II. UNE POLITIQUE DES TERRITOIRES QUI MANQUE DE COHÉRENCE : EN FINIR AVEC L'ARCHIPEL DES AGENCES

A. LA COORDINATION ENTRE LES DIFFÉRENTS OPÉRATEURS DE LA COHÉSION DES TERRITOIRES RESTE UN DÉFI

1. L'ANCT : une « nouvelle Datar » ou un îlot dans l'archipel des agences ?

La loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019, initiative sénatoriale examinée par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, a créé l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), afin de répondre au souhait des élus de disposer d'un accès renforcé à l'ingénierie des services de l'État et de ses opérateurs.

Durant les débats parlementaires autour de la création de l'agence, l'exemple de la Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire (Datar), dissoute en 2014, a été régulièrement évoqué : l'objectif était de redonner un interlocuteur unique aux collectivités territoriales pour assister les élus dans l'élaboration d'un projet de territoire durable.

Pourtant, l'ANCT n'a pas conduit à la fusion de l'ensemble des opérateurs de l'aménagement du territoire. Cinq opérateurs subsistent5(*), avec lesquels un dispositif de coordination a été constitué :

· des conventions de coordination sont signées entre l'ANCT et chacun des opérateurs ;

· un comité national de coordination se réunit en moyenne toutes les six semaines, complété par des réunions organisées au niveau technique.

Quatre ans après la création de l'ANCT, les succès de l'agence, notamment s'agissant des programmes nationaux d'intervention, sont indéniables. L'identification de l'ANCT auprès des élus et du public reste cependant limitée, en raison notamment de la multitude d'interlocuteurs.

Le déploiement du programme Villages d'Avenir illustre ces difficultés de coordination : 100 postes de chefs de projet ANCT et 20 postes de chefs de projets Cerema seront créés. Dans certains départements, les communes auront donc deux nouveaux points de contact dans le cadre de leurs projets d'ingénierie, en plus des acteurs de l'ingénierie préexistants (direction départementale des territoires, Agences techniques départementales, Conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement - CAUE...).

2. Quatre ans après la création de l'ANCT, le périmètre de l'Agence pourrait être interrogé

Les premières conventions de coordination arrivent aujourd'hui à leur terme. Ces conventions, ainsi que l'existence d'un comité de coordination, ont assurément réduit les inconvénients du maintien d'une pluralité d'interlocuteurs pour les collectivités territoriales.

Par exemple, dans le cadre des contrats de relance et de transition écologique (CRTE), 450 territoires ont bénéficié d'un appui soit de l'ANCT, soit du Cerema soit de l'Ademe dans la conception de ces contrats. La coordination entre ces trois acteurs a été nécessaire, pour optimiser la montée en charge de ce soutien.

La première génération de convention de coordination, prévue pour 2021 à 2023, arrive aujourd'hui à son terme. Une deuxième génération de conventions, pour la période 2023 à 2027, a été adoptée au conseil d'administration de l'ANCT le 15 novembre 2023.

Ces nouvelles conventions prennent en compte les critiques exprimées par les élus locaux ainsi que par le Sénat, en mettant par exemple en place un portail d'entrée commun de l'ingénierie auprès des préfets de département et une plateforme numérique destinée à l'accueil des besoins des collectivités.

Le rapporteur se félicite de l'évolution positive des conventions de coordination, qui témoigne d'une réelle prise en compte par les opérateurs de la cohésion des territoires du manque de lisibilité de cette politique.

Cette deuxième génération de conventions de coordination doit cependant être l'opportunité d'engager une réflexion plus large. Le rapporteur considère que, quatre ans après la création de l'agence, il convient de s'interroger sur les périmètres respectifs de l'ANCT et de ses partenaires : l'opportunité d'un rapprochement, voire même d'une fusion d'opérateurs, pourrait être étudiée, afin de renforcer la lisibilité de l'action, d'assurer une utilisation optimale des financements alloués et de mettre enfin en oeuvre une politique globale d'aménagement du territoire.


* 5 Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise d'énergie), Anah (Agence nationale de l'habitat), Anru (Agence nationale pour la rénovation urbaine), Banque des territoires, Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement).

Partager cette page