Avis n° 473 (2017-2018) de M. Dominique de LEGGE , fait au nom de la commission des finances, déposé le 15 mai 2018

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N° 473

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 15 mai 2018

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense ,

Par M. Dominique de LEGGE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Mme Fabienne Keller, MM. Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Jérôme Bascher, Arnaud Bazin, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

659 , 732 , 761 , 762 , 765 et T.A. 104

Sénat :

383 et 472 (2017-2018)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES FINANCES

Réunie le mardi 15 mai 2018, sous la présidence de M. Philippe Dominati, vice-président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, transmis par l'Assemblée nationale.

Ce texte, examiné dans le cadre de la procédure accélérée, a été adopté par l'Assemblée nationale le 27 mars dernier.

Son article 2 prévoit l'adoption du rapport annexé qui présente les principales orientations stratégiques et physico-financières pour la période couverte par le présent projet de loi . En particulier, il définit les contrats opérationnels assignés aux armées, précise le calendrier et les volumes des commandes et des livraisons d'équipements ainsi que les principaux chantiers de réforme qui seront lancés dans les années à venir.

Son article 3 fixe la trajectoire financière du ministère des armées pour les années 2019 à 2023 , laquelle s'inscrit dans le cadre de l'objectif de porter les ressources des armées à un montant correspondant à 2 % du PIB d'ici 2025. Sur la période 2019-2023, les crédits de paiement de la mission « Défense » s'élèveront ainsi à 197,8 milliards d'euros .

Son article 4 prévoit une augmentation progressive de la provision destinée au financement des surcoûts liés aux opérations extérieures (Opex) et aux missions intérieures (Missint) , qui passera de 650 millions d'euros en 2018 à 850 millions d'euros en 2019, puis à 1,1 milliard d'euros à compter de 2020.

Son article 5 fixe la trajectoire d'évolution des effectifs du ministère des armées . Sur la période 2019-2023, 3 000 postes devraient ainsi être créés, puis 3 000 supplémentaires entre 2024 et 2025 .

Enfin, son article 6 prévoit que le présent projet de loi fera l'objet d' actualisations , dont l'une devra intervenir au plus tard à la fin de l'année 2021 afin de « consolider la trajectoire financière et l'évolution des effectifs jusqu'en 2025 ».

La commission a relevé plusieurs points de vigilance .

En premier lieu, si les besoins identifiés s'élèvent à 295 milliards d'euros sur la période couverte par le texte, seuls 197,8 milliards d'euros sont programmés de manière ferme . Il reviendra à l 'actualisation prévue en 2021 de préciser les montants de crédits pour les années 2024 et 2025 . Par ailleurs, l'essentiel de l'effort prévu sera porté par le prochain quinquennat .

En deuxième lieu, les contrats opérationnels assignés aux armées ne sont modifiés qu'à la marge par rapport à ceux définis dans le livre blanc de 2013 . Or ces derniers ont été significativement dépassés au cours des dernières années . Cette situation présente deux risques : d'une part, le maintien du niveau d'engagement actuel ne sera pas soutenable dans le temps , d'autre part, de manière liée, elle ne laisse pratiquement aucune marge de manoeuvre pour l'ouverture d'un nouveau théâtre .

En troisième lieu, comme la précédente LPM, le présent projet de loi de programmation est construit en euros courants, ce qui présente un risque en cas d'évolution défavorable des facteurs économiques . Par ailleurs, l'équilibre du présent projet de loi repose sur des hypothèses d'exportation par nature incertaines .

En dernier lieu, l'augmentation de la provision Opex et Missint sera financée « sous enveloppe » et vient donc en déduction de l'effort réellement consenti .

La commission a cependant considéré que ces différents points ne sont pas dirimants au regard de l'effort incontestable inscrit dans le présent projet de loi et de l'identification de priorités répondant globalement aux besoins des armées .

Sur proposition du rapporteur pour avis, la commission a adopté cinq amendements :

- un amendement n° COM-121 disposant que les contrats de développement et d'acquisition des nouveaux aéronefs devront prévoir systématiquement l'acquisition des « liasses » , afin d'améliorer l'efficacité du maintien en condition opérationnelle par l'industriel étatique ;

- un amendement n° COM-122 précisant que les effectifs du service industriel de l'aéronautique (SIAé) ne sont pas pris en compte dans l'objectif d'évolution des effectifs inscrit à l'article 5, afin d'éviter tout effet d'éviction ;

- un amendement n° COM-123 portant à 250 salariés le seuil au-delà duquel s'applique le doublement du nombre de jours d'absence par année civile dont peuvent bénéficier de droit les réservistes , ce seuil correspondant à celui des entreprises de taille intermédiaire (ETI) ;

- un amendement n° COM-124 visant à exclure du mécanisme de décote « Duflot » en faveur du logement social les cessions immobilières du ministère des armées ;

- un amendement n° COM-125 visant à assurer la transition entre l'abrogation du mécanisme de cession de gré à gré inscrit à l'article 48 de la LPM 2014-2019 et sa prorogation qui interviendra par décret en Conseil d'État .

Sous réserve de l'adoption des modifications qu'elle propose, la commission des finances a émis un avis favorable au projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense dont elle s'est saisie.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La revue stratégique de défense et de sécurité nationale de 2017 conduite par notre collègue Arnaud Danjean, député européen, a clairement rappelé les dangers auxquels le monde actuel doit faire face : multiplication des zones de tensions, retour des jeux de puissance, émergence d'acteurs non-étatiques criminels ou terroristes, développement des cybermenaces, etc.

Dans le même temps, nos armées ont été durement éprouvées du fait de l'augmentation du rythme et de la durée des engagements de la France, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur de ses frontières, alors que, dans le même temps, leurs moyens ont insuffisamment été réévalués. Au cours des dernières années, un « passif » a donc été accumulé, qu'il convient désormais de solder .

Dans ce contexte, le présent projet de loi de programmation militaire (LPM), présenté comme une LPM de « renouveau », se donne pour double objectif de réparer le passé et de préparer l'avenir , avec pour ambition de maintenir, dans la durée, un « modèle d'armée complet et équilibré » .

Il se fixe en outre un cap, rappelé aux articles 2 et 3, celui de porter les crédits en faveur de la défense à 2 % du produit intérieur brut (PIB) à l'horizon 2025 , conformément aux engagements pris par la France dans le cadre de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN).

Si, en matière budgétaire et financière, le caractère normatif des lois de programmation militaire est juridiquement faible , la détermination des crédits alloués à la mission « Défense » devant figurer in fine dans les lois de finances votées chaque année, elles constituent cependant un cadre structurant pour la période qu'elles couvrent .

Votre rapporteur pour avis s'est donc attaché à mesurer la crédibilité de la trajectoire financière proposée et à s'assurer que les priorités identifiées correspondent bien aux enjeux auxquels nos armées sont confrontées .

S'agissant des ressources, force est de constater que les contrats opérationnels, qui leur sont assignés et qui en structurent les formats, n'ayant fait l'objet que d'ajustements ponctuels ne laissent par conséquent que peu de marge de manoeuvre pour l'avenir .

Par ailleurs, la trajectoire proposée ne s'étend pas au-delà de 2023 , le Gouvernement renvoyant à des actualisations ultérieures le soin de déterminer les montants de crédits pour les années 2024 et 2025. Or c'est précisément sur ces deux années, soit après la fin du quinquennat actuel, qu'une partie importante de l'effort sera concentrée .

En effet, si 1,7 milliard d'euros supplémentaires seront consacrés chaque année à la défense jusqu'en 2023, ce montant devra atteindre 3 milliards d'euros en 2024 et en 2025 pour porter l'effort en faveur de la défense à 50 milliards d'euros, en lien avec l'objectif de porter les ressources des armées à un montant correspondant à 2 % du PIB .

Enfin, comme pour la LPM précédente, l'équilibre du présent projet de loi repose sur des hypothèses d'exportation concernant le Rafale, l'A400M et le NH90, par nature incertaines .

Sous ces réserves, la trajectoire inscrite dans le présent projet de loi présente plusieurs motifs de satisfaction .

En premier lieu, sa sincérité a été améliorée par rapport à la précédente LPM .

L'équilibre budgétaire du ministère des armées ne repose ainsi pas sur des ressources exceptionnelles mais sur des crédits budgétaires, le ministère continuant cependant de percevoir les recettes issues des cessions de ses biens immobiliers .

Par ailleurs, l'augmentation progressive de la provision destinée au financement du surcoût des opérations extérieures (Opex) et des missions intérieures (Missint), à hauteur de 1,1 milliard d'euros à compter de 2020 (article 4), répond à une demande constante de votre commission des finances, même si l'on peut regretter que, contrairement à ce qu'avait promis Emmanuel Macron, alors candidat à l'élection présidentielle, cette progression soit imputée sur la hausse des crédits dont bénéficiera le ministère des armées .

Enfin, il est prévu que les missions réalisées par les armées et les services du ministère en matière de soutien aux exportations (Soutex) fassent l'objet d'une meilleure prise en charge financière de la part des industriels .

En second lieu, les priorités identifiées vont incontestablement dans le bon sens .

Un effort sera ainsi consenti en matière de ressources humaines , qu'il s'agisse des effectifs ou des mesures en faveur de l'amélioration de la condition du personnel .

Sur les 6 000 postes qui devraient être créés au cours de la période couverte par le présent projet de loi - dont 3 000 entre 2019 et 2023 et 3 000 sur les seules années 2024 et 2025 - la moitié sera consacrée au renforcement des fonctions « renseignement » et « cyberdéfense » .

Par ailleurs, 112,5 milliards d'euros seront consacrés à l'agrégat « équipement » sur la période 2019-2023, soit une moyenne annuelle de 22,5 milliards d'euros, contre 18,3 milliards d'euros en 2018 . Ces crédits permettront la livraison anticipée de certains équipements , à l'instar du programme Scorpion pour l'armée de terre, ainsi que l'augmentation des cibles prévues dans la précédente programmation , de MRTT et de patrouilleurs notamment. Ils seront en outre consacrés, à hauteur de 22 milliards d'euros sur la période 2019-2023, à l'entretien programmé des matériels .

Enfin, les crédits consacrés à l'agrégat « infrastructures » devraient progresser de 22 % entre 2019 et 2023 par rapport à la programmation précédente .

Ces efforts, nécessaires, ne couvrent cependant qu'une partie des besoins identifiés. Leur évolution devra par conséquent être prise en compte dans le cadre de la future actualisation afin que ne soient pas répétées les erreurs du passé .

Sous le bénéfice de ces observations, prenant acte des efforts prévus dans le présent projet de loi de programmation militaire, votre rapporteur pour avis vous propose d'adopter le présent projet de loi de programmation militaire , tout en restant vigilant sur l'exécution de celle-ci et les actualisations qui interviendront d'ici 2025.

I. UN PROJET DE LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE INTERVENANT DANS UN CONTEXTE GÉOSTRATÉGIQUE INSTABLE ET APRÈS DES ANNÉES D'ENGAGEMENT DE NOS FORCES AU-DELÀ DE LEURS CONTRATS OPÉRATIONNELS

A. LA REVUE STRATÉGIQUE DE 2017 A RAPPELÉ LE CARACTÈRE INSTABLE, VIOLENT ET IMPRÉVISIBLE DU MONDE ACTUEL

Le présent projet de loi de programmation militaire (LPM) s'inscrit dans le cadre fixé par la revue stratégique de défense et de sécurité nationale , conduite par un comité de rédaction 1 ( * ) présidé par notre collègue Arnaud Danjean, député européen, dont les conclusions ont été présentées en décembre 2017.

Cette revue stratégique a procédé à une actualisation du livre blanc sur la défense et la sécurité nationale (LBDSN) de 2013, sur le fondement duquel la précédente loi de programmation militaire avait été construite 2 ( * ) .

1. Un environnement géostratégique marqué par une instabilité croissante
a) Un monde de plus en plus instable, caractérisé par l'émergence de menaces nouvelles

L'environnement géopolitique de la France est marqué par la montée des tensions, tant au niveau européen, qu'en dehors de l'Union européenne .

Cette dernière a été confrontée, au cours des dernières années, à d'importantes crises : économique et financière en 2008-2009, de la dette entre 2011 et 2013 et du Brexit , après le vote du Royaume-Uni en 2016. Elle fait également face, depuis 2015, à la montée du terrorisme jihadiste, qui a frappé son territoire à de multiples reprises.

Au-delà des frontières européennes, le système international apparaît de plus en plus multipolaire du fait de l'affirmation d'acteurs toujours plus autonomes et de l'émergence d' « organisations terroristes proto-étatiques » .

Le monde actuel se caractérise en outre par une montée de la compétition internationale, tant dans le champ économique que militaire , conduisant « certaines grandes puissances [à faire] le choix d'une posture privilégiant ouvertement les rapports de force » et à contester l'ordre international et sa gouvernance assurée par l'Organisation des Nations unies (ONU).

Dans ce contexte, les zones de tensions ne cessent de se multiplier : sur la rive sud de la Méditerranée, sur les flancs est et nord de l'Europe, en Afrique subsaharienne et en Asie.

Par ailleurs, depuis 2014, certains conflits ont gagné en intensité - la crise syrienne n'a toujours pas trouvé de solution durable - et des tensions nouvelles ont émergé, soulignant l'instabilité croissante de notre environnement géopolitique immédiat : montée en puissance des ambitions russes, illustrée par l'annexion de la Crimée en 2014, tensions persistantes dans les Balkans, etc.

Ces tensions sont en outre exacerbées par différents phénomènes : prolifération des armes de destruction massive, notamment nucléaires, et dissémination des armes conventionnelles , y compris de dernière génération, qui remettent en cause les équilibres établis.

Les évolutions technologiques amplifient par ailleurs les risques et l'instabilité . Ces progrès techniques sont particulièrement marqués dans le champ des armes de très haute technologie et des cybermenaces . Ils ne sont en outre pas limités aux acteurs étatiques , renforçant ainsi leur dangerosité.

Enfin, ces tensions sont amplifiées par deux facteurs, qui s'entretiennent mutuellement : les mouvements migratoires, causés pour partie par les dérèglements climatiques, et la pression démographique , que connaissent certains pays d'Afrique notamment.

b) Dans ce contexte, l'engagement à l'international de la France s'est amplifié au cours des dernières années

Les engagements de la France sont nombreux et se sont multipliés depuis le vote de la dernière loi de programmation militaire .

En premier lieu, la menace terroriste sur le territoire national s'est intensifiée, conduisant à la mise en place de mesure inédites, telles que le déclenchement de l'opération Sentinelle, à la suite des attentats de 2015 .

L'engagement français dans la bande sahélo-saharienne demeure nécessaire, pour prévenir l'enracinement et la montée en puissance de groupes terroristes dans cette zone très fragilisée. Actuellement, 4 000 militaires sont ainsi engagés sur ce terrain dans le cadre de l'opération Barkhane.

Au total, plus de 30 000 militaires français sont déployés, en France et à l'étranger .

2. Face à ces menaces, une stratégie renouvelée et ambitieuse apparaît nécessaire afin de consolider l'armée française et sa force d'action

La revue stratégique rappelle la nécessité de préserver l'autonomie stratégique française , ce qui suppose de maintenir une diplomatie forte et de disposer de moyens suffisants pour assurer l'effectivité des actions menées .

Alors que, « par leur simultanéité et leur intensité, les crises dans lesquelles les armées françaises sont engagées ont mis les capacités de celles-ci sous tension », la consolidation des forces stratégiques, notamment dans l'optique de protection du territoire, représente un véritable défi pour les années à venir .

Les principaux chantiers identifiés par la revue stratégique concernent l'entretien de la force de dissuasion et des capacités d'intervention des armées, l'entretien et la modernisation des équipements et la formation des militaires .

Enfin, elle souligne l'importance de soutenir la base industrielle et technologique de défense (BITD), via la mise en oeuvre de politiques ambitieuses de recherche, d'investissements, en particulier dans les nouvelles technologies, ou encore de soutien à l'export .

3. Des ambitions européennes fortes et des partenariats à consolider et à développer

La France est partie à de nombreux engagements, bilatéraux, européens et multilatéraux, qu'il convient d'entretenir et de valoriser.

Sur le plan européen tout d'abord, certains progrès peuvent être cités. Ainsi, la proposition de créer un fonds européen de défense visant au financement des capacités de défense est une innovation qui nécessitera un engagement financier important dans le domaine militaire. En outre, la coopération structurée permanente décidée en novembre 2017 et réunissant 25 États membres devrait donner un nouvel élan à la défense européenne .

Face à la multipolarité du monde actuel, l'engagement de la France en faveur du multilatéralisme , qu'il soit onusien, par les opérations de maintien de la paix auxquelles elle participe, ou lié à l'OTAN, apparaît plus que jamais nécessaire .

De même, les coopérations de défense sont appelées à monter en puissance dans les années à venir , avec l'Allemagne et l'Italie notamment.

Enfin, les partenariats stratégiques, conclus avec des pays non-européens, sont cruciaux pour la stabilité de certains pays partenaires, et justifient la défense d'intérêts communs et l'entretien de forces prépositionnées .

B. UNE EXÉCUTION DE LA PRÉCÉDENTE LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE LAISSANT UNE SITUATION DÉGRADÉE, EN DÉPIT DE L'ACTUALISATION INTERVENUE EN 2015 ET DES EFFORTS CONSENTIS DEPUIS LORS

1. Une programmation initiale qui reposait sur des hypothèses qui se sont révélées obsolètes ou dont la sincérité était sujette à caution

La loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019 était construite à partir des constats établis par le Livre blanc pour la défense et la sécurité nationale (LBDSN) de 2013.

S'agissant des opérations de gestion de crise, elle prévoyait ainsi que « nos capacités militaires devront permettre aux armées de s'engager dans la durée sur deux ou trois théâtres distincts, dont un en tant que contributeur majeur », en lien avec le désengagement des troupes françaises d'Afghanistan.

Or, depuis 2013, le contexte sécuritaire international n'a cessé de se dégrader, justifiant l'intervention de la France sur de nombreux théâtres, dans le cadre des opérations :

- Serval, au Mali, déclenchée en janvier 2013 ;

- Sangaris, en République centrafricaine, entre décembre 2013 et décembre 2016 ;

- Barkhane, en bande sahélo-saharienne, qui a succédé aux opérations Serval et Épervier à partir du 1 er août 2014 ;

- Chammal, au Levant, lancée le 19 septembre 2014.

Ces tensions sur nos forces armées se sont en outre aggravées du fait du déclenchement de l'opération « Sentinelle », qui a vu le déploiement de 10 000 soldats sur le territoire national, au lendemain des attentats de janvier 2015 .

Cette multiplication des théâtres s'est logiquement traduite par un dépassement des contrats opérationnels fixés par la LPM précédente, de l'ordre de 30 %, conduisant à une usure accélérée des matériels et à l'épuisement des personnels .

Outre ce phénomène de « suractivité », les armées ont été confrontées à un phénomène de « surintensité » , lié aux caractéristiques des théâtres sur lesquels elles sont intervenues (conditions climatiques extrêmes, sables abrasifs, théâtres étendus, etc.).

Par ailleurs, la sincérité de certaines hypothèses, qui sous-tendaient la trajectoire financière inscrite dans la précédente LPM, pouvait être questionnée , qu'il s'agisse du montant de la provision destinée au financement des surcoûts liés aux opérations extérieures (Opex), du montant des recettes exceptionnelles ou encore des exportations de Rafales (cf. infra ).

2. Une actualisation de la loi de programmation militaire en 2015 nécessaire mais insuffisante

Cette situation n'a été que partiellement prise en compte lors de l'actualisation de la LPM intervenue en juillet 2015 3 ( * ) , qui a revu, d'une part, la trajectoire financière et des effectifs du ministère de la défense (cf. infra ) et, d'autre part, les volumes de commandes et de livraisons de matériels 4 ( * ) .

Trajectoire d'évolution des ressources du ministère de la défense

(en milliards d'euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

LPM initiale

Crédits budgétaires

29,61

29,61

30,13

30,65

31,5

32,36

Ressources issues de cessions

1,77

1,77

1,25

0,91

0,28

0,15

Total LPM initiale

31,38

31,38

31,38

31,56

31,78

32,51

LPM actualisée

Crédits budgétaires

31,15

31,73

32,11

32,62

33,87

Ressources issues de cessions

0,23

0,25

0,15

0,15

0,15

Total LPM actualisée

31,38

31,98

32,26

32,77

34,02

Champ : hors contribution au CAS « Pensions »

Source : commission des finances du Sénat

Au total, sur la période 2015-2019, les ressources du ministère de la défense devaient s'élever à 162,41 milliards d'euros, soit une augmentation de 3,8 milliards d'euros par rapport à la programmation initiale .

Par ailleurs, au lendemain des attentats de Paris du mois de novembre 2015, le Président de la République, François Hollande, a annoncé, devant le Parlement réuni en Congrès le 16 novembre 2015, différentes mesures en faveur de la défense.

Entérinées lors du conseil de défense du 6 avril 2016, celles-ci s'articulaient autour de cinq axes principaux : l'arrêt des déflations de personnels, la mobilisation de 3 000 postes au profit de la chaîne opérationnelle, du renseignement et de la cyberdéfense, un effort en faveur du fonctionnement et des infrastructures nécessaires à l'accompagnement de ces mesures relatives aux effectifs, un effort financier sur le plan capacitaire, avec une priorité donnée aux munitions, à la mobilité des unités déployées sur le territoire national ainsi qu'à la protection des emprises de la défense et l'amélioration de la condition du personnel.

Malgré le coût élevé de ces mesures, estimé à près de trois milliards d'euros sur la période 2017-2019, la LPM précédente n'a pas fait l'objet d'une nouvelle actualisation .

Coût des mesures nouvelles arrêtées
en conseil de défense du 6 avril 2016

(en CP et en millions d'euros)

2017

2018

2019

Total 2017-2019

Ressources humaines

Effectifs

216

960

1 176

2 181

Condition du personnel

287

366

351

1 005

Capacitaire

Munitions

80

225

305

739

Sécurisation du territoire national et équipement des renforts opérationnels

94

164

258

Cyberdéfense et renseignement

24

152

176

Total capacitaire

271

541

812

Total

775

996

1 222

2 993

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Les lois de finances pour 2017 et 2018 ont cependant intégré cet effort supplémentaire par rapport aux crédits inscrits dans la LPM actualisée à hauteur de respectivement 400 millions d'euros et 1,6 milliard d'euros .

C. UN PROJET DE LOI CONSTITUANT LA PREMIÈRE ÉTAPE DE L' « AMBITION 2030 », QUI VISE À GARANTIR, DANS LA DURÉE, « UN MODÈLE D'ARMÉE COMPLET ET ÉQUILIBRÉ »

Comme le note la Cour des comptes dans un référé de juillet 2017 5 ( * ) , si les « compléments de moyens décidés en 2015 et 2016 et les solutions d'urgence ont permis de combler certains manques capacitaires [...] l'intensité des engagements entame le potentiel des forces, qu'il s'agisse des hommes dont le temps de formation est réduit ou des matériels dont l'usure est accélérée. Il en résulte, en dépit des efforts budgétaires en faveur du maintien en condition opérationnelle, une dégradation des taux de disponibilité de la plupart des matériels ».

Le présent projet de loi poursuit par conséquent deux objectifs principaux : « réparer » le passé et « préparer l'avenir » . Il constitue la première étape de l' « Ambition 2030 », dont l'objectif est de maintenir « un modèle d'armée complet et équilibré » , soutenable dans le temps , conformément aux recommandations de la Revue stratégique de 2017.

Cette ambition a vocation à se décliner en quatre axes rappelés dans le graphique ci-après .

Principaux axes poursuivis
par le présent projet de loi de programmation militaire

1 Ces fonctions sont : « connaissance et anticipation », « prévention », « dissuasion », « protection » et « intervention ».

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport annexé au présent projet de loi

D. DES CONTRATS OPÉRATIONNELS NÉANMOINS GLOBALEMENT INCHANGÉS : UN PARI RISQUÉ POUR L'AVENIR

Les contrats opérationnels correspondent aux missions permanentes et non-permanentes que les armées doivent être en mesure d'exercer. Leur définition dans le cadre de la LPM revêt une importance cruciale dans la mesure où elle détermine dans une large mesure le format des armées pour les années à venir .

Or, ainsi qu'il a été rappelé par certaines personnes entendues en audition, il n'a pas été prévu de modification substantielle de ces contrats opérationnels dans le présent projet de loi afin de respecter un cadrage financier contraint .

Dès lors, ainsi que l'a indiqué le général François Lecointre, chef d'état-major des armées, lors de son audition par la commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale 6 ( * ) , « le choix que nous avons fait nous impose d'être extrêmement rigoureux à l'avenir quant à la modulation de nos engagements et dans l'adaptation permanente des moyens engagés aux effets militaires que nous souhaitons produire ».

Ce choix constitue un pari risqué . En effet, si le niveau d'engagement devait finalement être stabilisé à son niveau actuel, ou s'il était accru, l'équilibre défini par le présent projet de loi serait rompu et les armées renoueraient avec la situation antérieure .

1. Des opérations de gestion de crise en théorie limitées à trois théâtres d'opération

Le point 2.2.1 du rapport annexé au présent projet de LPM fixe à trois le nombre de théâtres d'opération sur lesquels les armées pourront être engagées , avec « la capacité à assumer le rôle de nation-cadre sur un théâtre et à être contributeur majeur au sein d'une coalition ».

Volumes cumulés de forces pouvant être mobilisés prévus dans la LPM pour les années 2014 à 2019 et dans le présent projet de LPM
(situation opérationnelle de référence)

LPM 2014-2019

LPM 2019-2025

- Moyens de commandement et de soutien associés

- 1 état-major interarmées de niveau stratégique

- 1 état-major de niveau coopératif et les systèmes de commandement associés

- Des moyens de renseignement interarmées, de guerre électronique, de soutien santé, munitions et pétrolier, cyber et soutien de l'homme adaptés aux opérations menées

- L'équivalent d'une brigade interarmes représentant 6 000 à 7 000 hommes des forces terrestres

- 1 brigade interarmes (6 000 à 7 000 hommes) dont :

• 4 groupements tactiques interarmes (GTIA) équipés de blindés modernisés

• 1 bataillon du génie

• 1 à 2 groupements d'artillerie

• 1 à 2 groupements aéromobiles

• 1 groupement de renseignement multi-capteurs

• 1 groupement de transmissions

• jusqu'à 3 groupements logistiques

- 1 frégate

- 1 groupe bâtiment de projection et de commandement

- 1 sous-marin nucléaire d'attaque

- Le porte-avions avec son groupe aérien

- Des capacités amphibies comprenant 1 ou 2 bâtiments de projection et de commandement (BPC)

- Des escortes comprenant :

• jusqu'à 6 frégates

• 1 patrouilleur

• Jusqu'à 3 avions de patrouille maritime (ATL2)

• 1 à 2 pétroliers ravitailleurs

• 1 sous-marin nucléaire d'attaque

• 1 groupe de guerre des mines

- Une douzaine d'avions de chasse, répartis sur les théâtres d'engagement

- 2 à 3 bases aériennes projetées incluant :

• Leur poste de commandement air

• 14 avions de chasse

• 4 avions de ravitaillement en vol MRTT

• 1 à 2 avions de guerre électronique

• 1 plot d'hélicoptères de manoeuvre pour les missions de recherche et sauvetage au combat (RESCO)

• jusqu'à 7 avions légers de surveillance et de reconnaissance

- 2 groupements et 1 détachement de forces spéciales

- 2 plots hélicoptères

- Des avions de transport tactique

Source : commission des finances du Sénat, d'après les rapports annexés à la loi de programmation pour les années 2014 à 2019 et au présent projet de loi

De même, il prévoit, comme la précédente LPM, que les « armées devront pouvoir également être engagées dans une opération majeure de coercition, tout en maintenant un niveau d'engagement adapté sur les théâtres de gestion de crise déjà ouverts. Dans ce cadre, les armées devront être capables de mener, en coalition, sur un théâtre d'engagement unique, une opération à dominante de coercition, dans un contexte de combats de haute intensité . Elles pourront assumer tout ou partie du commandement de l'opération et auront la capacité, dans les trois milieux, de participer à une opération d'entrée en premier sur un théâtre de guerre ».

Volumes cumulés de forces pouvant être mobilisés prévus dans la LPM pour les années 2014 à 2019 et dans le présent projet de LPM
(hypothèse d'engagement majeur en intervention)

LPM 2014-2019

LPM 2019-2025

- Moyens de commandement et de soutien associés

- Les moyens permettant d'assurer les fonctions de commandement, de renseignement et de logistique de l'opération (transport, santé, essence, munitions, stocks de rechange)

- 1 état-major interarmées de niveau stratégique

- 1 état-major de niveau coopératif et les systèmes de commandement associés

- Des moyens de renseignement interarmées, de guerre électronique, de soutien interarmées de théâtre intégrant les soutiens santé, munitions et pétrolier, cyber et soutien de l'homme adaptés aux opérations menées

- Jusqu'à 2 brigades interarmes représentant environ 15 000 hommes des forces terrestres, susceptibles d'être renforcées par des brigades alliées pour constituer une division de type OTAN, dont la France pourra assurer le commandement

- Une capacité de commandement terrestre de niveau corps d'armée, et les moyens organiques de nature à permettre d'assumer les responsabilités de nation-cadre correspondant au niveau divisionnaire (systèmes de commandement, renseignement, logistique...)

- Jusqu'à 2 brigades interarmes représentant environ 15 000 hommes des forces terrestres, mettant en oeuvre près d'un millier de véhicules de combat (dont environ 140 Leclerc, 130 Jaguar, 800 véhicules de combat d'infanterie, 64 hélicoptères et 48 Caesar, susceptibles d'être renforcées par des brigades alliées pour constituer une division de type OTAN

- Jusqu'à 45 avions de chasse, incluant les avions de l'aéronautique navale

- Une capacité de commandement d'opérations aériennes

- Jusqu'à 45 avions de chasse hors groupe aérien embarqué

- 9 avions de transport stratégique et de ravitaillement

- 16 avions de transport tactique

- 4 systèmes de drones armés

- Jusqu'à 4 avions légers de surveillance et de reconnaissance (ALSR)

- 2 à 3 bases aériennes projetées

- Des moyens de défense anti-aérienne de théâtre

- Des moyens de sauvetage au combat

- Le porte-avions

- 2 bâtiments de projection et de commandement,

- Un noyau clé national d'accompagnement à base de frégates, d'un sous-marin nucléaire d'attaque et d'avions de patrouille maritime

- Une capacité de commandement de force navale à la mer

- Une force navale composée du porte-avions (hors arrêt technique majeur) avec son groupe aérien

- 2 bâtiments de projection et de commandement disposant de moyens de commandement à la mer et d'accompagnement intégrant

• jusqu'à 8 frégates (FREMM, FDA ou FTI)

• 2 sous-marins nucléaires d'attaque de type BARRACUDA

• 5 avions de patrouille maritime

• des moyens de guerre des mines et de ravitaillement à la mer

- Un ensemble significatif de forces spéciales

- Des forces spéciales s'appuyant sur des capacités adaptées

- Une composante « cyber »

Source : commission des finances du Sénat, d'après les rapports annexés à la loi de programmation pour les années 2014 à 2019 et au présent projet de loi

Actuellement, les armées françaises sont engagées dans deux opérations majeures : Chammal au Levant et Barkhane au Sahel, cette dernière ayant pris la suite de deux opérations (Épervier et Serval), ainsi qu'au Liban, dans le cadre de l'opération Daman .

Les marges de manoeuvre pour l'ouverture éventuelle d'un nouveau théâtre apparaissent par conséquent très limitées .

2. Le maintien d'un échelon national d'urgence

Comme dans le cadre de la précédente programmation, le présent projet de LPM prévoit la mise en place d'un échelon national d'urgence de 5 000 hommes en alerte permanente . Doté de « tout l'éventail des capacités des armées », il a vocation à constituer une « réserve d'intervention immédiate apte, entre autres, à saisir un point d'entrée, à renforcer en urgence un dispositif ou à évacuer des ressortissants ».

En particulier, cet échelon doit être en mesure de mettre en place une force interarmées de réaction immédiate (FIRI) de 2 300 hommes 7 ( * ) , projetable à 3 000 kilomètres du territoire national ou depuis une implantation à l'étranger, dans un délai de sept jours et de procéder à des frappes aériennes ou navales en profondeur dans un délai de 48 heures .

Volumes cumulés de forces pouvant être mobilisés prévus dans la LPM pour les années 2014 à 2019 et dans le présent projet de LPM
(échelon national d'urgence)

LPM 2014-2019

LPM 2019-2025

- 5 000 hommes en alerte, rassemblant des moyens adaptés aux opérations de gestion de crise comme aux opérations de coercition

- Permet de constituer une force interarmées de réaction immédiate (FIRI) de 2 300 hommes

- Les armées doivent rester capables de mener, avant ce délai de sept jours, une action immédiate par moyens aériens

- 5 000 hommes en alerte permanente.

- Tout l'éventail des capacités des armées

- Permet de mettre sur pied une force interarmées de réaction immédiate (FIRI) de 2 300 hommes et composée :

• de forces spéciales

• d'un groupement tactique interarmes de 1 500 hommes comprenant

Ø des blindés et des hélicoptères

Ø un groupe naval constitué autour d'un bâtiment de projection et de commandement et pouvant comprendre frégates, pétroliers ravitailleurs et sous-marins

Ø une composante aérienne comprenant une dizaine d'avions de chasse, des aéronefs de transport et de ravitaillement, des aéronefs de renseignement, des avions de patrouille maritime, un plot d'hélicoptères de manoeuvre pour les missions de recherche et sauvetage au combat (RESCO), ainsi que des moyens de commandement et de contrôle associés

• La FIRI pourra être renforcée à hauteur de 5 000 hommes sous 30 jours, équipés de moyens complémentaires dont des systèmes SAMP/T et drones MALE

Source : commission des finances du Sénat, d'après les rapports annexés à la loi de programmation pour les années 2014 à 2019 et au présent projet de loi

3. La poursuite de l'engagement des armées sur le territoire national

Dans le cadre de la fonction stratégique de « protection », le point 2.1.1.2 du rapport annexé au présent projet de LPM prévoit la pérennisation du format de l'opération Sentinelle tel que modifié à l'automne 2017 (jusqu'à 10 000 soldats en trois échelons et pendant un mois).

4. La participation des forces au soutien aux exportations (Soutex)

Afin d'assurer le succès des exportations d'armement, les savoir-faire des directions et services du ministère ainsi que des armées sont sollicités dans le cadre du dispositif de « soutien aux exportations » (Soutex) .

La direction générale de l'armement (DGA) peut ainsi être appelée à exercer des missions d'assistance à maîtrise d'ouvrage auprès des pays importateurs. L'ensemble de ses compétences est susceptible d'être sollicité : technique, gestion de projet, qualité, finance, achat, ressources humaines et sécurité. Ses prestations peuvent en outre concerner la quasi-totalité des systèmes d'armement : aéronautique, sous-marin, véhicules terrestres, missiles, etc.

L'intervention des armées peut, quant à elle, prendre la forme d'un partage d'expérience (Retex), de la mise en oeuvre de formations opérationnelles ou de formations techniques.

Ces « prestations », qui constituent souvent un critère important de sélection pour les pays importateurs, pèsent de plus en plus sur l'activité des services du ministère et des armées . Ainsi, en 2017, 414 ETP ont été mobilisés au titre du Soutex.

Les actions réalisées dans ce cadre ont pu par conséquent aggraver les tensions qui pesaient sur les personnels. Comme le note le ministère dans sa réponse au questionnaire budgétaire pour 2018, « dans les cas les plus critiques (cas des prélèvements sur stocks nationaux par exemple), la mise en oeuvre d'une démarche d'optimisation de l'activité sur le reste des parcs a été nécessaire . Cette démarche fait ressortir, dans certains cas, des besoins supplémentaires de maintien en condition opérationnelle (MCO) et en ressources humaines (dédiées à la maintenance ou nécessaires pour la mise en oeuvre d'un matériel maintenu en service) ». Cela a par exemple été le cas en 2015, « les contrats d'exportation Rafale et Fremm conclus avec l'Égypte [...] [ayant] perturbé les programmes d'armement nationaux. Dans ces occasions en effet, des mesures palliatives ont été prises en matière de maintien en condition opérationnelle des équipements en fin de vie qui n'ont pas pu être remplacés à cause des prélèvements effectués dans les stocks français ».

Effectifs mobilisés au profit du soutien aux exportations en 2017

(en ETP)

Effectifs dédiés en permanence ou employés de manière récurrente ou ponctuelle à des actions de SOUTEX

100

dont :
35 Terre, 44 Marine, 11 Air, 10 Interarmées 8 ( * )

Effectifs détachés (ou affectés temporairement) auprès de Direction de la coopération internationale (DCI) ou de la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) au titre du SOUTEX

106

dont :
60 Terre, 21 Marine, 25 Air

Effectifs correspondant à l'accompagnement étatique des contrats déjà signés ou déjà engagés sur des prospects

208

dont :
20 Terre, 17 Marine, 166 Air, 5 Interarmées

TOTAL

414

dont :
115 Terre, 82 Marine, 202 Air, 15 Interarmées

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Or ces missions n'étaient pas prises en compte dans le cadre de la précédente LPM, celle-ci se contentant d'indiquer, dans sa rédaction initiale, que « le soutien aux exportations de défense constituera un volet majeur de la politique industrielle du Gouvernement ». L'actualisation de 2015 a reconnu « l'importance du soutien des armées aux opérations d'exportation », justifiant « un effort particulier en matière d'effectifs » : 400 postes ont ainsi été redéployés au profit du Soutex, notamment en faveur de l'armée de l'air et de la marine.

Néanmoins, d'importants contrats ayant été conclus ces dernières années (vente du Rafale à l'Égypte et au Qatar et de Fremm à l'Égypte), les mesures d'accompagnement au titre du Soutex devraient continuer de peser sur les ressources humaines et financières du ministère des armées.

Le présent projet de LPM prévoit ainsi qu' « au-delà des engagements opérationnels définis par les contrats, les armées pourront être sollicitées pour apporter leur expertise dans les actions de soutien aux exportations des matériels (Soutex) ».

C'est pourquoi 400 postes consacrés au Soutex devraient être créés sur la durée de la programmation .

II. UNE TRAJECTOIRE FINANCIÈRE INCERTAINE AU-DELÀ DE 2023

A. DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA DÉFENSE QUI S'ÉLÈVERONT À PRÈS DE 198 MILLIARDS D'EUROS ENTRE 2019 ET 2023 (ARTICLE 3)

L'article 3 du présent projet de LPM, intitulé « moyens de la politique de défense », fixe la trajectoire financière de la mission « Défense » pour la période 2019-2023 , hors contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ».

Évolution des crédits de paiement de la mission « Défense »

(en milliards d'euros courants)

Rappel 2018

2019

2020

2021

2022

2023

Total
2019-2023

34,2

35,9

37,6

39,3

41,0

44,0

197,8

Source : projet de loi de programmation militaire pour les années 2019 à 2025

La trajectoire fixée par le présent projet de LPM est cohérente avec celle prévue par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 9 ( * ) . Un effort de 1,7 milliard d'euros par an devrait ainsi être consenti entre 2019 et 2022. Celui-ci sera porté à 3 milliards d'euros en 2023 .

Selon l'exposé des motifs, cette trajectoire permettra de porter l'effort de défense de 1,84 % du PIB en 2019 à 1,91 % en 2023 et s'inscrira dans l'objectif fixé à l'article 2 de « porter l'effort national de défense à hauteur de 2 % du PIB » à l'horizon 2025.

Sur la période 2019-2023, près de 198 milliards d'euros devraient ainsi être consacrés à la défense, soit un effort supérieur à celui prévu dans le cadre de la précédente LPM (190 milliards d'euros sur la période 2014-2019) et de son actualisation (194 milliards d'euros sur la même période). En moyenne, les armées devraient bénéficier de ressources supérieures de plus de 7 milliards d'euros à celles constatées sur la période 2014-2018 .

B. UNE TRAJECTOIRE RENVOYANT PRÈS DU TIERS DE L'EFFORT AU LENDEMAIN DE L'ACTUEL QUINQUENNAT (ARTICLES 3 ET 6)...

La trajectoire inscrite dans le présent projet de LPM fait peser une double incertitude sur les ressources du ministère des armées .

En premier lieu, la « marche » la plus importante inscrite dans la présente trajectoire, de 3 milliards d'euros, ne sera gravie qu'en 2023. Près du tiers de l'effort prévu entre 2018 et 2023 (9,8 milliards d'euros) est donc renvoyé au lendemain du quinquennat actuel . Certes, ainsi que l'ont indiqué plusieurs personnes entendues par votre rapporteur pour avis, ni le ministère des armées, ni les industriels n'auraient été en mesure de répondre à une augmentation massive des crédits dès 2019, néanmoins, une augmentation plus progressive, à partir de 2020, aurait été souhaitable et « absorbable » .

En second lieu, pour atteindre l'objectif de porter les crédits du ministère des armées à un montant correspondant à 2 % du PIB à l'horizon 2025 (soit environ 50 milliards d'euros), un effort supplémentaire de 3 milliards d'euros par an devra être consenti en 2024 et 2025 . Or la trajectoire inscrite dans le présent projet de LPM ne couvre de manière « ferme » que la période 2019-2023, son article 3 prévoyant une clause de rendez-vous : « les crédits budgétaires pour 2024 et 2025 seront précisés par des arbitrages complémentaires [...] prenant en compte la situation macroéconomique à cette date ainsi que l'objectif de porter l'effort national de défense à 2 % du PIB en 2025 ».

Son article 6 précise quant à lui que la présente programmation fera l'objet d'actualisations qui permettront de « vérifier la bonne adéquation entre les objectifs fixés [...] , les réalisations et les moyens consacrés », dont l'une devra intervenir avant la fin de l'année 2021, afin de « consolider la trajectoire financière et des effectifs jusqu'en 2025 ».

Au total, seuls 67 % des besoins exprimés (295 milliards d'euros) sur la période 2019-2025 sont donc couverts de manière ferme par la trajectoire inscrite dans le présent projet de loi .

Ainsi, s'agissant des équipements, 112,5 milliards d'euros sont programmés sur la période 2019-2023 pour des besoins estimés à 178,8 milliards d'euros entre 2019 et 2025, soit un reste à financer s'élevant à 60,3 milliards d'euros .

Crédits consacrés à l'agrégat « équipement » par rapport aux besoins estimés

(en milliards d'euros)

Crédits

Besoins estimés

Écart

Programmes à effet majeur

37

59

- 22

Programmes d'environnement et équipements d'accompagnement

13

19

- 6

Entretien programmé des matériels

22

35

- 13

Dépenses d'investissement des infrastructures

7,3

11

- 3,7

Autres

33,2

48,8

- 15,6

Total

112,5

172,8

- 60,3

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport annexé au présent projet de loi

C. ...CONSTRUITE EN EUROS COURANTS ET PRÉSENTANT PAR CONSÉQUENT UN RISQUE EN CAS D'ÉVOLUTION DÉFAVORABLE DES INDICES ÉCONOMIQUES...

La LPM pour les années 2014 à 2019 était la première à définir une trajectoire financière en euros courants .

Afin d'éviter que l'augmentation du coût des matières premières - notamment des carburants opérationnels - ne se traduise par une diminution des moyens consacrés à la défense, le point 5.4 de son rapport annexé prévoyait qu' « en cas de hausse du prix constaté des carburants opérationnels, la mission " Défense " bénéficiera de mesures financières de gestion et, si la hausse est durable, des crédits supplémentaires seront ouverts en construction budgétaire, pour couvrir les volumes nécessaires à la préparation et à l'activité opérationnelle des forces ».

Si la trajectoire financière inscrite dans le présent projet de LPM est également construite en euros courants, il n'a cependant pas été prévu de clause de sauvegarde à l'instar de celle prévue dans la précédente loi de programmation .

Hypothèses économiques retenues
pour la construction du présent projet de LPM

LPFP 2018-2022

Projections

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

PIB
(en milliards d'euros courants)

2 349

2 419

2 497

2 584

2 677

2 775

2 880

2 989

Croissance

1,70%

1,70%

1,70%

1,70%

1,80%

1,90%

2,00%

2,00%

Déflateur

1,10%

1,25%

1,50%

1,75%

1,75%

1,75%

1,75%

1,75%

Cours du baril de brent en dollars

55,00

60,00

60,00

60,00

60,00

60,00

60,00

60,00

Parité euro/dollar

1,10

1,10

1,10

1,10

1,10

1,10

1,10

1,10

Cours du brent en euros

50,00

54,55

54,55

54,55

54,55

54,55

54,55

54,55

Source : ministère des armées, réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis

Si les hypothèses retenues s'agissant de la parité euro-dollar et du cours du baril de brent semblent cohérentes au regard des évolutions passées, plusieurs facteurs de risques peuvent être relevés . Comme le note le Gouvernement dans le programme de stabilité 2018-2022, « si, par crainte d'une remontée rapide de l'inflation en raison d'une surchauffe aux États-Unis, la Fed décidait de remonter ses taux plus rapidement, le dollar pourrait s'apprécier, et l'euro se déprécier vis-à-vis du dollar », renchérissant ainsi le prix du pétrole. De même, le prix du baril de brent s'est considérablement accru au cours des derniers mois, passant de 45 dollars en juin 2017 à plus de 70 dollars au mois d'avril 2018 .

Interrogé sur ce point par votre rapporteur pour avis, le ministère des armées lui a indiqué disposer « d'un mécanisme de couverture permettant de se prémunir pour partie d'une variation trop brutale des cours du pétrole ».

Si, à court terme, le risque semble donc modéré, il conviendra cependant que cette question, ainsi que, plus généralement, celle de l'évolution des indices économiques, soient prises en compte lors de l'actualisation qui interviendra en 2021 .

D. ...ET DONT L'ÉQUILIBRE CONTINUE DE REPOSER SUR DES HYPOTHÈSES D'EXPORT

La LPM 2014-2019 prévoyait que les exportations permettraient de réduire progressivement la cadence de livraison de Rafale, tout en maintenant le minimum de 11 avions produits par an nécessaire pour conserver la viabilité industrielle du programme.

Comme pour la LPM précédente, l'équilibre du présent projet de loi repose sur des hypothèses d'export . Celles-ci concernent trois programmes :

- le Rafale : compte tenu des projets d'export en cours, il est nécessaire de livrer au moins 16 avions entre 2024 et 2025 pour maintenir la cadence minimale de production à 11 aéronefs par an ;

- l'A400M : la livraison de 11 avions à l'export est nécessaire entre 2023 et 2025, en maintenant une cadence de production de 10 avions par an ;

- le NH90 : la livraison à l'export de 9 aéronefs est nécessaire entre 2022 et 2023 .

Si, selon le ministère, s'agissant du Rafale, « la dynamique de l'export permet d'envisager favorablement l'atteinte de cet objectif », et s'agissant des deux autres programmes, le « risque est partagé par les pays européens qui participent à ce programme », ces hypothèses constituent un aléa majeur . Il sera par conséquent nécessaire, à l'occasion de l'actualisation qui devra intervenir au plus tard en 2021, de s'assurer de la crédibilité de ces hypothèses et, le cas échéant, de modifier la trajectoire financière inscrite dans le présent projet de loi en conséquence .

E. UNE TRAJECTOIRE DONT LA SINCÉRITÉ A CEPENDANT ÉTÉ AMÉLIORÉE PAR RAPPORT À LA PRÉCÉDENTE PROGRAMMATION

1. Une provision au titre des surcoûts Opex et Missint plus sincère, mais dont l'augmentation sera financée par le budget des armées (article 4)
a) Une provision progressivement portée à 1,1 milliard d'euros par an

La loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019 fixait un montant de provision destinée au financement des surcoûts liés aux opérations extérieures (Opex) s'élevant à 450 millions d'euros .

Ce montant, inférieur à celui inscrit dans la précédente loi de programmation militaire (630 millions d'euros), reposait sur l'hypothèse d'une diminution des engagements extérieurs de la France, en lien avec le retrait des troupes françaises d'Afghanistan .

La LPM précédente ne fixait en outre aucun montant s'agissant des missions intérieures (Missint).

Or, comme le montre le schéma ci-après, l'écart entre le montant inscrit en loi de finances initiale au titre du financement des surcoûts des Opex et des Missint n'a cessé de croître depuis 2012, passant de 257 millions d'euros à plus d'un milliard d'euros en 2017 .

Évolution de l'écart entre prévision et exécution des surcoûts Opex et Missint

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après des données ministère des armées et documents budgétaires

L'article 4 du présent projet de loi de programmation militaire prévoit, après une première augmentation de la provision Opex inscrite dans la loi de finances pour 2018 (650 millions d'euros), une progression à hauteur de 200 millions d'euros supplémentaires en 2019 (850 millions d'euros) et de 250 millions d'euros supplémentaires à compter de 2020 (1,1 milliard d'euros) .

Provision OPEX et MISSINT

(en millions d'euros)

2019

2020

2021

2022

2023

850

1 100

1 100

1 100

1 100

Source : article 4 du présent projet de loi

Par ailleurs, 100 millions d'euros de crédits de masse salariale seront inscrits chaque année en loi de finances afin de couvrir une partie des surcoûts liés aux Missint, contre 41 millions d'euros en 2017 et 2018 .

La fixation d'un montant de provision Opex et Opint supérieur à celui prévu dans la LPM précédente répond à une demande constante de votre rapporteur pour avis , qui estimait que le montant prévu en LPM et inscrit chaque année en loi de finances contrevenait au principe de sincérité posé à l'article 32 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 10 ( * ) .

Si l'évolution proposée par le présent projet de loi va, par conséquent, dans le bon sens, il convient cependant de souligner que les montants prévus apparaissent inférieurs aux montants exécutés ces dernières années .

Comme le montre le tableau ci-dessous, le montant moyen des surcoûts Opex et Missint, hors crédits de masse salariale prévus au titre des Missint, s'est élevé à 1,3 milliard d'euros entre 2014 et 2017 .

Évolution des surcoûts et de la provision
destinée au financement des Opex et Missint

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

LFI 2017

PLF 2018

Provision Opex inscrite en LFI

630

630

450

450

450

450

650

Surcoûts OPEX

873

1 250

1 118

1 117

1 172

1 330

Provision Missint inscrite en LFI

0

11

11

11

26

41

41

Surcoûts Missint

17

15

22

176

173

213

Total inscrit en LFI

630

641

461

461

476

491

691

Total surcoûts

890

1 265

1 140

1 293

1 345

1 543

Source : commission des finances du Sénat, d'après des données ministère des armées et documents budgétaires

Aussi, votre rapporteur pour avis considère-t-il que la clause de sauvegarde inscrite à l'article 4 du présent projet de loi, qui prévoit un financement interministériel de la part des surcoûts Opex et Missint (hors dépenses d'investissement et nets des remboursements des organisations internationales et des crédits de masse salariale inscrits en loi de finances au titre des missions intérieures) excédant le montant de la provision, va dans le bon sens, pour autant que celle-ci soit effectivement mise en oeuvre .

Cet article permet en outre d'inscrire dans la loi le principe d'un financement interministériel des surcoûts liés aux Missint, ce qui n'était pas le cas dans la LPM précédente , son article 4-1 issu de l'actualisation de 2015 prévoyant simplement qu'un bilan relatif aux missions intérieures en cours devait préciser « les conditions dans lesquelles ces surcoûts peuvent faire l'objet d'un financement interministériel ».

b) Une augmentation financée sur le budget du ministère des armées, réduisant d'autant l'effort effectivement consenti en faveur de la défense

Si l'augmentation du montant de la provision destinée au financement des surcoûts Opex et Missint permettra d'améliorer la sincérité du budget voté chaque année, celle-ci est intégrée dans la trajectoire financière visant à porter les ressources des armées à un niveau correspondant à 2 % du PIB à l'horizon 2025 .

En d'autres termes, cette progression s'imputera sur l'augmentation des crédits du ministère des armées, contrairement à ce qu'avait promis Emmanuel Macron, alors candidat à l'élection présidentielle : « nous devons augmenter notre effort de défense. Je propose donc de porter les ressources de la défense à 2 % de la richesse nationale, mesurée en termes de Produit Intérieur Brut, en 2025. C'est un objectif très ambitieux : si on tient compte des hypothèses actuelles de croissance du produit intérieur brut dans les prochaines années, ce budget atteindra, hors pensions et hors surcoûts Opex, plus de cinquante milliards d'euros en 2025 , contre trente-deux en 2017 » 11 ( * ) .

Au total, en retirant l'augmentation des crédits liée à la réévaluation de la provision Opex et Missint, l'effort annuel « réel » consenti entre 2019 et 2022 sera d'un peu plus d'un milliard d'euros par an et de 2,35 milliards d'euros en 2023 .

2. Des cessions immobilières qui restent facilitées et dont le produit bénéficiera au ministère des armées mais qui n'ont plus vocation à en équilibrer les ressources (articles 27 et 28)

La LPM précédente faisait reposer l'équilibre budgétaire du ministère de la défense sur des recettes exceptionnelles (REX) issues de cessions .

Trajectoire budgétaire du ministère des armées prévue par la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019*

(en milliards d'euros et en %)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total
2014-2019

Crédits budgétaires

29,61

29,61

30,13

30,65

31,5

32,36

183,86

Programme d'investissement d'avenir

1,50

-

-

-

-

-

1,50

Cessions de fréquences

0,01

1,57

1,05

0,91

0,28

0,15

3,96

Cessions immobilières

0,21

0,20

0,20

-

-

-

0,61

Cessions de matériels

0,05

-

-

-

-

-

0,05

Total REX

1,77

1,77

1,25

0,91

0,28

0,15

6,12

Total

31,38

31,38

31,38

31,56

31,78

32,51

189,98

Part des recettes exceptionnelles dans le total (en pourcentage)

5,6 %

5,6 %

4,0 %

2,9 %

0,9 %

0,5 %

3,2 %

* Hors contribution au CAS « Pensions »

Source : commission des finances du Sénat

Sur des ressources totales s'élevant à près de 190 milliards d'euros sur la durée de la programmation, les REX devaient représenter un montant de six milliards d'euros, soit 3,2 % du total .

La majeure partie de ces ressources (près de quatre milliards d'euros) devait être issue du produit de la mise aux enchères de la bande de fréquences comprise entre 694 MHz et 790 MHz.

Les cessions immobilières devaient, quant à elles, représenter un montant de 606 millions d'euros sur la période .

Enfin, 50 millions d'euros étaient prévus au titre des recettes issues de cessions de matériels .

Face au retard pris par la procédure de cessions des fréquences hertziennes, il a été décidé, dans le cadre de l'actualisation de 2015, de procéder à une rebudgétisation d'une partie des recettes exceptionnelles.

Les recettes exceptionnelles du ministère des armées
pour la période 2015-2019

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

2018

2019

Total
2014-2019

Cessions immobilières

230

200

100

100

100

730

Cessions de matériels

-

50

50

50

50

200

Total REX

230

250

150

150

150

930

Source : commission des finances du Sénat

Sur la période 2015-2019 couverte par la loi d'actualisation, le montant des recettes exceptionnelles devait ainsi passer de 4,4 milliards d'euros à un peu moins d'un milliard d'euros .

Cette rebudgétisation n'a cependant concerné que les seules recettes devant être issues des cessions des fréquences hertziennes .

À l'inverse, le montant attendu des recettes issues de cessions immobilières a été réévalué à hauteur de + 330 millions d'euros, passant de 400 millions d'euros sur la période 2015-2019 à 730 millions d'euros.

Ainsi qu'il l'a indiqué à plusieurs reprises, votre rapporteur pour avis estimait contestable de faire reposer l'équilibre budgétaire d'un ministère régalien sur des recettes exceptionnelles , par nature incertaines.

En particulier, s'agissant des recettes immobilières, de nombreux aléas peuvent conduire à des retards ou à des recettes inférieures aux prévisions, en lien avec l'état du marché ainsi que la mise en oeuvre des différents mécanismes de décote (cession à l'euro symbolique et décote « Duflot » en faveur du logement social 12 ( * ) ).

Selon le ministère des armées, entre 2014 et 2016, la mobilisation du foncier public en faveur de la production de logements sociaux dans le cadre du dispositif « Duflot » a concerné cinq cessions pour une perte de recettes s'élevant à 22,8 millions d'euros .

Ainsi que l'a indiqué la ministre des armées lors de son audition par votre commission des finances 13 ( * ) , les recettes issues de cessions immobilières pourraient s'élever à 500 millions d'euros sur la période couverte par le présent projet de loi .

Afin de sécuriser ces ressources, qui permettront le financement d'opérations d'infrastructures, notamment de la vie courante, pour lesquelles les besoins sont criants, et dans la mesure où il estime contestable de financer deux politiques par une même recette, votre rapporteur pour avis vous propose d'adopter un amendement destiné à exclure le ministère des armées du mécanisme de décote « Duflot », ainsi qu'il l'avait fait lors de l'adoption du projet de loi d'actualisation de la précédente LPM .

Le présent projet de loi proroge en outre certains dispositifs dérogatoires en faveur du ministère des armées destinés à faciliter les cessions immobilières .

Son article 27 « Prolongation des cessions d'immeubles non déclarés inutiles à l'État » de la section 2 « Dispositions domaniales intéressant la défense » vise ainsi à proroger jusqu'en 2025 le dispositif inscrit au III de l'article 73 de la loi du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière 14 ( * ) , qui prévoit la possibilité pour le ministère des armées de remettre à l'administration chargée des domaines des immeubles qui lui sont inutiles sans que ces biens aient été reconnus comme définitivement inutiles pour les autres services de l'État . Ce mécanisme dérogatoire, qui permet d'accélérer les procédures de cession , devait arriver à échéance au 31 décembre 2019.

Comme le note l'étude d'impact de l'article 27 précité, cette mesure vise à faciliter des cessions dont la réalisation avait été intégrée dans les trajectoires financières inscrites dans les deux précédentes lois de programmation militaire .

Par ailleurs, l'article L. 3211-1 du code général de la propriété des personnes publiques prévoit la possibilité pour l'État, dans le cas d'une cession d'immeuble, de faire réaliser par l'acquéreur les travaux de dépollution dont le coût, qui peut être fixé par un organisme expert indépendant choisi d'un commun accord avec l'acquéreur, est déduit du prix de vente.

Néanmoins, comme le rappelle l'exposé des motifs de l'article 28 du présent projet de loi, la mise en oeuvre de ce dispositif a pu soulever des difficultés tenant à la réalisation effective de ces travaux, au respect par l'acquéreur des règles de sécurité applicables ou encore à la détermination du coût de ces travaux faisant l'objet d'une réduction du prix de vente.

L'article 28 du présent projet de loi vise par conséquent à préciser la rédaction actuelle de l'article L. 3211-1 précité. Il prévoit notamment que les opérations de dépollution pyrotechnique doivent respecter la réglementation en matière de sécurité, que le coût de ces opérations doit être défini au préalable par un expert indépendant choisi d'un commun accord par l'État et l'acquéreur et fixé dans l'acte de cession, que cette expertise doit être indépendante, et que les éventuels surcoûts liés à l'exécution de ces opérations sont supportés par l'acquéreur.

L'article 37 prévoit quant à lui l'abrogation de l'article 48 de la LPM 2014-2019, qui permet l'aliénation de gré à gré, sans publicité préalable, ni mise en concurrence, de certains immeubles domaniaux reconnus inutiles par le ministre des armées, ce mécanisme ayant vocation à faciliter et à accélérer les procédures de cessions.

En effet, dans son avis sur le présent projet de loi, le Conseil d'État a considéré que ce dispositif relevait du domaine réglementaire . Sa prorogation devrait ainsi intervenir par décret en Conseil d'État.

Néanmoins, afin d' assurer la transition entre ces deux textes , votre rapporteur pour avis vous propose d'adopter un amendement prévoyant que les dispositions de l'article 48 précité continuent de s'appliquer jusqu'à une date fixée par décret en Conseil d'État et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2019 .

3. Un objectif de stabilisation du niveau des restes à payer de l'État dont seront exclus les investissements du ministère des armées (article 6 bis nouveau)

Les restes à payer correspondent à des autorisations d'engagement consommées non soldées , sans considération du service fait.

Comme le montre le graphique ci-dessous, le ministère des armées représente près de la moitié des restes à payer de l'État (50,4 milliards d'euros sur un total de près de 107 milliards d'euros en 2016) .

Part de la mission « Défense » dans le total des restes à payer (RAP)
et des charges à payer (CAP) de l'État

(en %)

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, rapport n° 56 (2017-2018) d'Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, déposé le 31 octobre 2017

L'article 17 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 précitée prévoit que « le montant de restes à payer , tel que retracé annuellement dans le compte général de l'état annexé au projet de loi de règlement, hors impact des changements de règles de comptabilisation des engagements, ne peut excéder, pour chacune des années 2018 à 2022, le niveau atteint fin 2017 ». Pour éviter que cette disposition ne remette en cause la programmation des investissements prévue en LPM, le Sénat, à l'initiative de ses commissions des finances et des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, avait introduit une disposition visant à exclure de ce mécanisme les dépenses du ministère des armées, à l'exclusion de celles portées par la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». Cette disposition n'a cependant pas été conservée par l'Assemblée nationale.

Le 4.3 du rapport annexé au présent projet de loi de programmation militaire précise que « compte tenu de l'augmentation des engagements prévue sur la période de la LPM, l'évolution du reste à payer du ministère des armées augmente mécaniquement. Pour cette raison, cette disposition programmatique de la LPFP ne contraindra pas les investissements du ministère des armées ».

Votre rapporteur pour avis prend acte avec satisfaction du revirement opéré par le Gouvernement , qui indiquait, dans l'exposé sommaire de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale visant à supprimer la disposition introduite par le Sénat, qu' « exclure les investissements du ministère des armées (sauf la mission " Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ") aurait [...] peu de sens ».

Il se félicite en outre de l' adoption d'un amendement de notre collègue député Jean-Jacques Bridey, président de la commission de la défense nationale et des forces armées, créant un article 6 bis , qui inscrit dans le texte de la LPM l'exclusion de la mission « Défense » du champ d'application de l'article 17 précité .

4. Une diminution progressive du report de charges à son niveau structurel

Le point 4.3 du rapport annexé au présent projet de loi prévoit une diminution du report de charges , selon la chronique figurant dans le tableau ci-après.

Le report de charge correspond à l'ensemble des dépenses obligatoires définies par l'article 95 15 ( * ) du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique comme les « dépenses pour lesquelles le service fait a été certifié au cours de l'exercice précédent et dont le paiement n'est pas intervenu ». Il comprend notamment les dettes fournisseurs qui n'ont pas pu être soldées au cours de l'exercice précédent faute d'un niveau de crédits suffisant .

Objectif d'évolution du report de charges

(en pourcentage des crédits hors masse salariale)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

17 %

15 %

15 %

15 %

15 %

16 %

15 %

14 %

12 %

12 %

11 %

10 %

Source : ministère des armées, réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis, et rapport annexé au présent projet de loi

Ce niveau de 10 % , établi en commun par le ministère des armées et le ministère de l'action et des comptes publics, est censé correspondre au report de charges structurel .

Ainsi qu'il a été indiqué à votre rapporteur pour avis, la fixation d'un tel objectif constitue une assurance de bonne gestion et ne devrait pas se traduire par une contrainte excessive pour le ministère des armées, dès lors qu'il disposera, en gestion, d'un niveau de crédits correspondant au minimum à l'annuité prévue dans le présent projet de loi .

5. Une participation « améliorée » des industriels au financement du Soutex

Les actions de soutien aux exportations (Soutex) réalisées par les services du ministère et les armées ne relèvent pas directement de leurs « missions spécifiques ». Elles doivent par conséquent faire l'objet d'un remboursement de la part des personnes qui en bénéficient, conformément aux dispositions du décret n° 83-927 du 21 octobre 1983 16 ( * ) .

Aux termes de ce texte, la part des remboursements effectuée au titre des dépenses courantes, telles que les soldes, traitements, frais d'amortissement du matériel, est portée en recettes au budget général. En revanche, la part des remboursements effectuée au titre des dépenses supplémentaires résultant de l'activité ou de la prestation fournie, telles que les majorations de solde ou de traitement, les frais de déplacement, ou encore les dépenses de carburant, est affectée aux armées sous la forme d'attributions de produits.

Les moyens mobilisés au profit du Soutex
par les services du ministère et les armées

Les armées, directions et services interarmées consacrent au Soutex un certain nombre de moyens. Ces contributions comprennent :

- en matière de personnel (masse salariale/crédits « T2 ») :

• des effectifs dédiés en permanence ou employés de manière récurrente et/ou ponctuelle à des actions de Soutex : pilotage d'ensemble, actions de Soutex courantes et participation aux grands salons d'armement nationaux ;

• des effectifs détachés ou affectés temporairement auprès de Défense conseil international (DCI) 17 ( * ) ou de la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) du ministère de l'Europe et des affaires étrangères dans le cadre de leurs missions de Soutex ;

• des effectifs correspondant à l'accompagnement étatique des contrats déjà signés ou déjà engagés sur des prospects d'exportation d'armement (ayant une chance raisonnable d'aboutir dans les deux ans) ;

- en matière de matériel et d'infrastructure (crédits « hors T2 ») :

• l'utilisation d'équipements militaires pour les actions de Soutex courantes et les salons d'armement ;

• l'utilisation d'équipements militaires au profit de DCI ;

• l'utilisation d'équipements militaires au profit des grands contrats d'exportation ou des prospects d'exportation d'armement (tels que définis plus haut).

Source : réponse au questionnaire budgétaire 2018

Malgré une multiplication par plus de 20 entre 2014 et 2016, les montants remboursés par les industriels au titre du Soutex apparaissent significativement inférieurs aux coûts réels supportés par les armées .

Évolution des montants facturés aux industriels au titre du Soutex

(en milliers d'euros)

2014

2015

2016

Armée de terre

1 078,8

1 908,3

589,9

Armée de l'air

7 050,7

23 224,0

164 468,0

Marine

184,0

1 581,3

1 872,5

Total

8 313,5

26 713,6

166 930,4

Source : réponse au questionnaire budgétaire 2018

Ainsi, le coût de l'accompagnement des contrats conclus en 2015 (vente du Rafale à l'Égypte et au Qatar et de Fremm à l'Égypte), qui s'étalera sur plusieurs années, est estimé à un milliard d'euros. Sur ce montant, 460 millions d'euros devraient être remboursés par les industriels ou les pays clients .

Le point 3.3.2 du rapport annexé au présent projet de loi précise que les modalités de prise en charge, par les industriels de l'armement, des coûts indirects incombant aux armées devra faire l'objet d'améliorations .

L'objectif d'une meilleure prise en charge par les industriels des coûts réels supportés par les armées au titre du Soutex est louable. Un équilibre devra cependant être trouvé entre plusieurs objectifs pouvant entrer en contradiction : financement des activités de Soutex à leur juste coût, préservation de la compétitivité de l'industrie française de défense et volonté politique.

Par ailleurs, comme le note le secrétariat général pour l'administration dans sa réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis, « les textes qui fondent actuellement le remboursement des dépenses supportées par le ministère des armées au titre de services rendus à des tiers présentent des insuffisances. Les concepts de missions spécifiques ou non spécifiques sont ambigus ». En particulier, ainsi que le rappelle le ministère des armées dans sa réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis, le dispositif réglementaire actuellement applicable « ne prévoit pas expressément le cas des coûts indirects 18 ( * ) » même s'il n'interdit pas « leur prise en compte dans le cadre d'une facturation au coût complet ».

Il apparaît dès lors indispensable que la réécriture de ces textes permette de lever ces ambiguïtés ainsi qu'un fléchage de l'ensemble des sommes en jeu vers le budget du ministère des armées .

III. SOUS CES RÉSERVES, LES PRIORITÉS IDENTIFIÉES PAR LE PRÉSENT PROJET DE LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE SEMBLENT ALLER DANS LE BON SENS

Évolution des crédits prévue par le présent projet de LPM par agrégat

Agrégat

Total 2019-2025
(en CP, en millions d'euros)

Évolution 2019-2023 par rapport à 2014-2018
(en %)

Évolution 2019-2025 par rapport à 2014-2018
(en %)

Renseignement

3 145

44 %

59 %

Dissuasion

-

33 %

41 %

Programmes à effet majeur (PEM)

58 557

26 %

38 %

Entretien programmé du personnel (EPP)

2 282

26 %

37 %

Entretien programmé du matériel (EPM)

34 585

22 %

34 %

Études amont

5 489

27 %

32 %

Infrastructures

11 127

22 %

30 %

Équipement d'accompagnement et de cohérence (EAC)

8 408

17 %

23 %

Autres opérations d'armement (AOA)

10 900

11 %

16 %

Activités opérationnelles (AOP)

5 753

10 %

16 %

Fonctionnement et activités spécifiques (FAS)

18 672

2 %

4 %

Personnel (T2)

86 458

3 %

2 %

Mission « Défense »

-

16 %

22 %

Les ressources sont en euros courants 2018 mais les évolutions sont calculées en euros constants 2018.

Source : ministère des armées, réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis

A. UNE AUGMENTATION DES EFFECTIFS S'ACCOMPAGNANT DE MESURES EN FAVEUR DE L'AMÉLIORATION DE LA CONDITION DU PERSONNEL

Sur la période 2019-2023, les dépenses de personnel (titre 2) devraient croître de l'ordre de 3 % par rapport à 2014-2018. Sur la période 2019-2025, cet effort devrait atteindre 2 % par rapport à 2014-2018.

1. La poursuite de la remontée des effectifs avec la création de 6 000 postes à l'horizon 2025 (article 5), notamment dans les domaines du renseignement et de la cyberdéfense

Dans sa version initiale, la LPM précédente prévoyait une diminution significative des effectifs de la défense. Entre 2014 et 2019, plus de 33 600 postes devaient ainsi être supprimés .

L'actualisation de 2015 est revenue sur cette trajectoire en réduisant les suppressions de postes par plus de 2 sur la période. Au total, il était prévu que 10 000 ETP (équivalents temps plein) soient maintenus ou créés , selon la répartition suivante :

- 6 000 créations/maintiens d'emplois au titre de la chaîne opérationnelle, de la cyberdéfense et du renseignement ;

- 1 500 créations/maintiens associés dans le soutien pour accompagner cette nouvelle trajectoire ;

- 2 500 allègements de déflations destinés à assurer la soutenabilité des plans de transformation.

Par rapport à la LPM actualisée, les décisions prises lors du conseil de défense d'avril 2016 et dans le cadre de lettre-plafond 2018-2022 devaient se traduire par la préservation et la création de 3 000 emplois en 2017, 3 300 en 2018 et 4 268 en 2019.

Évolution de la trajectoire des effectifs du ministère des armées

(en ETP)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Bilan
2014-2019

LPM initiale 2013

- 7 881

- 7 500

- 7 397

- 7 397

- 3 500

0

- 33 675

LPM actualisée 2015

- 8 007

0

+ 2 300

- 2 600

- 2 800

- 3 818

- 14 925

LPM post conseil de défense avril 2016, à jour de la LPFP 2018-2022

- 8 007

0

+ 2 300

+ 400

+ 200

+ 182

- 4 925

Pour information : LPM actualisée de la lettre-plafond 2018-2022

- 8 007

0

+ 2 300

+ 400

+ 500

+ 450

- 4 357

Champ : hors service industriel de l'aéronautique (SIAé)

Source : réponse au questionnaire budgétaire 2018

Le bilan des suppressions de postes sur la période couverte par la LPM précédente devait par conséquent s'élever in fine à 4 357 ETP, contre 33 675 ETP prévus initialement.

L'article 5 « Effectifs » du présent projet de loi, qui fixe la trajectoire d'évolution des effectifs, prévoit une poursuite des efforts engagés depuis 2016 . Au total, 3 000 postes devraient ainsi être créés entre 2019 et 2023 , selon la chronique figurant dans le tableau ci-après.

Évolution des effectifs du ministère des armées

(en ETP)

2019

2020

2021

2022

2023

Total
2019-2023

2024

2025

Total
2019-2025

+ 450

+ 300

+ 300

+ 450

+ 1 500

+ 3 000

+ 1 500

+ 1 500

+ 6 000

Source : projet de loi de programmation militaire pour les années 2019 à 2025

Les effectifs du ministère des armées atteindraient ainsi 271 936 ETP en 2023.

Cette trajectoire devrait se poursuivre en 2024 et 2025, 3 000 postes supplémentaires étant prévus au cours de ces deux années, à raison de + 1 500 ETP par an .

Les 6 000 postes ainsi créés seront plus particulièrement consacrés au renseignement, à la cyberdéfense, à la sécurité et à la protection, au Soutex et à la satisfaction des besoins et des unités opérationnelles et de leur environnement (en particulier via un renforcement des moyens du service de santé des armées).

Répartition des créations de postes prévues entre 2019 et 2023

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport annexé au présent projet de loi

Comme en matière de ressources budgétaires, l'essentiel de l'effort est donc reporté sur le quinquennat suivant, 75 % des créations de postes devant intervenir entre 2023 à 2025 .

Par ailleurs, l'article 6 de la précédente LPM prévoyait que l'évolution des effectifs du service industriel de l'aéronautique (SIAé) s'ajoutait à celle du ministère 19 ( * ) . Cette disposition, qui offrait de la souplesse au SIAé en matière de gestion de ses ressources humaines, lui permettant d'adapter ses effectifs à ses besoins immédiats ou à venir, ne figure plus dans le présent projet de loi.

Or, au cours des contrôles budgétaires qu'il a réalisés sur le financement des opérations extérieures et sur la disponibilité des hélicoptères, votre rapporteur pour avis a acquis la conviction de l'importance de conserver un service étatique en mesure d'assurer la maintenance industrielle et de faire preuve d'adaptabilité, notamment en matière de dimensionnement de ses ressources humaines en fonction de ses besoins .

C'est pourquoi il vous propose un amendement visant à reprendre la rédaction de l'article 6 précité .

2. La poursuite des chantiers d'amélioration de la condition du personnel

Au cours des dernières années, les personnels, militaires comme civils, du ministère des armées ont fait face à une dégradation de leurs conditions de travail et de vie.

Cette situation s'est traduite par un enjeu en matière de fidélisation. Comme le note le Haut comité d'évaluation de la condition militaire dans un rapport de septembre 2017 20 ( * ) , « ce n'est pas sous-estimer les faiblesses qui affectent ainsi certains flux de recrutement, que de souligner l'importance actuelle et prévisible des enjeux de fidélisation . D'une part, les spécialités ou secteurs sous-attractifs sont souvent confrontés à des difficultés de fidélisation. D'autre part, la concurrence du marché de l'emploi est forte pour des spécialités de haute technicité. Enfin et de façon plus générale, comme il ressort d'une enquête réalisée par la délégation à l'information et à la communication de la défense (DICoD), la perception de leur carrière par les militaires eux-mêmes semble affectée par la conjonction de plusieurs facteurs négatifs : difficulté à concilier vie militaire et vie personnelle, manque de moyens, crainte d'une perte de compétences techniques et tactiques, lassitude face aux difficultés rencontrées en matière de soutien et d'environnement (infrastructure et hébergement) ... ».

Diverses mesures ont été prises pour tenter de répondre à cette problématique.

Mis en oeuvre à partir de 2017, le plan d'amélioration de la condition du personnel (PACP) vise ainsi à compenser les sujétions pesant sur le personnel .

Son volet financier comprend diverses mesures, dont :

- la création de l'indemnité pour absence cumulée (IAC) ;

- la transformation de deux jours de permissions complémentaires planifiées (PCP) en indemnité pour temps d'activité et d'obligations professionnelles complémentaires (ITAOPC) ;

- l'élargissement du champ de l'indemnité pour sujétion spéciale d'alerte opérationnelle (AOPER) ;

- la revalorisation du taux journalier de l'AOPER ;

- la monétisation de deux jours supplémentaires de PCP, la revalorisation de l'indemnité de sujétion d'absence du port base (ISAPB) et l'augmentation du contingent ouvrant droit à la prime de haute technicité (PHT).

En 2018, ce plan a été poursuivi et amplifié avec la revalorisation de l'indemnité pour connaissances spéciales en langues étrangères, l'augmentation de l'enveloppe indemnitaire de la DGSE et l'augmentation du nombre d'indemnités temporaires de mobilité versées aux personnels de la direction du renseignement militaire (DRM) et de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD).

Outre le volet « rémunérations », le plan d'amélioration de la condition du personnel comprend différentes mesures d'action sociale . 7 millions d'euros ont ainsi été inscrits dans la loi de finances pour 2018 afin de financer des actions visant à :

- favoriser l'amélioration du cadre de vie en enceinte militaire ;

- développer des actions sociales communautaires et culturelles, destinées notamment à faciliter l'insertion des familles ;

- améliorer le soutien en cas d'absence prolongée du domicile afin de soutenir les familles des militaires absents.

Par ailleurs, à l'occasion de son déplacement sur la base aérienne d'Istres le 20 juillet 2017, le Président de la République a annoncé la mise en oeuvre de mesures en faveur de la condition du personnel « pour que la vie des familles soit davantage prise en compte dans les affectations, dans les décisions du quotidien, et pour que toutes celles et ceux qui peuvent être aidés dans leur quotidien le soient ».

22,5 millions d'euros ont ainsi été inscrits en loi de finances pour 2018 afin de financer un « plan d'accompagnement des familles et d'amélioration des conditions de vie des militaires 2018-2022 », dit « Plan famille » .

Principales mesures du « Plan famille »

Source : ministère des armées

Le présent projet de loi prévoit la poursuite de ce plan jusqu'en 2025. 530 millions d'euros lui seront ainsi consacrés sur la période 2019-2025.

3. La mise en place d'une nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM) à compter de 2021

Les dépenses de personnel représentent une part significative des crédits de la mission « Défense ». 20,4 milliards d'euros sur 42,6 milliards d'euros de CP sont ainsi inscrits en loi de finances pour 2018 à ce titre, soit près de 48 % des dépenses .

Outre la solde de base, les militaires peuvent percevoir différentes indemnités et primes :

- visant à compenser les sujétions liées au statut militaire (indemnité pour charges militaires et ses accessoires pour la mobilité), aux activités opérationnelles (indemnités de sujétion pour service à l'étranger en opérations extérieures (OPEX), indemnités pour services aériens, etc.), ou encore au lieu d'affectation (majoration de solde dans les départements d'outre-mer (DOM), indemnités de résidence à l'étranger, etc.) ;

- destinées à accompagner certaines mesures de gestion des ressources humaines, tels que les recrutements, les départs, ou la valorisation des compétences (primes de qualification et de service, prime de haute technicité, etc.).

La rémunération des militaires comprend ainsi actuellement près de 174 primes , qui représentent, selon le Haut comité d'évaluation de la condition militaire (HCECM) 21 ( * ) , entre 32 % (militaires du rang) et 50 % (officiers supérieurs) de la rémunération totale des militaires.

Au total, comme le notait le HCECM, « la rénovation du statut général des militaires de 2005 devait être suivie de la refondation du système indemnitaire des militaires (RSIM) mais cette réforme n'a pas abouti. Le dispositif indemnitaire existant en 2017 relève, dans ses grandes lignes, des dispositions conçues avant la professionnalisation des armées tandis que l'harmonisation interarmées n'est pas achevée malgré le lancement en 2014 de la simplification du dispositif indemnitaire des militaires (SDIM) . La lisibilité du système indemnitaire qui en résulte reste faible ».

Bilan du chantier de simplification du dispositif indemnitaire des militaires (SDIM)

La simplification du dispositif indemnitaire des militaires (SDIM, 2013-2014) a été la deuxième tentative de réforme du système de rémunération .

Le calendrier prévisionnel des travaux avait été segmenté et initialement programmé en trois phases :

- P.1 : Gestion des flux ;

- P.2 : Valorisation des compétences ;

- P.3 : Sujétions.

Le projet n'a pas abouti en raison des dysfonctionnements du calculateur de solde LOUVOIS et du lancement du projet de calculateur Source solde .

Cependant, les travaux effectués sont utilisés dans le cadre des réflexions de la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM).

Plus précisément, un projet de « prime de lien au service », intégré au thème « leviers de gestion » de la NPRM et directement issu de la phase 1 de la SDIM « gestion des flux », est en cours de finalisation.

Source : réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis

L'intensification des missions intérieures a aggravé cette complexité en remettant en cause la distinction entre temps en garnison et temps en opération, qui structurait jusqu'alors le système indemnitaire .

Le point 3.1.3.1 du rapport annexé au présent projet de loi prévoit par conséquent le lancement d'un chantier de rénovation de la politique de solde des personnels militaires qui devrait aboutir à l'horizon 2021 à la mise en oeuvre d'une « nouvelle politique de rémunération des militaires » (NPRM) .

Dans sa réponse au questionnaire budgétaire pour 2018, le ministère des armées a indiqué à votre rapporteur pour avis que la rénovation du régime indiciaire et indemnitaire des militaires poursuivra deux objectifs : compenser les sujétions liées à la condition militaire tout en garantissant l'attractivité des armées et optimiser le pilotage de la dépense de masse salariale du ministère .

Elle devra en particulier veiller à la bonne articulation entre la rémunération et :

- les sujétions et les obligations auxquelles sont soumis les personnels militaires ;

- la logique de parcours de carrière et les responsabilités assumées ;

- les activités spécifiques de milieux ;

- les qualifications et les compétences ;

- les leviers de gestion et les rémunérations indirectes.

Votre rapporteur pour avis considère que, si ce chantier devait effectivement aboutir à une simplification de la rémunération des militaires tout en prenant mieux en compte les sujétions, les parcours et les compétences, il constituerait un indéniable progrès.

Le calendrier retenu semble de nature à permettre la mise en oeuvre d'une réforme complexe tout en prenant en compte les éventuelles difficultés liées au déploiement de Source Solde qui devrait succéder au logiciel de paye Louvois à la fin de l'année 2018 .

Le coût de cette réforme est estimé à 1,7 milliard d'euros entre 2019 et 2025 , selon la chronique figurant dans le tableau ci-après.

Coût prévisionnel de la mise en oeuvre du chantier « NPRM »

(en millions d'euros)

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

Cumulé

0

0

80

220

480

480

480

1 740

Source : ministère des armées, réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis

4. Un objectif d'accroissement des effectifs de la réserve opérationnelle maintenu, permettant de réduire les tensions sur les personnels

Afin de réduire les tensions pesant sur les armées, à l'issue du conseil de défense et de sécurité nationale du 22 juillet 2016, le Président de la République François Hollande a appelé à la constitution d'une « garde nationale » destinée à appuyer les effectifs d'active.

Il est ainsi prévu que ses effectifs atteignent 40 000 réservistes d'ici la fin de l'année 2018, permettant le déploiement permanent de 1 000 réservistes par jour sur le territoire national, selon la trajectoire figurant dans le tableau ci-dessous.

Montée en puissance prévisionnelle de la réserve opérationnelle au format Garde nationale

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Cible de réservistes (en ETP)

27 352

28 094

31 258

35 715

40 173

40 173

Jours d'activité annuels moyens

24,1

26,3

28,8

36,5

36,5

36,5

Cible de réservistes déployés par jour (en ETP)

2 300

3 350

4 000

4 000

Source : rapport relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019

Le décret n° 2016-1364 du 13 octobre 2016 relatif à la garde nationale précise ainsi que « la garde nationale concourt, le cas échéant par la force des armes, à la défense de la patrie et à la sécurité de la population et du territoire ». Elle peut être appelée à contribuer aux missions des « forces armées et formations rattachées relevant du ministre de la défense » ainsi que « de la gendarmerie nationale et de la police nationale relevant du ministre de l'intérieur ». Elle est « assurée par les volontaires servant au titre d'un contrat d'engagement à servir dans la réserve opérationnelle des forces armées et des formations rattachées et les volontaires de la réserve civile de la police nationale ».

La réserve opérationnelle des armées et services recensait, au 31 décembre 2016, 32 208 réservistes , contre 28 000 l'année précédente.

Évolution des effectifs de la réserve opérationnelle

(en ETP)

Source : réponse au questionnaire budgétaire 2018

Le point 3.1.4.1 du rapport annexé au présent projet de loi maintient l'objectif de 40 000 réservistes sous engagement à servir, pour un emploi annuel moyen d'environ 37 jours.

200 millions d'euros par an seront ainsi consacrés aux réserves du ministère des armées .

Par ailleurs, le présent projet de loi comporte différentes mesures destinées à promouvoir la réserve militaire : augmentation de la durée maximale d'activité dans la réserve opérationnelle, qui sera portée de 30 jours par an à 60 jours par an (article 10), assouplissement des conditions d'avancement des réservistes dans les corps à effectifs limités (1° de l'article 11), augmentation des limites d'âge des réservistes dans certaines spécialités rares (2° de l'article 11), sécurisation de la prise en charge des frais de santé pour les réservistes et leurs ayants droit durant leur activité de réserve (a du 4° de l'article 11) et bénéfice d'une réparation intégrale du préjudice subi par le réserviste pendant les périodes d'activité dans la réserve (b du 4° de l'article 11).

De plus, l'article 10 bis , issu d'un amendement de notre collègue député Jean-Pierre Cubertafon et des membres du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés, adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis défavorable de la commission et du Gouvernement, vise à porter le nombre de jours d'absence dont peuvent disposer les réservistes de droit de cinq jours à dix jours par année civile . Il prévoit cependant que les entreprises de moins de 200 salariés peuvent refuser, sur justification, ce doublement .

Si votre rapporteur pour avis partage le souhait d'augmenter le nombre de jours d'activité dans la réserve, il considère que cette disposition peut être défavorable aux petites et moyennes entreprises, qui ne bénéficient pas des marges de manoeuvre des plus grandes sociétés . C'est pourquoi il vous propose d'adopter un amendement visant à porter le seuil à 250 salariés, correspondant au seuil des entreprises de taille intermédiaire (ETI) .

B. DES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT S'ÉLEVANT À 112,5 MILLIARDS D'EUROS SUR LA PÉRIODE 2019-2023

Les besoins en matière d'équipement sont estimés à près de 173 milliards d'euros sur la période 2019-2025 .

Sur ce montant, 112,5 milliards d'euros (65 %) ont été prévus dans la trajectoire inscrite dans le projet de loi de programmation militaire .

Évolution des dépenses de l'agrégat « Équipement »

(en milliards d'euros)

LFI 2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

Total
2019-2025

Moyenne

18,3

19,5

20,8

22,3

23,7

26,1

28,8

31,5

172,8

24,7

Source : rapport annexé au projet de loi de programmation militaire pour les années 2019 à 2025

1. Un effort financier en faveur de l'entretien programmé du matériel (EPM) qui s'accompagnera d'une réforme de l'organisation du maintien en condition opérationnelle (MCO)
a) Des crédits consacrés à l'EPM qui s'élèveront à 4,4 milliards d'euros par an en moyenne

Le point 4.1.1 du rapport annexé au présent projet de loi indique que 22 milliards d'euros seront consacrés à l'entretien programmé des matériels (EPM) entre 2019 et 2023, pour des besoins estimés à 35 milliards d'euros sur la période 2019-2025 .

Entre 2019 et 2023, la dépense en faveur de l'EPM s'élèvera donc à 4,4 milliards d'euros par an en moyenne, soit un milliard d'euros en plus par rapport à la LPM précédente .

Votre rapporteur pour avis considère que cet effort est indispensable pour permettre, d'une part, de prendre en compte les besoins accumulés au cours des années passées, qui n'ont cessé de s'accroître du fait du sur-engagement des forces et, d'autre part, d'améliorer les taux de disponibilité des matériels , dont certains apparaissent critiques.

b) Un effort financier qui s'accompagnera d'une réforme du MCO, notamment dans le domaine aéronautique

Le maintien en condition opérationnelle (MCO) vise à assurer une disponibilité optimale des matériels militaires, afin de satisfaire les objectifs des contrats opérationnels. Il recouvre pour l'essentiel l'entretien programmé des matériels (EPM), financé sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces », qui représente la plus grande partie du MCO, le soutien opérationnel (maintenance courante) et le soutien initial financé par le programme 146 « Équipement des forces ». Ce dernier est assuré par la direction générale de l'armement (DGA), qui est en outre co-responsable avec l'état-major des armées de la politique générale du MCO.

(1) Une architecture du MCO renouvelée à partir de 2012

À la suite d'une très forte dégradation de la disponibilité des matériels au début des années 2000, le ministère de la défense a lancé une importante réforme de l'organisation du MCO. Celle-ci s'est traduite par la mise en place d'un pilotage par la performance - décliné en objectifs en termes de disponibilité - grâce à une gouvernance rationalisée et une répartition des compétences et des responsabilités clairement établie.

L'architecture du MCO, qui reposait auparavant sur une logique par armée, s'appuie depuis 2012 sur une répartition des compétences par « milieu » destinée à permettre une gestion « interarmées » des matériels. Trois niveaux peuvent être distingués :

1) la maîtrise d'ouvrage , qui relève de la responsabilité des états-majors de chaque armée ;

2) la maîtrise d'ouvrage déléguée par les états-majors aux trois structures de soutien spécialisées dont ils assurent la tutelle :

- la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT). Créée en 2010 sur le modèle de la SIMMAD et placée sous l'autorité du chef d'état-major de l'armée de terre, la SIMMT est chargée de la gestion du MCO des matériels terrestres. Malgré la vocation interarmées de la SIMMT, dans les faits, 90 % des matériels dont elle assure le MCO sont en service dans l'armée de terre 22 ( * ) ;

- le service de soutien de la flotte (SSF). Créé en 2000 et placé sous l'autorité du chef d'état-major de la marine, le SSF assure la gestion du MCO des matériels navals sur une base interarmées, bien que l'essentiel des matériels dont il a la charge relève de la marine nationale ;

- et jusqu'en avril 2018, la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) . Créée en 2000 et placée sous l'autorité du chef d'état-major de l'armée de l'air, la SIMMAD gérait le MCO de l'ensemble des matériels aéronautiques, quelle que soit leur armée d'appartenance. Le MCO aéronautique est désormais géré par la direction de la maintenance aéronautique (DMAé), créée par le décret du 18 avril 2018 23 ( * ) et placée directement auprès du chef d'état-major des armées.

3) la maîtrise d'oeuvre , qui peut relever d'acteurs étatiques tels que le service industriel de l'aéronautique (SIAé), le service de la maintenance industrielle terrestre (SMITer) et le service logistique de la marine (SLM), ou encore d'entreprises industrielles privées.

Organisation du MCO des armées depuis 2012

Source : Cour des comptes, à partir des données du ministère de la défense, 2014

(2) Un ensemble de réformes destinées à améliorer la disponibilité du matériel

Malgré les résultats obtenus, l'organisation actuelle du MCO n'a pas permis de pallier l'ensemble des faiblesses constatées dans la disponibilité des matériels, en particulier aéronautiques. Dès lors, les réformes en cours ou en projet visent à permettre une meilleure régénération des matériels très éprouvés par leurs déploiements successifs, puis à améliorer le niveau d'activité opérationnelle des armées .

Le rapport annexé énonce en premier lieu des mesures portant sur l'ensemble du MCO : renouvellement des systèmes d'information techniques et logistiques, rationalisation de la chaîne d'approvisionnement, etc.

À cet égard, le ministère des armées poursuit déjà un projet supply chain , qui se traduit par la réduction des coûts d'entreposage, d'infrastructure, de transports, l'identification des pistes de gain d'effectifs et l'optimisation de l'emploi des ressources d'EPM.

En second lieu, des évolutions dans la gouvernance du MCO propre à chaque milieu sont envisagées.

Le MCO naval n'est pas appelé à connaître de grandes modifications au cours de cette période de programmation, mais le SSF devra conjuguer l'entretien de nouveaux bâtiments (Frégates multi-missions, Barracuda, etc.) à celui d'équipements plus anciens.

En ce qui concerne le milieu terrestre, l'évolution du modèle du MCO du matériel terrestre (MCO-T) à l'horizon 2025 prévoit un recours croissant aux services des industriels privés , ainsi qu'une clarification de la séparation entre les acteurs de la maintenance industrielle (MI), réalisée par le SMITer en lien avec les acteurs privés, et de la maintenance opérationnelle (MO) , réalisée sous la responsabilité du commandement de la maintenance des forces terrestres , principalement pour le matériel déployé en Opex ou relevant du parc en exploitation opérationnelle destiné à l'entraînement ou à l'alerte.

C'est principalement sur le MCO aéronautique (MCO aéro) que porteront les évolutions les plus significatives .

L'architecture du MCO aéro a été rénovée à la suite d'une décision du COMEX ministériel du 6 mai 2014 dans le but d'en améliorer l'efficacité, via une meilleure harmonisation interarmées des pratiques et des organisations des trois armées. L'aspect interarmes est en effet spécifique au matériel aéronautique, chaque armée disposant de ses propres aéronefs , à raison de 28 % de l'ensemble des aéronefs pour l'armée de terre, 16 % pour la marine et 56 % pour l'armée de l'air 24 ( * ) . Cette spécificité est parfois source de complications dans la gouvernance du MCO aéro.

À la suite des conclusions de la mission conduite par l'ingénieur général de l'armement Christian Chabbert, la ministre des armées a entrepris une réforme de l'organisation du MCO aéro.

Celle-ci peut être résumée en quatre axes principaux : la création de la DMAé (cf. supra ), accompagnée d'un renforcement de la fonction contractuelle de la maîtrise d'ouvrage, la verticalisation et de la globalisation des contrats de maintenance, confiés à un maître d'oeuvre principal, notamment à travers un renfort d'agents issus de la DGA et le renforcement de la performance industrielle et économique du SIAé.

Cette réforme fera l'objet d'une analyse plus détaillée dans les conclusions du contrôle budgétaire sur la disponibilité des hélicoptères des armées conduit par votre rapporteur pour avis qui devraient être publiées d'ici l'été 2018.

2. Un effort indéniable en faveur des équipements, mais dont une partie significative sera consacrée à la modernisation et au renouvellement de la dissuasion
a) Un calendrier et des volumes de commandes et de livraisons qui semblent répondre aux besoins des forces

Hors entretien programmé des matériels et dépenses d'infrastructures, les crédits consacrés aux équipements s'élèveront à 50 milliards d'euros entre 2019 et 2023, pour des besoins estimés à 78 milliards d'euros sur la période 2019-2025.

Le point 3.2 du rapport annexé au présent projet de LPM détaille le programme de commandes et de livraisons prévu sur la période 2019-2025 ainsi que les objectifs de parcs fixés à l'horizon 2030 .

Programme de livraisons et de commandes des principaux équipements

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport annexé au présent projet de loi

S'agissant de la composante terrestre , le programme Scorpion - qui vise à doter les groupements tactiques interarmes (GTIA) de l'armée de terre d'engins blindés de nouvelle génération de type VBMR (véhicule blindé multi-rôles) et EBRC (engin blindé de reconnaissance et de combat) - sera accéléré . La moitié des véhicules du segment médian devrait ainsi être livrée d'ici 2025 , correspondant à 936 véhicules blindés multi-rôles lourds Griffon, 150 engins blindés de reconnaissance et de combat Jaguar, 122 chars de combat Leclerc rénovés et 489 véhicules blindés multi-rôles légers VBMR-L.

De même, les livraisons de l'armement individuel futur (AIF) et des missiles moyenne portée (MMP) seront accélérées.

Pour ce qui concerne la composante navale, 4 sous-marins nucléaires d'attaque de type Barracuda, les 3 dernières frégates multi-missions (FREMM) et les 2 premières frégates de taille intermédiaire (FTI) devraient être livrés d'ici 2025 . Par ailleurs, la cible du nombre de patrouilleurs sera portée de 17 à 19, dont 11 seront livrés d'ici 2025 (contre 4 prévus initialement).

La composante aérienne bénéficiera notamment de la livraison de 6 drones Reaper armés, d'un premier système du drone MALE ( medium altitude long endurance ) européen, 28 Rafale et 55 Mirage 2000 D rénovés d'ici 2025 et de 12 premiers avions ravitailleurs MRTT ( multi role tanker transport) d'ici 2023. Par ailleurs, le nombre total de MRTT sera porté à 15, contre une cible initiale fixée à 12.

b) Une modernisation de la dissuasion nucléaire qui concentrera près du quart des crédits consacrés à l'agrégat équipement sur la période 2019-2023

Le présent projet de loi prévoit l'inscription de crédits destinés à la modernisation et au renouvellement des deux composantes de la dissuasion nucléaire, présentée comme la « clé de voûte de notre stratégie de défense ».

S'agissant de la composante océanique , le rapport annexé au présent projet de loi précise que l'ensemble des sous-marins lanceurs d'engins (SNLE) devraient être modernisés, le missile mer-sol balistique stratégique (MSBS) intercontinental M 51.3 sera mis en oeuvre et la future version du missile M 51 devrait être lancée.

Par ailleurs, les travaux relatifs au sous-marin nucléaire lanceur d'engins de troisième génération (SNLE 3G) devraient entrer en phase de réalisation.

S'agissant de la composante aéroportée , il sera notamment procédé à la rénovation à mi-vie du missile air-sol moyenne portée amélioré (ASMPA) et les études de développement de son successeur (ASN 4G) seront poursuivies.

Enfin, des crédits seront prévus pour la poursuite du programme de simulation , lancé en 1995 après la décision d'arrêter les essais nucléaires dans le Pacifique.

Au total, 25 milliards d'euros seront consacrés à la modernisation de la dissuasion sur la période 2019-2023, soit 5 milliards d'euros par an , contre 3,2 milliards d'euros en 2018.

Si l'effort consenti apparaît globalement cohérent avec les préconisations de nos collègues et anciens collègues Xavier Pintat, Jeanny Lorgeoux , André Trillard, Pascal Allizard et Claude Haut 25 ( * ) , qui estimaient nécessaire de porter les crédits consacrés à la dissuasion à un montant compris entre 5,5 milliards d'euros et 6 milliards d'euros , il convient cependant de noter qu'il représentera près du quart du total des dépenses en faveur de l'agrégat équipement .

C. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX INFRASTRUCTURES NE PERMETTANT QUE DE STOPPER GLOBALEMENT LA DÉGRADATION DU PARC

Dans son rapport sur l'immobilier des armées, votre rapporteur pour avis avait constaté l'état globalement dégradé du parc immobilier du ministère des armées

Il estimait à 2,5 milliards d'euros le niveau des besoins non-satisfaits en matière immobilière sur la période 2018-2022.

En particulier, si les besoins liés à l'accueil des nouveaux équipements (A400M, sous-marins de type Barracuda, frégates multi-missions, etc.) sont globalement satisfaits, cela a pu se faire au détriment des infrastructures du quotidien (hébergement, restauration, entraînement), qui ont constitué une variable d'ajustement budgétaire .

Au cours des dernières années, les crédits consacrés aux infrastructures ont connu une augmentation, passant de 950 millions d'euros en 2014 à plus d'un milliard d'euros en 2017, permettant de réduire le patrimoine présentant un risque très élevé .

Crédits de paiement consacrés à l'infrastructure

(en millions d'euros)

2014

2015

2016

2017

LPM 14-19 struct. 2013 (1)

950

1 051

1 065

1 033

LPM actualisée (2)

950

1 097

1 121

1 041

Écart (2-1)

0

46

56

7

dont redotation opérée lors de l'actualisation

-

22

16

dont redéploiements internes

46

34

- 9

Source : direction des affaires financières du ministère des armées

Néanmoins, dans le même temps, la part des infrastructures présentant un risque élevé devait pratiquement doubler, passant de 11 % en 2015 à 20,5 % en 2024 .

Évolution du patrimoine immobilier du ministère des armées
présentant un risque

Source : secrétariat général pour l'administration

Le point 3.1.2.1 du rapport annexé indique que la programmation inscrite dans le présent projet de loi permettra de couvrir « les dépenses d'infrastructures des bâtiments de vie courante, d'hébergement ou de logement familial ».

Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, au total, 11,1 milliards d'euros seront consacrés à la modernisation des infrastructures de défense, hors dissuasion, soit un effort annuel moyen de l'ordre de 1,4 milliard d'euros entre 2019 et 2022, en augmentation à partir de 2023 pour atteindre 2 milliards d'euros en 2025 .

Sur ce montant, 500 millions d'euros en moyenne seront consacrés à la maintenance .

Évolution des crédits consacrés aux infrastructures

(en CP, en millions d'euros)

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

Total

1 379

1 313

1 400

1 485

1 679

1 845

2 026

11 127

Champ : hors dissuasion

Source : ministère des armées, réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis

Selon les termes du ministère des armées dans sa réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis, « cet effort inédit a pour principal objectif d'améliorer significativement les conditions de vie du personnel . Des investissements spécifiques permettront un accroissement de l'offre et de la qualité des logements familiaux et une remise à niveau des locaux de travail, de restauration et d'hébergement , tandis qu'une nette intensification des opérations de maintenance sera réalisée au profit du parc immobilier ».

Votre rapporteur pour avis constate cependant que si la proportion du patrimoine présentant un risque très élevé devrait effectivement diminuer, passant de 3 % en début de programmation à 0,2 % en fin de période, de même que celle du patrimoine présentant un risque faible ou moyen, qui passera de 62 % à 40 %, celle du patrimoine présentant un risque élevé devrait presque doubler, passant de 35 % à 60 %.

Au total, comme le note le secrétariat général pour l'administration dans sa réponse au questionnaire, cet effort permettra « jusqu'en 2022, de corriger les situations les plus détériorées et, progressivement, de stabiliser la tendance à la dégradation de l'état du bâti ».

Si votre rapporteur pour avis prend acte de l'effort prévu par le présent projet de LPM, il considère cependant que négliger la question immobilière, en particulier l'amélioration de l'état des infrastructures du quotidien (hébergement, restauration, infrastructures sportives), reviendrait à réduire voire annihiler l'effort consenti par ailleurs en faveur de l'amélioration de la condition du personnel , dans le cadre du plan « Famille » notamment.

D. DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX ÉTUDES AMONT EN HAUSSE DE 270 MILLIONS D'EUROS EN MOYENNE ANNUELLE PAR RAPPORT À LA PRÉCÉDENTE PROGRAMMATION

1. Des crédits consacrés aux études amont s'élevant à un milliard d'euros par an à partir de 2022

Les crédits consacrés aux « études amont » de grands programmes d'équipement, portés par le programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » seront portés de 730 millions d'euros à un milliard d'euros à l'horizon 2022 .

Les études amont sont des recherches et études appliquées rattachées à la satisfaction d'un besoin militaire prévisible et contribuant à constituer, maîtriser, entretenir ou à développer la base industrielle et technologique de défense, ainsi que l'expertise technique de l'État nécessaires à la réalisation des opérations d'armement.

Un triple objectif est poursuivi :

- disposer des technologies nécessaires au développement et à l'évolution des systèmes pour lesquels une autonomie nationale totale ou partielle est requise ;

- disposer des compétences industrielles et étatiques permettant de réaliser les programmes futurs, dans un cadre national ou en coopération ;

- susciter et accompagner l'innovation dans les domaines intéressant la défense, au travers de dispositifs de recherche coordonnés avec l'agence nationale pour la recherche (ANR), ou en favorisant la compétitivité et l'accès au marché de la défense aux PME/PMI et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), en lien avec la direction générale des entreprises (DGE).

2. Une enveloppe de 1,8 milliard d'euros par an destinée à financer les études relatives aux programmes d'armement du futur

Par ailleurs, 1,8 milliard d'euros par an seront consacrés à la conception des programmes d'armement majeurs .

En particulier, dans le cadre de la future LPM, les études portant sur le successeur du porte-avions Charles de Gaulle, dont le retrait de service est prévu en 2038, compte tenu de la durée de vie de ses chaufferies, seront lancées.

Ces études devront notamment permettre de définir le système de propulsion de ce futur bâtiment et les contraintes d'intégration de nouvelles technologies notamment dans le domaine des catapultes, alors que, compte tenu de sa longévité, il lui faudra accueillir le Rafale ainsi que son successeur .

Le rapport annexé au présent projet de loi n'exclut en outre pas la possibilité que les deux générations de porte-avions puissent coexister durant quelques années , précisant que ces études « devront fournir les éléments de décision relatifs à une éventuelle anticipation du lancement de sa réalisation et au format de cette composante pour garantir sa permanence ».

Votre rapporteur pour avis rappelle que près de quinze années se sont écoulés entre la commande et la mise en service du Charles de Gaulle . Il apparaît par conséquent à tout le moins indispensable que les études destinées à aboutir à son remplacement soient effectivement lancées au plus tôt.

La livraison par anticipation du successeur du Charles de Gaulle, ainsi qu'elle est évoquée par le rapport annexé au présent projet de loi, suppose quant à elle non seulement que les études mais également que la commande interviennent avant 2025 . Par ailleurs, ainsi que l'ont indiqué certaines personnes entendues par votre rapporteur pour avis, « avancer l'arrivée de son successeur, nécessitera un effort financier supplémentaire pour accélérer la conduite des études. Cet effort serait à supporter tant par les études amont que par les grands programmes d'armement. Si nous voulons le faire aujourd'hui, il découlerait de cette décision un réagencement de certaines priorités ». On peut dès lors douter de la crédibilité d'une telle hypothèse , sauf à envisager la prolongation de la durée de vie du porte-avions actuel .

Par ailleurs, dans le domaine terrestre, le programme Main Ground Combat System (MGCS), destiné à préparer le successeur du char Leclerc, sera lancé. Il concentrera l'essentiel de l'enveloppe financière consacrée à ces études (1,6 milliard d'euros sur 1,8 milliard d'euros).

Dans le domaine aéronautique, le système de combat aérien futur (SCAF) sera lancé. Des choix, concernant notamment le type de plateforme et les pays partenaires, devraient être faits avant l'actualisation qui interviendra en 2021 . Ainsi que l'a indiqué le général d'armée aérienne André Lanata, chef d'état-major de l'armée de l'air, lors de son audition devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat 26 ( * ) , ce projet pourrait avoir lieu dans le cadre d'une coopération franco-allemande dans la mesure où « nos besoins et que les structures de nos aviations de chasse sont assez proches de ceux des Allemands . Ces derniers sont équipés aujourd'hui d'Eurofighter et de Tornado. Nous sommes équipés de Rafale et de Mirage 2000. Les dates de retrait de service de ces flottes se situent à des horizons calendaires équivalents . Par ailleurs, la volonté politique de progresser vers des coopérations renforcées existe. Les discussions ont débuté sur ce sujet et ont donné lieu à des déclarations politiques, côté français et côté allemand ».

E. UN PLAN DE MODERNISATION DU MINISTÈRE DONT LES CONSÉQUENCES BUDGÉTAIRES N'ONT PAS ÉTÉ CHIFFRÉES MAIS DONT LES ÉVENTUELS GAINS DEVRAIENT ÊTRE CONSERVÉS PAR LE MINISTÈRE DES ARMÉES

Outre la réforme du MCO (cf. supra ), plusieurs chantiers de modernisation seront lancés par le ministère des armées dans le cadre du plan « Action publique 2022 ».

14 chantiers ont ainsi été identifiés :

- équipement des forces ;

- maintien en condition opérationnelle des matériels ;

- numérique ;

- chaîne logistique ;

- soutiens interarmées ;

- immobilier et infrastructures ;

- organisation centrale et territoriale du ministère ;

- action internationale et soutien aux exportations ;

- personnel du ministère ;

- finances ;

- audit, évaluation et maîtrise des risques ;

- administration générale et simplification ;

- innovation ;

- développement durable.

Pour autant, aucune économie, si ce n'est une stabilisation des dépenses de fonctionnement à 3,8 milliards d'euros par an, n'est prévue.

Plusieurs personnes entendues par votre rapporteur pour avis lui ont indiqué que les éventuelles économies liées à la mise en oeuvre du plan de modernisation du ministère auraient vocation à être conservées par les armées .

AMENDEMENTS PRÉSENTÉS
PAR LA COMMISSION DES FINANCES

Amendement n° COM-121

Article 2, rapport annexé

Alinéa 173

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Afin de conforter les moyens du SIAé et d'assurer son autonomie vis-à-vis des industriels, l'acquisition des « liasses » sera systématisée.

Amendement n° COM-122

Article 5

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

À ces évolutions s'ajouteront les éventuelles augmentations d'effectifs du service industriel de l'aéronautique.

Amendement n° COM-123

Article 10 bis

Alinéas 2 et 3

Remplacer les mots :

deux cents

par les mots :

deux cents cinquante

Amendement n° COM-124

Article additionnel après l'article 28

Après l'article 28

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 3211-7 du code général de la propriété de personnes publiques est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La décote ne s'applique pas aux cessions d'immeubles domaniaux mis à la disposition du ministère des armées. »

Amendement n° COM-125

Article 37

Compléter cet article par les mots :

à compter d'une date définie par décret en Conseil d'État et au plus tard au 31 décembre 2019

TRAVAUX EN COMMISSION

I. AUDITION DE MME FLORENCE PARLY, MINISTRE DES ARMÉES

Réunie le mardi 3 avril 2018, sous la présidence de M. Vincent  Éblé, président, la commission a entendu Mme Florence Parly, ministre des armées, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

M. Vincent Éblé , président . - Je vous remercie, madame la ministre, de venir nous présenter le projet de loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2019 à 2025, adopté par l'Assemblée nationale le 27 mars dernier, et dont notre commission des finances s'est saisie pour avis. Notre audition est ouverte à la presse et retransmise sur le site internet du Sénat.

Lors de la présentation de votre budget 2018 devant notre commission, vous aviez exposé les grandes orientations de cette LPM. Elles se résumaient, selon vos mots, au triptyque « soutenabilité, préparation de l'avenir, soutien à ceux qui s'engagent ».

Le projet de loi de programmation prévoit un effort significatif en faveur de la défense, de l'ordre de 200 milliards d'euros sur la période 2019-2023, en lien avec l'objectif de porter les crédits consacrés aux armées à un montant correspondant à 2 % du produit intérieur brut d'ici 2025.

Madame la ministre, après votre présentation, je donnerai la parole à Dominique de Legge, notre rapporteur pour avis, rapporteur spécial des crédits de la mission « Défense », puis à Philippe Bonnecarrère, rapporteur pour avis de la commission des lois, puis à tous les collègues qui le souhaitent.

Mme Florence Parly, ministre des armées . - J'ai présenté le projet de loi de programmation militaire 2019-2025 à vos collègues de la commission des affaires étrangères et de la défense le 20 février dernier. Depuis, ce texte a été examiné et voté à une très large majorité à l'Assemblée nationale. C'est un texte qui consacre - enfin - un renouveau des armées. Je connais l'attachement du Sénat à un débat parlementaire, riche, apaisé, constructif. Je connais aussi les interrogations des uns et des autres. Je les ai entendues en commission au Sénat, ainsi qu'à l'Assemblée nationale... avec plus ou moins de bonne foi. Je suis donc ravie de pouvoir présenter ce texte devant vous et d'aborder directement toutes les préoccupations, en particulier financières.

Mais avant tout, quelle est l'ambition du Gouvernement pour notre défense ? Comment entend-il atteindre les objectifs ? C'est une question centrale car cette LPM ne se résume pas à porter le budget des armées à 2 % du PIB à l'horizon 2025. Il s'agit d'abord de donner aux militaires les moyens de leur mission : protéger la France et les Français. Le Président de la République l'a dit très clairement : d'ici 2030, la France doit pouvoir intervenir partout, gagner sur tous les terrains, l'emporter face à tous les ennemis, seule ou en coalition. Pour réussir ce défi, il nous faut un modèle d'armée complet et équilibré ; ce n'est pas un luxe, c'est une nécessité, si nous voulons faire entendre la voix de notre pays, défendre pleinement les Français, répondre aux menaces qui émergent.

Car ces menaces, comme l'a montré la Revue stratégique , sont aujourd'hui plus fortes, plus imprévisibles, plus diffuses. Le terrorisme, nous venons encore de le voir douloureusement dans l'Aude, continue de frapper, lâche, violent, aveugle. Il faut le combattre jusqu'au bout. Les grandes nations s'arment et font montre de leur puissance par tous les moyens. Quant au cyberespace, comment ignorer qu'il est devenu un espace de confrontations à part entière ?

Le présent projet de loi reflète donc une ambition structurée autour de quatre axes. Il est le premier jalon de notre ambition pour les armées à l'horizon 2030, telle que définie par le Président de la République.

Premier axe : cette loi de programmation militaire 2019-2025 est placée « à hauteur d'homme ». D'abord, avec 6 000 recrutements supplémentaires prévus, nous inversons résolument la tendance baissière des effectifs de ces dix dernières années. Ensuite, nous nous concentrons sur le quotidien de nos soldats, quand les précédentes LPM s'étaient focalisées sur les gros équipements. Avec 23 000 nouveaux treillis ignifugés livrés dès cette année, 25 000 gilets pare-balle dernier standard l'an prochain, des casques supplémentaires, des tenues NRBC, c'est un effort majeur en faveur des petits équipements du quotidien, qui sont toujours les premiers sacrifiés dans les coupes budgétaires. Le « Plan famille » est prolongé. Par ailleurs, de nouveaux droits sont accordés, comme la possibilité pour un militaire en activité de devenir conseiller municipal, dans certaines villes.

Deuxième axe : un renouvellement majeur de nos capacités opérationnelles. Il n'est pas une option, mais un impératif absolu. Équipements vieillissants, parfois devenus inadaptés, impasses capacitaires qui font planer des dangers sur nos forces et sur notre supériorité opérationnelle : nous devions combler les carences du passé tout en restant l'oeil rivé sur l'avenir. C'est donc à la fois une LPM qui répare et qui prépare.

Aucune des trois armées n'a été oubliée et chacune verra ses moyens profondément renouvelés au cours des prochaines années. Quelques exemples : le programme d'équipement majeur de l'armée de terre, Scorpion, sera accéléré pour atteindre en 2025 la moitié de la cible et non plus un tiers ; l'armée de l'air recevra 6 drones armés, de nouveaux avions de chasse, des Rafale et des Mirage 2000D rénovés ainsi que les 12 premiers MRTT, avions ravitailleurs - dont la cible finale est passée de 12 à 15. Quant à la marine nationale, elle recevra de nouveaux sous-marins nucléaires d'attaque, des frégates et des patrouilleurs. Les deux composantes de la dissuasion nucléaire seront renouvelées.

Le troisième axe, c'est la garantie de notre autonomie stratégique, pour s'assurer que la France sera toujours capable de faire entendre sa voix et de l'emporter quels que soient le terrain, l'adversaire, les conditions. Pour anticiper les menaces et les évolutions géopolitiques, 1 500 nouveaux postes et 4,6 milliards d'euros d'investissements dans les équipements sont prévus dans le domaine du renseignement. La lutte dans le cyberespace est dotée de 1,6 milliard d'euros et 1 000 cybercombattants supplémentaires seront recrutés d'ici 2025.

Garantir notre autonomie stratégique exige aussi de fédérer nos alliés, en particulier nos voisins européens, confrontés aux mêmes menaces et aux mêmes dangers que nous, même si les priorités peuvent différer selon les pays. Nous devons porter avec eux des coopérations autour de projets stratégiques. Je pense à notre politique spatiale, à notre groupe aéronaval, à la défense aérienne élargie. L'Europe de la défense ne pourra se construire que grâce à ces projets, grâce à des initiatives concrètes et des opérations communes. C'est seulement ainsi que nous créerons une Europe forte, protectrice et garante de notre souveraineté.

Le quatrième axe est celui de l'innovation, pour construire des armées adaptées aux conflits modernes, des armées numériques, technologiques, afin de préserver notre supériorité opérationnelle dans les conflits futurs. Beaucoup a été fait ces derniers mois, création du fonds Def'Invest entre la direction générale pour l'armement (DGA) et Bpifrance, le lancement du partenariat d'innovation Artemis... Le projet de loi de programmation militaire accélère ce mouvement. L'accent est mis sur la recherche et le développement, le budget consacré aux études et à l'innovation passe de 730 millions d'euros par an aujourd'hui à 1 milliard d'euros par an dès 2022.

Avec ce projet de loi, nous engageons les phases préparatoires des grands programmes d'armement qui structureront l'avenir de nos armées : 1,8 milliard d'euros par an en moyenne seront consacrés aux études, pour concevoir l'aviation de combat du futur, le char de combat du futur ou le successeur du Charles de Gaulle .

Enfin, ce projet de loi est un texte de responsabilité. La Nation consent des moyens exceptionnels à nos armées, il nous faut veiller à ce que chaque euro investi soit un euro bien employé.

Le ministère des armées continuera donc sa modernisation. Mais les précédentes LPM traduisaient une modernisation sous contrainte. Dans le présent projet, la modernisation est choisie, voulue. Les 14 chantiers inscrits dans le plan « Action publique 2022 » sont lancés pour transformer le ministère.

Ces fondements politiques que je viens de détailler ne seraient rien sans des moyens à la hauteur des ambitions. Je souhaite à ce sujet mettre fin à certaines craintes, voire certains fantasmes véhiculés depuis des mois concernant le budget de nos armées. La fin de gestion 2017 offre des bases solides, tout comme l'augmentation conséquente du budget 2018. Il n'y a pas de demi-mesures, pas de « cadavres dans le placard », pas de trompe l'oeil, mais des moyens exceptionnels, qui correspondent aux besoins. Les armées ont trop souvent servi, par le passé, de variable d'ajustement dans le budget de l'État : près de 60 000 emplois en moins entre 2005 et 2015, tandis que le nombre d'emplois dans la fonction publique d'État augmentait.

Sur la gestion 2017, contrairement aux usages du passé à l'arrivée d'une nouvelle majorité, nous n'avons procédé à aucune annulation ni interruption de programme. Nous avons tenu tous les engagements de la précédente majorité, y compris ceux qui n'étaient pas financés.

La loi de finances initiale affichait 32,4 milliards d'euros, le report des années précédentes se montait à 700 millions d'euros, les ouvertures par décret d'avance ont représenté 950 millions d'euros et les annulations, à l'été, 850 millions d'euros. Le report sur 2018 a été de 38 millions d'euros. Soit un total de 33,2 milliards d'euros. Si l'on majore le montant initial des besoins de financement additionnels pour les opérations extérieures (OPEX) et les missions intérieures (Missint), on obtient le chiffre de 33,4 milliards d'euros, soit un écart de 228 millions d'euros qui correspond au reste à charge de la mission défense. Non seulement la loi de finances exécutée a été supérieure à la loi de finances votée, 33,2 milliards d'euros contre 32,4 milliards d'euros, mais la contribution du ministère au surcoût des OPEX a été de 228 millions d'euros, non de 850 millions d'euros. C'est la juste contribution à la solidarité interministérielle, ni plus, ni moins.

La gestion 2017 constitue donc une base saine ; il en de même pour le budget 2018. Le Parlement, je vous le rappelle, a augmenté les crédits de la défense de 1,8 milliard d'euros. C'est un budget de responsabilité et de cohérence. Il finance les décisions passées, annoncées mais non financées, notamment celles du Conseil de défense d'avril 2016 ou les celles concernant la condition du personnel ; il finance aussi les engagements pris à l'automne et le « Plan famille », ainsi que la hausse de la provision OPEX, 200 millions d'euros, ou le « Paquet protection », 200 millions d'euros également, que j'ai présenté à l'automne. Le budget de 34,4 millions d'euros finance la totalité des mesures qui ont été décidées.

Ce sont donc des bases saines pour le projet de loi de programmation militaire 2019-2025. Celui-ci a été construit autour d'un objectif clair, fixé par le Président de la République : la France consacrera 2 % de sa richesse nationale à la défense en 2025. C'est un objectif ambitieux : nous nous sommes donné les moyens d'y parvenir. Concrètement, ce sont donc 198 milliards d'euros que la France investira dans sa défense entre 2019 et 2023 ; et 295 milliards sont programmés sur l'ensemble de la période couverte par la LPM.

Cette remontée exceptionnelle des crédits de la mission défense a suscité la crainte d'un prétendu « mur budgétaire ». Il n'existe pas. Le budget des armées va augmenter de 1,7 milliard d'euros chaque année jusqu'en 2022 ; et de 3 milliards d'euros à partir de 2023. En 2018, avec 1,8 milliard d'euros de progression, le budget de la mission « Défense » a déjà augmenté de 5,6 %. En 2023, ce sera 7,3 % de plus, soit une différence de 1,7 point par rapport à cette année : la marche n'est pas si haute !

Une actualisation de la LPM est prévue en 2021. Ce choix est pertinent, le même chef de l'État prendra les décisions initiales et les actualisations. Imaginons que les recettes fiscales de la France croissent plus vite que prévu : nous n'allons quand même pas priver les armées de moyens supplémentaires ! L'actualisation prévue à l'article 6 est un bon moyen de surveiller l'exécution de la LPM et de tenir compte des évolutions macroéconomiques pour tracer le chemin qui restera à parcourir d'ici 2025.

À propos de l'objectif de 2 %, j'entends parfois un argument un peu étonnant : le poids des pensions serait « flou » dans le texte de loi. Nous utilisons pourtant ici les mêmes standards que ceux des précédentes lois de programmation. La LPM est présentée en milliards d'euros courants hors pensions. Pour calculer le pourcentage de l'effort de défense, nous ajoutons les pensions civiles et militaires du ministère, selon le périmètre déterminé par l'OTAN.

Le service national universel (SNU) verra le jour et constituera une opportunité extraordinaire pour tous les jeunes, qui vont ainsi se connaître et se comprendre. Ensuite, je veux rassurer les inquiets : le Président de la République s'y est engagé, le SNU aura un financement ad hoc , hors du cadre de la LPM. L'article 3 indique expressément que les moyens prévus dans la LPM le sont à périmètre constant de la mission « Défense ». Par conséquent, le financement du SNU ne ponctionnera d'aucune manière le budget de nos armées prévu dans cette LPM.

Ce projet de loi de programmation militaire procède d'un souci majeur de sincérisation. Les hypothèses budgétaires sont solides, fiables, sincères. Le texte se fonde sur des crédits budgétaires fermes. Il n'y a pas de paris sur des ressources exceptionnelles, pas de prévisions par définition aléatoires sur des recettes issues de cessions : uniquement des crédits budgétaires.

Cela ne veut pas dire que le ministère ne bénéficiera pas de recettes exceptionnelles au cours de la période ; 100 % du produit des cessions immobilières reste acquis au ministère des armées. Si recettes exceptionnelles il y a, elles nous permettront de faire mieux et plus vite. Mais elles ne sont pas prises en compte, il n'y a donc pas de risque dans la programmation des dépenses.

Cela me conduit à dire un mot du report de charges. Son montant est un indicateur de l'adéquation entre les ressources prévues et les dépenses programmées. Et en général, les dégradations résultent d'annulations, ou de recettes exceptionnelles qui ne sont pas encaissées pour les montants attendus ou dans les délais prévus. Ne pas prendre en compte de recettes exceptionnelles, c'est également maîtriser mieux le report.

Pour autant, le report zéro n'existe pas : il y a toujours des factures qui arrivent trop tard pour être payées ou sont incomplètes. Ce report de charges structurel et incompressible, Bercy et mes services l'ont estimé à 10 % des crédits hors masse salariale du ministère. Nous avons donc comme objectif de réduire le report de charges à 10 % d'ici fin 2025, contre 16 % fin 2019. Il augmentera cependant en valeur absolue, mécaniquement, parce que notre budget augmente. Il se situera donc autour de 3,7 milliards d'euros fin 2025. C'est un engagement de bonne gestion.

Il y a un dernier point, et pas des moindres, que je voulais évoquer avec vous. On m'interroge souvent sur l'augmentation de la provision des OPEX : les mêmes qui disaient hier que la provision était trop faible et les budgets insincères clament aujourd'hui que la provision va devenir trop forte et empêchera le renouvellement de notre outil de défense.

Mais demain, la provision OPEX et Missint représentera 2,5 % des crédits, contre 2 % dans le cadre de la précédente LPM. Cet élément de sincérisation n'entraîne pas une forte ponction sur le budget des armées.

Je voudrais enfin noter que le projet de loi de programmation militaire comporte un renforcement des pouvoirs de contrôle du Parlement sur l'exécution de la LPM. Cette évolution, proposée par le président de la commission de la défense nationale de l'Assemblée nationale, m'a semblée bienvenue pour que vous puissiez apprécier parfaitement l'exécution de la programmation. C'est une marque de confiance entre nous et un gage de transparence. Je compte sur vous pour signaler tout dérapage ou tout engagement qui ne serait pas respecté mais je peux d'ores et déjà vous dire que je suis très confiante : cette LPM est construite pour pouvoir être appliquée.

M. Dominique de Legge , rapporteur pour avis . - Le projet de loi de programmation militaire comporte des aspects positifs. Les chiffres montrent un effort réel et nous sommes sensibles à votre souci de « sincérisation », terme épouvantable mais réalité intéressante. La démarche se retourne un peu contre vous, car sur le 1,8 milliard d'euros que vous avez mentionné, 1,4 milliard d'euros sert à payer des factures anciennes, il n'y a donc guère de marge pour les mesures nouvelles, notamment en faveur des familles.

Vous voulez nous démontrer qu'il n'y a pas de mur budgétaire, et votre présentation est bien faite, mais la réalité demeure : l'effort est reporté sur le prochain quinquennat. Ce ne seront plus 1,7 milliard d'euros supplémentaires, mais 3 milliards d'euros qu'il faudra alors dégager. En pourcentage de PIB, l'évolution est probante, mais au regard des menaces, c'est une autre affaire...

Vous mentionnez l'objectif de 2 % du PIB, mais vous ne vous attardez pas sur les contrats opérationnels. Quelle amélioration par rapport à la précédente LPM, qui a connu un surengagement des armées ? À niveau d'activité inchangé, comment l'effort supplémentaire suffira-t-il à « reconstruire » nos armées, pour reprendre votre terme ?

Quant à la dissuasion nucléaire, sa rénovation absorbe des sommes très substantielles. Est-ce compatible avec l'objectif de remise à niveau de l'ensemble des équipements ? Le Charles de Gaulle doit être mis à la retraite dans quinze ans, or la LPM ne comporte que des études pour son remplacement : vous avez coché la case, certes. Mais quelle est l'espérance de vie du porte-avions actuel ? Quelle est la date limite de la décision de renouvellement ? Même remarque sur l'avion de combat du futur, au regard de la disponibilité des aéronefs, hélicoptères en particulier : pouvez-vous nous en dire plus sur les décisions industrielles à prendre ? Et sur la politique d'acquisition des « liasses », ces modes d'emploi sans lesquels l'entretien des A400M ou des hélicoptères nous rend très dépendants des constructeurs ? Nous avons pu mesurer le problème lors de notre déplacement à Clermont-Ferrand.

M. Philippe Bonnecarrère , rapporteur pour avis de la commission des lois . - Je suis un peu gêné : en commission des lois, nous ne parlons jamais d'argent...

M. Vincent Éblé , président . - C'est un tort !

M. Philippe Bonnecarrère , rapporteur pour avis . - ... mais de liberté, plus précisément de libertés publiques. Ma question portera donc sur l'article 19, qui en cas de situation d'alerte prévoit, au nom de la cybersécurité, un « chalutage » des data . La mesure est-elle pertinente ? Sans analyse des pièces jointes, la surveillance des mouvements numériques sera inefficace ; mais celles-ci sont des éléments de correspondance privée. C'est le point le plus délicat.

Mme Florence Parly, ministre . - La forte activité opérationnelle, de 30 % supérieure à la prévision en dernière LPM, a pénalisé la régénération des matériels et a provoqué une « surchauffe » dans l'emploi des personnels. C'est bien pourquoi le présent projet de loi augmente les crédits d'équipement, pour l'acquisition et l'entretien ; et les moyens de fonctionnement, pour relever le niveau de la préparation opérationnelle. Une LPM à hauteur d'homme, cela signifie aussi rendre plus supportable le haut niveau d'engagement, en améliorant le cadre de vie des familles et les conditions d'entraînement des militaires. La force opérationnelle terrestre est aujourd'hui parvenue à maturité, ce qui permettra à l'armée de terre de mieux concilier l'ensemble de sa mission. Par ailleurs, nous avons entrepris avec le ministre de l'intérieur Gérard Collomb d'améliorer le fonctionnement de l'opération Sentinelle, alors que nous savons que celle-ci sera durable.

En LPM, sont prévus 37 milliards d'euros pour la dissuasion nucléaire, dont 25 milliards d'euros pour la rénovation des deux composantes, aéroportée et océanique. Le budget de la défense progresse, donc également les moyens de la dissuasion nucléaire, en valeur absolue, mais le pourcentage est stable : 12,5 % demain contre 12 % aujourd'hui. Il n'y a donc pas d'effet d'éviction.

Le porte-avions Charles de Gaulle sera retiré en 2040. Les études visent, précisément, à préparer son remplacement ; et aucune décision n'est prise à ce jour sur un deuxième porte-avions. Seront évalués les systèmes de propulsion, de combat aérien, les nouvelles technologies, notamment pour les catapultes. C'est à l'issue de ces études que nous prendrons les décisions.

Pour le système de combat aérien du futur, la LPM pose les fondations du renouvellement des capacités, qui interviendra autour de 2030-2040. Avions, drones, systèmes de commandement connectés et interopérables, nous avons provisionné 1,6 milliard d'euros pour les études, en faisant l'hypothèse de coopérations européennes. La feuille de route est attendue à l'été 2018 et 2021 sera une année importante pour le choix d'une architecture de système de combat. C'est un enjeu majeur pour la construction de l'Europe de la défense et la coopération franco-allemande.

Le maintien en condition opérationnelle (MCO) aéronautique - et, singulièrement, la question des « liasses » - est un sujet important, quand moins de la moitié des avions est en état de voler... J'ai lancé une réforme ambitieuse du MCO aéronautique. La préfiguration d'une direction de la maintenance aéronautique (DMAé) est en cours, elle verra le jour en avril. L'acquisition des « liasses » est bien sûr décisive pour améliorer ce ratio. Je n'ai pas d'éléments particuliers à vous fournir sur cette question, mais nous travaillons à résorber ce problème.

J'en viens à l'article 19. La cybermenace s'intensifie et notre territoire y est très vulnérable. Il est le lieu de « dernier rebond » des attaquants cyber qui cherchent à perturber nos services et nos réseaux de communication internet. La forte porosité des réseaux aux assauts du crime organisé et du terrorisme a conduit le Gouvernement à vouloir renforcer les actions défensives. L'Agence nationale de la sécurité des systèmes informatiques (Anssi) en sera le pivot, avec Comcyber pour les systèmes d'information de la défense. Il s'agit d'une part de demander aux opérateurs de créer des mécanismes de détection des perturbations sur les réseaux, d'autre part de mettre sous tutelle temporairement les serveurs compromis par des attaques cyber. L'équilibre est-il préservé du point de vue des libertés publiques ? Oui, car les opérateurs ont une obligation de destruction des données qui ne sont pas nécessaires à cette cyber-défense, et la durée de conservation des autres est précisée. L'Autorité de contrôle des communications électroniques et des postes (Arcep) effectuera un contrôle a posteriori - la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement n'était pas le bon organe, puisqu'il ne s'agit pas ici de renseignement technique. L'Assemblée nationale a tenu à inscrire dans la loi les dispositions relatives au contrôle. Une précision : ce ne sont pas les data , mais les virus, que nous traquons ici : ne refaisons pas la loi sur le renseignement ! Le but est de pouvoir tracer les marqueurs des virus qui se propagent sur les réseaux, sans entrer dans les messages, mais en vérifiant si l'enveloppe de ces messages est perturbée.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Nous avons noté l'effort budgétaire et la sincérisation de la provision OPEX. Ces mesures seront financées par la croissance mais aussi, certainement, par des économies, dans le cadre du programme « Action publique 2022 », lequel n'épargne pas votre ministère. Quelles sont les pistes de travail ? Par ailleurs, il est prévu que les activités de soutien aux exportations (Soutex) fassent l'objet d'une meilleure prise en charge par les industriels. Selon quelles modalités ?

M. Vincent Éblé , président . - Pouvez-vous nous dire vos intentions en matière de modernisation de la politique de rémunération des militaires ? Quels seront les contours de la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM) ?

M. Vincent Capo-Canellas . - Quelle part de frustration comporte cet « effort majeur de sincérisation » dont vous nous avez parlé ? On avait pu reprocher au précédent gouvernement l'insuffisance des crédits mais aussi une absence de choix. Vous embrassez au contraire de nombreux objectifs... Mais la crédibilité exige de dire ce qui sera décalé, ce à quoi il faut renoncer, bref, préciser les choix opérés.

Sur l'Europe de la défense, où en est-on de l'initiative européenne d'intervention et quels espoirs placez-vous dans le Fonds européen de défense pour rendre tout cela crédible ?

M. Jérôme Bascher . - Vous avez annoncé la mise en place d'une agence pour l'innovation au sein de votre ministère. Pouvez-vous nous en détailler les contours et notamment nous préciser le rôle de la direction générale pour l'armement (DGA) ? La cyberdéfense, on en parle depuis longtemps. Lorsque votre prédécesseur était venu il y a un an célébrer les vingt ans de la direction du renseignement militaire, il avait annoncé un « Intelligence campus » à Creil. Cela semble aujourd'hui compromis. Avez-vous un autre projet de cyberdéfense pour ce site ?

M. Claude Raynal . - Je centrerai mes questions sur les objectifs : que peut faire le ministère avec les sommes programmées, qu'est-il contraint de laisser de côté ? Sur ces aspects, la LPM est un peu courte ! « Sincérisation » des crédits, volonté de « faire mieux que les gouvernements précédents », soit : Jean-Yves Le Drian appréciera que vous sincérisiez ses comptes. Mais il faut mettre les choses en perspective : il y a cinq ans, la croissance était de 0,4 %, non de 2 % comme aujourd'hui. Espérons du moins que la nouvelle programmation sera entièrement appliquée, car la tradition veut plutôt que l'on fixe des objectifs ambitieux et qu'on ne les atteigne jamais.

Le spatial, qui exige de travailler avec nos alliés, avec les Européens, a un lien avec la cybersécurité. Les industries spatiales américaine ou chinoise travaillent grâce aux crédits de la défense. Un budget militaire spatial important, c'est l'assurance d'applications civiles importantes... Quelle est votre vision des choses ?

Mme Florence Parly, ministre . - « Action publique 2022 » concerne bien sûr aussi le ministère des armées. Cependant, la transformation désormais, je l'ai souligné, n'est plus subie mais choisie. Il n'est plus question de supprimer 60 000 emplois, mais de gagner en efficacité. La Nation nous dote de moyens exceptionnels, chaque euro doit être dépensé au plus utile. Nous avons identifié 14 chantiers de modernisation, dont certains recoupent ceux sur lesquels travaille le Comité « Action publique 2022 », qu'il s'agisse de la réforme de la politique d'acquisition de la DGA ou de la réforme du MCO aéronautique. Des externalisations ont déjà été mises en oeuvre dans le passé. Je ne suis pas favorable à ce qu'elles soient systématiques. Je suis confiante dans notre capacité à progresser, le travail avec le comité est constructif, et tous les gains seront recyclés au profit du ministère.

Quelques mots du Soutex : il faut poursuivre la prise en charge financière de ces activités, mais le dispositif présentait le défaut de mobiliser beaucoup de personnel au ministère, en particulier au sein de l'armée de l'air. Sur les 6 000 créations de postes prévues, 400 visent à l'accompagnement des missions Soutex afin que nos armées ne soient pas pénalisées dans leur fonctionnement.

La nouvelle politique de rémunération des militaires a été décidée en novembre 2016 ; elle sera progressivement déployée, à partir de 2021. Les mesures indiciaires et indemnitaires visent à prendre en compte les sujétions particulières, les parcours professionnels et les activités spécifiques, les qualifications et les compétences, ainsi que les questions liées aux leviers de gestion... À l'automne 2018, seront prises les premières mesures, pour les praticiens du service de santé des armées et les ingénieurs de l'armement, puis les militaires du rang et les officiers. Cela représente un coût estimé à 480 millions d'euros.

Je n'ai pas le sentiment que la hausse de provision OPEX doive se traduire par une frustration et impose en elle-même des choix. La provision de 1,1 milliard d'euros, pour 1,3 milliard effectivement dépensés en 2017, est un bon compromis : elle est plus réaliste, mais n'entraîne pas de ponction sur les moyens des armées.

Nous sommes en train de travailler à l'adoption du règlement financier du Fonds européen de défense. Après une première réunion le 15 mars dernier, nous en aurons une autre en avril, peut-être conclusive. La recherche-développement et les projets capacitaires recevront des financements communautaires, c'est une révolution, et il est prévu de s'assurer que ceux-ci iront à des entreprises européennes !

Une Agence de l'innovation sera créée auprès de la DGA, pour piloter l'ensemble des outils existants ou en cours de développement afin de favoriser l'innovation, technologique ou d'usage. Il s'agit d'élargir l'écosystème : actuellement la DGA travaille avec les grands groupes, or nombre d'innovations civiles développées dans des start-up ou des PME pourraient utilement être captées pour des applications militaires.

Quant au domaine spatial, sans énumérer le détail des cinq grands programmes, je vous indique que la rénovation et la modernisation concernent tous les outils d'observation : c'est un effort considérable.

Mme Fabienne Keller . - Depuis plusieurs années, l'opération Sentinelle consomme des moyens humains considérables, au détriment de l'entraînement et de la préparation opérationnelle. Les moyens budgétaires et humains seront-ils suffisants, sur le long terme, pour les besoins de l'opération Sentinelle ? Je me suis rendue au Tchad et au Niger avec le président Larcher. Les hommes de l'opération Barkhane venaient de perdre deux soldats des Spahis de Valence... Nous avons été impressionnés par leur engagement dans des conditions très difficiles, et par l'efficacité des drones de surveillance dans une région dépourvue de routes - les rares qui existent sont minées. La France a tardé à s'équiper : quelle est votre volonté en la matière ?

La Brigade franco-allemande est opérationnelle depuis près de trente ans au moins, comme l'Eurocorps basé à Strasbourg. Ces unités sont déjà intervenues sous mandat européen dans le passé, comme au Congo. Quelle est votre vision de ces deux outils dans une Europe de la défense renforcée ?

M. Antoine Lefèvre . - Madame la ministre, vous nous avez déjà rassurés sur le service national universel, mais de nombreuses interrogations demeurent. C'est un engagement fort du Président de la République. Des rapports, parlementaires en particulier, ont été rédigés sur le sujet, mais la cacophonie demeure sur les financements...

M. Sébastien Meurant . - Il y a quatre-vingt-dix ans, était signé le pacte « Briand-Kellogg » qui condamnait le recours à la guerre. Nous en sommes bien loin...

La défense est un ministère régalien par excellence. Les crédits augmentent, en France comme chez nos voisins, et c'est une bonne chose car la menace augmente et se transforme. Mais pour élaborer ce modèle d'armée capable d'intervenir partout et tout le temps, faire un peu moins mal qu'avant n'est pas suffisant. Je n'ai rien vu d'exceptionnel dans votre présentation. Vous n'avez pas annoncé un deuxième porte-avions. Le Charles de Gaulle reste dix-huit mois en carénage, l'emploi des aéronefs est très limité... Qu'envisagez-vous pour sauvegarder l'industrie militaire française ? Quelle part de souveraineté doit être préservée des investissements dans des équipements étrangers ? Parmi les éléments exceptionnels, je ne vois que la démission du chef d'état-major des armées l'an dernier, événement choquant et sans précédent. À part cela, rien de nouveau.

M. Michel Canevet . - J'espère que les perspectives économiques permettront de financer effectivement les mesures que vous présentez. Je veux dire un mot moi aussi de l'article 19 et de la cyberdéfense. L'Assemblée nationale a heureusement supprimé l'article 20. Sur les 3 000 créations de postes annoncées dans la première phase, combien iront effectivement à la cyberdéfense et au renseignement ? Le pôle d'excellence cyber de Rennes sera-t-il conforté ? L'Arcep recevra-t-il de nouveaux moyens pour assurer ses nouvelles missions ?

Mme Sylvie Vermeillet . - Je salue l'effort conséquent sur les crédits prévus en LPM.

Que sera le futur statut des militaires, après la réforme des retraites et la création d'un régime de retraite universel ? Les recrutements ne risquent-ils pas d'être affectés par les incertitudes qui planent ?

M. Philippe Dallier . - Le rapporteur spécial du logement que je suis vous interrogera sur la libération du foncier qui appartient aux armées. Votre ministère est le seul qui conserve le produit des cessions, mais la pollution des terrains rend les ventes plus difficiles. Déduire du produit de la vente les coûts de dépollution est une opportunité pour débloquer des opérations. Pourrez-vous me communiquer un tableau de synthèse sur les opérations prévues pour les cinq ans à venir ?

Mme Florence Parly, ministre . - Le projet d'« Intelligence campus » sera poursuivi, mais en lien avec la création de l'Agence de l'innovation.

Sentinelle a connu une montée en puissance depuis 2015. Le mode opératoire a été infléchi, le but étant de le rendre plus efficace, en maintenant l'effectif actuel : 7 000 hommes, avec possibilité de monter à 10 000 si le Président de la République le décide.

La livraison de drones armés interviendra en 2019. Nous « rétrofiterons » ensuite les drones que nous possédons déjà. Ce ne sont pas des robots tueurs, ils resteront opérés par des hommes placés au plus près des forces au Sahel - et non manoeuvrés depuis Paris, comme certains en expriment la crainte !

L'Eurocorps et la brigade franco-allemande sont les piliers de l'Europe de la défense qui doivent être consolidés. Le premier est reconnu par l'OTAN comme état-major de réaction rapide ; la seconde est cette année au Mali, dans le cadre de la mission de formation de l'Union européenne au Mali (EUTM), ainsi qu'en République centrafricaine. Des hélicoptères allemands de la Minusma épaulent les forces françaises au Mali.

La réflexion interministérielle est en cours sur le SNU ; le général Daniel Ménaouine rendra ses conclusions à la fin du mois. Je pourrai donc, lors des débats en commission et en séance publique, vous apporter des compléments d'information.

Les équipements militaires ont pour la grande majorité une très forte dominante nationale. La Revue stratégique a publié un tableau où sont énumérés les équipements de souveraineté, et ceux qui peuvent faire l'objet de coopération industrielle au plan européen.

Pour les missions qui font l'objet de l'article 19, 1 000 recrutements sont prévus, et 1,6 milliard d'euros d'investissements. L'Anssi relève des crédits du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, autrement dit, du Premier ministre, hors périmètre de la LPM.

La réforme des retraites pose beaucoup de questions dans l'ensemble de la population française, mais certaines sont spécifiques aux militaires, dont les carrières sont beaucoup plus courtes. Je l'ai précisé au Haut Commissaire en charge de la réforme des retraites, il importe de préserver des flux réguliers, autrement dit une capacité à attirer massivement des jeunes, pour compenser les départs massifs à la retraite, qui interviennent à un âge où une seconde carrière est encore possible. C'est un point critique pour nos armées, le Haut Commissaire en a pris note.

Enfin, les cessions de foncier sont estimées à 500 millions d'euros sur la période de programmation, y compris l'îlot Saint-Germain. Le ministère des armées conservera l'intégralité de ces recettes.

II. EXAMEN DU RAPPORT (15 MAI 2018)

Réunie le mardi 15 mai 2018, sous la présidence de M. Philippe Dominati, vice-président, la commission a examiné le rapport pour avis de M. Dominique de Legge, sur le projet de loi n° 383 (2017-2018) relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

M. Philippe Dominati , président. - Nous examinons le rapport pour avis de Dominique de Legge sur le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale en première lecture après engagement de la procédure accélérée, relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense. Nous avions entendu la ministre des armées, Florence Parly, le 3 avril dernier. Nous entendons maintenant les conclusions du rapporteur.

M. Dominique de Legge , rapporteur . - En présentant le projet de loi de programmation militaire (LPM) devant notre commission, la ministre le qualifiait de « loi de réparation et de préparation de l'avenir ». En employant le terme de réparation, la ministre établissait un bilan négatif des dernières années. Sans nous attarder sur le bilan de la dernière LPM, nous pouvons pointer que nos forces furent engagées au-delà de ce qui était initialement prévu avec des moyens revus encore à la baisse par rapport à la période précédente. Dès le départ, la LPM était déconnectée de la réalité opérationnelle et budgétaire. Deux chiffres suffisent à illustrer ce décalage, la provision de 450 millions d'euros pour les opérations extérieures (OPEX) alors que les dépenses s'élèvent à un montant compris entre 1,2 milliard d'euros et 1,4 milliard d'euros, et les fameuses recettes exceptionnelles, qu'il a fallu remplacer en grande partie par des recettes budgétaires. En a résulté une dégradation de notre capacité potentielle : difficulté à tenir le programme de renouvellement de nos matériels, usure prématurée et rapide des matériels existants avec une difficulté d'assumer le maintien en condition opérationnelle (MCO). Les infrastructures du quotidien, dégradées, ont été sacrifiées pour assurer l'accueil des nouveaux matériels avec les conséquences que l'on sait sur l'état du patrimoine immobilier du ministère. Enfin, il est difficile d'assumer la préparation de nos soldats qui, sur-mobilisés sur les différents théâtres extérieurs, n'ont pas toujours pu assumer la formation des plus jeunes.

En quoi cette nouvelle LPM répare-t-elle le passé et prépare-t-elle l'avenir ? La trajectoire financière est incertaine au-delà de 2023. Les crédits de la mission « Défense » progressent de 9,8 milliards d'euros, passant de 34,2 milliards d'euros à 44 milliards d'euros entre 2018 et 2023. Cependant, l'effort important est renvoyé en 2023, lors d'un nouveau quinquennat et d'une nouvelle législature : la hausse des crédits devrait doubler après 2023, passant de + 1,7 milliard d'euros par an à + 3 milliards d'euros par an, mais les annuités 2024 et 2025 ne sont pas couvertes par le projet de loi. Au total, seuls 67 % des besoins identifiés, estimés à 295 milliards d'euros, sont couverts de manière ferme.

Par ailleurs, cette trajectoire demeure soumise à d'importants aléas. Les contrats opérationnels ne font pas l'objet de modifications substantielles par rapport à la précédente LPM. Nous avons engagé nos forces armées au-delà de ce qui était prévu sans en tirer les conséquences. Comme l'a rappelé le chef d'état-major des armées, le général Lecointre, nos forces n'ont pas vocation à être engagées dans la durée, au niveau maximum, 24 heures sur 24. C'est comme pour un véhicule : si vous utilisez votre voiture au maximum de ses capacités, son usure s'accélère et les délais entre les révisions doivent être réduits. Les contrats opérationnels sont inchangés, alors qu'il n'y a pas une moindre menace d'agressions extérieures.

Deuxième aléa, la trajectoire est construite en euros courants, renvoyant à une actualisation en 2021. Enfin, l'équilibre de la trajectoire repose sur des hypothèses d'exportations concernant notamment le Rafale et l'avion de transport A400M.

Il convient cependant de noter que la sincérité budgétaire de cette trajectoire s'est significativement améliorée par rapport à la précédente LPM. La provision pour les OPEX passera ainsi de 650 millions d'euros en 2018 à 850 millions en 2019 puis 1,1 milliard d'euros en 2020.

À la différence de la précédente LPM, il n'y a plus de recettes exceptionnelles : la prévision est construite sur des crédits budgétaires uniquement - du moins nous le vérifierons au fil des budgets suivants. Enfin, les activités de soutien à l'exportation (Soutex) sont prises en compte.

Le présent projet de loi de programmation militaire répond en outre globalement aux besoins des armées. Les effectifs augmenteront de 6 000 postes, mais l'essentiel des créations sont renvoyées au quinquennat suivant. Par ailleurs, lancé par la ministre, le plan Famille, qui améliore les conditions du personnel, constitue un réel effort.

Les crédits d'équipement s'élèveront à 112,5 milliards d'euros sur la période 2019-2023, soit une moyenne annuelle de 22,5 milliards d'euros, contre 18,3 milliards d'euros en 2018 - soulignons également cet effort. Ils permettront la livraison anticipée de certains équipements, à l'instar du programme Scorpion pour l'armée de terre, ainsi que l'augmentation des cibles prévues dans la précédente programmation, de l'avion de ravitaillement MRTT et de patrouilleurs notamment.

Par ailleurs, une part importante de ces crédits, 22 %, sera consacrée au renouvellement et à la modernisation de la dissuasion nucléaire, et 33 % aux programmes à effet majeur. Quelque 22 milliards d'euros seront consacrés à l'entretien programmé des matériels, soit un montant annuel moyen s'élevant à 4,4 milliards d'euros - un milliard d'euros de plus que dans la précédente LPM. Ces crédits financeront la régénération des matériels, durement éprouvés ces dernières années.

Les crédits consacrés aux infrastructures s'élèveront quant à eux à 7,3 milliards d'euros. Compte tenu de l'importance des besoins, cet effort ne permettra que de stopper globalement la dégradation du parc et non d'en améliorer l'état.

S'agissant de l'innovation, les crédits en faveur des études amont seront portés à un milliard d'euros par an à compter de 2022, contre 730 millions d'euros dans le cadre de la précédente LPM. Ils seront complétés par une enveloppe de 1,8 milliard d'euros par an consacrés à la conception des programmes d'armement majeurs, successeurs du porte-avions Charles de Gaulle , du char Leclerc et le système de combat aérien futur.

Au total, je retiens de ce projet de loi une plus grande sincérité, l'augmentation relativement significative des crédits, même si je regrette que la marche la plus importante ne soit franchie qu'en 2023. Nous devrons veiller à la bonne application de cette LPM et lors de la clause de revoyure de 2021, il conviendra de préciser la trajectoire budgétaire jusqu'en 2025.

Cette loi répare le passé dans la mesure où nous ne mobiliserons pas le maximum de nos moyens et prépare l'avenir, sous réserve de la concrétisation des engagements au-delà de 2022... Je vous propose donc d'émettre un avis favorable à son adoption, sous réserve de l'adoption des amendements que je vous présenterai.

M. Jean-François Rapin . - S'agissant des OPEX, la situation internationale change terriblement. Quelle capacité avons-nous à mener d'autres OPEX ? Faudra-t-il abandonner certains théâtres d'opérations actuels ? Est-on en mesure de défendre notre pays ?

M. Michel Canévet . - Merci pour votre exposé qui montre l'effort financier important pour la défense. La trajectoire financière intègre-t-elle des crédits pour faire face à des besoins supplémentaires, comme le service national ? Une partie pourrait relever du ministère des armées.

La modernisation des casernes de gendarmerie relève-t-elle du budget du ministère des armées ou de celui de l'intérieur, et des crédits spécifiques sont-ils prévus ? Plus globalement, les moyens sont-ils suffisants pour répondre aux besoins réels de modernisation des immeubles militaires ? J'ai cru percevoir quelques doutes dans le discours du rapporteur...

M. Marc Laménie . - Merci pour ces informations sur un dossier sensible et un des plus importants financièrement. Le patrimoine immobilier des armées rassemble des surfaces importantes de bâtiments relativement récents. La disparition de régiments aboutit à la fermeture de casernes, dont certaines sont reprises par les collectivités territoriales. Tout n'a pas été vendu - ou parfois à l'euro symbolique. Certes, ces bâtiments généraient un coût d'entretien. Je peux vous donner quelques exemples dans les Ardennes de tels sites militaires. Quelles sont les prévisions inscrites dans la LPM à ce titre ?

Par ailleurs, pourriez-vous nous indiquer quelles sont les perspectives de la réserve militaire et de la Journée défense et citoyenneté (JDC) ? La LPM en dit-elle davantage sur leur devenir ? Enfin, quelles sont les perspectives d'évolution des effectifs des militaires de l'opération Sentinelle ?

M. Bernard Delcros . - Pouvez-vous expliquer le lien établi entre le graphique de la page 2 de votre présentation et le fait qu'une grande partie des besoins ne seraient pas couverts de manière ferme ?

M. Pascal Savoldelli . - L'article 2 du projet de loi prévoit de porter l'effort national de défense à hauteur de 2 % du PIB d'ici 2025, mais il n'y a là aucune nouveauté : cet engagement a été pris en 2014 lors d'un sommet de l'OTAN au Pays-de-Galles. Cela montre la limite de notre indépendance s'agissant du cadrage financier.

Je suis d'accord avec le rapporteur sur les OPEX : c'est le rôle de la France, il en va de notre place politique. Le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste proposera des amendements.

Le Parlement a un pouvoir de contrôle : nous devons être collégialement informés des conséquences de la privatisation d'activités de défense sur le renseignement et le numérique. Celle-ci est-elle le gage d'une meilleure sécurité publique et d'une plus grande souveraineté ? Nous en débattrons en séance publique car cela dépasse le cadre de la commission des finances. Si cela aboutit à plus de fiabilité, je pourrais faire évoluer mon point de vue...

M. Claude Raynal . - Cette LPM est dans la droite ligne de la précédente et des propositions et du travail réalisés par le ministre Jean-Yves Le Drian, dont l'action et le combat au sein du gouvernement précédent pour obtenir des crédits supplémentaires pour la défense étaient la traduction claire de sa volonté d'avancer. Dans une période où la croissance économique autorise une augmentation significative des dépenses de défense, cela va dans le bon sens. Il est absolument nécessaire que nos armées disposent d'un matériel performant et d'une qualité de vie correcte.

Le groupe socialiste et républicain votera ce projet de loi, avec une réserve - qui ne tient pas au rapport : la plus grande partie de l'effort budgétaire portera sur le mandat présidentiel et législatif suivant. Nous nous inquiétons toujours lorsqu'un effort est prévu tardivement dans une loi de programmation... Nous ne savons pas quelle sera alors la croissance économique. Le rapporteur l'a relevé : ce sont des lois programmatiques... sans nécessairement de traductions budgétaires.

M. Dominique de Legge , rapporteur . - Pour répondre à Jean-François Rapin et Pascal Savoldelli, l'objectif de cette LPM, comme de la précédente, n'est pas d'engager l'intégralité de nos forces 24 heures sur 24. Mais le problème est l'écart entre une sur-activité et un niveau de crédits insuffisant. L'une des faiblesses de cette LPM est que le Gouvernement n'a pas revu les hypothèses d'engagement de nos armées à la hausse pour ne pas en tirer de conséquences financières... Si nous maintenons le niveau d'activité actuel, nous aurons toutes les peines du monde à régénérer nos armées.

Je confirme à Michel Canévet, qu'aucune provision n'est prévue dans la LPM pour le service national. La ministre nous a clairement affirmé que les armées pourraient participer à son financement, mais uniquement sur des moyens nouveaux. Nous y serons vigilants. Nos collègues de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées déposeront un amendement sur ce sujet, qui n'aura cependant pas de réelle portée normative.

Même si les gendarmes restent sous statut militaire, les crédits relatifs à l'immobilier de la gendarmerie dépendent du ministère de l'intérieur ; rien n'est donc prévu dans la LPM pour les casernes de gendarmerie. Le plan « Famille » prévoit par conséquent une amélioration de l'hébergement des militaires des armées de terre, de l'air et de la marine, mais pas de la gendarmerie.

Pour répondre à Marc Laménie, 500 millions d'euros de recettes issues de cessions immobilières sont prévus dans la LPM - si les ventes se réalisent - et resteront au budget des armées, sous réserve de l'adoption de l'amendement COM-124 .

Je partage l'analyse de Pascal Savoldelli, les 2 % du PIB sont un indicateur. Ils peuvent être un objectif, mais si la croissance est en berne, faudra-t-il alors réduire notre effort en faveur des armées ? Cet indicateur mesure l'effort des pays de l'OTAN mais n'a pas d'autre valeur.

Pour répondre à Claude Raynal, les moyens augmentent dans cette LPM, mais si l'effort facial est de 1,7 milliard d'euros par an jusqu'en 2022, l'effort réel est d'1,2 milliard d'euros à 1,4 milliard d'euros : il faut en effet déduire l'augmentation de la provision OPEX. Cet effort a en effet été amorcé dans la dernière période de la LPM précédente, mais parce que nous n'avions pas le choix, il fallait abonder les crédits pour entretenir le matériel...

EXAMEN DES ARTICLES

Article 2

Rapport annexé

M. Dominique de Legge , rapporteur . - L'amendement COM-121 porte sur les « liasses », à savoir la documentation technique et certains droits de propriété intellectuelle. Le Service industriel de l'aéronautique (SIAé) ne possède pas un certain nombre de ces documents. Cela revient à acheter une voiture sans que le garagiste dispose du mode d'emploi : elle ne peut pas être réparée. C'est le cas pour certains hélicoptères et l'A400M. Nous pouvons tolérer un délai d'acquisition de ces liasses, mais il faut pouvoir assurer la maintenance de ces aéronefs de manière autonome. Mon amendement rajoute à l'alinéa 173 du rapport annexé : « Afin de conforter les moyens du SIAé et d'assurer son autonomie vis-à-vis des industriels, l'acquisition des "liasses" sera systématisée. » Il en va de la capacité d'intervention de notre propre service.

L'amendement COM-121 est adopté.

Article 5

M. Dominique de Legge , rapporteur . - L'amendement COM-122 exclut du calcul des effectifs globaux de la défense les effectifs du SIAé. Pour des objectifs opérationnels ou politiques, on peut envisager de confier une part plus importante de la maintenance aux industriels privés ; mais il est tout aussi légitime de vouloir que les armées soient plus autonomes... Mon amendement permet d'assurer cette souplesse de fonctionnement.

L'amendement COM-122 est adopté.

Article 10 bis (nouveau)

M. Dominique de Legge , rapporteur . - L'article 10 bis prévoit que les entreprises de moins de 200 salariés peuvent refuser le doublement des jours d'absence des réservistes de cinq à dix jours. L'amendement COM-123 améliore les relations entre les employeurs de réservistes et le ministère des armées et propose de porter ce seuil à 250 salariés, qui correspond aux entreprises de taille intermédiaire (ETI). C'est une mesure de simplification.

Mme Sylvie Vermeillet . - Pourquoi ce seuil n'avait-il pas été retenu précédemment ?

M. Dominique de Legge , rapporteur . - Cet article a été introduit par un amendement à l'Assemblée nationale, mais le chiffre de 200 est peut-être une erreur...

L'amendement COM-123 est adopté.

Article additionnel après l'article 28

M. Dominique de Legge , rapporteur . - Mon amendement COM-124 vise à supprimer la décote prévue par la loi Duflot pour les cessions d'immeubles du ministère des armées. Lorsque l'État vend son patrimoine à des collectivités territoriales pour construire des logements sociaux, une décote pouvant atteindre 100 % de la valeur du bien peut s'appliquer. Je ne suis pas favorable au fait de financer deux politiques différentes, celle du logement et celle de la défense, avec une même enveloppe. Allons jusqu'au bout de la sincérité budgétaire. Sortons du dispositif Duflot les cessions réalisées par le ministère des armées.

M. Rémi Féraud . - Cette analyse vaut pour tous les ministères. Votre amendement détricote la loi Duflot sur cette décote qui a eu des effets très positifs à Paris. Je n'y suis pas favorable.

M. Dominique de Legge , rapporteur . - Le projet de LPM prévoit que les recettes des ventes immobilières reviennent au ministère des armées et dans le même temps, un autre texte dispose qu'en cas de vente pour créer des logements sociaux, le ministère ne touche pas la recette... Soyons cohérents ! Il serait contradictoire de ne pas adopter cet amendement.

L'amendement COM-124 est adopté.

Article 37

M. Dominique de Legge , rapporteur . - L'amendement COM-125 prévoit l'abrogation de l'article 48 de la précédente LPM qui permettait des ventes de gré à gré. Selon le Conseil d'État, cela relève du domaine réglementaire et doit être retiré de l'actuelle LPM. Mon amendement est une disposition transitoire en attendant le décret, pour que les armées puissent continuer de céder des biens de gré à gré.

L'amendement COM-125 est adopté.

La commission émet un avis favorable sur le projet de loi dans la rédaction issue de ses travaux.

M. Philippe Dominati , président . - La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées examinera nos amendements demain matin et établira son texte. Le projet de loi sera discuté en séance publique à compter du mardi 22 mai prochain.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère des Armées

État-major des armées

- Général de corps aérien Vincent CARRÉ, sous-chef d'état-major « Plans » ;

- Contre-amiral Xavier BAUDOUARD, chef de la division « plans, programmation et évaluation » ;

- Capitaine de vaisseau Lionel MATTHIEU, chef du bureau « maintien en condition opérationnelle ».

Direction générale de l'armement (DGA)

- M. Joël BARRE, délégué général pour l'armement.

Secrétariat Général pour l'Administration (SGA)

- M. Jean-Paul BODIN, secrétaire général ;

- Colonel Franck BARRERA, chef de cabinet.

Direction des affaires financières

- M. Christophe MAURIET, directeur des affaires financières.

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Direction du Budget

- M. François DESMADRYL, sous-directeur de 5 e sous-direction ;

- M. Louis d'HUMIÈRES, chef du bureau de la défense et de la mémoire.

Groupement des industries de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres (Gicat)

- M. Stéphane MAYER, président, président directeur général de Nexter ;

- Général de corps d'armée Jean-Marc DUQUESNE, délégué général ;

- M. François MATTENS, directeur de la communication et des affaires publiques.

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Participation aux auditions de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat.


* 1 Ce comité réunissait 18 membres représentants des institutions civiles et militaires et de personnalités qualifiées notamment issues de la société civile.

* 2 Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

* 3 Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

* 4 Un effort supplémentaire a ainsi été prévu sur certaines capacités critiques notamment la composante « hélicoptères » (7 Tigres et 6 NH90 supplémentaires), la capacité de projection aérienne tactique (par l'achat de C-130 notamment) ou encore le renseignement (acquisition d'un troisième satellite MUSIS). En outre, la commande de 3 avions MRTT prévue initialement au-delà de la LPM a été anticipée en 2018, leur livraison devant intervenir en 2024 et 2025.

* 5 Cour des comptes, référé sur la mise en oeuvre de la loi de programmation militaire 2014-2019 et les perspectives financières de la mission « Défense », 19 juillet 2017.

* 6 Audition du 21 février 2018.

* 7 Le rapport annexé au présent projet de loi de programmation militaire prévoit que cette force sera composée de « forces spéciales, d'un groupement tactique interarmes de 1 500 hommes comprenant des blindés et des hélicoptères, d'un groupe naval constitué autour d'un bâtiment de projection et de commandement et pouvant comprendre frégates, pétroliers ravitailleurs et sous-marins, ainsi que d'une composante aérienne comprenant une dizaine d'avions de chasse, notamment pour la frappe immédiate, des aéronefs de transport et de ravitaillement, des aéronefs de renseignement, des avions de patrouille maritime, un plot d'hélicoptères de manoeuvre pour les missions de recherche et sauvetage au combat (RESCO), ainsi que des moyens de commandement et de contrôle associés ».

* 8 Organismes interarmées, directions et services.

* 9 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

* 10 Loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 11 Discours d'Emmanuel Macron sur la Défense, 18 mars 2017.

* 12 La loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, dite loi « Duflot », et le décret n° 2013-315 du 15 avril 2013 pris pour son application ont institué un mécanisme de décote pouvant atteindre 100 % de la valeur d'un bien lorsque celui-ci a vocation à être transformé en logements sociaux.

* 13 Audition du 3 avril 2018.

* 14 Loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière.

* 15 Décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

* 16 Décret n° 83-927 du 21 octobre 1983 fixant les conditions de remboursement de certaines dépenses supportées par les armées.

* 17 Opérateur du ministère des armées pour le transfert du savoir-faire militaire français à l'international.

* 18 Ces coûts comprennent par exemple « les surcoûts en matière de ressources humaines et de maintenance induits par des prolongations au-delà des retraits de services programmés de matériels, les conséquences des prélèvements de matériels en cours de production destinés initialement aux armées françaises et finalement vendus à l'export ».

* 19 « À ces évolutions s'ajouteront les augmentations d'effectifs de volontaires nécessaires à l'expérimentation du service militaire volontaire, ainsi que les augmentations d'effectifs éventuelles du service industriel de l'aéronautique ».

* 20 Haut comité d'évaluation de la condition militaire, « La fonction militaire dans la société française », 11 e rapport, septembre 2017.

* 21 Haut comité d'évaluation de la condition militaire, « La fonction militaire dans la société française », 11 e rapport, septembre 2017.

* 22 Cour des comptes, Le maintien en condition opérationnelle des matériels militaires, rapport public thématique, septembre 2014.

* 23 Décret n° 2018-277 du 18 avril 2018 fixant les attributions de la direction de la maintenance aéronautique.

* 24 Cour des comptes, Le maintien en condition opérationnelle des matériels militaires, rapport public thématique, septembre 2014.

* 25 « La nécessaire modernisation de la dissuasion nucléaire », rapport d'information n° 560 (2016-2017) de Xavier Pintat, Jeanny Lorgeoux, André Trillard, Pascal Allizard et Claude Haut, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 23 mai 2017.

* 26 Audition du 4 avril 2018.

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