B. LA SITUATION DE L'ORGANISATION COMMUNE DES MARCHÉS (OCM) DE LA BANANE

1. L'économie générale de l'OCM de la banane

L'OCM, entrée en vigueur le 1er juin 1993, offre une garantie d'écoulement à la production antillaise et assure une juste rémunération à tous les producteurs. L'économie générale du règlement consiste en un contingentement, un tarif douanier et des mesures d'aides compensatoires.

Afin d'assurer la protection des productions communautaires de bananes et de réaliser la mise en oeuvre du grand marché, le texte réglementaire, révisé depuis les accords de Marrakech, a prévu :

- de fixer à 2,2 millions de tonnes le contingent pour les bananes « pays tiers » et « ACP non traditionnels », dont l'importation est soumise à l'obtention de certificats octroyés aux opérateurs reconnus. Les bananes ACP traditionnelles continuent à entrer librement dans la limite d'un volume maximum pour chacun des pays concernés, un taux de 750 Écus par tonne étant appliqué au-delà de cette limite ;

- de fixer à 75 Écus commerciaux par tonne le droit de douane pour les bananes du contingent et à 850 Écus au-delà du contingent ;

- d'assurer une aide compensatoire aux productions communautaires au cas où les prix chutent. Cette aide est calculée sur la base d'un prix de référence de 491 Écus par tonne de bananes vertes, pour des tonnages de 219.000 tonnes par an pour la Martinique et de 150.000 tonnes par an pour la Guadeloupe.

Le tableau ci-dessous récapitule les aides compensatoires versées en 1993 et 1995.

MONTANTS COMPENSATOIRES VERSÉS AU TITRE DE L'OCM DE LA BANANE

2. Situation du marché de la banane


• Bilan de la production aux Antilles

La production bananière est très dépendante des conditions climatiques et la succession de cyclones et de tempêtes tropicales ont fortement pesé sur les capacités de production. Pour 1995, les prévisions de commercialisation étaient de 207.000 tonnes pour la Martinique et de 118.000 tonnes pour la Guadeloupe, niveaux encore inférieurs aux potentialités réalisables à moyen terme estimées entre 250 et 260.000 tonnes pour la Martinique, entre 140 et 150.000 tonnes pour la Guadeloupe.

Les tempêtes tropicales auraient provoqué une baisse de 72.000 tonnes des quantités commercialisées.

Cette production est écoulée principalement sur le marché métropolitain. Depuis l'instauration de l'OCM de la banane, les organisations de producteurs antillais ont commencé à exporter sur les autres marchés européens, notamment au Royaume-Uni. En 1996, ces courants d'exportation se sont accrus et diversifiés, surtout à destination de pays traditionnellement importateurs de bananes « dollar » (Belgique. Allemagne, Italie).


• Évolution de l'approvisionnement de la France

Jusqu'en 1993, l'approvisionnement de la France était exclusivement, sauf circonstances exceptionnelles, réalisé par des bananes originaires des Antilles ou d'Afrique. Depuis la mise en place de l'OCM, les sources d'importation se sont diversifiées et se répartissent ainsi :

origine Antilles

252.000 tonnes

origine Afrique

274.000 tonnes

origine zone dollar

89.000 tonnes

Sur les 615.000 tonnes importées, 120.000 tonnes ont été réexportées vers les autres États membres de l'Union européenne.

La consommation française peut être estimée entre 450.000 tonnes et 500.000 tonnes, selon les méthodes d'évaluation.


• Évolution des prix

En 1995, la situation du marché s'est fortement dégradée. Le prix moyen des bananes vertes au stade départ-quai a diminué de 12 à 17 % par rapport à 1994 selon les origines.

Il convient de souligner que la mise en place de l'OCM banane a entraîné, à partir de 1993, une baisse des prix des bananes communautaires corrigée par une aide compensatoire pour perte de recettes versée aux producteurs communautaires, dont le montant a permis, jusqu'à présent, de maintenir les prix (en francs courants) payés aux producteurs.

Au cours du premier semestre 1995, le prix des bananes débarquées s'est maintenu à un niveau comparable à celui enregistré au cours de la même période en 1994. Par contre, au cours du second semestre 1995, les prix ont fortement chuté et se sont situés à un niveau inférieur à celui constaté durant le second semestre 1993, année de mise en place de l'organisation commune des marchés de la banane.

Cette situation s'explique par un surapprovisionnement du marché communautaire en dépit d'une diminution des productions communautaires et ACP, à la suite des destructions engendrées par les catastrophes naturelles.

Cet excédent est dû, d'une part, à une insuffisance du contrôle des volumes importés (100.000 tonnes environ seraient importées sans certificat) et, d'autre part, à l'attribution d'un volume de bananes « dollar » supplémentaire (353.000 tonnes) au titre de l'élargissement de l'Union européenne, dans le cadre d'une décision de gestion de la Commission, volume surdimensionné par rapport aux besoins réels du marché en matière d'importations.

Bien que lors du premier semestre 1996 la situation du marché se soit redressée par rapport à la fin de l'année 1995, les prix des bananes sont restés inférieurs (- 15 à 20 %) aux prix constatés durant le premier semestre 1995. La reprise, à un niveau normal, de l'approvisionnement du marché par la production des DOM, la baisse de la consommation de bananes à partir du mois de juin, les difficultés à exporter les bananes des DOM et/ou des pays ACP (Cameroun et Côte d'Ivoire) vers les pays du Nord de l'Europe (Allemagne, Benelux, Autriche, pays nordiques) et le niveau du contingent banane « dollar » proposé en 1996 par la commission (2.553.000 tonnes) ne permettent pas d'envisager un redressement des cours durant le second semestre 1996.

3. Les remises en cause de l'OCM de la banane


Depuis sa mise en place, l'OCM de la banane fait l'objet de multiples attaques devant diverses instances, et sur plusieurs affaires la Cour de Justice européenne doit bientôt se prononcer.

Celle-ci, dans des décisions antérieures, a reconnu, dans toutes ses dispositions, la conformité de l'OCM au droit communautaire.

En outre, l'OCM a été consolidée au GATT selon l'accord conclu à Marrakech.


Néanmoins, plusieurs recours émanent des producteurs latino-américains de bananes ou d'importateurs de bananes. À ce jour, trois procédures sont encore en cours :

- la société Chiquita ayant exercé des pressions auprès du Gouvernement des États-Unis d'Amérique, une procédure contentieuse dans le cadre de la section 301 a été engagée auprès de l'administration américaine le 17 octobre 1994. Une nouvelle procédure s'y substituant depuis le 28 septembre 1995 s'inscrit dans le cadre habituel de saisine de l'organe de règlement des différends de l'OMC. Elle devrait prendre fin au plus tard le 27 mars 1997 :

- le 5 février 1996, les États-Unis, le Guatemala, le Honduras et le Mexique, appuyés par l'Équateur, ont déposé auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) une demande de consultation sur l'organisation commune des marchés de la banane ; le groupe spécial (panel), demandé le 8 mai, a été constitué le 7 juin ; cette procédure contentieuse devrait en principe s'achever le 11 mars 1997 ;

- le 24 octobre 1996, la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe a été saisie de la plainte de l'importateur allemand Atlanta Fruchthandel AG contre le régime communautaire d'importation des bananes. Atlanta prétend que les restrictions communautaires à l'importation de bananes, et les jugements arrêtés par la Cour de Justice des Communautés européennes pour les défendre, vont à l'encontre des principes fondamentaux, dans ce cas, le droit de propriété et le droit à une activité économique.

4. Les négociations en cours résultant de l'élargissement de l'Union européenne

Pour tenir compte des besoins de consommations des trois nouveaux États membres (Autriche, Finlande et Suède), la Commission européenne a adopté une mesure de gestion augmentant de 353.000 tonnes le contingent tarifaire de bananes « dollar », qui a fait chuter les prix fortement, comme il a été décrit ci-dessus, et met les producteurs antillais dans une situation très difficile.

Les propositions de la Commission, actuellement sur la table, ne sont pas satisfaisantes. La France s'oppose à une augmentation aussi importante du contingent de bananes « dollar », laquelle risquerait de déséquilibrer l'ensemble de l'organisation commune de marché. La chute des cours constatée en 1995 en est la démonstration. Certains éléments techniques doivent en outre être améliorés (contrôle des importations, gestion des certificats des opérateurs de bananes CEE et ACP...).

Quoiqu'utilisé dans la pratique puisque la commission a invoqué ses « pouvoirs de gestion » pour décider unilatéralement d'une augmentation des contingents, ce quota n'a pas encore été approuvé par le Conseil des Ministres. De plus, le Parlement européen est appelé également, en décembre prochain, à prendre position sur la base d'un rapport proposé au nom de sa commission de l'agriculture qui est tout à fait hostile aux propositions de la commission européenne, allant jusqu'à mettre en cause ses méthodes de calcul. Le rapport de la commission de l'agriculture réclame que l'augmentation du contingent tarifaire annuel soit de 100.000 tonnes au lieu de 353.000 tonnes, proposé par la commission.

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