N° 22

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès-verbal de la séance du 9 octobre 1996

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi portant réforme de la réglementation comptable et adaptation du régime de la publicité foncière,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, vice-présidents ; Emmanuel Hamel, René Régnault, Alain Richard, François Trucy, secrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann, Michel Sergent, Henri Torre, René Trégouët.

Voir le numéro :

Sénat : 499 (1995-1996)

Comptabilité.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi soumis à notre examen comporte un important volet (titre premier) relatif à la réforme de la réglementation comptable sur lequel votre commission des finances a estimé devoir formuler un avis.

Cette réforme législative s'inscrit dans le cadre plus vaste d'une reforme de la normalisation comptable, annoncée et voulue par M. Jean Arthuis dès son arrivée au ministère de l'économie et des finances. L'objectif est de répondre à un besoin accru de transparence, de permanence et de lisibilité des comptes exprimé par les professionnels comme par les épargnants. À cette fin, un nouveau plan comptable sera élaboré dans le courant de l'année 1997 et se substituera au plan comptable de 1982.

Mais avant de réaliser cette unification des normes, le Gouvernement a jugé indispensable de procéder à une réforme des instances chargées de leur élaboration. La matière comptable souffre en effet d'une trop grande multiplicité des sources du droit et d'un manque de hiérarchie des textes qui la régissent.

En effet, de nombreuses instances disposent d'un pouvoir d'influence, d'avis voire de réglementation sur la matière comptable. Dans le foisonnement des règles qui en résulte, le plan comptable général n'arrive plus jouer un rôle de fédérateur en raison de sa place dans la hiérarchie des normes. Élaboré par le Conseil national du crédit, il trouve sa base légale dans un article de la loi du 28 décembre 1959 et dans un arrêté interministériel de 982, modifié en 1986. Il est strictement encadré par le corps de normes contenu dans la loi de 1966 sur les sociétés commerciales et son décret d'application du 23 mars 1967.

Par ailleurs, l'association des différents ministères de tutelle -économie, budget, justice - auxquels s'ajoute immanquablement le ministère sectionellement concerné, fait de l'élaboration des normes comptables un processus lent et inadapté aux contraintes économiques de notre époque. Il fallait donc, en préalable à toute réforme de la normalisation elle-même, moderniser et unifier le processus de normalisation comptable, afin de refaire du plan comptable général le « lieu géométrique de la règle comptable ».

Une première étape a été franchie dans la voie de la modernisation avec le décret n° 96-749 du 26 août 1996 qui rénove le Conseil national de la comptabilité et institue auprès de lui un comité d'urgence chargé de l'interprétation des normes comptables.

Il vous est proposé, avec le présent projet de loi, de parachever cette étape en permettant l'unification des instances normalisatrices. Cette unification résultera de la création du Comité de la réglementation comptable (article 2) et du transfert à cet organisme des compétences actuellement exercées, en cette matière, par le Comité de la réglementation bancaire et financière (article 7). C'est, de ce point de vue, la fin de l'exception bancaire.

Dans le même temps, et afin de tenir compte des besoins liés à la mondialisation de l'économie, il vous est également demandé d'accompagner et d'encadrer l'utilisation des règles internationales pour l'établissement des comptes consolidés des sociétés cotées (article 6).

Au regard de ces objectifs, votre commission a émis un avis favorable à l'adoption du titre premier du présent projet de loi, sous réserve des amendements qu'elle vous présente.

* *

*

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LA RÉFORME DES INSTANCES DE NORMALISATION COMPTABLE

Cette réforme porte sur trois points : la rénovation de l'instance de normalisation comptable (le Conseil national de la comptabilité ou CNC), l' unification des instances de réglementation comptable (le Comité de la réglementation comptable ou CRC) et enfin, la mise en place d'une instance (le comité d'urgence du Conseil national de la comptabilité) amenée à jouer un rôle important en matière d'application des règles comptables.

L'articulation des compétences entre les différentes instances est la suivante :

- D'une part, un organisme chargé de l'élaboration des normes comptables (plan comptable général) : le CNC. Cet organisme n'a pas de pouvoir de décision. Il rend des avis.

- D autre part, deux comités chargés respectivement de :

* l'adoption et de la publication des normes comptables : le CRC. Cet organisme dispose du pouvoir de prendre des règlements, sous réserve bien sûr de l'homologation ministérielle.

* l'interprétation de ces normes : le Comité d'urgence du CNC. Il rend des avis, qui sont des décisions ne faisant pas grief.

Trois observations s'imposent :

En premier lieu, la délégation d'une compétence réglementaire du premier ministre aux ministres chargés d'homologuer les règlements du CRC (économie, justice, budget et, le cas échéant, le ministre chargé de la sécurité sociale) nécessitait une loi. C'est pourquoi la réforme comprend un volet législatif.

En second lieu, la composition du CRC et du comité d'urgence sont très proches dans le souci légitime d'éviter toute discordance entre l'autorité chargée de l'édiction de la norme et celle chargée de l'interpréter.

Enfin, si la solution d'une organisation moniste (c'est la même autorité qui édicté et qui interprète la norme) a été écartée, c'est sans doute que le comité d'urgence est appelé à jouer un rôle important dans l'application et le contrôle des règles comptables, contrôle qui constitue actuellement, du moins en théorie, le maillon faible de la chaîne normative comptable.

A. LA RÉNOVATION DU CONSEIL NATIONAL DE LA COMPTABILITÉ

Le Conseil national de la comptabilité institué par le décret n° 57-129 du 7 février 1957 a succédé au Conseil supérieur de la comptabilité, créé en 1947. Cet organisme succédait lui-même à la Commission de normalisation des comptabilités, instituée en 1946 dans le but de forger et de suivre l'évolution du plan comptable général de 1947.

Déjà modifié en 1964 et 1993 1 ( * ) , le CNC a vu sa composition et sa mission substantiellement redéfinies par l'important décret n° 96-749 du 26 août 1996.

1. La composition du Conseil national de la comptabilité

La rénovation de la composition du CNC s'inscrit dans une perspective de continuité avec les précédentes réformes et consacre l'idée d'une composition pluridisciplinaire et interprofessionnelle qui a rendu cet organisme apte à faire progresser substantiellement la discipline comptable.

Loin d'être remise en cause, l'existence d'un cercle de « sachants » où s'exerce la confrontation des points de vue, lieu d'élaboration de solutions opérationnelles et force de proposition, est confirmée. La nouvelle composition fait une place importante aux professionnels désormais au nombre de quarante, auxquels il faut ajouter cinq vice-présidents sur six. Le Président du CNC vient d'être nommé par arrêté du ministre de l'économie. Il s'agit de M. Georges Barthes de Ruyter.

Les pouvoirs publics continueront d'être fortement représentés au travers de onze représentant qui comprennent : un représentant du Garde des sceaux, trois représentants du ministre de l'économie deux représentants du ministre du budget, un magistrat à la Cour des comptes, un représentant du président de la Commission des opérations de bourse, un représentant du président de la Commission bancaire, un représentant du président de la Commission de contrôle des assurances et un représentant du président de la Commission de contrôle des institutions de prévoyance et des mutuelles.

2. La mission du Conseil national de la comptabilité

La mission initiale du CNC était une mission de coordination et de synthèse des recherches théoriques et méthodologiques de comptabilité. Il était dénué et restera dénué de compétence sur les questions relatives à l'organisation et à la discipline des professions comptables.

Sa mission consiste désormais à émettre des avis et des recommandations dans le domaine comptable pour l'ensemble des secteurs économiques. Il devient, comme l'affirme l'exposé des motifs du présent projet de loi, le véritable « pôle de convergence » des normes comptables.

À cet égard on notera que le décret de 1996, contrairement au décret de 1957, ne fait plus référence à sa nature d' organisme consultatif et que ses compétences s'étendent désormais aux réglementations élaborées par le Comité de la réglementation bancaire et financière (CRBF) (article 2 du décret du 26 août précité) 2 ( * )3 ( * ) .

Cette extension du champ d'application de la mission du Conseil national de la comptabilité serait consacrée législativement par l'adoption de l'article 3 du projet du Gouvernement qui prévoit que les délibérations du Comité de la réglementation comptable doivent être précédées de l'avis du Conseil.

* 1 décrets n° 64-266 du 20 mars 1964 et n°93-167 du 1 er février 1993.

* 2 Le décret n° 93-167 du premier février 1993 avait déjà étendu la capacité du CNC à donner son avis préalable sur toutes les dispositions d'ordre comptable qu'elles soient d'origine nationale ou communautaire : le décret du 26 août 1996 a encore étendu cette capacité aux normes élaborées par les organismes internationaux ou étrangers de normalisation comptable

* 3 On observera que cette disposition du décret devrait être modifiée si le projet de loi est adopté en l'état, puisque celui-ci prévoit de retirer au CRBF sa compétence de réglementation en matière comptable.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page