CRDS

1 SMIC

1 SMIC

1,2 SMIC

1,3 SMIC

1,4 SMIC

Salaires

7,6 %

100 %

76 %

38 %

25,33 %

19 %

Indemnités journalières

6,7 %

100 %

67 %

33,5 %

22,33 %

16,75 %

Revenus non salariaux

8 %

100 %

80 %

40 %

26,67 %

20 %

Exemple : le coefficient applicable aux salaires à 1,2 SMIC est de 7,6 /(1,2 - 1) = 7,6/0,2 = 38 %

Cependant, le gouvernement a prévu une application progressive de la mesure. Aussi, le coefficient est-il lui-même multiplié par 0,33 pour 2001, 0,66 pour 2002 pour s'appliquer complètement en 2003.

Concrètement, le gain de revenu proposé par le gouvernement est substantiel, puisqu'il peut aller jusqu'à 540 francs par mois, soit 6.480 francs par an pour un revenu situé au niveau du SMIC.

Ainsi, un salarié payé au SMIC ne devrait plus payer de CSG en 2003 sur son salaire.

Gain annuel de CSG et de CRDS en 2003

Revenu

Gouvernement

Assemblée nationale

1 SMIC

6.480

6.480

1,1 SMIC

4.317

4.857

1,2 SMIC

2.158

3.238

1,3 SMIC

0

1.620

1,4 SMIC

0

0

Cette mesure concernait à l'origine (quand elle était limitée à 1,3 SMIC) selon le gouvernement 22 ( * ) sept millions de personnes (dont 2,5 millions de moins de trente ans), dont 90 % de salariés et 10 % d'indépendants. L'Assemblée nationale, en élevant le plafond à 1,4 SMIC, a étendu son bénéfice à un million supplémentaire de salariés selon le gouvernement 23 ( * ) , pour un surcoût d'un milliard de francs. La commission des finances quant à elle parlait de deux millions de salariés 24 ( * ) , pour un surcoût identique. Cependant, on a pu lire des chiffres plus élevés comme 9,6 millions de personnes, soit 2,6 millions de plus que ce qui était initialement prévu 25 ( * ) : 450.000 exploitants agricoles, 657.000 travailleur indépendants non agricoles, 7,4 millions de salariés du secteur privé et 1,12 million d'agents publics.

Le coût de la mesure initiale était de 8 milliards de francs la première année, puis 16,5 milliards la seconde et 25 milliards de francs en année pleine. L'extension adoptée à l'Assemblée nationale porterait le coût la première année à 9 milliards de francs soit un surcoût d'un milliard de francs. Votre rapporteur n'a pas eu d'information sur l'évolution de ce surcoût les autres années, mais toute porte à croire qu'il augmente à due concurrence de l'avantage ce qui amènerait le coût de la mesure à 18,5 milliards de francs en 2002 et à 28 milliards de francs en 2003.

3. Une baisse motivée par la lutte contre l'inactivité

Le gouvernement justifie cette mesure, élément essentiel de son programme de réduction d'impôts, par plusieurs raisons.

La première raison, la plus avouée, est le besoin de diminuer les effets de trappe à inactivité. Les études ne manquent pas pour souligner les conséquences du cumul d'allocations et minima sociaux sur l'attractivité de la reprise d'emploi surtout si ce dernier est rémunéré aux alentours du SMIC, a fortiori s'il est occupé à temps partiel. Certes, en théorie, le niveau des minima sociaux devrait empêcher que ce type de situation se produise, notamment pour un célibataire payé au SMIC.

Transitions sur le marché de l'emploi

(gain monétaire mensuel en francs)

du RMI vers...

½ SMIC

1 SMIC

Célibataire

- 88

1.658

Isolé 1 enfant

- 345

1.671

Isolé 2 enfants

253

2.310

Isolé 3 enfants

1.559

3.731

Isolé 4 enfants

1.467

3.672

Isolé 5 enfants

1.383

3.602

Couple sans enfant

0

987

Couple 1 enfant

0

583

Couple 2 enfants

0

597

Couple 3 enfants

0

1.539

Couple 4 enfants

0

1.479

Couple 5 enfants

0

1.410

Source : Conseil des impôts

Cependant, l'effet cumulé de la mise sous condition de ressources, des liens entre allocations, de la familiarisation de nombre d'entre elles fait que dans bien des cas occuper un emploi risque de se traduire par une perte de revenus. Retrouver un emploi signifiera perdre des exonérations de taxe d'habitation, perdre le bénéfice de la suspension de dettes, perdre la réduction ou la gratuité de certains services publics (transports, crèches, cantines, etc), perdre le bénéfice de la couverture maladie universelle. Ainsi le prouve cette situation concrète à laquelle s'est livrée une habitante de La Rochelle.

Exemple de situation concrète

CHOMAGE

TRAVAIL (SMIC)

Assedic (3020 x 12)

36.240 F

Salaire 35 h (5.064 x 12)

60.768 F

APL (1350 x 12)

16.200 F

APL (1.132 x 12)

13.584 F

Taxe d'habitation

0

Taxe d'habitation

- 1.500 F

Redevance TV

0

Redevance TV

- 735 F

Cantine

0

Cantine

- 2.040 F

Bus scolaire

0

Bus scolaire (77 x 12)

- 924 F

Bus adulte

0

Bus adulte

- 2.340 F

Aide médicale

0

Mutuelle (195 x  12)

- 2.820 F

EDF comprise aide sociale

1.500 F

EDF comprise aide sociale

0

Garde d'enfant

Garde d'enfant

- 10.000 F

Aide financière alimentaire

3.600 F

Total

57.540 F

Total

53.993 F

Situation concrète citée par Horizons politiques, n° 65, février 2000, page 2.

Bien sûr, les calculs financiers ne tiennent pas toujours devant les avantages moraux liés au retour à l'emploi : le travail n'est pas qu'une question financière et recouvre une dimension sociale essentielle aux yeux de beaucoup. Il n'en reste pas moins que dans bien des cas ce retour au travail devrait pouvoir être mieux récompensé d'un point de vue financier. L'intérêt de la ristourne de CSG et de l'exonération de CRDS est alors d'augmenter le revenu net des actifs à faibles ressources, et donc de réduire la trappe à inactivité.

La seconde raison est la volonté qu'ont beaucoup de transformer la CSG en un nouvel impôt sur le revenu, en tout cas en un impôt progressif. Cette revendication n'est pas nouvelle. Elle était au coeur de l'argumentaire communiste dans son refus de la CSG lors de sa création en 1990. En effet, la CSG a été conçue comme un prélèvement proportionnel, à l'origine à faible taux et large assiette. Le taux a augmenté, l'assiette s'est à la fois élargie et complexifiée, mais le principe a demeuré jusqu'à l'année dernière. En effet, au cours de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, les députés ont relancé le débat de l'absence de progressivité de la CSG. Avaient alors été émises deux idées : la création d'un seuil minimum de 500 francs au titre des 5% d'abattement pour frais professionnels réalisé sur la CSG et le relèvement de 160 à 400 francs du seuil de perception. Cette dernière proposition a été retenue. A l'occasion de l'examen de l'article, votre rapporteur pour avis avait fait part de son inquiétude devant " le spectre de la progressivité de la CSG " .

Cette progressivité est donc aujourd'hui d'actualité avec l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, révélant que les craintes de votre commission des finances étaient fondées. Cette progressivité, si elle venait à être établie comme proposée, serait une mesure dangereuse et perverse, la CSG n'étant pas le support fiscal de la progressivité, rôle qui revient à l'impôt sur le revenu (voir infra ).

La troisième raison, la moins avouable pour le gouvernement, est la nécessité qu'il y a à calmer les tensions qui se font jour pour demander une hausse des salaires.

En effet, effet pervers ou contrepartie des 35 heures, la hausse des coûts salariaux pour les entreprises ne s'accompagne pas d'une amélioration des revenus des salariés à la hauteur de leurs espérances et de la croissance économique. La réduction et l'aménagement du temps de travail ont pour contrepartie un moindre volume d'heures travaillées qui se traduit pour ceux qui sont rémunérés à un salaire horaire, et même avec la hausse de ce dernier, par un revenu global stagnant voire baissant. Quant aux salaires mensuels, ils ne connaissent qu'une hausse modérée.

La majorité plurielle se retrouve ainsi confrontée à ses propres ambiguïtés et aux effets pervers de la mesure phare et coûteuse des 35 heures.

Or, il y a un vrai danger inflationniste à lâcher la bride sur les salaires. La seule solution pour apaiser les tensions revenait alors à améliorer le revenu net des salariés en jouant sur les prélèvements obligatoires et donc les prélèvements sociaux puisque pour nombre d'entre eux ils constituent la quasi totalité des prélèvements directs qu'ils acquittent.

L'exonération de CSG n'est alors plus une baisse globale et une réforme des prélèvements obligatoires. Elle est faite pour le gouvernement avec comme objectifs d'accentuer l'écart entre travail et minima sociaux, d'ajouter une dose de progressivité et de redonner du pouvoir d'achat aux salariés lésés par les 35 heures.

Votre commission estime quant à elle que ces raisons d'affichage sont soit de mauvaises raisons soit la face émergée d'un iceberg bien plus pervers et dangereux qu'il n'y paraît.

B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

1. Une mesure complexe

La mesure proposée par le gouvernement heurte d'abord par sa complexité.

Cette complexité se lit dans le mécanisme proposé : il ne faut pas moins de 24 alinéas pour mettre en oeuvre la ristourne dégressive de CSG, prendre en compte toutes les situations élaborer des méthodes de calcul différentes, etc. L'aménagement réalisé par l'Assemblée nationale, en l'étendant à 1,4 SMIC, ne facilite pas non plus la lecture et la réalisation de projections. Bien malin le salarié gagnant 1,15 SMIC qui saura calculer sa ristourne de CSG !

De plus, le plan du gouvernement annonçait une ristourne dégressive totale d'ici à 2003, mais égale aux deux tiers en 2002 et au tiers en 2001, soit une " ristourne dégressive progressive " en quelque sorte. Or le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001 prévoit la mesure pour les années 2001 et 2002, mais pas pour l'année 2003 ce qui peut paraître étonnant. Où est la cohérence du gouvernement quand le ministre de l'économie annonce un plan d'ici à 2003, et quand la ministre de l'emploi et de la solidarité reprend la même annonce, alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui en est la traduction juridique ne va que jusqu'en 2002 ?

La complexité se lit ensuite dans les acrobaties de transferts de recettes auxquelles donne lieu la mesure (voir supra ). La CSG sera compensée à la CNAMTS, au FSV et à la CNAF pour 2001. Pour mettre en place une mesure complexe, le gouvernement brouille un peu plus les flux de financement de la protection sociale puisqu'il affecte une partie de la taxe sur les conventions d'assurance. Cette répartition a d'ailleurs été augmentée pour tenir compte de l'extension de la mesure, dans l'attente d'une hausse de la taxe sur les conventions d'assurance dans le projet de loi de finances. Ainsi, la CNAMTS touchera 20,8 % de cette taxe, le FSV 4,6 % et la CNAF 4,4 %, pour un montant total de 8,5 milliards de francs en 2001 (auxquels il faudra ajouter le coût des exonérations de CRDS).

D'un point de vue technique, la solution adoptée par l'Assemblée nationale met en exergue les problèmes d'articulation de la loi de financement et de la loi de finances : pour compenser la perte supplémentaire de recettes pour la sécurité sociale, il a fallu augmenter les clefs d'affectation de la taxe sur les conventions d'assurance à leur profit. Cependant cette nouvelle répartition du produit se fait au détriment de l'Etat. Pour que l'extension soit neutre pour lui, il faudra augmenter le taux de la taxe en loi de finances. Une fois de plus est démontrée l'absurdité à laquelle peut conduire l'articulation des mesures d'affectation de recettes entre l'Etat et la sécurité sociale.

De plus, le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne prévoit pas la compensation pour 2002 ni a fortiori la compensation pour 2003 . La raison en est connue et tient au caractère annuel des mesures d'affectation de recettes contenues dans le projet de loi de finances.

La mesure d'exonération est donc prévue jusqu'en 2003 par le gouvernement, inscrite jusqu'en 2002 comme perte de recettes dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et compensée pour la seule année 2000 en projet de loi de finances. La cohérence de l'ensemble échappe à votre rapporteur pour avis.

Quelle cohérence dans le discours et les textes de règlement ?

Texte

Etapes de la mesure

Annonces du Gouvernement

2001, 2002 et 2003

Mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale (article 2)

2001 et 2002
quid de 2003 ?

Compensation des pertes de recettes par la sécurité sociale par l'article 17 du projet de loi de finances et l'article 11 du projet de loi de financement

2001 seulement
quid de 2002 et 2003 ?

Cette mesure passe sous silence les difficultés auxquelles elle va donner lieu, qu'il s'agisse de l'ensemble des logiciels de salaires et des procédures de recouvrement de la CSG à modifier ou bien tout simplement des pertes de recettes induites pour les organismes de sécurité sociale par la dynamique différente de la ressource CSG et des impôts et taxes affectés pour en compenser la réduction.

2. Une mesure dangereuse

La ristourne dégressive sur la CSG constitue en réalité, par les mécanismes qu'elle met en oeuvre, une mesure dangereuse : elle risque de susciter des trappes à pauvreté, elle remet en cause les principes qui fondent cette imposition, elle altère les bases mêmes de notre système de sécurité sociale.

Le premier danger de la mesure est le risque évident de trappe à bas salaires. Certes, l'article 2 entend remédier aux situations de trappes à inactivité engendrées par les superpositions auxquelles donne lieu notre système de protection sociale et de minima sociaux. Cependant, à vouloir, à juste titre, tirer de l'inactivité, elle risque d'enfermer les bénéficiaires dans des " trappes à pauvreté " tout aussi redoutables.

En effet, la très forte dégressivité de l'aide apportée par l'exonération, dans le projet initial du gouvernement comme dans celui résultant des débats à l'Assemblée nationale, fait légitimement craindre que les ménages soient incités à demeurer dans une logique de bas salaires. D'abord, les entreprises risquent d'intégrer cet apport de revenu net dans la détermination de leur politique salariale, déjà modérée en raison des 35 heures et des aides qui les accompagnent. Ensuite, il y aura moins d'intérêt à chercher à élever son revenu, l'exonération de CRDS et la ristourne de CSG jouant comme un frein à la hausse. En effet, plus le salaire s'éloignera du SMIC, plus la hausse marginale sera mangée par la perte de l'avantage de CRDS et CSG. Entre 1 et 1,4 SMIC, il faudra que l'entreprise verse plus de trois fois ce qu'elle voudrait que le salarié perçoive.

Or la France connaît déjà des difficultés croissantes liées à l'existence d'un nombre important de travailleurs pauvres, ainsi que vient de le démontrer une étude publiée par l'INSEE 26 ( * ) . Elle estime à 1,3 million le nombre de personnes actives ayant travaillé au moins un mois dans l'année et dont le niveau de vie, prestations sociales comprises, est inférieur au seuil de pauvreté 27 ( * ) , soit 6 % de l'ensemble des actifs. Avec leurs proches, le nombre atteint 2 millions de personnes. La pauvreté se retrouve surtout chez ceux alternant des emplois à durée déterminée et des périodes de chômage, dans les foyers où un seul conjoint travaille et dans les familles nombreuses.

Ainsi, Jaques Delors faisait état de son inquiétude devant tout ce qui peut empêcher les salaires de progresser : " il ne faut pas empêcher les salaires d'augmenter " 28 ( * ) . De toute évidence le mécanisme proposé par le gouvernement, notamment en raison de son amplitude trop réduite, va dans le mauvais sens. Il remplace la trappe à inactivité par une trappe à pauvreté.

Le second risque a trait à l'essence même du prélèvement que constitue la CSG. Il a été conçu avec l'idée simple de donner à la France un outil fiscal de financement de la protection sociale qui ne porte pas sur les seuls salaires mais élargi à l'ensemble des revenus. Comme l'écrivait le Conseil des impôts en 1995 29 ( * ) , " la création d'un nouvel impôt n'est pas chose courante et on peut a priori, se demander pourquoi la nécessité a été ressentie d'ajouter aux deux prélèvements déjà existants sur les revenus des ménages (l'impôt sur le revenu et les cotisations sociales) un troisième prélèvement. On pressent que la raison n'est pas seulement financière - s'il s'était agi de procurer des ressources supplémentaires, une hausse des prélèvements classiques aurait suffi - mais qu'elle se trouve dans une réflexion sur la structure des prélèvements : si on a créé un nouveau prélèvement, c'est pour éviter - voire atténuer - les inconvénients qui s'attachent aux prélèvements existants " . La CSG a été créée en réaction contre les cotisations sociales et l'impôt sur le revenu . Son objectif était donc de ne pas encourir les critiques vives dont ces prélèvements faisaient et font toujours l'objet.

On ne peut nier que cet objectif a été pleinement atteint. Le Conseil des impôts le confirme dans son dernier rapport 30 ( * ) : " Outre la modernisation du financement de la protection sociale, la création de la CSG et de ses impositions additionnelles [la CRDS et le prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine] avait aussi pour but de réformer profondément l'imposition des revenus. L'assiette de la CSG est plus large que celle de l'impôt sur le revenu et prend mieux en compte l'ensemble des revenus et l'évolution de leur structure. La CSG a permis en particulier un rééquilibrage de la fiscalité du capital par rapport à celle du travail. Elle a également servi de compensation à la forte concentration de l'impôt sur le revenu, dotant la France de l'imposition sur le revenu moderne qui lui faisait défaut jusqu'alors, à assiette large et fort rendement. La CSG a enfin permis de rééquilibrer la part des impôts par rapport aux cotisations sociales dans les prélèvements directs, rapprochant progressivement la situation française de celle que l'on observe dans les autres pays de l'OCDE. "

On ne peut non plus nier que cet objectif et ce succès de la CSG sont considérablement remis en cause par le projet de réforme. En dix ans, la CSG est devenue la première imposition de France, rapportant plus que l'impôt sur le revenu. Elle est aussi devenue la deuxième source de financement de la protection sociale française. La substitution de la CSG aux cotisations sociales maladie des salariés en 1998 a accentué une évolution saine, qui revenait à progressivement déconnecter le financement de la protection sociale à la seule masse salariale. La valeur du point de CSG n'a ainsi pas cessé d'augmenter, montrant bien le dynamisme de la ressource et la garantie qu'elle représente pour l'équilibre des comptes sociaux.

Valeurs de point de la CSG

(en milliards de francs)

1999

Prévision 2000

Prévision 2001

maladie

CNAF

FSV

maladie

CNAF FSV

maladie

CNAF/FSV

TOTAL

48,9

48,9

48,9

51,0

51,0

53,3

53,3

Revenus d'activité

34,3

34,3

34,3

35,4

35,5

37,1

37,2

Revenus de remplacement

8,6

8,2

8,1

9,6

9,1

9,9

9,4

Divers

0,2

0,2

0,2

0,0

0,0

0,0

0,0

Revenus du capital

5,2

5,4

5,5

5,3

5,5

5,5

5,8

Revenus des jeux

0,2

0,2

0,2

0,2

0,2

0,3

0,3

DOM

0,5

0,6

0,6

0,6

0,6

0,6

0,6

Source : CSSS 09 2000

Il serait erroné de croire que la CSG est l'impôt le plus pur et le plus proportionnel qui soit. Il n'a pas fallu longtemps pour y instiller des exonérations, abattements, des taux différents, la complexité de la déductibilité partielle, etc. De même, il convient de rappeler, à l'instar du Conseil des impôts 31 ( * ) , que la CSG et la CRDS possèdent une dose de progressivité : " la CSG, la CRDS et le prélèvement social de 2 % sur les revenus sont généralement présentés comme des impôts proportionnels. Ces impositions sociales constituent en réalité un prélèvement faiblement progressif, ceci davantage chez les retraités que chez les actifs. Cette progressivité résulte surtout des exonérations de CSG portant sur les indemnités de chômage et les pensions de retraite des contribuables modestes (45 % des retraités, 25 % des préretraités et 88 % des chômeurs indemnisés par l'Unedic sont exonérés de CSG), qui réduisent fortement le prélèvement pour les trois premiers déciles de l'échelle des revenus chez les actifs, et pour les six premiers déciles chez les retraités. Une légère progressivité se maintient en haut de l'échelle des revenus grâce à l'ajout du prélèvement social sur les revenus du patrimoine. Ces revenus sont en effet fortement concentrés dans les déciles supérieurs. "

Ne faut-il pas cesser de toucher à la CSG qui est déjà un peu progressive et un peu complexe ? Il ne faudrait pas détruire un instrument efficace et moderne pour corriger les imperfections dont souffre l'impôt sur le revenu ou le système des minima sociaux. Ce n'est pas en instaurant de nouveaux biais que l'on corrigera les précédents. D'autant que le mécanisme proposé recèle des effets pervers nombreux et dangereux. Bref, il ne faut pas lâcher la proie pour l'ombre et, comme s'apprête à le faire le gouvernement, tuer la CSG. C'est d'ailleurs l'avis du Conseil des impôts.

L'avis du Conseil des impôts :
" Préserver la simplicité de la CSG "

S'agissant de la CSG, le Conseil des impôts estime qu'il reste nécessaire de ne pas personnaliser cet impôt.

Il serait notamment dangereux, quelles que soient les vertus économiques présumées d'une telle réforme, de créer un abattement sur la CSG 32 ( * ) . Un tel dispositif serait complexe à gérer. Il introduirait une nouvelle règle d'assiette pour les employeurs. Il serait nécessaire de réduire le montant de l'abattement au prorata du temps de travail dans le cas du travail à temps partiel, des congés maladie ou lorsqu'un salarié travaille pour plusieurs employeurs. En outre, il serait sans doute difficile de réserver cet avantage aux seuls revenus salariaux et de ne pas l'étendre aux pensions, aux revenus des non salariés, voire aux revenus de l'épargne.

Surtout, une telle réforme constituerait un précédent contestable, remettant en cause la nature même de la CSG. Il est en effet particulièrement difficile de personnaliser la CSG, imposition cédulaire qui ne prend pas en compte le revenu global du foyer fiscal mais uniquement les revenus catégoriels pris isolément. Un abattement sur la CSG pourrait ainsi créer une situation inéquitable entre les couples bi-actifs, bénéficiant de deux abattements, et ceux où l'un des conjoints seulement est actif. Il faudrait aussi veiller à ce qu'un salarié ne bénéficie pas d'autant d'abattements que d'employeurs. La création d'une franchise sur la CSG, avec pour objectif de rendre cette imposition progressive, supposerait donc des régularisations a posteriori pour prendre en compte la capacité contributive du foyer fiscal, ce qui n'est guère envisageable techniquement.

Il est en revanche toujours possible de s'interroger sur le taux d'imposition de la CSG. La cotisation de CSG est désormais supérieure à celle d'impôt sur le revenu pour plus de 90 % des contribuables. Compte tenu de l'affectation exclusive de la CSG à des dépenses sociales, il ne serait pas anormal que les éventuels excédents de recettes sociales que la croissance économique pourrait faire apparaître puissent être affectés à la baisse du taux de la CSG. L'avenir de la CRDS et du prélèvement de 2 % sur les produits de l'épargne pourrait également être revu dans ce cas de figure.

Par ailleurs, le gouvernement a-t-il bien conscience de la direction qu'il prend à rendre ainsi un peu plus progressive la CSG ? En assimilant davantage cette dernière à un impôt il renforce la tendance à l'étatisation de la protection sociale. La CSG deviendra un élément de stratégie fiscale au lieu d'être une variable d'ajustement de l'équilibre des comptes sociaux.

De plus, le gouvernement a-t-il oublié la grande réforme qu'il a fait adopter, il y a trois ans, de substitution entre la CSG et les cotisations maladie des salariés ? Par cette réforme, il a fait passer le lien entre l'assurance maladie et l'assuré des cotisations sociales à la CSG. C'est le fait de payer cette dernière qui donne lieu à l'établissement des droits. En exonérer certains salariés c'est couper le lien qui les relie à l'assurance maladie et, ainsi, étatiser davantage cette dernière. La progressivité de la CSG, en réduisant le nombre de Français payant la CSG, aura pour conséquence de faire en sorte que des millions de Français ne cotiseront plus à l'assurance maladie. Ils garderont certes leurs droits mais c'est l'Etat qui acquittera leur cotisation par le biais du transfert de recettes fiscales. La réforme proposée par le gouvernement est donc une étape supplémentaire vers une étatisation de la sécurité sociale et la mort du dialogue social. Là réside probablement le plus grand danger de la réforme.

Car les conséquences qui suivront sont faciles à imaginer : exonérations plus grandes, fiscalisation croissante de l'assurance maladie, mise progressive sous condition de ressources de certaines de ses prestations, développement de mécanismes privés destinés à combler les trous ainsi ouverts, etc. Est-ce vraiment cela que souhaitent le gouvernement et la majorité parlementaire qui le soutient ?

3. Une mesure injuste

La ristourne dégressive de CSG proposée par le gouvernement et la majorité de l'Assemblée nationale constitue à maints égards une mesure injuste, au point même d'entacher la mesure d'une interrogation sur sa constitutionnalité.

La première source d'injustice réside dans le choix de faire porter la hausse du revenu net sur la CSG. En effet, cette dernière est une imposition cédulaire, donc assise sur chaque source de revenu indépendamment de toute autre considération. L'imposition cédulaire présente notamment l'avantage d'être plus indolore et de permettre une perception à la source du prélèvement. Cependant, il a l'inconvénient d'empêcher tout mécanisme de progressivité puisqu'il ne prend pas en compte les autres revenus de la personne considérer ainsi que du foyer fiscal auquel elle appartient.

Ainsi, alors que deux conjoints occupant un emploi rémunéré au SMIC bénéficieront chacun de la ristourne, le ménage où un seul conjoint travaille mais gagne plus que 1,4 SMIC ne bénéficiera d'aucun allégement :

L'injustice entre ménages

Situation du foyer fiscal

Revenus annuels d'activité des ménages

Gain annuel de CSG et CRDS en 2003

- deux conjoints payés au SMIC

134.626

12.960

- un conjoint payé à 1,4 SMIC

94.238

0

- un conjoint payé à 2 SMIC

134.626

0

Ainsi, non seulement deux ménages percevant un revenu d'activité identique, dans la même situation de famille, auront l'un un avantage de 12.960 francs, l'autre un avantage nul, mais en plus deux ménages dont l'un perçoit davantage (40 %) de revenus d'activité que l'autre bénéficiera de 12.960 francs et l'autre rien. Comment nier une injustice aussi flagrante ?

La seconde source d'injustice provoquée par le mécanisme du revenu cédulaire est le cas des personnes occupant deux emplois à temps partiel par rapport à celui de celles qui n'en occupent qu'un seul à plein temps.

L'injustice entre actifs et pluriactifs

Situation d'activité

Revenus annuels d'activité

Gain annuel de GSG et CRDS en 2003

Un emploi à temps plein payé 1,4 SMIC

94.238 F

0

Deux emplois à temps partiel payé 0,7 SMIC chacun

94.238 F

9.072 F *

* 70 % de l'avantage obtenu pour un SMIC à temps plein soit 0,7 X 6.480 X 2 emplois.

Ainsi, pour un revenu d'activité strictement identique, fixé ici à 1,4 SMIC, une personne employée à temps plein ne bénéficiera d'aucun avantage alors qu'une autre employée à deux endroits différents à temps partiel se verra exonérée de CSG et de CRDS soit un avantage de plus de 9.000 francs. Comment nier cette autre injustice ?

Votre rapporteur pour avis pourrait enfin aussi évoquer le cas des familles. Le mécanisme du gouvernement ne prend aucunement en compte les charges de famille. Ainsi, si on rapporte l'avantage aux unités de consommation du foyer, les différences révèlent une nouvelle injustice.

Gain annuel de CSG et de CRDS en 2003

par unité de consommation pour un foyer gagnant 1 SMIC

Foyer

Gain/unité de conservation

Célibataire

6.480 F

Couple sans enfant

4.320 F

Couple avec 1 enfant

3.600 F

Couple avec 2 enfants

3.085 F

Couple avec 3 enfants

2.700 F

Hypothèses :

un seul des conjoints travaille et gagne 1 SMIC

les enfants ont moins de 14 ans

coefficients : 1 pour le 1 er adulte, 0,5 pour le second, 0,3 par enfant de moins de 14 ans.

Là aussi, cette mesure apparaît fondamentalement dirigée contre les familles puisque pour un même revenu, le gain est identique quelle que soit la composition du foyer. Belle progressivité que celle proposée par le gouvernement qui ne prend en compte ni la situation de famille ni les autres ressources du ménage !

Toutes ces injustices, singulièrement la seconde puisqu'elle concerne des personnes dans une situation de revenus et de famille strictement identiques, font émettre des doutes sur la constitutionnalité du dispositif. Le rapporteur de la commission des affaires culturelles a reconnu ces difficultés au cours des débats à l'Assemblée : M. Alfred Recours a ainsi indiqué à notre collègue M. Charles de Courson qui soulevait la question " Nous ne nous en sortirons pas sans faire un montage très compliqué. (...) Sur le fond, vous soulevez un vrai problème, mais en l'état actuel des choses, nous n'avons pas d'autres solutions que celles que je viens d'indiquer " 33 ( * ) . En revanche, le gouvernement s'est distingué par son silence complet, Mme Elisabeth Guigou se contentant laconiquement de remarquer que " les services avaient vu le problème et qu'ils y travaillent " 34 ( * ) . Votre rapporteur pour avis n'insistera pas sur le peu de considération du Parlement que ce silence manifeste.

Le gouvernement joue ici à l'apprenti sorcier et risque bientôt de se mordre les doigts de cette mesure mal préparée, mal conçue, mal négociée, mal coordonnée avec le reste du système fiscal français, dangereuse pour la sécurité sociale, porteuse d'inégalités fortes dont il devra se justifier.

Le Sénat prendra ses responsabilités pour proposer une solution alternative de nature à atteindre certains des objectifs du gouvernement en préservant et en consolidant la sécurité sociale dans laquelle il voit, lui, un élément essentiel du contrat social français.

C. LA PROPOSITION DE VOTRE COMMISSION

1. Un objectif partagé

Votre rapporteur pour avis entend affirmer un double souci : d'une part celui de lutter avec force contre les trappes à inactivité, ensuite celui de redonner du pouvoir d'achat aux salariés les plus défavorisés.

La volonté de lutter contre l'inactivité a ainsi été illustrée par la proposition de loi portant création d'un revenu minimum d'activité déposée par le président et le rapporteur général de votre commission des finances, le 25 avril dernier 35 ( * ) .

La proposition de loi créant un revenu minimum d'activité (RMA)

Il s'agit de promouvoir l'insertion, non par l'assistance, qui a fait preuve de son inefficacité -le nombre de titulaires du RMI ne cesse de progresser malgré la décrue du chômage- mais par l'activité, un vrai travail salarié.

Le RMA comporterait deux parts :

- la première, appelée aide dégressive, correspondrait au minimum social ou à l'allocation perçus jusqu'alors par le bénéficiaire ;

Elle serait versée par l'Etat, ou l'UNEDIC pour l'ASS, aux entreprises qui, à leur tour, l'utiliseraient pour rémunérer le nouvel embauché, ce dernier tirant ainsi l'ensemble de ses ressources de son employeur, au lieu de bénéficier d'un revenu d'assistance. Le versement à l'entreprise serait effectué de manière dégressive pendant trois ans. Le coût pour l'Etat ou l'UNEDIC n'en sera donc pas alourdi : au contraire, il ira en diminuant de manière graduelle. En outre, l'allocataire recevra ainsi la garantie que son revenu total ne diminuera pas suite à son retour sur le marché du travail.

- la seconde part, dénommée salaire négocié, correspondrait au salaire proprement-dit versé au nouvel embauché par l'entreprise ;

Son montant serait égal à la différence entre le montant total du RMA et l'aide dégressive mentionnée ci-dessus. Il serait donc appelé à progresser au fur et à mesure de la diminution de la première part. Il conviendrait d'exonérer de charges sociales le salaire négocié afin de s'inscrire dans une logique de diminution du coût du travail, qui a démontré son efficacité en termes de créations d'emplois.

L'ensemble, c'est-à-dire le RMA, serait ainsi versé au nouveau salarié par son employeur. Le montant du RMA ne pourrait être inférieur au SMIC, mais les négociations de branches pourront librement décider de l'établir à un niveau supérieur.

L'élément central du dispositif proposé consiste à donner aux entreprises un rôle actif dans sa mise en oeuvre, la proposition de loi étant conçue comme un dispositif-cadre, et non comme un mécanisme centralisé et uniforme.

Le RMA prendrait la forme d'une convention tripartite entre l'entreprise, le bénéficiaire du dispositif, et l'Etat ou l'UNEDIC lorsqu'il s'agit de l'ASS.

- l'Etat ou l'UNEDIC, verserait l'aide dégressive ;

- l'entreprise reverserait à son nouveau salarié cette aide dégressive à laquelle elle ajouterait sa propre participation, le tout constituant la rémunération du nouvel embauché, dont le niveau ne pourrait être inférieur au SMIC ; surtout, une large place serait laissée à la négociation entre les partenaires sociaux, par exemple au niveau des branches : cette négociation permettra d'adapter le dispositif aux réalités de chaque secteur d'activités, mais aussi d'arrêter les modalités de son application à la situation familiale des personnes concernées ;

- enfin, le bénéficiaire, en sortant de la spirale de l'inactivité et de l'assistance, serait en mesure de former un projet professionnel mais aussi personnel et ne percevrait plus d'allocation directement de l'Etat ou de l'UNEDIC. Il toucherait de son employeur un vrai salaire pour un véritable emploi dans le secteur marchand.

Le RMA serait conçu comme devant profiter à tous : aux anciens bénéficiaires, qui verraient leurs revenus progresser et qui, surtout, sortiraient de l'exclusion grâce à l'emploi qu'ils retrouveraient ; à l'Etat et à l'UNEDIC, qui pourraient réorienter leurs dépenses d'indemnisation du chômage en les activant mais aussi en envisageant leur réduction graduelle ; aux entreprises, qui verraient baisser le coût du travail sur les bas salaires et, dès lors, devenir rentables certaines activités qui ne l'étaient pas nécessairement.

En définitive, c'est la société tout entière qui en retirerait un véritable profit, l'activité étant réhabilitée au détriment d'une assistance déresponsabilisante et n'offrant aucune perspective.

De même, il paraît nécessaire de faire un effort sur les revenus des salariés, à l'instar de ce que préconisait le Président de la République, M. Jacques Chirac, le 21 septembre dernier : " Je dis simplement que nous sommes dans une période de forte croissance où chacun sait que les recettes rentrent à flot dans les caisses de l'État, et que - je ne connais pas de précédent - malgré cela, le pouvoir d'achat du salaire mensuel n'augmente pas. Alors on sait très bien que c'est dû, notamment au blocage en quelque sorte des salaires provoqués par les lois sur les 35 heures. Il faut faire en sorte que ceux qui ont fait les efforts, il y a quelques années, et jusqu'à une époque récente, trouvent aujourd'hui la récompense de ces efforts dans une amélioration de leur pouvoir d'achat, le pouvoir d'achat de leurs salaires . "

Il s'agit donc sur le fond d'un objectif partagé avec le gouvernement. Mais les moyens proposés divergent complètement quant aux principes à suivre et aux outils à utiliser.

2. Des principes préservés

Votre rapporteur pour avis estime qu'un certain nombre de grands principes doivent être préservés et d'autres suivis pour l'établissement d'une telle réforme.

Le premier principe est qu'il ne faut en aucun cas toucher à la CSG et à la CRDS. Certes ces impositions ne sont pas sans défauts. Mais elles constituent des instruments modernes et bien adaptés au financement de notre protection sociale. Ils sont simples, ont une assiette large qui garantit une moindre sensibilité à l'évolution de la conjoncture économique et sont prélevés à la source. C'est aussi l'avis du Conseil des impôts : " la CSG est désormais l'impôt simple, recouvré à la source, à assiette large, à taux proportionnel et à fort rendement qui manquait en France. Sa place dans l'imposition des revenus s'est affirmée au fil des augmentations de son taux et de ses déclinaisons successives, avec la CRDS puis la contribution de 2 % sur les produits de l'épargne. " 36 ( * ) Ils matérialisent le lien entre les assurés sociaux et leur régime de protection sociale. Il serait trop imprudent d'y toucher.

Le second principe est de ne pas prendre en compte le revenu cédulaire mais l'ensemble des revenus d'activité du foyer fiscal considéré. Les effets pervers d'injustice sont en effet liés à cette utilisation du revenu cédulaire qui ignore les autres revenus que peut percevoir l'intéressé ainsi que, éventuellement, les autres membres de son foyer fiscal. Cela permet de supprimer le biais lié à la présence d'un ou de deux actifs au sein du ménage et l'injustice considérable qui pouvait en résulter. De même, le biais soulevé pour les pluri-actifs disparaîtrait. De plus, si les Urssaf ne peuvent pas connaître ces éléments de revenu global, l'administration fiscale le peut par le biais de la déclaration annuelle de revenus. Il suffit ensuite de préciser les revenus sur lesquels doivent porter la mesure, par exemple en les limitant aux revenus tirés de l'activité professionnelle ou en renvoyant aux articles du code de la sécurité sociale concernés par la CSG et la CRDS.

Par ailleurs, il semble essentiel de prendre en compte la diversité des situations de famille. Certes, la familialisation de la mesure peut apparaître comme facteur de complexité. Elle est cependant justifiée non seulement par le souci de ne pas défavoriser les familles par rapport aux célibataires, mais aussi par la nécessité de corriger les effets de la familialisation de nombre de minima sociaux. En effet, les études ont montré que les avantages supplémentaires liés au nombre d'enfants réduisent l'écart avec le revenu de l'activité qui, lui, n'est pas lié à la charge de famille, et donc accentuent l'effet de trappe à inactivité. Il y a ainsi un intérêt économique à avoir un avantage supplémentaire de gain de pouvoir d'achat pour les familles faute de quoi la mesure risquerait de ne pas atteindre le but recherché. Il ne s'agit pas d'avantager les familles mais d'adapter la mesure à la familialisation des avantages sociaux.

Parallèlement, votre rapporteur pour avis estime qu'il est nécessaire de lisser au maximum les effets de seuil pour éviter les risques de trappe à pauvreté. Or les lois sur les 35 heures ont déjà établi un seuil important autour d'un salaire de 1,8 SMIC. Il peut sembler justifié de reprendre ce seuil afin de ne pas les multiplier et d'avoir une gamme de revenus allant assez loin.

Votre rapporteur pour avis note d'ailleurs que le gouvernement et la majorité de l'Assemblée nationale souhaitaient pouvoir aller jusqu'à un tel niveau de revenus. Ils se sont heurtés au coût budgétaire de la mesure. Cependant, en ne prenant plus en compte que le revenu du ménage et en limitant les risques de fraude, il semble possible de dégager les sommes propres à financer une telle extension.

Enfin, il convient à tout prix de rester à l'intérieur du budget de l'Etat et de ne pas multiplier les flux croisés de recettes, de compensations, de passerelles entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale. De plus, cela permettrait de préserver la CSG, le lien social qu'elle représente et la dynamique des recettes de la sécurité sociale qu'elle engendre.

Votre rapporteur pour avis estime donc que, tout en gardant les objectifs de hausse du revenu net et de lutte contre l'inactivité, un système alternatif devrait reposer sur un autre instrument que la CSG, respecter l'égalité de chacun devant l'impôt, intégrer la dimension familiale et surtout rester à l'intérieur de la sphère de l'Etat.

Ainsi s'esquissent les bases du mécanisme que votre commission des finances, en accord avec votre commission des affaires sociales, vous proposera dans le cadre du projet de loi de finances pour 2001.

3. Un mécanisme novateur

Les bases du mécanisme alternatif reprennent les principes énoncés ci-dessus.

Votre rapporteur pour avis estime qu'il convient de renoncer à l'instrument de la CSG pour lui préférer un système relié à l'impôt sur le revenu. En effet, il part du principe que, chacun remplissant une déclaration de revenus, c'est à partir de cette dernière que l'on pourra le mieux appréhender les revenus globaux du ménage et donc à la fois supprimer les risques de fraude et, surtout, d'injustice.

Il faudrait ainsi mettre sur pied une nouvelle mesure de crédit d'impôt, destiné à favoriser la reprise d'activité. Il pourrait bien évidemment donner lieu à remboursement dans la mesure où il serait supérieur à la cotisation fiscale à acquitter. Ce système le rendrait compatible avec les règles de recevabilité financière des amendements dans la mesure où il s'agirait d'un remboursement d'impôt, considéré comme un dégrèvement 37 ( * ) .

Plusieurs paramètres détermineraient l'avantage ainsi consenti. Ce serait en premier lieu la différence entre le revenu d'activité et le plafond de revenu retenu pour la mesure, qui pourrait s'élever à 1,8 SMIC. Puis il conviendrait de corriger ce rapport pour ne pas obtenir une courbe linéaire mais y instiller une dose de dégressivité de nature à surtout favoriser la sortie de l'inactivité. On pourrait alors appliquer un coefficient dégressif selon que l'on s'éloigne du plancher de la mesure soit le SMIC. Il conviendrait ensuite de proratiser ce rapport selon le nombre d'heures travaillées dans l'année, rapporté à la durée annuelle légale du travail, notamment pour éviter de favoriser le travail à temps partiel. Enfin, il serait envisageable d'y adjoindre une majoration pour le nombre d'enfants à charge, tout en plafonnant l'avantage ainsi obtenu.

Bien évidemment, ce mécanisme calé sur l'impôt sur le revenu ne saurait trouver sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 mais dans le projet de loi de finances.

Pour cette raison, votre rapporteur pour avis laissera au rapporteur général de la commission des finances le soin, au cours de l'examen du projet de loi de finances pour 2001, de présenter une telle mesure dans ses détails. Il se contentera dans le cadre du présent avis de recommander la suppression de l'article 2 en esquissant, en accord avec votre commission des affaires sociales et ainsi qu'il vient de le faire, les grandes lignes d'une proposition alternative.

III. LES AUTRES MESURES DE RECETTES

A. LA CADES FRAGILISÉE

1. Les pertes de recettes de la CADES

a) Une mission, des ressources

La Caisse d'amortissement de la dette sociale a été instaurée par l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale avec la mission de prendre à sa charge et de rembourser le stock de la dette correspondant aux déficits cumulés de la sécurité sociale (120 milliards de francs pour 1994 et 1995, 17 milliards pour 1996, 75 milliards pour le solde de 1996 et 1997 et 12 milliards pour 1998), ainsi que de verser une recette non fiscale à l'Etat de 12,5 milliards de francs jusqu'au 1 er janvier 2009 (pendant, sans lien juridique, de la reprise de 110 milliards de francs de dette de l'ACOSS par l'Etat en 1993, pour le règlement desquels, d'ailleurs, la CSG avait été augmentée de 1,4 point). Le terme de sa mission est fixé à janvier 2014. Elle bénéficie de plusieurs ressources affectées :

• le produit de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), imposition à assiette large et taux faible (0,5%) ;

• le produit de la vente du patrimoine privé à usage locatif des caisses nationales du régime général et de l'ACOSS, hormis les locaux à usage administratif ;

• les produits financiers ;

• et, si la CNAMTS n'est pas en déficit, le produit des créances de celle-ci sur les Etats étrangers.

La CRDS a profité elle aussi de la bonne conjoncture économique et enregistré des rentrées importantes : 27,6 milliards de francs pour 1999, 28,7 milliards en 2000 et 28 milliards attendus en 2001. Le résultat de l'établissement devrait s'élever à 5,7 milliards de francs en 2000 et aurait dû être de 4,5 milliards de francs en 2001 en dehors des mesures d'élargissement des exonérations introduites par l'Assemblée nationale.

b) 52 milliards de francs d'exonérations cumulées

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001 contient de nombreuses dispositions relatives à la CRDS.

D'abord l'article 2 A introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des affaires culturelles, notre collègue Alfred Recours, s'est attaché à sécuriser l'assiette de la CRDS (et de la CSG) pour les professions dont les cotisations sociales sont établies de manière forfaitaires en retenant ce forfait comme assiette de la CRDS.

Ensuite, l'article 2 organise l'exonération progressive de CRDS (et de la CSG, voir infra ) des salariés dont le salaire est compris entre 1 et 1,4 SMIC. Le coût de cette mesure, non compensée par l'Etat, est de 625 millions de francs pour 2001, 1,25 milliard de francs pour 2002 et 1,875 milliard pour 2003.

L'article 3 exonère quant à lui, dès 2001, de CRDS les retraités et invalides pensionnés ainsi que les chômeurs et préretraités dont les allocations sont inférieures au SMIC brut. Le coût de cette mesure reste en question. Selon le rapport de l'Assemblée nationale, il resterait de 1,5 milliard de francs, le surcoût lié à l'extension étant compensé par la soumission à la CRDS de plusieurs revenus qui auraient été exonérés par le premier dispositif (retraités devenus non imposables par le biais des réductions d'impôt, pour 125 millions de francs) et par un gage. Or ce dernier a été levé en séance par le gouvernement, qui a indiqué cependant que " le déficit de ressources ainsi créé dans les comptes de la CADES devra être compensé " , sans davantage préciser ses intentions et sans que le texte issu des délibérations de l'Assemblée nationale ne les fournisse. Il semble donc bien qu'il y ait un surcoût - évaluable à environ 370 millions de francs - et que la CADES sera encore un peu plus fragilisée.

Enfin l'article 3 bis prévoit les mesures de coordination destinées à exonérer de CRDS les indemnités de cessation anticipée d'activité dont bénéficient les victimes de l'amiante en vertu du dispositif adopté dans la loi de finances rectificative pour 2000.

Ainsi, les mesures introduites par l'Assemblée en sus des dispositions prévues par le gouvernement devraient dégrader l'exercice 2001 de plus de 800 millions de francs, le ramenant à 3,7 milliards :

Résultat de la CADES pour 2001

(en milliards de francs)

Résultat prévu avant PLFSS

6,5

Coût des exonérations prévues par le gouvernement

2

Coût des exonérations prévues par l'Assemblée nationale

0,8

Résultat prévisionnel

3,7

L'ensemble de ces dispositions a donc un coût très important pour la CADES, coût amené à augmenter dans les années à venir, selon les intentions du gouvernement. Au total, en faisant l'hypothèse que le dynamisme de l'assiette est égal à la dépréciation des prix, le coût d'ici à janvier 2014, terme prévisionnel de la CADES, s'élèverait à plus de 52 milliards de francs :

Pertes totales de recettes pour la CADES

(en milliards de francs)

2001

2002

2003 à 2013

Total

Exonération pour les salariés jusqu'à 1,4 SMIC

0,625

1,25

1,875 x 11 = 20,625

22,5

Exonération pour les retraités, invalides pensionnés, préretraités et chômeurs, jusqu'à 1 SMIC

2,184

2,256

2,313 x 11 = 25,443

29,383

Total

2,809

3,506

46,068

52,383

Hypothèse : taux d'actualisation = taux d'évolution de l'assiette

2. Un dispositif dangereux et injuste

a) Le danger : fragiliser la CADES

Le gouvernement justifie l'absence de compensation des pertes de recettes de la CADES par les prévisions d'un remboursement anticipé de la dette sociale, " libérant " ainsi en quelque sorte de la CRDS devenue inutile...

La bonne santé financière de la CADES est en effet préservée. Elle tiendrait à un double phénomène, la bonne tenue des recettes de CRDS et la baisse des taux d'intérêt, qui limite les frais financiers.

La CRDS a bénéficié à plein de la bonne conjoncture économique, son assiette quasiment universelle la faisant profiter de toute bonne nouvelle.

Rendement de la CRDS depuis 1996

1996

1997

1998

1999 (2)

2000 (1)

2001* (1)

Rentrées de CRDS

(en milliards de francs)

21

25,4

26,4

27,1

28,7

29,6

Evolution (en %)

-

+ 21 %

+ 3,9 %

+ 2,6 %

+ 5,9 %

+ 3,1 %

* Hors mesures d'exonérations des plfss 2001.

(1) Prévision

(2) Non compris 0,44 milliard de francs de créances nettes à recouvrer

Source : CADES

Simultanément, la CADES a mené une politique d'emprunt dynamique, profitant à la fois d'une garantie quasi-identique à celle de l'Etat français, et de la possibilité de mener les opérations financières les plus modernes : emprunts à taux variable, emprunts indexés sur l'inflation, emprunts en devises, politique de swaps , produits sophistiqués, allongement progressif de sa dette, etc. Elle a pu profiter des mouvements à la baisse des taux d'intérêt et, au 15 mai 2000, sa duration était de 4,6 ans et le coût actualisé de sa dette de 5,01 %.

La conséquence de ce double mouvement de dynamisme des recettes et de maîtrise des dépenses a été une amélioration des perspectives de remboursement complet de la dette. Une étude récente 38 ( * ) montre ainsi que selon les hypothèses adoptées pour l'évolution des recettes et le niveau des taux d'intérêt, le remboursement total pourrait être achevé autour de 2010. Les rapporteurs du projet de loi de financement de la sécurité sociale à l'Assemblée nationale semblent quant à eux avoir retenu le terme de 2012.

Cependant, on ne peut manquer de trouver les mesures d'exonération dangereuses. L'effet de ciseaux dont a bénéficié la CADES pourrait ainsi connaître un renversement de tendance : qui peut affirmer que la France est à l'abri dans les douze ans à venir d'un retournement de conjoncture ? qui peut soutenir que dans le même temps les taux resteront à leur niveau actuel ? Un point de hausse de taux sur une dette de plus de 200 milliards de francs sur plusieurs années aurait un coût très élevé et ne constitue pas une hypothèse irréaliste.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis tient à exprimer son scepticisme devant les projections favorables sur la clôture de la CADES. Aujourd'hui, sur 28 milliards de francs de recettes, 11 milliards de francs servent aux lois de finances, 12,5 milliards de francs sont versés à l'Etat et seul le solde va au remboursement du capital, qui dépasse les 200 milliards.

Si la ressource du CRDS baisse, et le gouvernement s'y emploie, l'équilibre du dispositif sera remis en cause. Le risque n'est pas à écarter.

De plus, les mesures introduites dans ce projet de loi, parce qu'elles brisent un tabou -jusqu'à maintenant toucher à la CADES ne s'était fait qu'avec un allongement concomitant de sa durée de vie- et qu'elles privent la CADES de ressources considérables risquent d'être très mal perçues par les marchés financiers et donc de renchérir le coût de la dette et d'accentuer les conséquences sur la durée de remboursement.

Il semble donc encore prématuré, présomptueux et irresponsable de mettre en péril l'équilibre financier déjà fragile de la CADES ainsi que le fait le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

b) L'injustice

Les promoteurs de la mesure initiale et les pères de son élargissement à l'Assemblée nationale les justifient par un souci de justice fiscale : l'exonération permettrait d'introduire une dose de progressivité dans la CRDS et d'en exonérer les plus bas revenus.

Si l'argument peut valoir politiquement, sa mise en oeuvre technique dans le texte est fortement douteuse.

D'abord, parce que la mesure risque d'engendrer les mêmes distorsions que celles que pourrait causer la ristourne dégressive sur la CSG (voir infra ). En effet, le projet de loi raisonne en termes cédulaires, c'est-à-dire par revenu, la CRDS étant prélevée à la source. Mais, combiné aux différents seuils, ceci est source d'inégalités fortes : le titulaire de deux emplois qui bénéficie de deux revenus inférieurs, chacun, aux seuils sera exonéré sur ces deux revenus, alors que celui qui gagne un seul revenu égal aux deux précédents ne le sera pas. De même, une famille où le père et la mère occupent un emploi payé au SMIC en bénéficiera deux fois, alors que celle où seul l'un d'entre eux travaille, pour un salaire égal à deux SMIC, n'aura aucune exonération. Il s'agit d'une distorsion trop forte pour être écartée d'un revers de main.

Ensuite parce que suite à l'élargissement de la mesure, l'exonération bénéficiera aux chômeurs et retraités jusqu'à un SMIC, mais aux actifs salariés jusqu'à 1,4 SMIC : un retraité smicard serait donc moins pauvre qu'un salarié gagnant plus que le SMIC ?

Enfin, parce que l'existence de ces seuils risque d'accentuer les phénomènes de trappes à bas salaires, voire, pour les chômeurs, de trappe à inactivité. La mesure devait accentuer l'écart de revenus entre ceux qui occupent un emploi et ceux qui en recherchent un ; voilà qu'après le passage à l'Assemblée nationale cet objectif ne peut plus être poursuivi.

Belle mesure de justice fiscale donc que cette exonération qui accentue les effets de seuil et crée des inégalités majeures, tout en fragilisant la CADES. Il s'agit bien d'une mauvaise mesure.

3. Une mauvaise mesure

a) Le débat faussé

Par ces exonérations de CRDS, le gouvernement et la majorité de l'Assemblée nationale remettent en cause un principe d'orthodoxie financière auquel tous les gouvernements s'étaient jusque là tenus : l'absence d'atteinte, même mineure, de la CADES sans en prolonger le terme. Lors de la réouverture de la CADES pour accueillir les déficits cumulés non prévus, en 1998, le gouvernement avait tenu à allonger en conséquence la durée de vie de la caisse de cinq ans. Si l'on pouvait alors critiquer le principe d'une réouverture, personne ne pouvait remettre en cause cet allongement destiné à rassurer les marchés et à éviter tout risque de non remboursement.

Cet allongement consistait par ailleurs en une hausse déguisée des prélèvements obligatoires, puisque l'on doit croire qu'à l'échéance des missions de la CADES, l'impôt qui les finance - la CRDS - disparaîtra.

Or, dans le cas présent, non seulement l'Etat ne met pas en place de mécanisme de garantie quant à la durée de vie de la CADES, mais en plus il argue de mauvaise foi d'une réduction des prélèvements obligatoires alors qu'il s'agit plutôt d'un report de prélèvements sur ceux qui paient la CRDS et s'en acquittent deux ans de plus.

En effet, priver la CADES de plus de 52 milliards de francs de recettes revient en réalité à en allonger le terme de plus de deux ans.

Dès lors, deux lectures sont possibles :

• ou la CADES devait avoir remboursé plus tôt que 2014 et alors ces 52 milliards correspondent au financement par ceux qui paieront la CRDS pendant deux ans de plus d'exonérations fiscales accordées à d'autres en 2000 ;

• ou la CADES ne tiendra pas ses engagements et ils devront être couverts soit par un nouvel allongement, c'est-à-dire un prélèvement supplémentaire de CRDS, soit par le budget de l'Etat et donc là aussi par le contribuable.

Il s'agit donc de discuter, des années avant qu'elle ne se produise éventuellement, de l'affectation de la ressource laissée disponible par une éventuelle bonne santé financière de la CADES et la suppression de la CRDS. Celle-ci devra disparaître avec la dette de la sécurité sociale portée par la CADES. Il en va de la responsabilité de l'ensemble de la classe politique devant les Français. Or ce projet de loi de financement de la sécurité sociale revient en fait à en prolonger la perception. Ce n'est pas acceptable.

Dans tous les cas de figure, il est faux de présenter cette mesure comme une baisse des prélèvements obligatoires : il ne s'agit ni plus ni moins d'un report de CRDS. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne prévoit donc pas une exonération de CRDS mais un transfert de la charge de CRDS. En tirer argument pour parler de baisse des prélèvements est non seulement un abus de langage mais un mensonge pour les Français.

b) D'autres leviers aux mains de l'Etat

Votre rapporteur pour avis, par ces considérations, n'entend pas remettre en cause l'objectif du gouvernement consistant à redonner du pouvoir d'achat aux salariés et retraités les plus défavorisés. Il s'agit là d'un objectif justifié. En revanche, la méthode choisie - baisse de la CSG et transfert de la charge de la CRDS - est d'autant plus critiquable et perverse qu'il existait d'autres solutions moins douloureuses et correspondant davantage à une baisse des prélèvements obligatoires.

Tout d'abord, l'Etat prélève toujours 12,5 milliards de francs sur la CADES, de manière plutôt indue puisque cette somme correspond à la reprise par le budget de l'Etat de 110 milliards de dettes de l'ACOSS en 1993, pour le financement desquelles la CSG avait été augmentée.

De plus, si l'Etat souhaite consentir des allégements de CRDS, il peut tout aussi bien les compenser pour la CADES par une diminution à due concurrence de ce prélèvement, dont, faut-il le rappeler, le caractère de recette non fiscale a permis tous les pilotages possibles. 39 ( * )

Enfin, votre rapporteur pour avis répète sa préférence pour un mécanisme plus souple et moins injuste d'allocation compensatrice de revenus (voir infra ) lié à l'impôt sur le revenu.

Pour toutes ces raisons, votre rapporteur pour avis estime qu'il serait nécessaire de supprimer du projet de loi de financement de la sécurité sociale l'ensemble des dispositions de nature à affaiblir la CADES et à alourdir la charge de ceux qui acquittent la CRDS.

B. LE FSV DÉPOUILLÉ

1. Le solde tendanciel du FSV

Le Fonds de solidarité vieillesse (pour sa première section 40 ( * ) ) est un établissement public administratif de l'Etat créé par la loi du 22 juillet 1993 et mis en place par le décret n° 93-1354 du 30 décembre 1993 intégré aux articles L 135-1 et R 135-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Il a pour mission " de prendre en charge les avantages d'assurance vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale ", parmi lesquelles :

• le minimum vieillesse ;

• les validations de périodes où les intéressés n'ont pas pu contribuer (service national, certaines périodes de chômage) ;

• les avantages liés à certaines situations (par exemple le nombre d'enfants).

Les charges liées au minimum vieillesse ont représenté en 2000 33,5 milliards de francs, celles liées aux validations de périodes à 42,1 milliards de francs. Au total, le FSV connaît une très bonne santé financière avec, hors mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, un excédent structurel :

Le compte du FSV en encaissements/décaissements (1 ère section)

(en millions de francs)

1997

1998

Evolution

1999

Evolution

2000

Evolution

2001

Evolution

RESSOURCES

71 697

75 524

+ 5,3 %

78 264

+ 3,6 %

78 707

+ 0,6 %

81 745

+ 3,9 %

CSG

57 999

60 786

+ 4,8 %

63 616

+ 4,7 %

66 269

+ 4,2 %

69 258

+ 4,5 %

Taxe sur les
boissons

12 119

11 982

- 1,1 %

11 739

- 2,0 %

5 404

- 54,0 %

5 669

+ 4,9 %

Taxe de prévoyance

1 507

2 652

+ 76,0 %

2 795

+ 5,4 %

2 839

+ 1,6 %

2 873

+ 1,2 %

CSSS

0

4 085

3 845

- 5,9 %

Produits financiers

72

103

+ 43,6 %

114

+ 10,3 %

110

- 3,5 %

100

- 9,1 %

EMPLOIS

72 479

73 694

+ 1,7 %

78 099

+ 6,0 %

73 351

- 6,1 %

71 977

- 1,9 %

Prestations de
prises en charge

35 263

35 880

+ 1,7 %

35 741

- 0,4 %

35 581

- 0,4 %

36 141

+ 1,6 %

Cotisations de prise en charge

38 644

37 424

+ 1,6 %

41 957

+ 12,1 %

37 386

- 10,9 %

35 465

- 5,1 %

Frais d'assiette

358

383

+ 7,0 %

391

+ 2,1 %

373

- 4,6 %

360

- 3,5 %

Fiscalité des paiements

14

7

- 50,0 %

10

+ 42,9 %

11

+ 10,0 %

11

-

Solde

- 782

1 830

165

5 356

9 768

Solde cumulé

2 399

4 229

4 394

9 750

19 518

Source : CCSS 09 2000

Les recettes perçues par le FSV n'ont cependant pas cessé de connaître des changements de périmètre. Le FSV bénéficie principalement de recettes fiscales pour un montant total en 2000 de 69,1 milliards de francs. Mais l'histoire de ces prélèvements est compliquée :

• le 1,3 % de CSG a été établi par la loi du 22 juillet 1993 ; il sera réduit à 1,15 % par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 ;

• les droits sur les alcools affectés en totalité (sauf ceux spécifiques à la Corse) au FSV en 1993 ont été réduits par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, par la loi de finances et la loi de financement pour 1999 et pourraient être supprimés par la prochaine deuxième loi de finances rectificative pour 2000 ;

• la taxe sur les contributions des employeurs pour le financement de prestations complémentaires de prévoyance a été attribuée au FSV à compter du 1 er janvier 1996 et a vu son taux augmenter par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 ;

• la fraction de la C3S a été ajoutée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.

A ces recettes à caractère fiscal, il convient d'ajouter les produits des placements du FSV. En effet, celui-ci peut placer ses disponibilités. En 1994, la plupart des placements se faisaient sous la forme de bons du Trésor négociables à intérêts précomptés. A partir de 1995 a été mise en place une gestion plus dynamique de la trésorerie sous la forme de pensions livrées, ainsi qu'une gestion au jour le jour de cette dernière à partir de 1996. En 2000, les placements du FSV lui ont rapporté 100 millions de francs.

Prélèvements fiscaux au profit de la première section du FSV

(en milliards de francs)

1999

2000

2001

CSG

63,7

66,3

61,1

Taxe sur les conventions d'assurance

-

-

1,2

Droits alcool

11,8

-

-

Taxe sur les contributions patronales à la prévoyance complémentaire

2,8

2,8

2,9

Prélèvement social de 2 %

-

-

2,3

Total

78,3

69,1

67,5

Source : Jaune " Bilan des relations financières entre l'Etat et la protection sociale, annexe au projet de loi de finances 2000

2. L'excédent ponctionné

Les articles 12, 22, 23, 24 du présent projet de loi de financement bouleversent complètement l'économie générale des recettes et dépenses de la première section du FSV.

a) 10,4 milliards de francs de pertes de recettes
(1) 7 milliards de francs de CSG en moins (article 12)

Le FSV bénéficie depuis 1993 du produit de 1,3 point de CSG. Cela représentait 90,4 % de ses recettes en 2000.

Cependant, pour compenser à la CNAMTS la perte de ses droits sur les tabacs (utilisés au financement des 35 heures à partir de 2001), l'article 12 du projet de loi de financement de la sécurité sociale minore la part de CSG attribuée au FSV de 0,15 point et affecte cette ressource à la CNAMTS.

Répartition de la CSG entre la CNAMTS et le FSV

Avant le plfss 2001

Après le plfss 2001

CNAMTS

part assise sur les revenus d'activité et d'épargne financière

5,1 % déductibles

5,25 % (dont 0,15 point non déductible)

part assise sur les revenus de remplacement des personnes imposables

3,8 %

3,95 %

FSV (CSG tous revenus)

1,3 %

1,15 %

Cela se traduit donc par un transfert de 7 milliards de francs de recettes du FSV vers la CNAMTS. Au passage, ce transfert brouille définitivement les liens entre les hausses de CSG, les organismes bénéficiaires et la déductibilité : la CSG de 1,3 % de 1993, non déductible, se justifiait théoriquement pour rembourser les 110 milliards de francs de déficits cumulés de la sécurité sociale (dette aujourd'hui reprise par la CADES avec la CRDS pour la rembourser). Le C du I en tire d'ailleurs les conséquences sur le code général des impôts en prévoyant une simple référence de 5,1 % pour la déductibilité de la CSG.

Outre les pertes de recettes pour le FSV, victime inconsciente des 35 heures, votre rapporteur pour avis soulignera une fois de plus la complexité liée à la déductibilité partielle de la CSG.

(2) 5,7 milliards de francs de droits sur les alcools en moins (article 11)

Le IV de l'article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 bouleverse une nouvelle fois l'affectation des droits sur les alcools pour en priver le FSV et affecter la part ainsi libérée au FOREC.

Ces droits sont nombreux :

• article 402 bis du code général des impôts (CGI) : droits de consommation des produits intermédiaires (titrant entre 16° et 22°) ;

• article 403 du CGI : droits de consommation sur les alcools (titrant au dessus de 22°) ;

• article 406 A du CGI : droits de fabrication sur les alcools ;

• article 438 du CGI : droits de circulation (vins, cidres, poirés et hydromels) ;

• article 520 A : droits sur les bières et les eaux.

Ils obéissent aussi à des régimes extrêmement complexes. Par exemple, les droits de l'article 403 perçus sur le territoire de la région corse reviennent à la collectivité territoriale de Corse. De même, le BAPSA bénéficie d'une infime partie de ces droits.

Le paragraphe IV de l'article 11 prévoit ainsi d'affecter au FOREC l'intégralité du produit des droits des articles 402 bis , 428 et 520 A du code général des impôts. Le FOREC bénéficiera aussi de 55 % du produit des droits de l'article 403, les 45 % restants demeurant au profit de la CNAMTS. Il s'agirait pour ces derniers de la troisième modification en un an et demi !

Changements de l'affectation des droits 403

1999 avant la loi CMU

1999 après la loi CMU

LFSS 2000

PLFSS 2001 (valable en 2000)

Régimes maladie
dont CNAMTS

40 %

40 %

-

-

CNAMTS

-

5 %

45 %

45 %

FSV

60 %

55 %

8 %

-

FOREC

-

-

47 %

55 %

Au total, le FSV devrait perdre 5,4 milliards de francs de recettes en 2000 et 5,7 milliards en 2001, au profit du FOREC.

Votre rapporteur pour avis ne peut que rester coi devant tant de contorsions :

• cette mesure est rétroactive ; elle réduit à zéro l'excédent du FSV ;

• elle le fait au profit des 35 heures ;

• en deux ans, ces droits auront été répartis de quatre manières différentes.

(3) 2,3 milliards de francs de prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine en plus (article 24)

L'article 24 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 modifie complètement la répartition du produit du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, en l'affectant en totalité à la vieillesse. Ainsi, la première section du FSV, qui n'en bénéficiait pas jusqu'à présent, en percevra 20 % (alors que la deuxième section qui bénéficiait de 49 % voit sa part passer à 50 %). Le pourcentage de la CNAVTS (30 %) reste inchangé. La CNAMTS (qui en percevait 8 %) et la CNAF (13 %) perdent tout bénéfice de cette taxe.

Il faut noter la vie agitée de ce prélèvement qui a été établi pour 1998, a vu sa répartition changer en 2000 et encore en 2001.

Changements de l'affectation du prélèvement de 2 %

Droit en vigueur en 1999

Loi de financement pour 2000

Loi de financement pour 2001

CNAMTS

28 %

8 %

0

CNAVTS

50 %

30 %

30 %

CNAF

22 %

13 %

0

FSV 1ère section

0

0

20 %

Fonds de réserve

0

49 %

50 %

Pour le FSV, cette nouvelle affectation devrait se traduire par un gain de 2,3 milliards de francs, venant atténuer un peu la rigueur des pertes précédentes. Sur la forme, votre rapporteur pour avis espère seulement que la prochaine loi de financement de la sécurité sociale n'apportera pas à nouveau son lot de changements.

Sur le fond, on ne peut que s'étonner de ces manipulations diverses et variées qui tendent en apparence à limiter les pertes de ressources des uns et des autres : plus il est brouillé, meilleur est le mode de financement des 35 heures, semble dire le gouvernement. Votre rapporteur pour avis n'est pas dupe de ces tours de passe-passe.

Par ailleurs, il s'interroge sur l'utilité de maintenir l'affectation à la CNAVTS de 30 % du prélèvement de 2 % alors que celle-ci verse ses excédents au fonds de réserve pour les retraites. Il est vrai qu'un transfert de la ressource vers ce dernier réduirait l'excédent apparent de la CNAVTS et donc celui du régime général. Bref, s'il n'est pas inutile pour le gouvernement de débudgétiser certaines dépenses et recettes pour afficher un objectif présentable d'évolution des dépenses de l'Etat, il préfère ne pas faire de même avec les recettes de la sécurité sociale de peur de dégrader un solde qui de toutes les façons le sera, mais a posteriori et donc après présentation à la presse...

b) 3,2 milliards de hausse des dépenses

Le projet de loi de financement ajoute aux validations dont le financement est pris en charge par le FSV deux nouveaux cas : le financement de la validation par les régimes complémentaires des périodes de chômage et de préretraite indemnisées par l'Etat ; et celui des périodes de perception d'allocations de cessation anticipée d'activité.

(1) Le financement de la validation par les régimes complémentaires des périodes de chômage et de préretraite indemnisées par l'Etat (article 22)

Depuis 1984 existe un litige assez lourd opposant l'Etat aux régimes de retraite complémentaire AGIRC et ARRCO au sujet des chômeurs et préretraités indemnisés par l'Etat (soit au titre des allocations du FNE, soit au titre des allocations de préretraite progressive, soit au titre de l'allocation de solidarité spécifique). Le protocole du 18 septembre 1984 avait prévu que l'Etat s'engageait à financer cette validation, sans que cet engagement soit suivi d'effet financier. Aussi les deux régimes ont-ils suspendu à partir du 1 er juillet 1996 l'octroi des points correspondants aux bénéficiaires. Le manque à gagner pour les régimes s'élevait en effet au début de 1999 à 9,5 milliards de francs, 7,5 milliards pour l'ARRCO et 2 milliards pour l'AGIRC, tandis que 20.000 cadres et 110.000 ressortissants de l'ARRCO étaient concernés.

Le 23 mars 2000, les partenaires sociaux et l'Etat ont signé un accord visant à mettre fin au différend. Il met en place un remboursement échelonné : les cotisations correspondant aux points inscrits, mais en attente de paiement, de juillet 1996 à décembre 1998, ont été remboursées en juillet 2000 (55 millions de francs pour l'AGIRC et 595 millions pour l'ARRCO). Pour les points inscrits avant 1996 et depuis le 1 er janvier 1999, le remboursement se fait à partir de 2001 à hauteur de 650 millions de francs par an pour l'AGIRC et 2,2 milliards de francs par an pour l'ARRCO jusqu'à extinction de la dette.

L'article 22 du projet de loi de financement de la sécurité sociale met à la charge du FSV le coût de ces validations passées et de celles à venir (coût réel des cotisations de l'année n-2 versé en année n). Au total, la charge pour le FSV est estimée à 2,9 milliards de francs en 2001.

(2) Le financement de la validation des périodes de perception d'allocations de cessation anticipée d'activité (article 23)

Le décret n° 00-105 du 9 février 2000 relatif à la cessation anticipée d'activité de certains travailleurs salariés a complètement revu le système des préretraites en limitant les aides financières apportés par l'Etat : elles ne peuvent plus excéder 50 % de la rémunération et sont réservées aux emplois pénibles et aux salariés ayant effectué une carrière particulièrement longue, avec un mécanisme modulé selon l'âge de l'intéressé. Pour bénéficier de l'aide de l'Etat, les entreprises doivent signer avec lui un accord d'aménagement et de réduction du temps de travail et relever d'un accord professionnel comprenant un dispositif de cette nature.

Le décret a ainsi prévu que les périodes de perception des allocations de cessation anticipée d'activité versées au sein des entreprises ayant conclu une telle convention avec l'Etat sont comptées comme période ouvrant droit à pension. Le FSV ayant la mission de financer ces validations prises en charge par la solidarité nationale, l'article 23 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 inclut donc ce cas dans les dépenses du fonds. Le dispositif est calé sur le système en place pour les allocations du FNE. Le dispositif est calculé sur une base forfaitaire.

Le FSV devrait ainsi voir ses charges augmenter de 300 millions de francs à ce titre, le gouvernement justifiant cette évolution par la baisse de 10,9 % des dépenses liées aux validations de période de chômage et de service national.

Au total, ce seront 3,2 milliards de francs de dépenses supplémentaires qui seront mises à la charge de la première section du FSV.

Votre rapporteur pour avis estime que si ces dépenses trouvent leur justification, elles conduisent indirectement à priver le fonds de réserve pour les retraites de 3,2 milliards de francs. Il considère donc que l'Etat aurait du prendre ses responsabilités et compenser au FSV ces nouvelles dépenses.

c) 16,1 milliards de francs détournés en deux ans

En 2000, en dehors des mesures proposées sur les droits sur les alcools, la commission des comptes estime que l'excédent du FSV aurait été de 5,4 milliards de francs. Le gouvernement a choisi : il a prélevé l'excédent du FSV pour tenter de boucler le financement des 35 heures plutôt que de l'affecter au fonds de réserve pour les retraites comme le prévoit le code de la sécurité sociale.

Pour 2001, la situation est pire puisque le FSV devrait perdre 7,4 milliards de francs de recettes par rapport à son solde tendanciel. Là aussi, le gouvernement a préféré le court terme inutile des 35 heures à l'urgence et à la réforme de long terme des retraites.

Le problème du FSV vient en réalité de la situation d'excédent structurel dans laquelle il se trouve. Avant les mouvements de recettes décrits ici, il bénéficiait d'un double mouvement favorable : des recettes dynamiques en raison de la croissance mais aussi de son assise large ; des dépenses orientées à la baisse. Le gouvernement a donc organisé un " siphonnage " en règle du FSV pour financer la priorité de sa politique : les 35 heures.

Le ponctionnement du FSV

(première section)

(en milliards de francs)

Excédent prévu pour 2000

5,4

Transfert du produit 2000 de la taxe sur les

- 5,4

Solde effectif 2000

0

Excédent prévu pour 2001

9,7

Transfert du produit 2001 de la taxe sur les boissons

- 5,7

Transfert de 0,15 point de CSG

- 7

Transfert d'une partie du 2 % sur les revenus du patrimoine

+ 2,3

Transferts de la CNAF

+ 2,9

Dépense AGIRC/ARRCO

- 2,9

Dépense allocation anticipée d'activité

- 0,3

Solde effectif 2001

- 1

Au total, alors que le FSV aurait dû connaître un excédent de 5,4 milliards de francs en 2000 et de 9,7 milliards de francs en 2001, il équilibrera ses comptes en 2000 et sera en déficit d'un milliard de francs en 2001 : 16,1 milliards de francs auront été détournés des retraites au profit des 35 heures.

C. DES AMÉNAGEMENTS PONCTUELS

1. Une réforme des cotisations sociales agricoles

Cette réforme a été inspirée par le récent rapport de nos collègues députés Béatrice Marre et Jérôme Cahuzac, paru au mois d'avril 2000 et qui concerne les adaptations à apporter à la fiscalité et au mode de calcul des cotisations sociales agricoles.

Les mesures contenues dans les articles 5, 5 bis (introduit par l'Assemblée nationale) et 6, visent à simplifier et à harmoniser les périodes de référence des revenus professionnels des agriculteurs soumis aux cotisations sociales, d'une part, à la CSG, d'autre part.

a) La simplification de l'assiette des cotisations des exploitants agricoles (articles 5 et 5 bis)

Les articles 5 et 5 bis du projet de loi de financement pour 2001 contiennent les dispositions relatives à cette simplification.

Actuellement, les cotisations sociales des exploitants agricoles peuvent être calculées, suivant les cas, sur quatre périodes de référence différentes, suivant que l'exploitant est soumis au régime fiscal du forfait ou du réel, et suivant qu'il est demeuré dans la formule par défaut d'une assiette lissée dans le temps ou qu'il a opté pour l'assiette d'une année donnée.

Le choix de ces différentes assiettes dépend en premier lieu du régime fiscal de l'exploitant. Depuis 1990, on constate une forte accélération du passage du forfait au réel. En outre, quel que soit le régime pour lequel ils ont opté, les exploitants demeurent très majoritairement dans le régime de l'assiette triennale.

Cette multiplicité d'assiettes entraîne des lourdeurs de gestion pour les caisses de mutualité sociale agricole sans que cela se traduise par un avantage significatif pour les exploitants.

C'est pourquoi, l'article 5 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale retient, quel que soit le régime fiscal, ou la moyenne des trois dernières années connues, (c'est-à-dire n-3, n-2 et n-1), ou l'année n-1. Le choix de l'année n-1 plutôt que n présente l'avantage de correspondre au dispositif en vigueur pour les non salariés non agricoles.

Les modalités d'application de l'exercice de l'option, en particulier le délai dans lequel celle-ci doit être formulée, sont renvoyées à un décret. Le choix de l'option s'accompagne d'une certaine permanence, puisque l'option peut être dénoncée et dans ce cas ne peut plus être exercée avant un délai de six ans (cette disposition a été introduite par l'Assemblée nationale, puisque dans le texte initial du gouvernement, cette option ne pouvait plus être exercée de nouveau quel que fût le temps écoulé depuis la dénonciation de l'option).

En outre l'Assemblée nationale a également adopté un amendement qui modifie légèrement le dispositif proposé par le gouvernement. Il était en effet initialement prévu qu'à compter du 1 er janvier 2001 s'ouvrirait une période de quelques mois au cours desquels les professionnels pourraient dénoncer l'option qu'ils avaient auparavant retenue. L'amendement voté à l'Assemblée nationale vise à simplifier la procédure en leur appliquant d'office, à moins qu'ils n'aient expressément opté avant la fin du mois d'avril pour une assiette annuelle, l'assiette triennale, qui est l'option la plus souvent retenue.

L'Assemblée nationale a également souhaité compléter l'article 5 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale afin de clarifier la définition de l'assiette des cotisants dits de " solidarité ". Il existe deux cotisations dites de solidarité, qui, au demeurant, n'ouvrent pas de droit particulier : l'une concerne les associés qui ne participent pas au travail de l'exploitation elle-même ; l'autre concerne les exploitants sur une exploitation dite de subsistance. L'amendement adopté par l'Assemblée nationale vise à tenir compte de la jurisprudence de la Cour de cassation et à simplifier le travail des caisses de mutualité sociale agricole. Jusqu'à présent on appliquait à ces cotisations une assiette triennale, ce qui, étant donnée la modicité des sommes en cause, constituait une complication de gestion inutile. Désormais sera appliquée à ces cotisations une assiette annuelle sur l'année n-1.

Enfin, l'article 5 bis du projet de loi de financement de la sécurité sociale, introduit par l'Assemblée nationale, vise à faire bénéficier les jeunes agriculteurs d'une exonération partielle de cotisations sociales pendant cinq ans au lieu de trois actuellement. Cette mesure devrait contribuer à aider les jeunes agriculteurs à s'installer en allégeant le poids de leurs charges sociales. Votre rapporteur pour avis est favorable à ce genre de mesures destinées à aider l'installation des jeunes agriculteurs.

b) L'aménagement de l'assiette de la CSG des exploitants agricoles (article 6)

L'article 6 du projet de loi de financement prévoit trois mesures distinctes visant :

- l'alignement de la période de référence des revenus pour la CSG sur celle retenue pour les cotisations sociales ;

- l'annualisation de l'assiette de la CSG pour les cotisants dits de " solidarité " ;

- le transfert à la MSA du recouvrement de celle - ci.

(1) L'harmonisation des périodes de référence pour le calcul de l'assiette de la CSG / CRDS et des cotisations sociales

L'assiette de la CSG et de la CRDS est constituée, dans le droit en vigueur, de la moyenne des revenus professionnels assujettis, sur la période triennale n-4, n-3, n-2, c'est-à-dire l'assiette triennale actuelle des cotisations sociales des exploitants soumis au régime du forfait.

S'agissant de l'assiette des revenus professionnels agricoles soumis à la CSG, il n'existe pas, actuellement, d'option possible pour une année n ou n-1.

L'article 6 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale propose d'aligner totalement le choix des périodes de référence sur celles proposées pour les cotisations sociales par l'article 5 du présent projet de loi, c'est-à-dire les années n-3, n-2 et n-1, avec option possible pour l'année n -1. Mais c'est le choix de l'option n-1 pour les cotisations sociales qui emporte celui de la même période de référence pour la CSG. Cette harmonisation devrait permettre d'aboutir à des simplifications de gestion pour les caisses de MSA.

En outre, cet article prévoit également l'application à la CSG ainsi définie du principe d'annualité applicable aux cotisations sociales.

(2) L'annualisation de l'assiette de la CSG perçue sur les cotisants solidaires

Les revenus des personnes soumises aux deux cotisations dites de " solidarité " sont soumis à la CSG.

L'article 6 du projet de loi de financement propose de soumettre à la CSG les revenus de l'année n-1, c'est-à-dire l'option annuelle ouverte aux exploitants normalement assujettis. Le dispositif précise que les contributions solidaires sont perçues sur le revenu brut, et non sur le revenu net, contrairement aux cotisations.

Par ailleurs, l'assiette des cotisants de solidarité serait calculée sur une base " forfaitaire provisoire ", c'est-à-dire donnant lieu à régularisation ultérieure, lorsque les revenus ne sont pas connus. La définition de cette assiette forfaitaire est renvoyée à un décret ce qui est incompatible avec la nature d'imposition de la CSG. Il est donc nécessaire de préciser le calcul de cette assiette forfaitaire.

(3) le transfert à la MSA du recouvrement de la CSG sur les cotisants " solidaires "

La CSG perçue sur les cotisants solidaires a été instaurée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 qui prévoit que le recouvrement et le contrôle de cette CSG sont confiés aux services fiscaux chargés du recouvrement de l'impôt sur le revenu.

L'article 6 du présent projet de loi vise à considérer ces revenus comme des revenus d'activité ce qui aurait pour conséquence de faire recouvrer et contrôler la CSG y afférent par les caisses de MSA.

Les montants concernés sont évalués à près de 10 millions de francs car les assiettes de ces cotisants sont faibles.

Au total, votre rapporteur pour avis estime que ces mesures de simplification vont dans le bon sens et répondent aux souhaits des salariés.

2. Vers l'achèvement de la réforme comptable ?

La sécurité sociale a connu, à l'image des collectivités locales, mais pas encore de l'Etat, une profonde réforme comptable consistant d'abord à passer de la comptabilité de caisse à celle d'exercice, puis à mettre en place un plan comptable unique, enfin à faire basculer les comptes de la loi de financement en droits constatés.

La mise en oeuvre de la réforme de la comptabilité
selon la méthode des droits constatés

" La réforme de la comptabilité des organismes de sécurité sociale selon la méthode des droits constatés a été mise en oeuvre à compter du 1 er janvier 1996 pour les organismes du régime général. Le décret du 23 mai 1996 définit l'ensemble des règles applicables afin d'établir des comptes qui donnent une image fidèle des opérations des organismes de sécurité sociale (en application des règles de prudence, régularité et sincérité des écritures), et qui permettent des consolidations.

La comptabilisation en droits constatés consiste à procéder au rattachement à un exercice des droits et obligations qui y sont nés, quelle que soit la date de dénouement en trésorerie de l'opération. Ce principe suppose donc que les faits générateurs soient définis afin d'identifier avec précision la date de naissance de l'opération. Cela signifie notamment que :

- pour les produits, les cotisations sociales doivent être rattachées à l'exercice au titre duquel elles sont dues et comptabilisées pour ce même montant, même si elles n'ont pas été encaissées (ainsi pour les régimes de salariés c'est le versement du salaire qui donne naissance à la créance des URSSAF et à la dette de l'entreprise) ;

- pour les charges, les prestations maladie, vieillesse, invalidité ou familiales doivent également être rattachées à l'exercice au titre duquel elles sont dues et comptabilisées pour ce même montant, même si elles n'ont pas été décaissées ".

Source : Rapport de la Cour des comptes sur la sécurité sociale, septembre 2000.

La réforme comptable des organismes de sécurité sociale a été lancée par une lettre du ministre des affaires sociales du 20 octobre 1994 fixant au 1 er janvier 1996 l'entrée en vigueur du passage aux droits constatés. Cette réforme a été précisée par le décret du 23 mai 1996, suivi d'une circulaire d'application le 9 juillet 1996, relayée par des circulaires de branche. Puis la réforme a été étendue aux organismes des divers régimes par deux décrets du 18 mars 1997 et par une circulaire interministérielle du 20 mai 1997 applicable au titre de l'exercice comptable de 1997 : formellement, la réforme est donc achevée depuis cet exercice.

Le basculement depuis 1997 en droits constatés a alors ouvert la voie à une réforme de la comptabilité : le 9 décembre 1998 a été installée la MIRCOSS (mission interministérielle de réforme de la comptabilité des organismes de sécurité sociale) avec pour but d'élaborer un plan comptable unique aux organismes de sécurité sociale. Elle a achevé ses travaux le 30 juin 2000. D'ores et déjà, les organismes de sécurité sociale disposent d'un plan comptable approuvé par le Conseil national de la comptabilité le 20 avril 2000. L'article 45 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit de le rendre applicable à l'ensemble des organismes de sécurité sociale, avec comme objectif sa généralisation au 1 er janvier 2002.

Il s'agit ensuite d'informatiser les transferts vers la mission comptable permanente qui pourra mieux centraliser les données et faciliter les analyses. En revanche, il n'est pas encore prévu d'appliquer le plan comptable aux organismes complémentaires.

Votre rapporteur pour avis ne peut que saluer cette nouvelle étape sur la voie de la modernisation comptable de la sécurité sociale. Il l'appelle de ses voeux depuis des années, s'est inquiété à de nombreuses reprises des difficultés rencontrées dans sa mise en place et se réjouit donc de la voir entrer en application.

Il ne s'agit bien entendu que d'une étape, un autre chantier devant s'ouvrir, celui de la réflexion sur l'articulation des différents champs statistiques de la sécurité sociale : commission des comptes de la sécurité sociale, annexes de la loi de financement de la sécurité et sociale et agrégats de cette dernière ne correspondent pas ; la direction de la sécurité sociale n'a pas les moyens d'assurer un suivi statistique convenable permettant d'obtenir des donnés irréfutables et fiables. Enfin, mais faut-il le rappeler, il est impossible de disposer d'une consolidation des agrégats des lois de financement et des lois de finances. Si l'on peut comprendre les différences de nature entre les textes, nul ne contestera que l'articulation en est mauvaise, et que les lois de financements de la sécurité sociale offrent certainement une souplesse qui conduit à relativiser sérieusement les appréciations chiffrées des uns et des autres.

3. Les mesures de trésorerie

a) La simplification des modes de paiement

Depuis quelques années l'Etat s'est engagé sur la voie de la modernisation des moyens de paiement proposés aux contribuables mais aussi à ceux qui s'acquittent auprès de l'ACOSS de taxes et cotisations sociales. Ceci passe donc par la possibilité offerte de payer par virement ou tout autre moyen dématérialisé, avec pour contrepartie une obligation de recourir aux moyens modernes à partir d'un certain seuil.

L'article 46 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 propose de ramener le seuil de l'obligation de paiement dématérialisé de six à un million de francs, allant au delà des recommandations de la Cour des comptes qui retenait un alignement sur ce qui se fait en matière de TVA, soit cinq millions de francs. Avec le seuil d'un million de francs, 75 % des opérations pourraient se faire par virement, simplifiant la tâche des services de recouvrement, une majoration de 0,2 % étant appliquée en cas de non respect de l'obligation. De plus, cette mesure devrait se traduire par un gain en trésorerie pour ces organismes en raison de la plus grande rapidité d'encaissement des virements par rapport aux chèques. C'est le gain financier qui en résulterait qui pourrait justifier la présence de cet article dans une loi de financement de la sécurité sociale.

b) L'accélération des délais de versement de la CSG sur les produits de placement

A l'initiative de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, et malgré un avis défavorable du gouvernement, les députés ont introduit un article 46 bis prévoyant d'avancer de deux mois la date de versement de la CSG sur les produits de placement par les établissements financiers à l'ACOSS. Ceux-ci pratiquent en effet un système de précompte, versant ensuite 90 % du montant dû au 30 novembre de l'année à l'ACOSS. Ils précomptent le prélèvement tout au long de l'année, alors que dans le même temps l'ACOSS connaît un déficit de trésorerie particulièrement important à l'automne, générateur de frais financiers.

Les députés proposent donc de ramener la date du premier versement de cette avance de 90 % au 30 septembre en en fixant le montant aux 7/9 e , le solde intervenant au 30 novembre, suivant en cela une suggestion de la Cour des comptes en 1999.

Cet amendement avait été présenté l'année dernière mais le gouvernement en avait demandé et obtenu le retrait contre l'engagement de mener des négociations avec les banques sur ce point. L'absence de négociations ou d'avancées concrètes a conduit les députés à adopter le présent article. Or, au cours de son examen en séance publique, le gouvernement a argué à nouveau des " discussions entre le ministère des finances et les établissements financiers " pour souhaiter le retrait de l'amendement, sans succès.

Votre rapporteur pour avis partage le souci de ne pas faire peser sur la trésorerie de l'ACOSS un élément de profit des banques. Il s'interroge aussi sur les relations entre le gouvernement et sa majorité, constatant non sans ironie que les engagements envers cette dernière ne sont guère tenus par ceux qui les formulent...

c) La question des plafonds de trésorerie

L'article 47 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 propose de reconduire les plafonds de trésorerie adoptés pour l'année 2000 :

Plafonds d'avances de trésorerie au sens de la loi de financement

(en milliards de francs)

LFSS 1997

Décret 8.10.97

LFSS 1998

Décret 26.8.98

LFSS 1999

Décret 7.10.99

LFSS 2000

LFSS 2001

Régime général

66,0

80,0

20,0

31,0

24,0

29,0

29,0

29,0

Régime des exploitants agricoles

8,5

8,5

10,5

12,5

12 ,5

CNRACL

0,0

2,5

2,5

2,5

2,5

CASSM

2,3

2,3

2,3

2,3

2,3

FSPOEIE

0,8

0,5

0,5

0,5

0,5

Seuls certains régimes ayant par le passé rencontré des besoins de trésorerie bénéficient de possibilités de recourir à emprunt pour couvrir d'éventuelles défaillances. Il s'agit du régime général, du régime des exploitants agricoles, de la Caisse autonome de sécurité sociale dans les mines (CASSM), du Fonds spécial de pension des ouvriers des établissements industriels de l'Etat (FSPOEIE) et de la Caisse de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). En pratique au cours de l'année 2000 et en prévision pour 2001, l'ACOSS et la CNRACL sont les seuls à recourir à l'emprunt.

Les besoins en trésorerie

" La notion de besoin de trésorerie doit être distinguée de celle de besoin de financement ou de résultat comptable. Ces dernières s'apprécient sur un exercice donné par comparaison de l'ensemble des emplois et des ressources ou des charges et produits afférents à l'année. Le besoin de trésorerie est " instantané " : chaque jour, le régime dispose ou non de disponibilités suffisantes pour faire face à ses engagements. S'il n'en dispose pas, il présente ce jour-là un besoin de trésorerie. L'évolution de ce dernier en cours d'exercice se lit aisément sur les profits de trésorerie.

L'apparition d'un besoin de trésorerie ne coïncide pas nécessairement avec un déséquilibre structurel des recettes et dépenses du régime. Il peut être ponctuel et résulter d'un calendrier d'encaissements et de dépenses heurté ou défavorable.

L'individualisation d'un besoin de trésorerie suppose une gestion centralisée de la trésorerie par une entité bénéficiant d'une certaine autonomie financière. Pour certains régimes, la notion de besoin de trésorerie n'est donc pas pertinente. Il en est ainsi pour les régimes faisant l'objet d'une intégration financière, comme le régime des salariés agricoles au sein du régime général, le besoin de trésorerie propre au régime étant alors fondu dans la trésorerie du régime d'accueil. Il en est de même pour d'autres régimes spéciaux, les prestations en espèces étant souvent directement prises en charge par l'employeur, il n'y a pas d'individualisation d'un besoin de trésorerie afférent à ces prestations. Le champ des régimes retenus pour l'examen des éventuels besoins de trésorerie diffère donc sensiblement du champ retenu en termes de financement. "

Source : Annexe C au PLFSS 2001.

Votre rapporteur pour avis rappellera que la question de la trésorerie n'est pas anodine. L'ACOSS devrait ainsi supporter 431 millions de francs de frais financiers en 2001.

Frais financiers du régime général

(en millions de francs)

1998

1999

2000

2001

Frais financiers

204

290

334

431

Evolution

-

+ 4,2 %

+ 1,5 %

+ 3 %

Source : CCSS 09 2000

(1) La trésorerie de l'ACOSS

La trésorerie du régime général se trouve dans une situation particulière, dans la mesure où en plus de ses opérations propres de décaissements et encaissements, elle assure des opérations pour compte de tiers : recouvrement de la CSG et son reversement au FSV et aux autres régimes, recouvrement de la CRDS et son reversement à la CADES, opérations d'encaissements du FOREC dans l'attente d'une éventuelle création du fonds, etc. Ces opérations ont pris de plus en plus d'importance.

L'ACOSS bénéficie depuis la convention passée avec la Caisse de dépôts et consignations du 18 juin 1980 d'un crédit de 15 milliards de francs en cas de besoin de trésorerie, montant porté à 20 milliards de francs par un avenant du 8 juillet 1998.

Ces avances sont consenties au taux de marché EONIA + 0,5 point pendant 21 jours par trimestre civil. En dehors de ces périodes, il est possible de recourir à des avances exceptionnelles pendant huit jours sur l'année civile à EONIA + 1 point. Enfin, l'ACOSS peut éventuellement demander des avances exceptionnelles dérogatoires en cas de nécessité, accordées au même taux que les précédentes. Le solde moyen du régime général en 2000 a été de 10,4 milliards de francs, la trésorerie se dégradant sur l'exercice de près de 5 milliards de francs qui correspondent à l'excédent de la CNAVTS. Le point le plus bas aurait été atteint en octobre avec - 27,6 milliards de francs. Comme l'indique l'annexe c du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001 : " le profil de trésorerie 2000 traduit comme l'an dernier le calendrier d'encaissements de certaines ressources. La CSG sur le patrimoine est dans sa quasi totalité perçue par l'ACOSS en décembre. Il en est de même pour la CSG sur les produits de placement qui est reversée tout au long de l'année au régime général mais pour laquelle l'essentiel des rentrées s'effectue en fin d'année en raison d'un acompte sur ces produits. La part du prélèvement social de 2 % affectée à la CNAMTS, à la CNAVTS et à la CNAF est également reversée au dernier trimestre. Le profil intègre par ailleurs les versements effectués par l'Etat au titre d'une part, de la compensation des mesures d'exonérations de cotisations sociales et d'autre part, du remboursement des prestations versées par les organismes de sécurité sociale ".

En 2001, les prévisions semblent à la fois optimistes et pessimistes : optimistes parce qu'elles ne tiennent pas compte des mesures d'exonérations supplémentaires de CSG et de CRDS décidées par l'Assemblée nationale et parce qu'elles partent du principe d'une compensation totale des pertes de ressources initialement prévues ; pessimistes parce que si le régime général se redresse il ne semble guère besoin de maintenir les plafonds très élevés de trésorerie dont il bénéficie. Il serait donc sûrement possible de réduire ce plafond de trésorerie, tout en veillant à ce que l'Etat et l'ACOSS s'entendent sur le profil de trésorerie de la compensation des ristournes de CSG consenties.

(2) La trésorerie de la CNRACL

L'amélioration de la situation de la CNRACL, fruit du plan de redressement mis au point en 1999 et donc des efforts particulièrement importants des employeurs (un point de hausse de cotisations), collectivités locales comme hôpitaux, devrait limiter le recours à l'emprunt de la CNRACL en 2001.

Par ailleurs, la caisse devrait bénéficier des conséquences sur le personnel et ses rémunérations du protocole d'accord national sur l'hôpital public et de celui de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) qui devrait voir le nombre de cotisants augmenter de 10.000 personnes d'ici à août 2001 et équilibrer les comptes en 2002 toutes choses égales par ailleurs.

Compte de résultat de la CNRACL de 1998 à 2001

(droits constatés et en milliards de francs)

Réalisation

Prévision

1998

1999

2000

2001

EMPLOIS

62,2

65,8

67,3

68,5

Prestations

42,1

44,4

46,9

49,4

Compensations

18,9

19,8

19,3

18,0

Autres emplois techniques

1,1

1,0

1,1

1,1

RESSOURCES

61

63,4

65,9

69,1

Cotisations affectées

58,9

61,1

63,8

66,9

Autres ressources techniques

1,9

1,9

2,1

2,2

RESULTATS

Résultat technique

- 1,3

- 2,2

- 1,4

0,6

Résultat net

- 1,2

- 2,4

- 1,4

0,6

Source : CCSS 09 2000

LA CNRACL

" Un résultat de gestion excédentaire

Malgré une dégradation continue depuis 15 ans, le rapport démographique de la CNRACL demeure le plus favorable de l'ensemble des régimes de retraite de salarié. Il était de 4,5 cotisants pour 1 retraité en 1982 puis de 4 en 1987. Il s'établit à 2,7 actifs cotisants pour 1 retraité en 1999, correspondant à 1.629.971 actifs cotisants et 609.460 pensionnés.

Cette montée en charge est la conséquence logique de l'évolution du régime intimement liée au développement des collectivités locales depuis la fin des années 60.

Les deux principaux postes du compte de résultat de la CNRACL sont constitués par :

Les prestations ( 1999 : 44,4 milliards de francs ; 2000 : 46,9 milliards ; 2001 : 49,4 milliards ) qui progressent à un rythme soutenu ( supérieur à 5 %/an ).

Les cotisations ( 61,1 milliards de francs en 1999 ; 63,8 milliards en 2000 ; 66,9 milliards en 2001 ) qui représentent plus de 96 % des ressources de l'institution.

La CNRACL expose donc un résultat technique de gestion des populations fortement excédentaire ( 18,1 milliards de francs en 1999 ; 18,3 milliards en 2000 ; 19,0 milliards en 2001 ).

La démographie spécifique de ce régime a permis à la CNRACL, jusqu'en 1992, de connaître des exercices excédentaires et de disposer de réserves à hauteur de 15 milliards de francs, qui ont servi ensuite à financer l'accroissement des transferts de compensation à la charge du régime.

Un résultat très affecté par les transferts de compensation

Les transferts de compensation ( compensation généralisée, compensation entre régimes spéciaux ) entre les régimes de protection sociale du risque vieillesse ont été faits, à l'origine, pour établir une solidarité entre ceux dont la structure démographique est très dégradée et ceux qui bénéficient d'une situation plus favorable. Titulaire du meilleur rapport démographique des principaux régimes de retraites, la CNRACL est le régime de salariés qui contribue le plus, en valeur relative, à ces flux financiers ( 1999 : 19,8 milliards de francs ; 2000 : 19,3 milliards ; 2001 : 18,0 milliards, soit plus du tiers du montant des pensions servies ).

La participation de la CNRACL à ces mécanismes s'est accrue, au début de la décennie, avec l'augmentation du taux de recouvrement de la compensation entre régimes spéciaux. En effet, fixé à l'origine à 22 % par décret n° 86-100 du 23 janvier 1986, ce taux a été porté à 30 % en 1992 et 38 % en 1993 par le décret n° 92-1296 du 11 décembre 1992. Il est maintenu à 38 % pour les années suivantes par le décret n° 94-695 du 16 août 1994. Enfin, l'article 38 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 vient plafonner, pour chaque exercice comptable, le montant de la compensation entre régimes spéciaux à 25 % du total des prestations servies par chaque régime. Ce plafond n'a pas été atteint depuis cette date.

Les réserves de la CNRACL étant fortement entamées à la fin de l'année 1994, suite à ces modifications de taux de recouvrement, les pouvoirs publics ont décidé, par décret du 28 décembre 1994, d'augmenter le taux de cotisation patronale de 3,8 points au 1 er janvier 1995, le portant ainsi de 21,30 % à 25,10 % au 1 er janvier 1995 ( part employé maintenue à 7,85 % ). Pour 1997, le transfert de 4,5 milliards de francs, au 1 er janvier ( art. 37 de la loi n° 96-1160 du 27 décembre 1996 ), en provenance des réserves de l'ATIACL a permis à la CNRACL d'afficher un excédent de 3,5 milliards de francs et des réserves en fin d'exercice de 4,4 milliards de francs. Toutefois, les deux exercices suivants font apparaître des déficits comptables, à hauteur de 1,2 milliard de francs en 1998 et de 2,4 milliards de francs en 1999 qui ont pu être financés par les réserves de l'institution tandis que la loi de financement de la sécurité sociale pour ces deux années autorisait la CNRACL à recourir à des avances de trésorerie à hauteur de 2,5 milliards de francs.

Le déficit prévisionnel de la CNRACL en 2000 est limité à 1,4 milliard de francs grâce à une augmentation du taux de cotisation employeur de 0,5 % au 1 er janvier 2000 et à une baisse du taux de recouvrement de la surcompensation qui est passé de 38 % à 34 % à la même date. Avec des réserves de 0,8 milliard de francs en fin d'exercice 1999, le plafond d'avances de trésorerie autorisées a été reconduit par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Pour 2001, des mesures similaires de financement ont été arrêtées, portant le taux de cotisation employeur à 26,1 % au 1 er janvier 2001 et le taux de recouvrement de la surcompensation 30 % à la même date. "

Source : Caisse des dépôts et consignations.

Votre rapporteur pour avis rappellera cependant, comme chaque année, que cette situation difficile n'est pas le fruit de la situation du régime, ni le fait de ses gestionnaires : elle résulte uniquement du jeu des mécanismes de compensation, qui fait que la CNRACL a été contrainte d'emprunter des recettes de trésorerie pour verser les sommes dues à ce titre.

Coût des mécanismes de compensation de la CNRACL
pour les employeurs

(en milliards de francs)

Compensation généralisée

Surcompensation

Total

Collectivités hospitalières

4,35

4,56

8,91

Collectivités locales

5,31

5,57

10,88

TOTAL

9,66

10,13

19,79

Source : Caisse des dépôts et consignations.

CHAPITRE III :

LES DÉPENSES :
MESURES NOUVELLES, DÉRIVE SPONTANÉE
ET ABSENCE DE RÉFORMES

I. LA FAMILLE

Depuis 1999, la branche famille connaît des exercices excédentaires alors que, pendant cinq années consécutives, de 1994 à 1998, elle avait connu des exercices déficitaires.

Comptes de la branche famille
en encaissements/décaissements

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

Recettes

252,5

267,4

272,5

282,3

Evolution

+ 4,1 %

+ 5,9 %

+ 1,9 %

+ 3,6 %

Dépenses

254,4

262,6

265,7

273

Evolution

- 1,0%

+ 3,2 %

+ 1,2%

+ 2,7 %

Solde

- 1,9

+ 4,8

+ 6,8

+ 9,4

Source : CCSS 09 2000

En 1999, le solde positif de la branche famille s'élevait à 4,8 milliards de francs . ce chiffre correspond cependant à la comptabilité d'encaissement / décaissement présentée par la commission des comptes de la sécurité sociale. En droits constatés ce solde s'établissait en 1999 à 1,7 milliard de francs.

En 2000, le solde positif de la branche famille devrait s'élever à 6,8 milliards de francs en comptabilité d'encaissement / décaissement, ce qui correspond à un solde positif de 6,4 milliards de francs en droits constatés, selon les prévisions datant de septembre 2000 de la commission des comptes. Il convient toutefois de souligner à propos de ce solde que le transfert du financement de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (MARS) du budget de l'Etat vers la branche famille aboutit à diminuer l'excédent pour 2000 des 2 milliards de francs supplémentaires pris en charge par la CNAF à ce titre.

Pour 2001, la commission des comptes prévoit un solde tendanciel positif de 9,4 milliards de francs en comptabilité d'encaissement / décaissement, soit un excédent de 9,2 milliards en droits constatés. La branche famille contribue ainsi à près de 61 % du solde positif de l'ensemble du régime général. Cependant, il convient de préciser que ces comptes intègrent cette année la prise en charge intégrale de la majoration de l'ARS par la branche famille, soit 6,6 milliards de francs. En contrepartie, l'Etat s'est engagé pour 2001, comme cela avait été le cas en 2000, à prendre en charge le financement de la participation de la CNAF au Fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leur famille (FASTIF), soit près d'un milliard de francs.

Comparaison des comptes en encaissements/décaissements
et en droits constatés de la branche famille

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

ED

DC

ED

DC

ED

DC

ED

DC

Recettes

252,5

255,9

267,4

265,8

272,5

273

282,3

283,3

Dépenses

254,4

256,8

262,6

263,9

265,7

266,6

273

274,1

Solde

- 1,9

- 0,88

+ 4,8

+ 1,9

+ 6,8

+ 6,4

+ 9,4

+ 9,2

Source : CCSS 09 2000

A. LA BRANCHE FAMILLE PONCTIONNÉE

1. Des recettes en hausse mais parfois détournées de la branche famille

Les recettes totales de la branche famille seront pour 2001 en hausse de 3,6 % par rapport à 2000. Elles s'élèveront ainsi à 282,4 milliards de francs contre 272,5 milliards de francs en 2000.

Concernant les recettes pour 2001, deux points saillants doivent être mentionnés :

- d'abord, la disparition du remboursement à la CNAF par l'Etat de la majoration de l'ARS , soit une somme totale de l'ordre de 6,6 milliards de francs désormais totalement à la charge de la CNAF. Le principe d'un transfert progressif de son financement de l'Etat à la CNAF avait été annoncé par le Premier ministre en juillet 1999, sans que le calendrier en soit fixé avec précision. Une première étape a eu lieu en 2000 pour un montant de 4,5 milliards de francs. Le solde (environ 2,1 milliards de francs) est intégralement pris en charge par la CNAF dès 2001 ;

- une augmentation de 4,5 % du montant de la CSG destiné à la branche famille . La valeur prévisionnelle du point de la CSG en 2001 s'élève à 53,3 milliards de francs pour les trois régimes destinataires (maladie, vieillesse, famille), soit une progression de 4,5 % par rapport à 2000. Sur les revenus d'activité, elle est en 2001 de 37,2 milliards pour la CSG famille. En 2001, les rendements de la CSG atteindraient 58,6 milliards de francs pour la branche famille (+ 4,5 % par rapport à 2000).

Concernant les autres recettes, les cotisations constituent la ressource principale de la branche famille (à hauteur de 65 %) et sont quasi exclusivement à la charge des employeurs. En 2000, l'ensemble des cotisations affectées à la branche famille avait connu une progression de + 5,6 % par rapport à 1999. Pour 2001, l'augmentation sera moins importante : + 5 %.

Le montant des impôts et taxes affectés s'élève pour 2001 à 59,4 milliards de francs dont près de 58 milliards proviennent de la seule CSG 41 ( * ) . Par rapport à 2000, ce montant total est en hausse de 4,5 % pour 2001. En outre, en 2000 les impôts et taxes affectés à la branche famille avaient diminué de près de 2 milliards de francs, soit une baisse de 3,2 % par rapport à 1999 en raison notamment de la diminution de la part de prélèvement sur les capitaux affectés à la CNAF.

Depuis 1998, la CNAF bénéficiait de 50 % de ce produit, puis de 22 % en application de l'article 10 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 instituant la CMU, puis de 13 % en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Toutefois en 2001, ce produit du prélèvement sur les revenus financiers ne sera plus du tout affecté à la CNAF, ce qui représente une perte de recettes de l'ordre de 1,5 milliard de francs. 42 ( * ) . La CNAF voit donc une partie de son résultat excédentaire ponctionné et transféré vers la première section du FSV pour compenser partiellement la diminution de ses ressources issues de la CSG.

Les subventions de l'Etat résultent de la prise en charge par la CNAF des prestations servies pour le compte de celui-ci. Ces prestations sont diverses, il s'agit notamment de l'allocation aux adultes handicapés (26 milliards de francs en 2001), de l'allocation de parent isolé depuis 1999 (4,5 milliards de francs en 2001) et jusqu'en 2000 de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (soit 2 milliards de francs en 2000 contre 6,3 milliards en 1999). A partir de 2001, comme il a déjà été souligné, cette majoration sera intégralement assumée par la branche famille. Le montant total des subventions devrait s'élever à 30,4 milliards de francs en 2001, contre 31,8 milliards de francs en 2000 (29,7 milliards de francs hors majoration de l'ARS).

2. Des dépenses en hausse

Les prestations familiales

Les allocations familiales (AF) sont versées sans conditions de ressources aux familles assumant la charge de deux enfants ou plus. Ces allocations sont majorées selon l'âge des enfants (11 ème et 16 ème années).

Le complément familial (CF) est versé sous condition de ressources aux familles ayant trois enfants à charge (tous âgés de plus de trois ans).

L'allocation pour jeune enfant (APJE) est versée sous condition de ressources du cinquième mois de grossesse au troisième mois de l'enfant (APJE " courte "). Son versement peut être prolongé jusqu'aux trois ans de l'enfant si les revenus de la famille ne dépassent pas un certain plafond (APJE " longue).

L'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA) consiste en la prise en charge de l'intégralité des cotisations sociales et patronales dues pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (avec un salaire plafond) pour la garde d'un enfant de moins de six ans. De plus, l'AFEAMA comporte un complément destiné à prendre en charge une partie du coût de la garde. Ce complément varie selon l'âge de l'enfant (moins de trois ans et de trois à six ans). Cette prestation est versée sans condition de ressources.

L'allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) vise à compenser l'ensemble des charges sociales supportées par une famille qui emploie une personne gardant un enfant de moins de trois ans à domicile et, à taux réduit, des enfants de trois à six ans. Les montants de l'AGED sont modulés en fonction du revenu des bénéficiaires.

L'allocation de rentrée scolaire (ARS) est versée sous condition de ressources aux familles ayant un ou plusieurs enfants scolarisés âgés de six à dix-huit ans.

L'allocation à la scolarité (AAS), instaurée pour la rentrée 1994-1995 pour se substituer aux bourses des collèges servies par l'éducation nationale, a été supprimée en 1998.

L'allocation parentale d'éducation (APE) est destinée à compenser l'arrêt ou la réduction de l'activité professionnelle à l'occasion d'une naissance ou d'une adoption portant à deux le nombre d'enfants à charge dans la famille (trois enfants avant 1994). Elle est versée pour une durée maximale de trois ans.

L'allocation de soutien familial (ASF) est versée sans condition de ressources aux personnes isolées ayant la garde d'un enfant et aux familles ayant à leur charge un enfant orphelin de père et de mère. Son montant varie selon que l'enfant est orphelin d'un ou des deux parents (ou assimilé).

L'allocation de parent isolé (API) est une allocation différentielle versée sous condition de ressources aux personnes seules qui assument la charge d'un ou plusieurs enfants. Elle est servie pendant une période d'un an maximum mais peut être prolongée jusqu'aux trois ans du dernier enfant.

L'allocation d'adoption (AA) est versée sous condition de ressources depuis 1996 pour tout enfant arrivé dans un foyer d'adoption. Elle est servie pour une durée maximale de vingt et un mois à partir du jour de l'arrivée dans le foyer.

Les objectifs de dépenses de la branche famille retenus par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (264 milliards de francs) ont été respectés puisque les dépenses réalisées s'élèvent à 263,8 milliards de francs en 2000.

Pour 2001, les objectifs de dépenses de la branche famille seront en hausse de 2,7 % et s'élèveront à 273 milliards de francs.

Les dépenses de prestations, soit les prestations familiales versées en métropole, les prestations gérées pour compte de tiers (c'est-à-dire principalement l'AAH), ainsi que les prestations transférées à l'étranger, connaîtront une progression de + 3,1 % par rapport à 2000 avec un montant total de 195,5 milliards de francs.

Les autres postes augmenteront globalement de 1,9 %. Parmi ces postes on peut notamment distinguer : les transferts versés : + 1,7 % ; les charges de gestion administrative : + 2,7 % avec un montant pour 2001 de 9 milliards de francs ; les dépenses d'action sociale : + 0,6 % malgré la prise en charge par l'Etat depuis 2000 du FASTIF.

Prestations familiales en 2000 (en pourcentage)

Source : Direction de la sécurité sociale

Bénéficiaires des prestations familiales - Tous régimes

(Effectifs en milliers, évolution en pourcentage)

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

Allocations familiales

4.500

4.501

4.489

4.487

4.476

4.470

4.491

4.498

4.132

4.495

0,0 %

0,0 %

- 0,3 %

0,0 %

- 0,2 %

- 0,1 %

0,5 %

0,2 %

- 8,1 %

8,8 %

Complément familial

882

894

910

941

943

938

918

903

903

897

0,7 %

1,4 %

1,8 %

3,4 %

0,2 %

- 0,5 %

- 2,1 %

- 1,6 %

0,0 %

- 0,7 %

Allocation de rentrée scolaire

2.700

2.708

2.709

2.833

2.902

2.912

2.923

2.915

2.938

3.054

9,0 %

0,3 %

0,0 %

4,6 %

2,4 %

0,3 %

0,4 %

- 0,3 %

0,8 %

3,9 %

Aide à la scolarité

682

698

705

3,8 %

2,3 %

1,0 %

Allocation pour jeune enfant " courte "

501

501

478

472

475

485

405

403

410

411

- 0,2 %

0,0 %

- 4,6 %

- 1,3 %

0,6 %

2,1 %

- 16,5 %

- 0,5 %

1,7 %

0,2 %

Allocation pour jeune enfant " longue "

1.386

1.389

1.393

1.346

1.292

1.167

1.069

1.014

1.011

1.006

0,8 %

0,2 %

0,3 %

- 3,4 %

- 4,0 %

- 9,7 %

- 8,4 %

- 5,1 %

- 0,3 %

- 0,5 %

APE

181

174

164

154

175

303

448

528

536

534

- 3,2 %

- 3,9 %

- 5,7 %

- 6,1 %

13,6 %

73,1 %

47,9 %

17,9 %

1,5 %

- 0,4 %

Allocation de soutien familial

467

472

473

476

495

506

514

522

532

550

1,7 %

1,1 %

0,2 %

0,6 %

4,0 %

2,2 %

1,6 %

1,6 %

1,9 %

3,4 %

AGED

13

12

15

21

25

47

67

82

73

66

18,2 %

- 7,7 %

25,0 %

40,0 %

19,0 %

88,0 %

42,6 %

22,4 %

- 11,0 %

- 9,6 %

AFEAMA

110

159

218

273

326

384

436

486

520

44,5 %

37,1 %

25,2 %

19,4 %

17,8 %

13,5 %

11,5 %

7,0 %

Champ : France métropolitaine.

Source : CNAF.

a) La majoration de l'allocation de rentrée scolaire

Le mécanisme de majoration de l'ARS et le transfert progressif de sa prise en charge de l'Etat vers la CNAF

La majoration de l'allocation de rentrée scolaire, instauré par décret à titre exceptionnel en 1993, a toujours été reconduite depuis cette date. Les conditions d'attribution sont exactement les mêmes que pour l'allocation de rentrée scolaire.

La loi de financement pour 1999 a étendu le bénéfice de l'ARS et de sa majoration aux familles d'un enfant remplissant les conditions nécessaires, mais ne percevant aucune autre prestation familiale et, de ce fait, n'entrant pas jusque là dans le champ de cette prestation.

Depuis 1998, le montant total de l'ARS (base et majoration) s'élève à 1.600 francs par enfant bénéficiaire. En 1999, le coût de la majoration, entièrement à la charge de l'Etat, s'est élevé à 6,7 milliards de francs (tous régimes métropole et DOM).

En 2000, la majoration d'ARS est reconduite et son montant fixé à 1.170,16 francs par enfant bénéficiaire. Le coût de cette majoration est évalué à 6,6 milliards de francs (tous régimes métropole et DOM).

Lors de la conférence de la famille tenue en juillet 1999, le Premier ministre a annoncé la pérennisation de la majoration de l'ARS et sa prise en charge progressive par la CNAF. La première étape intervient en 2000 : seuls 2,13 milliards de francs (sur 6,6 milliards) sont inscrits dans le compte à la charge de l'Etat.

En contrepartie, la contribution actuelle de la CNAF au financement du fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs familles (FASTIF) est prise en charge par l'Etat, dès 2000. Cette contribution est de l'ordre de 1 milliard de francs.

A partir de 2001, la majoration de l'ARS sera entièrement financée par la CNAF, ce qui représentera pour cette dernière, en 2001, une charge supplémentaire de l'ordre de 4,5 milliards de francs, l'intégralité de la majoration s'élevant à 6,6 milliards de francs en 2001.

Il convient toutefois de souligner le fait que cette dépense supplémentaire n'est pas identifiée comme telle dans la présentation du compte de la branche famille par la commission des comptes de la sécurité sociale. Ce compte ne mentionne en effet que le montant total de l'ARS sans faire état de la part que représente la base et de celle que représente la majoration de l'ARS. Il est dès lors difficile de se rendre compte de la hausse effective de dépenses que représente ce transfert si ce n'est en se reportant au compte retraçant les recettes de la branche famille qui mentionne bien la disparition pour 2001 de la subvention de l'Etat au titre de la prise en charge de la majoration de l'ARS.

En outre, le transfert des dépenses engendrées au titre du FASTIF de la CNAF vers l'Etat, et censé intervenir en contrepartie de la prise en charge intégrale par la CNAF du montant de la majoration d'ARS, ne représente qu'une baisse des dépenses de l'ordre de 1 milliard de francs. Cette somme ne compense donc aucunement les 6,6 milliards de francs supplémentaires désormais à la charge de la CNAF.

b) La prise en charge des majorations de pensions pour enfants (article 16)

L'article 16 du projet de loi de financement propose d'instaurer une prise en charge progressive par la CNAF des majorations de pensions servies aux parents de trois enfants et plus.

Cet article modifie l'article L. 223-1 du code de la sécurité sociale qui définit le rôle de la CNAF. Ce rôle est ainsi étendu au versement au FSV d'un montant égal aux dépenses prises en charge par ce fonds au titre des majorations de pension pour enfants. Il est précisé que ce versement fait l'objet d'acomptes.

En outre, le dernier paragraphe de l'article 16 du projet de loi de financement de la sécurité sociale précise que, pour 2001, la CNAF verse au FSV un montant égal à 15 % des sommes correspondant à ces majorations. Le solde de cette opération sera déterminé par les lois de financement de la sécurité sociale ultérieures.

Il convient de rappeler que le FSV prend en charge trois types de dépenses relevant de la solidarité nationale : les allocations correspondant au minimum vieillesse, les périodes validées gratuitement au titre de l'assurance vieillesse, enfin les bonifications de pension pour enfants et conjoint à charge.

L'article 16 du projet de loi de financement de la sécurité sociale vise exclusivement les bonifications de pension pour enfants. Instaurée après la seconde guerre mondiale, la bonification pour enfants dans le régime général est égale à 10 % du montant de la pension. Pour en bénéficier, il faut avoir eu au moins trois enfants ou les avoir élevés pendant neuf ans avant leur seizième anniversaire. La bonification peut être accordée aux deux parents.

La Cour des comptes, dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2000, a souligné le caractère qu'elle considère comme inégalitaire de la prise en compte par les différents régimes de retraite de ces majorations de pension ainsi que l'hétérogénéité du mode de financement de ces avantages. La Cour en arrive à la conclusion suivante : " Contrairement à la plupart des domaines de la retraite, où c'est entre les salariés du privé et ceux des fonctions publiques et des régimes spéciaux que les différences résident, ici la ligne de partage distingue (...) les salariés du privé et des grandes entreprises publiques d'une part, et ceux de l'Etat, des collectivités locales et des hôpitaux publics d'autre part. "

D'après la Cour des comptes, les bonifications concernent actuellement 45 % des pensionnés, pour un montant moyen de 800 F pour les hommes et 400 F pour les femmes. Elles ne sont pas imposables.

Le coût global de ces majorations de pension est de l'ordre de 40 milliards de francs , avec un poids différent selon les régimes, les écarts résultant des différences de montant de la bonification et de la proportion de familles nombreuses dans les régimes. A ces 40 milliards de francs, il faut ajouter la dépense fiscale correspondant à l'exonération de cette majoration de l'impôt sur le revenu, soit 2,3 milliards de francs, majorant la bonification de 6 % en moyenne par rapport à ce qu'elle serait si elle était imposable.

Le financement est différent selon les régimes : il est à la charge du FSV pour le régime général et les régimes alignés (18 milliards de francs) ; il est à la charge des régimes eux-mêmes dans les autres cas.

L'article 16 du PLFSS, en transférant progressivement la prise en charge de ces majorations du FSV vers la CNAF, ajoute de la confusion à ce mode de financement déjà très hétérogène. En outre, cette mesure a un coût puisque l'annexe f au projet de loi de financement concernant les comptes du FSV, du FOREC et de la CADES, précise qu'elle donnera lieu à un transfert de 2,9 milliards de francs de la CNAF vers le FSV.

Le résultat excédentaire de la branche famille est donc une fois de plus ponctionné dans le but de soulager ceux des organismes de sécurité sociale qui connaissent des résultats beaucoup moins encourageants. En outre, malgré ce transfert, le solde d'exercice prévisionnel pour 2001 du FSV est en déficit de 1,1 milliard de francs.

Enfin, votre rapporteur pour avis fait part de sa vive inquiétude devant ce transfert de charges. Le gouvernement parait poursuivre le mouvement et transférer ainsi à la CNAF la charge de l'ensemble des majorations familiales, ce qui ne serait pas supportable par la branche.

B. LES CRÉATIONS

1. L'allocation de présence parentale (article 15)

L'article 15 du projet de loi de financement crée une nouvelle prestation familiale : l'allocation de présence parentale.

Jusqu'à présent, concernant la possibilité de congé pour assurer la garde d'un enfant malade, le législateur avait procédé par touches successives. Ainsi, plusieurs congés et des aménagements du temps de travail ont été institués : le congé d'accompagnement créé par la loi du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs sur l'initiative d'ailleurs de notre collègue, le sénateur Lucien Neuwirth ; le congé parental d'éducation et sa prolongation possible en cas de maladie, d'accident ou de handicap grave de l'enfant ; enfin, le droit de travailler à temps partiel en cas de maladie, d'accident ou de handicap grave d'un enfant à charge.

Cependant, ni la réduction d'activité professionnelle ni sa suspension ne sont aujourd'hui compensées financièrement. D'où la création par l'article 15 du présent projet de loi de financement d'une allocation de présence parentale pour les parents qui interrompent ou réduisent leur activité professionnelle pour s'occuper d'un enfant gravement malade, c'est-à-dire qui bénéficient d'un congé de présence parentale.

Le montant de l'allocation varie selon le type de congé choisi, d'une part, selon la composition familiale, d'autre part. Ce montant est fixé par le pouvoir réglementaire comme suit :

- 3.000 francs en cas de suspension totale de l'activité ;

- 2.000 francs en cas de passage à une activité à 50 % ;

- 1.500 francs en cas de passage à une activité à 80 %.

Cette allocation de présence parentale est donc calée sur l'allocation parentale d'éducation à temps plein ou partiel.

Ce dispositif vise les cas où des soins et une présence aux côtés de l'enfant sont nécessaires, c'est-à-dire les hospitalisations périnatales, les pathologies tumorales, les pathologies nécessitant une rééducation intensive et de longue durée. Il toucherait, selon les estimations du gouvernement 13.000 cas par an, pour un coût annuel de 200 millions de francs.

Le projet de loi de financement pour 2001 interdit le cumul de cette allocation de présence parentale avec un complément d'allocation d'éducation spéciale. Ce complément sert en effet à compenser notamment les pertes de revenus entraînées par l'arrêt ou la réduction d'activité des parents en raison du handicap de l'enfant. En outre, cette allocation n'est pas non plus cumulable avec le versement de prestations correspondant à des absences de travail pour maladie, maternité, éducation des enfants. En revanche, elle est cumulable avec l'allocation d'éducation spéciale de base dont le versement est uniquement subordonné au taux d'incapacité de l'enfant.

Le projet de loi de financement assouplit également les conditions d'accès au travail à temps partiel pour les parents ayant à leur charge un enfant gravement malade.

Votre rapporteur pour avis ne peut que se féliciter de la création d'une telle allocation par le gouvernement, qui reprend à cet égard la proposition de loi de notre collègue Lucien Neuwirth, adoptée par le Sénat le 15 juin 2000 qui créait une allocation de présence familiale . Malheureusement, à l'époque, le gouvernement s'était opposé à cette proposition de loi et avait utilisé des moyens de procédure (notamment l'invocation de l'article 40 de la Constitution relatif à la recevabilité financière pour interrompre l'examen du texte par le Parlement... et finalement en reprendre ici la substance.

Cette proposition de loi avait pour objet d'aider de manière significative et concrète les parents contraints de cesser ou de réduire leur activité professionnelle pour soigner leur enfant malade ou accompagner un proche en fin de vie. Elle créait ainsi un congé d'une durée de six mois renouvelables (contre quatre mois renouvelables dans l'actuel projet de loi de financement) pour les parents, salariés ou fonctionnaires, d'enfants malades. Elle créait également une allocation de présence familiale, d'un montant égal à celui de l'allocation parentale d'éducation. Cette allocation devait aussi bénéficier aux proches d'une personne en fin de vie et qui avaient choisi de demander le congé d'accompagnement institué l'année dernière par la loi du 9 juin 1999 visant à garantir l'accès aux soins palliatifs.

On peut faire remarquer que le gouvernement ne reprend pas ce dispositif d'accompagnement d'un proche en fin de vie, alors même qu'au cours de la discussion au Sénat le 15 juin 2000 de la proposition de loi de notre collègue Lucien Neuwirth, Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés, avait déclaré : " concernant les congés pour les personnes qui veulent accompagner un membre de leur famille parvenu en fin de vie, il a été dit à plusieurs reprises par Martine Aubry et par moi-même, notamment lors de la clôture de l'année internationale des personnes âgées, que nous allions étudier la mise en oeuvre de dispositifs susceptibles de permettre à la solidarité familiale de s'exercer en direction non seulement des personnes âgées, mais aussi de tout membre de la famille qui a besoin d'attention " . Or rien, dans ce projet de loi de financement, ne concerne ces situations pourtant elles aussi tragiques.

Votre rapporteur pour avis ne peut qu'approuver les dispositions de l'article 15 du projet de loi de financement de la sécurité sociale tout en regrettant que la création de cette allocation de présence parentale intervienne avec retard, illustrant le peu de considération que le gouvernement porte aux propositions de loi parlementaires et, en l'occurrence, sénatoriales.

2. Le fonds d'investissement pour les crèches (article 18)

L'article 18 du projet de loi de financement vise à la création d'un fonds d'investissement pour les crèches, annoncé par le gouvernement lors de la conférence de la famille le 15 juin 2000.

Le financement des crèches est devenu depuis quelques années problématique en raison de la distorsion qui existe entre l'offre et la demande de places en crèche. En effet l'offre d'équipements d'accueil destinés aux jeunes enfants est aujourd'hui largement insuffisante alors même que le rythme de création des places nouvelles s'est ralenti au cours des années 1990. Avec un peu moins de 140.000 places pour 2,2 millions d'enfants de moins de trois ans, les crèches collectives sont incapables de répondre aux besoins des parents, favorisant le développement d'autres modes de garde non agréés (travail au noir, solidarité familiale, etc.).

De plus en plus de ménages ont recours à une garde payante pour leur enfant. Selon une enquête réalisée par l'INSEE en 1999, 57 % des ménages avec un enfant de moins de trois ans y font appel. Cette proportion a presque doublé en dix ans.

Pour les enfants de moins de trois ans, l'accueil en structures collectives reste minoritaire. Plusieurs grandes catégories d'établissements coexistent : les crèches collectives, les crèches familiales et les halte-garderies.

La capacité d'accueil en crèche est actuellement de l'ordre de 1.500 places annuelles supplémentaires, et le taux d'équipement s'élève à 6,3 places pour 100 enfants de moins de trois ans. Mais les disparités géographiques demeurent importantes.

En outre, il faut noter que la stabilisation de l'offre publique a coïncidé avec la montée en charge du nouveau dispositif d'aides aux familles pour la garde d'enfants mis en place dans le cadre de la loi famille de 1994 : l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle (AFEAMA) et l'allocation de garde d'enfant à domicile. Ces prestations favorisent le recours à des modes de garde privés. Dans ce cadre, l'emploi d'une assistante maternelle est devenu le mode de garde le plus répandu.

Le financement des crèches collectives est assuré par les communes, d'une part, par une contribution financière de la CNAF à travers le Fonds national d'action sociale, d'autre part. Les ressources de ce fonds proviennent d'un prélèvement sur les cotisations d'allocations familiales et du produit de l'écrêtement des fonds de roulement. En 2001, la dotation de ce fonds s'élèvera à 14,7 milliards de francs, en augmentation de 0,5 % par rapport à 2000. En outre, les dépenses en faveur de l'accueil des jeunes enfants représentent plus du tiers des dépenses d'action sociale de la caisse nationale.

Un nouveau système de financement a été mis en place début 2000 par la CNAF permettant d'annuler les effets sur les communes de la modulation des participations familiales. Dans ce système, les caisses d'allocations familiales assurent des recettes stables aux gestionnaires que sont en majorité les communes, correspondant aux deux tiers d'un prix de revient journalier plafonné. Les familles participent toujours en fonction d'un barème modulé selon leurs revenus. En contrepartie, les gestionnaires de crèches doivent appliquer le barème de tarification préconisé par la caisse nationale.

L'article 18 du présent projet de loi de financement prévoit donc la mise en place, à compter du 1 er janvier 2001, d'un fonds d'investissement pour les crèches au sein du Fonds national d'action sociale de la CNAF.

Ce fonds d'investissement pour les crèches a vocation à participer au développement des établissements et services d'accueil de la petite enfance par le versement d'une aide à l'investissement aux collectivités locales et aux associations gestionnaires.

Ses ressources sont constituées par l'excédent de l'exercice 1999 de la branche famille, affecté à un compte de réserve spécifique à hauteur de 1,5 milliard de francs. Une fois n'est pas coutume, les excédents de la branche famille bénéficieront ainsi directement aux familles.

Ce fonds prend la fin une fois l'intégralité des crédits inscrits à ce compte consommés. Il a donc un " caractère exceptionnel et non reconductible " comme le précise l'exposé des motifs de cet article du projet de loi de financement. Le gouvernement ne donne cependant aucune indication prévisionnelle concernant le rythme de consommation de ces crédits et donc la durée de vie du fonds. S'agit-il une fois de plus d'une " fausse bonne " idée qui consiste à créer un instrument utile mais à l'abandonner par la suite alors même que les besoins existent encore ? S'agit-il d'un nouveau fonds qui mettra plusieurs mois à décaisser les premières interventions ?

La création de ce fonds d'investissement devrait cependant permettre à terme l'accueil de 30.000 à 40.000 enfants supplémentaires dans les établissements et services d'accueil.

L'intention, certes louable, du gouvernement de tenter d'apporter une solution au problème de l'accueil de la petite enfance est cependant loin de combler les lacunes du système des crèches collectives en France. Les moyens consacrés à cette réforme sont en effet largement insuffisants. Des crédits devront notamment être dégagés pour assurer le fonctionnement des nouvelles places en crèches puisque l'article 18 du projet de loi établit un fonds destiné à favoriser l'investissement mais ne prévoit rien concernant le fonctionnement des crèches. Le gouvernement, dans le rapport annexé au projet de loi de financement, annonce un abondement, à hauteur de 1,7 milliard de francs, des moyens du Fonds national d'action sociale consacrés au fonctionnement des modes de garde collectifs.

C. LES AMÉNAGEMENTS

1. La réforme de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (article 14)

L'article 14 du projet de loi de financement réforme l'aide à l'enfance pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA).

L'AFEAMA, créée dans le cadre de la loi famille de 1994, se caractérise par l'existence de deux volets : la base, c'est-à-dire l'aide en elle-même, et sa majoration. Elle est attribuée aux personnes employant une assistante pour assurer la garde, au domicile de celle-ci, d'au moins un enfant de moins de six ans. L'aide est attribuée pour chaque enfant à condition que la rémunération de l'assistante n'excède pas un certain montant (cinq fois la valeur horaire du salaire minimum, soit 210,10 francs depuis le 1 er juillet 2000) par jour et par enfant gardé. Son montant correspond aux cotisations patronales et salariales de sécurité sociale, de retraite complémentaire et d'assurance chômage.

Le complément d'aide, versé aux familles, est quant à lui mensuel et forfaitaire et varie en fonction de l'âge de l'enfant : 826 francs par mois par enfant jusqu'à trois ans, 413 francs par enfant de trois à six ans.

Les années 90 se sont caractérisées par la montée en charge des prestations liées à la garde des jeunes enfants, l'AGED et l'AFEAMA, à des rythmes dépassant 20 % par an jusqu'en 1997. Le développement de l'AFEAMA, se poursuit mais de manière plus modérée depuis. Le nombre de bénéficiaires a ainsi crû de 7 % en 1999 (520.000 bénéficiaires au total en 1999), contre plus de 11 % les deux années précédentes.

Le dispositif proposé dans le projet de loi de financement vise à instaurer trois taux de majoration différents variant en fonction de l'âge de l'enfant ainsi que des revenus des personnes employant une assistante maternelle agréée. D'autre part, l'article 14 du projet de loi prévoit le non-cumul de l'AFEAMA avec l'allocation parentale d'éducation (APE) à taux plein .

Concernant la modulation de la majoration en fonction des ressources des ménages, le projet de loi prévoit trois taux à fixer par décret :

- pour les ménages dont le revenu mensuel est inférieur à 9.400 francs (pour les familles avec un enfant), le complément maximal sera porté à 1.290 francs, soit une augmentation de 56 % du complément familial ;

- pour les ménages ayant un revenu mensuel compris entre 9.400 et 13.000 francs (familles avec un enfant), le complément maximal sera porté à 1.020 francs ;

- enfin pour les ménages ayant un revenu mensuel supérieur à 13.000 francs (familles avec un enfant), le complément maximal est maintenu à 826 francs.

La prise en charge des dépenses sera cependant limitée à un certain pourcentage du salaire net perçu par l'assistante agréée. Le gouvernement prévoit de fixer cette part à 85 % du salaire versé.

En outre, le projet de loi prévoit également le non-cumul de l'AFEAMA avec l'APE à taux plein car le versement de cette dernière ne se justifie pas lorsque l'allocataire ne travaille pas et qu'il perçoit une allocation à ce titre.

Votre rapporteur pour avis constate que cette réforme va dans le sens pas toujours justifiable de la mise sous condition de ressources des allocations familiales. En outre il s'inquiète des difficultés de gestion pour la CNAF de l'instauration de ces multiples taux et seuils qui viennent compliquer un système déjà hermétique.

Le coût de cette réforme est évalué par le gouvernement à 500 millions de francs en 2001 et à 1,1 milliard de francs en année pleine.

En outre, il convient de noter que le coût de cette aide a connu une croissance exponentielle ces dernières années passant, en 1999, de 9 à 10 milliards de francs (+ 10,7 %). En 2000, la dépense pour l'aide est estimée à plus de 11 milliards de francs (+13,7 % par rapport à 1999) et en 2001 elle est évaluée par la commission des comptes de la sécurité sociale à 12,5 milliards de francs (+ 12,6 % par rapport à 2000). Il s'agit d'ailleurs de la prestation familiale qui connaît la plus forte progression.

Le dispositif proposé induit, en outre, de nouvelles charges pour les caisses d'allocations familiales du fait non seulement de l'augmentation du montant de la majoration pour certaines catégories de ménages mais aussi de l'émergence de nouvelles demandes suscitées par cette augmentation. Le nombre de familles prestataires pourrait augmenter à terme de 30.000 à 40.000 personnes.

2. Le cumul de l'allocation parentale d'éducation avec la reprise d'activité (article 17)

L'article 17 du projet de loi de financement vise à permettre le cumul de l'allocation parentale d'éducation et d'une activité professionnelle pendant une certaine durée.

L'APE est destinée à compenser l'arrêt ou la réduction de l'activité professionnelle à l'occasion d'une naissance ou d'une adoption portant à deux le nombre d'enfants à charge dans la famille (trois enfants avant 1994) et jusqu'à ce que le plus jeune atteigne trois ans. Elle est versée, sans condition de ressources, pour une durée maximale de trois ans.

La montée en charge de l'APE, suite à son extension au deuxième enfant en 1994, paraît aujourd'hui achevée : les effectifs ont augmenté de 17,9 % en 1997, de 1,5 % en 1998 et ont légèrement diminué en 1999 (- 0,4 %). Cette allocation a été versée à 534.000 familles en 1999 et, pour les deux tiers d'entre elles, suite à une seconde naissance. L'APE à taux réduit, qui correspond à un retrait d'activité à temps partiel, reste peu importante puisqu'elle concerne environ le quart des allocataires.

Actuellement, le montant de l'APE à taux plein atteint 3.060,62 francs par mois. Pour une activité au plus égale à 50 % de la durée légale du travail, il est de 2.023,83 francs mensuels, et pour une activité comprise entre 50 et 80 % de la durée légale du travail de 1.530,31 francs mensuels.

L'article 17 du projet de loi de financement vise à permettre de cumuler l'allocation parentale d'éducation et un revenu d'activité après la reprise d'activité de l'intéressé (pendant deux mois, délai fixé par décret) lorsque celui-ci a la charge d'un enfant d'un âge fixé par décret (au moins dix-huit mois et de moins de trente mois, d'après les intentions du gouvernement). En outre, un aménagement est prévu pour les naissances multiples d'au moins trois enfants. Enfin, lorsque le parent a bénéficié d'un tel cumul, le droit à l'APE ne peut lui être réouvert qu'en cas de changement de sa situation familiale (nouvelle naissance par exemple).

L'objectif affiché de cette réforme est de favoriser le retour à l'emploi des personnes bénéficiaires de l'APE. Statistiquement en effet le taux d'activité des femmes bénéficiant de l'APE a baissé, surtout depuis 1994 (extension du dispositif aux mères de deux enfants) : 27 % des bénéficiaires (en grande majorité des femmes) restent inactifs à la sortie du dispositif.

En 2000, le montant total des prestations versées par la CNAF au titre de l'allocation parentale d'éducation s'élevait à 18 milliards de francs, soit 11 % des prestations familiales de métropole. En 2001, ce montant s'élèvera à 18,4 milliards de francs, en augmentation de 1,7 % par rapport à 2000, soit 10,8 % des prestations familiales versées en métropole.

L'économie représentée par cette mesure pour la branche famille est évaluée par le gouvernement à 64 millions de francs en 2001 et à 110 millions de francs en année pleine. Cette économie résulterait notamment des moindre dépenses pour la branche famille induites par un retour à l'emploi plus précoce des bénéficiaires de l'allocation.

Votre rapporteur pour avis met cependant en doute la fiabilité de ces estimations. Dès lors, et d'après les dispositions de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale selon lesquelles " les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions affectant directement l'équilibre financiers des régimes obligatoires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ", il est permis à votre rapporteur pour avis de douter de la pertinence d'une telle mesure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

3. La réforme des prestations logement

a) Les prestations existantes

Principales caractéristiques des différentes allocations de logement à caractère social

Trois aides, accordées sous condition de ressources, sont destinées à assurer une couverture partielle des frais de logement des familles : l'aide personnalisée au logement (APL), l'allocation de logement à caractère familial (ALF) ainsi que l'allocation de logement à caractère social (ALS). Il est à noter que, depuis 1993, des aides sont accordées aux associations logeant à titre temporaire des personnes défavorisées.

L'ALF, l'ALS et l'APL sont toutes les trois attribuées sous condition de ressources aux locataires et aux accédants à la propriété qui occupent un logement répondant à des normes minimales de salubrité et de peuplement. Les bénéficiaires de l'ALF et de l'APL peuvent, sous certaines conditions, percevoir une prime de déménagement.

L'ALF est une prestation familiale destinée aux jeunes ménages (versée au maximum pendant cinq ans à compter de la date du mariage) et aux familles avec des personnes à charge payant un minimum de loyer.

L'ALS a été étendu, de 1990 à 1993, à toute personne acquittant une dépense de logement, quels que soient son âge et sa situation familiale ou professionnelle, si elle dispose de ressources ne dépassant pas un certain plafond. Ce plafond varie selon la localisation.

L'APL est destinée aux locataires de logements conventionnés et aux accédants à la propriété mais aussi aux propriétaires qui ont amélioré leur logement avec des prêts aidés par l'Etat ou des prêts conventionnés.

Ces trois prestations sont calculées de la même façon ; seuls les coefficients sont établis différemment selon les allocations. Les modalités de calcul varient en fonction de la composition familiale et du statut du bénéficiaire (locataire ou propriétaire).

Toutes ces aides au logement confondues, les bénéficiaires de ces trois allocations ont augmenté de 39 % entre 1990 et 1999, passant de 4,2 millions à 5,8 millions en 1999. Fin décembre 1999, 1.079.000 ménages bénéficiaient de l'ALF ; le nombre de ménages titulaires de l'APL s'élevait à 2.274.000, celui de l'ALS à 2.045.000.

Le versement de ces aides au logement est assuré par les caisses d'allocations familiales et les caisses de la Mutualité sociale agricole. Pour leur financement, la CNAF perçoit des transferts versés par le Fonds national d'aide au logement (FNAL) et le Fonds national de l'habitation (FNH), à hauteur de 1,17 milliard de francs au total en 2000 et de 1,2 milliard de francs prévus en 2001, soit une augmentation de 2,1 % par rapport à 2000. En outre, la CNAF participe au financement du Fonds national de l'habitation et du Fonds national d'aide au logement à hauteur de 20,7 milliards en 2000 et de 21,1 milliards de francs en 2001, soit une augmentation de 2 % par rapport à 2000.

Au total le montant des aides à la personne versées s'élève à 80 milliards de francs. L'allocation de logement familiale représente 17 milliards de francs, l'allocation personnalisée au logement 40 milliards de francs et l'allocation de logement sociale 22 milliards de francs.

S'agissant du coût supporté par la CNAF (soit le montant des prestations de l'allocation de logement familial auquel on doit ajouter la contribution de la CNAF au FNH et au FNAL), il s'élevait à 36,8 milliards en 1999, à 37,8 milliards en 2000 soit une augmentation de 2,7 % par rapport à 1999, et s'élèvera à 39,4 milliards en 2001 selon les prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale, soit une hausse de 4,2 % par rapport à 2000.

L'Etat quant à lui finance 41 % du montant des aides personnelles au logement.

SECURITE SOCIALE

COTISATIONS EMPLOYEURS

ETAT

FNAL

FNH

ALS

ALT

APL

ménages avec enfants et jeunes couples dont le type de logement ne permet pas d'obtenir l'APL

pour locataires parc privé et catégories n'ayant pas droit à l'APL notamment étudiants

pour associations qui hébergent à titre temporaire des personnes défavorisées

locataires du parc social conventionné

2,2 millions

+650.000 propriétaires

ALF

FNPF

b) La réforme proposée

Lors de la conférence de la famille du 15 juin 2000, il a été décidé de réformer le système des prestations logement dans le sens des recommandations formulées par le commissariat général au plan dans son rapport sur les minima sociaux datant du mois de mai 2000.

La réforme des aides au logement poursuit deux objectifs :

- harmoniser et simplifier les barèmes des aides, regroupés dans un barème unique (hors le cas des logements-foyers) ;

- améliorer l'équité des aides en prenant en compte tous les revenus de la même manière (revenus du travail, minima sociaux, RMI).

Elle harmonise et simplifie le dispositif des aides personnelles et permet donc un traitement plus équitable et plus cohérent de l'aide des ménages ayant de très faibles revenus, qu'ils soient issus du travail ou de transferts sociaux ; un ménage ayant des revenus du travail de même niveau que le RMI aura la même aide que le bénéficiaire de cette allocation alors que son aide est aujourd'hui nettement inférieure.

Le coût important de cette réforme est évalué à 6,5 milliards de francs dont 2,9 milliards de francs seront supportés par la branche famille et dont une partie sera prise en charge sur les crédits du secrétariat d'Etat au logement.

4,8 millions d'allocataires seront concernés par ces mesures qui interviendront en deux temps : mise en place d'un barème intermédiaire dès le 1 er janvier 2001 permettant le même niveau d'aide jusqu'à environ 75 % du RMI, mise en place du barème définitif au 1 er janvier 2002 avec aide identique jusqu'au niveau de revenu correspondant au RMI.

Le projet de loi de financement pour 2001 évalue le coût de la réforme pour la branche famille à 1,3 milliards en 2001 - 600 millions ayant été provisionnés dans les comptes tendanciels - et 2,9 milliards de francs en 2002, la charge résultant pour l'Etat étant de 2 milliards de francs en 2001 et de 3,6 milliards en 2002.

Votre rapporteur pour avis approuve cette réforme, que la commission des finances appelle d'ailleurs de ses voeux depuis plusieurs années. Il s'agit en effet d'une mesure de justice sociale car elle prend en compte, sur un pied d'égalité, les revenus de transfert et les revenus d'activité et constitue donc un moyen de lutter contre le phénomène de " trappe à pauvreté ".

Toutefois, cette réforme souffre de plusieurs insuffisances :

- tout d'abord, elle s'est faite par le haut, c'est-à-dire que toutes les prestations ont été revalorisées, sans souci d'économies, alors qu'il existe des sources d'économies potentielles : la révision des conditions de ressources notamment pour les étudiants, la remise à plat des frais des caisses d'allocations familiales qui sont beaucoup trop élevés ; à défaut d'économies, le risque est grand, en cas de retournement de conjoncture, de rencontrer des difficultés pour le financement de la réforme ;

- ensuite, la réforme est incomplète : elle ne prend notamment pas en compte les aides à l'accession, et elle n'aboutit pas à une unification complète des aides, qui supposerait une réforme du conventionnement ;

- le financement de la réforme des aides personnelles est réalisée au détriment des aides à la pierre ;

- enfin, la réforme n'a pas simplifié l'extraordinaire complexité des aides au logement en France.

Résultats APL, ALS, ALT pour 1999

(en millions de francs)

Prestations tous régimes versées au titre de

Participation

Prestations régime général Versement CAF

Dépenses branche famille
(CNAF)

Recettes branche famille (CNAF)

Métropole

DOM

Etat*

Métropole

DOM

APL

39.478

0

15.554

37.908

0

20.420

722

ALS

22.866

374

17.925

19.943

374

432

ALT

281

2

130

281

2

136

Contribution CNAF au FNH / FNAL

20.556

Total recettes CNAF au titre du logement

1.154

* Les soldes au 31.12.1999 font apparaître respectivement une créance de l'Etat de 420 et 103 millions de francs et une dette de 1,6 million de francs.

Source : Direction de la sécurité sociale (SDPEF/6A)

II. LA MALADIE

En 2001, comme en 2000 et en 1999, la branche maladie connaît des résultats déficitaires marqués notamment par une hausse, d'ordre aussi bien conjoncturel que structurel, des dépenses de l'assurance maladie.

Comptes de la branche maladie
en encaissements/décaissements

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

Recettes

577,4

601

638

665,9

Evolution

+ 3,3%

+ 4,1%

+ 6,2 %

+ 4,4 %

Dépenses

593,3

610

644,1

666,6

Evolution

+ 3,5 %

+ 2,8%

+ 5,6 %

+ 3,5 %

Solde

- 15,9

- 9

- 6,1

- 0,756

Source : CCSS 09 2000

En 1999, le solde négatif de la branche maladie s'élève à près de 9 milliards de francs, chiffre qui correspond à une comptabilité d'encaissements / décaissements. En droits constatés, d'après le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, ce solde négatif est de 5 milliards de francs, soit un écart entre les deux modes de comptabilisation de 4 milliards de francs.

Pour 2000, les prévisions de résultat avancées par la commission des comptes font apparaître un exercice déficitaire de l'ordre de 6,1 milliards de francs en encaissements / décaissements et de l'ordre de 7,4 milliards de francs en droits constatés. Si le déficit de la branche maladie baisse entre 1999 et 2000, cette baisse cache une véritable accélération des dépenses qui augmentent, entre 1999 et 2000, de 5,6 % et passent d'un montant de près de 610 milliards de francs à un montant de plus de 644 milliards de francs. Parallèlement, et c'est ce qui explique la diminution du déficit, les recettes connaissent elles aussi une augmentation extrêmement dynamique entre 1999 et 2000 : + 6,2 %.

Pour 2001, les prévisions de la commission des comptes annoncent une nouvelle réduction du déficit qui s'établirait à 756 millions de francs en encaissements / décaissements et hors coût des mesures du projet de loi de financement. La présentation des comptes en droits constatés fait même apparaître un excédent de la branche maladie pour 2001 : + 1,5 milliard de francs. Là encore il faut bien distinguer à l'intérieur de ce solde la dynamique des recettes de celle des dépenses : entre 2000 et 2001, les dépenses augmenteront de 3,5 % passant d'un montant total de 644 milliards de francs à 667 milliards de francs, tandis que les recettes connaîtront, elles, une hausse de 4,4 %.

L'amélioration des résultats comptables de la branche maladie ne doit donc pas occulter l'échec total de la maîtrise des dépenses maladie.

Cet échec suggère à votre rapporteur pour avis les réflexions suivantes : tout d'abord, il est aujourd'hui indispensable de mettre en place une politique de médecine de ville régulée, responsable et efficace de même qu'il est plus que nécessaire de mener une politique hospitalière d'excellence afin notamment de réduire les inégalités, aussi bien statutaires que géographiques, qui persistent entre établissements. Enfin, votre rapporteur pour avis s'interroge sur la portée, aujourd'hui en France, des politiques de santé publique . Le gouvernement a-t-il vraiment pris conscience de l'ampleur de ces défis ? Il est permis à votre rapporteur pour avis d'en douter.

Comparaison des comptes en encaissements/décaissements
et en droits constatés de la branche maladie

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

ED

DC

ED

DC

ED

DC

ED

DC

Recettes

577,4

581,1

601

604,8

638

636,9

665,9

667,8

Dépenses

593,3

595,8

610

609,8

644,1

644,3

666,6

666,3

Solde

- 15,9

- 14,7

- 9

- 5

- 6,1

- 7,4

- 0,75

+ 1,5

Source : CCSS 09 2000

A. LA DÉRIVE COMPLÈTE DES DÉPENSES MALADIE

1. A quoi sert l'ONDAM ?

L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) comprend pour la métropole et les départements d'outre-mer les dépenses remboursées par les régimes de base pour les prestations suivantes : dépenses de soins de santé (dépenses de soins ambulatoires et dépenses d'hospitalisation) pour les risques maladie, maternité et accidents du travail, ainsi que les dépenses de prestations en espèces pour les risques maladie et accidents du travail. Pour les risques accidents du travail, seules sont retenues les dépenses liées à l'incapacité temporaire. A partir de l'année 2000, l'ONDAM est défini en retranchant à ces dépenses les remises conventionnelles versées par les entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques au titre de l'article L. 162-18 du code de la sécurité sociale et la contribution, visée à l'article L. 132-8 du même code, des entreprises n'ayant pas signé de convention avec le comité économique des produits de santé (la clause de sauvegarde).

L'ONDAM a été voté par le Parlement à 658,3 milliards de francs pour 2000, en progression de 2,5 % par rapport à une base de dépenses reprenant, pour les dépenses de soins de ville et le secteur médico-social, les prévisions présentées dans le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 1999. Il a ensuite été décliné par le gouvernement en quatre objectifs prévisionnels : soins de ville, hospitalisation, secteur médico-social, cliniques privées. Cette déclinaison a accordé une priorité au secteur médico-social, comme en 1998 et 1999. La régionalisation a été poursuivie pour les dépenses encadrées des établissements hospitaliers publics.

En 1999, les dépenses d'assurance maladie ont dépassé de 11,3 milliards de francs l'objectif fixé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. L'objectif avait été fixé à 629,9 milliards de francs en progression de 2,5 % par rapport à 1998. Les réalisations ont atteint 641,2 milliards de francs, en progression de 2,9 % par rapport à l'année précédente. Le dépassement de 11,3 milliards de francs résulte en majeure partie du dépassement de l'année antérieure (9,8 milliards de francs), l'objectif 1999 ayant été calculé à partir de l'objectif 1998 et non des dépenses réalisées ; il résulte également de la forte progression des dépenses de soins de ville (3,8 % hors transferts). Les établissements sanitaires du secteur public ont, quant à eux, respecté leur objectif de dépenses.

Le calcul des objectifs 2000 a intégré plusieurs effets de champ, dont le principal est l'achèvement de l'intégration dans la dotation globale hospitalière de l'ensemble des dépenses de soins de ville facturés à l'acte par les établissements ex-PJP, conformément à l'article 1.1 b de l'avenant annuel 1999 à la convention d'objectif et de gestion conclue entre l'Etat et la CNAMTS. Ce transfert, qui affecte l'enveloppe de soins de ville et les établissements sanitaires publics, est évalué à 555 millions de francs.

L'objectif 2000 a été fixé à 658,3 milliards de francs, en progression de 2,5 % par rapport à une base intégrant ces transferts et tenant compte des dépenses réalisées en 1999. Cet objectif se décompose comme suit :

- l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses de soins de ville a été fixé pour 2000 à 291,6 milliards de francs. Il intègre les effets prévisibles de plusieurs mesures de santé publique et prend en compte les transferts mentionnés ci-dessus ainsi que les effets du programme de médicalisation des établissements pour personnes âgées qui fait basculer les dépenses de l'enveloppe soins de ville vers l'enveloppe médico-sociale de l'ONDAM, pour un montant de 200 millions de francs ;

- l'objectif d'évolution des dépenses des établissements de santé publics et assimilés a été fixé pour 2000 à 260,8 milliards de francs ;

- l'objectif de dépenses d'assurance-maladie pour le secteur médico-social a été fixé pour 2000 à 47,2 milliards de francs et correspond à une évolution de 4,9 % par rapport aux dépenses 1999 ;

- l'objectif de dépenses des cliniques privées a été fixé pour 2000 à 42,1 milliards de francs. Cette rubrique se compose de deux postes : les cliniques privées sous objectif quantifié national (OQN) hors consommations intermédiaires et les établissements ou les prestations hors OQN. L'OQN des cliniques privées est fixé à 43,7 milliards de francs, en hausse de 2,2 % par rapport à l'objectif de 1999 corrigé à la baisse des transferts de fongibilité à hauteur de 179 millions de francs. L'objectif de dépenses des cliniques privées hors OQN, après avoir été réduit en 1999 à cause du transfert dans le champ des soins de ville des prestations liées à l'insuffisance respiratoire, progresse en 2000 au même rythme que l'ensemble de l'objectif des cliniques privées ;

- les autres postes concernent notamment les départements d'outre-mer qui sont traités à part. L'objectif en 2000 est de 14,9 milliards de francs, en hausse de 4,4 % par rapport à l'objectif 1999. Enfin, le cadrage de l'ONDAM pour 2000 contient une marge de manoeuvre d'environ 600 millions de francs.

Pour l'année 2000, la prévision des dépenses brutes du champ de l'ONDAM, présentée par la commission des comptes dans son rapport de septembre 2000, est de 672,4 milliards de francs en augmentation de 4,9 % par rapport à 1999. L'objectif fixé à la fin de 1999 serait donc dépassé de 13,2 milliards de francs. Pour le seul régime général, le dépassement serait de 11,5 milliards de francs, en métropole sur le champ de l'ONDAM. Il porte intégralement sur les soins de ville dont les dépenses dans le champ du régime général augmenteraient de 7 % en 2000. Ce dépassement est imputable à quatre postes principaux : le médicament à hauteur de 6,2 milliards de francs ; les honoraires de certaines professions pour 3,8 milliards de francs ; les indemnités journalières pour 1,7 milliard de francs et les dispositifs médicaux (TIPS) pour 1,6 milliard de francs. Selon la commission des comptes, l'écart constaté entre les taux de croissance des deux dernières années s'explique très largement par la variation des délais de liquidation des feuilles de soins.

Ainsi pour la troisième année consécutive, les dépenses d'assurance maladie vont déraper, en 2000, de plus de 10 milliards de francs (le dépassement de l'ONDAM a été en 1998, 1999 et 2000 respectivement de 12 milliards, 10 milliards et 13 milliards de francs). En mai 2000, lors des derniers comptes prévisionnels de la commission des comptes de la sécurité sociale, le dépassement devait encore rester limité à 3,5 milliards de francs. Mais cette prévision n'a pas résisté à l'emballement constaté, depuis le début de l'année, de la plupart des postes de la consommation de soins.

Sur les huit premiers mois de 2000, les dépenses du régime général d'assurance-maladie (salariés) ont ainsi progressé de 5,4 % par rapport à la période correspondante de l'année précédente, soit un rythme déjà plus de deux fois supérieur à la norme d'évolution votée par le Parlement (2,5 %). Les chiffres définitifs de juillet 2000 ont fait état d'une hausse de 5,3 % des dépenses maladie par rapport aux sept premiers mois de 1999. Sur l'année entière, le rythme de progression de l'ONDAM 2000 devrait être de 4,1 %, qui reste un rythme très supérieur à celui des années précédentes.

Le poste médicaments, placé cette année sous la responsabilité de l'Etat, enregistre une progression de 12,1 % selon les résultats provisoires fin août 2000 ( + 11,4 % définitifs fin juillet). C'est sans précédent depuis 1989, année où la dépense des médicaments avait augmenté de 14,8 %. Les indemnités journalières progressent de 8,1 % à la fin août (chiffres provisoires), les honoraires médicaux et dentaires de 4,3 %. Ainsi la hausse des soins de ville est estimée, sur les huit premiers mois de l'année, à 8,5 %, tandis que les crédits aux hôpitaux publics restent conformes aux prévisions.

L'absence de maîtrise des dépenses de santé se répète donc d'année en année. Sur une base 100 pour l'année 1997, les dépenses comprises dans le champ de l'ONDAM passeront à 117,3 en 2001 (en francs courants et en prenant pour hypothèse le respect de l'objectif pour 2001). Si les objectifs votés en loi de financement depuis 1996 avaient été respectés chaque année, l'indice ne se serait élevé qu'à 110,1. En d'autres termes, l'ONDAM pour 2001 aurait été fixé à 651,1 milliards de francs (contre 693,3 milliards), soit un écart de plus de 42 milliards de francs. Entre la première loi de financement de la sécurité sociale, avec un ONDAM réalisé de 599,5 milliards de francs et le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, notre système de soins aura donc englouti près de 100 milliards de francs supplémentaires, dont il est difficile d'affirmer qu'ils répondent intégralement à de nouveaux besoins ou à des soins de meilleure qualité.

Objectifs fixés dans les lois de financement
(en septembre n-1 pour l'année n) et réalisations

1998

1999

2000

Objectif loi de financement

- en milliards

613,8

629,9

658,3*

- en évolution

2,3 %

2,6 % (1)

2,5 %

Réalisation

623,6

641,2

671,5* (p)

Ecart entre réalisation et objectif en milliards

9,8

11,3

13,2* (p)

Variation constatée par rapport à l'année précédente en %

4,0 %

2,9 %

4,9 % (p)

(p) prévision.

*Données nettes de la remise de l'industrie pharmaceutique.

(1) Variation calculée par rapport à l'objectif fixé un an plus tôt pour l'année précédente. A partir de la loi de financement pour 2000, le taux de variation affiché pour l'objectif est calculé par rapport à une estimation des dépenses de l'année en cours (objectif " rebasé ").

Source : Rapport de la CCSS septembre 2000

Pour 2001, le taux de progression de l'ONDAM a été fixé par le gouvernement à 3,5 % avec une enveloppe de 693,3 milliards de francs, soit un point de plus qu'en 1999 et 1998. Selon l'ancienne ministre de l'emploi et de la solidarité, Mme Martine Aubry, " il s'agit de prendre un objectif réaliste, c'est-à-dire ayant une chance d'être effectivement atteint ". Mais pourquoi le gouvernement a-t-il attendu si longtemps avant de faire preuve de ce réalisme nécessaire alors même qu'il apparaissait évident que les objectifs fixés jusqu'alors ne pourraient en aucun cas être respectés ?

Comme l'année passée, les données communiquées par le gouvernement sur la répartition de l'ONDAM pour 2001 en quatre sous-objectifs ne sont pas homogènes. Deux taux d'évolution, dans les secteurs qui ont donné lieu à des dépassements importants cette année, sont calculés par rapport à une base 2000 révisée : + 3% pour les soins de ville et + 3,4 % pour les hôpitaux. Les deux autres taux ont été établis d'objectif à objectif : + 5,8 % pour le médico-social et + 3,3 % pour les cliniques privées.

Mais, comment, alors que les outils de régulation des dépenses restent identiques, le gouvernement peut-il assurer que, cette fois, l'objectif sera tenu ? Le gouvernement répond qu'il le sera grâce aux mesures structurelles déjà prises et dont les effets devraient monter en puissance (politique du médicament, instauration de la clause de sauvegarde imposée à l'industrie pharmaceutique : selon le gouvernement ces dispositifs devraient permettre à la sécurité sociale d'économiser cette année de 3,5 à 4 milliards de francs, dont la moitié au titre de la seule clause de sauvegarde).

Décomposition de l'objectif national d'assurance maladie
en 1999 - 2000

Tous régimes

Comptes 1999

Objectif 1999

Objectif 2000

Objectif 00/ Objectif 99

Objectif 00/
base 99 hors effets de champ
*

Objectif 00/ Comptes 1998

I. Soins de ville

287,4

274,7

291,6

6,2 %

2,0 %

1,5 %

I.1. Dépenses délégués

138,0

-

140,3

-

2,0 %

-

I.2. Autres dépenses de ville

149,4

-

151,3

-

2,0 %

-

II. Versements aux établissements

338,5

339,2

350

3,2 %

2,4 %

3,4 %

I.1. Etablissements sanitaires

253,3

254,3

260,8

2,6 %

2,4 %

3,0 %

I.1.1. Etablissements sanitaires sous D.G.

248,2

249,0

255,7

-

2,4 %

I.1.2. Autres établissements sanitaires

4,3

4,3

4,3

-

2,4 %

I.1.3. Honoraires du secteur public

0,8

0,8

0,8

-

2,4 %

I.2. Médico-social

44,1

43,9

47,2

7,5 %

4,9 %

7,0 %

I.2.1. Médico-social : E.I. - A.H.

29,7

-

31,7

-

3,8 %

I.2.2. Médico-social : personnes âgées

14,4

-

15,5

-

7,4 %

I.3. Cliniques privées

41,1

41,3

42,1

1,9 %

2,2 %

2,4 %

I.3.1. Cliniques privées sous OQN hors C.I.

37,6

37,4

38,2

-

2,2 %

-

1.3.2. Cliniques privées hors OQN

3,5

3,9

3,9

-

2,2 %

-

III. Ressortissants français à l'étranger

1,1

0,9

1,2

-

1,3 %

-

IV. Prestations DOM

14,2

13,9

14,9

7,2 %

4,4 %

4,9 %

Marge de manoeuvre résiduelle

-

1,2

0,6

-

-

-

Objectif national

641,2

629,9

658,3

4,5 %

2,5 %

2,7 %

* Cette colonne neutralise l'ensemble des transferts entre les différentes sous-catégories de l'ONDAM.

Source : CCSS O9 2000 et projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001

Pourtant, alors qu'une politique de vraie maîtrise des dépenses s'impose, le gouvernement profite de la relative amélioration des comptes, qui résulte avant tout de la bonne tenue des cotisations sociales, pour engager des moyens nouveaux. Rares sont ainsi les dispositions dans ce projet de loi de financement visant explicitement à la maîtrise des dépenses de santé.

a) Des moyens nouveaux (articles 28 et 30)

L'article 28 du présent projet de loi prévoit un alignement complet des prestations de la caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes (CANAM) sur celles du régime général.

Le coût de cette mesure est évalué à 1,3 milliard de francs. Ce coût est intégré à l'ONDAM mais fait l'objet d'un traitement comptable pour le moins étonnant. En effet, ce coût est déjà répercuté dans le compte tendanciel du régime général pour 2001 ; or, cette charge ne pèsera pas, par définition, sur le régime général, ce qui justifie la régularisation (1 milliard de francs en moindres dépenses) inscrite à l'annexe c du projet de loi.

Corrélativement, le gouvernement augmentera par décret le taux des cotisations de ce régime, l'objectif étant d'assurer le financement de ces prestations supplémentaires. D'un côté le gouvernement décide donc d'améliorer les prestations des non salariés non agricoles, de l'autre, pour lui permettre de financer cette amélioration, il augmente le taux des cotisations de ce régime ! Ainsi, alors même que la conjoncture est favorable, les prélèvements augmentent.

En outre, cette mesure est complétée par une disposition permettant aux intéressés de résilier leurs contrats en cours auprès d'organismes de protection complémentaire dans le but de leur permettre de choisir un organisme complémentaire qui leur consente une baisse de cotisation correspondant à la réduction de la part de prise en charge complémentaire consécutive à l'amélioration des prestations de base. Cette disposition constitue probablement un " cavalier social " au regard des dispositions de l'article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale.

L'article 30 du présent projet de loi concerne l'alimentation du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville et fixe à 700 millions de francs le montant des dépenses autorisées pour 2001.

Ce fonds a été instauré par l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 qui le dotait de 500 millions de francs. Il a pour mission de soutenir les mutations de l'exercice de la médecine ambulatoire. Créé pour cinq ans, géré en partenariat avec l'ensemble des professionnels de santé et rattaché, hors ONDAM, à la CNAMTS, ce fonds est chargé de financer des aides visant à l'amélioration de la qualité et de la coordination des soins de ville, notamment en soutenant le développement des nouveaux modes d'exercice de ces soins, au premier rang desquels les réseaux.

La définition des modalités de mise en oeuvre de ce fonds est intervenue tardivement avec le décret n° 99-940 du 12 novembre 1999. Les membres de son comité national de gestion ont été nommés par un arrêté en date du 10 janvier 2000. Les modalités de mise en place des comités régionaux de gestion ont fait l'objet d'une circulaire en date du 14 mars 2000. La répartition des ressources du fonds a été effectuée par un arrêté du 11 avril 2000. Enfin, le comité national de gestion a été installé le 4 mai 2000, soit plus d'un an et demi après la création de ce fonds par la loi. En outre, l'annexe b 1 au présent projet de loi de financement précise que, près de deux ans après le vote de la loi de financement instituant ce fonds, les comités régionaux de gestion sont toujours en cours de constitution.

En 1999 et en 2000, la dotation de ce fonds s'est élevée, d'après les dispositions des lois de financement de la sécurité sociale, à 500 millions de francs chaque année, soit 1 milliard de francs au total. L'article 30 du présent projet de loi de financement fixe à 700 millions de francs le montant des dépenses autorisées pour 2001, soit une augmentation de 40 % par rapport aux deux années précédentes.

Selon l'exposé des motifs de l'article 30, les dépenses du fonds ont été nulles en 1999 et devraient atteindre 200 à 300 millions de francs en 2000. Même en tenant compte de la lenteur de la montée en puissance de ce dispositif depuis sa création, on peut s'interroger sur la réelle utilité de doter ce fonds de 700 millions de francs en 2001.

L'interprétation des différents chiffres, parfois contradictoires, concernant ce fonds est en effet complexe : en réalité le fonds est doté d'un milliard de francs (500 millions de francs en 1999 de même qu'en 2000), reportable d'un exercice sur l'autre en vertu de l'article 11 du décret n° 99-940 du 12 novembre 1999 ; les dépenses effectuées au titre du fonds devraient se situer entre 60 et 65 millions de francs en 2000, puis de l'ordre de 500 millions de francs en 2001, soit un total de 560 à 565 millions de francs, pour des disponibilités d'un milliard de francs.

Quel est donc l'intérêt de prévoir dans le projet de loi de financement un article qui fixe le montant maximal des dépenses autorisées de ce fonds pour 2001 à 700 millions de francs alors même que celles-ci ne devraient atteindre en 2001 que 500 millions de francs ? Les montants d'ores et déjà disponibles sont largement suffisants pour assurer les besoins du fonds pour 2001.

En outre l'article 30 du projet de loi de financement prévoit également que désormais un arrêté ministériel fixera chaque année le montant de la participation des régimes obligatoires compte tenu du montant des dépenses autorisées par le Parlement et des crédits non consommés au titre des exercices antérieurs. Or, le montant des dépenses autorisées par le Parlement tient déjà compte des crédits reportés. Il serait donc plus pertinent de prévoir que le Parlement détermine les ressources du fonds qui sont ensuite réparties par arrêté entre les différents régimes d'assurance maladie.

b) Des mesures d'adaptation du système de soins (articles 29 et 37)

L'article 29 du présent projet de loi vise à la prorogation des expérimentations en matière de filières et réseaux de soins prévues dans le cadre de l'article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale introduit par l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996.

L'annexe b 1 au projet de loi de financement pour 2001 fait état de sept actions agréées pour l'instant.

Ces expérimentations avaient été prévues pour une durée de cinq ans à compter de la publication de l'ordonnance de 1996. L'article 29 du présent projet de loi de financement propose de proroger ce dispositif jusqu'à la fin 2001.

Sur la forme, votre rapporteur pour avis se voit dans l'obligation de souligner que cette mesure constitue un " cavalier social ", qui n'a probablement pas sa place dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Sur le fonds, votre rapporteur pour avis redit son attachement à l'idée des réseaux de soins dans laquelle il voit une piste d'avenir. Les réseaux permettent de faire travailler ensemble les différents acteurs du système de santé. Cependant, comment ne pas s'interroger sur l'extrême lenteur pour ne pas dire le quasi immobilisme de la commission Soubie mise en place pour les promouvoir et les valider ?

L'article 37 du projet de loi de financement porte sur la répartition des charges du budget de la santé, d'une part, et de l'assurance maladie, d'autre part, et concerne les appartements de coordination thérapeutiques (ACT) ainsi que les consultations d'alcoologie dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale.

S'agissant des ACT, qui existent depuis 1995 et qui comprennent 341 places cofinancées par l'Etat et l'assurance maladie, auxquelles s'ajoutent 40 places d'accompagnants exclusivement financées par l'Etat, le projet de loi prévoit notamment de transférer à l'assurance maladie la prise en charge des dépenses de fonctionnement des ACT au titre des patients, sans préjudice d'une participation des collectivités locales, soit un montant de 74 millions de francs, dont seulement 29,41 millions dans le champ de l'ONDAM.

S'agissant des consultations d'alcoologie, le projet de loi de financement prévoit un transfert à l'assurance maladie de 89 millions de francs, inscrits jusqu'alors au budget de l'emploi et de la solidarité, dont seulement 25 millions de francs dans le champ de l'ONDAM.

Ainsi le montant total du transfert de crédits de l'Etat vers l'assurance maladie au titre des ACT et des interventions des consultations d'alcoologie dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale s'élèvent à 54,4 millions de francs dans le champ de l'ONDAM.

c) Maîtriser les dépenses du service de santé des armées et de l'Institution nationale des Invalides (article 36)

L'article 36 du projet de loi de financement prévoit de financer les dépenses du service de santé des armées (SSA) et de l'Institution nationale des Invalides (INI) prises en charge par les régimes d'assurance maladie sous forme de dotations globales annuelles, dont l'évolution sera arrêtée chaque année en fonction de l'objectif prévisionnel des dépenses des établissements de santé et dont la répartition sera effectuée en même temps que la dotation globale aux établissements publics de santé.

Le montant des dépenses à la charge de l'assurance maladie pour ces deux institutions est évalué à 2,1 milliards pour le SSA et 43,8 millions de francs pour l'INI en 1999.

En outre, cet article prévoit également que certaines des dépenses incluses dans l'objectif national d'évolution des établissements hospitaliers pourront ne pas être incluses dans la répartition en dotations régionales du montant total annuel des dépenses hospitalières prise en charge pour le calcul de la dotation globale et des tarifs des prestations. En l'occurrence, les dotations du SSA et de l'INI, qui ont une vocation nationale, ne pourront relever des agences régionales de l'hospitalisation.

2. A quoi servent les mécanismes de régulation ?

Dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2000, la Cour des comptes a dressé un bilan très critique des mécanismes de régulation collective de l'offre de soins et plus généralement de la mise en oeuvre des politiques conventionnelles.

S'agissant des mécanismes de régulation, votre rapporteur pour avis ne peut que constater, comme il l'avait d'ailleurs déjà fait dans ses rapports précédents, l'inefficacité des différents dispositifs de régulation, tout au moins de ceux qui ont encore le mérite d'exister.

a) La régulation par les tarifs et la négociation d'avantages annexes

Comme le rappelle la Cour des comptes dans son rapport de septembre 2000, " l'efficacité des mécanismes conventionnels suppose qu'un maximum de professionnels accepte de rentrer dans la logique d'une tarification unique servant de base au remboursement, de manière que chaque assuré puisse s'adresser à un professionnel conventionné ".

Toutefois l'esprit même du conventionnement et des mécanismes de régulation s'est vu détourné lorsqu'il a été question, pour obtenir un taux d'adhésion le plus large possible, notamment chez les médecins de ville et les dentistes, d'instaurer une différenciation des prix et des taux de remboursement contraire à la logique des conventions et qui a entraîné une réduction de la qualité de la prise en charge.

En outre, l'adhésion des médecins n'a été acquise qu'en consentant aux spécialistes des tarifs supérieurs à ceux des généralistes, ce qui a favorisé une recrudescence du nombre de spécialistes.

Enfin, votre rapporteur pour avis ne peut que déplorer le fait que la négociation des conventions ait été davantage axée sur les avantages annexes accordés aux professionnels dans le souci de privilégier la solvabilisation de la demande permise par le remboursement.

La Cour des comptes rappelle dans son rapport que les deux avantages annexes les plus importants sont la prise en charge, par l'assurance maladie, d'une fraction des cotisations sociales des professionnels et, pour les médecins, celle des deux tiers du régime particulier de l'allocation supplémentaire vieillesse (ASV).

Le premier avantage, dont le coût pour l'assurance maladie est estimé à 8,2 milliards de francs, représente un supplément de revenu net de 12,7 % pour les médecins, 10,2 % pour les dentistes et 8,9 % pour les auxiliaires médicaux. Il avait été accordé au départ en échange de la signature des conventions et de l'adhésion des médecins. Même après que les conventions ont été annulées par le Conseil d'Etat, cet avantage a été maintenu.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a introduit la possibilité pour les caisses de majorer la prise en charge pour faire évoluer le système de soins, mais les modalités d'application de ce régime n'ont pas été définies et il demeure très difficile de remettre en cause un avantage considéré comme partie intégrante du revenu réel. En outre, la prise en charge des cotisations, qui constitue en réalité un supplément d'honoraires, obscurcit le débat sur le niveau de rémunération des professionnels.

b) La régulation portant sur les volumes

L'insuffisance de la voie conventionnelle à mettre en place des mécanismes de régulation efficaces fondés sur la définition d'objectifs quantitatifs a conduit l'ordonnance du 24 avril 1996 et son décret d'application à élaborer un nouveau système, fondé sur une responsabilisation accrue des médecins dont la convention devait fixer un objectif opposable englobant les honoraires et les prescriptions ainsi que déterminer les modalités de l'individualisation de la charge du reversement entre les médecins. Mais les mécanismes de reversement se sont révélés impossibles à mettre en oeuvre pour des raisons juridiques et pratiques.

Pour les professions de santé autres que les médecins de ville, la logique de l'ordonnance de 1996 rendait la négociation conventionnelle des objectifs subalterne puisqu'une régulation globale devait être assurée via l'objectif fixé aux médecins. Aucun accord n'a pu être trouvé en 1998 et 1999 sur la fixation des objectifs par profession (sauf pour les laboratoires d'analyse en 1998 et les infirmières en 1999).

Cette impossibilité de mettre en place une régulation quantitative efficace a entraîné une nouvelle réforme inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Il s'agissait de rendre, pour chaque profession, l'objectif quantitatif en principe opposable. La régulation n'est plus recherchée par des reversements mais par des réajustements du tarif ou de la cotation des actes. Si les partenaires ne parviennent pas à s'entendre, les caisses d'assurance maladie sont autorisées à prendre unilatéralement les mesures nécessaires.

Toutefois, le constat de l'échec des mécanismes de régulation des volumes que fait la Cour des comptes est sans appel : " force est de constater que, pour aucune des professions, les mécanismes de régulation successivement tentés dans le cadre des conventions n'ont été véritablement efficaces, ce qui conduit à se demander si le conventionnement, tel qu'il a été pratiqué, peut contribuer efficacement à la régulation des volumes. ".

c) Le système de sanctions (article 31)

Des dispositifs de sanctions sont prévus par les conventions. Ils ont été conçus comme un élément de leur équilibre général et l'un des éléments de la maîtrise des dépenses. Mais l'ensemble des textes aboutit à un enchevêtrement des dispositifs d'origine légale ou réglementaire et d'origine conventionnelle, ce qui rend le système actuel des sanctions particulièrement opaque et complexe : de nombreux manquements relèvent aussi bien du dispositif conventionnel, du contentieux technique des juridictions ordinales, du contentieux disciplinaire, sans compter une possible action devant le juge pénal et/ou l'action en dommages intérêts devant la juridiction civile. Ce manque de clarté apparaît aussi dans la détermination de la faute : l'obligation peut trouver sa source uniquement dans la convention ou dans la loi et la convention. Dès lors, et c'est ce que souligne la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2000 : " les dispositifs prévus sont cumulatifs, ce qui affecte leur lisibilité. La complexité de l'architecture générale des obligations et des sanctions est génératrice de contestations et de difficultés pratiques d'application par les caisses . ".

La privation des avantages conventionnels en cas de non respect de la convention par le professionnel est considérée comme une sanction. Or, les dispositifs de sanctions conventionnelles ne comportent pas de barème précis des pénalités. Des différences existent entre professions de santé alors qu'elles sont, quant à leurs relations avec l'assurance maladie, dans une même situation. Ces dispositifs sont donc fragiles juridiquement.

En outre l'efficacité même des dispositifs est limitée. Les invalidations contentieuses fréquentes privent de base légale toutes les procédures de sanctions mises en oeuvre. Le dispositif de sanctions s'appuie sur des organes paritaires souvent créés par les conventions, qu'il faut donc mettre en place et dont le fonctionnement est perturbé par les remous de la vie conventionnelle.

Les conclusions de la Cour des comptes à propos du système des sanctions étaient les suivantes : " il serait opportun d'engager une réflexion conduisant à revoir tant l'architecture des dispositifs de sanctions que les mécanismes procéduraux. Une réflexion serait utile sur la qualification retenue en cas de privation des avantages conventionnels liée à l'inexécution de ses obligations par le professionnel de santé. (...) A la notion de sanction devrait se substituer celle de rupture du contrat, ce qui serait d'ailleurs plus conforme à la logique d'un véritable système conventionnel . "

L'article 31 du projet de loi initial de financement de la sécurité sociale pour 2001, supprimé par l'Assemblée nationale, visait à une refonte des mécanismes de règlement des litiges entre les professionnels de santé et les caisses d'assurance maladie. Cet article, qui avait été conçu sans aucune concertation des professionnels de santé, prévoyait :

- l'instauration d'une possibilité de conciliation préalable, dont l'échec aurait dû autoriser les caisses à prendre des mesures immédiatement exécutoires allant jusqu'à la suspension du conventionnement pour une durée maximale de trois mois ;

- la dévolution aux seules sections des assurances sociales de l'ensemble du contentieux des sanctions des professionnels de santé, actuellement éclaté en plusieurs instances comme il a déjà été souligné.

En outre cet article avait également pour objet d'inclure dans le système de sanctions le non-respect des dispositions conventionnelles, rendues obligatoires par leur approbation, les conventions ne pouvant dès lors plus introduire de sanctions.

Votre rapporteur pour avis reconnaît bien sûr l'inefficacité du système actuel de sanctions, son caractère complexe et illisible pour les professionnels de santé et donc la nécessité de le réformer, mais il désapprouve entièrement la méthode avec laquelle procède le gouvernement. On ne peut instaurer un nouveau dispositif de sanctions sans même se concerter avec les professionnels de santé qui sont les premiers concernés par ce dispositif. C'est pourquoi votre rapporteur pour avis se félicite de la suppression de cet article par l'Assemblée nationale.

De manière générale, les mécanismes de régulation sont donc aujourd'hui en perte de vitesse. Leur échec ne constitue d'ailleurs qu'un des éléments de la disparition progressive de toute forme de système conventionnel.

3. Existe-t-il encore un système conventionnel ? (article 41 ter)

Depuis la loi du 3 juillet 1971, un dispositif conventionnel national organise la participation des caisses d'assurance maladie au remboursement des soins et prescriptions délivrés par les professionnels de santé. Il vise ainsi à concilier l'exercice libéral de la médecine et des professions paramédicales, assorti du libre accès à leurs soins et prescriptions, d'une part, et une assurance maladie obligatoire d'autre part.

Initialement limitées à la fixation d'un tarif unique à l'échelle nationale pour l'ensemble des professionnels, les conventions ont vu leur champ et leur objet s'élargir pour englober une part croissante des composantes de la relation entre le patient et les professionnels de santé. Elles comprennent principalement deux types de dispositions : celles visant à la régulation collective des systèmes de soins et celles qui, dans une optique plus qualitative, visent à modifier les pratiques individuelles.

Dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2000, la Cour des comptes soulignait les limites évidentes de ce dispositif conventionnel : " les conventions n'ont réussi ni à assurer la régulation des dépenses ni à modifier les pratiques individuelles. La formule du généraliste référent, mise en place par les partenaires conventionnels pour tenter de trouver une voie nouvelle, n'a guère conduit pour l'instant à des résultats tangibles. Plus fondamentalement le cadre conventionnel lui-même, tel qu'il s'est développé, débouche sur des difficultés juridiques de fond. Une réflexion et une réforme d'ensemble apparaissent aujourd'hui nécessaires. ".

En outre les insuffisances dans les méthodes de préparation, de négociation et de suivi des conventions contribuent à expliquer que la plupart des conventions aient été annulées. C'est ce qui pose aujourd'hui un problème majeur. Si elle trouve en partie son origine dans des problèmes de fond que pose le cadre juridique des conventions, la précarité de celles-ci ne peut qu'être accrue par l'insuffisance de leur préparation.

La Cour des comptes a souligné à quel point l'ensemble des problèmes juridiques de fond posés par ces conventions avait été mésestimé et fragilisait le système conventionnel.

En effet, la crédibilité et l'efficacité d'un système de régulation supposent sa stabilité dans le temps. Or, les relations entre l'assurance maladie et les professions de santé sont souvent conflictuelles et les conventions sont systématiquement attaquées devant les juridictions. Dans la pratique, presque toutes les conventions ont été annulées, totalement ou partiellement. La jurisprudence du Conseil d'Etat admet, depuis 1999, que les clauses d'une convention sont divisibles et que l'annulation d'une clause n'entraîne pas nécessairement celle de la convention dans son ensemble.

Cette fragilité des conventions tient notamment à des problèmes de fond liés à la nature juridique du dispositif conventionnel. En effet, une convention, si elle est élaborée à l'issue d'une négociation de type contractuel, est considérée par les juridictions comme un règlement d'application d'une loi. La jurisprudence considère donc que le dispositif conventionnel doit respecter à la fois les contraintes qui s'imposent aux contrats administratifs et celles qui prévalent pour les textes réglementaires. L'extension progressive du champ d'application des conventions ne pouvait que renforcer les difficultés juridiques.

C'est pourquoi la Cour des comptes en conclut qu'il " serait nécessaire de réfléchir à la possibilité de redéfinir les domaines respectifs de compétence de la loi, du règlement et de la convention. "

La fragilité tient aussi en grande partie à l'organisation et aux formes de représentation collective des professions de santé. Le moins que l'on puisse dire, c'est que celles-ci ne se sont approprié aucun des systèmes imaginés pendant ces dernières années. Cela pose une question de fond sur la qualité du dialogue mené. Il semble que les professions de santé n'aient plus aucune confiance dans les instances de gestion du système de santé : gouvernement, caisses, syndicats.

Rien n'a été fait par le gouvernement pour tenter de sauver ce système conventionnel aujourd'hui sinistré. A cet égard, notre collègue député Claude Evin, rapporteur de l'assurance maladie au nom de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, déclarait récemment : " le système conventionnel est mort, (...) il faut redéfinir les relations entre le financeur - soit l'Etat, soit les caisses - et les professionnels de santé ".

Votre rapporteur pour avis ne peut que condamner ce désengagement et cette mauvaise volonté du gouvernement et approuve l'initiative de M. Claude Evin qui a proposé qu'un groupe de travail sur le thème de la réforme du système conventionnel soit mis en place. Il estime cependant que la première étape du renouveau sera de redonner confiance aux professionnels car rien ne se déroulera et ne fonctionnera sans eux.

Votre rapporteur pour avis tient toutefois ici à exprimer son approbation de l'article additionnel 41 ter introduit à l'Assemblée nationale, à l'initiative du gouvernement, et qui donne à l'assurance maladie la possibilité de conclure des conventions avec les distributeurs ou les fournisseurs de dispositifs médicaux. Votre rapporteur pour avis ne peut qu'approuver cet article qui devrait permettre de renforcer le partenariat conventionnel dans les secteurs des dispositifs médicaux en lui conférant les bases légales indispensables.

B. LES INÉGALITÉS HOSPITALIÈRES

1. La politique des fonds

Dans le secteur hospitalier, comme dans le reste de la branche maladie d'ailleurs, on assiste depuis 1996 à la multiplication des fonds qui sont autant d'éléments d'affectation au sein des dépenses de la branche maladie.

Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, il faut noter d'une part la création du Fonds pour la modernisation sociale des établissements de santé, qui entraîne la suppression du Fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé (FASMO) créé par la loi de financement pour 1998, d'autre part l'abondement à hauteur de 150 millions de francs du Fonds de modernisation des cliniques privées, sans compter l'existence par ailleurs du Fonds d'aide à l'adaptation des établissements hospitaliers (FIMHO), créé par la loi de finances pour 1998 et dont les crédits sont inscrits au chapitre 66-12 du budget du ministère de l'emploi et de la solidarité.

a) La création du Fonds pour la modernisation sociale des établissements de santé (article 33)

L'article 33 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 supprime le FASMO et crée un nouveau Fonds pour la modernisation sociale des établissements de santé (FMES).

Le FASMO avait été créé par l'article 25 de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998. Géré par la Caisse des dépôts et consignations, il était destiné aux personnels des hôpitaux publics et privés participant au service public soumis à des mesures de restructuration, ainsi qu'aux salariés des cliniques privées pour autant que l'opération concerne un établissement public.

Ce fonds était financé par des contributions des régimes obligatoires d'assurance maladie, à hauteur, pour le seul régime général, de 244 millions de francs en 1998 et de 650 millions de francs en 2000. Au total, en 1998, le FASMO avait été doté de 300 millions de francs répartis entre les différents régimes conformément au décret n° 98-1223 du 29 décembre 1998. Pour 1999, en revanche, le rapport de la commission des comptes ne mentionne aucun montant versé par la branche maladie au " fonds de modernisation de l'hôpital ".

Ce fonds avait pour mission de contribuer au financement des actions de modernisation sociale des établissements décidées dans le cadre d'un dialogue social, de participer au financement des contrats d'amélioration des conditions de travail et de financer les aides individuelles destinées à favoriser l'adaptation des personnels et leur mobilité lorsqu'ils sont personnellement concernés par une opération de restructuration. Il permet notamment de financer des indemnités exceptionnelles de mobilité, des primes à l'embauche pour les établissements accueillant les personnels quittant leur établissement dans le cadre de sa réorganisation, des actions de conversion ainsi que des indemnités de départ volontaire.

En raison de la lenteur de la mise en place du FASMO, au même titre d'ailleurs que le fonds d'aide à la qualité des villes, dénoncée par la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale de 1999, les dépenses du fonds furent faibles en 1999 et 2000 : 13 millions de francs en 1999 et 74 millions de francs en 2000. Les crédits du FASMO avaient été abondés au total de 300 millions de francs dès la fin 1998, dont 244 millions de francs financés par la branche maladie du régime général. C'est pourquoi ce fonds de modernisation présente actuellement un important excédent de ressources de l'ordre de 200 millions de francs.

Le tableau suivant retrace les dépenses effectives du FASMO par catégorie d'aide au 31 août 2000 (versements effectifs depuis la création du fonds ou montants payés par la Caisse des dépôts et consignations à cette date) auxquelles s'ajoutent les versements en cours par la CDC à la même date (montants engagés).

Récapitulatif des aides par prestation au 31 août 2000

(en francs)

Prestation

Montants au 31/08/2000

(Montants effectifs et versements en cours)

Cellules d'accompagnement

2 452 000

Remboursement du différentiel de rémunération

698 287

Indemnités de mobilité et de déménagement

5 457 675

Indemnités de départ volontaire

44 762 311

Actions de conversion

5 741 220

Total

59 111 493

Source : Ministère de l'emploi et de la solidarité

Votre rapporteur pour avis s'interroge dès lors sur l'opportunité de créer un nouveau fonds qui connaîtra sans doute les mêmes avatars que son prédécesseur.

L'article 33 du projet de loi de financement supprime donc le FASMO pour créer le Fonds pour la modernisation sociale des établissements de santé qui doit financer " des actions d'amélioration des conditions de travail des personnels des établissements de santé et d'accompagnement social de la modernisation des établissements de santé " selon les termes même du projet de loi. Comme le FASMO, ce fonds est géré par la Caisse des dépôts et consignations.

Les ressources du fonds sont constituées par une contribution des régimes obligatoires d'assurance maladie, dont le montant est fixé chaque année par arrêté ministériel. En outre, le solde disponible du FASMO est versé au FMES, à la date de sa création.

Conformément au protocole d'accord du 14 mars 2000 conclu entre le gouvernement et les organisations syndicales représentatives des personnels de la fonction publique hospitalière, le fonds a été porté à un milliard de francs en 2000, dont 400 millions de francs au titre des contrats d'amélioration des conditions de travail et 400 millions de francs au titre des actions de modernisation sociale. En outre, le solde de 200 millions de francs du FASMO est versé au FMES. En 2000, la commission des comptes prévoit pour ce fonds une dépense de la branche maladie du régime général de 650 millions de francs et pour 2001 de 300 millions de francs.

Votre rapporteur pour avis remarque ainsi la curieuse méthode du gouvernement qui consiste à créer un nouvel outil par un effet d'affichage lors d'un conflit social alors qu'il en disposait déjà d'un, largement sous-employé. Cet article 33 relèverait ainsi d'une logique " marketing " bien dans l'esprit du gouvernement, que votre rapporteur pour avis ne partage pas.

Votre rapporteur pour avis ne peut également que douter de l'utilité de la création d'un tel fonds alors même que son prédécesseur avait déjà suscité des interrogations quant à sa pertinence soulevées notamment par la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale datant de 1999. S'agira-t-il une fois de plus d'un dispositif très lent à se mettre en place et dont les crédits ne seront consommés qu'au compte-gouttes remettant par là même en cause son utilité première : l'amélioration des conditions de travail dans la fonction publique hospitalière et la modernisation sociale des établissements de santé qui ne sauraient souffrir de délais de mise en oeuvre ?

b) Le Fonds pour la modernisation des cliniques privées (article 35)

L'article 35 du projet de loi de financement dispose que le montant du Fonds de modernisation des cliniques privées est fixé à 150 millions de francs pour l'année 2001.

Ce Fonds de modernisation des cliniques privées a été créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 pour une durée de cinq ans à compter du 1 er janvier 2000. Géré par la Caisse des dépôts et consignations, il est destiné à financer des opérations permettant l'adaptation de l'offre régionale de soins hospitaliers, opérations réalisées par des cliniques privées. Ce sont les agences régionales de l'hospitalisation qui sont chargées d'attribuer les subventions d'investissement dont les modalités d'utilisation sont définies dans le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens.

En 2000, ce fonds était doté de 100 millions de francs. Ce montant, pour 2001, est fixé à 150 millions de francs par le projet de loi de financement, soit une augmentation de 50 %. Cette mesure est présentée par le gouvernement comme découlant de la nécessité " d'accompagner plus activement au niveau régional, dans le respect des schémas régionaux d'organisation sanitaire, les opérations de restructuration et de modernisation menées dans ce secteur ". Il s'agit en effet d'une nécessité impérieuse, qui n'est cependant pas encore suffisamment prise en compte par le gouvernement. Les cliniques privées demeurent en effet les " laissées pour compte " du système de santé alors même qu'elles sont plus performantes et plus rentables que les hôpitaux publics.

Un décret en Conseil d'Etat datant du 24 août 2000 a permis de définir les opérations éligibles à un financement par le Fonds pour la modernisation des cliniques privées. Les annexes au projet de loi de financement ne fournissent aucune indication concernant la mise en place et l'exécution du fonds en 2000. Les premières aides pourraient être versées fin 2000 ou début 2001 .

Là aussi, comment ne pas s'interroger sur la méthode du gouvernement qui tergiverse pour faire appliquer une mesure pourtant nécessaire, attendue par l'ensemble des cliniques privées ?

c) Le Fonds d'aide à l'adaptation des établissements hospitaliers

Les deux fonds qui viennent d'être présentés et qui relèvent de la loi de financement de la sécurité sociale doivent en outre s'articuler avec le Fonds d'aide à l'adaptation des établissements hospitaliers (FIMHO) dont les crédits sont quant à eux inscrits en loi de finances, sur le budget du ministère de l'emploi et de la solidarité (chapitre 66-12).

L'objectif de ce fonds, créé par la loi de finances pour 1998, est de subventionner des opérations d'établissements, publics et privés financés par dotation globale, contribuant significativement à l'adaptation de l'offre de soins.

Comme les autres fonds, le FIMHO a mis du temps à monter en puissance. Le délai nécessaire à la vérification d'une stricte application des critères d'éligibilité au FIMHO conduit à ne pouvoir engager la constitution des dossiers d'affectation des crédits, par arrêté ministériel, qu'à la fin de l'exercice d'ouverture des crédits. En conséquence, la consommation des crédits de paiement n'a atteint un niveau de croissance significatif qu'à compter du second semestre 1999.

Pour 2000, l'ouverture en collectif budgétaire de 600 millions de francs supplémentaires d'autorisations de programme n'a pas permis de réduire les délais de programmation et de financement comme prévu, compte tenu du nombre de dossiers présentés.

Pour 2001, la dotation de 500 millions de francs en autorisations de programme représente le montant prévu par le protocole d'accord du 14 mars 2000 conclu entre le gouvernement et les organisations syndicales représentatives du service public hospitalier. Toutefois, compte tenu du retard pris dans la consommation des crédits de paiement, seul le montant en mesure nouvelle (soit 20 % des autorisations de programme) a été inscrit en projet de loi de finances.

L'analyse de ces trois fonds destinés au secteur hospitalier inspire de véritables inquiétudes à votre rapporteur pour avis quant à leur efficacité. La lenteur de leur montée en puissance retarde d'autant la mise en oeuvre des réformes pour lesquelles ils ont été créés.

2. Les cliniques oubliées (articles 34 et 35)

Alors qu'en mars 2000, Martine Aubry, alors ministre de l'emploi et de la solidarité, annonçait des mesures financières d'envergure en direction des hôpitaux publics (plus de 10 milliards de francs sur trois ans), les cliniques privées apparaissent une fois de plus comme les grandes oubliées du système hospitalier français. Elles sont à peine mentionnées dans ce projet de loi de financement.

L'article 34 propose que l'activité de soins d'accueil et de traitement des urgences dans les établissements de santé privés puisse être financée, à titre dérogatoire et de façon conjointe, par les tarifs des prestations d'hospitalisation mais également par un forfait annuel. Il s'agit de rémunérer les cliniques autorisées à exercer une activité de soins d'accueil et de traitement des urgences d'une façon partiellement indépendante de leur niveau d'activité et de prendre ainsi en compte la réalité de leurs charges fixes.

Par ailleurs, comme il a déjà été souligné, l'article 35 du présent projet de loi de financement vise à doter le Fonds pour la modernisation des cliniques privées de 150 millions de francs en 2001. Entre les 150 millions de francs pour les cliniques privées et les 10 milliards de francs pour l'hôpital public, l'écart est à la mesure des préférences du gouvernement.

Pourtant la situation des cliniques privées est tout aussi grave, en termes de crise sociale, que celle des hôpitaux publics.

La crise sociale concerne aujourd'hui l'ensemble des établissements de santé privés sur tout le territoire et pour tous les personnels, notamment soignants. Elle résulte notamment de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans les cliniques. On peut estimer le déficit global des postes d'infirmiers à plus de 18.000 -soit une promotion complète- dont 6.000 pour les établissements du secteur privé. En outre, l'hospitalisation privée ne peut, dans les conditions tarifaires actuelles, assurer l'égalité de traitement avec les hôpitaux publics et, en conséquence, assumer sa place, pourtant légitime et décisive dans le paysage hospitalier français.

La réduction du temps de travail équivalant à 10 % environ de la durée totale de travail doit être majoritairement compensée (7 %) par des embauches de personnels possédant les qualifications nécessaires au maintien de la qualité des soins et des services. Une telle compensation pourrait notamment être financée par la suppression de la taxe sur les salaires permettant, compte tenu de son montant et de sa proportionnalité aux salaires bruts afin de financer - sans majoration budgétaire mais avec une perte de recettes - les conséquences de la réduction du temps de travail dans le secteur de l'hospitalisation privée.

Ces mesures à destination des cliniques sont d'autant plus nécessaires que leur situation financière est aujourd'hui considérée comme critique. La rentabilité économique des établissements hospitaliers privés est en baisse et a atteint un niveau alarmant de 0,8 % en 1998, un point de moins par rapport à 1997. La généralisation de la dégradation des résultats se traduit globalement par une baisse du taux de résultat net et une augmentation du nombre d'établissements déficitaires de 66 % entre 1997 et 1998. La solvabilité de ces établissements est également en baisse ainsi que leur indépendance financière et le niveau de leurs capitaux propres.

Cette situation est d'autant plus injuste que le programme d'évaluation des coûts hospitaliers (le PMSI) montre que, même une fois les charges propres au service public déduites et les honoraires des médecins libéraux inclus, le même acte de soin revient 30 à 50 % moins cher dans le privé qu'à l'hôpital public. Les cliniques effectuent aujourd'hui un tiers des accouchements, la moitié des interventions chirurgicales, 80 % de la chirurgie ambulatoire. Ceci s'explique par un double mouvement. Les charges des cliniques ont augmenté de 15 à 20 % au cours des sept dernières années d'après la FIEHP. En 1997 et 1998, la progression moyenne du chiffre d'affaires des quelques 1.200 cliniques s'établit à 3,3 % alors qu'elle était de 4,5 % les années précédentes.

Votre rapporteur pour avis estime qu'il serait temps que le gouvernement tienne compte de cet état de fait et prenne à bras-le-corps le problème de l'hospitalisation privée qui répond certes à une attente des Français mais, surtout, procure des économies financières non négligeables à la sécurité sociale, principalement en raison de modes de gestion plus souples et plus efficaces.

3. La persistance des inégalités hospitalières (article 32)

Les inégalités hospitalières, d'ordres statutaire et géographique, persistent malgré les velléités du gouvernement d'y remédier.

Ces inégalités sont très fortes s'agissant notamment de l'offre de soins dont la localisation est subordonnée à l'autorisation de l'Etat. Ainsi, le nombre de lits de chirurgie autorisés pour 10.000 habitants est deux fois plus élevé en Ile-de-France et en Corse qu'en Picardie par exemple. De même la densité de médecins des hôpitaux publics est trois plus élevée en Ile-de-France qu'en Bourgogne. En outre, les inégalités de densité médicale totale (tous médecins confondus) et de densité médicale hospitalière publique s'additionnent au lieu de se compenser : l'Ile-de-France et l'Alsace se trouvent toujours en tête d'un classement peu modifié qui maintient en queue de peloton le Centre, le Poitou-Charentes et la Bourgogne. L'Etat aura donc été incapable de corriger des inégalités globales d'offre de soins : les médecins hospitaliers se sont installés dans les mêmes lieux que leurs confrères libéraux. Aujourd'hui encore les procédures de rééquilibrage entre les régions riches et les régions pauvres ne sont pas suffisamment fortes. La méthode de péréquation a certes été perfectionnée mais elle demeure insuffisante, principalement parce qu'elle érige la moyenne en norme et parce qu'elle prend mal en compte l'état de santé des populations.

Le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI), mis en place dès 1983, est un outil interne d'allocation des ressources aux différents services aussi bien qu'externe, ce qui permet d'allouer une enveloppe globale médicalisée. Il a été étendu au secteur privé. Les ordonnances de 1996 remettent l'accent sur le PMSI dont l'utilisation est généralisée dans les cliniques privées comme dans les hôpitaux publics. Cet outil est censé aider les agences régionales d'hospitalisation (ARH) à réaliser une allocation des ressources plus efficaces. En outre, dans le souci de poursuivre une politique de réduction des inégalités d'allocation des ressources entre régions, le gouvernement a procédé en 1998 à une modification du mécanisme de péréquation entre régions sur la base d'un critère fondé sur les coûts d'activité des établissements (point ISA, indice synthétique d'activité) et d'un critère démographique permettant d'approcher les besoins de la population. La comparaison du coût de production de l'unité ISA doit permettre d'analyser précisément les disparités de ressources entre régions et le niveau de dotation de chaque établissement. Ces informations jouent un rôle central dans la détermination du taux d'évolution des dépenses par région.

Si l'utilisation de cet outil indispensable qu'est le PMSI est aujourd'hui une bonne chose, il doit aussi servir de base à l'instauration tant attendue et toujours retardée d'une tarification à la pathologie c'est-à-dire d'un système d'allocation des ressources en fonction du service rendu. La capacité du PMSI à introduire une certaine efficience dans le système de soins dépendra aussi des modalités choisies pour son utilisation. En particulier c'est de son articulation avec les mécanismes de régulation macro-économique que dépend son efficacité : le PMSI n'a de sens comme outil d'allocation des ressources que si l'on en fait un levier de la régulation du système de santé. Ainsi, serait introduite une forme de concurrence organisée entre les établissements sur la base de la mesure de leurs performances. En effet, si le point ISA donne bien aujourd'hui une indication sur le rapport prix / service rendu, il ne fournit aucune indication quant à la qualité de ce service. Il existe pourtant une légitimité à créer un lien entre la performance d'un établissement et sa rémunération.

L'article 32 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 contient des dispositions relatives à l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation, établissement public administratif, dont la création est prévue par un décret en cours de publication et qui a pour principal objet de permettre de réunir l'ensemble des équipes (médecins, statisticiens, informaticiens) qui interviennent actuellement dans la mise en oeuvre du PMSI.

Le financement de cet établissement public viendra de l'Etat, d'une part, 9,5 millions de francs étant déjà inscrits à cet effet au chapitre 36-81 du budget de la santé et de la solidarité pour 2001, de l'assurance maladie, d'autre part, au travers d'une dotation globale de l'ordre de 20 millions de francs, incluse dans le compte prévisionnel de la branche pour 2001.

Par ailleurs, le projet de loi de financement précise dans son article 32 que l'agence, compte tenu de ses besoins spécifiques et des personnels auxquels elle recourt déjà, pourra conclure des contrats à durée indéterminée avec les agents contractuels de droit public qu'elle emploie.

Votre rapporteur pour avis désapprouve ce genre de dépenses inutiles qui privent l'assurance maladie de ressources dont elle pourrait faire un usage plus bénéfique. Quelle est en effet l'utilité de créer un établissement public administratif permettant de réunir l'ensemble des équipes qui interviennent dans la mise en oeuvre du PMSI ? N'est-ce pas déjà le rôle de la direction des hôpitaux du ministère ? Est-ce aux ressources de la CNAMTS de servir de " deuxième tour budgétaire " au ministère ?

Dotations régionales de dépenses hospitalières

(en millions de francs*)

Région administrative

1999

2000**

Evolution 2000/1999

Alsace

8.961

9.305

3,8 %

Aquitaine

11.763

12.143

3,2 %

Auvergne

5.882

6.081

3,4 %

Bourgogne

6.330

6.633

4,8 %

Bretagne

13.067

13.481

3,2 %

Centre

8.652

8.957

3,5 %

Champagne-Ardenne

5.555

5.744

3,4 %

Corse

1.007

1.051

4,4 %

Franche-Comté

4.934

5.106

3,5 %

Ile-de-France

58.679

59.832

2,0 %

Languedoc-Roussillon

8.917

9.171

2,8 %

Limousin

3.652

3.765

3,1 %

Lorraine

11.682

12.024

2,9 %

Midi-Pyrénées

10.461

10.702

2,3 %

Nord-Pas-de-Calais

15.750

16.547

5,1 %

Basse-Normandie

6.652

6.834

2,7 %

Haute-Normandie

6.613

6.872

3,9 %

Pays de la Loire

11.909

12.304

3,3 %

Picardie

7.715

8.072

4,6 %

Poitou-Charentes

6.275

6.564

4,6 %

Provence-Alpes-Côte d'Azur

19.601

20.564

4,9 %

Rhône-Alpes

24.827

25.580

3,0 %

France métropolitaine

258.886

3,3 %

* Les dotations régionales correspondent au montant des dépenses hospitalières encadrées, c'est-à-dire opposables à l'assurance maladie, couvertes par les produits des tarifications et la dotation globale (versement de l'assurance maladie).

** Les dotations 2000 sont celles fixées par la circulaire DHOS-1A /DSS-F2 du 8 août 2000 relative à la campagne 2000 des établissements de santé financés par dotation globale. Elles intègrent notamment les conséquences financières des protocoles signés en mars 2000.

Répartition des capacités autorisées en 2000
par statut juridique en métropole

Ensemble MCO

Ets privés non PSPH sous DG
0,82 %

Ets privés PSPH
7,53 %

Ets privés sous OQN (ex PJP)
1,84 %

EPS
63,70 %

Ets privés sous OQN

26,11 %

QUELQUES EXEMPLES DE REFORMES HOSPITALIERES A L'ETRANGER

I - Les réformes du système hospitalier en Nouvelle-Zélande

Dotée d'un des systèmes de protection sociale les plus avancés du monde, la Nouvelle Zélande, petit pays de 3,8 millions d'habitants, a bénéficié pendant 50 ans de la gratuité des prestations de santé, toutes financées par l'Etat. Les réformes de 1993 et 1996 ont vu le désengagement des pouvoirs publics en matière de financement des dépenses de santé afin de responsabiliser prescripteurs et utilisateurs, et d'améliorer la gestion des fonds. Le gouvernement ne finance plus que 76,9 % des dépenses de santé et a mis à contribution le secteur privé et les organismes bénévoles. Bien que l'impact des réformes soit difficile à quantifier, l'architecture du système de santé néo-zélandais et notamment du système hospitalier, en mettant l'accent sur la distinction entre l'achat et la propriété, et en intégrant la demande, est relativement innovante.

En outre, les hôpitaux néo-zélandais, publics et privés, se partagent les domaines d'intervention médicale et collaborent afin d'éviter le gaspillage. Le secteur hospitalier est donc très bien équipé, et le niveau de soins prodigués semble satisfaisant même si des difficultés apparaissent dues au surnombre des patients.

1) Financement

La Nouvelle-Zélande bénéficie depuis longtemps d'un système médical public efficace et à un prix abordable. L'Etat, par l'intermédiaire du Health Funding Authority (HFA), consacre annuellement près de 6 milliards de NZD à ce secteur (soit un peu plus de 17 % du Budget et 6,7 % du PIB), 70 % de ces dépenses étant utilisées dans les services hospitaliers.

Le bénévolat et le secteur privé ne sont toutefois pas absents du système. Alors que 37 % de la population souscrit à une police d'assurance complémentaire, les assureurs supportent 8 % de la facture santé.

2) Réformes de 1993 et 1996

L'organisation du secteur de la santé a été profondément modifiée en 1993 et 1996. Le financement et la fourniture des prestations sont désormais dissociés afin de réduire l'incitation à s'approvisionner auprès d'organismes sous contrôle public. Auparavant, le gouvernement finançait quatre Regional Health Board (RHA, autorités régionales de la santé) qui recevaient leurs fonds en fonction de l'importance de la population. Ces organismes étaient propriétaires d'hôpitaux et employaient directement leur personnel hospitalier. Aujourd'hui la HFA a remplacé les RHA et est chargée d'acheter les services de santé dont la fourniture est assurée par toute une série de prestataires privés et 23 entités gouvernementales indépendantes, les Hospital and Health Services ( HHS) qui résultent d'une restructuration des hôpitaux publics. Ces réformes ont été menées dans le but d'alléger la structure administrative et d'harmoniser les opérations d'achat sur tout le territoire. Un objectif de saine gestion commerciale a remplacé les multiples objectifs de rentabilité, les HHS devant prendre en charge tous les coûts y compris le coût du capital.

En 1996 , on recensait 368 hôpitaux et 22 488 lits, soit 6,2 lits pour 1000 habitants. Les hôpitaux publics, certes moins nombreux (119 comparés à 249 pour le secteur privé) sont en revanche mieux équipés et ont une capacité d'accueil supérieure (15 270 lits dans les hôpitaux publics soit 68 % du total). La durée moyenne de séjour dans les hôpitaux publics, indicateur couramment utilisé pour apprécier les performances des systèmes de santé, était de 6,5 jours en 1997, résultat remarquable au vu du chiffre japonais (43 ,7 jours).

En février 1997 , John Ayling, responsable hospitalier, affirmait : " Ce secteur a beaucoup changé pour mieux répondre au climat politique. Le concept d'un hôpital public offrant tous les services nécessaires à la communauté ne correspond plus à la réalité ".

Ces réformes reflètent l'ampleur limitée de la concurrence au niveau des services hospitaliers. Toutefois rien n'est prévu pour remédier à ce problème. En effet, étant donné les économies d'échelle et la dispersion de la population, nombre d'hôpitaux installés en province présentent des caractéristiques monopolistiques. En cherchant à introduire plus de concurrence dans ce qui est essentiellement un monopole bilatéral entre la HFA et les HHS, les mécanismes d'incitations et de sanction liés au fonctionnement du marché n'ont guère été renforcées.

Ces réformes ont surtout simplifié et renforcé le contrôle de l'administration centrale sur le niveau et la répartition des dépenses publiques de santé.

3) Architecture et organisation du système hospitalier

Sollicitant parfois les conseils du National Advisory Committee on Health and Disability Support Services (notamment sur les services susceptibles d'être subventionnés par l'Etat et sur l'évaluation de l'efficacité de certains équipements et produits médicaux), le Ministère de la Santé néo-zélandais détermine les priorités et les besoins financiers, surveille la HFA qui agit en son nom et réglemente la santé publique.

- un acheteur national unique, la HFA

Crée en 1998, la HFA conclue des contrats avec les HHS et le secteur privé pour obtenir des services de soins primaires, secondaires et tertiaires ainsi que des prestations destinées aux handicapés. En règle générale, ces contrats précisent, pour un service donné quel sera le volume qui sera acquis pour un certain prix. La HFA est entièrement responsable devant l'administration centrale, mais il lui appartient d'utiliser ses ressources comme elle le juge bon. On lui reproche assez souvent de ne pas spécifier avec assez de précision les services souhaités afin de permettre des appels d'offre.

La HFA dispose d'un budget déterminé par le Parlement. Elle finance ainsi les services de santé, les prestations en faveur des handicapés et la santé publique.

- les prestataires de service de santé

La fourniture des soins est assurée par toute une série de prestataires publics, privés ou bénévoles.

Les HHS qui évoluent dans le cadre du droit commercial sont en charge des soins secondaires et tertiaires de santé. Bien qu'ils disposent d'une grande liberté vis-à-vis de l'administration centrale, ils sont tenus de rentabiliser le capital investi par le gouvernement . Depuis l'entrée en vigueur du nouveau système de santé, les hôpitaux publics peuvent procéder de façon autonome à leurs achats. Les directeurs des 23 HHS se comportent désormais comme ceux des hôpitaux privés, dans la limite des fonds que l'Etat leur alloué. Ils sont les principaux acheteurs de matériel médical. Près de 75 % des équipements médicaux sont aujourd'hui achetés en NZ par les HHS. Le secteur privé est cependant demandeur d'appareils plus sophistiqués. Ainsi, en 1996, les trois scanners IRM d'Auckland étaient propriété privée. Par ailleurs la HFA peut choisir de financer certains équipements lorsqu'ils ont généré un besoin matériel pour l'hôpital et que celui-ci ne peut faire face au coût impliqué.

Les hôpitaux privés mais subventionnés s'occupent eux plutôt des soins primaires. Un grand nombre d'entre eux sont ainsi spécialisés sur la chirurgie facultative et les services de gériatrie.

Malgré cette stricte séparation des soins, le système néo-zélandais semble cependant se diriger à long terme vers l'intégration de l'offre autour de compagnies d'assurance qui sont déjà propriétaires de la plupart des hôpitaux privés.

Enfin l'éventail des services qui ne sont plus gratuits pour les patients à revenu moyen ou élevé a été élargi depuis 1993, notamment aux soins ambulatoires dispensés par les hôpitaux.

II - Les multiples expériences de privatisation en Amérique du Nord

A - Diverses expériences de privatisation d'hôpitaux publics ont été menées ces dernières années aux Etats-Unis .

1) Les raisons de ces privatisations sont multiples :

- déclin de la demande de lits dans les hôpitaux publics et des taux d'occupation généralement inférieur à 50 %

- plus grande compétitivité des hôpitaux privés et captation d'une grande partie des patients par les hôpitaux privés

- série de dysfonctionnements internes aux hôpitaux publics, notamment un système bureaucratique pesant et des subventions fiscales croissantes de l'Etat à destination des hôpitaux publics

- inadaptation des hôpitaux publics aux changements rapides du système de santé et aux innovations techniques qui restent l'apanage du secteur hospitalier privé.

2) Les avantages attendus de ces privatisations sont les suivants :

- réduction des coûts pour les contribuables

- amélioration des soins, sur un plan qualitatif comme quantitatif, notamment à destination des " indigents "

- innovation médicale : avancées technologiques, informatisation des systèmes de management hospitalier, avantages compétitifs

3) Les options envisagées en matière de privatisation sont nombreuses :

- la vente : permet le désendettement de certains hôpitaux et l'établissement d'un fond pour les soins médicaux des plus défavorisés (ex : vente de l'hôpital public de Conroe, Texas pour une valeur de 70 millions de dollars).

- le bail : une alternative à la vente à prix forfaitaire est de louer à bail les hôpitaux, cliniques et l'équipement médical à une firme spécialisée en management (ex : la ville d'Austin au Texas a contracté un bail de 30 ans avec la firme Seton Health Care Network pour gérer son hôpital public).

- la gestion déléguée : le gouvernement s'en remet au secteur privé pour ce qui est du fonctionnement de l'hôpital mais continue à exercer une certaine influence en nommant une partie des membres au conseil d'administration de l'hôpital.

- la procédure de " joint venture " : le gouvernement vend une partie des actifs de l'hôpital public mais garde le pouvoir de nommer une partie des membres du CA (ex : hôpital public de Sequoia en Californie).

- disparition de certains services hospitaliers : dans certains cas le gouvernement peut décider de se séparer de certains hôpitaux lorsque leur présence est devenue inutile ( compte tenu des conditions du marché local, de la localisation de l'hôpital, de l'image de l'hôpital auprès du public...).

- partenariat entre le secteur public et le secteur privé : après s'être séparé de son hôpital public, le gouvernement achète aux hôpitaux et cliniques locaux les lits dont il a besoin (ex : Orange County, Californie , ne possède ni ne dirige aucun hôpital mais a souscrit des contrats avec 28 hôpitaux locaux pour l'offre de soins aux plus démunis sur une base de coût-effectif).

- délocalisation et sous-traitance ( ex : le Nassau County Medical Center à NY s'est dégagé de ses services orthopédiques auprès d'un groupe local de praticiens).

Ces différentes pratiques doivent cependant permettre de préserver la mission de service public des hôpitaux, de garantir l'emploi du personnel de transition ainsi que les conditions législatives du transfert de la propriété d'Etat à la propriété privée.

B - Des expériences similaires au Canada

La santé occupe une place majeure dans l'économie canadienne, par ses dépenses de plus de 80 milliards de dollars en 1998. La part de ces 80 milliards assumée par le secteur public est de 55,7 milliards (70 %), les 30 % restant (24,3 milliards) sont assumés par le secteur privé. A mesure que les dépenses publiques diminuent, à cause des réductions de financement et de services, les dépenses privées augmentent pour remplir le vide, + 127 % depuis 1975.

A Calgary une société appelée Health Resources Group veut convertir une clinique privée en hôpital complètement privé. Les compressions dans le financement public ont facilité la naissance de la clinique privée de HRG, qui est située dans l'aile d'un hôpital fermé à cause des compressions imposées par le gouvernement.

Le retrait du gouvernement fédéral du financement de la santé s'étend au-delà des compressions, jusque dans le domaine de la réglementation. Le rétrécissement du rôle de la Direction générale de la santé du Canada soulève des inquiétudes quant à la qualité de la nourriture et à la rigueur des essais effectués sur les médicaments.

Le 29 octobre 1997 paraissaient des appels d'offre pour l'entretien sanitaire, les services alimentaires et de buanderie. Né de la fusion de cinq établissements, le CLSC, le CHSLD et le Centre hospitalier du Pontiac sollicite auprès du secteur privé des contrats de services pour une durée de cinq années chacun.

IV - Une expérience de gestion déléguée en Suède : la maintenance des hôpitaux de Stockholm par la firme Dalkia

La gestion déléguée ne constitue pas une privatisation car tous les équipements nécessaires à l'exécution du service deviennent la propriété de la collectivité déléguante, même s'ils sont financés par les opérateurs. Elle n'est pas non plus une sous-traitance, la mission du délégataire intégrant l'ensemble des fonctions : conception, réalisation, exploitation et maintenance des infrastructures.

Cette expérience de gestion déléguée découle de la volonté de la Région de Stockholm de réduire le coût d'utilisation de ses hôpitaux. La région décide en 1994 de transformer en société le service de maintenance technique des hôpitaux (création de Locum Drift, filiale à 100 % de la région) et d'attribuer les contrats de maintenance par appels d'offre ouverts à la concurrence. Ceci a pour conséquence une forte réduction des coûts de maintenance / m2 d'hôpital et une réduction d'effectifs de Locum Drift qui passent de 615 en 1994 à 323 en 1997. Mais la région comprend que cette évolution est insuffisante et inachevée.

La concurrence qui s'exprime dans les appels d'offre est très dure, Locum Drift n'est pas abritée et perd des contrats, et surtout la société est isolée (pas d'accès au savoir-faire ni aux courbes d'expérience des grands groupes spécialisés). D'où une décision de la région de trouver un partenaire stratégique .

Dalkia est retenu en 1998 par le Conseil régional de Stockholm, après appel d'offres international. Dalkia prend 50 % de Locum Drift. Le management est placé sous la responsabilité de Dalkia, qui fait d'autre part l'acquisition à terme des actions conservées par la Région.

La durée moyenne des contrats est de 3 ans, la nature des prestations recouvre la maintenance du bâti, la maintenance des systèmes techniques, celle des systèmes médicaux et la prise en charge des travaux correspondants. Les avantages de cette architecture sont multiples pour les hôpitaux : réduction des coûts, amélioration de la qualité des prestations, accès à l'expérience européenne d'un grand groupe gérant un parc important d'établissements semblables.

Bilan fin 1999 :

- un transfert important de savoir-faire Dalkia vers la filiale suédoise,

- aucun contrat d'hôpital n'a été perdu à ce jour,

- une forte croissance de la profitabilité sans réduction d'effectif.

Il existe par ailleurs aujourd'hui de fortes perspectives de croissance pour Dalkia dans le métier de base avec l'externalisation prévue de la maintenance hospitalière dans les principales villes suédoises.

4. Le délai de mise en place de la tarification des établissements (article 41 quater)

L'article 41 quater du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, introduit à l'Assemblée nationale après un amendement du gouvernement, reporte la mise en place de la nouvelle tarification des établissements pour personnes âgées en repoussant la date limite de signature des conventions tripartites prévues à cet effet. Le dispositif juridique actuel impose, en effet, de conclure ces conventions avant fin avril 2001. Le gouvernement a décidé de proroger cette date, qui lui semblait très contraignante, au 31 décembre 2003.

Si sur le fond la tarification dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées pose un vrai problème, il ne rime à rien de repousser encore cette réforme très attendue. Il est regrettable que le gouvernement ait décidé de prolonger cette échéance de trois années supplémentaires. La situation de ces établissements est en effet inquiétante car elle ne permet pas d'élaborer des programmes de prise en charge des personnes âgées dépendantes fondés sur des bases budgétaires réelles. Il sera indispensable dans le cadre de la réforme annoncée de prestation dépendance de revoir cette question.

C. LA POLITIQUE DU MÉDICAMENT

1. Les questions soulevées par les génériques

Prévu par le protocole d'accord avec les pharmaciens d'officine conclu en avril 1999, la mise en place du droit de substitution des médicaments génériques aux produits princeps n'est intervenue qu'à partir de l'application de la nouvelle rémunération des pharmaciens, le 1 er septembre 1999. Cet accord intégrait un objectif de substitution fixé à 35 % avant la fin 1999, ce qui devait conduire à une baisse du prix moyen des médicaments appartenant aux groupes génériques retenus de 10,5 %.

Pour la période juillet 1999 - mars 2000, la baisse de ce prix moyen par rapport au dernier trimestre 1998 - qui est la période de référence figurant dans l'accord - est de 4,3 %. Pour le seul mois de mars 2000, par rapport à cette même référence, la baisse se situe à 6,7 %, ce qui, selon le rapport de la Cour des comptes sur la sécurité sociale de septembre 2000, est " l'indice d'un développement significatif du marché des génériques ". La Cour précise par ailleurs que " ces résultats ne traduisent pas seulement une pratique plus fréquente de la substitution ; ils reflètent aussi, de façon mineure certes, la prescription par le médecin de produits moins chers et la baisse du prix de certains médicaments. " On constate donc un certain développement des génériques qui reste cependant en deçà de l'objectif retenu, objectif toutefois déterminé sans étude préalable. Au total, ni sur la marge des officines, ni sur le développement des génériques, les objectifs de l'accord n'ont été atteints, ce qui, selon la Cour des comptes, " devrait conduire, dans la logique même de cet accord, à réexaminer la situation ".

Fin mai 2000, selon les sources du GERS, la baisse du marché de l'ensemble des princeps des groupes génériques du répertoire a atteint 7,08 % et 7,2 % fin juin. Pour le mois de juillet 2000, la substitution a été plus faible, à 7,03 %.

Le 21 septembre 2000, la ministre de l'emploi et de la solidarité annonçait qu'un bilan précis de la progression des médicaments génériques serait réalisé début octobre et que " d'ores et déjà, les économies réalisées à ce titre sont évaluées à 500 millions de francs. ". On est cependant encore loin des 2 milliards de francs d'économies que prévoyait l'assurance maladie en phase de démarrage des génériques.

Le bilan est donc encourageant mais encore insuffisant, même si le récent rappel de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) au sujet du plafonnement des remises accordées aux génériques pourrait stopper l'élan.

En effet, la lettre de la DGCCRF, qui n'est qu'un rappel du texte de la loi de 1999, si elle était appliquée en l'état, pourrait avoir des conséquences graves pour le développement du marché des génériques dont la croissance s'explique essentiellement par l'implication des forces de vente des laboratoires de génériques.

La Cour des comptes, dans son rapport de septembre 2000, se pose la question d'une éventuelle libéralisation des remises sur les génériques. " Bien que le dispositif d'encadrement soit très complet (la marge, les remises, la contribution à l'assurance maladie), il n'empêche pas certains professionnels de prendre des initiatives commerciales, parfois contraires à la réglementation... " Ces initiatives intervenant plutôt dans le domaine des génériques placent les pouvoirs publics devant l'alternative ou bien de faire respecter la réglementation des remises (10,74 %) au risque de freiner le développement de ces produits, ou bien de favoriser les génériques en acceptant de ne pas faire respecter une réglementation des remises qui deviendrait alors inutile.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 ne règle en aucune façon cette question. Votre rapporteur pour avis regrette que le gouvernement n'ait pas saisi l'occasion du vote de ce texte pour éclaircir ce problème des remises et donc lever l'hypothèse qui pèse sur le développement des médicaments génériques.

En outre, il estime que des mesures de bon sens s'imposent aujourd'hui pour permettre le développement de l'utilisation des médicaments génériques : par exemple permettre aux médecins de prescrire des molécules et non plus seulement des spécialités ou des marques de médicaments.

2. La hausse des prélèvements sur l'industrie pharmaceutique

a) La révision de la clause de sauvegarde (article 41)
(1) Le dispositif existant

L'article 31 de la loi de financement pour 1999 a institué une clause permanente de sauvegarde applicables aux entreprises exploitant des médicaments remboursables sauf à celles ayant passé une convention avec le Comité économique des produits de santé. Cette clause de sauvegarde consiste dans le versement d'une contribution par ces entreprises lorsque leur chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au titre des spécialités remboursables et agréées à l'usage des collectivités s'est accru, par rapport au chiffre d'affaires réalisé l'année précédente, d'un pourcentage excédant le taux de progression de l'ONDAM tel qu'il résulte du rapprochement des lois de financement de l'année en cours et des années précédentes.

Selon le gouvernement, cette clause de sauvegarde se caractériserait par des effets de seuil, dénoncés par l'industrie pharmaceutique, et un taux de récupération du dépassement de chiffre d'affaires par rapport à l'ONDAM fluctuant fortement à chaque franchissement de seuil. A titre d'exemples, lorsque le taux de progression du chiffre d'affaires du secteur est de 2,99 % (soit un dépassement de 0,99 point pour un seuil de déclenchement de 2 %), le pourcentage de récupération du dépassement est de 16 % de ce dépassement. Si le taux de progression du chiffre d'affaires est de 3,01 % (soit un dépassement de 1,01 point), le pourcentage de récupération passe à 66 %.

Le taux de contribution varie donc en fonction du dépassement du taux de progression de l'ONDAM. Le montant global calculé est ensuite réparti entre les entreprises redevables selon trois critères :

- le niveau brut du chiffre d'affaires pour 30 % ;

- la progression du chiffre d'affaires pour 40 % ;

- les frais de publicité pour 30 %.

Pour les dépenses de 1998, auxquelles ce dispositif n'était pas encore applicable, le gouvernement avait négocié des remises à hauteur de 1,2 milliard de francs, qui avaient été considérées comme des diminutions de dépenses dans les comptes pour 1999.

En 2000, cette contribution était évaluée, au titre de 1999, à un montant compris entre 500 millions et 1 milliard de francs, la marge d'erreur dépendant du taux réel de dépassement de l'ONDAM. En réalité, elle s'élèvera, d'après l'annexe b1 au projet de loi de financement, à 75,43 millions de francs, au titre de la seule contribution, c'est-à-dire pour les entreprises n'ayant pas pris part au conventionnement, seules entreprises à être soumises, d'après la loi, à cette clause de sauvegarde. Cependant si on inclut dans ce versement les remises qui s'appliquent elles à l'ensemble des entreprises de l'industrie pharmaceutique, 900 millions de francs ont été reversés, qui sont à nouveau considérées comme des diminutions de dépenses dans les comptes de l'année 2000, traitement comptable contestable.

Au titre de 2000, pour la contribution versée en 2001, l'article 29 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a fixé un seuil de déclenchement de la contribution à 2 %, déconnecté de tout lien avec l'ONDAM. Cet article tirait donc les conséquences du nouveau mode de calcul de l'ONDAM. Retenir l'évolution entre l'objectif de 1999 et l'objectif de 2000 aurait élevé le seuil de déclenchement à 4,5 % au lieu de 2,5 %. Mais le gouvernement a ainsi accentué le caractère arbitraire de cette contribution en retenant le taux de 2 % qui n'avait plus aucun lien avec l'ONDAM. 2 à 2,8 milliards de francs devraient être versés à ce titre en 2001.

Votre rapporteur pour avis avait fortement critiqué le principe de cette clause de sauvegarde au moment de sa création.

(2) La décision proposée

L'article 41 du présent projet de loi ajuste le mécanisme actuel :

- pour le seuil de déclenchement de la contribution, il substitue au taux de progression de l'ONDAM un taux de progression fixé à 3 % pour 2001 ;

- pour le calcul de la contribution, il remplace le système actuel par un système de récupération linéaire qui aurait pour effet de lisser les effets de seuil et de récupérer une part constante du dépassement, plus importante que celle résultant du système actuel (70 % contre un taux maximum de 65 % actuellement).

Ce nouveau dispositif s'appliquera à la contribution perçue à compter de l'année 2001.

Malgré les efforts du gouvernement pour rendre ce système plus équitable, votre rapporteur pour avis continue de désapprouver le principe même de cette clause de sauvegarde qui a un caractère confiscatoire. En outre, une fois encore, le taux de progression dont le dépassement déclenche le versement de la contribution arbitrairement fixé par le gouvernement est totalement indépendant du taux de progression de l'ONDAM. Par ailleurs, votre rapporteur pour avis désapprouve l'artefact comptable auquel le gouvernement a recours selon lequel cette contribution, qualifiée par le Conseil constitutionnel d'imposition au sens de l'article 34 de la Constitution, est considérée comme une atténuation des dépenses de l'exercice suivant plutôt que comme une recette de l'exercice en cours.

b) La hausse de la contribution des grossistes répartiteurs (article 41 bis)

L'article 41 bis du présent projet de loi vise à augmenter de 0,45 point le taux de taxation des grossistes répartiteurs. Cette mesure qui devrait rapporter 450 millions de francs en année pleine est présentée par le gouvernement comme devant permettre de stabiliser l'évolution de la rémunération des distributeurs en gros au cours de l'année 2001.

La contribution due par les laboratoires et les grossistes répartiteurs sur les ventes en gros aux officines pharmaceutiques a été instituée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1996. Elle a rapporté 1,35 milliard de francs en 1999 et devrait rapporter en 2000 et 2001 respectivement 1,6 et 1,58 milliard de francs.

Lorsque cette taxe a été créée, elle devait être exceptionnelle. Or elle est devenue pérenne. En outre, s'il est vrai que les marges des distributeurs en gros ont augmenté depuis 1998, il convient de noter que la progression de cette marge n'a été que de 1,21 % depuis le 1 er janvier 2000.

Il serait préjudiciable de continuer à taxer cette profession dont le degré de concentration est déjà très important et inquiétant. En outre, le gouvernement avait à l'origine prévu, en concertation avec les grossistes répartiteurs, d'augmenter leur taux de taxation de 0,35 % et non de 0,45 %.

Tous ces arguments poussent votre rapporteur pour avis à désapprouver cette nouvelle mesure fiscale.

3. La réforme de la publicité et la transparence de l'information médicale

a) La réforme de la publicité (article 38)

L'article 38 du projet de loi de financement vise à compléter les dispositions relatives à la publicité des médicaments après radiation de la liste des médicaments remboursables.

D'après les dispositions du code de la santé publique, la publicité auprès du public pour un médicament est admise à condition que le médicament ne soit pas soumis à prescription médicale, qu'il ne soit pas remboursable par les régimes obligatoires d'assurance maladie et que son autorisation de mise sur le marché ne comporte pas de restriction en matière de publicité en raison d'un risque possible pour la santé publique.

Une fois un médicament radié de la liste des médicaments remboursables, il peut donc faire l'objet de publicité auprès du public sous réserve de remplir les deux autres conditions. Toutefois, avec le dispositif actuel, les laboratoires se trouvent souvent dans l'incapacité de s'adapter assez rapidement aux nouvelles conditions de commercialisation d'un médicament radié.

D'où la possibilité introduite par l'article 38 du présent projet de loi de financement de faire autoriser la publicité pour des médicaments radiés de la liste des produits remboursables par la décision de radiation, avant même que cette décision ne soit entrée en vigueur.

La décision de radiation doit marquer l'anticipation du démarrage de la publicité en différant pendant une certaine période, fixée par décret à six mois vraisemblablement, la date d'entrée en vigueur de la décision de radiation du médicament de la liste des médicaments remboursables. Dès lors, la publicité pourra commencer avant l'entrée en vigueur de la radiation.

Ces dispositions s'appliquent cependant sous réserve de remplir les deux conditions suivantes :

- le médicament ne doit pas être soumis à prescription obligatoire et ne doit pas comporter de risques pour la santé publique, comme cela est spécifié dans le code de la santé publique pour la publicité de droit commun de tout autre médicament ;

- le médicament devra être mentionné dans une convention conclue avec le Comité économique des produits de santé et comportant des engagements sur le chiffre d'affaires. Il s'agit en la matière d'éviter une croissance excessive des ventes au cours de la période comprise entre la décision de radiation et l'expiration de son caractère remboursable.

Cette mesure, si elle devrait permettre aux laboratoires concernés de mettre en place dans des délais raisonnables les nouvelles conditions de commercialisation des médicaments radiés de la liste des médicaments remboursables, n'a pas vraisemblablement sa place dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale en vertu des dispositions de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale. Une fois de plus, votre rapporteur pour avis réprouve fortement la présence dans le projet de loi de financement de dispositions n'affectant en rien directement l'équilibre financier des régimes obligatoires.

b) La transparence de l'information médicale (article 39)

En matière de transparence de l'information médicale on peut ici également faire référence à l'article 39 du projet de loi de financement qui crée un Fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique.

Ce fonds a pour but d'apporter aux prescripteurs non liés aux laboratoires pharmaceutiques une information médicale et médico-économique suffisante et de permettre ainsi une plus grande maîtrise des coûts liés à la promotion des médicaments auprès des prescripteurs par les entreprises pharmaceutiques, coûts qui contribuent au niveau élevé des dépenses de médicaments en France.

Ce fonds sera alimenté par une fraction du produit de la taxe sur la promotion pharmaceutique affecté jusqu'à présent en totalité à l'assurance maladie. Ce prélèvement sera fixé par arrêté, dans la limite d'un plafond de 10 % du produit de cette contribution, qui s'est élevé à 1,315 milliard de francs en 1999 et qui devrait rapporter 1,410 milliard de francs en 2000. Le prélèvement devrait donc atteindre 130 millions de francs alors même que le gouvernement précise que les entreprises pharmaceutiques dépensent chaque année 12 milliards de francs au titre de la promotion des médicaments auprès des prescripteurs.

Votre rapporteur pour avis pourrait trouver l'intention du gouvernement louable si cette mesure ne consistait pas une fois encore à priver la branche maladie d'une partie de ses recettes. Alors même que le gouvernement présente la création de ce fonds comme un moyen de faire face au niveau élevé des dépenses de médicaments dans notre pays, il en assure le financement par un prélèvement sur les recettes de l'assurance maladie.

III. LA VIEILLESSE

La branche vieillesse a connu un très net redressement depuis 1998 grâce principalement à la bonne tenue des recettes. Celles-ci progressent en effet à un rythme compris entre 2,9 et 5,2 % depuis 1998, alors que les dépenses augmentent entre 3,1 et 3,8 %.

Comptes de la branche vieillesse
en encaissements/décaissements

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

Recettes

385,4

403,5

415,2

430,6

Evolution

+ 5,2 %

+ 4,7 %

+ 2,9 %

+ 3,7 %

Dépenses

385,6

399,8

414,6

427,2

Evolution

+ 3,8 %

+ 3,7 %

+ 3,7 %

+ 3,1 %

Solde

- 0,2

+ 3,7

+ 0,6

+ 3,4

Source : CCSS 09 2000

Le dynamisme des recettes pour 2001 se lit surtout sur les cotisations sociales (+ 5,2 %), liées à la croissance de la masse salariale, et sur les cotisations prises en charge (+ 16,8 %), avec le FOREC.

Par rapport aux prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale de mai 2000, la situation s'est améliorée en termes de recettes (2,4 milliards de francs de supplémentaires pour les trois quarts en raison de rentrées de cotisations supérieures aux prévisions) et dégradée en termes de dépenses (1,9 milliard de francs de dépenses en plus). Le solde positif s'élève donc à un peu plus de 500 millions de francs, soit le montant de l'excédent total pour 2000. Comme la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 avait entièrement consommé l'excédent prévisionnel en affectant 2,9 milliards de francs au fonds de réserve pour les retraites et 950 millions de francs à une revalorisation supplémentaire de 0,3 % des retraites, l'excédent de 2000 ne s'explique que par les bonnes surprises constatées en gestion.

Les mesures proposées dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 vont dans le même sens, ce qui relativise grandement le redressement de la branche, et nourrit les inquiétudes quant à son avenir puisque la prévision de déficit cumulé en 2020 s'élèvait à 474 milliards de francs 43 ( * ) . Il ne faut pas oublier par exemple que la prévision d'excédent de la CNAVTS pour 2001 se fonde sur une revalorisation des pensions de 1,7 point alors qu'elle sera de 2,2 points, soit un coût supplémentaire de 1,7 milliard de francs, et néglige la prise en charge par le Fonds de solidarité vieillesse de 300 millions de francs de dépenses supplémentaires correspondant à la validation des périodes de perception des allocations de cessation anticipée d'activité comme périodes d'assurance pour l'ouverture du droit à pension.

En droits constatés, l'écart est très important puisqu'il s'élève à 3,05 milliards de francs pour l'année 2001.

Comparaison des comptes en encaissements/décaissements (ED)
et en droits constatés (DC) de la branche vieillesse

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

ED

DC

ED

DC

ED

DC

ED

DC

Recettes

385,4

389,7

403,5

407,1

415,2

417

430,6

434,1

Dépenses

385,6

386,8

399,8

402,1

414,6

415,6

427,2

429,7

Solde

- 0,2

+ 2,9

+ 3,7

+ 5

+ 0,6

+ 1,4

+ 3,4

+ 6,4

Source : CCSS 09 2000

A. A LA RECHERCHE DU FONDS DE RÉSERVE DES RETRAITES

1. Un fonds toujours virtuel

Créé par l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, le fonds de réserve pour les retraites avait comme objectif de consolider l'avenir des régimes de répartition, CNAVTS, ORGANIC, CANCAVA et salariés agricoles. Il prenait alors la forme d'une seconde section au sein du Fonds de solidarité vieillesse.

Le décret n° 99-898 du 22 octobre 1999, pris plus de dix mois après la création du fonds, lui a donné une première existence formelle en fixant quelques principes transitoires de gestion : le fonds de réserve fait l'objet d'une gestion budgétaire et comparable à celle des autres opérations du FSV. La trésorerie se trouve dans un compte distinct ouvert auprès du Trésor public et placée en titres du marché monétaire et obligations de moins de deux ans. Le fonds de réserve possède ainsi un budget, sous la forme d'un budget annexe au FSV, d'un bilan et d'un compte de résultat. Le conseil de surveillance du FSV a été ouvert aux partenaires sociaux pour tenir compte de la création du fonds de réserve.

Tout cela relève d'une simple politique d'attentisme. Votre rapporteur pour avis, ainsi que la majorité des observateurs, est convaincu qu'il convient de décider rapidement de la forme du fonds de réserve, de ses objectifs précis et de ses modes de gestion.

A l'évidence, la situation ne peut rester en l'état. Le premier débat à trancher est celui de l'objectif précis qui est assigné au fonds : s'agit-il d'aider simplement les caisses de retraite par répartition à passer le moment difficile de l'arrivée de l'âge de la retraite des classes d'âge correspondant au baby-boom par un complément de ressources ou bien d'apporter durablement un complément de ressources à ces régimes ? Les deux solutions ne sont pas incompatibles mais emportent des choix stratégiques différents. Il semble ainsi acquis que le fonds de réserve aura une fonction de lissage, c'est-à-dire qu'il lui reviendra de lisser sur une assez longue période les hausses de cotisations rendues nécessaires et, ainsi éviter de surtaxer les actifs au moment où des générations nombreuses arrivent à l'âge de la retraite. Dans ce cas, le fonds est destiné à être alimenté par une accumulation d'épargne, puis à être complètement dépensé. Ce lissage permet d'établir un calendrier prévisionnel des hausses de cotisations, d'en atténuer le niveau et de répartir de manière plus harmonieuse la charge supplémentaire : les actifs d'aujourd'hui comme ceux de demain se partagent ainsi le fardeau. La question suivante sera de savoir si le fonds doit survivre au passage des classes d'âge nombreuses. En ce cas, les produits du fonds servent de troisième cotisant comme le fait le Canada qui cherche à constituer un fonds à même de prendre en charge le quart des charges de pension. De ces choix découlent plusieurs données indispensables à connaître : quelle durée de période de lissage ? quels modes de financement ? quel niveau de réserve souhaité en fin de période ?

Différents scenarii techniques montrent l'importance financière des ces données 44 ( * ) : la période d'accumulation peut être inférieure à celle d'utilisation des ressources accumulées ; plus l'abondement est régulier, moins les cotisations futures auront besoin d'être relevées ; un point de rendement financier pour le fonds fait gagner un an sans hausse de cotisations pour les actifs ; plus la période de lissage est longue, plus celle d'accumulation augmente mais aussi plus l'amplitude des hausses de cotisations se réduit.

Il semble donc évident, au-delà des polémiques politiques, qu'il faut abonder le plus vite et le plus régulièrement possible. Or deux ans après la création du fonds, alors que seulement dix ans s'offrent à nous, le fonds n'est doté d'aucune règle de gestion d'avenir, et de seulement 23 milliards de francs !

Ces études montrent aussi l'importance du schéma de gestion retenu. Il faudra mettre en place un cadre certes sécurisé et contrôlé mais surtout géré par de vrais professionnels du long terme. Cela ne s'improvise pas et l'architecture provisoire est loin du compte en cette matière. Il semble désormais urgent de sortir le fonds de réserve du FSV et de le doter d'une architecture de gestion adaptée à sa tâche particulière.

Ainsi, les tâches de contrôle et de gestion devront être strictement séparées, la gestion devant être déléguée à un ou plusieurs professionnels, avec des règles précises sur la nature des actifs, leur dispersion, leur maturité, mais aussi des contraintes fortes de reporting et de contrôle. Le fonds pourra s'adjoindre une structure d'étude et d'évaluation, chargée notamment d'actualiser des scenarii actuariels et d'établir des comparaisons, le tout dans la plus grande transparence. Le fonds devrait être doté d'une très grande indépendance et rendre compte au Parlement de sa gestion.

Le régime des pensions du Canada

La réforme intervenue en 1997 dans le régime en répartition du Canada a modifié le régime des pensions et le rôle dévolu au fonds de réserve déjà existant, en transformant ce dernier d'un simple rôle d'épargne de précaution en un fonds permanent destiné à couvrir partiellement les engagements de retraite, donc à atténuer les hausses de cotisations futures nécessaires en visant un niveau équivalent à environ cinq années de prestations.

L'environnement de la réforme

Il est important de noter que cette réforme a été facilitée par le fait que tous les trois ans un organisme indépendant (le Bureau du surintendant des institutions financières) procède, conformément à la loi, à un examen actuariel du régime, analysant les conditions de l'équilibre à très long terme. Ce rapport est publié.

Le gouvernement fédéral et les provinces assurent conjointement la gestion du régime ; ils ont l'obligation de se réunir tous les cinq ans afin de fixer le calendrier des taux de cotisations des vingt-cinq ans à venir. Toute modification importante du régime (prestations, taux et assiette des cotisations, placements du fonds de réserve) doit être acceptée par le Parlement du Canada et les deux tiers des provinces.

C'est lors de l'examen quinquennal de 1996 que les tendances à long terme ont montré la nécessité d'augmenter fortement à terme les taux de cotisation.

Le rythme de la montée en charge du fonds

Le gouvernement a adopté une série de mesures visant d'une part à resserrer les conditions d'octroi des pensions et d'autre part à agir sur les recettes en recherchant simultanément un calendrier d'augmentation des taux de cotisation pendant une période relativement courte démographiquement favorable, et un niveau de fonds de réserve tel que le taux de cotisation soit ultérieurement stable sur une longue période en régime permanent (sous la contrainte que ce taux de régime permanent soit significativement inférieur au taux projeté avant la réforme).

Le calendrier et l'amplitude des hausses ont été les suivants :

1977 + 0,15 %

1998 + 0,40 %

1999 + 0,60 %

2000 + 0,80 % }Soit un niveau de cotisation en 2003 de 9.90 % de la fraction de salaire

2001 + 0,80 % soumise à cotisation, pour un taux maximum de remplacement de 25 %.

2002 + 0,80 %

2003 + 0,50 %

Après 2010, le fonds de réserve représentera entre quatre et cinq années de cotisations et les produits financiers qu'il dégage représenteront environ 25 % des cotisations.

La gestion financière

Afin d'optimiser les recettes financières, une nouvelle politique de placement est définie et un office d'investissements est créé afin de contrôler et de réguler ces placements. Cet organisme est doté de la personnalité morale et il a pour objectif de gérer, dans l'intérêt des déposants, les sommes transférées et de placer pour un rendement maximal compte tenu des risques acceptés. Il est assisté d'un Comité de placement et d'un Comité de vérification.

Source : Caisse des dépôts et consignations

Votre rapporteur pour avis, sans revenir sur le principe ou la justification économique du fonds de réserve, avoue ne pas comprendre l'attentisme du gouvernement en la matière : quel enjeu politique justifie que l'on diffère pendant plus de deux ans ainsi des décisions techniques à l'incidence financière lourde ?

2. Des ressources largement insuffisantes (articles 24 et 25)

Les ressources du fonds de réserve pour les retraites sont énumérées par l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale, modifié par le présent projet de loi de financement et par le projet de loi, en cours de discussion, sur l'épargne salariale. Elles comprendraient, si toutes les dispositions de ces textes étaient adoptées :

1° Une fraction, fixée par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, du solde du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) ;

2° Tout ou partie du résultat excédentaire de la première section du FSV, dans des conditions fixées par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget ;

3° Les montants résultant de l'application de l'article L. 251-6-1 ;

4° Une fraction égale à 50 % du produit des prélèvements visés aux articles L. 245-14 à L. 245-16 ;

5° Les versements du compte d'affectation institué par le II de l'article 23 de la loi de finances pour 2001 ;

6° Toute autre ressource affectée au fonds de réserve en vertu de dispositions législatives ;

7° Le produit des placements effectués au titre du fonds de réserve ;

8° Le produit des fonds en déshérence de l'épargne salariale à l'issue de la prescription trentenaire ;

9° Le produit de la cotisation de 8,2 % applicable aux abondements d'un plan partenarial d'épargne salariale volontaire supérieurs à 15.000 francs 45 ( * ) .

Le fonds de réserve a déjà bénéficié de certaines de ces ressources et devrait en percevoir de nouvelles.

Il a reçu : - 2 milliards de francs de C3S, - 5,4 milliards de francs de produit 2000 du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital, - 5 milliards de francs d'excédents de la CNAVTS en droits constatés sur 1999, - 2,9 milliards de francs d'excédents prévisionnels de la CNAVTS sur 2000, - 4,7 milliards de francs tirés de la vente des parts de caisses d'épargne, - 3 milliards de francs de " don " de la Caisse des dépôts et consignations, - 209 millions de francs de produits financiers pour 2000.

Pour 2001, les ressources du fonds de réserve augmenteront de 13,2 milliards de francs : 5,6 milliards de francs de prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine, 1,4 milliard de francs d'excédent prévisionnel en droits constatés de la CNAVTS, 4,7 milliards de francs des ventes de parts de caisses d'épargne, 1,4 milliard de francs de produits financiers.

Devraient s'y ajouter 18,5 milliards de francs de produit d'une première tranche d'attribution des licences de téléphonie mobile et 115 millions de francs issus de l'attribution de 0,1 point supplémentaire de prélèvement social de 2 % au fonds de réserve.

L'article 25 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit en effet d'ajouter à la liste des ressources du fonds de réserve une partie des produits de la cession de quatre licences de téléphonie mobile de troisième génération, dites licences UMTS, inscrits au budget de l'Etat dans un compte d'affectation spéciale, créé à cet effet par l'article 23 du projet de loi de finances pour 2001. Au total, sur les 130 milliards de francs attendus de la cession, 116 milliards devraient revenir au fonds de réserve, le solde allant au remboursement de la dette de l'Etat 46 ( * ) . Les versements seraient de 18,5 milliards de francs en 2001 et 2002 puis de 4,64 milliards de francs par an jusqu'en 2016.

Votre rapporteur pour avis n'est pas favorable à cette affectation. Il estime d'abord que le fonds de réserve doit être doté de ressources pérennes et non au coup par coup, au gré de cessions, d'occasions. Il lui faut un mode de financement clair et immuable. Il ne doit pas être suspendu au bon vouloir du gouvernement une année, et à son besoin de recettes une autre.

Par ailleurs, ces recettes sont rien moins que floues, très liées au budget de l'Etat, dépendantes de la vie économique et de l'avenir du secteur de la téléphonie mobile. Le fonds de réserve n'a pas besoin d'incertitudes.

En conclusion, votre rapporteur pour avis vous proposera de supprimer cette affectation au fonds de réserve, et, en loi de finances, de l'affecter exclusivement au désendettement de l'Etat.

Enfin, l'article 24 du projet de loi de financement de la sécurité sociale modifie les règles de répartition du produit du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital en l'affectant uniquement au risque vieillesse. Ainsi, la CNAMTS (pour 900 millions de francs) et la CNAF (pour 1,5 milliard de francs) perdent cette ressource qui sera désormais répartie :

• à 50 % pour le fonds de réserve pour les retraites (au lieu de 49 %) ;

• à 30 % à la CNAVTS ;

• à 20 % à la première partie du FSV (nouvelle ressource de 2,4 milliards de francs).

Au total, ce seront 31,8 milliards de francs qui devraient être ajoutés au fonds de réserve pour l'année 2001.

Le compte du FSV en encaissements/décaissements
(2 ème section)

(en millions de francs)

1999

2000

2001

Ressources

2.007

21.271

31.790

Excèdent du FSV 1 ère section

0

nd

nd

Prélèvement de 2 % sur le capital

5.410

5.750

Acompte de l'excèdent de la CNAVTS (n)

-

2.900

0

Affectation de l'excèdent de la CNAVTS (n-1)

-

5.033

1.421

Versement des caisses d'épargne

-

4.719

4.719

Versement de la CDC

-

3.000

0

Licence des téléphones mobiles de 3 ème génération

-

-

18.500

Produits financiers

7

209

1.400

C3S

2.000

-

Emplois

-

-

-

Solde (ressources - emplois)

2.007

21.271

31.790

Solde cumulé

2.007

23.278

55.068

Source : annexe f au PLFSS 2001

Cependant, ces projections négligent, toutes, la question de l'affectation de l'excédent de la première section du FSV au fonds de réserve. Le FSV avait un excédent structurel tendanciel qui se retrouve affecté par les mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. En deux ans, le solde positif cumulé du FSV, destiné à alimenter le FSV, sera réduit de 7,4 milliards de francs liés soit à des pertes de recettes soit à des hausses de charges pérennes. Au total, ce sont donc des recettes qui n'iront pas au fonds de réserve (cf. supra ).

Dégradation du solde de la première partie
du FSV en 2001

(en milliards de francs)

Perte de 0,15 point de CSG

- 7

Transfert au FOREC des droits sur les alcools

- 5,7

Transfert de la CNAF d'une partie du 2 % sur le patrimoine

+ 1,4

Transfert de la CNAMTS d'une partie du 2 % du patrimoine

+ 0,9

Transferts de la CNAF relatifs aux majorations de pension

+ 2,9

Nouvelles charges du FSV

- 3,2

Total

- 10,4

Le gouvernement a donc choisi : entre tenter aujourd'hui de financer les 35 heures et résoudre demain le problème des retraites, il a préféré la première solution et ponctionné 7,4 milliards de francs sur le FSV alors que cette somme aurait dû aller au fonds de réserve.

De même, le fonds de réserve doit recevoir l'excédent de C3S de l'année. En réalité, le gouvernement a, un nouvelle fois, ponctionné pour financer le déficit du BAPSA, privant le fonds de réserve de 1,35 milliard de francs, qui succède au milliard de francs prélevé en 1999 et 2000.

Ainsi, le fonds de réserve n'a jamais reçu de ressources en provenance du FSV et n'a reçu depuis 1999 que deux milliards du produits de la C3S. Or il faut rappeler les prévisions du gouvernement lors de la déclaration du Premier ministre le 21 mars 2000 quand il annonçait un fonds doté de 1.000 milliards de francs d'ici à 2020 : elles se fondaient sur 4.000 milliards de francs issus de ces deux sources, soit 20 milliards de francs par an.

Alimentation du fonds de réserve pour les retraites (2000-2020)

(en millions de francs)

Ressources

Cumul des flux annuels

Excédents de la CNAVTS

100

Excédents C3S et FSV

400

Prélèvement de 2 % sur les revenus du capital

150

Produit des parts sociales des caisses d'épargne et versement de la caisse des dépôts et consignations

20

Revenus financiers

330

Total estimé en 2020

1.000

*

Plus de deux ans après la création du fonds, et huit mois après les déclarations du gouvernement, le fonds de réserve de toute évidence connaît un rythme de progression bien inférieur à ce qui était prévu et, surtout, bien inférieur aux besoins. De plus, rien n'a été mis en place pour sa gestion et son fonctionnement. On peut donc se demander si, à l'image de l'ensemble de la politique du gouvernement en matière de vieillesse, le fonds de réserve existe vraiment.

B. LES AUTRES MESURES

1. La suppression du mode d'indexation des pensions (article 19)

L'article 19 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 se propose de réviser complètement le mode d'évolution des pensions en le supprimant. En effet, il se contente de remplacer le dispositif courageux d'indexation de retraites mis en place par la loi n° 93-936 du 22 juillet 1993, par une simple mesure valant pour la seule année 2001.

Afin de déguiser cette absence totale de décision en matière d'indexation des pensions, le gouvernement se propose d'établir de manière arbitraire la hausse pour 2001 à + 2,2 %.

Le précédent mode de fixation disposait qu'un " arrêté interministériel fixe :

1° le coefficient de majoration applicable aux salaires et aux cotisations servant de base au calcul des pensions ou rentes ;

2° le coefficient de revalorisation applicable aux pensions déjà liquidées.

Ces coefficients sont fixés conformément au taux prévisionnel d'évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation de tous les ménages hors les prix du tabac, qui est prévu, pour l'année civile considérée, dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances ".

L'application de ce principe a connu plusieurs variations puisque l'ajustement se fait d'une manière différente selon le respect ou non de l'objectif d'évolution des prix.

Taux comparé d'évolution des pensions et des prix depuis la loi du 22 juillet 1993

(en pourcentage)

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000 (prév.)

2001 (prév.)

Revalorisations

au 1 er janvier

2

1,2

2

1,2

1,1

1,2

0,5

2,2

au 1 er juillet

0,5

Evolution annuelle

2

1,45

2,25

1,2

1,1

1,2

0,5

2,2

Evolution des prix hors tabac

prévue

2

1,7

2,1

1,3

1,3

1,2

0,9

1,2

constatée

1,4

1,8

1,9

1,1

0,8

0,5

1,4

-

Source : commission des comptes de la sécurité sociale et projet de loi de finances

Au 1 er janvier 2001, selon le mode d'indexation de 1993, la revalorisation des retraites aurait dû être de 1,7 % correspondant au 0,5 point de manque à gagner sur 2000 et au 1,2 point d'inflation attendu pour 2001. Au lieu de cela, le gouvernement propose une hausse de 2,2 % à laquelle viendra s'ajouter pour certains retraités l'exonération de CRDS soit 0,5 point de pouvoir d'achat en plus. Cette revalorisation au-delà du mode précédent de 0,5 % a un coût pour l'assurance vieillesse de 1,875 milliard de francs. Le coût total de la hausse des pensions pour l'assurance vieillesse est quant à lui de 8,25 milliards de francs.

Votre rapporteur pour avis avait déjà l'année dernière reproché au gouvernement de retenir un taux arbitraire. Il constate que le taux retenu cette année ébranle un peu plus le dispositif courageux mis en place en 1993 et visant à ce que les retraites n'évoluent plus comme les salaires mais comme les prix. Progressivement, ce principe qui avait été la première mesure de consolidation du régime par répartition est battu en brèche, sans débat, en déguisant la mesure sous un habillage de revalorisation du pouvoir d'achat des retraités.

Il s'agit d'une mauvaise mesure pour l'ensemble du système français de retraite :

• les retraités ont le droit de savoir la méthode qui sera retenue durablement pour faire évoluer leurs pensions ;

• le système de répartition a besoin de projections claires pour être consolidé.

La méthode ou l'absence de méthode du gouvernement est dangereuse et critiquable. Elle cache aux retraités la vérité et affaiblit un peu plus les régimes par répartition qui n'en ont guère besoin. Votre rapporteur pour avis ne peut que la condamner.

2. La création d'un répertoire national des retraites (article 20)

Le rapport Charpin a mis en lumière la nécessité de se doter d'instruments techniques propres à apporter une aide, mise à jour en continu, à l'analyse et la décision en matière de retraites.

L'article 20 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 propose ainsi de créer deux outils :

• un répertoire national des retraites et des pensions : tous les organismes obligatoires, de base et complémentaires, ainsi que les débiteurs d'avantages (complément familial, APE, personnes assurant la charge d'une personne handicapée, assurance volontaire vieillesse et invalidité) et les organismes gérant des régimes d'invalidité, seront tenus de communiquer à un organisme qui sera créé par décret en Conseil d'Etat toutes les informations sur la nature et les avantages servis, l'identification des assurés, de leurs ayants-droit et leurs droits ;

• un échantillon statistique inter-régime de cotisants, anonyme et représentatif, destiné à des études en continu et à des simulations.

Ces instruments figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, cependant votre rapporteur pour avis émet des doutes sur leur recevabilité au regard du champ défini par la loi organique pour les lois de financement de la sécurité sociale. L'insertion, à l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, notre collègue député M. Jérôme Cahuzac, de la transmission tous les deux ans au Parlement et au Conseil d'orientation des retraites d'une synthèse des travaux permettra peut-être de lever cette difficulté constitutionnelle.

Votre rapporteur pour avis estime que cette mesure va dans le bon sens. Elle ne doit cependant pas être une incitation à un attentisme motivé par le lancement de nouvelles études et projections mais véritablement constituer un outil d'aide à ce qui manque le plus en matière de retraite : la décision.

3. La pérennisation de l'interdiction du cumul emploi - retraite (article 21)

L'article 21 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 supprime toute limitation dans le temps des dispositifs existants restreignant le cumul emploi - retraite.

Les règles de limitation du cumul emploi - retraite ont été fixées corrélativement à l'abaissement de l'âge de la retraite par l'ordonnance n° 82-290 du 30 mars 1982 pour le régime général et le régime des pensions civiles et militaires, puis ont été étendues aux professions non salariées. Le cumul d'une pension de retraite avec une activité rémunérée est soumis à la condition de l'abandon de l'emploi occupé lors de la demande de liquidation de la pension. S'ils souhaitent pouvoir cumuler, les salariés doivent exercer leur activité chez un nouvel employeur, et les non salariés, exercer une autre profession.

Ces règles ont été régulièrement reconduites, la dernière fois par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 jusqu'au 31 décembre 2000, ce délai se justifiant, pour le gouvernement, par la nécessité d'analyser complètement le dispositif. M. Balmary a ainsi remis un rapport au gouvernement, qui montrerait " que ce dispositif auquel les partenaires sociaux sont fortement attachés, ne soulève pas de critique majeure de leur part et n'occasionnera pas de tensions particulières. Par ailleurs, il est probable que la suppression de ce dispositif aurait un impact non négligeable sur le chômage puisque les retraités pourraient, sans limitation, poursuivre leur activité professionnelle " 47 ( * ) .

Or, la lecture du rapport indique que cette vision des choses pêche par trop d'optimisme, ainsi que l'indique les citations figurant dans le rapport de notre collègue député Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour la vieillesse : " Aujourd'hui, dans un champ très large, mais criblé de dérogations ponctuelles, ne subsiste plus que l'interdiction faite à celui qui demande la liquidation de l'intégralité de sa retraite à partir de 60 ans, de poursuivre son activité antérieure ".

Déjà, le rapport Charpin avait considéré que les règles actuelles souffraient de complexité, de trop nombreuses dérogations, pour un effet très limité sur le niveau de l'emploi.

Votre rapporteur pour avis ne peut que s'interroger sur ces discordances entre le texte du rapport et sa lecture par le gouvernement. Il n'y voit qu'un exemple supplémentaire à la fois de sa volonté de tromperie et de son incapacité à définir clairement sa doctrine en matière de retraites. Or, s'agissant du cumul entre pension de retraite et revenus d'activité, la question dépasse les seuls équilibres financiers et statistiques du chômage. C'est une question de société qui mérite, elle aussi, plus qu'un simple article rapidement examiné du projet de loi de financement. Il n'a pas fait l'objet d'un instant de débat à l'Assemblée nationale. Quelle place pour le cumul dans la société future ? Que faire des situations inégalitaires qui prévalent aujourd'hui sur ce sujet ? Ne veut-on pas plus de flexibilité, de souplesse, de liberté dans ses choix de vie ? Ces questions sont loin d'être anodines et attendent des réponses que ne livre pas le gouvernement.

4. Les mesures spécifiques

a) L'amélioration de la situation des veuves ( article 19 bis)

L'Assemblée nationale a adopté un amendement déposé par le gouvernement, suivant en cela le souhait de la commission des affaires culturelles qui ne pouvait le faire en raison des dispositions de l'article 40 de la Constitution. Il insère un article 19 bis qui supprime dans l'article L. 356-1 du code de la sécurité sociale (qui régit l'assurance veuvage) toute référence au nombre d'enfants pour bénéficier de cette prestation. Cinq cents personnes seraient concernées.

L'assurance veuvage, qui a connu une petite réforme dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, garantit au conjoint d'un assuré relevant du régime général ou du régime des salariés agricoles de moins de 55 ans et ayant élevé ou ayant à sa charge au moins un enfant, une allocation veuvage durant deux ans, reconductible trois ans entre 50 et 55 ans, soumise à un plafond de ressources. Elle est financée par une cotisation à la charge du salarié, de 0,1 % du salaire. Au 31 décembre 1999, 17.329 femmes et 462 hommes en bénéficiaient.

Sans revenir sur l'économie générale de ce minimum social, votre rapporteur pour avis émettra quelques observations.

D'abord, il ne peut que remarquer la situation excédentaire dans laquelle se trouve le Fonds national de l'assurance veuvage depuis des années. Ainsi, l'année dernière, l'excédent a représenté le triple des dépenses. En 2001, il sera supérieur à celui de l'excédent de la CNAVTS qui le gère.

Les comptes de l'assurance veuvage

(en millions de francs)

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Recettes

1.738

2.028

1.941

1.924

1.992

2.020

2.321

2.153

2.400

2.207

2.330

2.467

Dépenses

435

435

439

449

465

462

506

550

548

590

608

556

Solde

+ 1.303

+ 1.593

+ 1.502

+ 1.475

+ 1.527

+ 1.558

+ 1.815

+ 1.603

+ 1.852

+ 1.617

+ 1.722

+ 1.911

Source : Commission des affaires sociales du Sénat et CCSS 09 2000

Ainsi, l'absence de réforme significative de la prestation d'assurance veuvage pourrait s'expliquer par le souci de ne pas dégrader les comptes de la CNAVTS.

L'apport de l'assurance veuvage à l'équilibre de la CNAVTS

(en millions de francs)

1998

1999

2000

2001 (*)

Solde CNAVTS

- 224

3.715

+ 594

+ 1.400

dont assurance veuvage

+ 1.852

+ 1.617

+ 1.722

+ 1.911

Solde CNAVTS

- 2.076

2.098

- 1.126

- 511

sans assurance veuvage

(*) Après mesures du plfss 2001

En effet, la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 a intégré l'assurance veuvage dans la branche vieillesse, même si l'article L. 251-6 du code de la sécurité sociale prévoit que " les excédents du fonds national d'assurance veuvage constatés à l'issue de chaque exercice sont affectés en priorité à la couverture sociale du risque veuvage " . De toute évidence cela est faux et n'a jamais été respecté.

Ensuite, l'assurance veuvage constitue un des mécanismes les plus injustes et les moins favorables de notre système social : les seuils de revenus sont draconiens (790 francs par mois pour en bénéficier à taux plein), les conditions d'âge aussi (elle n'est valable que deux ans en-dessous de 50 ans), quant au montant il est de 2.065 francs par mois. Elle était encore plus stricte avec la condition d'enfant qui, cumulée avec la possibilité d'y adjoindre l'allocation de parent isolé (API) hors plafond de ressources, créait une disparité très forte entre les veufs avec enfants (assurance veuvage et API) et les veufs sans enfant (RMI). A l'instar de la Cour des comptes et de notre collègue député Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour la vieillesse, votre rapporteur pour avis estime qu'il est temps de réfléchir à l'avenir de cette prestation, en la liant aux questions de pensions de réversion, d'âge et de lien avec les autres minima sociaux.

S'il ne peut qu'approuver la mesure proposée dans l'article 19 bis , il doit aussi déplorer son caractère bien trop timoré, qui ne saurait faire oublier que ce sont les veuves et veufs qui depuis trop d'années aident à couvrir les déficits de l'assurance vieillesse.

b) L'amélioration de la situation des veuves de marins (article 26)

L'article 26 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoit un aménagement d'apparence technique pour le régime spécial de retraite des marins, la Caisse de retraite des marins (CRM).

Il prévoit ainsi dans son I d'ajouter à la liste des revenus pris en compte pour le calcul de la pension les périodes durant lesquelles un marin a perçu une pension d'invalidité. Ainsi, cette dernière sera prise en compte jusqu'à 25 annuités et pourra être versée comme pension de vieillesse entre le 55 ème et le 60 ème anniversaires si le plafond de 25 annuités est atteint. Le II réécrit l'alinéa prévoyant que l'ensemble des services accomplis à bord et à terre, de nature à ouvrir droit à retraite, donnent lieu à une cotisation des employeurs, fonction des salaires, mais en exclut les pensions d'invalidité, comme les cas de perception d'un revenu de remplacement en cas de privation d'emploi. Cela signifie que si les pensions d'invalidité donnent droit à annuités, elles ne donnent pas lieu à contribution des employeurs.

L'intérêt principal de cet article est donc de faire rentrer dans la base de calcul des pensions, et donc des pensions de réversion, les pensions d'invalidité. Jusqu'alors, si les marins pouvaient cumuler pension d'invalidité et retraite, leur veuve perdait tout bénéfice de la première, non réversible et non prise en compte dans le calcul des pensions.

Il s'agit donc d'une mesure d'un coût de 20 millions de francs destinée à améliorer la situation des veuves de marins.

c) L'intégration du fonds additionnel d'action sociale (article 27)

Le Fonds additionnel d'action sociale (FAAS) du régime de protection sociale des agriculteurs a été créé par la loi de finances pour 1980 afin de donner les moyens aux caisses, en sus des fonds d'action sociale, de développer une politique d'aide aux services ménagers pour les personnes âgées.

Le gouvernement a souhaité supprimer ce fonds, considérant que les enjeux du maintien à domicile, de la dépendance, des services collectifs avaient gagné en ampleur et qu'il était nécessaire de développer une approche plus globale que les seuls services ménagers.

Le FAAS est financé depuis 1992 par un prélèvement sur le produit des cotisations complémentaires d'assurance vieillesse des salariés et des non salariés. Ceci lui permet de disposer de ressources en augmentation constante depuis 1995, avec une baisse en 2000.

Ressources DU FAAS

(en millions de francs)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

156,5

220

220

250

346

316

En 1999, le FAAS a dégagé un excédent de 51 millions de francs qui a permis de compenser, pour 27 millions, les déficits des années précédentes.

C. QUELLE POLITIQUE GOUVERNEMENTALE EN MATIÈRE DE RETRAITES ?

1. Le décalage de temps

a) Le temps infini des concertations

En matière de retraites, alors que les rapports et études se multiplient depuis vingt ans comme en témoigne le tableau ci-dessous, le gouvernement ne brille pas par sa précipitation.

Les retraites : vingt ans de rapports

Voici les principaux rapports publiés depuis vingt ans sur le thème des retraites :

• 1980 : rapport de Robert Lion ;

• 1983 : rapport de Jean-Pierre Sueur ;

• 1985 ; rapport de Maurice Ragot pour le Conseil économique et social (CES) ;

• 1987 : rapport de Philippe Seguin ;

• 1988 : rapport d'Yvon Chotard ;

• 1989 : rapport de René Teulade pour le Xème plan ;

•  1990 : rapport de Denis Kessler pour la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) ;

• 1991 : Livre blanc de Michel Rocard et Claude Evin ; rapports de Bernard Chevalier pour le Plan et le CES ;

• 1992 : rapport Cottave ;

• 1992 : rapport de Bernard Brunhes ;

•  1994 : rapports de l'Inspection générale des affaires sociales et de Jean-Pierre Thomas ;

• 1995 rapport du Plan ;

• 1996 : rapport de Charles de Courson ;

• 1997 : audit des finances publiques de MM. Bonnet et Nasse ;

• 1998 : rapports de Laurent Caussat, François Morin, Olivier Davanne (Conseil d'analyse économique), de Jérôme Cahuzac, de Jean-Baptiste de Foucauld ;

• 1999 : rapports de René Teulade, de la Fondation Copernic, de Jean-Michel Charpin, de Dominique Taddéi ;

• 2000 : rapports de René Teulade et de Marisol Touraine.

Source : Les Echos du 15 avril 2000

Au lieu de décisions, le gouvernement a indiqué ses orientations par la bouche du Premier ministre le 21 mars 2000, après une longue attente. Il a à cette occasion énoncé cinq grand principes :

• la concertation dans l'élaboration et la progressivité dans la mise en oeuvre ;

• le respect de la diversité et de l'identité des régimes ;

• la recherche d'une plus grande équité et d'une solidarité plus forte entre les régimes ;

• l'introduction de plus de souplesse pour mieux respecter les choix des individus ;

• l'anticipation des évolutions démographiques afin d'équilibrer les charges entre les générations.

A partir de ces axes, au lieu de décisions, le Premier ministre a indiqué qu'il allait " dégager, par la discussion, des solutions adaptées à chaque régime, renforcer le fonds de réserve pour les retraites et instaurer un conseil d'orientation des retraites ". La déception fut donc grande.

A la phase des rapports succédera donc une phase de discussion, dont le moins que l'on puisse dire c'est qu'elle ne fait guère de bruit et qu'elle ne débouche pas sur grand chose jusqu'à présent.

Quant au fonds de réserve, il est loin du compte (voir infra ).

Le gouvernement a cependant mis en place le Conseil d'orientation des retraites (COR), institué par le décret n° 00-393 du 10 mai 2000, avec pour missions :

" 1° de décrire la situation financière actuelle et les perspectives des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques ;

2° d'apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ;

3° de veiller à la cohésion du système de retraite par répartition, en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité, tant entre les retraités qu'entre les différentes générations ".

A cette fin, il " peut formuler toutes recommandations ou propositions de réforme qui lui paraissent de nature à répondre aux objectifs précédemment définis. Il remet au Premier ministre, au moins tous les deux ans, un rapport d'ensemble analysant la situation des régimes de retraite et proposant les mesures jugées nécessaires pour assurer leur équilibre à long terme. Ce rapport est communiqué au Parlement et rendu public. " Il doit se faire communiquer tous renseignements utiles par les administrations et organismes concernés.

Comme premier travail, le COR s'est livré à une analyse critique des différents travaux réalisés dernièrement, à commencer par les rapports Charpin et Teulade. Il a montré que les différences entre eux s'expliquaient par un écart dans le choix méthodologique d'indexation des pensions : alors que le rapport Charpin retient les mécanismes en vigueur, le rapport Teulade ne tient pas compte des modes d'indexation particuliers des régimes spéciaux. Par ailleurs, le COR a examiné les différentes variables pesant sur l'évolution des besoins de financement : perspectives démographiques (un retour rapide à une fécondité de 2,1 se traduirait par un gain d'un point de PIB en 2040 ; mortalité ; solde migratoire), hypothèses sur l'activité et le chômage (taux d'activité de la population, des jeunes, des femmes, des plus de 55 ans, taux de chômage), et hypothèses sur l'évolution des revenus (productivité, partage de la valeur ajoutée). Le COR rappelle enfin que ce qui est en jeu est moins un niveau constant de retraite que le maintien du niveau de vie des retraités. Il montre par sa première étude que les données démographiques laissent assez peu de marges de manoeuvre, alors que les hypothèses relatives à l'emploi et à l'activité sont déterminantes. A long terme, la croissance ne peut suffire à régler le problème du chômage, même si elle peut permettre de réorienter vers la retraite d'autres prélèvements.

Cependant, en plus de la légitime et forte inquiétude qui commence à se faire jour chez les Français sur l'avenir de leurs retraites, il devient urgent pour l'état de nos finances publiques de tracer une voie pavée de décisions précises, et non plus de travaux d'attente. Les actes se font attendre : qu'il s'agisse des différences entre les régimes privés et publics, de l'âge de départ en retraite, des modes supplémentaires de constitution volontaire d'une épargne retraite, sur aucun des points essentiels le gouvernement n'a apporté de réponse, alors que chacun a une traduction financière. Il ne faut pas se laisser abuser par l'équilibre de la branche vieillesse du régime général qui n'est qu'un répit.

b) Le temps fini de l'équilibre

En effet, si le diagnostic est connu, il n'est pas inutile de le rappeler. Pour reprendre les conclusions du rapport Charpin, trois scenarii se dégageaient.

Projections des dépenses de retraite dans le rapport Charpin

Fécondité

1,8 enfant/femme

Hypothèses démographique

Mortalité

Projection tendancielle INSEE (1)

Solde migratoire

+ 50.000 par an

Productivité du travail

+ 1,7 % par an

Hypothèses économiques

Taux de chômage

9 % (Sc n° 1)

6 % (Sc n° 2)

3 % (variante)

Effectif de la population active

Tendanciel INSEE (2)

Tendanciel INSEE + 500.000

Tendanciel INSEE + 1.000.000

Hypothèses sociales

Indexation des pensions

Prix

Part des dépenses de retraite dans le PIB en

2020

15 %

14,1 %

13,5 %

Résultats

2040

2040

16,7 %

15,8 %

15,1 %

Besoin de financement

2020

+ 2,9

+ 2

+ 1,4

en points de PIB (3)

2040

+ 4,6

+ 3,7

+ 3

(1) Correspondant à une poursuite de l'allongement de l'espérance de vie de deux mois tous les ans.

(2) Correspondant à une prolongation de l'accroissement des taux d'activité féminins et une stabilisation des taux d'activité des jeunes et des personnes âgées

(3) Par rapport à 12,1 %, part en 1998 des dépenses de retraite dans le PIB

Source : COR, rapport 2000

Au total, il faudrait de 1,4 à 2,9 points de PIB supplémentaires pour maintenir la situation actuelle en 2020, et de 3 à 4,6 points en 2040. En 1998, la retraite représentait 12,1 % du PIB français.

Traduits en termes financiers, ces chiffres permettent de prendre la mesure et l'ampleur du chantier ouvert. De plus, il est urgent puisque les retraités de 2020 sont déjà tous nés et puisque les classes d'âge nées entre 1942 et 1960 seront retraitées entre 2002 et 2020. La génération du baby-boom remettra en cause l'équilibre de la CNAVTS dès 2010.

2. L'ardente obligation du troisième pilier

Votre rapporteur pour avis tient d'abord à réaffirmer son attachement très vif aux régimes de retraite par répartition. Il estime qu'ils jouent un rôle essentiel dans le contrat social français et qu'il n'est pas imaginable de les remettre en cause.

La première réforme des retraites est donc une consolidation des régimes de répartition qui passera notamment par un allongement de la durée de la vie active.

Cette réforme pourra aller de pair avec d'autres mesures comme l'idée d'une généralisation du fonctionnement par points (sur le modèle de ce qui se fait pour les régimes complémentaires) ou celle d'un rapprochement des situations, notamment d'ouverture de droits, des régimes de la fonction publique et des salariés du privé.

Mais ces réformes ne pourront suffire. Il faudra bien arriver à faire comprendre la nécessité de l'établissement, pour les salariés du secteur privé, d'un mécanisme d'épargne permettant de mettre en place une retraite surcomplémentaire : le troisième pilier.

a) Gesticulation : le scandale de l'abrogation de la loi Thomas (article 19 A)

La loi n° 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite, d'origine parlementaire, a été adoptée par le Parlement en février 1997. Suite au changement de gouvernement en mai 1997, elle n'a pas reçu ses décrets d'application et est donc inapplicable depuis plus de deux ans et demi. C'est une situation relativement inédite dans laquelle tout un dispositif législatif, régulièrement adopté, promulgué par le Président de la République, et publié au Journal officiel , reste inappliqué par la seule volonté du gouvernement. Le " délai raisonnable " de parution des textes d'application ne tient plus. Et le gouvernement a clairement fait savoir son intention d'abroger cette loi qui ne correspond pas à ses attentes.

Le gouvernement avait l'obligation juridique de publier les décrets ; il ne l'a pas fait. Il s'était engagé à proposer un système alternatif ; il ne l'a pas fait. Il avait claironné son souhait de l'abroger, voilà qu'il approuve la proposition de le faire. Le principal acte en matière de réforme du système de retraite présent dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 ressemble donc à un renoncement, celui à un système attendu de tous et qui aurait été un succès. Au lieu de cela, le gouvernement a préféré l'échec et son constat.

A l'Assemblée nationale, en gage à une frange de la majorité plurielle particulièrement agitée, le gouvernement a décidé, un peu comme on lance un " os à ronger ", de proposer d'abroger définitivement cette loi. Une telle mesure devait figurer dans d'autres textes législatifs mais soit elle en fut retirée, soit le projet de loi a tardé à venir en discussion.

Cette abrogation est critiquable à bien des points de vue.

On pourrait certes se féliciter de voir la fin de ce scandale législatif que représente la vie formelle d'un texte adopté mais non appliqué pour des raisons politiques. Mais comment ne pas voir dans le contraste entre le silence des propositions concrètes du gouvernement en matière de retraites et le mauvais signal donné par cette abrogation un signe de plus de l'inaction gouvernementale sur le sujet ! Et les retraites ? Sa seule proposition est donc de supprimer l'une des principales possibilités de conforter les régimes par répartition !

Ensuite, on peut se demander si une telle disposition figure bien à sa place dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Certes, il peut exister un lien financier dans la mesure où la loi Thomas s'accompagnait d'avantages fiscaux et sociaux. Mais comment penser qu'il y aura plus de recettes ou moins de dépenses par cette abrogation puisque la loi n'était pas appliquée et n'avait pas vocation à l'être.... Il s'agit d'un simple prétexte et votre rapporteur pour avis espère que le Conseil constitutionnel déclarera non conforme à la Constitution cet article 19 A.

Enfin, quelle image donne-t-on du débat politique si, pour acheter une absence de vote contraire, on lâche ainsi telle ou telle mesure, au gré des influences et des humeurs ?

Votre rapporteur pour avis estime que cette abrogation de jure constitue un caprice irresponsable du gouvernement qui, pour se sauver lui-même, sacrifie l'avenir tout entier du système français de retraite.

b) Actes : les propositions adoptées par le Sénat

Le Sénat a, dès février 1993, pris position en faveur d'un mécanisme complémentaire d'épargne individuelle 48 ( * ) . En 1997, la loi Thomas a été votée, pour connaître la destinée qu'on lui connaît. En octobre 1999, le Sénat a adopté une proposition de loi tendant à instituer des plans de retraite 49 ( * ) . Ces initiatives allaient dans le bon sens : celle de la généralisation à 14 millions de salariés du secteur privé des mécanismes d'épargne mis en place dans le secteur public (la Préfon) et pour les professions libérales (dite " loi Madelin ").

En effet, le développement de la capitalisation constituera un complément indispensable à la réforme des retraites et pourra en atténuer les rigueurs. Le régime par capitalisation jouerait un rôle d'appoint, alliant ainsi les avantages des deux systèmes. D'ailleurs, sur le long terme, le taux de rendement de la capitalisation a toujours été supérieur à celui de la répartition.

Le Sénat a adopté, le 9 novembre 2000, un système de plans de retraite dans le cadre du projet de loi relatif à l'épargne salariale, qui cherche à répondre à ces besoins. Il s'agit d'un dispositif équilibré, structuré autour des axes suivants :

- le choix d'une retraite complémentaire facultative : il s'agit d'un système souple pour le salarié et pour l'entreprise ;

- le choix d'une sortie essentiellement en rente ;

- la préservation de l'équilibre des régimes de retraite avec l'exclusion des cotisations vieillesse de l'exonération de cotisations sociales ;

- le choix de la gestion externe à l'entreprise qui assure une meilleure protection des adhérents.

Alors que le gouvernement se contente de discuter et de commander des rapports, le Sénat a prouvé à de nombreuses reprises qu'il entendait agir sur le terrain des retraites, domaine sur lequel les Français nourrissent une très vive inquiétude.

Votre rapporteur pour avis espère que la phase attentiste touche à sa fin et qu'il ne faudra pas attendre le passage d'échéances importantes dans les dix-huit mois à venir pour voir le gouvernement se mettre à l'ouvrage.

En matière de retraite, le pire est à venir, ce pire est certain et il se rapproche à grands pas. L'immobilisme frise donc ici l'irresponsabilité. Le gouvernement doit désormais agir.

IV. LES ACCIDENTS DU TRAVAIL : LE FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE

Les accidents du travail ont poursuivi en 1999 leur hausse entamée depuis 1997 : plus de 1,35 million d'accidents du travail ont ainsi été enregistrés en 1999, plus de 715.000 ayant entraîné un arrêt supérieur à 24 heures. La forte progression de l'emploi salarié a en revanche fait baisser la fréquence des accidents de 1,2 % (hausse de 0,9 % pour les accidents avec arrêt). Le nombre de décès a aussi augmenté avec 732 décès en 1999 contre 695 en 1998 et 732 en 1997. Les maladies professionnelles se sont élevées à 15.612 en 1999 (16.498 en 1998 et 15.554 en 1997). Elles étaient liées à 70 % aux troubles périarticulaires et à 10,5 % à l'amiante.

Evolution du nombre du nombre des accidents du travail

(en pourcentage)

1994 / 1993

1995 / 1994

1996 / 1995

1997 /1996

1998 / 1997

1999 / 1998

Accidents

0,4

0,3

- 4

0,8

1,2

1,5

Accidents avec arrêts

0,5

1,1

- 4,6

2,3

3,1

3,6

Accidents mortels

- 0,5

- 8,2

- 3,7

-0,1

- 5,1

5,3

Source : CNAMTS

La branche accidents du travail connaît une situation structurellement excédentaire depuis 1998, caractérisée par une bonne tenue des dépenses et un dynamisme des recettes, le rythme supérieur des secondes à celui des premières expliquant la hausse de l'excédent :

Les comptes de la branche " accidents du travail "

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

Recettes

45,7

46,3

49,3

51,9

Evolution

-

+ 1,3 %

+ 6,5 %

+ 5,3 %

Dépenses

44,1

45,3

47,2

48,5

Evolution

-

+ 2,7 %

+ 4,2 %

+ 2,7 %

Solde

+ 1,6

+ 1

+ 2,1

+ 3,4

Source : CCSS 09 2000

Cette branche a notamment tiré profit pour ses dépenses en 2000 du mode de financement des 35 heures qui l'a conduit à bénéficier d'une baisse de dépenses sans perte de ressources. Le passage à la comptabilité en droits constatés ne révèle pas d'écarts très importants, sinon une légère augmentation de chaque poste, se retrouvant dans un solde en hausse :

Les comptes de la branche " accidents du travail " : comparaison encaissements / décaissements et droits constatés

(en milliards de francs)

Encaissements décaissements 2000

Droits constatés 2000

Encaissements décaissements 2001

Droits constatés 2001

Recettes

49,3

49,6

51,9

52,4

Dépenses

47,2

47,3

48,5

48,6

Solde

+ 2,1

+ 2,3

+ 3,4

+ 3,8

Source : CCSS 09 2000

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une importante réforme pour la branche accidents du travail par la création d'un fonds spécial destiné à indemniser les victimes de l'amiante. La conséquence financière du fonds sera de ramener la prévision d'excédent 2001 de 3,4 à 1,8 milliard de francs (en encaissements / décaissements).

A. LE DISPOSITIF ACTUEL ENCORE INCOMPLET

1. Le drame de l'amiante

En 1997, l'INSERM a évalué le nombre total des victimes de l'amiante à 35.000 personnes depuis 1965, occasionnant 2.000 décès par an. Les maladies liées à l'amiante ayant un délai de latence de trente à quarante ans, et ce matériau n'ayant été interdit qu'à partir du 1 er janvier 1997, il est à craindre que le drame de l'amiante sera amené à se développer dans les années qui viennent.

Une étude de l'unité 88 de l'INSERM en 1999 a ainsi mis en évidence " le nombre extraordinairement élevé d'hommes ayant été exposés à l'amiante durant leur carrière professionnelle. (...) 45 % des métiers du bâtiment et travaux publics sont exposés à l'amiante ; au sein du secteur de la production industrielle, où plus de 40 % des emplois sont exposés à l'amiante, la métallurgie et le secteur des machines sont particulièrement concernés ". De même, l'étude a montré que 80 % des mésothéliomes et entre 5 et 10 % des cancers du poumon sont dus à une exposition professionnelle à l'amiante.

Au regard de la branche accidents du travail, l'amiante est une maladie professionnelle dont l'indemnisation obéit à un dispositif dérogatoire.

2. Les précédentes initiatives

Les victimes de l'amiante disposent déjà d'un dispositif particulier d'indemnisation, complété par une allocation de cessation anticipée d'activité.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a revu les règles de prescription en vigueur pour les maladies professionnelles en les adaptant au régime particulier de l'amiante :

• au lieu de prévoir une prescription de deux ans à partir du moment où la maladie survient, le délai court à partir du moment où le malade a connaissance du lien avec son activité professionnelle ;

• les victimes de l'amiante pouvaient de manière rétroactive demander indemnisation entre fin décembre 1998 et fin décembre 2000, délai prolongé en 2001 par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

La branche accidents du travail a supporté le coût financier des ces mesures.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a par ailleurs instauré une nouvelle prestation, l'allocation de cessation anticipée d'activité destinée à permettre à des salariés ayant été victimes de l'amiante de partir en préretraite. Ce dispositif est désormais ouvert aux salariés et anciens salariés d'au moins cinquante ans des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, ou bien atteints d'une maladie professionnelle liée à l'amiante, ou bien ayant travaillé dans des entreprises spécialisées dans le flocage et le calorifugeage à base d'amiante, dans des établissements de construction navale où était traitée l'amiante, ou dockers professionnels d'un port où était manipulée de l'amiante.

La loi de finances rectificative pour 2000 a exonéré l'indemnité perçue au titre de la cessation anticipée d'activité (qui complète l'allocation) d'impôt sur le revenu, de cotisations sociales, de CRDS et de CSG, en la considérant comme une indemnité octroyée au salarié quittant l'entreprise à l'initiative de l'employeur.

Le dispositif de cessation anticipée d'activité concernait au 31 mars 2000 déjà près de 2.500 personnes :

Victimes de l'amiante bénéficiant du dispositif de cessation anticipée d'activité
(au 31 mars 2000)

Dossiers reçus

3.670

Dossiers acceptés

2.466

Dossiers rejetés

781

Dossiers attendus d'ici au 31 décembre 2000

5.900

Total attendu d'ici au 31 décembre 2000

8.300

Source : Ministère de l'emploi et de la solidarité

Lors de la discussion de cette disposition en juin dernier, votre commission avait salué cette avancée mais avait critiqué son absence de financement, notamment pour les pertes de recettes qui en résulteraient pour la sécurité sociale. Elle n'a toujours pas eu de réponse, probablement parce qu'il n'existe pas de compensation et que l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est ainsi violé.

Pour financer l'allocation de cessation anticipée d'activité, a été mis en place un fonds d'indemnisation 50 ( * ) , doté en 1999 de 100 millions de francs de subvention de l'Etat (pour des dépenses effectives de 56,4 millions de francs), et à partir de 2000 de 0,43 % du droit de consommation sur les tabacs ainsi que d'une contribution de la branche accidents du travail 51 ( * ) .


Compte de résultat prévisionnel du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante
pour 2000

(en millions de francs)

Recettes

923

Solde de la subvention de l'Etat

43

Droits sur les tabacs

205

Subvention de la branche accidents du travail

675

Dépenses

925

Pour 2001, le produit des droits sur les tabacs est estimé à 210 millions de francs par le ministère des finances (dans le jaune Bilan des relations financières entre l'Etat et la protection sociale ) et à 240 millions de francs par le ministère de l'emploi et de la solidarité (dans la réponse à une question de votre rapporteur pour avis). Il n'a pu être obtenu aucune autre information sur les futures dépenses et recettes du fonds, alors même qu'il devrait bénéficier d'une subvention de la branche accidents du travail.

Or les demandes croissantes pour voir inscrire telle ou telle entreprise et surtout ajouter tel ou tel secteur d'activité dans le champ des bénéficiaires de cette allocation rendent inéluctable une montée en puissance très rapide des dépenses du FCAATA. Il faudrait donc s'assurer de la pérennité de son financement qui risque de mobiliser des sommes importantes dans l'avenir : il ne faudrait pas que le champ soit contraint pour des raisons de non prévision budgétaire, mais seulement pour des raisons scientifiquement prouvées de non exposition au risque.

B. UN NOUVEAU FONDS NÉCESSAIRE ET COÛTEUX

1. Un fonds nécessaire

Le dispositif proposé était jusqu'à présent finalement assez limité (délais administratifs pour les maladies professionnelles ou bien cas spécifiques des professions bénéficiant de l'allocation de cessation anticipée d'activité).

Or les victimes dépassent largement ce cadre là. Certaines souffrent de maladies liées à l'amiante sans aucun lien avec une maladie professionnelle. D'autres se heurtent à des difficultés administratives. D'autres enfin, quoique relevant du régime des maladies professionnelles, ne jouissent pas d'une indemnisation totale. Nombre de ces difficultés occasionnent des contestations devant les juridictions des affaires de sécurité sociale. Les victimes souhaitent donc une appréhension globale du problème de l'amiante et de son coût pour la Nation.

Le projet de loi propose ainsi la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante.

Le principe de ce fonds est justifié. D'abord pour des raisons pratiques : la plupart des entreprises ayant exposé leurs salariés aux risques de l'amiante ont aujourd'hui disparu. Mais aussi pour des raisons de solidarité nationale : l'ensemble de la Nation a été aveuglé par l'amiante et ses atouts techniques, sans avoir conscience de ses conséquences mortelles sur la santé de ceux qui étaient exposés. Les drames ne relèvent pas toujours de fautes ou de négligences, parfois seulement d'une myopie et d'un défaut de connaissance collectifs. Il est alors normal que la prise en charge soit, elle aussi, collective.

L'article 42 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, modifié par l'Assemblée nationale, prévoit trois catégories de bénéficiaires (estimés à 100.000 personnes) :

• les personnes ayant obtenu la reconnaissance d'une maladie professionnelle liée à l'amiante ;

• les personnes qui ont subi un préjudice résultant directement d'une exposition à l'amiante ;

• leurs ayants droits.

Le fonds constitue un nouvel établissement public à caractère administratif. Il a pour mission de réparer les préjudices des bénéficiaires. Le fonds procède à l'instruction des demandes et se substitue notamment aux indemnisations que la victime pourrait recevoir de la branche accidents du travail. Il a six mois pour répondre aux demandes et formuler une offre d'indemnisation, dont l'acceptation entraîne la renonciation à toute action en justice. En cas d'accord, le fonds pourra alors se retourner contre l'éventuel responsable.

Le fonds bénéficie de ressources en provenance du budget de l'Etat et de la branche accidents du travail, la première subvention étant fixée en loi de finances et la seconde en loi de financement, à partir du rapport d'activité du fonds. La subvention de l'Etat est justifiée par l'exposition professionnelle de certains de ses salariés, le retard pris dans l'édiction de normes et d'interdictions s'agissant de l'amiante, et aussi l'inclusion dans le champ du dispositif de la deuxième catégorie. Elle devrait être de 500 millions de francs en 2001, la subvention de la branche s'élevant quant à elle à 1,5 milliard de francs.

Votre rapporteur pour avis ne peut que s'interroger sur l'absence de coordination entre les lois de finances et de financement puisque le budget de l'Etat ne comporte pas, en l'état actuel de choses, la subvention pourtant promise par le gouvernement. Il ne faudrait pas que des charges indues de trésorerie pèsent sur la branche accidents du travail suite, par exemple, à l'introduction de la subvention simplement dans la loi de finances rectificative 2001 en décembre 2001. Il ne faudrait pas non plus que le gouvernement argue d'un excédent résiduel de la branche accidents du travail pour, au cours de l'année 2001, revenir sur ses engagements, comme il le fait pour le fonds sur les calamités agricoles par exemple.

2. Un dispositif financier encore flou

L'ensemble du dispositif d'indemnisation des victimes de l'amiante, qu'il s'agisse du nouveau fonds ou du mécanisme de cessation anticipée d'activité, semble en place. Il reviendra, dans l'avenir, au législateur et aux administrations d'en assurer le suivi et l'adaptation éventuelle.

Cependant, votre rapporteur pour avis souhaite attirer l'attention sur les conséquences financières de ces dispositifs pour la branche accidents du travail. Celle-ci doit désormais assurer l'équilibre de deux fonds aux dépenses inconnues, et pour lesquels la contribution de l'Etat, soit a été remplacée par une affectation de recettes, soit n'obéit à aucune règle. Il ne s'agit pas de prévoir des affectations de recettes supplémentaires mais d'établir des règles, ne serait-ce que pour évaluer les dépenses futures de la branche accidents du travail.

Il semble évident que la branche accidents du travail supportera un coût très élevé lié à l'amiante dans les années à venir, et il n'est pas sûr que les entreprises accepteront facilement de le financer le jour où, éventuellement, mais l'éventualité n'est pas à écarter, il se traduira par des hausses de cotisations sociales. Il est donc important et urgent de réfléchir à cette architecture financière prise dans son ensemble.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenue le mercredi 8 novembre 2000, sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis sur le projet de loi n° 64 (2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2001 , sur le rapport de M. Jacques Oudin, rapporteur général .

Après avoir rappelé qu'il s'agissait de la cinquième loi de financement, M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, procédant à l'aide d'une vidéo-projection, a indiqué qu'il devrait s'agir d'abord d'un rendez-vous annuel pour étudier au Parlement les différents comptes sociaux, ensuite d'un moment privilégié pour évaluer l'état des réformes entreprises, enfin d'une occasion de prendre un certain nombre de mesures d'ajustement aux conséquences financières lourdes pour la sécurité sociale. Il a cependant estimé que sur aucun de ces sujets, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 n'offrait de perspective satisfaisante.

Il a considéré que les comptes sont brouillés par des présentations trompeuses, que l'entrelacement des finances sociales et des finances de l'Etat fait perdre toute vision cohérente, que les politiques sociales ne sont qu'annoncées, que les seules réformes d'ampleur proposées, la recherche du financement des 35 heures et la réforme de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), n'ont pas leur place dans la loi de financement.

Il a alors présenté son avis en cinq temps : les comptes de la sécurité sociale pour 2000 et 2001, l'architecture globale du projet pour 2001, les deux principales mesures de recettes que sont les 35 heures et les baisses de CSG et de CRDS, l'état des dépenses de chaque branche, et quelques réflexions sur les lois de financement.

S'agissant des comptes, M. Jacques Oudin a rappelé l'importance de la protection sociale dans notre pays par quelques chiffres :

- les prestations sociales ont représenté 29 % du produit intérieur brut (PIB) en 1999 ;

- les recettes du projet de loi de financement 2001 s'élèveront à 1.972 milliards de francs et les dépenses à 1.933 milliards de francs ;

- l'Etat verse comme employeur 265 milliards de francs de cotisations, comme redistributeur 142 milliards de francs de minima sociaux, comme régulateur 30 milliards de francs de subventions d'équilibre ;

- la sécurité sociale recevra, en 2001, 560 milliards de francs de fiscalité affectée ;

- l'Etat va transférer près de 20 milliards de francs de nouvelles recettes fiscales vers la sécurité sociale auxquelles s'ajouteront les recettes affectées au fonds de réserve pour les retraites.

Il a expliqué que la sécurité sociale connaîtrait un excédent en 2001, compris entre 4 et 17,5 milliards de francs selon les conventions utilisées, la branche maladie étant la seule en déficit.

Il a nuancé cet excédent en exposant que l'apparence de l'équilibre cache un très fort dynamisme des recettes comme des dépenses : les recettes augmenteraient en effet de 4,1 % en 2001 après une hausse de 4,5 % en 2000; les dépenses quant à elles progresseraient de 4,3 % en 2000 et de 3,2 % en 2001 ; la branche maladie se distingue par son rythme le plus élevé de croissance des dépenses avec 5,6 % prévus en 2000, soit 1,4 point de plus que le PIB en valeur.

Il a alors illustré ses propos en indiquant que sur les 55,6 milliards de recettes supplémentaires attendues pour 2001 pour le régime général, 54,6 milliards iront financer des dépenses supplémentaires, dont 43,5 milliards résultent de l'évolution naturelle des comptes et 11,1 milliards de mesures nouvelles. Il a déploré que le contribuable social ne retrouve rien de ces fortes recettes.

Il a également montré la hausse croissante des prélèvements obligatoires sociaux, passés de 1997 à 2000, de 20,4 % du PIB à 21,3 %, rappelant ainsi que la tendance en matière de prélèvements sociaux se poursuit.

Enfin, il a nuancé l'autosatisfaction du Gouvernement sur l'équilibre comptable construit sur des conventions sujettes à variations, et sur les méthodes de calcul du solde du régime général : selon que l'on prenne ou non en compte les dépenses à venir occasionnées par la loi de financement, les versements au titre du fonds de réserve pour les retraites et la prise en charge totale par la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire ; selon que l'on raisonne en comptabilité de caisse ou en comptabilité d'exercice, les résultats varient de plusieurs milliards de francs. Le rapporteur pour avis a donc préféré parler de tendance favorable plutôt que de triompher sur un excédent. Il s'est interrogé aussi sur le contenu de cet excédent, le considérant comme le résultat des plus forts prélèvements sociaux que la France ait jamais connu, en partie en raison de la croissance économique, en partie à cause des hausses et créations successives de prélèvements en faveur de la sécurité sociale depuis 1997.

Il a déploré que le Gouvernement ne réussisse pas à maîtriser les dépenses. Il s'est inquiété de ce qu'il adviendrait des comptes, le jour où les prélèvements ne pourront plus grimper, où la croissance sera inférieure à son niveau actuel, où le poids des retraites augmentera, où la prise en charge de la dépendance sera devenue une obligation nationale, où il faudra financer les nouvelles techniques médicales. Il s'est demandé en quoi la croissance économique d'aujourd'hui a été mise à profit pour préparer l'avenir et a estimé que le Gouvernement portera la lourde responsabilité d'avoir laissé passer ce moment exceptionnel où des recettes supplémentaires permettaient des réformes.

Abordant l'architecture globale du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, M. Jacques Oudin a expliqué qu'il était construit de façon à priver le fonds de solidarité vieillesse (FSV) et la branche famille de leurs excédents pour, d'une part, faire financer de nouvelles charges, d'autre part tenter de boucler le financement des 35 heures.

Il a expliqué que, pour ce faire, le projet :

- donne au fonds de réforme des cotisations sociales (FOREC), destiné à financer les 35 heures, 22,4 milliards de francs de recettes supplémentaires, en provenance de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), de l'Etat et du FSV ;

- retire à la CNAMTS 6,5 milliards de francs de ressources transférées au FOREC et au FSV, mais lui en redonne 7 milliards en provenance du même FSV ;

- retire au FSV 7,4 milliards de francs de recettes, au profit de la CNAMTS et du FOREC ;

- retire 1,5 milliard de francs de recettes de la CNAF transférées au FSV et lui ajoute 2,9 milliards de francs de charges, auxquelles s'ajoutent 2,1 milliards de francs de perte de recettes de subvention de l'Etat pour la prise en charge de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire ;

- donne à la CNAMTS, la CNAF et le FSV, en provenance de l'Etat, 8 milliards de la taxe sur les conventions d'assurance pour compenser les pertes de CSG.

Au sujet des dépenses, il a exposé que le projet dégrade le solde du régime général de 14,3 milliards de francs de dépenses supplémentaires dont 1,7 milliard pour les accidents du travail, autant pour la vieillesse, et 9,7 milliards pour la famille.

Il a considéré que le projet de loi de financement faisait trois victimes :

- la branche famille, dont l'excédent tendanciel est confisqué par 6,5 milliards de francs de dépenses non compensées et de pertes de recettes ;

- le FSV, qui perd 7,4 milliards de francs de recettes et voit ses dépenses augmenter de 3,2 milliards, connaîtrait un déficit, alors qu'il est en excédent tendanciel ; ceci est d'ailleurs paradoxal puisque les excédents du FSV doivent aller au fonds de réserve pour les retraites ;

- la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) qui se verra privée de plus de 52 milliards de francs de recettes cumulées.

A propos des 35 heures, M. Jacques Oudin a estimé que le projet de loi propose une fois de plus une véritable " usine à gaz " pour courir après le financement des 35 heures. Il a déploré qu'un an après sa création le FOREC n'existe toujours pas faute de décrets d'application.

Il a noté que, comme il l'avait annoncé l'année dernière, les 35 heures auront coûté plus cher que prévu en 2000 et qu'en 2001 les dépenses augmenteront de 18 milliards de francs. Il a dit sa stupéfaction de voir que cette hausse de 27 % des dépenses ne sera adoptée nulle part par le Parlement, le FOREC n'étant plus dans le cadre du budget de l'Etat et ses dépenses n'entrant pas dans la définition des agrégats de dépenses de la loi de financement.

Il a ensuite détaillé les six recettes fiscales du fonds et annoncé que, convaincu que le rapport avantages/inconvénients penche en faveur des seconds, il proposerait de supprimer les articles 10 et 11 qui organisent les transferts de l'Etat vers le FOREC.

Abordant la question des mesures relatives à la CSG et à la CRDS, M. Jacques Oudin a expliqué qu'elles consistent en l'exonération progressive de CSG et de CRDS en dessous de 1,4 SMIC pour les actifs et l'exonération totale de CRDS pour les retraités non imposables et les chômeurs gagnant moins d'un SMIC. Il a évalué leur coût à 28 milliards de francs en 2003.

Pour la CRDS, il a d'abord constaté que c'est la première fois que le Gouvernement altère les ressources de la CADES sans en prolonger le terme. Il a expliqué que cela revenait à prolonger de facto de deux ans la durée de vie de la CRDS et donc à substituer à la CRDS actuelle celle que paieront en 2012 et 2013 l'ensemble des contribuables. Il lui a donc semblé abusif de parler de baisse des prélèvements alors qu'il s'agit seulement d'un report de prélèvements. Il a aussi condamné une mesure revenant à priver la CADES de plus de 52 milliards de francs de recettes, sans compenser cette baisse, alors qu'un moyen existait en diminuant à due concurrence les 12,5 milliards de francs que l'Etat reçoit chaque année de la CADES. Enfin, il a regretté la méthode choisie qui revient à fragiliser la crédibilité de la CADES sur les marchés financiers, et a donc conclu en proposant de supprimer ces mesures.

S'agissant de la ristourne de la CSG, il a fait part de nombreuses critiques :

- la mesure est complexe, oblige à affecter de nouvelles recettes fiscales à la sécurité sociale pour compenser les pertes, et ajoute un nouveau seuil de 1,4 SMIC, alors que celui des 35 heures est de 1,8 SMIC ;

- la mesure est dangereuse dans ses principes mêmes, car elle risque de se transformer en " trappe à pauvreté " en maintenant les salariés autour du SMIC, elle remet en cause le concept de CSG bâtie comme une imposition proportionnelle à fort rendement, et donc fragilise le financement des comptes sociaux ; elle aura aussi pour conséquence que des millions de salariés ne cotiseront plus à l'assurance maladie puisque la CSG s'est substituée aux cotisations sociales maladie, ce qui ouvre la voie à une fiscalisation de la sécurité sociale ;

- la mesure apparaît particulièrement injuste puisqu'un ménage composé de deux actifs gagnant chacun un SMIC bénéficiera d'une aide, alors qu'un ménage où un seul actif travaille et gagne 1,4 SMIC n'aura rien, qu'un actif payé 1,4 SMIC n'aura rien ; qu' un actif occupant deux emplois payés chacun 0,7 SMIC percevra 9.072 francs ; et qu'un célibataire payé au SMIC bénéficiera de 6.480 francs quand une famille de deux enfants gagnant aussi le SMIC ne percevra, par unité de consommation, que 3.085 francs.

C'est pourquoi le rapporteur pour avis a proposé, en accord avec la commission des affaires sociales, de supprimer le dispositif du Gouvernement, indiquant que le rapporteur général présenterait, dans le projet de loi de finances, un dispositif restant dans le cadre du budget de l'Etat, s'appuyant sur un crédit d'impôt sur le revenu remboursable, fonction du revenu et dégressif jusqu'à 1,8 SMIC, prenant en compte les charges de famille, supprimant les principales injustices du dispositif gouvernemental.

Ne développant pas la question des dépenses des branches, il a insisté sur quatre points :

- sur l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie (ONDAM), encore rebasé et qui devrait augmenter de 3,5 % par rapport aux prévisions de réalisation 2000, il a regretté que le projet passe l'éponge sur 13 milliards de francs de dépassement. Il a constaté qu'en cinq ans, l'ONDAM a augmenté de 100 milliards de francs, sans que le Parlement ne débatte d'orientations pour affecter ces sommes, sans que les Français aient été consultés ;

- sur les hôpitaux, il a constaté qu'ils bénéficient de nombreuses mesures de hausse de leur enveloppe, de fonds de restructuration - alors que les précédents fonds n'avaient pas été épuisés - de personnel supplémentaire, sans que rien ne soit fait ni pour réduire les inégalités de dotations entre régions, ni pour favoriser de nouveaux modes de gestion de l'hôpital. Il a rappelé que dans le même temps, les cliniques privées traversent une situation critique : il leur manque 6.000 infirmières et sont confrontées au coût des 35 heures alors que leur rentabilité est déjà nulle ;

- sur les accidents du travail, il s'est félicité que le projet de loi de financement règle une question délicate de santé publique et de solidarité nationale, avec la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, doté en 2001 de 2 milliards de francs dont 500 millions de subventions de l'Etat, qui ne semblent d'ailleurs pas inscrits à son budget. Il a attiré l'attention sur les coûts futurs de ce fonds et sur les éventuelles hausses des cotisations sociales d'accidents du travail qui pourraient en résulter ;

- sur les retraites, il a critiqué l'absence totale d'action du Gouvernement. Il a rappelé que le fonds de réserve est toujours, deux ans après sa création, dans l'attente d'une définition claire de ses missions, de ses ressources, de ses futures dépenses, de ses modes de gestion et de placement. Il s'est interrogé sur la cohérence du projet de loi de financement qui ponctionne 10 milliards de francs par an sur le FSV, privant d'autant de recettes le fonds de réserve.

S'agissant de l'outil des lois de financement, à la lumière de l'expérience des années écoulées, il a fait part de ses préoccupations.

Il a constaté encore la complexité des liens avec la loi de finances et s'est interrogé sur la meilleure façon de parler d'une même voix, de mener une politique de finances publiques cohérente, d'examiner l'ensemble des prélèvements obligatoires quand il faut jongler d'un texte à un autre sans pouvoir établir de comparaison. Il a estimé que cette situation posait un vrai problème de cohérence du travail, gouvernemental comme parlementaire, et empêchait d'avoir une vision globale des finances publiques.

Il a ensuite regretté les débudgétisations. Rappelant que l'Etat débudgétise largua manu vers le champ de la protection sociale par le biais de fonds spécifiques comme le FOREC, le FSV, le fonds de réserve pour les retraites et le fonds de financement de la couverture maladie universelle (CMU), il a expliqué que si le Parlement était certes consulté sur les recettes de ces fonds, il n'en connaissait jamais les dépenses. Il a renvoyé ce problème à la réflexion sur l'ordonnance organique.

Il s'est aussi interrogé sur l'utilité de l'ONDAM. Il s'est demandé pourquoi le Parlement s'escrime à voter un objectif qui n'aura été respecté qu'en 1997 et qui aura été dépassé de 35 milliards de francs en quatre ans.

Enfin, il a proposé de revoir la structure même des lois de financement : sans article d'équilibre, même prévisionnel, comment identifier recettes et dépenses, comment s'accorder sur un solde, comment discuter de son affectation. Il a rappelé par exemple que faute de loi de financement rectificative, il n'y aura pas eu de débat sur les surplus de recettes pour 2000 et sur leur affectation.

En conclusion, M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis , a invité la commission à émettre un avis négatif sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale, s'en remettant aux travaux de la commission des affaires sociales.

Au cours de la discussion engagée après la présentation de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, M. Alain Lambert, président , a d'abord tenu à souligner qu'il avait particulièrement apprécié la mise en perspective pluriannuelle que le rapporteur pour avis avait faite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

M. Philippe Adnot a ensuite souhaité interroger le rapporteur pour avis quant à la situation financière de la CADES. Il a en effet rappelé que le déficit de la CADES s'élevait à 100 milliards de francs. La dette sociale représente aujourd'hui 209 milliards de francs et le remboursement s'élève à 110 milliards de francs, soit un manque de 100 milliards de francs. Il s'est donc inquiété de la situation dans laquelle se trouve aujourd'hui la CADES et en a conclu qu'il était impossible de parvenir à un remboursement total en 2014 comme cela est prévu par les textes. M. Philippe Adnot a enfin rappelé que depuis deux ans la capacité de remboursement de la CADES avait diminué.

M. Alain Lambert, président , a ensuite demandé à M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, quelle avait été l'utilisation faite des 100 milliards de francs de dépenses maladie supplémentaires depuis cinq ans, c'est-à-dire depuis la première loi de financement de la sécurité sociale.

M. Jacques Oudin rapporteur pour avis , a précisé à M. Alain Lambert, président, que personne ne savait vraiment à quoi avaient servi ces 100 milliards de francs de dépenses d'assurance-maladie supplémentaires. Il a également émis l'idée de demander le concours de la Cour des comptes pour éclaircir cette question. Il a simplement rappelé que l'hôpital public avait bénéficié cette année de la mise en place d'un plan triennal de 10 milliards de francs, que les dépenses de médecine de ville avaient également considérablement augmenté, tandis que les cliniques privées demeuraient les parents pauvres de l'assurance-maladie, notamment en termes de rémunération de leur personnel infirmier.

S'agissant de la CADES, M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis , a indiqué à M. Philippe Adnot que cette question méritait d'être étudiée et a précisé que la situation de la CADES serait largement abordée dans le corps de son rapport.

La commission a par la suite examiné et adopté à l'unanimité l'ensemble des amendements de suppression proposés par M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis :

- sur l' article 2 (réduction de la CSG et de la CRDS sur les revenus d'activité) ;

- sur l' article 4 (compensation de la réduction de la CSG) ;

- sur l' article 10 (dépenses du FOREC) ;

- sur l' article 11 (recettes du FOREC) ;

- sur l' article 12 (modification des règles d'affectation de la CSG) ;

- sur l' article 19 A (abrogation de la loi Thomas) ;

- sur l' article 25 , alinéa 5 (alimentation du fonds de réserve pour les retraites).

La commission à alors émis un avis négatif sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale.

ANNEXE 1 :

LISTE DES SIGLES UTILISÉS

AAH

Allocation d'adulte handicapé

AFEAMA

Aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée

AGED

Allocation de garde d'enfant à domicile

AGIRC

Association générale des institutions de retraite des cadres

ALF

Allocation de logement familial

ALS

Allocation de logement à caractère social

AMM

Autorisation de mise sur le marché

ANAES

Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé

AP-HP

Assistance publique - Hôpitaux de Paris

APE

Allocation parentale d'éducation

APL

Aide personnalisée au logement

APUL

Administrations publiques locales

ARH

Agence régionale d'hospitalisation

ARRCO

Association des régimes de retraite complémentaires

ARS

Allocation de rentrée scolaire

ASSO

Administrations de sécurité sociale

AT

Accidents du travail

BAPSA

Budget autonome des prestations sociales agricoles

BMAF

Base mensuelle des allocations familiales

C3S

Contribution sociale de solidarité sur les sociétés

CADES

Caisse d'amortissement de la dette sociale

CANAM

Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs non salariés

CANCAVA

Caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse des artisans

CASS

Caisse autonome de sécurité sociale des mines

CCSS

Commission des comptes de la sécurité sociale

CDAG

Centre de dépistage anonyme et gratuit

CDC

Caisse des dépôts et consignations

CDEF

Centre de planification ou d'éducation familiale

CGI

Code général des impôts

CMU

Couverture maladie universelle

CNAF

Caisse nationale d'allocations familiales

CNAMTS

Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés

CNAMTS/AT

Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés/accidents du travail

CNAVPL

Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales

CNAVTS

Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés

CNRACL

Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales

CPAM

Caisse primaire d'assurance maladie

CRAM

Caisse régionale d'assurance maladie

CRDS

Contribution au remboursement de la dette sociale

CSB

Cotisation sociale sur les bénéfices

CSG

Contribution sociale généralisée

DOM

Département d'outre-mer

DREES

Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques

FASMO

Fonds d'accompagnement social pour la modernisation hospitalière

FAAS

Fonds additionnel d'action social

FASTIF

Fonds d'action sociale des travailleurs immigrés et de leurs familles

FIEHP

Fédération intersyndicale des établissements d'hospitalisation privée

FIMHO

Fonds d'investissement pour la modernisation hospitalière

FNAL

Fonds national d'aide au logement

FNE

Fonds national pour l'emploi

FNH

Fonds national de l'habitation

FOREC

Fonds de réforme des cotisations sociales

FSV

Fonds de solidarité vieillesse

FSPOEIE

Fonds spécial de pension des ouvriers des établissements industriels de l'Etat

GERS

Groupement d'étude pour la réalisation statistique

INI

Institut national des Invalides

INSEE

Institut national de la statistique et des études économiques

MARS

Majoration de l'allocation de rentrée scolaire

MIRCOSS

Mission interministérielle de réforme de la comptabilité des organismes de sécurité sociale

MSA

Mutualité sociale agricole

OCDE

Organisation pour la coopération et le développement économiques

ODAC

Organismes divers d'administration centrale

ONDAM

Objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie

OQN

Objectif quantifié national

OQR

Objectif quantifié régional

ORGANIC

Caisse de compensation de l'organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce

PIB

Produit intérieur brut

PLF

Projet de loi de finances

PLFSS

Projet de loi de financement de la sécurité sociale

RDB

Revenu disponible brut

RMI

Revenu minimum d'insertion

SMIC

Salaire minimum interprofessionnel de croissance

SMR

Service médical rendu

SSA

Service de santé des armées

TGAP

Taxe générale sur les activités polluantes

TIPS

Tarif interministériel des prestations sanitaires

TVA

Taxe sur la valeur ajoutée

UNEDIC

Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce

URSSAF

Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales

ANNEXE 2 :

TABLE DE CONCORDANCE DES ARTICLES

Numéros d'articles

Page

1 er

28

2 A (nouveau)

84

2

84

3

107

3 bis (nouveau)

84

3 ter (nouveau)

84

4

84

4 bis (nouveau)

49

5

123

5 bis (nouveau)

123

6

124

7

49

8

65

9

65

10

65

11

65

12

19

13

149

14

144

15

143

16

143

17

151

18

147

19 A (nouveau)

215

19

204

19 bis (nouveau)

208

20

206

21

207

22

114

23

114

24

114

25

196

26

210

27

210

28

164

29

166

Numéros d'articles

Page

31

169

31 bis (nouveau)

159

32

179

33

173

34

178

35

176

36

167

36 bis (nouveau)

49

37

166

38

192

39

194

40

188

41

190

41 bis (nouveau)

192

41 ter (nouveau)

171

41 quater (nouveau)

187

42

218

43

14

44

50

45

126

46

128

46 bis (nouveau)

128

47

129

ANNEXE 3 :

QUESTIONS RESTÉES SANS RÉPONSE

1. Caisse d'amortissement de la dette sociale

a) Présenter les missions et l'organisation de la CADES. Préciser les moyens humains et budgétaires affectés à son fonctionnement.

b) Retracer chacune des opérations d'emprunt lancées par la CADES depuis sa création, en précisant notamment ses modalités techniques et ses conditions financières. Programme d'emprunts pour 2000 et 2001.

c) Fournir le tableau d'amortissement de la dette de la CADES.

2. Individualisation de la trésorerie des branches

a) Présenter les comptes de gestion individualisée de trésorerie des branches en 1999 et pour 2000.

b) Présenter l'évolution de la trésorerie de l'ACOSS et retracer l'utilisation des avances de trésorerie de la Caisse des dépôts.

3. Frais de gestion administrative

Etablir un bilan des rémunérations versées par l'Etat et reçues par lui pour des organismes de Sécurité sociale.

4. Rationalisation du réseau des caisses

a) Présenter l'organisation et les missions des unions régionales des caisses d'assurance maladie créées par l'ordonnance n°96-344 du 24 avril 1996 portant mesures relatives à l'organisation de la sécurité sociale, en fournissant les textes d'application. Pour chaque région, indiquer la date de leur mise en place. Préciser les implications en termes de personnel et de budget des caisses.

b) Présenter l'organisation et les missions des caisses pivots et des unions ou fédérations de caisses créées par l'ordonnance n°96-344 du 24 avril 1996 portant mesures relatives à l'organisation de la sécurité sociale, en fournissant les textes d'application. Indiquer les applications concrètes de ces dispositions d'amélioration du réseau des caisses locales.

5. Remboursement

Etablir un bilan des taux de remboursement moyen depuis 10 ans en France et en Europe. Y indiquer la part des organismes complémentaires

III. ASSURANCE MALADIE

6. Comptes de la santé

Fournir les derniers comptes de la santé.

7. Objectif national des dépenses d'assurance maladie

a) Définir les différentes catégories de dépenses de santé inclues dans le champ de l'ONDAM. Préciser et justifier les exclusions.

b) Retracer l'évolution par secteur des dépenses constituant l'ONDAM en 1997, 1998 et 1999. Perspectives pour 2000.

c) Présenter les différents mécanismes par lesquels l'ONDAM est décliné sectoriellement et localement en sous objectifs. Le cas échéant, commenter l'écart entre l'ONDAM et ses sous objectifs et les réalisations prévisibles en 1999.

8. Objectif de dépenses délégué

a) Fournir les rapports rendus par la CNAMTS sur les négociations relatives à l'ODD.

b) Indiquer l'objectif délégué (par profession) et les résultats précis pour 2000. Perspectives 2001.

9. Couverture maladie universelle

a) Evaluer les conséquences de la mise en place de la couverture maladie universelle sur les frais de gestion des caisses ; quel personnel est affecté à la mise en place ?

b) Indiquer quels accords ont été signés avec les organismes complémentaires de protection sociale pour la mise en place de la couverture maladie universelle.

c) Indiquer quels accords ont été signés avec les professionnels de santé pour la limitation des prix pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle.

d) Indiquer le nombre de bénéficiaires de la CMU de base, de la CMU complémentaire.

e) Fournir le budget du fonds de financement de la CMU pour 2000. Perspectives 2001.

10. Versement au titre des maladies professionnelles

a) Evolution sur la période récente des maladies professionnelles reconnues et des dépenses afférentes pour les branches maladies et accidents du travail.

b) Indiquer le montant effectif des versements de la branche accidents du travail à la branche maladie en 1999 et 2000. Préciser leurs modalités de calcul et leurs conséquences sur le niveau des cotisations. Communiquer l'avis de la commission prévue par l'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.

c) Indiquer le budget du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le nombre de dossiers reçus/acceptés, les allocations déjà servies et les perspectives.

11. Démographie médicale

a) Etablir une note sur la situation actuelle de la démographique médicale et ses perspectives à l'horizon 2000-2015. Evaluer notamment les effets prévisibles du numerus clausus.

b) Fournir des cartes et des tableaux présentant pour chaque département et pour chaque région :

- le nombre de médecins libéraux installés, en distinguant les omnipraticiens des spécialistes ;

- le nombre de médecins libéraux rapporté à la population ;

- le nombre de médecins abonnés à un réseau de santé ;

Préciser les mesures envisagées pour corriger les disparités régionales constatées.

12. Revenus des professions de santé

a) Indiquer le revenu annuel moyen de chacune des professions de santé au cours des cinq dernières années.

b) Pour les médecins, fournir toutes les informations disponibles sur la dispersion de leurs revenus annuels en fonctions de leur spécialité, de leur cadre d'activité (hospitalière ou libérale, secteur I ou secteur II), de leur implantation géographique, et leur situation de carrière.

13. Réseaux de soins

Note sur l'activité de la commission présidée par Raymond Soubie.

14. Formation des médecins et adaptation de l'offre de soins

a) Etablir un bilan quantitatif et qualitatif de la formation continue des médecins au cours des trois dernières années, en précisant ses coûts et ses modes de financement. Evaluer les implications de la nouvelle obligation de formation continue posée par l'ordonnance n°96-345 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins.

b) Etablir un bilan quantitatif et qualitatif du mécanisme d'incitation à la cessation anticipée d'activité des médecins au cours des trois dernières années, en précisant ses coûts et ses modes de financement. Evaluer l'impact et le coût des modifications apportées par l'ordonnance n°96-345 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins.

c) Fournir les comptes et préciser l'utilisation du fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale en 1999 et 2000. Prévisions pour 2001.

15. Informatisation du système de soins

a) Indiquer l'état d'avancement de l'informatisation de l'assurance maladie. Récapituler le coût du programme Sesam-Vitale depuis son origine. Evaluer ses coûts prévisionnel d'équipement et de fonctionnement dans sa forme définitive, ainsi que les économies de gestion afférentes. Indiquer le nombre d'utilisateurs et les sommes en jeu.

b) Indiquer l'état d'avancement de l'informatisation des établissements hospitaliers. Evaluer les coûts d'équipement et de fonctionnement des systèmes informatiques en 1998, 1999 et 2000.

c) Indiquer l'état d'avancement de l'information des médecins et les incitations mises en place. Indiquer le taux de télétransmission par département.

16. Médicament

a) Rappeler les missions du Comité économique du médicament et des produits de santé. Dresser un bilan de ses activités.

b) Présenter les dispositions prises en faveur du développement des médicaments génériques. Etablir un premier bilan et notamment sur le droit de substitution.

c) Retracer l'évolution depuis cinq ans du produit des impôts et taxes assis sur le secteur pharmaceutique (taxe sur les dépenses de promotion des laboratoires pharmaceutiques, contribution des grossistes-répartiteurs, contribution sur les ventes directes de médicaments contribution exceptionnelle des laboratoires pharmaceutiques).

d) Définir le service médical rendu et faire le point sur le réexamen des médicaments au regard du SMR.

e) Faire un bilan des conséquences de l'arrêt des vaccinations obligatoires hépatite A sur l'ensemble du marché des vaccins.

f) Fournir les statistiques de la consommation de médicaments à l'hôpital.

g) Fournir depuis 10 ans les statistiques d'assiette et de rendement de la taxe parafiscale perçue par l'AFSSAPS.

17. Redéploiement des capacités hospitalières

a) Dresser un tableau présentant, dans chaque région, pour les secteurs hospitaliers public et privé :

- les besoins théoriques en lits de court, moyen et long séjour tels qu'ils sont déterminés par la carte sanitaire ;

- le nombre de lits effectivement autorisés et installés pour chacune des catégories susmentionnées.

Etat d'avancement de la révision du découpage sectoriel de la carte sanitaire. Indiquer les mesures envisagées à moyen terme pour réduire et redéployer les capacités excédentaires de lits hospitaliers.

b) Présenter synthétiquement les schémas régionaux d'organisation sanitaire adoptés. Préciser le champ territorial et la date d'adoption de chacun des SROS.

c) Indiquer les instructions données par la tutelle aux directeurs d'ARH en matière de restructurations hospitalières.

d) Indiquer les grandes orientations pour le secteur psychiatrique. Préciser les évolutions souhaitables et celles déjà enregistrées.

e) Indiquer l'état des lieux de l'évaluation conduite par l'ANAES. Indiquer également les moyens humains et financiers dont dispose l'ANAES.

18. Programme de médicalisation du système d'information

a) Dresser un tableau présentant, pour le secteur hospitalier public et le secteur hospitalier privé, le nombre d'établissements participant en 2000 à la mise en oeuvre du PMSI ;

b) Dresser un tableau retraçant, pour 1999 et 2000, l'évolution des crédits budgétaires et des concours de la CNAMTS destinés à financer la mise en oeuvre du PMSI ;

c) Fournir les premiers résultats synthétiques du PMSI. Evaluer les implications d'une allocation systématique des dotations budgétaires en fonction du PMSI.

d) Que penser des comparaisons de coût du point ISA entre les secteurs hospitaliers public et privé ? Indiquer les résultats du PMSI pour les cliniques privées par région.

19. Personnels du secteur hospitalier

a) Dresser un tableau présentant, par catégorie de personnel hospitalier, les effectifs employés dans le secteur hospitalier public et le secteur hospitalier privé. Indiquer, par catégorie d'hôpitaux publics (CHU, CHR, etc...) et de personnel médical, les déficits de postes estimés dans chaque département et dans chaque région.

b) Fournir la grille de rémunération de base du personnel hospitalier du secteur public. Comparer avec les rémunérations moyennes dans le secteur hospitalier privé.

c) Présenter les mesures sociales prises afin d'accompagner le redéploiement des personnels résultant de l'évolution des structures hospitalières. Retracer les recettes et les dépenses du fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé, créé par l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.

d) Etablir un premier bilan du plan annoncé par le Gouvernement pour le personnel hospitalier public.

e) Etablir un bilan de l'application des 35 heures dans le secteur hospitalier public et dans le passé, en indiquant notamment le coût de la mesure.

f) Indiquer le nombre de directeurs d'hôpitaux en disponibilité et en détachement, ainsi que les organismes d'accueil.

20. Politique d'équipement hospitalier

a) Dresser un tableau présentant pour chaque région :

- le niveau atteint en matière d'équipements biomédicaux (scanners, appareils de radiothérapie, résonance magnétique nucléaire, lithotripteurs, etc...) dans le secteur hospitalier public et le secteur hospitalier privé ;

- le nombre d'examens effectués à l'aide de ces appareils.

Indiquer les mesures prises ou envisagées pour corriger les disparités éventuellement constatées entre les différents départements.

b) Présenter les informations disponibles, de sources officielles et fiables, permettant de comparer l'équipement de la France en matériels biomédicaux par rapport aux autres pays de la C.E.E. Commenter les différences ainsi mises en évidence.

c) Faire le point sur le développement des conventions entre hôpitaux publics et établissements sanitaires privés pour l'utilisation commune des équipements biomédicaux.

21. Dépenses et coûts d'hospitalisation

a) Dresser un tableau présentant, pour chaque département et pour chaque région, le volume d'activité et le coût de fonctionnement des établissements hospitaliers sous budget global. Commenter.

b) Fournir un tableau présentant, pour chaque département et pour chaque région, le volume d'activité et le coût de fonctionnement des établissements hospitaliers privés. Commenter.

c) Fournir un tableau retraçant l'évolution, en valeurs absolues et en pourcentage annuel d'augmentation, des dépenses du secteur hospitalier public et privé au cours des dix dernières années. Commenter les évolutions ainsi mises en évidence.

d) Présenter et commenter l'évolution de la dotation globale nette, tous régimes, tous risques, depuis 1983.

e) Faire le bilan des transferts des malades de l'hospitalisation publique vers l'hospitalisation privée.

22. Agences régionales de l'hospitalisation

Récapituler, pour chaque agence régionale, les conventions signées avec les établissements hospitaliers et les autorisations qui leur sont accordées.

23. Assistance publique - Hopitaux de Paris

Présenter le budget, le nombre d'établissements, de lits, de personnels (dont médecins) dont dispose l'APHP.

24. Personnel

Indiquer le nombre de personnels des régimes de protection sociale obligatoires en situation de détachement et de disponibilité, les organismes d'accueil et les sommes correspondantes à ces situations.

25. Cures thermales

Indiquer le montant des remboursements de la CNAMTS aux curistes, le nombre de personnes prises en charge, le montant des frais de transport et indemnités journalières versées. Faire le point sur la question de l'entente préalable.

26. Protection complémentaire

Combien d'organismes complémentaires ont mis en place un produit destiné aux bénéficiaires de la CMU.

IV. VIEILLESSE

27. Régimes de retraite

a) Présenter les orientations du Gouvernement à l'égard des mécanismes d'épargne retraite. Indiquer les points sur lesquels la loi n°97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite pourrait être modifiée.

b) Faire le point sur la dette de l'Etat à l'égard de la l'AGIRC et de l'ARRCO.

28. Evolution des transferts de compensation vieillesse

Retracer l'évolution sur les cinq dernières années des transferts de compensation vieillesse. Pour chacun d'entre eux, préciser sa base légale et réglementaire et, le cas échéant, indiquer les modifications intervenues dans ses modalités de calcul.

29. Risque dépendance

a) Fournir une prévision de l'évolution du nombre de personnes âgées dépendantes, en précisant la méthode retenue. Evaluer les capacités d'accueil et de services à domicile nécessaires pour faire face à cette évolution prévisible.

b) Dresser un tableau présentant, pour chaque département :

- le nombre de personnes âgées de plus de 75 ans et de plus de 85 ans évalué en valeur absolue et en pourcentage de la population totale ;

- le pourcentage de personnes âgées de plus de 75 ans ayant perdu leur autonomie.

c) Présenter et commenter les résultats de la loi 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance.

d) Présenter la réforme de la tarification des établissements accueillant des personnes âgées dépendantes. Evaluer le coût pour l'assurance maladie d'une mise à niveau des forfaits soins et du financement des sections de cure médicale.

V. FAMILLE

30. Conférence de la famille

Indiquer les mesures (et leur coût) prises à l'issue de la conférence de la famille.

31. Caisse nationale des allocations familiales

Indiquer le nombre de bénéficiaires, le nombre d'enfants par famille, les montants versés.

Faire le bilan de l'ensemble des prestations familiales versées par la Caisse nationale des allocations familiales, ainsi que de l'allocation de rentrée scolaire, en indiquant pour cette dernière le mode de financement et ses perspectives.

Réunie le 8 novembre 2000, sous la présidence de Monsieur Alain Lambert, président, la commission des finances a procédé à l'examen de l'avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté par l'Assemblée nationale, sur le rapport de Monsieur Jacques Oudin, rapporteur pour avis.

La commission des finances a décidé d'émettre un avis négatif sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

Puis elle a adopté sept amendements de suppression des articles 2 (réduction de la CSG et de la CRDS sur les revenus d'activité),
4 (compensation de la réduction de la CSG), 10 (dépenses du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC)), 11 (recettes du FOREC), 12 (modification des règles d'affectation de la CSG), 19 A (abrogation de la loi Thomas), et du 5° de l'article 25 (alimentation du fonds de réserve pour les retraites).

* 1 Source :annexe a au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

* 2 Où les flèches en gras représentent des compensations, les flèches fines des transferts de recettes et les flèches en pointillé gras des subventions.

* 3 Op. cit. Avant-propos.

* 4 Sans parler des décrets d'application du FOREC, prévus à l'article 5 et pas encore parus (cf. infra).

* 5 Application de la loi de financement de la sécurité sociale : un bilan à mi-parcours , rapport au nom de la commission des affaires sociales du Sénat, n° 356 (1999-2000).

* 6 Voir le rapport de M. Alain Lambert, président de la commission des finances, sur la réforme de l'ordonnance organique (n° 37, 2000-2001).

* 7 Décision n° 98-406 DC du 29 décembre 1998 ( Journal officiel du 31 décembre 1998).

* 8 Ces mesures sont détaillées dans le présent avis.

* 9 L'exonération de CRDS n'étant, quant à elle, pas compensée.

* 10 De ce point de vue, votre rapporteur pour avis salue l'avancée que représente le nouveau " jaune " budgétaire " Bilan des relations financières entre l'Etat et la protection sociale " , distribué assez tôt pour permettre de mieux apprécier l'articulation des deux textes.

* 11 Assemblée nationale, rapport n° 2387, pages 50 et 51, XIème législature.

* 12 Les 3,2 % restants sont répartis de la façon suivante : 2,81 % sont affectés à la CNAMTS, et 0,39 % sont affectés au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

* 13 Les 45 % restants demeurent affectés à la CNAMTS. Les présentes dispositions sont également sans incidence sur les prélèvements sur le produit de ce droit spécifiques aux départements corses et au BAPSA.

* 14 Assemblée nationale, XIème législature, rapport n° 2633, page 51.

* 15 Assemblée nationale, XIème législature, avis n° 2631, page 41.

* 16 Cette mesure serait prévue par le prochain projet de loi de finances rectificative.

* 17 L'essentiel du produit de cette taxe affecté à la sécurité sociale bénéficiera à la CNAMTS, à la CNAF et au FSV, au titre de la compensation intégrale par l'Etat de la perte de recettes résultant de la ristourne de CSG sur les bas salaires.

* 18 Rapport n° 356, 1999-2000.

* 19 Au cours de sa dernière audition devant votre commission, le gouverneur de la Banque de France, M. Jean-Claude Trichet, a rappelé que 51 % des entreprises éprouvaient des difficultés à recruter, alors qu'elles n'étaient que 20 % un an auparavant.

* 20 Article " La politique économique de l'emploi ", paru dans le quotidien Libération du 16 octobre 2000.

* 21 Cité par le XVIIIème rapport du Conseil des impôts au Président de la République, L'impôt sur le revenu , juin 2000, page 13.

* 22 Dossier de presse du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le 31 août 2000.

* 23 Propos de Mme Elisabeth Guigou, le 25 octobre 2000, Journal officiel des débats , Assemblée nationale, 3 ème séance, page 7503, 1 ère colonne.

* 24 Rapport pour avis de M. Jérôme Cahuzac, n° 2361 (XIème législature), page 27.

* 25 Espace social européen, numéro du 3 novembre 2000.

* 26 INSEE première , " Les travailleurs pauvres ", octobre 2000.

* 27 Défini comme les personnes dont le niveau de vie est inférieur à la moitié du niveau de vie médian de la population et donc à environ 3.500 francs par unité de consommation.

* 28 Interview au quotidien Les Echos , 27-28 octobre 2000.

* 29 XIVème rapport au Président de la République, octobre 1995, page 11.

* 30 Op. cit. page 12.

* 31 Op. cit. page 30.

* 32 Diverses propositions ont été récemment formulées pour accorder un minimum d'abattement de 500 F ou 1 000 F par mois, qui représenterait plus que la réfaction de 5 % du salaire au titre des frais professionnels lorsque celui-ci est peu élevé (5 % du SMIC correspond à 344 F). Cette mesure est présentée comme une façon de rendre plus attractif le retour à l'emploi.

* 33 Journal officiel des débats , Assemblée nationale, 3 ème séance du 25 octobre 2000, page 7507, 2 ème colonne.

* 34 Journal officiel des débats , Assemblée nationale, 3 ème séance du 25 octobre 2000, page 7508, 2 ème colonne.

* 35 Proposition de loi n° 317 (1999-2000) déposée par les sénateurs Alain Lambert et Philippe Marini.

* 36 Op. cit., page 169.

* 37 Voir le rapport de M. Jacques Barrot au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Article 40 de la Constitution , n° 1273 (Xème législature), pages 79 à 81.

* 38 Eric Pichet, " La CRDS et la CADES sont-elles mortelles ? ", in Connaissance et action , n° 11, septembre 2000.

* 39 Voir le rapport de MM. Alain Lambert et Philippe Marini, au nom de la commission des finances du Sénat, dotée des pouvoirs de commission d'enquête, En finir avec le mensonge budgétaire , n° 485 (1999-2000).

* 40 La seconde section, le fonds de réserve pour les retraites est abordée dans le chapitre relatif à la vieillesse.

* 41 Ces chiffres correspondent à des données s'appliquant à la métropole.

* 42 Votre rapporteur pour avis s'étonne d'ailleurs de constater que cette recette continue à apparaître dans le compte de la branche famille pour 2001 présenté par la commission des comptes de la sécurité sociale en septembre 2000 (Rapport de la CCSS, Tome 2, p. 266). Il s'agit une fois de plus d'une sélection totalement arbitraire faite par la Commission dans la prise en compte de ses hypothèses comptables.

* 43 Audition de M. Jean-Luc Cazettes, président du conseil d'administration de la CNAVTS devant la commission des affaires sociales du Sénat, le 24 octobre 2000.

* 44 Source : étude de la Caisse des dépôts et consignations.

* 45 Cf. projet de loi sur l'épargne salariale, articles 6 ter et 7.

* 46 Le budget supportera probablement aussi une charge fiscale liée au traitement comptable des sommes déboursées pour cette acquisition par les opérateurs.

* 47 Exposé des motifs du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001.

* 48 Proposition de loi n° 222 (1992-1993) de MM. Philippe Marini, Jacques Bimbenet, Maurice Blin, Jean Chérioux, Jean Clouet, André Fosset et Bernard Sellier tendant à permettre la création de fonds de pension.

* 49 Voir le rapport de la commission des affaires sociales (n° 8, 1999-2000) et l'avis de la commission des finances (n° 10, 1999-2000) sur les propositions de loi de MM. Charles Descours et plusieurs de ses collègues visant à améliorer la protection sociale des salariés et créant des fonds de retraite, et de M. Jean Arthuis et les membres du groupe de l'Union centriste visant à instituer des plans d'épargne retraite.

* 50 Le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA).

* 51 Une nouvelle fois, votre rapporteur pour avis ne peut que constater que le gouvernement ne juge pas bon de revoir l'énumération des ressources du fonds prévue à l'article 41 de la lfss 1999.

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