B. LE PROGRAMME DE SIMULATION

La mise en oeuvre du programme de simulation constitue le second impératif pour notre force de dissuasion car il conditionne la garantie de la fiabilité et de la sûreté des armes futures.

1. Les enjeux du programme de simulation

De l'ensemble des puissances nucléaires reconnues, la France se distingue en ayant à la fois renoncé juridiquement aux essais nucléaires, en ratifiant le traité d'interdiction complète des essais nucléaires, et renoncé matériellement et de manière irréversible à sa capacité d'effectuer de tels essais, en démantelant les installations du Centre d'expérimentations du Pacifique.

Le programme de simulation apparaît dans ce contexte comme indispensable à la garantie de la fiabilité et de la sûreté des armes futures, c'est-à-dire de celles qui remplaceront les armes actuelles sans avoir pu bénéficier des essais en vraie grandeur.

Votre rapporteur souhaite ici rappeler les principaux enjeux de la simulation :

- les armes subissent des phénomènes de vieillissement des charges qu'il importe de surveiller et dont il faut mesurer les incidences pour y remédier. En l'absence d'essais, la simulation permettra d'évaluer les conséquences du vieillissement des charges et contribuera au maintien de la durée de vie des armes actuelles, telle qu'elle est prévue jusqu'à leur remplacement ;

- les têtes nucléaires appelées à remplacer les charges actuelles seront définies à partir des concepts "robustes" testés lors de la dernière campagne d'essais, qui toléreront des écarts de modélisation ou de réalisation, limités par rapport aux engins testés. Mais seule la simulation permettra de garantir la fiabilité et la sûreté de ces charges nouvelles, garantie sans laquelle la dissuasion n'aurait plus la même crédibilité.

- enfin, à plus long terme, les concepteurs des armes qui assureront le renouvellement appartiendront à une génération n'ayant pas été confrontée aux essais en grandeur réelle. Au-delà des données recueillies lors de ces essais, la simulation leur fournira des calculateurs et des moyens expérimentaux adaptés (la machine radiographique AIRIX et le laser Mégajoule) leur permettant de confronter leurs calculs à l'expérience.

C'est à cette triple nécessité que répond le programme de simulation.

2. La mise en oeuvre du programme de simulation

La simulation permettra de reproduire, à l'aide d'expériences et de calculs, les phénomènes rencontrés au cours du fonctionnement d'une charge nucléaire.

La mise en oeuvre du programme de simulation repose sur de puissants moyens de simulation numérique fournis par des ordinateurs beaucoup plus performants que ceux actuellement en service, et sur des installations expérimentales permettant de valider les modèles physiques décrivant les phénomènes essentiels du fonctionnement des armes nucléaires : la machine radiographique AIRIX pour la visualisation détaillée du comportement dynamique de l'arme, et le laser Mégajoule pour l'étude des phénomènes physiques, notamment thermonucléaires.

La machine radiographique AIRIX , située à Moronvilliers dans la Marne, sera vouée à l'analyse de la dynamique des matériaux et elle permettra d'étudier le fonctionnement non nucléaire des armes, à l'aide d'expériences au cours desquelles les matériaux nucléaires sont remplacés par des matériaux inertes.

Projet de plus grande ampleur, le laser Mégajoule qui sera installé au Barp, en Gironde, est pour sa part destiné à l'étude du domaine thermonucléaire. Il permettra de déclencher une combustion thermonucléaire sur une très petite quantité de matière et de mesurer ainsi les processus physiques élémentaires. Le développement du projet doit s'effectuer en plusieurs étapes, avec tout d'abord la construction d'une ligne d'intégration laser (LIL) qui devra valider et qualifier la définition de la chaîne laser de base du laser Mégajoule.

Le calendrier du programme de simulation a été arrêté en fonction de plusieurs critères : d'une part, la relève des équipes de concepteurs actuels par des équipes n'ayant pas connu les essais nucléaires, qui implique la mise à disposition de ces dernières de moyens de simulation, et d'autre part les échéances de remplacement des charges nucléaires actuelles.

Le CEA a passé en début d'année 2000 un contrat avec la société américaine Compaq pour l'échat d'un super calculateur.

En ce qui concerne le laser Mégajoule, la ligne d'intégration laser, en cours de réalisation, devrait être mise en service fin 2001. La mise à disposition du laser mégajoule à pleine puissance a été avancée pour tenir compte des échéances de départ en retraite des équipes de concepteurs. Elle est désormais prévue pour 2008, les premières expériences d'ignition et de combustion thermonucléaire étant prévues pour fin 2010.

S'agissant de la machine radiographique AIRIX, une première phase est désormais achevée avec la réalisation de l'installation " un axe ", opérationnelle depuis cet automne. L'ensemble complet, qui implique la réalisation d'un second axe, devrait être opérationnel en 2011, le lancement de cette réalisation ayant été repoussée au-delà de 2007, ce qui impliquera de réaliser les travaux sur une durée inférieure à celle initialement prévue. Ce décalage est la contrepartie de l'avancement du calendrier de mise en service du laser mégajoule.

L'ensemble du programme de mise en place de moyens expérimentaux de simulation représente un coût global de 15 milliards de francs, dont 9,5 milliards de francs d'investissements et 5,5 milliards de francs de sous-traitance d'études et de développement. Depuis le lancement du programme, environ 4 milliards de francs ont été engagés pour l'acquisition de ces moyens.

Pour 2001, le programme de simulation (hors coût de personnel) mobilisera environ 850 millions de francs de crédits de paiement, dont 710 pour le laser mégajoule.

Votre rapporteur croit devoir souligner une nouvelle fois que la contrepartie indispensable aux engagements internationaux souscrits par la France et à ses initiatives unilatérales, réside dans le respect scrupuleux de l'échéancier et des enveloppes financières allouées à la simulation par la dernière loi de programmation militaire. C'est en effet sur la simulation que reposera la crédibilité de notre dissuasion, puisqu'elle seule permettra d'évaluer le comportement des armes et d'en garantir la fiabilité.

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