C. LE PRINCIPE DE RÉALITÉ APPLIQUÉ À LA COUR DES COMPTES ET À SES MOYENS

L'extension du droit de demander des missions d'assistance à la Cour des comptes est plus radicale que celle des compétences en termes d'auditions ou de pouvoirs de contrôle des rapporteurs.

Elle concerne, en effet, non seulement « toute instance permanente créée au sein d'une des deux assemblées parlementaires pour procéder à l'évaluation de politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente », mais aussi les commissions permanentes autres que la commission des finances et celle des affaires sociales, et les Présidents de chacune des Assemblées.

Il y a fort à craindre que cette extension n'aboutisse à une augmentation du nombre de demandes incompatible avec les moyens humains de la Cour des comptes ce qui amènera celle-ci à devoir trier entre les différentes demandes émanant de chacune des assemblées et au sein même de chaque assemblée.

Ce risque est d'autant plus important que, comme le Conseil constitutionnel l'a rappelé dans sa décision n°2001-448 DC du 25 juillet 2001 sur la LOLF, il appartient aux autorités compétentes de la Cour des comptes de faire en sorte que l'équilibre voulu par le constituant dans les fonctions d'assistance de la Cour des comptes (entre le Parlement et le Gouvernement) ne soit pas faussé au détriment de l'un de ces deux pouvoirs. En conséquence, le tri effectué par la Cour s'exercera toujours au sein des demandes émanant du Parlement .

On peut en outre s'interroger sur la réelle capacité du Président de chacune des Assemblées à effectuer une coordination et un filtrage efficace des demandes présentées sachant que celles-ci pourront émaner d'instances dont la création aura été obtenue par des groupes politiques au titre de leurs nouveaux « droits de tirage ». En tout état de cause, si les demandes d'assistance formulées par les commissions des finances et des affaires sociales en application de la LOLF et du code de la sécurité sociale ne feront pas l'objet du filtrage présidentiel prévu à l'article 3 de la proposition de loi, on peut s'interroger sur ce qui empêcherait ces deux commissions de formuler des demandes d'assistance supplémentaires au titre de la nouvelle procédure.

Votre commission des finances n'a pas jugé opportun de restreindre l'effet de la présente proposition de loi en excluant son application au Sénat et en limitant son objet au seul comité d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale. La faisabilité juridique d'une telle modification est en outre très douteuse.

Mais elle a considéré indispensable de fixer certaines bornes à l'extension des pouvoirs spécifiques des instances de contrôle et d'évaluation .

Elle souhaite ainsi, d'une part, préserver les spécificités actuelles des commissions des finances et des affaires sociales et, d'autre part, écarter le risque que la Cour des comptes, devant l'afflux de demandes, soit amenée à effectuer une sélection des demandes sur des critères que le Parlement ne maîtriserait pas.

Elle a donc retenu, en ce sens, deux dispositions qui prévoient :

- que les demandes formulées au titre de la nouvelle procédure ne peuvent concerner ni l'exécution des lois de finances ni une question relative aux finances publiques (reprenant ainsi la jurisprudence du Conseil constitutionnel) ;

- qu'une priorité d'examen par la Cour des comptes s'applique aux demandes d'assistance et aux enquêtes visées à l'article 58 de la LOLF et à l'article L.O. 132-3-1 du code des juridictions financières (qui sont antérieurs et ont valeur de dispositions organiques).

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