B. LES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT : UN EFFORT ENCORE INSUFFISANT POUR L'IMMOBILIER

Le tire V dans le cadre du projet de budget pour 2001, connaît une évolution contrastée . En effet, si les autorisations de programme progressent de 1 % pour s'élever à 2,231 milliards de francs, les crédits de paiement diminuent de 2,2 % (soit une dotation de 2,228 milliards de francs contre 2,279 milliards de francs en 2000). L'érosion des crédits de paiement ne devrait pas peser à l'excès sur les équipements de la gendarmerie dans la mesure où l'achèvement -prévu cette année- du déploiement du réseau de télécommunications Rubis, seul programme majeur de l'Arme, permet de redéployer les ressources disponibles au profit, en particulier, des matériels indispensables au service quotidien des unités.

En revanche, les moyens dévolus aux infrastructures demeurent encore insuffisants au regard des besoins de rénovation du parc immobilier de la gendarmerie.

1. La priorité accordée aux matériels nécessaires au fonctionnement courant des unités

a) L'achèvement du programme Rubis

Après avoir encore représenté 22 % des crédits du titre V, la part désormais dévolue au programme Rubis ne dépasse pas 3,5 % des dépenses d'équipement dans le projet de loi de finances initiale pour 2001.

En effet, à la fin de cette année l'ensemble des 97 groupements de gendarmerie de la France métropolitaine aura été doté du réseau Rubis. Dans ces conditions, le projet de budget pour 2001 prévoit le paiement du solde du programme Rubis (soit 7,4 millions de francs) et le financement d'opérations complémentaires destinées à améliorer le fonctionnement de ce système de radiocommunication avec :

- le déploiement des premiers relais radio afin d'optimiser la couverture radioélectrique du réseau ;

- l'augmentation de la dotation en terminaux radio des unités ;

- la mise en oeuvre de relais radio mobiles de secours.

Ces évolutions du programme Rubis représentent un coût de 68,6 millions de francs.

Il est donc possible aujourd'hui de dresser un premier bilan de ce programme qui a, pendant une décennie, mobilisé l'essentiel des ressources consacrées à l'équipement de la gendarmerie.

Un audit conduit en 1999-2000 dans le cadre du contrôle des prix de revient des programmes d'armement, a porté une appréciation favorable sur les conditions de mise en oeuvre de Rubis.

Sur le plan financier, le coût total du programme RUBIS s'élève à 2,241 milliards de francs 2 ( * ) . Il est supérieur de 17 millions à l'estimation initiale (soit une augmentation de 0,8 %).

Toutefois, ce coût final est inférieur aux 2,531 milliards de francs annoncés lors de la réévaluation réalisée en 1994 du fait de l'intégration d'équipements portatifs non prévus à l'origine pour des raisons de disponibilité technologique.

Il faut ajouter que l'exportation de matériels communs à Rubis a entraîné le versement à l'Etat de redevances d'études, d'outillage et de contrôle pour un montant de 2,5 millions de francs et permis une diminution du coût du marché de l'ordre de 6 millions de francs.

Le programme Rubis a en effet donné naissance au produit Matracom 9 600 sur la base de la norme Tetrapol. 44 réseaux Tetrapol (dont 14 confidentiels : 4 au Moyen-Orient, 3 en Asie, 1 en Amérique et 6 en Europe) ont été commercialisés de par le monde. La technologie Tetrapol a connu un revers avec le refus de l'instance européenne compétente (l'European telecommunication standard institute -ETSI) d'en v alider la norme en 1999. Le préjudice supporté par Tetrapol par rapport à la norme concurrente Tetra (seule reconnue par l'ETSI) demeure limité sur le marché européen car chaque Etat a désormais l'obligation d'évaluer avec la même impartialité les deux solutions techniques. Il est, en outre, sans effet hors du vieux continent dans la mesure où les Etats-Unis ont élaboré une norme équivalant à la technologie Tetrapol.

Sur le plan du fonctionnement, le bilan de Rubis apparaît également satisfaisant. A la fin de l'année tous les groupements disposeront d'un système opérationnel.

Il faut ajouter que l'interopérabilité de Rubis avec le réseau de communication de la police nationale ACROPOL, basée sur la norme Tetra, a été assurée en Corse. Il reste encore à la conduire à bien sur le continent.

Lors d'un sondage sur le moral mené au printemps 1999, 92 % des personnels concernés par l'emploi du réseau Rubis s'étaient déclarés satisfaits du fonctionnement du réseau.

b) Une remise à niveau des autres équipements de la gendarmerie

La marge de manoeuvre financière dégagée par l'achèvement du programme Rubis bénéficie principalement aux moyens de fonctionnement quotidien des unités. Cette orientation s'inscrit dans le prolongement de l'effort particulier décidé à la suite de la session extraordinaire du Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie du 28 février 2000. Le gouvernement avait en effet décidé alors, outre une augmentation des effectifs et des crédits de fonctionnement, un renforcement des équipements des unités :

- dotation de 1 500 véhicules en sus du plan d'accroissement du parc automobile prévu en 2000 afin d'équiper plus particulièrement les brigades à 6 ne disposant que d'un seul véhicule ;

- l'acquisition de 3 500 ordinateurs supplémentaires afin de doter toutes les unités d'un poste pour deux militaires et l'installation d'un télécopieur dans les unités urbaines classées en zone urbaine sensible ;

- l'augmentation du parc de téléphones portables à raison d'un appareil par unité de 6 gendarmes et deux appareils par unité comportant un effectif supérieur à 6.

. Les moyens de communication

Les crédits prévus dans le cadre du budget 2001 traduisent une attention particulière à l'amélioration des moyens de communication :

- pour les groupements outre-mer , l'achèvement de l'équipement en émetteurs-récepteurs HF et VHF, particulièrement nécessaires dans ces zones souvent très étendues (Polynésie) où les liaisons téléphoniques traditionnelles ne sont pas toujours possibles ;

- pour la gendarmerie mobile et départementale , la mise en place d'émetteurs-récepteurs de transmissions de données HF de deuxième génération ; ces matériels permettront aux escadrons de gendarmerie mobile de communiquer de manière sécurisée avec les unités de gendarmerie mobile et départementale (200 stations seront déployées sur les années 2001-2002 au profit de la gendarmerie mobile et des groupements de gendarmerie départementale ; 400 stations devraient l'être à partir de 2003 au profit des compagnies de gendarmerie départementale) ;

- pour la gendarmerie mobile , l'équipement en postes radio de quatrième génération (VHF kaki) destinés à renouveler les matériels kaki d'ancienne génération (le programme devrait s'étendre de 2001 à 2005 pour un montant de 50 millions de francs) ;

- pour le groupe de surveillance et d'intervention de la gendarmerie nationale (GSIGN) et les groupes d'observation et de surveillance des sections de recherche , le renouvellement des moyens de télécommunications dont ils disposent ;

- pour les détachements de gendarmerie en opérations extérieures qui, souvent dans l'urgence, avaient dû déployer des réseaux de radiocommunication de circonstance non sécurisés et, surtout, non compatibles avec ceux des  armées, la mise en place de nouveaux matériels adaptés à ce type de mission et interopérables avec ceux des forces terrestres présentes. La gendarmerie a décidé de s'appuyer sur le réseau de radiocommunication de l'armée de terre, RENABEC (réseau numérique à base d'équipements civils) et de financer les terminaux nécessaires à ses unités.

Par ailleurs, s'agissant des installations téléphoniques, les crédits du titre V permettent le renouvellement de 400 autocommutateurs de petite capacité et de 25 de grande capacité. En outre, la gendarmerie procédera à l'acquisition de 1 700 télécopieurs en clair.

. L'informatique

Dans ce domaine, la dotation en autorisations de programme est principalement consacrée à l'informatique de gestion avec le renouvellement du système décentralisé GEAUDE (mini-ordinateurs, réseaux locaux et imprimantes).

. Les véhicules

Le parc automobile de la gendarmerie -marqué par son vieillissement- bénéficie d'un effort particulier avec la livraison de 1 600 véhicules de brigade, 140 véhicules de liaison, 30 véhicules utilitaires et 10 véhicules de transport en commun. Ces dotations sont destinées à renouveler les matériels existants.

En outre, le projet de budget prévoit la livraison de 400 motocyclettes destinées principalement à assurer les missions de police de la route.

. Les autres aspects des besoins quotidiens des unités

Le souci de satisfaire les besoins d'équipement liés à l'exercice quotidien des missions des unités, a conduit par ailleurs à consacrer un effort particulier à la sécurité (fourniture de 5 000 gilets pare-balles à port apparent et de 10 000 gilets pare-balles à port discret) ainsi qu'au cadre de travail et de vie (mobilier de bureau et matériel de couchage).

. Les projets d'équipement plus lourds

- Les hélicoptères

Depuis plusieurs années déjà, le renouvellement des douze hélicoptères de sauvetage et d'intervention monoturbine Alouette III de la gendarmerie s'imposait en raison, d'une part, de l'obsolescence de ces équipements et, d'autre part, de la modification de l'évolution des normes européennes qui interdisent l'utilisation d'appareils monoturbine au-dessus des zones urbaines. Au terme d'une procédure de marché négocié, la société Eurocopter s'est vu confier une commande ferme de 8 appareils BK 117 C2 (future appellation EC 145) dont la livraison s'échelonnera sur trois ans :

- 1 appareil en 2001

- 4 appareils en 2002

- 3 appareils en 2003

Le montant total de ces acquisitions s'élèvera à 332 millions de francs.

Par la suite, comme l'a indiqué le directeur général de la Gendarmerie lors de son audition devant votre commission, six autres appareils de ce type seront commandés (entre 2003 et 2008). A partir de 2005, le renouvellement des 30 hélicoptères de surveillance et de liaison sera engagé.

Les financements nécessaires seront prévus dans la future loi de programmation.

- Les véhicules blindés

Le parc des blindés de la gendarmerie n'est plus, depuis plusieurs années, à la mesure des missions de maintien de l'ordre auxquelles il est, en principe, destiné. Il se compose de 155 véhicules blindés à roues de la gendarmerie VBRG (dont 37 en place outre-mer) et de 28 véhicules blindés canon VBC.

Il est devenu indispensable de renouveler ces matériels. La gendarmerie, consciente du risque soulevé par la faiblesse de ce chaînon dans l'éventail des moyens utilisés pour le maintien de l'ordre, a cependant longtemps hésité sur les caractéristiques d'un nouveau type de véhicule dont elle souhaitait qu'il présente une certaine polyvalence.

Depuis le mois d'octobre 1999, l'Arme conduit avec la délégation générale pour l'armement une analyse des caractéristiques auxquelles doit répondre un véhicule blindé dans le cadre du maintien de l'ordre. Ce travail devrait aboutir à l'élaboration d'un cahier des charges fonctionnel à la spécification technique des besoins avant la fin de l'année 2000.

2. Les infrastructures : un besoin de rénovation considérable non satisfait

L'enveloppe allouée aux infrastructures enregistre une légère progression par rapport au budget pour 2000 : les autorisations de programme passent ainsi de 856 millions de francs à 866 millions de francs (+ 1,1 %) et les crédits de paiement, de 817 millions de francs à 838 millions de francs (+ 2,6 %). Cet effort, réel, demeure toutefois encore largement insuffisant au regard des besoins de rénovation et d'accroissement du parc immobilier de la gendarmerie.

Le projet de loi de finances se distingue cependant au titre VI par une augmentation significative de la subvention pour la construction des casernes par les collectivités locales (101 millions de francs en autorisations de programme et 50 millions de francs en crédits de paiement + 11,1 %).

Au 31 décembre 1999, le parc de la gendarmerie se composait de 81 741 logements, dont 13 655 pris à bail hors caserne. Le tiers de ces logements appartient aux collectivités locales représentées à part égale par les départements et par les communes.

Les besoins de renouvellement du parc immobilier peuvent être estimés à 1 500 unités logement 3 ( * ) par an. Or, comme le montrent les tableaux des mises en chantier et des livraisons, les réalisations, faute de moyens budgétaires suffisants, demeurent en deçà de ce niveau.

Mises en chantier

(en nombre d'équivalent unité logement)

année

état

collectivité territoriale et particuliers

total

1996

800

415

1 215

1997

934

470

1 404

1998

880

353

1 233

1999

914

231

1 145

2000

(prévision)

780

280

1 060

La livraison intervient dans un délai moyen de dix-huit mois à deux ans selon la taille de l'opération.


Année


Etat

Collectivité territoriale et particuliers


Total

1996

973

310

1 283

1997

838

338

1 176

1998

871

454*

1 325*

1999

911

243

1 154

2000

(prévision)

901

300

1201

*+ 121 logements à Lure.

a) Les opérations de l'Etat : des moyens insuffisants

La dotation budgétaire de 2001 devrait permettre la livraison de 750 équivalents unité logement et la commande de 787 équivalents unité logement (contre 925 l'an passé).

Les principales opérations susceptibles d'être lancées en 2001 sont les suivantes :

Grandes opérations à financer en 2001 sous réserve qu'aucune mesure d'ajustement budgétaire n'intervienne avant le vote du budget

(en millions de francs)

Mende (Lozère) Construction d'une caserne GD (2 e tranche)

73,4

Digne les Bains (Alpes de Haute Provence) Construction d'une caserne GM (2 e tranche)

60

Maisons-Alfort (Val de Marne) Réhabilitation de caserne (parkings et mess)

45

Pamandzi (Mayotte) Construction d'une caserne (1 ère tranche)

32

Pithiviers (Loiret) Reconstruction de la caserne GD et GM (1 ère et 2 e tranches)

62

Istres (Bouches du Rhône) Extension et restructuration de la caserne GD

37,45

Ecoles (Auch, Tulle, Melun...) Restructuration extension

175

Rennes (Ille et Vilaine) Construction d'un bâtiment administratif

35

Marseille (Bouches du Rhône) Construction de logements et d'un ensemble alimentation loisirs et bâtiment d'hébergement (1 ère tranche)

80

Beauvais (Oise) Extension et réhabilitation de la caserne (1 ère tranche)

42

b) L'aide des collectivités territoriales encouragée par le redressement des subventions de l'Etat

Confronté à un cadre budgétaire contraint, l'Etat tend à se reposer sur les collectivités territoriales pour prendre en charge une partie du coût de réalisation des infrastructures. La mise en place d'un cadre incitatif est cependant apparue indispensable. Les bases en ont été posées par le décret n° 94-1158 du 27 décembre 1994 : octroi d'une subvention de l'Etat fixée à 18 % du coût plafond des unités logement ou à 20 % pour les communes de moins de 10 000 habitants qui ne bénéficient pas du concours financier d'une ou de plusieurs collectivités. Une circulaire du 10 janvier 1995 a, certes, assujetti les travaux de construction de gendarmeries à la TVA mais en compensant cette nouvelle charge par un relèvement du montant des coûts plafonds de la construction. L'effet incitatif s'est traduit par une augmentation des dossiers proposés par les collectivités territoriales, dans le cadre de la phase préalable, à l'agrément de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).

Cependant les moyens financiers consentis par l'Etat n'ont pas été à la mesure du dispositif ainsi mis en place . Aux termes de la loi de programmation, les subventions d'investissement accordées aux collectivités territoriales demeurent en effet limitées à une moyenne de 40 millions de francs par an alors que le double de ce montant serait sans doute nécessaire pour satisfaire les besoins. Dès lors, le nombre de dossiers en attente d'une décision d'agrément de la DGGN représentent quelque 1 500 unités logement.

Votre rapporteur a, à plusieurs reprises, attiré l'attention des pouvoirs publics sur cette situation peu cohérente avec la volonté affichée du gouvernement d'impliquer davantage les collectivités dans le financement des infrastructures. Le ministre de la défense a pris en compte ces préoccupations en décidant le 31 mars 2000, d'abonder le titre VI de 50 millions de francs pour l'année. Des programmes supplémentaires ont ainsi été agréés (350 unités logement environ). L'effort est prolongé dans le projet de loi de finances pour 2001. Si le titre VI a désormais des moyens nécessaires pour assurer la réalisation des projets les plus urgents (financement de quelque 680 équivalents unités logement), il ne permettra cependant pas de ne concrétiser qu'une partie des projets présentés par les collectivités.

Par ailleurs, la nouvelle attention accordée par l'Etat à la participation des collectivités territoriales devrait également se traduire par un assouplissement de la réglementation . Ainsi la circulaire du 28 janvier 1993 relative aux conditions de prise à bail par l'Etat des casernes édifiées au profit de la gendarmerie, pourrait être révisée afin que soient supprimées les dispositions limitant ainsi à 40 unités logement la capacité des casernements ainsi réalisée.

* 2 Evaluation en Franc constant (valeur 1986)

* 3 L'unité logement correspond au logement nu, concédé par nécessité absolue de service, et à une quote-part des locaux de service et techniques.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page