3. Une mauvaise mesure

a) Le débat faussé

Par ces exonérations de CRDS, le gouvernement et la majorité de l'Assemblée nationale remettent en cause un principe d'orthodoxie financière auquel tous les gouvernements s'étaient jusque là tenus : l'absence d'atteinte, même mineure, de la CADES sans en prolonger le terme. Lors de la réouverture de la CADES pour accueillir les déficits cumulés non prévus, en 1998, le gouvernement avait tenu à allonger en conséquence la durée de vie de la caisse de cinq ans. Si l'on pouvait alors critiquer le principe d'une réouverture, personne ne pouvait remettre en cause cet allongement destiné à rassurer les marchés et à éviter tout risque de non remboursement.

Cet allongement consistait par ailleurs en une hausse déguisée des prélèvements obligatoires, puisque l'on doit croire qu'à l'échéance des missions de la CADES, l'impôt qui les finance - la CRDS - disparaîtra.

Or, dans le cas présent, non seulement l'Etat ne met pas en place de mécanisme de garantie quant à la durée de vie de la CADES, mais en plus il argue de mauvaise foi d'une réduction des prélèvements obligatoires alors qu'il s'agit plutôt d'un report de prélèvements sur ceux qui paient la CRDS et s'en acquittent deux ans de plus.

En effet, priver la CADES de plus de 52 milliards de francs de recettes revient en réalité à en allonger le terme de plus de deux ans.

Dès lors, deux lectures sont possibles :

• ou la CADES devait avoir remboursé plus tôt que 2014 et alors ces 52 milliards correspondent au financement par ceux qui paieront la CRDS pendant deux ans de plus d'exonérations fiscales accordées à d'autres en 2000 ;

• ou la CADES ne tiendra pas ses engagements et ils devront être couverts soit par un nouvel allongement, c'est-à-dire un prélèvement supplémentaire de CRDS, soit par le budget de l'Etat et donc là aussi par le contribuable.

Il s'agit donc de discuter, des années avant qu'elle ne se produise éventuellement, de l'affectation de la ressource laissée disponible par une éventuelle bonne santé financière de la CADES et la suppression de la CRDS. Celle-ci devra disparaître avec la dette de la sécurité sociale portée par la CADES. Il en va de la responsabilité de l'ensemble de la classe politique devant les Français. Or ce projet de loi de financement de la sécurité sociale revient en fait à en prolonger la perception. Ce n'est pas acceptable.

Dans tous les cas de figure, il est faux de présenter cette mesure comme une baisse des prélèvements obligatoires : il ne s'agit ni plus ni moins d'un report de CRDS. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne prévoit donc pas une exonération de CRDS mais un transfert de la charge de CRDS. En tirer argument pour parler de baisse des prélèvements est non seulement un abus de langage mais un mensonge pour les Français.

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