Avis n° 165 (2015-2016) de Mme Annie GUILLEMOT , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 19 novembre 2015

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N° 165

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VIII

POLITIQUE DES TERRITOIRES
(VILLE)

Par Mme Annie GUILLEMOT,

Sénatrice.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Claude Lenoir , président ; Mmes Delphine Bataille, MM. Alain Bertrand, Martial Bourquin, Gérard César, Alain Chatillon, Daniel Dubois, Joël Labbé, Mme Élisabeth Lamure, MM. Michel Le Scouarnec, Yannick Vaugrenard , vice-présidents ; M. Marc Daunis, Mme Valérie Létard, M. Bruno Sido , secrétaires ; MM. Gérard Bailly, Jean-Pierre Bosino, Henri Cabanel, François Calvet, Roland Courteau, Alain Duran, Mmes Frédérique Espagnac, Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet, Mme Annie Guillemot, MM. Michel Houel, Serge Larcher, Jean-Jacques Lasserre, Daniel Laurent, Philippe Leroy, Mmes Marie-Noëlle Lienemann, Anne-Catherine Loisier, MM. Michel Magras, Franck Montaugé, Robert Navarro, Jackie Pierre, Ladislas Poniatowski, Mme Sophie Primas, MM. Yves Rome, Henri Tandonnet .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602

Sénat : 163 et 164 à 170 (2015-2016)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

L'examen des crédits du programme 147 « Politique de la ville » de la mission « politique des territoires » intervient dans un contexte particulier d'attentats meurtriers qui ont ensanglanté à deux reprises la France, en janvier, puis en novembre.

Prenant acte du « profond malaise social et démocratique » que connaît la France et que les attentats de janvier ont mis en exergue, le Comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté , réuni le 6 mars dernier, a adopté 60 mesures réparties en trois thématiques :

- les mesures relatives au « vivre dans la République » concernent les lieux et symboles de la République, la laïcité, l'apprentissage du français, l'accès à la culture et au sport. Elles visent notamment à mettre la laïcité et la transmission des valeurs républicaines au coeur de la mobilisation de l'école, à renforcer l'apprentissage du français, ou encore à mobiliser les établissements culturels et audiovisuels pour aller à la rencontre des publics les plus éloignés de la culture ;

- les mesures relatives à « la République pour tous » ont pour objet de lutter contre les inégalités entre les femmes et les hommes, de combattre l'ensemble des discriminations et de favoriser le recours au numérique dans les quartiers ;

- les mesures relatives à « la République au quotidien » concernent l'habitat, les questions de sécurité dans l'espace public, l'école, l'emploi et la santé. Elles ont notamment pour objet de mieux répartir le parc social sur les territoires, de prolonger le dispositif des ZSP, de renforcer la mixité sociale et lutter contre les inégalités, de s'assurer de l'accès effectif des résidents des quartiers prioritaires de la politique de la ville aux principaux dispositifs de la politique de l'emploi, ou encore d'assurer un suivi social et de santé renforcé dans les quartiers prioritaires.

Le comité interministériel a également décidé de renforcer les moyens alloués à la politique de la ville. Ainsi, 31,7 millions d'euros ont été « dégelés » de la mise en réserve initiale et ont notamment permis :

- d'augmenter les dotations aux associations de proximité ;

- de revaloriser de 5 % à compter du 1 er septembre 2015 le forfait d'aide aux employeurs d'adultes-relais ;

- de créer ou renforcer les programmes de réussite éducative ;

- de créer des places supplémentaires dans les EPIDe ;

- de lancer un plan de formation sur la laïcité et les valeurs de la République.

Le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté s'est de nouveau réuni le 26 octobre dernier aux Mureaux afin de tirer un premier bilan de la mise en oeuvre de ces mesures et pour en annoncer de nouvelles en matière de lutte contre les ségrégations, de lutte contre les discriminations et de prévention de la radicalisation. Votre rapporteure souhaite rappeler que la lutte contre les phénomènes de radicalisation est un combat de chaque instant et suppose de ne pas transiger avec l'application de la laïcité.

Certaines de ces mesures seront discutées dans le cadre de l'examen du projet de loi pour l'égalité et la citoyenneté qui devrait venir en discussion devant le Parlement en 2016.

S'agissant des crédits affectés au programme « politique de la ville » par le présent projet de loi de finances, votre rapporteure tient à saluer, dans un contexte global de restriction budgétaire, le choix du Gouvernement d'augmenter les crédits destinés aux quartiers prioritaires de la politique de la ville. Les crédits du programme certes diminuent, mais il s'agit d'une baisse optique qui résulte de la fin du dispositif des zones franches urbaines tel qu'il existait avant 2015.

Votre rapporteure a souhaité examiner plus particulièrement les mesures mises en oeuvre à la suite du comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) en matière de développement économique et d'habitat dans les quartiers prioritaires.

Lors d'une réunion tenue le mercredi 25 novembre 2015, la Commission des affaires économiques a émis, contre l'avis de son rapporteur, un avis défavorable, à l'adoption des crédits du programme « Politique de la ville » de la mission « Politique des territoires » du projet de loi de finances pour 2016.

I. L'AUGMENTATION DES CRÉDITS DESTINÉS AUX QUARTIERS PRIORITAIRES DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

Les crédits du programme 147 « Politique de la ville » connaissent une diminution de 2,6 % en autorisations d'engagement et de 2,7 % en crédits de paiement. Toutefois, comme l'an dernier, cette baisse des crédits est purement optique et s'explique par une diminution des crédits nécessaires à la compensation des charges sociales des entreprises installées dans les zones franches urbaines avant le 1 er janvier 2015.

Dans un contexte de restriction budgétaire important, votre rapporteure salue le choix du Gouvernement d'augmenter les crédits dédiés aux quartiers de la politique de la ville permettant ainsi d'assurer le financement de mesures décidées par le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) du 6 mars 2015.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 147 « POLITIQUE DE LA VILLE »

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Actions

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

1

Actions territorialisées et Dispositifs spécifiques de la politique de la ville

331 819 031

346 974 000

+ 4,6%

331 819 031

346 974 000

+ 4,6%

2

Revitalisation économique et emploi

83 348 996

57 637 123

-30,8%

83 348 996

57 637 123

- 30,8%

3

Stratégie, ressources et évaluation

33 756 978

32 559 910

-3,5%

34 040 708

32 559 910

-4,4%

4

Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie

43 000

-

923 000

880 000

-4,7%

Total

448 968 005

437 171 033

-2,6%

450 131 735

438 051 033

-2,7%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Lors de l'examen des crédits de la mission « politique des territoires », le 10 novembre dernier, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement diminuant les crédits du programme « politique de la ville » de 660 000 euros pour qu'ils soient affectés à l'Agence France entrepreneur dont le budget relève de la mission « Économie » .

Lors de la seconde délibération du projet de loi, les députés ont également adopté un amendement du Gouvernement diminuant les crédits du programme « politique de la ville » de 3 millions d'euros afin de garantir le respect de la norme de dépense en valeur de l'État. Le Gouvernement a précisé que cette diminution serait permise grâce à un effort de rationalisation des actions de soutien à la vie associative.

Le budget du programme « politique de la ville » s'élève en conséquence à 433 511 033 euros en AE et 434 391 033 en CP.

Dans la suite du présent rapport, il sera cependant fait référence aux données figurant dans le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

A. DES CRÉDITS POUR LES QUARTIERS PRIORITAIRES DE LA POLITIQUE DE LA VILLE EN AUGMENTATION

1. L'augmentation des crédits de l'action « Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville »
a) Les crédits du programme à destination des quartiers de la politique de la ville

Les crédits dédiés aux quartiers de la politique de la ville augmentent de 13 %, pour atteindre 195,7 millions contre 181,9 millions d'euros l'an dernier. Ainsi, 137,5 millions d'euros seront affectés au pilier cohésion sociale, dont 38,4 millions d'euros seront consacrés à l'éducation et notamment au financement de programmes spécifiques (les cordées de la réussite, les internats de la réussite et les classes préparatoires intégrées). 46,2 millions d'euros seront consacrés à l'emploi et au développement économique. Enfin, 5 millions d'euros seront affectés au pilier cadre de vie et rénovation urbaine.

Répartition des crédits de l'action pour 2016 (en millions d'euros)

Pilier cohésion sociale

137,5

Éducation

38,4

Santé et accès aux soins

14,5

Culture et expression artistique

12,1

Lien social, participation citoyenne

49,5

Accès aux droits et prévention des discriminations

14

Programme Ville Vie Vacances

9

Pilier emploi et développement économique

46,2

Développement économique, emploi et soutien entrepreneurial

42,7

Écoles de la 2 ème chance

3,5

Pilier Cadre de vie et rénovation urbaine

5

Habitat et cadre de vie

5

Pilotage, ingénierie et évaluation des contrats de ville

7

Total

195,7

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Les crédits du volet « lien social et participation citoyenne » sont en très forte augmentation de 38,6 % passant de 35,7 millions d'euros budgétés en 2015 à 49,5 millions d'euros en 2016. Ces crédits seront destinés au financement d'actions favorisant la structuration des associations, d'actions de proximité, d'actions dans le domaine sportif tendant en particulier à réduire les inégalités d'accès à la pratique et aux équipements sportifs, d'actions favorisant la participation citoyenne (éducation au respect, promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, actions de solidarité). Ils permettront également de financer les conseils citoyens .

En outre, afin de mettre en oeuvre les mesures retenues par le Comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC), deux appels à projets ont été lancés par les ministères de la ville et de la culture. Le premier a pour objet de développer les médias de proximité notamment dans les quartiers, tandis que le second aura pour objet de favoriser la maîtrise du français au travers d'actions culturelles.

Votre rapporteure se félicite de cette augmentation des crédits qui permettront de soutenir plus activement encore les associations, dont le rôle demeure essentiel dans la mise en oeuvre de la politique de la ville, en particulier dans les quartiers prioritaires.

b) Les crédits dédiés aux dispositifs spécifiques : programme de réussite éducative et programme des adultes-relais

151,3 millions d'euros sont consacrés à deux dispositifs spécifiques : le programme de réussite éducative et celui des adultes-relais.


Programme de réussite éducative

77,3 millions d'euros sont consacrés au programme de réussite éducative, contre 76 millions l'an dernier, soit une augmentation de 1,7 %. Selon les informations transmises à votre rapporteure, le Gouvernement envisagerait de compléter ce montant avec un « dégel » en cours d'années à hauteur de 9,3 millions d'euros.

Le nombre de programmes de réussite éducative (PRE) actifs a connu une légère baisse passant de 515 à 493 équipes en raison du recentrage des crédits d'interventions sur les populations les plus en difficultés. Toutefois, de nouvelles équipes devraient être mises en place en 2015, 27 PRE ayant été validés et 16 étant en cours de validation. Sont concernés 104 701 enfants répartis sur 619 communes. 1 217 quartiers prioritaires de la politique de la ville sont couverts par un PRE (soit 93 %). Le taux de cofinancement moyen atteint 31% en 2015.

Les parcours individualisés, caractéristiques du programme, sont en augmentation constante depuis 2007, comme le montre le tableau ci-dessous :

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Part des jeunes bénéficiant d'un parcours individualisé

23%

35%

35%

46%

51%

51%

62%

71,5%

77,5%

Ils concernent 77,5 % des enfants en 2015 (soit 81 141 parcours) contre 23 % des enfants en 2007. Le Gouvernement s'est fixé pour objectif d'atteindre 85 % des enfants en 2016 .

Pour 2016, les moyens seront concentrés sur les quartiers et établissements scolaires les plus prioritaires. Le Gouvernement a toutefois décidé de maintenir dans les territoires de veille active un financement jusqu'en 2017 . Cette période transitoire devra permettre aux élus de ces territoires de rechercher de nouveaux financements afin de pérenniser ce dispositif.


Programme des adultes-relais

Les adultes-relais, âgés d'au moins 30 ans et résidant dans les quartiers prioritaires, ont pour mission d'améliorer les relations entre les habitants et les services publics et contribuent à améliorer les rapports sociaux dans les espaces publics des quartiers prioritaires de la politique de la ville par des actions de médiation.

En 2015, on pouvait dénombrer 4 200 postes d'adultes-relais qui ont été redéployés en fonction de la nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville. Les départements les plus dotés sont les suivants : le Nord avec 343 postes, la Seine-Saint-Denis avec 220 postes, les Bouches-du-Rhône avec 217 postes, Paris avec 210 postes, la Réunion avec 185 postes, la Guadeloupe avec 180 postes, le Pas-de-Calais avec 136 postes et l'Essonne avec 100 postes.

Votre rapporteure avait constaté l'an dernier un ralentissement de la demande d'adulte-relais en raison, d'une part, des incertitudes de la géographie prioritaire et, d'autre part, de la baisse de 20 % du montant des aides. Le Comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) a décidé de revaloriser de 5 % l'aide financière octroyée à ces postes , qui atteindra désormais 18 823,09 euros par adulte-relais et par an. Les crédits dédiés à ce dispositif atteignent 74 millions d'euros pour 2016.

Votre rapporteure se félicite de l'augmentation de l'aide financière accordée à ce dispositif dont elle espère qu'elle contribuera à diminuer le taux de vacance, qui atteint en moyenne 20 %, en facilitant l'embauche d'adulte-relais par les petites associations.

2. La poursuite de la mobilisation des crédits de droit commun

Le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) a réaffirmé la nécessité de mobiliser les crédits de droit commun pour répondre en particulier aux besoins des quartiers prioritaires.

Selon le document de politique transversale, 34 programmes ont contribué à la politique de la ville en 2015. Ils représentaient 4,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Pour 2016, 35 programmes vont contribuer à la politique de la ville pour un montant de 4,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 4,6 milliards d'euros en crédits de paiement, soit 4,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 4,2 milliards d'euros en crédits de paiement pour les seuls crédits de droit commun (hors programme 147).

Pour faciliter leur utilisation, 12 conventions interministérielles ont été signées. Elles ont été complétées par plusieurs instructions ministérielles.

Selon les indications fournies à votre rapporteure, ces conventions devraient être renouvelées et comporter des engagements plus précis avec des indicateurs permettant de mesurer les objectifs de progression.

Votre rapporteure souligne la nécessité que l'ensemble des ministères s'impliquent dans des actions en faveur des quartiers prioritaires de la ville et elle sera particulièrement vigilante quant au déploiement de ces crédits de droit commun à l'occasion de la signature des contrats de ville.

3. La mise en place de la dotation de la politique de la ville

L'article 107 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 a rebaptisé la dotation de développement urbain (DDU) en dotation politique de la ville (DPV) . Cette dotation bénéficie à 120 communes parmi les plus défavorisées.

Pour 2015, les critères d'éligibilité et de répartition de la DPV sont, ceux qui étaient précédemment retenus pour la DDU. Peuvent ainsi bénéficier de la dotation de la politique de la ville les communes qui réunissent les trois conditions suivantes :

- avoir été éligibles l'année précédente à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) ;

- avoir une proportion de population située en zone urbaine sensible supérieure à 20 % de la population totale de la commune, ou une proportion de population située en zone franche urbaine supérieure à 20 % de la population totale de la commune ;

- avoir au moins une convention pluriannuelle conclue avec l'Agence nationale pour la rénovation urbaine.

Ces communes sont ensuite classées en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges.

Les crédits de la dotation de la politique de la ville, d'un montant de 100 millions en 2015, sont ainsi répartis :

- 75 millions sont répartis entre les 120 premières communes classées en fonction de leur indice synthétique de ressources et de charges ;

- 25 millions sont répartis entre les 60 premières communes.

La loi de finances pour 2015 a précisé que ces crédits sont destinés à financer les actions prévues par les contrats de ville.

Entre 2011 et 2015, la dotation de la politique de la ville (Ex DDU) a doublé et le nombre de communes bénéficiaires a augmenté de 20 %.

Année

Montant de la DDU/DPV

(en millions d'euros)

Nombre de communes bénéficiaires

2011

50

100

2012

50

100

2013

75

100

2014

100

120

2015

100

120

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit de maintenir le même montant de dotation.

Selon les informations recueillies auprès du Gouvernement, les critères d'éligibilité et de répartition devraient évoluer à compter de 2016. La population des nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville actuellement en cours de calcul et d'authentification par l'Insee sera prise en compte. Votre rapporteure sera très attentive à l'évolution de ces critères et souhaite que les élus soient le plus possible associés à cette réflexion.

Par ailleurs, le Gouvernement a prévu de réformer la dotation globale de fonctionnement (DGF). Votre rapporteure sera particulièrement vigilante quant aux conséquences de cette réforme sur les communes éligibles à la DSU et plus généralement sur les communes comportant des quartiers relevant du PNRU et/ou du NPNRU.

B. DES CRÉDITS DÉPLOYÉS DANS LE CADRE DE LA NOUVELLE GÉOGRAPHIE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

1. La détermination des quartiers prioritaires de la politique de la ville

? L'article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine définit les quartiers prioritaires de la politique de la ville comme des quartiers situés en territoire urbain et caractérisés par un nombre minimal d'habitants et un écart de développement économique et social apprécié par un critère de revenu des habitants.

La liste des 1 514 quartiers prioritaires a été publiée dans le décret n° 2014-1750 du 30 décembre 2014 fixant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville dans les départements métropolitains et le décret n° 2014-1751 du 30 décembre 2014 fixant la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville dans les départements d'outre-mer, à Saint-Martin et en Polynésie française.

Bien que la nouvelle géographie prioritaire soit plus resserrée, le nombre de quartiers étant passé de 2 500 à 1 514, il apparaît que 6 quartiers sur 10 ont été retenus dans la nouvelle géographie prioritaire, 9/10 pour les ZUS et 4/10 pour les Cucs.

? S'ils ne bénéficient plus des crédits spécifiques de la politique de la ville, les quartiers sortants de l'actuelle géographie prioritaire font cependant l'objet d'une « veille active » .

Selon les informations transmises par le Gouvernement à votre rapporteure, ce dispositif s'est traduit concrètement par une saisine du préfet par les présidents des EPCI et les maires concernés d'une demande de placement d'un quartier sortant en « quartier de veille ». En conséquence, en réponse à cette demande, soit un contrat de ville spécifique a été élaboré, soit ces quartiers ont été intégrés dans les contrats de ville qui ont alors prévu un traitement spécifique différent de celui des quartiers prioritaires.

En outre, l'État a décidé de maintenir dans ces quartiers de manière transitoire deux dispositifs spécifiques. Ainsi, les conventions d'adultes-relais iront à leur terme et les programmes de réussite éducative bénéficieront jusqu'en 2017 d'une subvention qui sera progressivement réduite.

Par ailleurs, les représentants de la Caisse des dépôts et consignations ont indiqué à votre rapporteure que le financement par des prêts projet urbain (PPU) auxquels l'ensemble des acteurs du renouvellement urbain sont éligibles demeurera possible pour les quartiers sortant placés en veille active.

2. 397 contrats de ville signés

L'article 1 er de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine précise que la politique de la ville sera mise en oeuvre au travers des contrats de ville conclus à l'échelle intercommunale entre l'État et, les communes et EPCI concernés. Sur les 438 contrats de ville attendus, 392 sont ou seront pilotés par un EPCI et 46 par une commune.

Ces contrats sont signés par les départements et les régions et éventuellement la Caisse des dépôts et consignations, les organismes de logements sociaux, les organismes de protection sociale, les chambres consulaires et les autorités organisatrices de la mobilité.

Signés dans l'année du renouvellement général des conseils municipaux ou au plus tard l'année suivante, les contrats de ville entrent en vigueur le 1 er janvier de l'année suivante pour une durée de six ans (5 ans en cas de décalage lors de la signature). Au 19 novembre, 397 contrats de ville sur 438 ont été signés, soit 90,6 %.

La signature de ces contrats est très importante dans la mesure où elle conditionne à compter du 1 er janvier 2016 l'application de plusieurs mesures fiscales telles que l'application d'un taux réduit de TVA pour la construction de logements dans les QPV dans le cadre d'un contrat d'accession à la propriété, les exonérations fiscales dont peuvent bénéficier les entreprises s'installant dans une ZFU-territoires entrepreneurs, ou encore le bénéfice des exonérations de cotisations foncières pour les petites entreprises installées dans les quartiers prioritaires à partir du 1 er janvier 2016.

Un conseil citoyen qui doit être mis en place dans chaque quartier prioritaire de la politique de la ville, est associé à l'élaboration, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des contrats de ville. Fin août 2015, 300 conseils citoyens avaient été créés et 1 005 conseils étaient en cours de constitution. Afin de faciliter ce processus de création, le CGET a mis en place des sessions de formation à destination des agents de l'État et un cadre de référence a été produit. En outre, le Gouvernement a mis en place un comité de suivi national chargé d'accompagner le déploiement des conseils citoyens dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

3. Les nouvelles instances de la politique de la ville installées d'ici la fin de l'année 2015

Le décret n° 2015-77 du 27 janvier 2015 relatif aux instances en charge de la politique de la ville a précisé les modalités de mise en oeuvre des nouvelles instances de la politique de la ville.


• Le Conseil national des villes (CNV) concourt ainsi à la conception, à l'élaboration et au suivi de la politique de la ville.

Le CNV qui comprenait 55 membres répartis en trois collèges - un collège d'élus (25 membres), un collège des représentants d'associations et d'organismes et de syndicats d'employeurs et de salariés (15 membres) et un collège de personnalités qualifiées (15 membres) - a vu sa composition modifiée.

Dans un avis du 24 juin 2013, le Conseil national des villes avait souhaité la création d'un 4 ème collège d'habitants et d'un 5 ème collège réunissant chercheurs, sociologues, universitaires dont la composition aurait varié selon l'actualité des travaux du CNV, ainsi qu'une augmentation des membres avec une majorité d'élus.

Le Gouvernement a partiellement suivi les recommandations du CNV qui est désormais composé de 48 membres , pour un mandat de trois ans renouvelable une fois, répartis entre quatre collèges de 12 membres :

- un collège d'élus ;

- un collège représentant les acteurs économiques et sociaux impliqués dans la mise en oeuvre de la politique de la ville ;

- un collège composé de personnalités qualifiées ;

- et, innovation majeure, un collège représentant les habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville .

Ce collège « habitants » est lui-même constitué :


• pour moitié de personnes volontaires tirées au sort parmi celles proposées par trois associations « têtes de réseau » implantées dans les quartiers (la fédération des centres sociaux, la fédération des régies de quartiers, la coordination « Pas sans Nous »). Ce tirage au sort a eu lieu le 8 septembre dernier ;


• pour moitié des habitants issus des conseils citoyens créés ou en création.

Siégeant intuitu personae et non comme porte-parole d'une association, les membres du collège « habitant » apporteront ainsi une expertise résultant de leur connaissance personnelle des quartiers.

Plutôt que de créer un collège de chercheurs, le Gouvernement a choisi de consacrer un lien entre le CNV et l'Observatoire national de la politique de la ville en prévoyant, d'une part, que les huit membres du bureau du CNV seront membres de droit du comité d'orientation de l'Observatoire et, d'autre part, que l'Observatoire devra retenir dans son programme de travail au moins deux thèmes d'étude proposés par le CNV.

Le CNV a été installé le 26 octobre dernier par le Premier ministre.


L'Observatoire national de la politique de la ville est doté d'un comité d'orientation chargé de définir un programme de travail annuel d'enquêtes, d'évaluations et d'études permettant d'évaluer la politique de la ville menée par les ministères concernés et par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, ainsi que sa mise en oeuvre, et d'analyser l'évolution de la situation économique et sociale des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des conditions de vie de leurs habitants. Ce comité est composé :

- des membres du bureau du Conseil national des villes ;

- du Défenseur des droits ;

- d'un membre du corps préfectoral choisi parmi les préfets délégués pour l'égalité des chances ou les sous-préfets chargés de mission pour la politique de la ville ;

- d'un délégué du préfet ;

- de représentants des principales administrations centrales concourant à la politique de la ville ;

- de représentants d'opérateurs publics (ANRU, Pôle emploi, Caisse des dépôts et consignations, Caisse nationale d'allocations familiales) ;

- d'experts ;

- de personnalités qualifiées ;

- des représentants des élus.

Lors de son audition par nos collègues députés le 3 novembre dernier, M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports a précisé que l'Observatoire serait installé avant la fin de l'année et que ses moyens humains et financiers seraient les mêmes que ceux dont disposait l'Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS).

II. LE RENFORCEMENT DES MESURES EN FAVEUR DE LA CRÉATION ET DE L'IMPLANTATION DES ENTREPRISES AINSI QUE DE L'EMPLOI DES JEUNES DANS LES QUARTIERS PRIORITAIRES

Le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) a réaffirmé la nécessité de faciliter l'accès à l'emploi des résidents des quartiers prioritaires et ainsi concourir à diminuer le taux de chômage des jeunes de ces quartiers qui demeure très supérieur au taux constaté en dehors des QPV (42,1 % contre 22,6 % en 2013).

Il a décidé de :

- renforcer la mobilisation du service public de l'emploi. 230 conseillers de Pôle emploi seront chargés de « l'accompagnement intensif » des jeunes dans les agences situées à proximité des quartiers prioritaires. En outre, un correspondant « contrat de ville » sera désigné par chaque mission locale concernée ;

- renforcer les dispositifs existants à destination des jeunes habitant les quartiers prioritaires ;

- développer de nouvelles réponses, comme la mise en place du contrat CIE-starter ;

- créer une agence de développement économique des territoires.

Le programme 147 « politique de la ville » consacre 99 millions d'euros au développement économique des quartiers : 46,2 millions sont ainsi prévus à l'action 1 du présent programme pour l'emploi et l'insertion et 57,6 millions d'euros à l'action 2 « Revitalisation économique et emploi », pour les zones franches urbaines et l'EPIDe.

Afin de favoriser le développement économique des quartiers, le Gouvernement agit dans plusieurs directions : en faveur de l'emploi des jeunes des quartiers prioritaires, mais aussi en faveur de l'installation et du maintien des entreprises dans ces quartiers.

A. DES MESURES EN FAVEUR DE L'EMPLOI DES JEUNES HABITANT DANS LES QUARTIERS PRIORITAIRES

Le Comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) a renforcé plusieurs mesures existantes destinées à favoriser l'emploi ou l'insertion des jeunes sur lesquelles votre rapporteure s'était longuement penchée dans son avis budgétaire de l'an dernier.

1. Le renforcement des dispositifs pour améliorer la qualification des jeunes

Le CIEC a décidé de doter l'EPIDe et les écoles de la deuxième chance de moyens supplémentaires afin qu'un nombre plus important de jeunes puissent améliorer leur qualification. Le Gouvernement a par ailleurs souhaité renforcer la formation en alternance.


L'établissement public d'insertion de la défense (EPIDe) est un établissement qui a pour objet l'insertion des jeunes sans diplômes ni qualification qui cumulent des difficultés sociales. L'EPIDe met en place un cadre structurant d'inspiration militaire, un suivi personnalisé des jeunes et des équipes pluridisciplinaires pour les accompagner. 3 227 jeunes ont intégré l'EPIDe en 2014. 37 % résidaient dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Si un tiers des jeunes abandonnent en cours de route, l'EPIDe a cependant permis en 2014 d'insérer 51 % des jeunes engagés alors même que le contexte économique était difficile : 39 % ont été insérés dans un emploi durable, 37 % ont intégré une formation et 24 % ont bénéficié de contrats aidés ou de contrats à durée déterminée de moins de six mois.

Fin 2014, une nouvelle directrice générale a été nommée. Plusieurs objectifs lui ont été assignés :

- porter à 50 % la part de jeunes intégrant l'EPIDe et résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ;

- assurer le retour à un équilibre économique pérenne d'ici 2017 ;

- préparer le retrait du ministère de la Défense de la gouvernance de l'EPIDe ;

- mettre en place une politique de ressources humaines adaptée au projet de l'établissement.

Mme Nathalie Hanet, directrice générale de l'EPIDe, a indiqué à votre rapporteure avoir poursuivi les efforts de maîtrise des coûts au sein de son établissement.

En 2014, l'EPIDe a disposé d'un budget de fonctionnement à hauteur de 80 millions d'euros, dont 21 millions ont été versés par le ministère de la ville. Cependant, faute de budget dédié, les dépenses d'investissement de l'établissement sont financées sur son fonds de roulement . Or, cette situation devient problématique dans la mesure où cette source de financement se tarit.

Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit une subvention à hauteur de 26 millions d'euros , soit une augmentation de 17 % par rapport à l'an dernier où la subvention atteignait 22,2 millions d'euros.

Le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) a décidé d' augmenter de 27,8 % le nombre de places d'accueil au sein de cet établissement le faisant passer de 2 085 en 2014 à 2 665 en 2016. Ce sont ainsi 4 000 jeunes qui pourront être accueillis dans l'un des 18 centres à partir de 2016 pour une durée de 8 mois environ. En outre, deux nouveaux centres devraient ouvrir leurs portes à Nîmes et à Toulouse.

Votre rapporteure salue cette décision d'augmentation des crédits destinés à un dispositif qui fait ses preuves. Toutefois, elle s'interroge sur le financement des deux nouveaux centres dont elle n'a pas trouvé mention dans le présent projet de loi de finances.


• Les écoles de la deuxième chance proposent un parcours de formation aux jeunes de moins de 25 ans dépourvus de qualification professionnelle ou de diplôme, sortis du système scolaire.

Ces écoles ont ainsi accueilli 14 385 jeunes en 2014, dont 37 % résidaient dans les quartiers prioritaires . Le taux de sortie positive des écoles vers l'emploi ou une formation qualifiante était de 56 % en 2014.

Le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) a fixé comme objectif que les écoles de la deuxième chance accueillent 15 000 jeunes en 2015 et que 40% des bénéficiaires de ce dispositif soient des jeunes issus des quartiers prioritaires.

Le programme 147 finance ce dispositif à hauteur de 3,5 millions d'euros.


• Partant du constat que la part des jeunes des quartiers prioritaires dans les contrats de formation en alternance était faible, autour de 5-7 %, le Gouvernement a également souhaité renforcer les mesures en faveur de l' apprentissage .

Ainsi, le dispositif « réussite apprentissage » a pour objet de faire bénéficier 10 000 jeunes d'un accompagnement renforcé en amont de la signature du contrat et pendant les premières semaines d'apprentissage. 40 % d'entre eux devront résider dans les quartiers prioritaires .

En outre, le dispositif TPE « jeunes apprentis » permet aux employeurs de petites entreprises recrutant des jeunes de moins de 18 ans d'être exonérés de charges pendant la première année du contrat (soit une aide de 1 100 euros par trimestre). Ce dispositif devra également bénéficier en priorité aux jeunes des quartiers prioritaires.

2. Le renforcement des dispositifs d'accès à l'emploi et aux contrats aidés

Lors du comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC), le Gouvernement a souhaité renforcer deux dispositifs d'accès à l'emploi et aux contrats aidés et a annoncé la création d'un nouveau contrat : le CIE-Starter.

? Les emplois d'avenir sont des contrats uniques d'insertion permettant à l'employeur de bénéficier sous certaines conditions d'une prise en charge de l'État à hauteur de 75% de la rémunération du jeune. Au 30 juin 2015, 167 281 emplois d'avenir ont été conclus, dont près de 75 % dans le secteur non-marchand. 19,8 % des jeunes ayant signé ce contrat résident dans les quartiers prioritaires . Le Gouvernement a réaffirmé sa volonté d'atteindre un objectif 30 % de jeunes habitant dans les quartiers prioritaires.

? La « garantie jeunes » est un dispositif d'accompagnement des jeunes de moins de 25 ans en situation de grande précarité. Cette mesure a été étendue à 72 départements en 2015 pour atteindre 50 000 bénéficiaires avant sa généralisation en 2016 . Le Gouvernement s'est fixé pour objectif que 21 % des bénéficiaires soient des jeunes des quartiers prioritaires.

? Le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) a décidé de mettre en place un nouveau contrat, le CIE-Starter , notamment à destination des jeunes des quartiers prioritaires.

Ce contrat est réservé aux personnes remplissant les conditions suivantes :

- être âgé de moins de trente ans ;

- être sans emploi ;

- rencontrer des difficultés particulières d'accès à l'emploi ;

- résider dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, être bénéficiaire du revenu de solidarité active, être demandeur d'emploi de longue durée, être suivi dans le cadre d'un dispositif de deuxième chance (ex. garantie jeunes, écoles de la deuxième chance, EPIDe), ou avoir bénéficié d'un emploi d'avenir dans le secteur non-marchand.

Le CIE-starter est un contrat de travail de droit privé, à durée indéterminée ou à durée déterminée, à temps plein ou à temps partiel.

Peuvent avoir recours au contrat starter toutes les entreprises du secteur marchand et les groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification (GEIQ). L'employeur bénéficie d'une aide à hauteur de 45 % du SMIC. En échange, il s'engage à mettre en oeuvre les actions prévues dans la convention (formation, accompagnement...) qui favorisent l'accès rapide à un emploi durable.

Le Gouvernement s'est fixé pour objectif de créer 13 000 CIE-Starter en 2015 . Selon les informations transmises par le Gouvernement, après trois mois de mise en oeuvre, 2 900 jeunes avaient conclu ce contrat. Parmi eux, 23,6 % résident dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville .

3. La mobilisation des entreprises : la charte Entreprises et Quartier

Votre rapporteure considère que les entreprises doivent se mobiliser en faveur du développement économique et social des quartiers prioritaires.

Au niveau national, 69 entreprises ont signé la charte Entreprises et Quartier , mise en place par le Gouvernement depuis juin 2013. Le Gouvernement souhaite porter leur nombre à 100 en 2016. Parallèlement, les préfets ont mis en place une démarche similaire au niveau local. Ce sont ainsi 600 entreprises qui se sont impliquées dans des actions bénéficiant aux habitants des quartiers prioritaires.

Les entreprises signataires de cette charte s'engagent à intervenir dans l'un des domaines suivants : éducation et orientation scolaire (ex. intervention en direction des élèves, tutorat..), emploi, insertion et formation (ex. parrainage des demandeurs d'emploi, développement de contrats en alternance), développement économique (ex aide à la création d'entreprises), services de proximité, accessibilité aux produits et services de l'entreprise, soutien aux initiatives locales, participation à la création et au développement de la fondation « quartiers ».

Selon les informations transmises par le Gouvernement, en matière d'emplois, 25 723 personnes ont ainsi pu bénéficier d'actions mises en place par les entreprises signataires (recrutement, alternance, parrainage...) et 406 000 heures d'insertion ont été réalisées.

B. DES MESURES INCITANT À L'INSTALLATION D'ENTREPRISES DANS LES QUARTIERS PRIORITAIRES

Outre des mesures fiscales incitant à l'installation des entreprises dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, des mesures d'accompagnement à la création d'activité s'avèrent également essentielles.

1. Le dispositif zones franches urbaines (ZFU) - territoires entrepreneurs

Le dispositif des zones franches urbaines a fait l'objet d'une refonte lors de la loi de finances rectificative pour 2014 afin de limiter ses effets d'aubaine. Les entreprises installées avant le 1 er janvier 2015 dans les zones franches urbaines conservent cependant le bénéfice de leurs exonérations fiscales et sociales. Cette réforme se traduit par une diminution mécanique de 30,8 % des crédits de l'action 2 « revitalisation économique et emploi » du programme 147. 31,59 millions d'euros seront ainsi consacrés aux compensations des exonérations de charges sociales en ZFU.

S'agissant des entreprises s'installant dans l'une des 100 ZFU - territoires entrepreneurs après le 1 er janvier 2015, elles ne bénéficient plus d'exonération de charges sociales. Le dispositif est désormais le suivant :

- la durée des exonérations est réduite à 8 ans ;

- les exonérations sont accordées à taux plein pendant les cinq premières années, puis à 60 % la sixième année, à 40 % la septième année et à 20 % la huitième année ;

- le plafond des bénéfices exonérés diminue de 100 000 euros à 50 000 euros ;

- l'exonération est conditionnée au respect d'une clause locale d'embauche consistant en :

? soit au moins la moitié des salariés en CDI ou en CDD d'au moins douze mois doit résider dans l'une des zones franches urbaines-territoires entrepreneurs ou dans l'un des quartiers prioritaires de la politique de la ville de l'unité urbaine dans laquelle est située la zone franche urbaine ;

? soit au moins la moitié des salariés embauchés en CDI ou en CDD d'au moins douze mois depuis l'implantation de l'entreprise doit résider dans l'une des zones franches urbaines-territoires entrepreneurs ou dans l'un des quartiers prioritaires de la politique de la ville de l'unité urbaine dans laquelle est située la zone franche urbaine.

En outre, le bénéfice de ces exonérations est subordonné à compter du 1 er janvier 2016 à la conclusion des contrats de ville.

2. Des mesures fiscales de soutien aux commerces et services de proximité dans les quartiers prioritaires.

Deux mesures fiscales de soutien aux commerces et services de proximité dans les quartiers prioritaires ont été adoptées à l'article 49 de la loi de finances rectificative pour 2014.

Ont ainsi été instituées deux exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de cotisation foncière des entreprises (CFE) pour les entreprises exerçant une activité commerciale dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Ces exonérations sont réservées aux très petites entreprises (moins de dix salariés et chiffre d'affaires annuel ou total de bilan n'excédant pas 2 millions d'euros) :

-  qui exercent une activité commerciale ;

- et, qui existent au 1 er janvier 2015 dans les quartiers prioritaires ou qui sont créées ou font l'objet d'une extension entre le 1 er janvier 2015 et le 31 décembre 2020.

Le Gouvernement a souhaité retenir une notion d'activité commerciale la plus large possible en incluant les activités de service.

L'instruction fiscale a été publiée au BOFIP le 19 juin 2015 et la date limite de dépôt de la déclaration au titre des années 2015 et 2016 a été reportée au 31 juillet 2015. Selon la direction générale des finances publiques, 7 462 demandes d'exonération ont été adressées. Bien que des mesures d'information ait été mises en oeuvre à destination des services déconcentrés de l'État, et des organisations socio-professionnelles, votre rapporteure regrette la publication tardive de l'instruction fiscale et la disparité de traitement de ce nouveau dispositif entre les quartiers prioritaires, certains centres des impôts fonciers ayant décidé d'envoyer d'office un avis de dégrèvement, d'autres examinant les demandes au cas par cas.

3. Des dispositifs de soutien et d'accompagnement à la création d'entreprise

Selon les informations transmises par le Gouvernement à votre rapporteure, 42 323 établissements se sont implantés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville en 2014. Selon le Gouvernement, le taux d'échec atteint 50 % dans les ZFU. Les dispositifs d'accompagnement juridique ou financier à la création d'entreprises revêtent dès lors toute leur importance.

Le ministère de la ville apporte un soutien financier aux actions d'accompagnement à la création d'activité à hauteur de 3,7 millions d'euros en 2014. La Caisse des dépôts et consignations consacre quant à elle 50 millions d'euros de fonds propres à l'accompagnement et au développement économique des quartiers (prise de participations, subventions, prêts...).


• Le dispositif « nouvel accompagnement à la création d'activité » (NACRE) permet à des personnes sans emploi ou qui rencontrent des difficultés d'insertion dans l'emploi et qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise d'être accompagnées lors des différentes étapes de la création et dans les premières années du démarrage. L'accompagnement est effectué par des professionnels qui sont conventionnés par l'État et la Caisse des dépôts et consignations.

Entre janvier 2009 et fin octobre 2010, à peine 10 % des 43 000 bénéficiaires du dispositif résidaient dans un quartier prioritaire. Ce taux a diminué pour s'établir à 4,7 % des bénéficiaires en 2014 en légère augmentation. L'objectif est de porter ce taux à 11% en 2015 .


• L'agence de développement économique, baptisée Agence France entrepreneur , dont la création avait été annoncée par le Président de la République François Hollande en mars dernier entrera en fonction progressivement à partir de 2016.

Le Gouvernement a indiqué que cette agence aura vocation à encourager la création d'entreprises dans « les territoires fragiles économiquement », et en particulier dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville en favorisant la création d'entreprise pérenne, en luttant contre un taux très élevé d'échec et en aidant au développement des petites et moyennes entreprises.

Dirigée par M. Mohed Altrad, cette agence prendra appui sur les acteurs oeuvrant pour le développement économique tels que Citelab, BGE, Adie, ou encore Réseau entreprendre.

Selon le Gouvernement, l'agence bénéficiera d'une mutualisation des moyens existants. À cette fin, il a souhaité que les crédits destinés à cette agence soient regroupés au sein de la mission « Économie ». En conséquence, les députés ont adopté un amendement diminuant les crédits du présent programme de 660 000 euros afin de les affecter au sein de la mission « Économie ».


• Par ailleurs, BpiFrance a mis en place plusieurs dispositifs d'aide aux entreprises implantées dans les quartiers prioritaires.

Entre 2007 et 2014, BpiFrance a ainsi soutenu 13 859 entreprises correspondant à 109 000 emplois et représentant 4,4 milliards d'euros de financement. Elle a accompagné 4,6 % des entreprises localisées en ZUS et ZFU ainsi que 40 % des PME installées dans ces zones.

En mai dernier, BpiFrance a lancé le prêt Entreprises et quartiers destiné à aider les entreprises situées dans les quartiers prioritaires à se développer. Des sommes comprises entre 10 000 euros et 50 000 euros peuvent ainsi être empruntées sur 5 ans, sans prise de garantie sur le capital de l'entreprise ou le patrimoine de l'emprunteur. Lorsque la région intervient en co-garantie, un prêt allant jusqu'à 100 000 euros peut alors être accordé. Ce prêt est uniquement octroyé dans le cadre d'un cofinancement sous forme de prêt avec un établissement bancaire ou sous forme d'apport.

4. Des dispositifs de soutien à l'immobilier économique

D'autres mesures permettent de soutenir l'investissement dans l'immobilier économique.

Les quartiers prioritaires se caractérisent par un équipement en offre commerciale trois fois moins important que le reste de la France. L'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (Epareca), dont le nombre de saisine par les collectivités locales en accompagnement du NPNRU a été multiplié par deux, joue un rôle important pour requalifier les centres commerciaux en perte de vitesse et ainsi redonner aux habitants des quartiers une qualité de vie au quotidien.

La liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville ayant été publiée, M. Thierry Febvay, directeur général de l'Epareca, a confirmé à votre rapporteure que son établissement avait débuté l'examen de la situation des centres commerciaux présents dans ces quartiers.

La Caisse des dépôts et consignations et l'Epareca ont mis en place une société commune d'investissement patrimonial dédiée aux petits centres commerciaux et artisanaux (moins de 1 500 m²) dans les quartiers prioritaires. Cette société dénommée « Foncièrement Quartier » permet à l'Epareca d'amplifier son action dans les quartiers et à la Caisse des dépôts et consignations d'intervenir en faveur des petits centres commerciaux pour lesquels un montage en co-investissement avec des investisseurs privés n'est pas envisageable.

En complément de ces actions, un partenariat entre l'Anru et la Caisse des dépôts et consignations a été conclu le 10 novembre dernier afin de favoriser l'investissement dans l'immobilier dans les quartiers prioritaires.

Ce sont ainsi 250 millions d'euros de fonds propres qui seront apportés à parts égales d'une part, par l'Anru au titre du programme d'investissements d'avenir (PIA) et, d'autre part, par la Caisse des dépôts et consignations. Mobilisés en co-investissement avec des opérateurs privés, c'est en réalité 1,25 milliards d'euros qui devraient pouvoir être investis dans l'ensemble des quartiers prioritaires. L'Anru et la Caisse des dépôts et consignations agiront en « investisseurs avisés d'intérêt général ».

Sont concernées des opérations immobilières ayant pour objectif une diversification fonctionnelle du quartier prioritaire. Si les opérations de constructions ou de réhabilitations d'immobilier commercial, d'entreprise ou d'activité sont principalement visées , ce partenariat pourrait également concerner des opérations d'équipement comme les maisons de santé ou des logements spécifiques.

III. DES MESURES POUR RENFORCER L'ATTRACTIVITÉ DES QUARTIERS PRIORITAIRES EN MATIÈRE D'HABITAT

En matière d'habitat, M. Manuel Valls, Premier ministre, a appelé le 6 mars dernier à « casser les logiques de la ségrégation avec une autre répartition de l'habitat ». À cette fin, le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) a adopté plusieurs mesures parmi lesquelles : l'accélération de la mise en oeuvre du nouveau plan de renouvellement urbain, dont tous les acteurs rappellent l'importance au regard du succès du PNRU, et une meilleure répartition du parc social sur les territoires.

A. ACCÉLÉRER LA MISE EN oeUVRE DU NOUVEAU PROGRAMME DE RENOUVELLEMENT URBAIN (NPNRU)

1. Les règles applicables dans le cadre du NPNRU

Le 15 décembre 2014, le conseil d'administration de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) a arrêté la liste des 200 quartiers d'intérêt national. Par ailleurs, 250 opérations d'intérêt régional ont également été retenues.

L'Anru a adopté un nouveau règlement général relatif au nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) le 16 juillet dernier. Ce règlement précise que « seuls les projets qui visent une transformation du quartier grâce à un impact global, urbain, économique, social et environnemental » seront financés par l'Agence.

Peuvent ainsi être financées les opérations suivantes :

- opérations d'ingénierie : moyens d'ingénierie nécessaires à l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation du projet de renouvellement urbain, dispositifs d'accompagnement des ménages devant être relogés ;

- opérations d'aménagement : démolition de logements locatifs sociaux, « recyclage » de copropriétés dégradées, « recyclage » de l'habitat ancien dégradé, aménagement d'ensemble ;

- programmes immobiliers : reconstitution de l'offre de logements sociaux locatifs, requalification de ces logements, résidentialisation de logements, action de portage en copropriétés dégradées, opérations d'accession à la propriété, opérations de création et d'extension d'équipements publics ou collectifs de proximité bénéficiant principalement aux habitants des quartiers, création et réorganisation d'espaces d'activité économique et commerciale.

Il est à noter qu'en matière de démolition-reconstruction ne sera plus exigé le respect de la règle du 1 pour 1. Dans les zones tendues, les logements sociaux détruits devront être reconstruits en dehors des quartiers prioritaires, sauf exception justifiée par l'intérêt local. Cette orientation traduit l'une des mesures adoptées par le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC).

Les démolitions ne devraient plus être financées qu'à 70 % au lieu de 100 % auparavant. Or, cette décision qui oblige les bailleurs sociaux à apporter plus de fonds propres pourrait les conduire à proposer dans un premier temps de simples réhabilitations. Votre rapporteure souhaite réaffirmer qu'il faut mettre fin à la concentration de logements sociaux dans un certain nombre de quartiers et que la démolition/reconstruction est l'un des moyens pour mettre un terme à une situation que le Premier ministre M. Manuel Valls a qualifié d'« apartheid territorial, social, ethnique ».

L'Anru attribue des moyens financiers aux projets sous deux formes : des subventions ou des prêts bonifiés distribués par Action Logement .

Les représentants de l'Union sociale pour l'habitat ont indiqué à votre rapporteure que le recours au mécanisme d'équivalent subvention n'était pas neutre et que les organismes Hlm seraient perdants à hauteur de 150  à 200 millions d'euros.

Les subventions devraient être destinées à des opérations de démolition et les prêts bonifiés aux opérations de réhabilitation et de construction de logements. Celles accordées aux EPCI et aux communes tiendront compte de leur situation financière, de leur effort fiscal et de la richesse de leur territoire. Les aides pourront également être revues à la hausse lorsque le projet s'inscrit dans une logique d'excellence. M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports a cependant appelé à une mise en oeuvre du NPNRU « avec souplesse, rapidité, pragmatisme et en respectant les élus » lors du congrès Hlm, le 23 septembre dernier.

Au 1 er octobre 2015, un protocole a été signé.

2. Les règles de financement actées : Action Logement premier contributeur du NPNRU
a) Des modalités de financement du NPNRU actées

Les modalités et le calendrier de financement du nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU) ont été fixées dans une convention signée le 2 octobre dernier par l'État, Action logement et l'Agence nationale pour la rénovation urbaine. Action logement devient ainsi le premier financeur du NPNRU . En contrepartie, Action Logement bénéficiera :

- d'une part, de droits de réservation de logements locatifs sociaux dans et hors QPV bénéficiant d'une convention pluriannuelle de renouvellement urbain, correspondant à 20 000 logements. Les représentants d'Action Logement entendus par votre rapporteure ont indiqué que contrairement à ce qui avait été fait pour le PNRU, Action Logement serait plus actif et négocierait les droits avec les présidents d'agglomération ;

- d'autre part, de terrains ou droits à construire issus de l'aménagement foncier des QPV, correspondant à environ 12 500 logements. Les représentants d'Action Logement ont précisé qu'ils souhaitaient moduler cette surface selon qu'elle se situe ou non en zone tendue.

La CGLLS participera également au financement du NPNRU en apportant 450 millions d'euros.

Source de financement du NPNRU (en millions d'euros)

Source : Commission des affaires économiques.

Action Logement apportera 84 % des fonds sous deux formes : 3,2 milliards de subventions et 2,2 milliards de prêts équivalents subvention .

Ce sont ainsi 6,4 milliards d'euros qui seront consacrés au NPNRU : 5,3 milliards seront consacrés aux quartiers d'intérêt national et 1,1 milliards d'euros aux quartiers d'intérêt régional, soit 17 % des fonds prévus par le NPNRU.

b) Un reliquat de 600 millions d'euros du PNRU

Au 15 septembre 2015, 399 projets de rénovation urbaine concernant 593 zones urbaines sensibles (ZUS) ou zones assimilées ont été mis en place dans le cadre du PNRU. 386 sont situés en métropole et 13 dans les départements d'outre-mer.

Sur le plan financier, ces projets représentent 47 milliards d'euros d'investissement, dont 11 milliards d'euros de subventions de l'ANRU. Le programme est engagé sur le plan financier à hauteur de 92 % au 30 juin 2015. 2015 sera la dernière année au cours de laquelle des engagements financiers pourront être effectués au titre du PNRU.

M. Nicolas Grivel, directeur général de l'Anru, a indiqué à votre rapporteure qu'il devrait rester un reliquat d'environ 600 millions d'euros résultant d'opérations non réalisées ou réalisées partiellement, qui seraient réinjectés dans le NPNRU. Il a rappelé que le taux de chute atteint 6 %.

c) L'accélération de la mise en oeuvre du NPNRU et la question de la soutenabilité financière pour l'ANRU

La Cour des comptes s'était interrogée sur la soutenabilité financière pour l'ANRU de la poursuite du programme national de rénovation urbaine (PNRU) et de l'engagement simultané du nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU). M. Nicolas Grivel, directeur général de l'Anru, a indiqué à votre rapporteure que le PNRU devrait connaître une décélération progressive jusqu'en 2020 et que le NPNRU devrait lui connaître une montée en charge vers 2019-2020 si le programme avance à un bon rythme.

Les prévisions budgétaires pour 2015, 2016 et 2017 prévoient surtout des crédits d'ingénierie et d'études permettant de réaliser les protocoles de préfiguration. La Caisse des dépôts et consignations a d'ores et déjà consacré sous forme de subventions 6,4 millions d'euros sur une enveloppe de 90 millions au financement de l'ingénierie (études, expertises...). Cette montée en charge demeure modeste en raison des retards pris dans la signature des contrats de ville et en raison du démarrage récent par l'ANRU de l'instruction du NPNRU.

Évolution des PNRU et NPNRU entre 2015 et 2019
(en millions d'euros)

Source : Commission des affaires économiques.

Le comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC) du 6 mars 2015 a souhaité accélérer la mise en oeuvre du nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU) avec le soutien de la Caisse des dépôts et consignations. Un prêt d'un milliard d'euros de la Caisse des dépôts et consignations devrait permettre aux maîtres d'ouvrage, aux bailleurs sociaux et aux collectivités territoriales de lancer dès 2015 les opérations de reconstruction hors site, de démolition et de création et de rénovation d'équipements publics. Ainsi, pour faire face à d'éventuels besoins de trésorerie , l'Agence aura donc deux sources de financements à disposition : 100 millions d'Action Logement et le prêt d'un milliard de la Caisse des dépôts et consignations .

En outre, les représentants d'Action logement et M. Nicolas Grivel ont indiqué à votre rapporteure que le financement du NPNRU était stabilisé jusqu'en 2031 et qu'Action Logement devrait concourir au financement du NPNRU au-delà de 2019 à hauteur de 500 millions d'euros chaque année.

Si votre rapporteure se félicite que la question de la trésorerie soit résolue, elle s'inquiète cependant des conséquences sur la réalisation de projets de rénovation urbaine des baisses de dotations aux collectivités territoriales et des nouvelles règles de financement de l'Anru qui obligent les bailleurs sociaux à avoir recours de façon plus importante à leurs fonds propres. Elle craint en effet que faute de moyens suffisants, les opérations de rénovation urbaine soient moins importantes que prévues ou, pire, ne puissent être réalisées alors qu'il est indispensable d'agir et d'agir vite .

B. DES MESURES POUR FAVORISER LA MIXITÉ SOCIALE DANS L'HABITAT ET AMÉLIORER LES CONDITIONS DE VIE DANS LES LOGEMENTS SOCIAUX DES QPV

Selon les informations transmises par l'Union sociale pour l'habitat à votre rapporteure, un million de logements Hlm étaient situés dans une zone urbaine sensible en 2013, soit 24 % du parc Hlm.

Le comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté (CIEC) a rappelé la nécessité de favoriser la mixité sociale dans les logements des quartiers prioritaires de la politique de la ville.

La loi de finances pour 2016 prévoit deux mesures spécifiques destinées à favoriser cette mixité sociale. Ces mesures complètent ainsi une mesure fiscale prorogée l'an dernier au bénéfice des organismes Hlm et dont la contrepartie permet d'améliorer les conditions de vie des habitants des quartiers prioritaires.

1. Des mesures fiscales pour favoriser la mixité sociale

Le législateur a souhaité favoriser la production d'une offre de logements diversifiée dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

À cette fin, un taux de TVA réduit à 5,5 % est appliqué, en application de l'article 278 sexies du code général des impôts, aux opérations d'accession sociale à la propriété :

- jusqu'au 31 décembre 2024 dans les quartiers faisant l'objet d'un PNRU ;

- dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville définis à l'article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine qui font l'objet d'un contrat de ville prévu à l'article 6 de la même loi ou entièrement situés, à la même date, à une distance de moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers .

Ce taux réduit est soumis au respect de conditions de plafond. Ces opérations sont destinées à des personnes physiques dont les ressources sont inférieures au plafond  des ressources applicables dans le parc Hlm majoré de 11 %. En outre, le prix de vente ou de construction des logements doit être inférieur aux plafonds applicables au contrat de location-accession.

Les dispositions fiscales supposaient la conclusion des contrats de ville au 3 mars 2015. Or, la plupart des contrats de ville n'ont pas été signés avant l'été 2015 ou n'ont pas fait l'objet d'un avant-contrat de ville. Afin de ne pas pénaliser les accédants à la propriété, les députés ont adopté un article 2 bis dans le présent projet de loi tendant à préciser que le taux réduit de TVA s'appliquera aux demandes de permis de construire entre le 1 er janvier et la date de signature du contrat de ville.

S'agissant du logement intermédiaire , l'article 279-0 bis A du code général des impôts prévoit l'application d'une TVA au taux réduit de 10 % pour la livraison de logements à condition que ces logements soient :

-  situés en zone tendue ;

- intégrés dans un ensemble immobilier comportant 25 % de logements sociaux ;

- destinés à être loués à des personnes dont les ressources ne dépassent pas les plafonds prévus dans le cadre du dispositif « Pinel ».

Pour tenir compte des engagements pris par le Gouvernement lors du comité interministériel pour l'égalité et la citoyenneté (CIEC), et ainsi limiter la construction de logements sociaux dans les quartiers défavorisés et encourager la construction de logements intermédiaires et l'accession à la propriété, les députés ont adopté dans le présent projet de loi de finances pour 2016 un article 3 ter dispensant du respect de la condition de construction de 25 % de logements sociaux lorsque le bien se situe dans des communes comptant déjà plus de 50 % de logements locatifs sociaux ou situé dans les quartiers faisant l'objet d'une convention de rénovation urbaine avec l'Anru .

Les députés ont en outre adopté un article 9 bis au présent projet de loi de finances pour 2016 tendant à ce que les personnes vendant des terrains situés dans des quartiers faisant l'objet d'un projet de renouvellement urbain à des organismes HLM ou à un cessionnaire qui s'engage à réaliser des logements sociaux ne puissent bénéficier de l'exonération d'imposition des plus-values immobilières prévue par l'article 150 U du code général des impôts.

Ces mesures fiscales qui viennent en complément du renforcement de l'application des obligations de construction de logements sociaux prévues par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, doivent permettre de favoriser la mixité sociale dans les quartiers.

Votre rapporteure approuve ces mesures qui permettront d'accroître la mixité sociale dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

2. L'amélioration des conditions de vie dans les logements sociaux des quartiers prioritaires

Depuis 2011, les organismes Hlm peuvent bénéficier d'un abattement de 30 % de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour les logements sociaux situés dans les zones urbaines sensibles à condition de respecter les conditions suivantes :

- la signature d'une convention d'utilité sociale ; à partir de 2016, la signature d'un contrat de ville ;

- la justification du montant et du suivi des actions entreprises par ces organismes pour améliorer les conditions de vie des habitants en contrepartie de l'abattement.

La loi de finances pour 2015 a prorogé ce dispositif jusqu'en 2020.

Ce dispositif s'applique aux logements anciens, les constructions neuves financées à plus de 50 % par des prêts aidés de l'État étant déjà exonérées de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant quinze ans à compter de l'année de leur achèvement. Cette mesure fiscale est estimée à 150 millions d'euros. Seul 26 % du montant serait remboursé par l'État aux communes, ce que regrette votre rapporteure .

En contrepartie, les bailleurs sociaux doivent s'engager à améliorer la qualité de vie des habitants de ces quartiers par des actions qui contribuent notamment à la tranquillité publique et à l'amélioration du cadre de vie . L'abattement de TFPB permet de financer des actions de droit commun faisant l'objet de moyens renforcés dans les QPV et/ou des actions spécifiques à ces quartiers. Il ne peut être utilisé pour financer le « rattrapage » des moyens de gestion de droit commun. En outre, ces nouvelles actions ne doivent pas conduire à une augmentation des loyers et des charges des locataires.

Le 29 avril dernier, une charte établissant un « cadre national d'utilisation de l'abattement de taxe foncière des propriétés bâties (TFPB) dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville pour la qualité de vie urbaine » a été signée par le Gouvernement, l'Union sociale pour l'habitat (USH), les représentants de l'Association des maires de grandes villes (AMGVF) et de l'Association des communautés urbaines (Acuf), de l'Assemblée des communautés de France (ADCF) et de l'association Ville et Banlieue.

Ainsi, la charte précise que les actions doivent être menées dans les domaines suivants :

« - l'organisation d'une présence de proximité adaptée au fonctionnement social du quartier et le soutien aux personnels de proximité dans leur gestion des spécificités du patrimoine et des besoins des locataires,

« -l'adaptation des modes et rythmes d'entretien et de maintenance aux usages et modes d'habiter,

« -les dispositifs et les actions contribuant à la tranquillité résidentielle (dont la lutte contre l'occupation abusive des halls),

« -les actions de développement social permettant de développer la concertation et le « vivre ensemble »,

« -les petits travaux d'amélioration du cadre de vie (sécurité passive, réparation du vandalisme, ...). »

Une liste des actions à mener a été élaborée.

Axe

Actions spécifiques aux quartiers

Renforcement des moyens de gestion de droit commun

Renforcement de la présence du personnel de proximité (par rapport à présence dans patrimoine hors QPV)

Agents de médiation sociale

Renforcement du gardiennage et surveillance

Agents de développement social et urbain

Coordonnateur HLM de la gestion de proximité

Référents sécurité

Formation/soutien des personnels de proximité

Formations spécifiques (relation client, gestion des conflits, compréhension du fonctionnement social...)

Sessions de coordination inter-acteurs

Dispositifs de soutien

Sur-entretien

Renforcement nettoyage

Enlèvement de tags et graffitis

Renforcement maintenance équipements et amélioration des délais d'intervention

Réparations des équipements vandalisés (ascenseurs...)

Gestion des déchets et encombrants/épaves

Gestion des encombrants

Renforcement ramassage papiers et détritus

Enlèvement des épaves

Amélioration de la collecte des déchets

Tranquillité résidentielle

Dispositif tranquillité

Vidéosurveillance (fonctionnement)

Surveillance des chantiers

Analyse des besoins en vidéosurveillance

Concertation / Sensibilisation des locataires

Participation/implication/formation des locataires et associations de locataires

Dispositifs spécifiques à la sensibilisation à la maîtrise des charges, collecte sélective, nouveaux usages, gestes éco-citoyens...

Enquêtes de satisfaction territorialisées

Animation, lien social, vivre ensemble

Soutien aux actions favorisant le « vivre ensemble »

Actions d'accompagnement social spécifiques

Services spécifiques aux locataires (ex : portage de courses en cas de pannes d'ascenseurs)

Actions d'insertion (chantiers jeunes, chantiers d'insertion)

Mise à disposition de locaux associatifs ou de services

Petits travaux d'amélioration de la qualité de service (hors quartiers ANRU)

Travaux de sécurisation (gestion des caves, digicodes, Vigik...)

Petits travaux d'amélioration du cadre de vie (éclairage, sécurisation abords, résidentialisation, signalétique...)

Surcoûts de remise en état des logements

Source : cadre national d'utilisation de l'abattement de taxe foncière des propriétés bâties (TFPB) dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville pour la qualité de vie urbaine.

Une convention d'utilisation de l'abattement de TFPB signée par l'organisme Hlm, l'État et la collectivité concernée :

- indiquera les moyens mis en oeuvre dans les quartiers prioritaires, en comparaison du reste du parc ;

- fixera des objectifs, des actions et les modalités de suivi.

Cette convention sera annexée au contrat de ville.

Selon l'Union sociale pour l'habitat, une enquête réalisée en 2013 auprès des organismes Hlm bénéficiaires de cet abattement montre que les dépenses se répartissent de la manière suivante : le renforcement de la présence de personnel de proximité (37 %), la sécurisation des immeubles et les travaux d'amélioration de la qualité de service (32%), le sur-entretien et la gestion des épaves (14 %), des actions en faveur de l'insertion (9 %), des dispositifs de tranquillité (7 %).

L'utilisation de l'abattement de la TFPB s'intègre dans les démarches de la gestion urbaine de proximité (GUP) qui a pour objet d'organiser et de coordonner les interventions destinées à répondre aux besoins spécifiques des quartiers.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNEES

Mercredi 28 octobre 2015

- Agence nationale pour la rénovation urbaine : M. Nicolas Grivel , directeur général, et Mme Anne Peyricot , directrice des relations institutionnelles.

Jeudi 29 octobre 2015

- Association des maires villes et banlieues : Mme Sylvie Thomas , déléguée générale ;

- Action logement : MM. Bruno Arbouet , directeur général, et Yves Lemeur , directeur général de Foncière logement.

Mardi 3 novembre 2015

- Union sociale pour l'habitat (USH) : Mmes Beatrix Mora , directrice du service des politiques urbaines et sociales, et Francine Albert , conseillère pour les relations avec le Parlement.

Mercredi 4 novembre 2015

- Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) : MM. Raphaël Le Méhauté , adjoint à la commissaire générale, directeur de la ville et de la cohésion urbaine, et Pierre Gmerek , adjoint à la cheffe de bureau de la programmation ;

- Etablissement public d'insertion de la défense (EPIDe) : Mmes Nathalie Hanet , directrice générale, et Caroline Ritzenthaler , directrice supports et affaires financières ;

- Caisse des dépôts et consignations : Mmes Odile Renaud-Basso , directrice générale adjointe, Françoise Duquesnes , adjointe département ville, immobilier, tourisme de la direction investissement, et Brigitte Laurent , directrice des relations institutionnelles ;

- Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux ( EPARECA) : M. Thierry Febvay , directeur général.

Jeudi 19 novembre 2015

- Cabinet de M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports : M. Camille Vielhescaze , directeur-adjoint de cabinet en charge de la politique de la ville, Mmes Armelle Daam, conseillère budgétaire, Julie Lavet , conseillère parlementaire, et M. Raphaël Le Méhauté , commissaire général délégué à l'égalité des territoires et Mme Gabrielle de Nadaillac , responsable du pôle programmation et exécution des crédits de la politique de la ville.

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