CHAPITRE DEUX - LES MESURES DE DÉPENSES RELATIVES AUX QUATRE BRANCHES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE ET À LA CAISSE NATIONALE DE SOLIDARITÉ POUR L'AUTONOMIE (CNSA)

I. LA BRANCHE MALADIE

A. L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE : DES RAISONS D'ESPÉRER ?

1. Une décélération notable des dépenses d'assurance maladie depuis 2003

Les dépenses d'assurance maladie remboursées par le régime général ont augmenté de 4,9 % en 2004 par rapport à la base 2003, corrigée des erreurs de ventilation comptable et de la surestimation des provisions 2003.

Votre rapporteur pour avis note donc, avec satisfaction, que pour la deuxième année consécutive, en 2004, le rythme de croissance de ces dépenses a diminué. Cette décélération fait suite à une forte progression des dépenses au cours de la seconde moitié des années 90 (+ 5,2 % en moyenne annuelle sur la période 1997-2002 avec un pic de + 7,1 % d'augmentation en 2002).

Taux d'évolution des dépenses d'assurance maladie relevant du champ de l'ONDAM
depuis 1997

(en %)

Source : ministère de la santé et des solidarités

a) Le ralentissement des dépenses de soins de ville en 2004 mais le dépassement important de l'ONDAM hospitalier

Après une croissance des dépenses relevant du champ de l'ONDAM déjà moins rapide en 2003 qu'en 2002, l'année 2004 a été marquée par un ralentissement des dépenses de soins de ville qui n'ont progressé « que » de 4,3 % contre 6,2 % en 2003. Pour la première fois depuis 1998, les soins de ville ont ainsi augmenté moins vite que l'ensemble de l'ONDAM.

Ainsi, les dépenses entrant dans le champ de l'ONDAM s'élèvent en 2004 à 130,1 milliards d'euros, en progression de 4,9 % par rapport aux réalisations 2003. Le dépassement par rapport à l'objectif fixé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 est donc de 500 millions d'euros, correspondant au dépassement des objectifs consacrés aux établissements de santé .

En effet, les versements à l'ensemble des établissements de santé en 2004 sont évalués à 56,5 milliards d'euros en progression de 4,6 % par rapport à 2003. Les objectifs dédiés aux établissements de santé sont donc dépassés de près de 500 millions d'euros, dont 245 millions d'euros pour les établissements publics à but lucratif et 220 millions d'euros pour les cliniques privées.

Principales conclusions du rapport d'enquête de l'IGAS et de l'IGF sur le pilotage des dépenses hospitalières en 2004 (juillet 2005)

Le dépassement des versements aux établissements hospitaliers en 2004 est de 341 millions d'euros d'après les données de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) et de 325 millions d'euros d'après celles de la CNAMTS. Il s'explique principalement par la sous-estimation de la part de l'assurance maladie dans les bases budgétaires (130 millions d'euros), la sous-tarification des prestations par les établissements (entre 130 et 150 millions d'euros) et la non réalisation d'une recette attendue de l'Etat au titre de l'aide médicale d'urgence (36 millions d'euros). A ce dépassement s'ajouteront les moins values qui seront constatées aux comptes administratifs, estimées à 100 millions d'euros.

La question du financement de ce dépassement (économies, augmentation des tarifs des prestations ou assurance maladie) reste ouverte et doit être envisagée établissement par établissement, au vu des marges de manoeuvre et des politiques tarifaires de chacun.

Cependant, même dans l'hypothèse d'un financement intégral par les recettes, aucun nouveau crédit n'est à déléguer à ce titre en 2005, et les 160 millions d'euros délégués en avril 2005 doivent être considérés comme des crédits non reconductibles destinés à atténuer l'impact de la hausse des tarifs. Toujours dans l'hypothèse d'un financement par les recettes, la modification de la base 2006 serait comprise entre 0 et 78 millions d'euros. En outre, les dotations pour les unités de soins de longue durée (USLD) devraient être rectifiées pour tenir compte de leur sous-exécution en 2004.

A compter de la campagne 2005, une sous-exécution des recettes de groupe 2 sera à la charge des établissements. L'enjeu du pilotage de la dépense hospitalière est désormais que la mise en place de la tarification à l'activité (T2A) ne se traduise pas par une dérive non maîtrisée des dépenses.

La T2A suscite une attente forte : une allocation des ressources plus équitable à partir de l'activité, un rapprochement des modes de financement et de régulation des secteurs public et privé, et une incitation au développement du pilotage médico-économique des établissements.

Toutefois, la mission souligne que la T2A ne constitue qu'un mode de financement et n'est pas en soi un outil de régulation des dépenses, de restructuration ou de planification sanitaire. En particulier, elle n'apporte pas de solution aux facteurs de blocage de la gestion hospitalière (faibles marges de manoeuvre des établissements, difficulté à promouvoir un discours de gestion).

Par ailleurs, au terme de l'enquête, il apparaît que :

- la régulation de la dépense présente des zones de fragilité : plusieurs enveloppes sont inflationnistes (frais de séjours, MIGAC déclaratives au coût observé) sans pour autant qu'un dispositif de régulation efficace n'ait été parallèlement institué ; le modèle de financement ne prend qu'imparfaitement en compte l'hétérogénéité des situations des établissements ; la procédure de définition de l'ONDAM hospitalier n'a pas été adaptée ;

- l'impact de la T2A dans les établissements reste faible : elle s'est accompagnée d'un desserrement de la contrainte budgétaire ; ses règles sont aujourd'hui complexes, peu stables et insuffisamment expliquées ;

- le pilotage d'ensemble du projet présente des insuffisances : calendrier mal maîtrisé ; confusion entre maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre, notamment recentralisation de la procédure budgétaire qui réduit les ARH à un rôle minimal ;

- la fiabilité du processus d'allocation des ressources (calcul des bases et des tarifs) est perfectible.

Dès lors, les enjeux sont aujourd'hui d'assurer une régulation efficace de la dépense et de restaurer la crédibilité de la réforme.

Pour 2006, il convient de stabiliser le système de financement, à la fois pour donner la priorité à la régulation, garantir une certaine visibilité aux établissements et aux tutelles, et tenir compte de l'état de préparation de certains dossiers. Il est donc proposé de maintenir la part activité à 25 ou 30 % ; de conserver les bases budgétaires et la structure actuelle de tarification ; d'ajourner l'extension de la T2A au moyen séjour ; de reporter l'EPRD ; et de s'en tenir pour 2006 à la facturation individuelle des soins externes et des médicaments.

Simultanément, il est urgent de mettre en oeuvre les instruments de régulation, pour partie déjà prévus, afin d'enrayer la dynamique inflationniste des dépenses : reprise des contrôles du codage PMSI ; contractualisation sur les missions d'intérêt général (coûts normés, évaluation) ; objectifs de volume sur les MO, les DMI et les séjours les plus coûteux.

Il est également proposé de créer le cadre d'une régulation efficace de la dépense par les ARH : délégation de l'ensemble des dotations régionales en début d'année ; redéploiements entre établissements ; instauration d'une procédure budgétaire annuelle avec l'échelon national conduisant à fixer à chaque région des objectifs de dépense sur les séjours MCO ainsi que les MO et DMI.

Au niveau national, l'action de la DHOS doit être recentrée sur ce dialogue de gestion avec les ARH et le pilotage stratégique. Les fonctions techniques et opérationnelles reviendraient aux maîtrises d'oeuvre (ATIH, dont les moyens pourraient utilement être renforcés, et ARH, dont le statut mériterait d'être clarifié).

S'agissant de la régulation macro-économique, il est nécessaire dès 2006 que la construction du PLFSS fasse apparaître les hypothèses à partir desquelles les objectifs hospitaliers sont construits. Ces hypothèses devront être mises en regard de prévisions réalisées par un organisme indépendant (le comité d'alerte).

Les deux inspections divergent cependant sur un point. L'IGF estime que si les propositions émises par la mission sont mises en oeuvre dès 2006, l'éventuel dépassement dû à une sous-estimation des prévisions initiales d'activité sera nécessairement faible. De ce fait, et au vu des inconvénients de la régulation prix/volume, il conviendrait de supprimer officiellement cet instrument. Ceci permettrait, en outre, de stabiliser en 2006 le montant des tarifs, ce qui apporterait plus de visibilité aux établissements et aux tutelles.

En revanche, pour l'IGAS, il ne serait pas prudent de renoncer à une régulation prix/volume tant que les autres mécanismes de régulation n'auront pas fait la preuve de leur efficacité.

Enfin, il importe de préciser le schéma cible de la T2A : réévaluer les modalités de la convergence public/privé ; calibrer les missions d'intérêt général et coefficients géographiques sur des bases objectivées ; déterminer le périmètre cible de la part activité (proportion des enveloppes rémunérées à l'activité et des enveloppes forfaitaires ; différenciation suivant les types de séjours et d'établissements) ; réexaminer la tarification des soins externes. La fiabilisation du dispositif budgétaire et l'évaluation des effets qualitatifs de la T2A doivent également être engagées.

Source : rapport d'enquête de l'Inspection générale des affaires sociales et de l'Inspection générale des finances sur le pilotage des dépenses hospitalières (juillet 2005)

En outre, les versements aux établissements médico-sociaux ont progressé de 9 % en 2004 pour s'élever à 9,8 milliards d'euros.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner que l'article 1 er du présent projet de loi de financement propose d'approuver, au titre de l'exercice 2004, un montant des dépenses constatées relevant du champ de l'ONDAM de 130,2 milliards d'euros au lieu des 130,1 milliards d'euros annoncés par la commission des comptes de la sécurité sociale. C'est pourquoi, il vous proposera un amendement tendant à rectifier cette erreur .

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