2. Une démarche opportune

Votre rapporteur se félicite du louable souci de transparence du Gouvernement assorti d'objectifs clairs et précis fixés par une loi de programmation.

Cette approche, qui contraste avec les pratiques précédentes, est un facteur essentiel d'efficacité. En effet, en l'absence d'une telle vision à long terme, les efforts budgétaires accomplis de 1997 à 2002 n'ont pas permis de remédier efficacement aux difficultés matérielles des juridictions, et ont paradoxalement suscité des mouvements de mécontentement sans précédent au sein du monde judiciaire (magistrats, avocats, fonctionnaires des greffes).

Le bilan des créations d'emplois effectuées dans le passé illustre bien cette situation 16 ( * ) : loin de contribuer au renforcement des juridictions et à la réduction des délais de jugement, elles ont en effet été mécaniquement absorbées par la mise en oeuvre de réformes nouvelles telles que la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits de victimes ou encore la mise en place des « trente-cinq heures ».

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2002-460 DC du 29 août 2002, a reconnu à la programmation des moyens de la justice figurant à l'article 2 de la loi d'orientation et de programmation pour la justice « la valeur normative qui s'attache aux lois de programme prévues par l'article premier de l'ordonnance du 2 janvier 1959 17 ( * )

Cependant, les limites d'une loi de programme liées au caractère indicatif des crédits programmés sont réelles, seule la loi de finances de l'année pouvant autoriser l'engagement effectif des dépenses 18 ( * ) .

A cet égard, il convient de tirer les enseignements de l'application de la loi de programme pour la justice de 1995. Notre regrettée collègue Dinah Derycke, dans son avis sur le projet de loi de finances pour 2000, avait en effet relevé que la loi de programme n° 95-9 du 6 janvier 1995 relative à la justice avait été réalisée inégalement selon les objectifs : les créations d'emplois annoncées ayant été partiellement réalisées 19 ( * ) , les engagements en matière d'autorisations de programme inscrites ayant, quant à eux, été pleinement concrétisés.

Ce bilan témoigne ainsi de la délicate articulation entre loi de programme et loi de finances initiale.

Force est de constater que les prévisions budgétaires chiffrées, tout comme le calendrier figurant dans les lois de programme, peuvent ne pas être respectés à la lettre.

L'application d'une loi de programmation dépend donc avant tout du degré de détermination du Gouvernement et suppose une volonté politique forte, chaque année réaffirmée. Présenter un budget dynamique et maintenir l'effort dans la durée afin de concrétiser les objectifs annoncés : tel est le défi principal auquel sera confronté le ministère de la Justice jusqu'en 2007.

Cette année, l'objectif est atteint : le projet de loi de finances pour 2003 va dans le bon sens et mérite d'être approuvé.

* 16 De 1998 à 2002, on enregistre pour l'ensemble du ministère de la Justice 7.273 créations brutes d'emplois.

* 17 Contrairement aux orientations présentées dans le rapport annexé à la loi d'orientation et de programmation pour la justice qui, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, n'ont pas valeur législative.

* 18 En effet, aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances, « les lois de programme ne peuvent permettre d'engager l'Etat à l'égard des tiers que dans les limites des autorisations de programme contenues dans la loi de finances de l'année. »

* 19 Le taux de réalisation des créations d'emplois est resté inférieur à 70 %. Ce constat général masque toutefois une réalité plus contrastée : les créations d'emplois budgétaires concernant les services judiciaires et la protection judiciaire de la jeunesse ont dépassé les objectifs fixés par la loi de programme, tandis que le taux de réalisation s'est établi à 46 % dans l'administration pénitentiaire.

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