QUATRIÈME PARTIE - PLF 2013 : UNE AIDE BILATÉRALE STABILISÉE À UN NIVEAU HISTORIQUEMENT BAS

I. DES CAPACITÉS OPÉRATIONNELLES BILATÉRALES ENTAMÉES PAR LA DIMINUTION DES AIDES SOUS FORME DE DONS

A. LA MONTÉE EN PUISSANCE DE L'AIDE MULTILATÉRALE CES DIX DERNIÈRES ANNÉES CONTINUE DE PESER SUR LE NIVEAU DE L'AIDE BILATÉRALE

1. Alors que les contributions multilatérales ont connu une progression constante sous l'effet des contributions à la Banque mondiale, au Fonds sida et au FED....

La part croissante de l'aide allant aux « grands guichets » multilatéraux et européens s'est traduite, dans un budget contraint, par une diminution symétrique de l'aide bilatérale, réduisant considérablement les moyens des agences locales de l'AFD et des ambassades sur le terrain.

Il s'agit d'une évolution qui, pour une part, est commune à l'ensemble des bailleurs de fonds. Elle s'explique par des raisons déjà évoquées liées à la mise en place d'outils internationaux de gestion de développement.

Sur la période 1998-2010, l'aide publique au développement nette de la France est restée majoritairement bilatérale (60 % en 2010), malgré une montée en charge de l'aide multilatérale et l'aide européenne. Alors qu'elle n'était que de 27 % environ en 1998, l'aide française multilatérale et communautaire représente environ 40 % des crédits d'APD nette en 2010.

Elle transite par le canal européen (21 % en 2010), notamment via les financements apportés au Fonds européen de développement et au budget européen, et par l'aide multilatérale française hors UE (19 %), relativement concentrée et mobilisée par le biais des institutions financières internationales (FMI et Banque mondiale principalement) et des fonds verticaux (Fonds mondial pour la lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme en premier lieu), plus marginalement par le canal des organismes spécialisés des Nations unies.

Evolution de l'APD en volume (en Md USD) et en % de l'APD nette par canal

L'APD nette de la France par canal en 1998

L'APD nette de la France par canal en 2010

Source : Stat .OECD

Ce renforcement de l'aide multilatérale s'explique principalement par des engagements pris par la France dans les enceintes internationales, telles que le G8, dans le cadre européen ou encore à l'occasion des processus des reconstitutions pluriannuelles des institutions financières internationales (augmentation de capital de banque et les reconstitutions des fonds concessionnels).

Dans la majorité des pays membres du CAD, la croissance des contributions multilatérales s'est accompagnée d'une augmentation du budget de l'aide au développement.

En France, si l'on considère, non pas les chiffres de l'APD, mais les crédits budgétaires, la stagnation de ces derniers a conduit à une relative éviction des crédits disponibles pour l'aide bilatérale.

Quoi qu'il en soit, un consensus s'est dégagé ces dernières années pour opérer un rééquilibrage au profit de l'aide bilatérale .

Les prévisions du DPT laissent présager un rééquilibrage très modéré fondé sur une dynamique des prêts et des allégements de dette.

La part du bilatéral passerait de 65 % en 2010 à 67 % en 2015. On constate une forte augmentation de l'aide communautaire, une diminution des subventions de 530 à 500 millions de 2011 à 2015 contre 596 millions en 2007 et une forte augmentation des prêts bilatéraux de 1,9 milliard à 2,6 milliards.

Prévisions d'APD pour 2015

en millions €

2007

2008

2009

2010

2011*

Prévisions

2012

2013

2014

2015

TOTAL APD

7 220

7 562

9 048

9 751

9 384

9 705

9 826

10 531

10 916

AIDE MULTILATERALE NETTE TOTALE

2 648

3 083

4 008

3 872

3 254

3 029

3 192

4 048

3 654

part APD multilatérale dans l'APD totale

37%

41%

44%

40%

35%

31%

32%

38%

33%

Dons

Aide Communautaire

1 575

1 753

2 083

2 009

1 742

1 554

1 662

2 526

2 076

Autres multi (aide hors UE)

1 116

1 307

1 339

1 413

1 512

1 475

1 530

1 522

1 578

Prêts (FMI & BM)

Prêts nets

-43

23

586

450

-5

196

198

144

63

Prêts bruts (pour info)

88

159

666

519

183

237

237

237

237

AIDE BILATERALE NETTE TOTALE

4 572

4 480

5 041

5 879

6 130

6 676

6 634

6 484

7 262

part APD bilatérale dans l'APD totale

63%

59%

56%

60%

65%

69%

68%

62%

67%

Dons
(hors annulations de dette)

Total

3 657

3 382

3 528

3 760

3 319

3 664

3 588

3 443

3 347

dont subventions

596

645

605

633

530

577

562

501

500

Prêts

Prêts nets
(hors rééchelonnement de dette)

-179

422

504

1 004

1 994

1 818

2 150

2 425

2 668

Prêts bruts (pour info)

695

1 246

1 276

1 862

2 675

2 643

3 019

3 343

3 710

Annulations de dette et rééchelonnements nets

1 094

675

1 009

1 115

817

1 194

896

616

1 247

2. L'aide bilatérale connaît des évolutions contrastées avec une évolution dynamique des bonifications du programme 110 et un décrochage des subventions du programme 209

La diminution de la part relative de l'aide bilatérale dans la coopération française correspond, ces dernières années, en valeur absolue, à une stagnation des crédits bilatéraux, voire une légère augmentation de ces derniers, en raison de quelques moyens supplémentaires rendus disponibles par la diminution de la contribution au FED.

Cette stabilisation de moyens dans leur ensemble masque des évolutions contrastées des moyens en subventions et en bonifications.

Au regard du document de politique transversale (DPT), on constate une stagnation des subventions à un niveau historiquement bas.

Au sein du programme 209, les crédits de subventions-projets sont stabilisés aux environs de 170 millions d'euros en crédits de paiement pour toute la période 2010-2013.

Il convient de remarquer que la stagnation des crédits de subventions pendant toute la période conduit à maintenir ces crédits à un niveau historiquement très bas qui, comme il a été souligné, affaiblit considérablement les possibilités d'intervention de l'AFD dans les zones prioritaires de la coopération française.

A l'inverse, on constate une légère progression des bonifications issues du programme 110, qui passent, en crédits de paiement, de 167 millions d'euros à 188 millions d'euros de 2011 à 2013.

De même, en dehors de la mission aide au développement, les prêts à l'AFD en vue de favoriser le développement économique et social dans les pays étrangers issus du programme 853 passent de 232 millions d'euros à 364 millions d'euros.

Cette divergence entre les bonifications et les subventions correspond à l'évolution respective des programmes 110 et 209, au poids respectif du ministère des finances et du ministère des affaires étrangères dans les négociations budgétaires.

Elle correspond également à une logique comptable pour laquelle les bonifications sont payées à moyen terme alors que les subventions sont payées plus vite. Elle correspond enfin à une logique d'affichage.

Les bonifications permettent, en effet, grâce aux prêts, un montant d'APD déclaré beaucoup plus élevé que les subventions. Avec un peu moins de 500 millions de coût Etat, l'AFD peut déclarer 6,7 milliards d'autorisations de financement en APD en 2010, soit un effet de levier de plus de 6.

Allocation par instrument en volume

(versements en millions de dollars):

Source : Ernst and Young

B. LA DIMINUTION DES SUBVENTIONS SE TRADUIT PAR UNE AIDE AU DÉVELOPPEMENT COMPOSÉE ESSENTIELLEMENT DE PRÊTS ET ACCESSOIREMENT DE DONS

1. L'évolution de l'aide française se caractérise par l'augmentation importante des prêts.

Le total des prêts comptabilisés dans la déclaration d'APD de la France à l'OCDE a été multiplié par près de trois, entre 2005 et 2009. Cette augmentation est principalement due à la hausse de 830 millions d'euros des prêts permettant de financer des projets, dont le montant s'établit en 2009 à plus d'1,8 milliard d'euros.

Prêts bilatéraux , en M€

2005

2006

2007

2008

2009

TOTAL Prêts

658

764

733

1329

1873

La multiplication par trois de prêts consentis par la France au titre de l'aide au développement a été rendue possible par un effet de levier croissant entre le volume total de prêts concessionnels octroyés et l'effort budgétaire correspondant (principalement sous forme de bonifications de taux d'intérêt). Autrement dit, on a prêté plus pour un montant de bonification stable ou en légère augmentation.

Comme le souligne le Plan d'Orientation stratégique de l'AFD : « L'effet de levier (autorisations de financement déclarées en APD rapportées au « coût Etat » de la bonification) est passé de 3,1 en 2006 à 6,7 en 2010 ».

L'augmentation de cet effet de levier constitue d'ailleurs un objectif de performance de l'AFD dans la loi de finances.

Le projet annuel de performance pour 2013 indique ainsi que le contrat d'objectifs de l'AFD doit être un effet de levier de 9,4 en 2013 contre 6,7 en 2009 44 ( * ) , comme le retrace le tableau suivant :

INDICATEUR 2.1 : Montant d'aide au développement apportée par l'AFD sous forme de prêt par euro de subvention de l'Etat (du point de vue du contribuable)

Unité

2010
Réalisation

2011
Réalisation

2012
Prévision PAP 2012

2012
Prévision actualisée

2013
Prévision

2015
Cible

Montant d'aide au développement apportée par l'AFD sous forme de prêt par euro de subvention de l'Etat

6,7*

10,1

9,3*

9,1*

9,4*

9,1*

Source PLF 2013

L'augmentation du montant des prêts pour un coût relativement stable constituait ainsi un objectif tel qu'il figure parmi le peu d'indicateurs de performance de la mission aide au développement.

L'accroissement des prêts dans l'APD française déclarée est en effet lié à la possibilité offerte par les règles de l'OCDE de déclarer, au titre de l'aide au développement, des prêts à des taux proches du marché. Cette possibilité permet d'augmenter les décaissements éligibles à l'APD à bonifications constantes.

Votre commission retrouve dans cet indicateur budgétaire le symbole d'une « programmation guidée par l'objectif des 0,7 % du RNB », selon l'expression retenue lors des travaux du bilan évaluatif de la politique française de coopération au développement entre 1998 et 2010.

Elle rejoint l'appréciation selon laquelle le pilotage de la politique de coopération au développement répond en partie à une logique d'affichage qui vise à augmenter le volume de l'aide consacrée par la France comptabilisée par le CAD selon l'agrégat de l'APD. Les discussions menées en Co-CICID concernant la programmation des crédits budgétaires portent ainsi en grande partie sur l'impact des arbitrages budgétaires effectués en termes d'effet de levier sur le montant d'APD (et donc sur le lien entre le coût budgétaire des actions programmées et leur impact sur les montants d'APD déclarés au CAD-OCDE). Ce raisonnement à rebours incite à choisir les instruments en fonction de leur comptabilisation en APD, plutôt qu'en fonction des orientations stratégiques préétablies. Il impacte les décisions relatives au choix entre prêts et dons, et influence par extension les choix d'intervention dans des zones géographiques ne figurant pas nécessairement dans les zones prioritaires de la France.

2. Cette situation contraste avec celle de la moyenne des pays du CAD

La situation de la coopération française au regard de l'équilibre entre les dons et les prêts doit s'apprécier au regard des autres coopérations. La comparaison avec la Grande-Bretagne, qui a choisi un modèle inverse en concentrant son action sur les dons, permet d'éclairer cette singularité française.

La France a, en effet, nettement plus recours aux prêts que le Royaume-Uni. Sur la période 2005-2009, les montants déclarés en prêts ont été plus de 3 fois supérieurs en France qu'outre-Manche.

Prêts bruts, hors prêts de refinancement de la dette

en M$ courants

2006

2007

2008

2009

2010

France

1 149

1 124

2 146

3 536

2 463

Royaume-Uni

468

802

780

554

687

Depuis 2005, la France a multiplié son volume de prêts par 3,3 contre 2 au Royaume-Uni.

La préférence française pour les prêts s'observe également lorsque l'on compare avec la moyenne des pays du CAD. La proportion de prêts bruts dans l'APD nette totale est deux fois supérieure en France à la moyenne des pays du CAD, la proportion de prêts nets y est six fois supérieure en France à la moyenne des pays du CAD.

Part des Dons (hors annulations
de dette) dans l'APD totale brute

Part des prêts bruts
dans l'APD totale brute

Année

France

Donneurs du CAD

France

Donneurs du CAD

2000

70%

70%

9%

15%

2001

69%

72%

11%

13%

2002

60%

72%

11%

11%

2003

53%

72%

7%

10%

2004

63%

73%

8%

9%

2005

59%

65%

7%

7%

2006

62%

69%

7%

8%

2007

76%

77%

9%

9%

2008

74%

75%

16%

9%

2009

69%

81%

19%

11%

2010

66%

79%

22%

12%

*les prêts nets représentent des montants négatifs car les prêts remboursés sont retranchés aux prêts accordés

Le total ne représente pas 100% car les réaménagements de dette et les souscriptions en capital ne sont pas représentés.

Comme le soulignent les travaux du bilan évaluatif de la politique française de coopération au développement entre 1998 et 2010 :  au sein de l'APD française, la part des prêts est passée de 10 % en 2005 à 26 % en 2010 ; cette hausse constitue une spécificité française par rapport à d'autres bailleurs tels que les Etats-Unis, l'Allemagne ou le Royaume-Uni.

Ce décrochage de la France est manifeste depuis 2007.

La comparaison de l'aide française par rapport à celle de ses principaux partenaires du Nord met en effet clairement en évidence le poids relatif particulièrement faible que représentent les dons français par rapport aux autres pays (39 % des versements d'APD net), alors qu'ils dépassent 50 % au Royaume-Uni, en Allemagne, au Canada et au Japon). Elle souligne également la part importante, en 2010, de l'effet des annulations de dette.

La comparaison permet aussi d'opposer le modèle du Royaume-Uni qui se caractérise par la faiblesse de ses prêts (2 % seulement). Dans le cadre de sa politique résolument orientée vers les dons, le Royaume-Uni prône par ailleurs l'utilisation de l'aide budgétaire, au nom de l'appropriation de l'aide par les pays bénéficiaires (mais aussi de la réduction récente de l'effectif du DFID), et privilégie l'amélioration des politiques publiques plutôt que l'aide-projet.

Le Japon est l'un des pays qui, avec la France, recourt le plus aux prêts, conformément à l'approche globale du pays. Centrée sur la croissance économique, celle-ci favorise le recours aux prêts, mais également les activités de coopération technique dans une perspective de meilleure appropriation et de renforcement des capacités des pays partenaires.

Selon l'évaluation « ce recours croissant au prêt n'est que partiellement guidé par des considérations de nature stratégique. Ces dernières portent surtout sur le développement des infrastructures et l'appui au secteur privé, gages de développement au sens du Document cadre, mais en dissonance avec les priorités géographiques.

« En effet, l'équilibre entre prêts et dons ne semble pas être utilisé de manière optimale pour permettre de répondre aux priorités géographiques mises en avant dans le Document cadre qui prévoient, de manière simplifiée : (i) Le recours aux financements les plus concessionnels, soit principalement aux dons et aux prêts très concessionnels en faveur des 17 pays prioritaires (et des PMA), et (ii) le recours à des prêts faiblement concessionnels dans les pays méditerranéens et dans les pays émergents. »

C. LA PRÉFÉRENCE FRANÇAISE POUR LES PRÊTS LIMITE SA CAPACITÉ À INTERVENIR DANS LES PAYS LES PLUS PAUVRES ET LES SECTEURS LES MOINS RENTABLES

1. Si l'opposition entre les dons et les prêts doit être relativisée

Les interventions françaises dans les pays en développement sous forme de prêts sont à des conditions extrêmement variables aussi bien en matière de taux que de bonification, ou même de durée, comme l'illustre le tableau suivant relatif aux conditions de prêts de l'AFD. Cette gradation entre les différentes catégories de prêts permet de relativiser l'opposition entre ces deux instruments.

Par ailleurs, l'analyse des instruments financiers de l'aide au développement française ne saurait se réduire à celle des dons et des prêts. Une des caractéristiques des interventions de l'AFD est en effet d'avoir la possibilité de déployer une palette d'instruments extrêmement variés. Cette variété constitue l'une des forces de la coopération française qui lui permet d'adapter ses différents instruments -fonds de garanties, financements souverains et non souverains, financements structurés, accompagnement des acteurs- au profil des pays partenaires.

Ainsi, les 2,2 milliards d'euros d'intervention de l'AFD en Afrique prennent des formes très variées, comme l'illustre le graphique suivant.

Source : AFD

2. La capacité d'intervenir sous forme de prêts dépend de la capacité d'endettement des pays ou des secteurs concernés, de ce fait, la diminution des dons n'est pas cohérente avec les objectifs géographiques et sectoriels de la France

En l'absence de crédits en montant suffisant pour intervenir de façon significative sous la forme de subventions, la coopération française cherche à soutenir la croissance des pays en voie de développement par le biais de prêts, en prenant soin de ne pas conduire les pays aidés à des situations de surendettement, comme ce fut le cas par le passé. Pour éviter ce risque, la communauté internationale a, lors des différents processus d'annulation de dettes, défini un cadre d'analyse permettant de déterminer les pays susceptibles d'avoir recours de nouveaux à l'emprunt.

Ce cadre dit « de la viabilité de la dette », défini conjointement par le FMI et la Banque mondiale pour les pays bénéficiant ou ayant bénéficié d'allègement de leur dette externe au titre de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), et/ou bénéficiant du guichet concessionnel de la Banque mondiale (AID), classe les pays en risque faible (pays « vert »), modéré (« jaune ») ou élevé (« rouge ») de surendettement.

Jusqu'au début de l'année 2010, les prêts souverains de l'AFD en faveur des pays à faible revenu ayant accès au seul guichet concessionnel de la Banque mondiale étaient réservés à ceux de ces pays dont le risque de surendettement est jugé faible (pays « vert »).

Or, parmi les 39 pays d'Afrique subsaharienne qui disposent d'une telle analyse, 14 pays seulement sont « verts » (Niger, Sénégal, Madagascar, Éthiopie, Ouganda, Tanzanie, Mozambique, Zambie, Libéria, Nigeria, Kenya, Cameroun, Cap Vert, Congo).

De nombreux pays parmi les pays prioritaires de la coopération française sont soit dans la catégorie« jaune » (Bénin, Mali, Mauritanie, Centrafrique, Tchad, Togo, Ghana, Sierra Leone, Lesotho, Rwanda, Malawi), soit dans la catégorie « rouge » (Burkina Faso, RDC, Guinée, Gambie, Sao-Tome, Djibouti, Burundi, Guinée-Bissau,). 5 pays sont par ailleurs en situation de surendettement : Comores, Côte d'Ivoire, Guinée, Zimbabwe, Soudan 45 ( * ) .

Cette situation explique que les prêts de l'AFD soient presque absents des 14 pays prioritaires sur la période.

La conjonction de cette situation et de la faiblesse des subventions conduisent à ce que les 14 pays prioritaires de la coopération française ne représentent que 24 % des engagements de l'AFD en Afrique.

De même la situation des pays francophones est telle que les engagements du groupe AFD en Afrique subsaharienne -qui sont à 80 % des prêts- concernent majoritairement les pays anglophones.

Ainsi, 66 % des engagements ont concerné des pays anglophones, 33 % des pays francophones et 1 % des pays lusophones.

La répartition des engagements de l'AFD en Afrique subsaharienne
par instrument et par type de pays en 2010 (en M€)

Subventions

Prêts

Garanties

Total

En %

14 pays pauvres prioritaires

156

211

66

433

24 %

PMA non prioritaires

33

151

17

201

11 %

Pays à faible revenu

0

419

17

436

25 %

Pays à revenu intermédiaire

14

426

42

482

27 %

Multi-pays

102

100

8

209

12 %

Total

321

1 306

150

1 778

100 %

La tendance ces dernières années a été, en outre, marquée par une diminution des subventions à ces pays comme l'illustre ce tableau issu du DPT pour 2013.

Pays pauvres prioritaires

2006

2007

2008

2009

2010

Subventions

271

246

243

205

199

Reste, l'aide multilatérale et les prêts. Votre commission a bien noté qu'en janvier 2010, le ministre des finances a assoupli la politique de prêt, l'AFD étant désormais autorisée à octroyer des prêts aux pays pauvres prioritaires dont le risque de surendettement est jugé modéré et qui sont sous programme FMI.

Cette mesure devrait permettre la poursuite de la hausse des engagements de l'AFD en Afrique subsaharienne, pour atteindre 3,2 milliards d'euros en 2013, en lien avec les engagements pris par le Président de la République d'y consacrer 10 milliards de financements sur 2008-2012.

Evolution prévisionnelle des engagements de l'AFD
en Afrique subsaharienne

Les objectifs d'accroissement des engagements sous forme de prêts en Afrique conduiront l'AFD à accroître ses engagements là où l'opinion publique, et dans une moindre mesure les pouvoirs publics, l'attendent moins, c'est-à-dire dans l'Afrique non francophone, plutôt plus riche, dans des secteurs souvent intrinsèquement rentables, à travers des prêts de moins en moins concessionnels.

L'assouplissement de la politique de prêts devrait cependant permettre de promouvoir la croissance prioritaire de la coopération française.

Pour des pays qui sortent d'un processus de désendettement ou des secteurs rentables, comme l'électricité ou, à un degré moindre, l'eau, un recours accru aux prêts constitue un moyen de financement des investissements. Compte tenu des besoins de financement de l'Afrique subsaharienne en matière d'infrastructures, ces investissements ne pourront pas se faire sans un recours massif aux prêts.

Mais à l'exception du Ghana pour lequel la plupart des engagements sont opérés sous forme de prêts, les autres pays pauvres prioritaires de la coopération française sortent d'un processus de désendettement et sont inéligibles aux prêts, conduisant à réorienter l'aide française, accordée sous forme de prêts, vers des pays africains « non prioritaires », comme l'Afrique du sud ou le Kenya.

Si l'AFD a réussi à concentrer 60 % de l'effort financier de l'AFD en Afrique subsaharienne en 2010, les pays pauvres prioritaires n'en concentrent que 25 %.

Il faut toutefois veiller à ce que le niveau des objectifs d'octroi ne conduise pas à une nouvelle crise de surendettement. De ce point de vue l'assouplissement de la politique française de prêts constitue un risque supplémentaire et devra faire l'objet d'une évaluation régulière.

3. La montée en puissance des prêts aura, à terme, des conséquences paradoxales sur le montant de l'aide au développement déclarée de la France

Comme il a été indiqué lors de la présentation de l'APD déclarée de la France dans les années passées, la montée en puissance des prêts dans les années 90 et 2000 aura pour conséquence, dans les prochaines années, une croissance importante des remboursements qui viendront en déduction de l'aide déclarée.

C'est déjà le cas, par exemple, pour les prêts de la Réserve pays émergents du programme 851, qui sont déclarés au titre de l'APD. Actuellement, les remboursements en capital au titre du programme 851 sont supérieurs aux déboursements au titre des prêts de la Réserve pays émergents, comme le souligne le document de politique transversale.

Impact APD et budgétaire des prêts de la Réserve pays émergents
(en millions d'euros)

Programme

LFI 2011
solde budgétaire

Estimation APD 2011

PLF 2012
solde budgétaire

Estimation
APD 2012

851 - Prêts à des Etats étrangers, de la réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d'infrastructure

76

-66

21

-103

dont versements

350

dont versements

390

dont remboursements

-416

dont remboursements

-421 (1)

dont remboursements par refinancements

-3

Source : DG Trésor (septembre 2011)

Au moment même où la communauté internationale se donnera rendez-vous pour apprécier la capacité de chaque pays à atteindre l'objectif de 0,7 % en 2015, la France risque de voir le montant de son APD déclarée largement amputé par le montant croissant des remboursements.

En outre, compte tenu du niveau de concessionalité des prêts consentis par l'AFD, une partie d'entre eux, proches des conditions du marché, risque de ne plus être à terme comptabilisés au titre de l'APD.

Remboursements de prêts en M€

2012

2013

2014

2015

2016

AFD

424

489

560

714

808

RPE

404

380

359

329

309

FMI

41

40

93

174

nd

Total

870

909

1 012

1 218

1 117


* 44 L'effet de levier correspond au rapport entre le montant total des engagements en prêts concessionnels (souverains et non souverains) de l'AFD et le coût budgétaire correspondant. Un prêt d'un montant de 100 M€ avec un coût budgétaire de 20 M€ correspond ainsi à un effet de levier de 5. L'objectif fixé pour l'effet de levier correspond à un équilibre entre la maximisation de l'efficacité de la dépense publique - qui se traduit en particulier par le développement des activités de prêt souverain faiblement ou non bonifié à des pays émergents (Chine, Indonésie et Brésil notamment) - et la priorité réaffirmée aux pays d'Afrique - auxquels un niveau élevé de bonification doit être consenti.

* 45 Par ailleurs, 9 pays d'Afrique subsaharienne ne sont pas soumis à ce cadre d'analyse (Gabon, Afrique du Sud, Botswana, Namibie, Swaziland, Maurice, Seychelles, Guinée Équatoriale et Angola).

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