CHAPITRE IV - DISPOSITIONS INTÉRESSANT L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Article 43 - Validation législative de l'action de l'État pour la liquidation de trois sociétés de développement régional


• Créées sur la base de décrets-lois du 30 juin 1955, les sociétés de développement régional (SDR) ont couvert la France de leur « réseau » (20 SDR dont 16 en métropole).

Les SDR avaient pour mission de contribuer à la création et au renforcement financier des petites entreprises régionales, par deux voies : la mise en place de prêts à moyen et long terme et les concours en fonds propres. Ces missions étaient délimitées au sein d'une zone géographique. La plupart des SDR sont nées de 1955 à 1960. Depuis 1974, ces établissements financiers peuvent distribuer des concours à prêts bonifiés, et peuvent étendre leur activité à l'ensemble des secteurs économiques. En 1984, avec la loi bancaire, les SDR ont été agréés comme établissements de crédit dans la catégorie des Institutions financières spécialisées (IFS).

Les SDR sont confrontées depuis plusieurs années à des difficultés sérieuses. La moitié d'entre elles ne remplit pas le ratio de solvabilité européen (engagements/fonds propres) fixé à 8 %. Certains sont sous administration provisoire. Un grand nombre de SDR est dans une situation délicate, les actionnaires se refusant à une recapitalisation. Seuls EXPANSO (SDR du Sud-Ouest), la SADE (SDR d'Alsace), la SDR de Bretagne et TOFINSO (Midi-Pyrénées) semblaient résister dans les années récentes.

Les pertes des SDR ont atteint les montants suivants :

On ne souvient que, jusqu'en 1993, l'organisme de refinancement des SDR, FINANSDER, a bénéficié d'importantes garanties de l'État.


• Trois SDR -CENTREST, LORDEX et PICARDIE- sont, selon les termes de l'exposé des motifs du projet de loi, « entrées dans une phase de cessation ordonnée de leur activité » et font l'objet d'une liquidation amiable entre créanciers et actionnaires.

Pour chacune de ces sociétés, le plan de liquidation élaboré prévoit une contribution forfaitaire des actionnaires et des créanciers. L'État s'est, pour sa part, engagé à assurer les passifs résiduels de liquidation de ces institutions. Le coût direct induit pour l'État est évalué à 1,25 milliards de francs. L'objectif de chaque plan est d'éviter de compromettre l'équilibre déjà fragile de l'ensemble du « réseau » des SDR.

L'article 43 permettrait de valider, par voie législative, les actes de l'État et, notamment, les garanties qu'il aurait pu octroyer dans le cadre des plans de liquidation amiable des trois sociétés.

L'exposé des motifs du projet de loi précise que la garantie apportée par l'État se traduirait par « la simple mise en jeu des garanties accordées jusqu'en 1987 par l'État sur les emprunts de ces SDR ».

Selon les précisions fournies à votre rapporteur, les encours à gérer vont diminuer rapidement. Le montant des remboursements d'emprunts à effectuer en capital et intérêt par les trois SDR est estimé au 31 décembre 1995 à 10 milliards de francs. Au 31 décembre 1999, ce montant sera de 4 milliards de francs compte tenu de la cession d'encours (2,4 milliards de francs) sur leurs filiales de crédit bail qui devrait pouvoir intervenir auparavant.

Dans ce cadre, les actifs des trois SDR devraient être cédés, compte tenu d'un passif contracté pour partie à taux fixe auprès de FINANDSER. De telles cessions pourraient intéresser notamment des banques implantées localement ou des SDR voisines recherchant une extension de leur champ géographique de compétence.

Il n'a donc pas semblé opportun de créer une société holding ou un établissement public chargé de leur liquidation (comme cela a été le cas pour le Crédit Lyonnais et le Comptoir des Entrepreneurs). Un tel schéma ne serait justifié que dans une logique de gestion plus longue et pour des montants plus importants. Dès lors que la majorité de l'actif et du passif de ces SDR sera réalisée, il sera possible de confier la fin de la gestion extinctive à un organisme extérieur.

Le système de contrôle mis en place devrait permettre à l'État de s'assurer du strict respect de ses intérêts patrimoniaux.


• Au-delà du simple problème de validation législative de l'action de l'État en cours de liquidation que l'article 43 du projet de loi tend à résoudre, le problème de fond rencontré par les SDR est celui de leur actionnariat.

La composition de l'actionnariat souffre, en effet, du manque d'actionnaires de référence au titre de l'article 52 de la loi bancaire de 1984.

Les SDR peuvent être classées en trois catégories. Il faut d'abord évoquer celles qui sont adossées à un établissement bancaire ou une compagnie d'assurances : Sud-Est (Crédit Lyonnais), SOFIPARIL (UAP-Worms), SODLER (Caisse d'épargne du Languedoc-Roussillon), SODECCO (GAN-CIC), les quatre actionnaires principaux détenant plus de 66 %, Nord-Pas-de-Calais (détenue à 28,6 % par le Crédit lyonnais), Méditerranée (la région ayant 22 %) et la SDR de Corse (contrôlée par des capitaux publics). La question qui se pose est de savoir si elles peuvent être considérées comme de véritables SDR. En effet, elles sont plutôt considérées comme des filiales de grands établissements financiers que comme des sociétés de développement régional. Dans ce contexte, les règles normatives qui s'appliquent au réseau ne peuvent réellement être adaptées pour ces SDR adossées à des grands groupes.

Viennent ensuite celles dont l'actionnariat est très dispersé entre la région et des établissements financiers, et qui affichaient, dans la période récente, un ratio de solvabilité européen supérieur au seuil de 8 % : BRETAGNE, EXPANSO, SADE, TOFINSO, SODERE et SORERO. Ces dernières pourraient, selon les commentateurs, être touchées par les répercussions des SDR qui sont en difficulté. De même, toutes les SDR se refinançaient par emprunts groupés auprès de FINANSDER, organisme de refinancement des SDR, dont l'activité est remise en cause par la nouvelle réglementation communautaire.

Restent celles qui sont sous administration provisoire. La lenteur des dossiers illustre les difficultés rencontrées par les actionnaires et les créanciers pour se mettre d'accord et, souvent, les actionnaires refusent de recapitaliser.

Pour votre Commission des Affaires économiques et du Plan, la question de fond est de savoir si l'État peut laisser disparaître un outil qui pourrait être un levier privilégié du développement local et d'aménagement du territoire.

En effet, seules les SDR connaissent intimement le tissu industriel local. Pour beaucoup, ces sociétés jouent aussi un grand rôle d'intérêt général et sont les seules à accompagner sur le long terme les petites PME régionales, sur dix à quinze ans, ce que les banques se refusent, le plus souvent, à faire aujourd'hui.

Sous le bénéfice des remarques qui précèdent, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de cet article.

Article 55 (nouveau) - Extension limitée des réseaux des distributeurs locaux de gaz

L'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement tendant à insérer un article 55, dont l'objet est d'aménager le monopole attribué à Gaz de France en donnant aux distributeurs locaux de gaz la possibilité d'étendre leur activité aux communes connexes de celles qu'ils desservent, dès lors que ces communes ne disposent pas déjà d'un réseau public de gaz.

Rappelons que la loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz a institué le monopole de Gaz de France sur la distribution du gaz, assorti cependant d'une brèche concernant l'activité de 17 distributeurs non nationalisés 1 ( * ) qui assurent aujourd'hui environ 3 % de la distribution.

L'article L.374-2 du code des communes, tel qu'il résulte de la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République, avait permis aux services locaux de distribution de gaz en cours d'exploitation au 1er juillet 1991, de poursuivre de plein droit leur activité dans les limites territoriales que celle-ci couvrait à cette date. Cet article a donc légalisé les créations et extensions de régies réalisées illégalement depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1946 précitée et maintenu le monopole de distribution de Gaz de France pour les nouvelles dessertes potentielles.

Néanmoins, depuis plusieurs années, des demandes se sont exprimées en faveur de l'ouverture d'un droit, pour les régies existantes, d'étendre leur zone d'intervention (amendements Derosier, Micaux...).

C'est ainsi que ce débat a été de nouveau ouvert lors de la discussion sur la loi d'orientation du 4 février 1995 pour l'aménagement et le développement du territoire.

Ayant instruit une plainte déposée par le SPEGNN (Syndicat des entreprises gazières non nationalisées), la Commission européenne, sans contester le monopole lui-même, a demandé à l'État français une modification du cadre actuel de la desserte gazière, pour qu'un opérateur existant puisse desservir une commune nouvelle, lorsqu'il est mieux placé que Gaz de France pour ce faire.

Rester inactif face à cette situation aurait conduit à accroître les risques (recours à l'article 90-3 du Traité de Rome, saisine de la Cour de Justice...).

C'est pourquoi, le Gouvernement a décidé de proposer un amendement tendant à :

- ouvrir la possibilité aux distributeurs locaux d'étendre leur activité aux communes connexes de celles qu'elles desservent, dès lors que ces communes ne disposent pas déjà d'un réseau public de gaz ;

- prévoir qu'un décret en Conseil d'État fixera un seuil de rentabilité minimal s'imposant à tous les opérateurs pour développer de nouveaux réseaux de distribution. Ces procédures devraient assurer l'égalité de traitement de Gaz de France et des autres opérateurs.

Votre commission est favorable à cette disposition qui, tout en étant d'une portée limitée puisqu'elle ne devrait concerner qu'une trentaine de communes, permettra cependant de trouver une issue pour ces communes qui souffrent du paradoxe suivant : Gaz de France ne peut les desservir dans des conditions économiques satisfaisantes, car elles sont trop éloignées de son réseau, tandis que les régies qui se trouvent à proximité se heurtent à un interdit juridique.

Il sera donc mis fin à ce paradoxe, sans pour autant que soient remis en cause les fondements de l'organisation gazière de notre pays.

Votre commission souhaite que, parallèlement, les contraintes pesant sur les décisions d'investissement de Gaz de France soient desserrées pour que l'entreprise publique puisse répondre au souhait des collectivités locales de voir s'étendre les réseaux de gaz naturel aux communes non desservies.

Rappelons qu'à l'heure actuelle, Gaz de France dessert environ 5.700 communes, et que, au total, près des deux tiers de la population française sont situés dans une zone desservie par le gaz.

L'allongement de 20 à 25 ans de la période de calcul du critère d'investissement permettrait, par exemple, de faire passer de 1.000 à 1.500 le nombre de communes susceptibles d'être raccordées par Gaz de France dans les quelques années à venir.

Votre commission a donné un avis favorable à l'adoption sans modification de cet article.

* 1 Voir la liste en annexe

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