B. LA CRÉATION DE 60 000 POSTES DANS L'ENSEIGNEMENT AU COURS DU QUINQUENNAT (ARTICLE 1ER ET RAPPORT ANNEXÉ AU PROJET DE LOI)

1. Rétablir les postes supprimés dans l'éducation nationale : un principe fixé dans les lois à caractère financier...

Comme votre commission des finances l'avait souligné lors de l'examen, du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2012 4 ( * ) , le Gouvernement a, dès la rentrée 2012, ouvert des crédits pour renforcer les moyens humains du service public de l'éducation et répondre aux besoins les plus urgents (aide aux élèves handicapés, accompagnement et encadrement des élèves).

Un coup d'arrêt a été donné aux suppressions continues de postes dans l'éducation nationale engagées par l'ancienne majorité en application de la politique de non-remplacement d'un départ en retraite sur deux, qui atteignait le rythme « de croisière » de 14 000 suppressions de postes par an en moyenne pendant cinq ans .

Dans la loi de finances rectificative du 16 août 2012, des ouvertures de crédits ont été votées à hauteur de 89,5 millions d'euros pour recruter :

- 1 000 professeurs des écoles ;

- 100 conseillers principaux d'éducation ;

- 1 500 auxiliaires de vie scolaire individualisés au service des élèves handicapés ;

- 2 000 assistants d'éducation qui assurent l'accompagnement des élèves, financés sur des crédits d'intervention de titre 6 ;

- 500 agents chargés de la prévention et de la sécurité scolaire dans les établissements en difficulté ;

- ainsi que 50 emplois dans l'enseignement technique agricole.

Le décret n° 2012-1000 du 27 août 2012 a créé une nouvelle mission consistant en la participation aux actions de prévention et de sécurité (APS) des adultes présents dans les établissements les plus exposés aux phénomènes de violence. Ces assistants de prévention et de sécurité contribuent à l'analyse de la situation de l'établissement pour favoriser la mise en place de mesures de prévention et participent à l'action éducative, en lien avec les autres personnels.

Tous les emplois ont été pourvus au 1 er septembre 2012 pour les postes correspondant à des fonctions déjà identifiées avant le changement de majorité en 2012. Le recrutement des nouveaux APS était par ailleurs quasiment achevé au 31 janvier 2013, le nombre de postes s'élevant à 454 à cette date, soit une réalisation de l'objectif fixé (soit 500 postes) à plus de 90 %.

La répartition par académie des recrutements opérés dès la rentrée 2012, pour satisfaire les besoins les plus urgents, figurent dans le tableau ci-après.

Cette priorité en faveur de l'éducation nationale s'est traduite, dans la loi de finances pour 2013 , par la création de 9 011 postes supplémentaires (ETP 5 ( * ) ) à la rentrée 2013, dont 230 pour l'enseignement technique agricole.

Au total, le plafond d'emplois de la mission « Enseignement scolaire » s'élève à 0,97 million d'ETPT 6 ( * ) en 2013 , faisant de l'éducation nationale le premier employeur public en France, répartis comme suit :

- 319 000 ETPT dans l'enseignement public du premier degré ;

- 447 000 ETPT dans l'enseignement public du second degré ;

- 131 000 emplois dans l'enseignement privé du premier et du second degrés ;

- 15 000 emplois dans l'enseignement technique agricole ;

- 60 000 emplois dans les fonctions de soutien et pour le programme « Vie de l'élève » de la mission « Enseignement scolaire ».

Répartition par académie et par programme des créations de postes mises en oeuvre à la rentrée 2012
(en ETP)

Source : ministère de l'éducation nationale

Dans un contexte budgétaire contraint qui implique une stabilisation globale des effectifs de l'Etat, ces créations de postes sont gagées par des réductions d'emplois dans les autres missions du budget général de l'Etat .

En 2013, plus de 43 000 places seront ouvertes aux concours de recrutement pour non seulement remplacer les départs à la retraite des enseignants, mais aussi pourvoir les postes créés dès la rentrée 2012. À titre transitoire, il a été décidé l'organisation successive de deux concours, le premier pour les enseignants recrutés pour la rentrée 2013 (et dont les épreuves d'admission sont prévues en juin 2013, après l'organisation des épreuves d'admissibilité à l'automne 2012) et le second, organisé à partir de juin 2013, pour les futurs enseignants recrutés pour la rentrée 2014, après une année de formation dans les nouvelles écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE).

Autre engagement du Président de la République François Hollande, le rétablissement d'une année de formation initiale des enseignants s'est accompagné, dès l'adoption de la loi de finances pour 2013, d'une action destinée à faciliter l'insertion professionnelle et la promotion sociale des jeunes dans les métiers du professorat. La création, dès le 1 er janvier 2013, de 6 000 postes d'emplois d'avenir professeur a ainsi constitué une première étape de la mise en oeuvre de cette forme de pré-recrutement au métier d'enseignant.

2. ... mais détaillé dans le présent projet de loi d'orientation et de programmation

Aux termes du rapport annexé au présent projet de loi présentant les objectifs de la politique d'éducation 7 ( * ) , et dont l'article 1 er tend à l'approbation, « la refondation de l'école consiste d'abord à réinvestir dans les moyens humains qui sont mis en service ».

Le rapport annexé détaille ainsi la programmation des 60 000 emplois devant être créés dans l'enseignement au cours de la législature, en vue notamment de rétablir une formation initiale pour les enseignants, de développer l'accueil des enfants de moins de trois ans et de mieux répondre à des situations et à des questions spécifiques : permettre la réussite de tous les élèves ; accueillir les élèves en situation de handicap ; accompagner les élèves ; assurer leur suivi médical ; piloter les établissements et les services académiques.

Sur ce total de 60 000 postes , 54 000 emplois seront créés au ministère de l'éducation nationale , 5 000 au ministère de l'enseignement supérieur et 1 000 au ministère de l'agriculture au titre de l'enseignement technique agricole .

Les créations d'emplois prévues dans l'enseignement technique agricole visent à compenser les suppressions de postes, au rythme de 250 par an, jusqu'en 2012. Il convient d'observer que, de 2005 à 2012, 70 % des réductions d'emplois ont eu lieu dans des établissements publics, qui ne concentrent pourtant que 37 % des élèves et dont les effectifs, bien que moins dynamiques que dans le privé, sont pourtant en augmentation. Le rétablissement des moyens de l'enseignement technique agricole doit permettre un rééquilibrage entre le public et le privé.

Le premier tableau ci-après détaille la répartition de la création des 54 000 emplois au ministère de l'éducation nationale. La formulation des zones prioritaires ciblées - mais qui ne seront pas les seules à bénéficier des créations de postes de personnels titulaires, hors rétablissement de la formation initiale - peut apparaître relativement floue, mais cette imprécision devrait favoriser une souplesse dans la déclinaison, complexe, de ces créations de postes par académie et selon les territoires.

Les deuxième et troisième tableaux ci-après donnent la répartition par académie, en nombre d'élèves, des dispositifs d'éducation prioritaire (ECLAIR 8 ( * ) et RRS 9 ( * ) ) dans le premier et le second degrés, à la rentrée scolaire 2011-2012, correspondant à la date la plus récente pour laquelle une répartition géographique est disponible.

Pour la rentrée scolaire 2012-2013, 367 205 élèves relevaient du programme ECLAIR et 664 330 des RRS, soit au total 1 031 535 élèves scolarisés en éducation prioritaire.

La répartition des 54 000 emplois créés au ministère de l'éducation nationale

(en ETP)

Réforme de la formation initiale

27 000

dont enseignants stagiaires

26 000

dont enseignants titulaires formateurs

1 000

Enseignants titulaires

21 000

dont premier degré (public et privé)

14 000

Scolarisation des enfants de moins de 3 ans

3 000

Renforcement de l'encadrement pédagogique dans les zones difficiles

7 000

Amélioration de l'équité territoriale interacadémique

4 000

dont second degré (public et privé)

7 000

Collèges en difficultés professionnelles et lycées professionnels : lutte contre le décrochage

4 000

Amélioration de l'équité territoriale interacadémique

3 000

Accompagnement des élèves en situation de handicap, conseillers principaux d'éducation, personnels administratifs, médico-sociaux, vie scolaire

6 000

TOTAL

54 000

Source : alinéa 50 du rapport annexé au projet de loi

Répartition par académie et par dispositif des élèves du premier degré
en zone d'éducation prioritaire (rentrée 2011)
(en nombre d'élèves)

Source : ministère de l'éducation nationale

Répartition par académie et par dispositif des élèves du second degré
en zone d'éducation prioritaire (rentrée 2011)

(en nombre d'élèves)

Source : ministère de l'éducation nationale

Selon le rapport annexé au projet de loi, 26 000 enseignants , à partir de la rentrée 2014, effectueront pendant un an un stage rémunéré de formation initiale, en alternance, dans les futures écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) et auprès des élèves. Du fait de cette formation en alternance, ces 26 000 postes stagiaires correspondront à 13 000 postes d'enseignants devant les élèves, comme le précise l'alinéa 47 du rapport annexé.

Cette estimation de 26 000 postes se fonde sur les prévisions de départs en retraite (estimées à 22 000 par an dans l'enseignement public et privé) et les créations de postes prévues au cours de la période, selon une répartition moyenne de deux tiers dans le premier degré et d'un tiers dans le second degré. Au total, 150 000 recrutements sont envisagés au cours de la période 2013-2017.

Pour assurer la formation dans les ESPE, il est prévu la création de 1 000 postes d'enseignants titulaire formateurs . Trois amendements identiques ont été adoptés, à l'Assemblée nationale, pour prévoir le cas des enseignants chercheurs exerçant une activité clinique, de recherche ou un enseignement académique, qui « seront encouragés à continuer à exercer à temps partiel » une telle activité.

Au total, la réforme de la formation initiale représentera la moitié des créations d'emplois (27 000 sur un total de 54 000).

En outre, 21 000 nouveaux postes d'enseignants titulaires seront pourvus, en plus de ceux prévus par la réforme de la formation initiale, dans le premier degré (14 000 postes) et le second degré (7 000 postes).

Les 14 000 postes du premier degré sont répartis de la manière suivante :

- 3 000 postes au titre de la scolarisation des enfants de moins de trois ans, « en particulier dans les zones d'éducation prioritaire ou dans les territoires ruraux isolés les moins bien pourvus, ainsi que les départements et régions d'outre-mer », aux termes de l'alinéa 40 du rapport annexé ; la commission des finances a adopté un amendement permettant de viser effectivement l'ensemble des collectivités ultra-marines ;

- 7 000 postes pour favoriser l'évolution des pratiques pédagogiques, « dans les secteurs les plus fragiles », pour renforcer l'encadrement, accompagner les organisations pédagogiques innovantes ou renforcer l'action des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED) et les autres dispositifs de remédiation scolaire ; concrètement 10 ( * ) , dans le cadre d'un contrat éducatif et pédagogique entre l'école et les autorités académiques, il est prévu la présence de onze professeurs pour dix classes dans les zones d'éducation prioritaire ou celles présentant des besoins similaires pour améliorer les résultats scolaires ; la mention des RASED provient d'une modification du texte apportée par la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale ; votre rapporteur est particulièrement sensible à la question des RASED, laquelle donne par ailleurs lieu à un contrôle budgétaire en cours des rapporteurs spéciaux de la mission « Enseignement scolaire » ;

- 4 000 postes pour « améliorer l'équité territoriale interacadémique » au titre de l'alinéa 51 du rapport annexé, non seulement pour tenir compte des évolutions démographiques attendues, mais aussi pour procéder à des rééquilibrages territoriaux et améliorer les remplacements dans les zones ayant le plus souffert de suppressions de postes.

Les 7 000 postes créés dans le second degré se répartissent entre :

- 4 000 postes créés « en priorité » dans les « collèges comptant une forte proportion d'élèves en difficulté » et les lycées professionnels, par des pratiques pédagogiques adoptées, pour lutter contre le décrochage scolaire (alinéa 44 du rapport annexé) ;

- 3 000 postes destinés, comme dans le premier degré, à tenir compte des évolutions démographiques et rééquilibrer les moyens ; à la différence du premier degré, le rapport annexé ne mentionne pas la nécessité de mieux assurer les remplacements pour compenser les suppressions de postes au cours de la période 2007-2012 ; la commission des finances a adopté un amendement pour combler cette lacune.

S'agissant de l'amélioration du remplacement, tant dans le premier que dans le second degrés, le ministère de l'éducation nationale a répondu qu'il bénéficierait notamment aux quatre académies ayant rencontré es difficultés les plus importantes : les académies de Bordeaux, Créteil, Versailles et Lyon.

Enfin, 6 000 postes supplémentaires sur les 54 000 emplois créés correspondent à la scolarisation des élèves en situation de handicap, la prévention et la sécurité, le suivi médical et social, l'amélioration du pilotage des établissements et des services académiques, aux termes de l'alinéa 49 du rapport annexé.

Un peu plus de 10 % des créations d'emplois, votées dans la loi de finances pour 2013 au titre de la prochaine rentrée scolaire, visent l'enseignement privé. Il s'agit du rétablissement de postes dans des proportions comparables aux suppressions opérées entre 2007 et 2012 (de l'ordre de 10 % des créations et suppressions), au regard de la démographie scolaire et des situations observées sur le terrain.

3. La question récurrente des personnels employés sur des crédits d'intervention de titre 6

Les personnels d'assistance éducative ont donné lieu à des observations récurrentes de votre commission des finances lors de l'examen des projets de loi de finances initiale.

Inscrits au sein du programme « Vie de l'élève » de la mission « Enseignement scolaire », les crédits des personnels d'assistance éducative regroupent notamment les assistants d'éducation, les emplois de vie scolaire, les auxiliaires de vie scolaire collectifs (AVS-co) ainsi que les assistants de scolarisation. Les effectifs des assistants d'éducation se sont élevés à 84 237 pour l'année scolaire 2011-2012.

Recrutés par les établissements publics locaux d'enseignement, les assistants d'éducation ne relèvent ni du plafond d'emplois de l'Etat, ni du plafond des opérateurs, bien qu'il s'agisse d'emplois permanents financés entièrement par l'Etat, et dont le recrutement est décidé et effectué par des agents de l'Etat pour faire face à des besoins permanents du service public.

De manière récurrente, votre commission des finances a déploré que ces personnels, rémunérés par les établissements scolaires ne relèvent ni du plafond d'emplois de l'Etat, ni du plafond des opérateurs puisque les établissements publics locaux d'enseignement ne sont pas reconnus comme des opérateurs, en préconisant de prévoir, dans les prochaines lois de finances, une information plus précise du Parlement concernant l'évolution de ces personnels.

Dans sa note d'exécution budgétaire 2011, la Cour des comptes a pour sa part recommandé de mettre les emplois d'assistants d'éducation sous plafond ministériel ou de créer un plafond spécifique, ce que le nombre d'emplois concernés justifierait par ailleurs. Il s'agit en effet d'emplois précaires de personnels par ailleurs soumis à des exigences croissantes d'encadrement des élèves.

Enfin, le ministère de l'éducation nationale emploie des personnes en contrats aidés , regroupés sous l'appellation d' emplois de vie scolaire , notamment pour l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Ces contrats sont des contrats de droit privé à durée déterminée qui s'adressent aux personnes rencontrant des difficultés d'insertion, ayant pour objet de permettre à leurs titulaires d'acquérir une expérience professionnelle assortie d'actions d'accompagnement et de formation, en vue de leur permettre de retrouver un emploi de droit commun dans le secteur privé ou public.

Pour la rentrée 2012-2013, le nombre d'assistants d'éducation est estimé à 54 700, rémunérés sur des crédits ne relevant pas du titre 2 (dépenses de personnel), mais des dépenses d'intervention (titre 6). Comme le ministère de l'éducation nationale l'a souligné auprès de votre rapporteur lors de ses auditions, les contraintes budgétaires se traduisent par une diminution tendancielle, en moyenne annuelle, de 3 000 contrats aidés par an, ce qui est de nature à soulever des difficultés d'encadrement ou de prise en charge de besoins spécifiques.


* 4 Loi de finances rectificative pour 2012 n° 2012-958 du 16 août 2012. Rapport n° 689 (2011-2012) de M. François Marc, rapporteur général, au nom de la commission des finances.

* 5 Emplois équivalent temps plein. Votre rapporteur rappelle qu'un poste (ou ETP), créé à la rentrée scolaire le 1 er septembre de l'année n, ne se traduit que par un tiers d'emploi équivalent temps plein travaillé la première année (ETPT), puisque le fonctionnaire n'est en poste que les quatre derniers mois de l'année civile (soit un tiers d'année). La création, comme la suppression de postes, dans l'éducation nationale ne produira normalement ses effets pleinement qu'à l'issue de l'exercice budgétaire suivant.

* 6 Emplois équivalents temps plein travaillé.

* 7 Parmi ces objectifs figurent la maîtrise des compétences de base à l'école primaire ; la réduction par deux du nombre d'élèves sortant du système scolaire sans qualification ; la réaffirmation des objectifs visant à conduire 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat et 50 % d'une classe d'âge à un diplôme de l'enseignement supérieur.

* 8 Écoles, collèges et lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite. Ayant pour objectifs de « faciliter la réussite de chacun et d'améliorer le climat scolaire, de développer l'ambition pour tous et de renforcer la stabilité des équipes », selon la présentation qui en est faite sur le site Internet du ministère de l'éducation nationale, le programme ECLAIR prévoit des innovations en matière de pédagogie, de vie scolaire et de ressources humaines à organiser au sein de chaque établissement ou école.

* 9 Réseaux de réussite scolaire. Les RRS réunissent des établissements du premier et du second degrés afin de favoriser la continuité des apprentissages tout au long de la scolarité obligatoire.

* 10 Ces précisions ont été apportées par la circulaire n° 2008-2012 du 28 décembre 2012 « plus de maîtres que de classes ».

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