Avis n° 153 (2012-2013) de M. Alain HOUPERT , fait au nom de la commission du développement durable, déposé le 22 novembre 2012

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N° 153

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire (1) sur le projet de loi de finances pour 2013 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME VIII

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

RECHERCHE EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Par M. Alain HOUPERT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Raymond Vall , président ; MM. Gérard Cornu, Ronan Dantec, Mme Évelyne Didier, MM. Philippe Esnol, Alain Houpert, Hervé Maurey, Rémy Pointereau, Mmes Laurence Rossignol, Esther Sittler, M. Michel Teston , vice-présidents ; MM. Pierre Camani, Jacques Cornano, Louis Nègre, secrétaires ; MM. Joël Billard, Jean Bizet, Vincent Capo-Canellas, Yves Chastan, Philippe Darniche, Marcel Deneux, Michel Doublet, Jean-Luc Fichet, Jean-Jacques Filleul, Alain Fouché, Francis Grignon, Mme Odette Herviaux, MM. Benoît Huré, Daniel Laurent, Alain Le Vern, Jean-François Mayet, Stéphane Mazars, Robert Navarro, Charles Revet, Roland Ries, Yves Rome, Henri Tandonnet, André Vairetto, Paul Vergès, René Vestri.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 235 , 251 à 258 et T.A. 38

Sénat : 147 et 148 (annexe n° 22 ) (2012-2013)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Dans un contexte où une grave crise économique se double d'une crise écologique plus ancienne et plus profonde, la stratégie nationale de développement durable 2010-2013, adoptée le 27 juillet 2010 par le comité interministériel pour le développement durable, identifie neufs défis, parmi lesquels : une consommation et une production durables, la société de la connaissance, le changement climatique et l'énergie, le transport et la mobilité durables, la conservation et la gestion durable de la biodiversité et des ressource naturelles, la santé publique, la prévention et la gestion des risques.

Chacun de ces défis implique pour la France de réaliser autant de sauts technologiques, indispensables pour réussir ce qu'il est désormais convenu d'appeler la transition énergétique ou la transition écologique. Il est donc essentiel de maintenir les capacités publiques de recherche au niveau d'excellence atteint par notre pays.

Les crédits inscrits, au sein de la mission « Recherche et enseignement supérieur », sur le programme « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables » y contribuent très directement. En effet, ces moyens viennent alimenter les budgets de huit organismes de recherche et d'expertise, qui sont les opérateurs de ce programme.

La présentation des activités et des ressources financières des plus importants d'entre eux mettra en évidence le caractère stratégique de leur participation, en dépit d'une forte contrainte budgétaire, à l'effort national de recherche dans une perspective de développement durable.

*

* *

Lors de sa réunion du 28 novembre 2012, la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables » de la mission « Recherche et enseignement supérieur » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2013.

PREMIÈRE PARTIE : UN PROGRAMME CRUCIAL POUR LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ET ÉCOLOGIQUE

I. UN ENSEMBLE DE SUBVENTIONS À DES OPÉRATEURS DE RECHERCHE

A. LA PLACE DU PROGRAMME 190 DANS LA MISSION « RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR »

La mission « Recherche et enseignement supérieur » est l'une des plus importantes du budget de l'Etat, puisque ses moyens dans le projet de loi de finances pour 2013 s'élèvent à 25,964 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 25,955 millions d'euros en crédits de paiement.

Ce volume important de crédits est réparti entre un bloc de 15 milliards d'euros en autorisations d'engagement pour les formations supérieures et la recherche universitaire, ainsi que pour la vie étudiante , soit 57,9 % du total de la mission, et un bloc de 10,9 milliards d'euros en autorisation d'engagement pour huit programmes de recherche différents , soit 42,1 % du total.

Evolution 2012-2013 des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur »

Le programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables » comporte pour 2013 un montant de 1,418 milliard d'euros en autorisations d'engagement, soit 5,5 % du total de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

En volume, il se classe au deuxième rang des programmes de recherche, après le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » (5,166 milliards d'euros en autorisations d'engagement), mais - de peu - avant le programme 193 « Recherche spatiale » (1,413 milliard).

Proportionnellement, le programme 190 représente 13 % du total des autorisations d'engagement inscrites dans le projet de loi de finances pour 2013 au titre des huit programmes de recherches de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Répartition des autorisations d'engagement pour 2013 des programmes de recherche

B. UNE MULTIPLICITÉ D'OPÉRATEURS

Près de 90 % des crédits sont affectés sous la forme de subventions pour charges de service public aux opérateurs du programme 190, qui sont des établissements publics : agences de moyens, d'une part, et organismes de recherche et d'expertise, d'autre part.

Trois d'entre eux sont rattachés à titre principal au programme : l'IFP Energies nouvelles, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), et l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR).

Les autres opérateurs bénéficiant de subventions issues du programme 190 sont rattachés à titre principal à d'autres programmes : le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) au programme 172, l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) au programme 206, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) au programme 181.

Le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) reçoit une subvention au titre du programme 190, mais n'est pas considéré comme un opérateur de l'Etat car plus de la moitié de ses ressources est d'origine privée.

II. DES CRÉDITS APPAREMMENT ÉPARGNÉS PAR LA RIGUEUR BUDGÉTAIRE

A. UN PROGRAMME EN LÉGÈRE HAUSSE EN CRÉDITS DE PAIEMENT

Le programme 190 couvre la recherche dans les domaines du développement durable, de l'énergie, des risques, des transports, de la construction et de l'aménagement. Grâce à son caractère transversal, il constitue un levier important de mise en oeuvre de la transition écologique et énergétique , ainsi que de la stratégie nationale de développement durable (SNDD).

Conformément à la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, ce programme participe à l'amélioration des connaissances sur les axes structurants des Grenelle de l'environnement et de la mer : amélioration énergétique des bâtiments ; harmonisation des outils de planification en matière d'urbanisme et de gestion des territoires ; transports plus respectueux de l'environnement et répondant aux besoins en mobilité ; réduction des consommations d'énergie et de leur contenu en carbone ; développement des énergies renouvelables ; préservation de la biodiversité ; maîtrise des risques ; enjeux de ville durable ; santé-environnement.

Il répond également aux orientations définies par la stratégie nationale de recherche et d'innovation (SNRI) de 2009, en particulier celles portant sur l'urgence environnementale et les écotechnologies.

Pour 2013, le programme 190 est présenté en très légère baisse de 0,3 % en autorisations d'engagement, pour s'établir à 1,418 milliard d'euros, mais en légère hausse de 2,1 % en crédits de paiement, pour atteindre 1,380 milliard d'euros. Il apparaît donc relativement épargné par l'effort général de rigueur, induit par la nécessité du redressement des finances publiques.

B. L'IMPACT DÉTERMINANT DES CHARGES NUCLÉAIRES DE LONG TERME DES INSTALLATIONS DU CEA

Toutefois, la bonne tenue des crédits du programme 190 s'explique surtout par l'ajustement à la hausse de la dotation pour les charges nucléaires de long terme des installations du CEA, qui progresse de près d'un tiers en 2013 pour atteindre 249 millions d'euros en autorisations d'engagement, comme en crédits de paiement. Or, il ne s'agit pas, à proprement parler, de dépenses de recherche.

Evolution 2012-2013 des crédits du programme « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables »

Si l'on ne tient pas compte du fort ajustement de cette dotation, dont les raisons seront évoquées plus loin, les autres actions du programme apparaissent en stagnation, voire en forte baisse. Ainsi, l'action 14 « Recherche partenariale dans le développement et l'aménagement durables » et l'action 15 « Recherche dans le domaine de l'aéronautique civile » diminuent toutes deux de près de 20 % en crédits de paiement.

III. DES INDICATEURS DE PERFORMANCE INÉGALEMENT PERTINENTS

Le programme 190 est structuré autour de six objectifs et onze indicateurs de performance.

A. LES OBJECTIFS DU PROGRAMME

L'objectif n° 1 vise à développer l'excellence des instituts de recherche au niveau européen et assurer l'efficience de la recherche. Il porte à la fois sur l'excellence de la recherche, qui traduit la capacité à atteindre un niveau de résultat, et sur son efficience, qui traduit la capacité à obtenir un résultat avec une moindre consommation de moyens.

L'objectif n° 2 vise à développer les recherches partenariales entre acteurs publics et entre acteurs publics et privés.

L'objectif n° 3 vise à accroître, par la recherche, la compétitivité et la sécurité nucléaires sur l'ensemble du cycle.

L'objectif n° 4 vise à soutenir, par la recherche, le développement des nouvelles technologies de l'énergie et de l'efficacité énergétique.

L'objectif n° 5 vise à produire les connaissances scientifiques et l'expertise nécessaires au maintien d'un très haut niveau de protection contre les risques nucléaires et radiologiques.

L'objectif n° 6 vise à favoriser l'essor d'une industrie aéronautique innovante et compétitive, génératrice de projets industriels économiquement viables pour le domaine du transport aérien durable.

B. LES INDICATEURS DE PERFORMANCE

L'objectif n° 1 se décline en quatre indicateurs de performance.

Les indicateurs 1.1 et 1.2 mesurent la production scientifique des principaux instituts de recherche du programme : le premier par le nombre de publications par chercheur dans des revues scientifiques internationales, le second par le taux de citation à deux ans des articles produits par les instituts concernés. Ces indicateurs progressent légèrement entre 2011 et 2012.

L'indicateur 1.3 mesure, d'une part, le montant des ressources générées par les brevets déposés par l'IFPEN rapporté aux dépenses de propriété intellectuelles afférentes, d'autre part, la proportion de ces ressources dans les charges directes de l'IFPEN. Cet indicateur tend à se dégrader entre 2011 et 2012, pour partie en raison d'un retournement de la conjoncture sur le marché des procédés pour le raffinage et la pétrochimie.

L'indicateur 1.4 mesure la part des financements européens du programme cadre de recherche et développement (PCRD) dans les recettes totales de recherche de cinq organismes du programme (CSTB, INERIS, IRSN, IFSTTAR, IFPEN). Il diminue en 2012 par rapport à 2011, mais en partie en raison d'une augmentation pour certains organismes plus rapide de leurs recettes totales de recherche.

L'objectif n° 2 se décline en deux indicateurs de performance.

L'indicateur 2.1 mesure l'effet d'entraînement des crédits incitatifs ministériels et de l'ADEME. Il est en progression en 2012 par rapport à 2011.

L'indicateur 2.2 mesure la part des contrats passés avec les industriels et les partenaires dans les ressources des instituts de recherche du programme. Pour 2012, elle varie entre 88 % pour la participation des industriels et des partenaires au financement de l'optimisation du nucléaire actuel par le CEA, et 9,6 % pour la participation des industriels et des partenaires au financement des recherches sur les nouvelles technologies de l'énergie par l'IFPEN.

L'objectif n° 3 , qui correspond à la première priorité du CEA pour améliorer la compétitivité et la sécurité de la production nucléaire, comporte un seul indicateur. Celui-ci mesure, d'une part, le taux d'atteinte des jalons du CEA fixés dans son contrat d'objectifs et de performance, d'autre part, le taux de grands projets d'investissement n'ayant pas dépassé de plus de 10 % leurs prévisions de coût initiales. Ces deux taux atteignent en 2012 des valeurs élevées de respectivement 91 % et 87 %.

L'objectif n° 4 comporte un seul indicateur, qui mesure le nombre de brevets déposés par le CEA et l'IFPEN dans le domaine des nouvelles technologies de l'énergie, ainsi que le montant des recettes que ces deux organismes de recherche en retirent. Le nombre des brevets tend à décroître entre 2011 et 2012, mais les recettes afférentes augmentent.

L'objectif n° 5 comporte un seul indicateur également, qui mesure la qualité des prestations de l'IRSN sous forme de note sur 20 attribuée par voie d'enquête par les partenaires de l'institut, services de l'Etat et autorité de sûreté. Elle se maintient en 2012 à un niveau élevé de 17/20.

L'objectif n° 6 se décline en deux indicateurs de performance.

L'indicateur 6.1 mesure le taux de remboursement cumulé des avances récupérables allouées par l'Etat aux industriels du secteur de la construction aéronautique civile. Ce taux devrait atteindre 60,9 % en 2012.

L'indicateur 6.2 mesure le taux de remboursement cumulé des principales avances récupérables rapporté au taux prévu à l'origine et à même échéance. Ce taux était de 73,3 % en 2011.

Votre rapporteur pour avis relève le caractère inégalement pertinent de ces divers indicateurs, qui parviennent difficilement à saisir sous un mode quantifié les aspects qualitatifs des politiques publiques de recherche.

SECONDE PARTIE : DES OPÉRATEURS SOUS CONTRAINTE BUDGÉTAIRE

I. L'AGENCE DE L'ENVIRONNEMENT ET DE LA MAÎTRISE DE L'ÉNERGIE

A. UNE CONTRIBUTION MULTIFORME À LA RECHERCHE EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Créée par la loi n° 90-1130 du 19 décembre 1990 sous forme d'établissement public à caractère industriel et commercial, l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) est l'aboutissement de plusieurs fusions :

- l'agence pour les économies d'énergie (AEE), créée en 1974, le commissariat à l'énergie solaire (COMES), créé en 1978, les comités géothermie et réseaux de chaleur, créés dans les années 1970, ont fusionné en 1982 pour devenir l'agence française pour la maîtrise de l'énergie (AFME) ;

- puis l'AFME, l'agence pour la qualité de l'air (AQA), créée en 1980, et l'agence nationale pour la récupération et l'élimination des déchets (ANRED), créée en 1975, se sont regroupées pour devenir l'ADEME en 1990.

Aujourd'hui placée sous la tutelle conjointe des ministères en charge de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et de l'enseignement supérieur et de la recherche, l'ADEME participe à la mise en oeuvre des politiques publiques dans les domaines de l'environnement, de l'énergie et du développement durable. Le décret du 28 mai 2009 confirme l'Agence comme opérateur clé de la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

Afin de leur permettre de progresser dans leur démarche environnementale, l'ADEME met à disposition des entreprises, des collectivités locales, des pouvoirs publics et du grand public ses capacités d'expertise et de conseil. Elle aide en outre au financement de projets de recherche, d'étude et d'investissements en matière de gestion des déchets, de préservation des sols, d'efficacité énergétique et d'énergies renouvelables, de qualité de l'air et de lutte contre le bruit.

Répartis sur les sites des services centraux à Angers (Maine-et-Loire), Paris et Valbonne (Alpes Maritimes), des vingt-six directions régionales, des trois représentations dans les territoires d'outre-mer et du bureau de représentation à Bruxelles, l'ADEME comptait, au 31 décembre 2011, 963 équivalents temps plein (ETP) permanents (+ 2,1 % par rapport à 2010), ce qui portait l'effectif total à 1 006 personnes , y compris les personnels détachés et mis à disposition. En 2013, une diminution de 15 emplois ETP rémunérés par l'ADEME est prévue par rapport à 2012.

Le budget de l'ADEME est l'addition d'un budget de base, qui correspond à celui de l'Agence avant le Grenelle de l'environnement qui supporte les actions traditionnellement mises en oeuvre par l'ADEME, et d'un budget dit « Grenelle ». Sur la période de programmation triennale 2011-2013, le budget de base a été fixé à 190 millions d'euros. Le budget « Grenelle », initialement fixé à 500 millions d'euros en autorisations d'engagement, a vu son montant ramené à 460 millions d'euros en 2012, en raison d'une mise en réserve de 40 millions d'euros pour financer les mesures issues de la table ronde nationale pour l'efficacité énergétique lancée par le ministère du développement durable le 31 mai 2011. Le budget global s'est donc élevé à 650 millions d'euros (hors mesures de soutien à la modernisation de l'éclairage public).

En outre, la gestion du fonds démonstrateur de recherche , initialement doté de 325 millions d'euros sur la période 2009-2012, avait été confiée à l'ADEME. Ce fonds a été clôturé en 2011, à hauteur de 160 millions d'euros, suite à la décision de confier à l'ADEME la gestion, pour un montant de 2,85 milliards d'euros, de quatre programmes d'investissements d'avenir . Dans ce cadre, l'agence accompagne les projets sélectionnés à l'issue d'appels à manifestations d'intérêts (AMI), depuis la réalisation de démonstrateurs de recherche jusqu'à la préindustrialisation, notamment dans les domaines du photovoltaïque, du solaire thermodynamique, du grand éolien, du stockage d'électricité, de la géothermie ou des réseaux électriques intelligents.

B. UNE FORTE DÉPENDANCE À LA TAXE GÉNÉRALE SUR LES ACTIVITÉS POLLUANTES

En crédits de paiement, les ressources financières de l'ADEME sont issues pour 75 % des fractions de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) affectées à l'agence (une part forfaitaire de la TGAP sur le stockage, ainsi que l'intégralité du produit de la TGAP sur l'incinération), pour 15 % des subventions pour charges de service public issues du programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables » et du programme 181 « Prévention des risques », et enfin pour 10 % de ressources propres. La fraction du produit de la TGAP que l'ADEME reçoit depuis 2008 a été plafonnée à 499 millions d'euros en loi de finances initiale 2012. Les subventions pour charges de service public s'établissaient à 65,5 millions d'euros en 2012.

Initialement, la programmation 2009-2011 avait prévu de doter les différents dispositifs financiers issus du Grenelle de l'environnement d'un montant, en autorisations d'engagement, de 1,7 milliard d'euros sur trois ans : 319 millions d'euros en 2009, 598 millions d'euros en 2010 et 814 millions d'euros en 2011. Ces crédits venaient renforcer le budget d'intervention de l'agence d'un montant annuel, avant la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, de 250 millions d'euros.

À l'été 2010, dans le cadre de la programmation triennale 2011-2013, les engagements du Grenelle de l'environnement ont été confirmés, mais la trajectoire budgétaire a été revue : le budget 2010 a été fixé à 480 millions d'euros (contre 598 millions d'euros initialement) et les engagements, sur 2011-2013, ont été fixés à 500 millions d'euros annuels au titre des fonds Grenelle, tandis que le budget de base de l'agence était ramené à 190 millions d'euros (en baisse par rapport à 2010, baisse qui portait principalement sur les actions de recherche et les contractualisations régionales). Le niveau des engagements de l'agence a ainsi globalement été porté à 690 millions par an sur la période de programmation triennale 2011-2013.

Cette nouvelle trajectoire reposait sur un étalement des engagements initiaux, avec un réajustement à la baisse des budgets 2010 et 2011. Au total, le niveau des engagements Grenelle devait être de 2,3 milliards d'euros sur 2009-2013 contre 1,7 milliard initialement programmé sur 2009-2011.

Suite à la loi de finances rectificative de décembre 2010 et aux modifications apportées à la progression des taux des TGAP stockage et incinération, les ressources de l'agence au titre de la part forfaitaire de la TGAP qui lui est affectée, ont été diminuées de 95 millions d'euros sur la période 2011-2013 :

Modifications des ressources de TGAP en LFR 2010

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

Programmation initiale

441

485

485

LFR 2010

431

435

450

Diminution

10

50

35

Source : ADEME

Sur ces bases, une mesure d'économie de 60 millions d'euros sur la période 2011-2013 est intervenue en gestion, à laquelle s'ajoute le redéploiement de 30 millions d'euros en 2012 pour le financement des mesures issues de la table ronde nationale pour l'efficacité énergétique (dont principalement la mesure relative à l'éclairage public).

Evolution des crédits d'intervention en autorisations d'engagement

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

Budget Grenelle initial

319

598

814

Budget Grenelle trajectoire 2010

319

480

500

500

500

Budget Grenelle trajectoire actuelle

319

480

480

460

400

Budget de base

240

220

190

190

190

Budget total

559

700

670

650

590

Source : ADEME

Votre rapporteur pour avis relève que la programmation en autorisations d'engagement est donc sensiblement inférieure aux moyens qui avaient été jugés initialement nécessaires pour atteindre les objectifs du Grenelle de l'environnement.

C. L'INQUIÉTANTE ÉROSION DES DOTATIONS BUDGÉTAIRES

À l'exception de certaines dépenses, les crédits incitatifs mobilisés par l'agence résultent d'engagements pluriannuels, sous forme de subventions accordées dans le cadre de systèmes d'aides à des projets dont la durée peut aller jusqu'à cinq ans. La consommation des crédits de paiement est donc décalée dans le temps. En raison de la montée en puissance progressive des moyens d'intervention, cette consommation a été, en début de période, sensiblement inférieure au niveau des autorisations d'engagement programmées.

Quant aux ressources en crédits de paiement (dotations budgétaires et TGAP), elles ont été volontairement fixées à un niveau qui était, dans un premier temps, supérieur aux dépenses. L'objectif était de constituer un fonds de roulement substantiel afin de stabiliser les trajectoires en autorisations d'engagement.

Evolution des ressources de l'ADEME en crédits de paiement

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

TGAP forfaitaire

363

445

431

435

435

TGAP incinération

39

44

48

64

64

Dotations budgétaires

(181 et 190)

53

100

83

73

58

Total

455

589

562

572

557

Source : ADEME

Les enjeux budgétaires de l'agence, pour la période de programmation triennale 2013-2015, doivent tenir compte à la fois des objectifs fixés par les lois Grenelle, de la soutenabilité du niveau des engagements et de la mise en oeuvre des politiques relatives aux déchets.

L'article 46 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement prévoit que le produit de la fiscalité sur les déchets (augmentation de la TGAP stockage et de la TGAP incinération) « bénéficiera prioritairement au financement d'actions concourant à la mise en oeuvre de la nouvelle politique des déchets, en particulier en termes de prévention et de recyclage, et devra, au plus tard fin 2015, avoir été intégralement affecté à cette politique ».

Cela supposerait non seulement une augmentation à hauteur de 240 millions d'euros en 2013 des moyens du plan déchets, alors que 190 millions d'euros seulement sont inscrits dans le projet de loi de finances, mais aussi la répercussion sur la part forfaitaire de la TGAP de l'augmentation des taux de la TGAP stockage fixés par la loi de finances rectificative pour 2010. Alors que, sur la base des données tendancielles pour la période 2013-2015, la TGAP affectée à l'agence devrait a minima progresser de 60 millions d'euros, elle se trouve en fait plafonnée à son niveau de 2012, soit 499 millions d'euros.

Par ailleurs, les dotations budgétaires des programmes 181 « Prévention des risques » et 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables » passent de 73 millions d'euros en 2012, à 58 millions d'euros en 2013, puis 36 millions d'euros en 2014 et 24 millions d'euros en 2015, soit une baisse de près de 70 % sur la période de programmation triennale.

Votre rapporteur pour avis appelle à une vigilance particulière pour que l'érosion des moyens mis en oeuvre ne remette pas en cause l'efficacité des politiques publiques confiées à l'agence. Malgré une baisse de la contribution de l'État au budget de l'ADEME d'environ 16 % en 2013, les objectifs nationaux préalablement fixés et les engagements législatifs devront être respectés.

II. LE COMMISSARIAT À L'ÉNERGIE ATOMIQUE ET AUX ÉNERGIES ALTERNATIVES

A. UNE RECHERCHE DIVERSIFIÉE AU-DELÀ DE LA SEULE ÉNERGIE NUCLÉAIRE

Créé par une ordonnance du 18 octobre 1945, le CEA est un établissement à caractère scientifique, technique et industriel placé sous la tutelle des ministres chargés de la recherche, de l'énergie, de la défense, du redressement productif et des finances.

La loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 a complété sa dénomination par la mention des énergies alternatives, afin de traduire l'implication du CEA, au-delà de sa compétence nucléaire initiale, dans le domaine des nouvelles technologies de l'énergie.

Dans le domaine des énergies « bas carbone », le CEA est aujourd'hui un acteur de recherche scientifique et technologique. Sa stratégie de recherche, qui s'appuie sur un socle de recherche fondamentale d'excellence, s'inscrit dans une perspective de développement durable en préparant la transition vers un bouquet énergétique décarboné, en promouvant des technologies économes en énergie, en accroissant la part des énergies renouvelables en substitution aux énergies fossiles, en tirant le meilleur parti des synergies entre le nucléaire et ces énergies renouvelables, et en se dotant d'outils d'analyse et de maîtrise de l'impact sur le climat et l'environnement.

Le CEA est un acteur reconnu dans le domaine de l'innovation et du soutien industriel par la recherche technologique : c'est le premier déposant public de brevets en France, avec 665 brevets déposés en 2011 et un portefeuille de 4 200 brevets prioritaires. Il contribue au renforcement de la compétitivité industrielle de la France :

- au moyen de plus de 500 partenariats de recherche et développement avec des industriels ;

- par une politique favorisant la création d'entreprises et de technologies innovantes, avec plus de 150 start-up créées depuis 1984 ;

- par une politique d'achats, portant principalement sur de hautes technologies, représentant environ 60 % du total de ses dépenses ;

- en structurant des écosystèmes de l'innovation au plan régional, national et européen.

Déployée sur cinq centres de recherche (Fontenay-aux-Roses, Saclay, Grenoble, Cadarache, Marcoule), la composante civile du CEA est organisée en quatre grands programmes et une mission :

- le programme « Energie bas carbone et recherche fondamentale associée » : énergie nucléaire, nouvelles technologies pour l'énergie, recherche fondamentale pour l'énergie et sciences du vivant pour l'énergie ;

- le programme « Technologies pour l'information et technologies pour la santé, et recherche fondamentale associée » : technologie pour l'information et la santé, micro-nanotechnologies, recherche fondamentale pour les technologies de l'information et de la santé, technologies des systèmes numériques et biotechnologies ;

- le programme « Conception et exploitation des très grandes infrastructures de recherche » : Installation européenne de rayonnement synchrotron (ESRF), Institut Laue-Langevin (ILL), réacteur de recherche Orphée, Grand accélérateur national d'ions lourds (GANIL), Système de production d'ions radioactifs en ligne (SPIRAL), synchrotron Soleil, Grand équipement national de calcul intensif (GENCI), accélérateur européen de particule X-FEL, réseau européen de suivi des gaz à effet de serre ICOS ;

- le programme « NRBS » : risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques et lutte contre le terrorisme ;

- la mission d'enseignement supérieur et de formation : le CEA s'implique fortement dans la transmission du savoir et la formation par la recherche dans ses domaines d'expertise, en promouvant la recherche de partenariats avec les établissements d'enseignement supérieur.

Le CEA est membre fondateur de quatre alliances nationales de recherche dans les domaines de l'énergie (ANCRE), des sciences de la vie et la santé (AVIESAN), des sciences et techniques numériques (ALLISTENE) et des sciences de l'environnement (ALLENVI).

Enfin, dans le cadre du programme d'investissements d'avenir , le CEA a été retenu, avec ses partenaires académiques et industriels, dans plus de cent projets.

B. UNE DIMINUTION DES CRÉDITS RÉELLEMENT DISPONIBLES

Le CEA reçoit des subventions au titre de trois programmes de la mission « Recherche et enseignement supérieur » : le programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables », mais aussi le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » et le programme 191 « Recherche duale (civile et militaire) ».

Evolution des dotations budgétaires allouées au CEA

Le total des dotations budgétaires au CEA progresse de 7,2 % en 2013 par rapport à 2012 pour s'établir à 1,42 milliard d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, notamment en raison de la progression du programme 190, qui augmente de 9,5 % pour s'établir à 769 millions d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement.

Toutefois, le montant réel de la dotation allouée en 2013 au CEA pour l'ensemble de ses activités civiles, hors ITER et hors fonds dédiés au démantèlement des installations nucléaires, n'est en fait que de 1,071 milliard d'euros , en retrait de 25,8 millions d'euros par rapport à la programmation de son contrat d'objectifs et de performance, soit une baisse de 2,4 %.

Cette diminution intervient alors que le CEA devra faire face en 2013 à des charges financières non prévues :

- le financement des conséquences du renforcement de la réglementation nucléaire sur ses installations suite à l'accident de Fukushima (+ 30 millions d'euros) ;

- le financement de la montée en charge de son principal investissement civil, le réacteur de recherche Jules Horowitz (+ 15 millions d'euros) ;

- le financement des charges liées aux cessations anticipées d'activité de ses personnels du fait de l'abaissement de l'âge de la retraite du mois de juillet 2012.

Pour couvrir ces charges nouvelles et absorber la baisse de sa subvention, le CEA devra dégager 48 millions d'euros d'économies. La baisse du budget disponible pour les unités de recherche en 2013 sera de l'ordre de 6 %, salaires compris. Compte tenu de l'existence de projets partenariaux et de contrats pluriannuels de maintenance, cette diminution ne pourra être absorbée que par l'intermédiaire d'une remise en cause de la programmation scientifique du CEA, les économies de gestion, déjà largement engagées, ne suffisant pas.

C. LA BUDGÉTISATION DU FINANCEMENT DES CHARGES NUCLÉAIRES DE LONG TERME

Depuis 2004, et jusqu'en 2010, le financement des dépenses de démantèlement des sites nucléaires du CEA était principalement assuré par des actifs financiers immédiatement disponibles, sanctuarisés au sein de deux fonds dédiés , l'un pour les installations civiles, l'autre, plus récent, pour les installations de défense. Ces actifs financiers ont été constitués, pour l'essentiel, au moyen des soultes versées par d'autres exploitants nucléaires lors de la reprise de responsabilité du CEA sur certains sites nucléaires.

Fin décembre 2010, ces actifs financiers représentaient 716 millions d'euros de disponibilités. Or, la seule annuité 2011 des travaux de démantèlement des installations du CEA a représenté un coût de 675 millions d'euros. L'épuisement des fonds est donc total depuis février 2012.

Un nouveau système de financement a en conséquence été mis en place. L'Etat a signé un convention-cadre avec le CEA, le 19 octobre 2010, s'engageant à couvrir le coût du démantèlement et à donner de la visibilité au CEA quant au rythme des apports budgétaires au moyen de conventions triennales glissantes. Cette visibilité est importante pour la conduite opérationnelles des travaux et la capacité du CEA à contracter de manière pluriannuelle avec des fournisseurs, ce qui est indispensable pour ce type d'opérations.

Au lieu d'un financement par vente d'actifs positionnés dans les fonds, le CEA bénéficie depuis 2012 de deux sources de financement :

- d'une part, une subvention budgétaire en hausse de 20 millions d'euros par rapport à 2011, pour atteindre 189 millions d'euros, et qui est inscrite au programme 190 ;

- d'autre part, le rachat par l'Etat des actions d'AREVA détenues par le CEA , pour un montant de 214 millions pour la première fois en 2012.

Pour l'année 2013 et au-delà, ce système de financement mixte devrait perdurer, avec 418 millions d'euros de rachat d'actions et 249 millions d'euros de subvention.

Financement des dépenses de démantèlement des installations du CEA

La subvention devrait encore progresser de 60 millions en 2014, puis à nouveau de 60 millions en 2015.

Toutefois, votre rapporteur pour avis observe que la totalité des actions d'AREVA positionnées sur les fonds dédiés auront été rachetées par l'Etat en 2015, et que le besoin de budgétisation des fonds dédiés du CEA atteindra brutalement plusieurs centaines de millions d'euros supplémentaires dès 2016.

III. L'IFP ÉNERGIES NOUVELLES

A. UNE RECHERCHE ÉLARGIE AU-DELÀ DES SEULS PRODUITS PÉTROLIERS

L'IFP Énergies nouvelles (IFPEN) est un établissement public national à caractère industriel et commercial (EPIC) de recherche, d'innovation et de formation intervenant dans les domaines de l'énergie, du transport et de l'environnement, placé sous la tutelle du ministère chargé de l'énergie.

Héritier de l'Institut français du pétrole (IFP), établissement professionnel créé en 1943 et transformé en EPIC par la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, l'IFPEN tire sa dénomination actuelle de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement. Son changement d'appellation témoigne de la mise en adéquation de ses missions avec les objectifs du Grenelle de l'environnement et la réorientation de ses activités de recherche appliquée vers les nouvelles technologies de l'énergie (NTE).

En application de l'article L. 144-2 du code de l'énergie, l'IFPEN a pour objet, dans les domaines de l'énergie, du transport et de l'environnement, pour ce qui concerne le développement des technologies et matériaux du futur :

- la réalisation d'études et de recherches dans les domaines scientifique et technique et la valorisation sous toutes formes de leurs résultats ;

- la formation de personnes capables de participer au développement des connaissances, à leur diffusion et à leur application ;

- l'information des administrations, de l'industrie, des techniciens et des chercheurs sur les connaissances scientifiques et les techniques industrielles.

L'IFPEN peut, pour valoriser le résultat de ses activités, prendre des participations dans des sociétés industrielles ou commerciales, que ce soit directement ou par le biais de structures de capital investissement. Dans les faits, ces sociétés interviennent dans des secteurs très variés : procédés catalytiques, régénération et conditionnement de catalyseurs, raffinage et pétrochimie, carburants alternatifs (Axens, Eurecat), ingénierie des fours de raffinage, pétrochimie et production d'hydrogène (Heurtey Petrochem), ingénierie du traitement de gaz naturel (Prosernat), ingénierie du transport et du stockage géologique du CO 2 (Geogreen), ingénierie pour les groupes motopropulseurs (D2T), conseil et logiciels en géosciences (Beicip-Franlab, Tech'Advantage, IFP Technologies Canada), formation (IFP Training), récupération assistée des hydrocarbures par les polymères (Poweltec)...

L'IFPEN accompagne également le développement de petites et moyennes entreprises et de petites et moyennes industries (PME-PMI) dans le cadre d'accords de collaboration leur permettant de bénéficier de son savoir-faire technique et juridique. À titre d'illustration, l'IFPEN a apporté à la start-up Ozoval ses compétences en génie des procédés et en conception d'équipements industriels afin d'adapter la technologie d'ozonation hybride (procédé de traitement de l'eau et de l'air par oxydation sans ajout de produits chimiques, permettant aux machines à eau de fonctionner en boucle) au recyclage des eaux usées des stations de lavage automobile. L'établissement public a également apporté son appui à la société Desautel, leader européen des extincteurs et des matériels incendie, pour développer un nouveau concept de lance à incendie dédié aux feux en milieux confinés.

B. LES PRIORITÉS STRATÉGIQUES DE L'ÉTABLISSEMENT PUBLIC

L'IFPEN est lié à l'État par un contrat d'objectifs et de performance (COP) pour la période 2011-2015 , qui confirme et amplifie son engagement dans le domaine des NTE, tout en renforçant sa contribution au développement de la compétitivité technologique des industries pétrolières, parapétrolières et automobile.

Ce COP s'articule autour de cinq priorités stratégiques :

- la priorité « Énergies renouvelables » donne pour objectif à l'IFPEN de travailler à la production, à partir de sources renouvelables, de carburants, d'intermédiaires chimiques et d'énergie pour lutter contre l'effet de serre responsable du changement climatique et limiter la dépendance du secteur des transports au pétrole (transformation de la biomasse, développement de solutions technologiques d'exploitation des énergies marines...) ;

- la priorité « Production éco-responsable » confie à l'IFPEN le soin de travailler à la production d'énergie en réduisant l'impact sur l'environnement (développement de procédés de captage, de transport et de stockage géologique du CO 2 pour lutter contre le réchauffement climatique, mise au point de technologies permettant d'optimiser l'utilisation de l'eau par l'industrie...) ;

- la priorité « Transports innovants » vise à axer la recherche et développement menée par l'IFPEN sur le développement de transports économes et à faible impact environnemental (conception et finalisation de solutions technologiques « moteurs propres à haut rendement » pour réduire la consommation des véhicules et limiter leur impact sur l'environnement, mise au point de motorisations à faibles émissions de CO 2 pour le transport aérien...) ;

- la priorité « Procédés éco-efficients » oriente l'action de l'IFPEN sur le développement de procédés et de produits éco-efficients permettant de produire, à partir de ressources fossiles variées (pétroles technologiques, charbon, gaz), des carburants et intermédiaires chimiques à faible impact environnemental ;

- la priorité « Ressources durables » incite l'IFPEN à proposer des technologies respectueuses de l'environnement et capables de repousser les limites actuelles des réserves d'hydrocarbures (mise au point d'outils de simulation avancés pour la connaissance du sous-sol et de technologies respectueuses de l'environnement permettant l'accroissement des réserves et la production d'hydrocarbures).

C. UN BUDGET DÉFICITAIRE

Pour mener à bien les actions prévues par son contrat d'objectifs et de performance, l'IFPEN bénéficie d'une dotation budgétaire de l'État, rattachée exclusivement à l'action 10 « recherche dans le domaine de l'énergie » du programme 190.

Le projet de loi de finances pour 2013 envisage d'accorder 146,6 millions d'euros de subvention pour charges de service public à l'IFPEN en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, pour couvrir ses dépenses de fonctionnement. Alors que les crédits de l'action 10 augmentent de 6,8 millions par rapport à 2012, la dotation allouée à l'IFPEN reste quasiment stable en 2013 , enregistrant une diminution de 41 242 euros, soit une baisse de 0,03 % seulement.

Toutefois, cette simple stabilisation de la dotation budgétaire de l'IFPEN rompt avec une logique de diminution de son montant observée depuis dix ans. En effet, le montant des subventions pour charges de service public allouées à l'IFPEN a été réduit de 58,6 millions d'euros courants entre 2002 et 2013, soit une baisse de plus de 40 % en euros constants. La diminution de ce montant a été particulièrement marquée en 2011
(- 19,8 millions d'euros) et dans une moindre mesure en 2012 (- 4,8 millions d'euros).

Votre rapporteur pour avis salue donc la décision de ne pas diminuer davantage, en 2013, la dotation budgétaire de l'IFPEN, qui a connu depuis 2002 une pression budgétaire très supérieure à celle de la plupart des autres organismes de recherche et développement opérateurs de l'État. Néanmoins, cette décision ne devrait pas suffire à résoudre le problème du déficit budgétaire de cet établissement public, récurrent depuis trois ans.

Évaluées à 1,959 millions d'euros en 2011, les pertes de l'IFPEN ont en effet été estimées à 6,892 millions d'euros pour 2012. Elles pourraient atteindre entre 5,8 et 11,8 millions d'euros en 2013, selon les règles fiscales qui seront appliquées par l'établissement en matière de taxe sur la valeur ajoutée.

Ce déficit budgétaire se trouve creusé par une diminution récente des ressources propres de l'établissement , qui ont baissé de 4,6 millions d'euros entre 2011 et 2012. En effet, ces ressources propres, principalement tirées des projets conduits en partenariat avec des industriels, des prestations rendues à ces derniers, des redevances versées au titre des procédés brevetés par l'IFPEN, et des dividendes versés par les filiales de l'établissement, sont très dépendantes du ralentissement de la croissance économique, de la diminution des commandes et de l'accroissement de la concurrence. Elles pourraient encore diminuer en 2013, les prévisions de l'établissement faisant état d'une perspective de réduction de l'ordre de 8 millions d'euros.

Le montant total des ressources propres de l'IFPEN représente toutefois encore près de la moitié des ressources totales de l'établissement. Cette situation est relativement singulière, la plupart des établissements publics de recherche français ne parvenant pas à financer plus de 50 % de leur budget par leurs ressources propres.

Afin de faire face à ces difficultés budgétaires, l'IFPEN devra poursuivre ses efforts, d'une part, pour maintenir le niveau de ses ressources propres, d'autre part, pour réduire le montant de ses charges.

Outre l'augmentation des taux de redevances perçues auprès des filiales commercialisant les procédés, produits et logiciels issus de la recherche qu'il mène, l'IFPEN s'est déjà engagé dans une procédure de ventes d'actifs, pour plus de 27 millions d'euros entre 2009 et 2012, afin de financer son programme immobilier et participer aux investissements d'avenir (plateformes de démonstration, pilotes...) sans avoir recours à sa dotation budgétaire.

L'établissement est par ailleurs invité à rester très actif auprès des organismes extérieurs de financement et à continuer, comme il le fait déjà, à répondre systématiquement aux appels à projets entrant dans son domaine d'activités (Union européenne, ADEME, fonds FEDER, fonds régionaux...), même si le niveau de ressources propres provenant de ces financements a peu de perspectives d'augmentation.

L'IFPEN sera tenu, en parallèle, de poursuivre les efforts qu'il a entrepris pour réduire ses frais de fonctionnement et d'investissements courants, qui ont déjà diminué de plus de 5 % en euros courants entre 2009 et 2013. L'établissement envisage ainsi en 2013 une baisse de 6 millions d'euros de son budget de fonctionnement par rapport à 2012 et une baisse de 2 millions d'euros de ses investissements courants.

Enfin, l'IFPEN devra chercher, cette année encore, à maîtriser ses dépenses de personnel. Celles-ci ont été estimées à hauteur de 148,5 millions d'euros dans le budget prévisionnel 2012. Le projet de loi de finances prévoit une réduction de 3 % des effectifs de l'IFPEN en équivalents temps plein, qui passeront de 2 022 ETP en 2012 à 1 961 en 2013 (- 61 ETP). Cette diminution significative a déjà été prise en compte par l'IFPEN, qui a accéléré dès 2011 ses efforts de réduction d'effectifs en les ciblant sur une partie des personnels de recherche (notamment recrutés en contrats à durée déterminée), des thésards, post-doctorants et stagiaires.

Dans un contexte de ralentissement économique et de rigueur budgétaire, la stabilisation de la dotation budgétaire de l'IFPEN en 2013 apparaît comme un moindre mal, et les efforts demandés à cet établissement, à l'image de ceux réclamés aux autres organismes, restent légitimes. Il n'empêche que la réalisation, par l'IFPEN, de sa mission d'intérêt général de préparation de la transition énergétique, reste délicate dans un contexte énergétique et environnemental de plus en plus tendu.

Plus que jamais, votre rapporteur pour avis estime nécessaire de maintenir à un niveau consistant le soutien budgétaire apporté par l'État à l'IFPEN, premier déposant français de brevets en énergies renouvelables. Ce soutien permettra à l'IFPEN d'oeuvrer au renforcement de la compétitivité industrielle de la France, par la mise sur le marché d'innovations technologiques directement applicables par les entreprises et l'émergence de ruptures décisives en matière, notamment, de diversification des sources d'énergies et de réduction des émissions de CO 2 .

Dans les années à venir, l'IFPEN pourrait notamment avoir un rôle important à jouer en matière de recherche et développement sur les gaz de schiste. Votre rapporteur pour avis estime dommage que la France s'interdise toute recherche sur cette forme d'énergie non conventionnelle, dont les ressources pourraient être importantes, alors qu'elle dispose de toutes les compétences et savoir-faire nécessaires.

IV. L'INSTITUT FRANÇAIS DES SCIENCES ET TECHNOLOGIES DES TRANSPORTS, DE L'AMÉNAGEMENT ET DES RÉSEAUX

A. UNE RECHERCHE CENTRÉE SUR LES USAGES ET L'IMPACT SOCIO-ENVIRONNEMENTAL DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORTS

L'IFSTTAR a été créé en janvier 2011, il est issu de la fusion du laboratoire central des ponts et chaussées (LCPC), spécialisé dans le génie civil, et de l'institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS), compétent principalement en matière de transport et sécurité routière, et est placé sous la tutelle conjointe des ministres chargés respectivement du développement durable et de la recherche.

Établissement public à caractère scientifique et technologique, il est rattaché à l'action 12 « Recherche dans le domaine des transports, de la construction et de l'aménagement » du programme 190.

Il contribue aux deux premiers objectifs de performance du programme : « Développer l'excellence des instituts de recherche au niveau européen et international et assurer l'efficience de la recherche » (objectif n° 1) et « Développer les recherches partenariales entre acteurs publics et entre acteurs publics et privés » (objectif n° 2).

L'IFSTTAR a pour mission de réaliser des recherches dans les domaines du génie urbain, du génie civil et des matériaux de construction, des risques naturels, de la mobilité des personnes et des biens, des systèmes et des moyens de transports et de leur sécurité, des infrastructures et, plus généralement, de leurs usages et de leurs impacts, techniques, économiques, sociaux, sanitaires, énergétiques, environnementaux et humains.

Pour ce faire, l'établissement conduit des recherches fondamentales et appliquées, des études méthodologiques et des développements d'essais, et prototypes, il mène des travaux d'expertise et de conseil, met en oeuvre une politique d'information scientifique et technique et assure la diffusion des connaissances, contribue à la formation à la recherche et par la recherche, au rayonnement international et à l'exportation de l'expertise et des techniques développées.

Votre rapporteur pour avis note avec intérêt que, dans le cadre de ses activités d'expertise et de conseil, l'IFSTTAR a été étroitement associé, à la fin de l'année 2011, aux travaux de la mission d'information de l'Assemblée nationale relative à l'analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière (auditions d'experts, table ronde scientifique, réalisation d'une étude d'analyse de la littérature scientifique).

B. UNE DOTATION STABLE MAIS UNE BAISSE DU PLAFOND D'EMPLOIS

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des crédits de l'action 12 « Recherche dans le domaine des transports, de la construction, de l'aménagement » et en particulier de la dotation de l'établissement IFSTTAR, entre les exercices 2011 (loi de règlement), 2012 (loi de finances initiale) et 2013 (projet de loi de finances) :

Evolution de la dotation budgétaire à l'IFSTTAR

(en millions d'euros)

(AE = CP)

LR 2011

LFI 2012

PLF 2013

Action 12 : Recherche dans le domaine des transports, de la construction, de l'aménagement

111,5

112,3

112,4

Dont sous-action 12-01 : IFSTTAR

88,9

89,4

89,5

Source : projet de loi de finances pour 2013

Pour l'exercice 2013, la dotation prévue est de 89,5 millions d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement , quasiment stable (+ 100 000 euros) par rapport à celle de 2012. Analysée par nature de dépense, elle est constituée exclusivement de dépenses de fonctionnement (Titre 3). Les recettes du budget de l'IFSTTAR proviennent à presque 80 % de cette subvention pour charges de service public.

Evolution 2010-2012 du budget de l'IFSTTAR

(en millions d'euros)

Réalisé 2010

Réalisé 2011

2012 (Prévisionnel)

Subvention pour charge de service public au titre du Programme 190 action 12

89,7

88,9

87,7

Ressources propres

24,3

18,6

22,9

Recettes totales

114

107,5

110,6

Source : IFSTTAR

Les 20 % restant viennent de ressources propres , pour 22,9 millions d'euros en 2012, en augmentation de 23 % par rapport à 2011.

Ces ressources comprennent notamment des financements obtenus grâce aux appels d'offres remportés par les chercheurs de l'institut auprès des bailleurs institutionnels ou des acteurs privés du monde de l'industrie (« Contrats et soutiens finalisés à l'activité de recherche » : 16,7 millions d'euros). S'y ajoutent les redevances pour brevets et licences, expertises et analyses, et droits d'encaissement liés aux colloques (« Produits valorisés de l'activité de recherche et prestations de services » : 4,9 millions d'euros) ainsi que des subventions régionales permettant de réaliser des investissements scientifiques en lien avec les contrats de recherche (1,4 million d'euros). Par ailleurs, le ministère de la recherche et de l'enseignement supérieur apporte son soutien pour le financement de post-doctorants.

Le projet de loi de finances pour 2013 fait participer l'IFSTTAR à l'objectif général de réduction des dépenses publiques au travers d'une baisse de 31 ETP (- 2,32 %) de son plafond d'emplois pour 2013 .

Evolution 2010-2013 des emplois de l'IFSTTAR

2011 (Réalisé)

LFI 2012

PLF 2013

Var. 2012-2013

Emplois (ETP) rémunérés par l'opérateur

1 262

1 337

1 306

-31

(- 2,32 %)

- sous plafond

1 125

1 159

1 128

- 31

(- 2,67 %)

- hors plafond opérateurs

137

178

178

0

Source : IFSTTAR

Afin de faire face à cette réduction d'effectifs, l'IFSTTAR privilégie une politique de ressources humaines fondée sur le non-remplacement de postes libérés en 2013, avec une possibilité d'effectuer des mutations internes, en fonction de l'importance de ces postes. Les recrutements déjà en cours en 2012 ne donnent plus à l'institut de souplesse de recrutement externe pour 2013.

Concernant plus particulièrement les conséquences de cette réduction d'effectifs sur le nombre de doctorants financés sur la subvention pour charges de service public, elle devrait n'avoir que peu d'impact, la baisse prévisible étant au plus de cinq doctorants.

C. L'ACHÈVEMENT DE LA FUSION ET LA STRATÉGIE DE RECHERCHE DU NOUVEL ÉTABLISSEMENT

L'achèvement de la fusion est marqué en 2012 par le déménagement du nouveau siège de l'IFSTTAR sur le site de Marne-la-Vallée au sein du Pôle de Recherche et d'Enseignement Supérieur (PRES) Paris-Est. Les anciennes unités de recherche des deux établissements ont été regroupées par thématiques de recherche en cinq départements : Matériaux et structures, Géotechnique-géoscience-risques naturels, Composants et systèmes, Transport-santé-sécurité, Aménagement-mobilités-environnement.

Le nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP) pour la période 2013-2016 est en cours de finalisation. Le projet a été présenté au conseil scientifique puis soumis à l'approbation du conseil d'administration avant d'être proposé à la signature des ministères de tutelle de l'IFSTTAR.

Le document relatif à la stratégie scientifique à dix ans a été validé par le conseil scientifique le 30 mai 2012 puis par le conseil d'administration du 6 juin. L'application effective du document est prévue pour le 1 er janvier 2013. Ce chantier a été lancé dès 2011 avec des échanges internes au travers de séminaires de connaissance réciproque avant d'être approfondi dans des groupes de travail transversaux de « politique de recherche ». Les différents travaux ont été régulièrement présentés au conseil des structures de recherche et ont fait l'objet d'une démarche concertée avec les ministères de tutelle.

Chacun des cinq départements de recherche est organisé en plusieurs laboratoires (unités propres de l'institut ou unités mixtes de recherche - UMR) répartis sur 7 sites d'implantation (Lille-Villeneuve d'Ascq, Paris, Marne-la-Vallée, Versailles-Satory, Nantes, Lyon-Bron, Marseille-Salon de Provence).

Cette forte implantation régionale permet à l'IFSTTAR d'être représenté dans les principaux pôles de compétitivité du secteur du transport, de la ville et du génie des matériaux. Ainsi, il participe à la gouvernance et à l'animation des groupes de travail des pôles MOV'EO (Basse-Normandie, Haute-Normandie et Ile-de-France), I-TRANS (Nord Pas-de-Calais et Picardie), ADVANCITY (Ile-de-France) et LUTB (Grand Lyon). La part des contrats de recherche labellisés par les pôles de compétitivité dans les ressources totales de l'établissement est d'ailleurs en croissance, passant de 4 % en 2010 à 4,5 % en 2011.

L'IFSTTAR est partie à 17 projets sélectionnés au titre du programme d'investissements d'avenir (dossiers déposés en 2011 et retenus entre 2011 et début 2012).

L'institut pilote ainsi le projet d'équipement d'excellence « Sense-City », qui développe la recherche de nano-capteurs pour la ville et l'environnement.

L'Equipex « Sense-City »

Le coeur du dispositif est constitué d'un réseau de capteurs physiques, chimiques ou biologiques innovants intégrant des nanotechnologies et permettant de collecter des informations grâce à une « mini-ville », vaste hall climatique mobile reconfigurable de 400 m² accueillant des maquettes réalistes des principales composantes urbaines (bâtiments, infrastructures, réseaux de distribution).

Le site d'installation principal de cet équipement d'excellence est à Champs-sur-Marne et la dotation sur 5 ans est de  9 M€, versés par l'Agence nationale de la recherche (ANR).

L'IFSTTAR participe également :

- à trois autres équipements d'excellence (EQUIPEX) : ingénierie du vieillissement des tissus vivants ; réseau sismologique et géodésique français ; nano-tomographie ;

- à cinq laboratoires d'excellence (LABEX) : ville du futur ; acoustique et vibrations ; sciences de l'environnement dans les domaines de l'hydrologie et la sismologie ; construction durable ; imagerie médicale et simulation ;

- à deux instituts de recherche technologique (IRT) : infrastructures ferroviaires ; matériaux composites ;

- à trois instituts d'excellence « énergie décarbonée » (IEED) : géothermie ; véhicule décarboné ; ville durable ;

- à une initiative d'excellence (IDEX) : homme virtuel ;

- et à deux sociétés d'accélération du transfert de technologie (SATT) : Île-de-France Innov et PACA-Corse.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du mercredi 28 novembre 2012, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits du programme « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables » de la mission « Recherche et enseignement supérieur » du projet de loi de finances pour 2013.

M. Alain Houpert, rapporteur pour avis. - J'ai l'honneur de vous présenter pour la première fois cette année un nouvel avis budgétaire, qui portera sur la recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables. Il s'agit des crédits de l'un des programmes de la vaste mission « Recherche et enseignement supérieur ». Celle-ci est présentée pour 2013 avec un montant en autorisations d'engagement de 25,9 milliards d'euros, réparti entre 15 milliards d'euros consacrés aux formations supérieures, à la recherche universitaire, ainsi qu'à la vie étudiante, et 10,9 milliards d'euros consacrés à huit programmes de recherche différents. Au sein de cet ensemble, le programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables » s'élève à 1,4 milliard d'euros en autorisations d'engagement, soit 5,4 % seulement du total de la mission, ou encore 13 % du total des programmes de recherche.

Quelle est l'évolution des crédits de ce programme ? Alors que le total des huit programmes de recherche de la mission est présenté pour 2013 en augmentation de 1,1 % en autorisations d'engagement et de 1,3 % en crédits de paiement par rapport à 2012, le programme 190 apparaît en diminution de 0,3 % en autorisations d'engagement, mais en augmentation de 2,1 % en crédits de paiement. Il semble donc relativement épargné par la rigueur budgétaire. Toutefois, cette bonne tenue des crédits s'explique surtout par l'ajustement à la hausse de la dotation pour les charges nucléaires de long terme des installations du CEA, qui progresse de près d'un tiers pour atteindre 249 millions d'euros en autorisations d'engagement, comme en crédits de paiement. Si l'on ne tient pas compte de cet ajustement, sur lequel je reviendrai, les autres actions du programme apparaissent en stagnation, voire en forte baisse. Ainsi, l'action 14 « Recherche partenariale dans le développement et l'aménagement durables » et l'action 15 « Recherche dans le domaine de l'aéronautique civile » diminuent toutes deux de près de 20 % en crédits de paiement.

Les crédits du programme 190 correspondent majoritairement à des subventions pour charges de services publics versées aux divers établissements publics, c'est-à-dire les opérateurs. Parmi ceux-ci, je peux citer le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives - ou CEA, l'IFP Energies nouvelles, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques - ou INERIS, l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux - ou IFSTTAR, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail - ou ANSES, le Centre scientifique et technique du bâtiment - ou CSTB, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire - ou IRSN, et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie - ou ADEME. Au total, ces subventions représentent près de 90 % du programme.

Cette année, je me suis intéressé plus particulièrement à quatre de ces établissements publics, dont j'ai auditionné les responsables dirigeants.

Je commencerai tout d'abord par l'ADEME. Nous connaissons tous l'action de l'ADEME dans son rôle d'expertise et de conseil auprès des entreprises, des collectivités locales, des pouvoirs publics et du grand public. Mais l'agence contribue, en outre, au financement de projets de recherche et d'études en matière de gestion des déchets, de préservation des sols, d'efficacité énergétique et d'énergies renouvelables, de qualité de l'air et de lutte contre le bruit. Le budget de l'ADEME est la somme d'un budget de base, fixé à 190 millions d'euros, qui correspond aux actions traditionnellement mises en oeuvre par l'agence, et d'un budget additionnel dans le cadre du Grenelle de l'environnement, initialement fixé à 500 millions d'euros en autorisations d'engagement, mais qui a été ramené à 460 millions d'euros en 2012. Le budget global s'est donc élevé cette année à 650 millions d'euros. Par ailleurs, l'ADEME est en charge de la gestion, à hauteur de 2,8 milliards d'euros, de quatre des programmes d'investissements d'avenir. Dans ce cadre, l'Agence accompagne les projets sélectionnés à l'issue d'appels à manifestation d'intérêt, depuis la réalisation de démonstrateurs de recherche jusqu'à la préindustrialisation, notamment dans les domaines du photovoltaïque, du solaire thermodynamique, du grand éolien, du stockage d'électricité, de la géothermie ou des réseaux électriques intelligents.

Le budget de l'ADEME se caractérise par l'importance des recettes affectées. Le produit de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) représente 75 % de ses ressources, alors que les subventions pour charges de service public provenant du programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables », ainsi que du programme 181 « Prévention des risques », n'en représentent que 15 %. Le solde, soit 10 %, est constitué de ressources propres. La fraction du produit de la TGAP que l'ADEME reçoit depuis 2008 a été plafonnée l'an dernier à 499 millions d'euros. Les dotations budgétaires à l'ADEME sont passées de 73 millions d'euros en 2012, à 58 millions d'euros pour 2013. Selon la programmation triennale, elles devraient s'abaisser encore à 36 millions d'euros en 2014, puis à 24 millions d'euros en 2015, soit une diminution de près de 70 % sur trois ans. J'appelle donc à la vigilance, pour que l'érosion des moyens alloués à l'ADEME ne remette pas en cause l'efficacité des politiques publiques qui lui sont confiées.

Le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives est un autre opérateur majeur du programme 190. Ses actions de recherche interviennent dans le secteur de la Défense, mais également dans les domaines des énergies décarbonées, des technologies de l'information et des technologies de la santé. Je rappelle que l'énergie nucléaire du futur fait partie des scénarios de la transition énergétique, même si l'on vise désormais une réduction de sa part dans le bilan énergétique de notre pays.

La dotation budgétaire allouée au CEA au titre du programme 190 est en hausse de près de 10 % rapport à 2012, pour atteindre 769 millions d'euros. Mais ce mouvement de hausse est trompeur, car il demeure partiel. En effet, il faut prendre en compte les crédits inscrits sur deux autres programmes, le 172 et le 191. Au total, les crédits accordés au CEA en 2013 pour l'ensemble de ses activités civiles sont en baisse de 2,4 % par rapport à 2012, pour s'établir à 1,07 milliard d'euros. Cette baisse des subventions sera d'autant plus difficile à absorber que le CEA devra faire face en 2013 à 55 millions d'euros de charges nouvelles non prévues : le financement du renforcement de la réglementation nucléaire sur ses installations suite à l'accident de Fukushima, la montée en charge de l'investissement dans le réacteur de recherche Jules Horowitz, et l'alourdissement des charges liées à l'abaissement de l'âge de la retraite.

En réalité, l'augmentation de la dotation allouée au CEA au titre du programme 190 s'explique essentiellement par celle du financement des charges nucléaires de long terme, qui s'accroît de 60 millions d'euros, soit une progression de 31,7 %. En effet, les fonds dédiés aux dépenses de démantèlement et d'assainissement des sites nucléaires du CEA sont arrivés à épuisement depuis le mois de février 2012. Un nouveau système de financement a donc été mis en place cette année, qui se fonde sur des ressources mixtes : d'une part, une subvention budgétaire croissante ; d'autre part, le rachat par l'Etat des actions d'AREVA détenues par le CEA, pour un montant de 214 millions d'euros en 2012 et de 418 millions d'euros en 2013. La totalité des actions d'AREVA aura été rachetée en 2015. En conséquence, le besoin de financement budgétaire des fonds dédiés du CEA augmentera brutalement de plusieurs centaines de millions d'euros en 2016. Nous devons en avoir conscience dès à présent.

J'en viens maintenant à l'IFP Energies nouvelles. Héritier de l'Institut français du pétrole créé en 1943, cet établissement public industriel et commercial tire sa dénomination actuelle de la loi dite « Grenelle II », en conséquence de la réorientation de ses activités de recherche vers les nouvelles technologies de l'énergie. L'IFPEN a pour mission de réaliser des études et des recherches appliquées dans les domaines scientifique et technique, et de valoriser leurs résultats. Il peut ainsi prendre des participations dans des sociétés industrielles ou commerciales, que ce soit directement ou par le biais de structures de capital investissement. Dans les faits, ces sociétés sous contrôle de l'IFPEN interviennent dans des secteurs très variés : procédés catalytiques, raffinage et pétrochimie, carburants alternatifs, production d'hydrogène, ingénierie du traitement de gaz naturel, ingénierie du transport et du stockage géologique du CO2, etc.

L'IFPEN bénéficie d'une dotation budgétaire de l'État rattachée exclusivement à l'action 10 « Recherche dans le domaine de l'énergie » du programme 190. Cette dotation s'élève pour 2013 à 146,6 millions d'euros en autorisations d'engagement, comme en crédits de paiement, et est quasiment stable par rapport à 2012. Cette stabilisation rompt avec un mouvement de diminution continue observé depuis dix ans. Au total, le montant de la subvention allouée à l'IFPEN aura été réduit de 58,6 millions d'euros courants entre 2002 et 2013, soit une baisse de plus de 40 % en euros constants. C'est pourquoi la décision de ne pas diminuer davantage en 2013 la dotation budgétaire de l'IFPEN mérite d'être saluée.

Néanmoins, cette décision ne devrait pas suffire à résoudre le problème du déficit budgétaire de cet établissement public, récurrent depuis trois ans. Évaluées à 1,9 million d'euros en 2011, les pertes de l'IFPEN devraient être de 6,9 millions d'euros en 2012. Elles pourraient atteindre entre 5,8 et 11,8 millions d'euros en 2013, selon les règles fiscales qui seront appliquées en matière de TVA. Afin de faire face à ses difficultés budgétaires, l'IFPEN devra poursuivre ses efforts, d'une part, pour maintenir le niveau de ses ressources propres, qui représentent près de la moitié des ressources totales de l'établissement ; d'autre part, pour réduire le montant de ses charges. Outre l'augmentation des taux de redevances perçues auprès de ses filiales qui commercialisent les procédés et produits issus de sa recherche, l'IFPEN s'est engagé dans la vente de ses participations, pour un montant de plus de 27 millions d'euros entre 2009 et 2012. Cette politique de cession d'actifs, qui permet de combler les déficits dans l'immédiat, ne pourra évidemment pas être prolongée indéfiniment. Or, dans les années à venir, l'IFPEN pourrait avoir un rôle important à jouer en matière de recherche-développement sur les gaz de schiste, sujet qui soulève beaucoup de débats.

Pour finir, j'évoquerai l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux, l'IFSTTAR, issu de la fusion, en janvier 2011, du Laboratoire central des Ponts et Chaussées, spécialisé dans le génie civil, et de l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité, compétent principalement en matière de transport et sécurité routière. Il est placé sous la tutelle conjointe des ministres chargés du développement durable et de la recherche. Établissement public à caractère scientifique et technologique, il est rattaché à l'action 12 « Recherche dans le domaine des transports, de la construction et de l'aménagement » du programme 190.

Pour l'exercice 2013, la dotation prévue est de 89,5 millions d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement. Elle est quasiment stable par rapport à celle de 2012. Les recettes de l'IFSTTAR proviennent pour presque 80 % de cette subvention, le solde est constitué de ressources propres, qui comprennent notamment des financements obtenus grâce aux appels d'offres remportés par les chercheurs de l'institut auprès des bailleurs institutionnels ou des acteurs privés du monde de l'industrie. S'y ajoutent les redevances pour brevets et licences, expertises et analyses.

L'achèvement de la fusion est marqué en 2012 par le déménagement du siège de l'IFSTTAR sur le site de Marne-la-Vallée au sein du Pôle de Recherche et d'Enseignement Supérieur de Paris-Est. Ses cinq départements de recherche sont organisés en plusieurs laboratoires, répartis sur sept sites d'implantation. Cette forte implantation régionale permet à l'IFSTTAR d'être représenté dans les principaux pôles de compétitivité des secteurs du transport, de la ville et du génie des matériaux. L'IFSTTAR est par ailleurs partie à dix-sept projets sélectionnés au titre du programme des investissements d'avenir.

Telles sont mes observations sur les quatre établissements que j'ai choisi de regarder plus attentivement cette année parmi les principaux opérateurs du programme 190. On constate une tendance générale à la baisse de leurs subventions budgétaires, parfois compensée par la vente des « bijoux de famille ». Alors que le thème de la compétitivité de la France est à la mode, la recherche et l'innovation devraient plus que jamais y contribuer. Personnellement, j'adopterai sur ces crédits une position d'abstention « positive ».

M. Raymond Vall, président. - Je vous remercie pour ce rapport qui nous a fait découvrir des organismes de recherche très intéressants. On doit parfois réduire des crédits à contre-coeur en cette période de rigueur pour les finances publiques. Je serais curieux d'en savoir plus sur le réacteur de recherche Jules Horowitz du CEA.

M. Henri Tandonnet. - Savez-vous quels sont les mécanismes d'évaluation de ces programmes de recherche ?

M. Alain Houpert, rapporteur pour avis. - Les organismes concernés pratiquent l'autoévaluation.

M. Charles Revet. - Notre rapporteur a souligné la baisse des crédits consacrés à la recherche en matière d'énergie et de développement durable. Or, l'effort national de recherche doit être maintenu dans les moments de difficultés. Le groupe UMP s'abstiendra sur le vote de ces crédits.

M. Vincent Capo-Canellas. - L'idée sous-jacente est que l'on pallie les difficultés que nous avons à soutenir notre effort de recherche par les fonds du « grand emprunt ». C'est notamment le cas pour l'aviation civile, pour laquelle la baisse des crédits est compensée par le programme des investissements d'avenir (PIA). Or, il faut dès maintenant envisager la fin du PIA, alors que notre effort de recherche est moitié moindre de celui de l'Allemagne. Le groupe UDI s'abstiendra également.

M. Pierre Camani. - Le groupe socialiste votera les crédits de ce programme budgétaire.

M. Alain Houpert, rapporteur pour avis. - Ces organismes, qui sont pourtant des fleurons de notre recherche, souffrent d'une vision d'avenir à trop court terme. Nous devons y être attentifs. Leur vie est conditionnée par la tournure que prend le débat politique. Je pense par exemple au débat sur le nucléaire pour le CEA, ou au débat sur les gaz de schiste pour l'IFPEN.

M. Henri Tandonnet. - Les entreprises privées apportent-elles des concours à ces organismes publics ?

M. Alain Houpert, rapporteur pour avis. - Tous ces organismes ont des passerelles vers le secteur privé, auquel ils vendent des brevets et des licences. Mais cet apport financier n'est pas suffisant.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durables» du projet de loi de finances pour 2013.

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mardi 6 novembre 2012

- IFSTTAR : Mme Hélène Jacquot-Guimbal , directrice générale.

Mardi 13 novembre 2012

- ADEME : M. Xavier Lefort , directeur général délégué.

- IFPEN : M. Olivier Appert , président, M. Georges Picard , directeur général adjoint.

Mercredi 21 novembre 2012

- CEA : M. Bernard Bigot , administrateur général, M. Christophe Gegout, directeur financier, M. Jean-Pierre Vigouroux , directeur des relations institutionnelles.

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