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Avis n° 89 (1996-1997) de Mme Paulette BRISEPIERRE , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 26 novembre 1996

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N° 89

SÉNAT

PREMIÈRE SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès verbal de la séance du 26 novembre 1996

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 1997 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME III

COOPÉRATION

Par Mme Paulette BRISEPIERRE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet, François Abadie, vice-présidents ; Mme Danielle Bidard-Reydet, Michel Alloncle, Jacques Genton, Jean-Luc Mélenchon, secrétaires ; Nicolas About, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Mme Monique ben Guiga, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Jean-Paul Chambriard, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel Debarge, Bertrand Delanoë, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Daniel Goulet , Yves Guéna, Jacques Habert, Marcel Henry, Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Jean-Pierre Raffarin, Michel Rocard, André Rouvière, Robert-Paul Vigouroux, Serge Vinçon

Voir les numéros :

Assemblée nationale :

Sénat :

Lois de finances.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

« Il est temps que l'Occident et l'Afrique acceptent de regarder ensemble leur passé commun ». Aujourd'hui, l'occident doit « construire de nouvelles bases de collaboration et d'entraide où chacun puisse reconnaître et respecter l'identité de l'autre ». Ces propos tenus par le Président de la République, devant les deux Chambres réunies du parlement congolais en juillet 1996, rappelaient la fidélité de la France au continent africain, une fidélité lucide sur le passé, ouverte sur l'avenir et prenait un écho particulier au moment où l'aide publique internationale se contracte, où les investisseurs privés quittent l'Afrique.

L'afropessimisme entretient l'image d'un continent voué à la fatalité du sous-développement, aux vieux démons des divisions ethniques, au spectre de l'extension du SIDA. L'Afrique demeure le théâtre de douloureuses tragédies, le drame de la région des grands lacs nous le rappelle chaque jour. Mais ces visions de détresse ne doivent pas occulter les manifestations réelles d'un changement : le retour à la croissance dans la zone franc, l'émergence d'une Afrique du sud réconciliée. Il faut cesser de considérer le continent africain comme un ensemble immobile et prêter attention à sa grande diversité.

Pour que se confirment ces signes d'espérance, l'Afrique a encore besoin de l'aide internationale, même si ce soutien doit aussi évoluer dans ses formes et ses objectifs.

La France a montré l'exemple et, dans un cadre budgétaire pourtant difficile, préserve l'essentiel de son effort. Votre rapporteur souhaiterait montrer que cette constance répond tout à la fois à la vocation de notre pays et à ses intérêts.

I. L'AFRIQUE AU "MILIEU DU GUÉ"

A. LES PRÉMICES D'UNE RENAISSANCE ?

1. La démocratisation : fragilité des institutions, force naissante des aspirations populaires

a) Les fortunes contrastées du processus démocratique

L'année politique 1996 laissera sans doute en Afrique un sentiment contrasté : d'un côté, un processus de démocratisation parfois contrarié dans certains pays, de l'autre, les signes confirmés et prometteurs d'un réel élan vers la démocratie de la part de populations que certains avaient trop rapidement jugé résignées aux pratiques autoritaires.

La démocratisation a connu des fortunes diverses selon les pays. Les pouvoirs mis en place à la suite d'un processus électoral demeurent fragiles, à la merci d'une conjonction de mécontentements. Leur dénuement financier, en particulier, les place dans une position très délicate à l'égard des appareils militaires.

A titre d'exemple, en février, en Guinée , les soldats revendiquaient l'augmentation de leurs soldes. En mai, en Centrafrique , les militaires rebelles craignaient -après s'être déjà soulevés pour protester contre les trois mois d'arriérés de soldes non payées- d'être désarmés et privés de l'amnistie qui leur avait été promise. Au Congo , l'intégration, trop longtemps différée, des milices politiques dans l'armée régulière mit le feu aux poudres. Dans les trois cas, les chefs d'Etat furent contraints de satisfaire les mutins, non sans avoir bénéficié, en Centrafrique, du soutien de la France.

Dans d'autres pays (au Niger en janvier, au Burundi en juillet...) les pouvoirs durent céder la place même si, comme au Niger, une élection - organisée parfois dans des conditions controversées - vient donner une onction démocratique aux nouvelles autorités.

Ces différents événements ne doivent pas étonner. Rappelons-nous notre propre histoire : la démocratisation s'inscrit dans un processus historique de longue durée. Sans doute, comme l'a souligné le président de la République dans son discours du 18 juillet 1996 à Brazzaville : "la volonté qui s'est manifestée dans un passé récent, de soumettre l'aide publique internationale à des conditions politiques, a conduit certains pays à se parer d'un masque pour répondre à cette exigence. Il s'en suivit une démocratie de façade...". Dans certains pays mal préparés à les recevoir, les usages démocratiques ont dû composer avec la prégnance de traditions politiques toutes différentes. Paradoxalement, ils ont pu parfois exacerber les tensions existantes au lieu de leur fournir, conformément à leur vocation, un exutoire pacifié. C'est ainsi que le multipartisme peut refléter non pas des visions politiques différentes mais bien plutôt les attaches ethniques de la mosaïque africaine. L'erreur est parfois de vouloir aller trop vite en réagissant avec notre propre mentalité , sans tenir compte des différences et de la nécessité d'une évolution progressive.

b) Les signes encourageants d'une « adhésion de l'esprit et du coeur »

En quelques années, la démocratisation a progressé incontestablement en Afrique. Dans de nombreux pays, la machine en marche ne s'arrêtera plus.

Entre autres exemples, en Sierra Leone , en mars, les électeurs n'ont pas hésité à se rendre aux urnes au risque de leur vie et ont contraint le chef de la junte à accepter l'organisation d'un second tour au terme duquel le premier président civil depuis 1996, M. Ahmad Tejan Kabbah, a été élu. Au Bénin , la mobilisation pour les élections présidentielles de mars n'a pas été moindre malgré les difficultés d'organisation. Le scrutin s'est traduit par la première réelle alternance démocratique, au profit, certes, de l'ancien dirigeant du Bénin (1972-1991), M. Kerékou. En outre le processus a mis en exergue le rôle actif joué par la Cour constitutionnelle béninoise qui, forte d'une autorité acquise grâce à l'impartialité de ses membres, a su faire accepter les résultats à l'ensemble des parties en présence.

2. Un renouveau économique en quête d'une assise plus stable

a) Le retour à la croissance

L'Afrique de la zone franc a-t-elle renoué durablement avec la croissance ? Après une progression de 1,5 % en 1994, de 4,4 % en 1995, le PIB des 13 pays concernés devrait encore augmenter de 4,6 % en 1996. Rapportés au taux de croissance démographique (sans doute 3 % en 1996), ces résultats ouvrent enfin la voie, après la crise des années 80, à une évolution positive du revenu par habitant.

Encore ne s'agit-il ici que de moyennes. Avec une croissance de 5,6 % en 1995, les Etats de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) 1 ( * ) ont su tirer un meilleur parti de la dévaluation du Franc CFA que leurs voisins de la Communauté économique et monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC) 2 ( * ) dont le taux de croissance n'a pas dépassé 2,9 %.

Cependant, au regard de la croissance moyenne de l'Afrique subsaharienne estimée à 2,4 % en 1995, la situation de la zone franc dans son ensemble apparaît de toute façon plus favorable.

. Une croissance tirée par la consommation

Parmi les principaux ressorts de la croissance - l'exportation, l'investissement, la consommation des ménages - c'est ce dernier facteur qui paraît avoir joué un rôle décisif en 1995. Il n'aurait pourtant pu concourir à ce nouvel élan économique si deux effets attendus de la dévaluation du Franc CFA ne s'étaient concrétisés : la substitution des productions locales aux importations d'une part, la revalorisation des prix à l'exportation exprimés en francs CFA d'autre part.

C'est ainsi, au prix d'un rééquilibrage des revenus au profit du milieu rural (du producteur vivrier aux planteurs) et au détriment des citadins, que le changement de parité a favorisé la consommation. En 1995, en effet, le dynamisme de la consommation des ménages ruraux a plus que compensé la contraction du pouvoir d'achat des salariés du secteur urbain.

L'investissement, autre facteur décisif de la croissance, a connu des fortunes plus diverses selon les pays. Une fois de plus se retrouve le contraste entre la zone CEMAC et les pays de l'UEMOA, seul ensemble où les investissements ont présenté un réel dynamisme. Encore la progression s'est-elle concentrée dans quelques pays comme la Côte d'Ivoire ou le Mali , où l'investissement reste surtout le fait des entreprises des secteurs parapublic, pétrolier et minier.

. Des déséquilibres mieux contrôlés

La modération salariale qui a prévalu dans le secteur privé et surtout public a permis d'enrayer la pente inflationniste des économies africaines. La hausse des prix (39 % en moyenne en 1994) n'a pas dépassé 15 % en 1995 et sans doute 5 % en 1996.

La balance commerciale reste excédentaire même si l'excédent s'est réduit entre 1994 et 1995 (de 11,4 % du PIB à 9,1 %) du fait de la hausse des importations (+ 14,5 % -+ 35 % pour la Côte d'Ivoire-). Mais, il importe de le souligner, si les importations ont retrouvé au sein du PIB la part qui leur revenait avant la dévaluation, leur structure s'est modifiée : le poids des biens de consommation s'est réduit au profit des biens d'équipement professionnels.

Cette évolution paraît prometteuse car elle permettra le renforcement des capacités productrices des économies concernées.

Les pays de la zone franc restent cependant confrontés à des problèmes durables. La politique budgétaire, malgré quelques exceptions, doit composer avec un déficit chronique des recettes, lié aux insuffisances des systèmes fiscaux. Les économies africaines restent donc encore largement tributaires des financements extérieurs .

Au-delà de ce retour à la croissance et malgré les difficultés rencontrées, les structures mêmes des économies de la zone commencent à évoluer en raison des réformes entreprises. Ces transformations apparaissent indispensables car elles permettent de jeter les bases d'une croissance durable.

b) La libéralisation : un processus indispensable mais nécessairement progressif

Choix ou nécessité dictés par les bailleurs de fonds, les responsables africains ont pris le parti des réformes. Ici, seules les apparences changent, là, les structures se transforment en profondeur. Les vieilles structures étatiques commencent à se fissurer. Il n'est plus question que de libéralisation, de privatisation, d'intégration régionale et la direction prise n'est guère contestable même si le choix des méthodes n'échappe pas toujours à un examen critique.

. La privatisation : un exercice progressif

Dans presque tous les pays africains, les privatisations sont à l'ordre du jour. Elles conditionnent souvent la signature des programmes d'ajustement structurel sous l'égide de la Banque Mondiale et du FMI et l'octroi d'importants financements - aide budgétaire, aide à l'ajustement, aide projet parfois.

Les programmes de privatisation concernent ainsi aujourd'hui quelque 58 sociétés en Côte d'Ivoire , 25 au Togo , 20 au Cameroun , 9 au Mali ... Les exemples pourraient être multipliés même si le processus connaît parfois certains retards. Comment s'en étonner ? Les résistances des pouvoirs soucieux d'éviter le tarissement d'une source de revenus parfois substantielle ne sont pas ici seules en cause. La situation financière dégradée de certaines entreprises, le souci -certes légitime- de faire prévaloir des intérêts nationaux constituent autant d'obstacles parfois difficiles à surmonter.

Les privatisations ont, dans la majorité des cas, des effets heureux sur les structures économiques ; elles permettent de réduire les coûts de production ou de fonctionnement, ou encore d'assainir les conditions de gestion grevées, sous statut étatique, de contraintes que n'imposaient pas toujours les seules nécessités d'intérêt général. L'impéritie de l'administration avait, dans certains cas, hypothéquée jusqu'au bon fonctionnement des services publics ; l'ouverture au privé s'est alors traduite par une amélioration globale des prestations au bénéfice des usagers. La concession, par exemple, de l'exploitation du réseau de chemins de fer Abidjan-Ouagadougou à une société privée 3 ( * ) a permis d'améliorer notablement le fonctionnement régulier de la ligne.

La privatisation ne signifie pas nécessairement liquidation du patrimoine public : dans l'exemple précédent, les sociétés de chemins de fer des deux pays concernés ont été maintenues en sociétés de patrimoine. De même, le principe d'une concession de service public a été retenu pour la production et la distribution de l'électricité en Côte d'Ivoire .

Si utile qu'elle puisse paraître, la privatisation ne peut toutefois être appliquée sans discernement à des secteurs économiques fragiles. La filière coton se prête mal ainsi à la privatisation par compartiments que préconisait la Banque mondiale. Les sociétés nationales cotonnières assurent non seulement le traitement et la commercialisation du coton, mais dotées d'un monopole d'achat du coton-graine, elles assurent aux petits producteurs un prix garanti et leur fournissent également les intrants nécessaires. La libéralisation doit ménager les intérêts des petits producteurs qui, en l'absence de prix garantis, pourraient se décourager et se détourner d'une production pourtant extrêmement prometteuse pour le développement économique des zones rurales. Pour votre rapporteur, la libéralisation doit constituer l'auxiliaire du développement. Elle ne saurait représenter une fin en soi.

Eviter l'esprit de système dans un monde complexe où les équilibres paraissent précaires, cette préoccupation devrait également inspirer le processus d'intégration régionale.

. L'intégration régionale : un processus à conduire avec méthode

Le fractionnement des marchés nationaux, héritage des tracés souvent arbitraires de la colonisation, constitue un frein certain au développement. Dans la zone franc, la rupture salutaire apportée par la dévaluation s'est 00000également accompagnée de la signature de traités permettant la constitution d'ensembles économiques sous-régionaux, l'Union monétaire et économique d'Afrique de l'Ouest, d'une part, la Communauté économique et monétaire d'Afrique Centrale, d'autre part. Ces organisations peuvent se prévaloir sans doute de l'expérience acquise par les deux banques centrales, la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest (BCEAO) et la Banque des Etats d'Afrique centrale (BEAC). La Communauté de développement de l'Afrique Australe (SADC) témoigne que le mouvement d'intégration ne se cantonne pas à l'Afrique francophone. Ces ensembles régionaux visent généralement la mise en place d'union douanières puis la constitution de marchés communs.

Si l'Afrique de l'Ouest s'est engagée résolument sur la voie de l'intégration, l'Afrique Centrale surmonte difficilement l'antagonisme entre certains de ses Etats-membres, notamment entre le Gabon et le Cameroun. Les difficultés économiques rencontrées par cette zone, la constance toute relative dans l'application des programmes d'ajustement, s'ils ne remettent pas en cause l'objectif d'intégration, rendu au contraire encore plus nécessaire, n'en facilitent guère l'application.

En Afrique de l'Ouest cependant, les avantages attendus de l'intégration ne se répartissent pas également entre les pays de la zone, compte tenu de l'inégalité des niveaux de développement. La Côte d'Ivoire dotée d'un potentiel économique sans exemple dans la région bénéficiera la première de l'ouverture des marchés voisins. Mais, au Burkina Faso, certaines industries (dans le secteur textile ou le caoutchouc) ne survivent que par la grâce de tarifs douaniers particulièrement protecteurs. Sans doute, la libéralisation se traduira-t-elle par une baisse des coûts pour les consommateurs mais elle peut laminer également un tissu industriel d'un pays enclavé et privé de tout avantage comparatif. Dans ces conditions, le processus d'intégration ne peut être que progressif. Il doit prévoir, en outre, des mesures d'accompagnement, notamment sociales, nécessaires pour limiter l'impact perturbateur de l'ouverture des frontières. Dans cette phase, l'appui des bailleurs de fonds étrangers constitue un impératif.

B. UN CONTINENT EN MARGE DES GRANDES MUTATIONS CONTEMPORAINES ?

Au-delà de ces évolutions récentes, l'Afrique ne reste pas en marge des grands mouvements qui paraissent emporter les autres ensembles géographiques sur les voies de la modernité (transition démographique, progrès de l'éducation et de la santé, croissance durable). Les grandes conférences internationales organisées sous les auspices des Nations-Unies (au cours des trois dernières années, au Caire en 1994 sur la population, à Pékin en 1995 sur les femmes, à Istanbul en 1996 sur l'habitat) ont paru souligner le décalage entre ce continent et le reste du monde. Pourtant des signes d'évolutions profondes se dessinent dont votre rapporteur souhaiterait rendre compte.

1. Une évolution démographique plus favorable

a) La baisse de l'indice synthétique de fécondité

L'analyse des statistiques relatives à l'indice synthétique de fécondité -ISF- (le nombre d'enfants par femme) ne permet plus d'en douter, la fécondité s'inscrit aujourd'hui dans un mouvement de décrue. La tendance s'est d'abord confirmée à Maurice -parvenue désormais, sans doute, au terme de sa transition démographique avec un ISF de 2- puis dans quatre autres pays précurseurs (l'Afrique du sud, le Zimbabwe, le Botswana et le Kenya). Si le nombre d'enfants par femme demeure élevé -de l'ordre de 5 à 6- dans les autres pays africains, il a toutefois baissé -de deux enfants en moyenne- depuis 10 ans.

Cette évolution trouve son origine dans trois facteurs aujourd'hui bien reconnus. En premier lieu, les efforts entrepris depuis quelque trente années en faveur de l'enseignement ont porté leurs fruits : le niveau d'instruction des jeunes filles s'est élevé progressivement. Une période de scolarisation plus longue, la recherche, le cas échéant, d'un emploi retardent l'âge du mariage et de la naissance du premier enfant. Le système éducatif n'est d'ailleurs pas seul ici en cause, les associations de quartier et d'entraide, très dynamiques en Afrique peuvent également contribuer à l'élévation du niveau d'éducation, à une meilleure prise de conscience aussi des principes d'hygiène -conditions d'une baisse d'un taux de mortalité infantile et partant, à terme, du nombre d'enfants souhaités compte tenu des chances accrues de survie jusqu'à l'âge adulte.

Le développement de l'urbanisation constitue le deuxième facteur décisif du ralentissement de la fécondité. La ville favorise en effet la diffusion de nouveaux modèles familiaux centrés sur la famille nucléaire de type européen, et la pression sociale sur les jeunes couples pour avoir des enfants y est moins forte qu'à la campagne. En outre, le milieu urbain facilite l'accès aux services de planification familiale . D'après certaines estimations, 20 % des femmes en âge de procréer ont recours aux services de planification familiale tandis qu'une proportion comparable seraient prêtes à y faire appel si elles disposaient de ces services dans leur voisinage.

Ces tendances favorables paraissent toutefois contrariées par des facteurs dont il est, aujourd'hui encore, difficile de prendre la juste mesure.

b) Les facteurs de résistance

En premier lieu les situations de crise politique , voire les conflits armés dont l'Afrique apparaît trop souvent le théâtre, peuvent produire des effets contradictoires. En effet, à une baisse de la natalité, observée dans un premier temps, succède généralement un rattrapage démographique. Ce phénomène se produit avec constance dans les camps de réfugiés ou déplacés, ainsi que parmi les populations survivantes parmi lesquelles les filles paraissent systématiquement déscolarisées afin d'accélérer les unions. En outre, quand les tensions ethniques divisent un pays, la stratégie "d'occupation de l'espace national ou régional" passe souvent par un discours très nataliste de la part des gouvernants.

La crise économique n'a pas d'effets moins contrastés. Dans les villes, le souci de préserver son pouvoir d'achat peut conduire à limiter les naissances. Mais l'impécuniosité des pouvoirs publics condamne les services scolaires ou de santé à ne pas jouer leur rôle positif auprès des populations.

En outre, au-delà même des situations de crise, les résistances sociales et culturelles à une baisse de la fécondité demeurent fortes, notamment au sein des populations rurales, soucieuses notamment d'assurer par une nombreuses progéniture, la sécurité des parents, en l'absence de tout réel système de retraite.

Enfin, compte tenu de l'inertie propre aux phénomènes démographiques, la population africaine âgée aujourd'hui pour moitié de moins de quinze ans, assurera par sa jeunesse, pendant encore plusieurs décennies, un taux élevé de croissance naturel même si, par ailleurs, le déclin de la fécondité se confirme dans l'avenir.

2. L'évolution contrastée des indicateurs sociaux

Depuis 1990, le programme des Nations Unies pour le développement tente d'évaluer les progrès accomplis par chaque pays à travers le concept de "développement humain" qui cherche à prendre en compte non seulement la croissance économique mais aussi les évolutions dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'emploi, de la situation des femmes, de la protection sociale et de l'environnement. Selon le rapport mondial sur le développement humain de 1996, les pays d'Afrique subsaharienne connaissent encore de nombreux retards dont témoignent un indice de développement humain, inférieur pour la plupart des pays à 0,396 (sur un maximum de 1).

Toutefois cette situation recouvre des évolutions contrastées.

a) Progrès et incertitudes dans le secteur de la santé

L'état sanitaire du sous-continent s'est dans l'ensemble amélioré : l'espérance de vie s'est réduit de 48 à 52 ans entre 1982 et 1993. Sur la même période le taux de mortalité infantile s'est réduit de 112 à 93 sur 1000. La politique de vaccination, un encadrement sanitaire plus poussé (grâce à l'augmentation du nombre de centres de santé, des médecins et d'infirmiers) ont commencé de porter leurs fruits malgré l'impéritie de l'Etat, et la crise économique. Toutefois, l'extension de l'épidémie du VIH Sida fait peser une lourde hypothèque sur ces avancées. Dans trois pays - l'Ouganda, la Zambie et le Zimbabwe- frappés par ce mal avec une particulière gravité, l'espérance de vie a reculé de trois ans. L'absence de moyens financiers, le poids des traditions culturelles et sociales ne permettent malheureusement pas d'envisager un recul de la contagion dans les années à venir.

b) Les retards du secteur éducatif

Dans le domaine de l'enseignement, les résultats apparaissent préoccupants. En effet, malgré l'augmentation générale du nombre d'enseignants, le taux de scolarisation dans le primaire a régressé (de 79 % à 73 % entre 1980 et 1993). La forte croissance démographique, les difficultés financières rencontrées par les pouvoirs publics constituent les principaux facteurs d'une évolution qui, si elle devait se confirmer, pourrait, à travers la déscolarisation des filles notamment, remettre en cause la lente baisse de la fécondité.

A vrai dire, l'engagement d'un pays sur la voie de la transition démographique paraît étroitement liée à l'amélioration de la situation sociale sans qu'il soit d'ailleurs possible d'avancer une relation univoque entre les deux phénomènes.

Le bilan des deux dernières décennies apparaît nuancé. L'exemple de la santé -où les progrès sont notables malgré un contexte économique difficile- méritent la réflexion. Sans doute inspire-t-il en partie le propos introductif du rapport du PNUD : "En termes purement économiques, les années quatre-vingt ont constitué une "décennie perdue" pour près de 70 pays. Cependant il est remarquable d'observer que sur la même période, presque tous les pays sont parvenus à maintenir et dans certains cas à accélérer leur rythme de croissance en terme de développement humain (...) [Ainsi] des politiques délibérées et bien ciblées peuvent faire la différence lorsqu'elles sont appliquées avec coeur, même dans les circonstances les plus difficiles". Ces observations démontrent que l'aide publique au développement a permis au continent d'échapper à la régression à laquelle la crise économique paraissait la condamner.

II. LA COOPÉRATION FRANÇAISE SUR LES VOIES DU CHANGEMENT

A. LA PÉRENNITÉ DE L'ENGAGEMENT FRANÇAIS EN AFRIQUE

1. L'aide française : un effort exemplaire dans un contexte de désengagement général

a) Une « fracture sociale » à l'échelle du monde aggravée par le désintérêt des investisseurs et la baisse de l'aide publique

Si les pays les moins avancés d'Afrique -le continent compte 33 des 48 pays les plus pauvres recensés par l'organisation des Nations Unies- ont connu une croissance de 2,2 % (le continent asiatique ayant maintenu son avance avec une croissance de 4,6 %). L'écart de revenu entre les pays industrialisés et les pays en développement n'a cessé de se creuser : il a triplé entre 1960 et 1993 selon un rapport du programme des Nations Unies pour le développement.

Au cours des trente dernières années, la part des richesses détenues par les 20 % des habitants les plus pauvres de la planète s'est contractée de 2,3 à 1,4 %, tandis que la part des 20 % les plus riches s'est accrue de 70 à 85 %. La crise des années quatre-vingt a aggravé encore les inégalités : ainsi dans 70 des pays frappés par la stagnation ou la dépression, les revenus moyens n'ont pas encore retrouvé leur niveau antérieur à 1980.

Si les tendances actuelles devaient se prolonger, le revenu annuel des plus pauvres en 2030 ne devrait pas dépasser 325 dollars, tandis que celui des pays industrialisés atteindra quelque 40 000 dollars...

Ces évolutions sont-elles inéluctables ? Certes, il paraît difficile de compter sur les seuls ressorts des forces du marché pour corriger ces évolutions. L'Afrique demeure encore un continent délaissé par les investisseurs. Entre 1990 et 1995 elle n'aura reçu que 5 % des investissements étrangers dirigés vers les pays du sud. En outre, l'année 1995 s'est caractérisée par un mouvement préoccupant de retrait avec un recul d'un tiers des investissements étrangers directs. Au total, ceux-ci n'ont pas dépassé 2,2 milliards de dollars et se sont concentrés principalement sur le secteur des ressources naturelles (production de pétrole ou de minerai en Angola, au Gabon et au Nigeria).

Dans ce contexte, le soutien de la communauté internationale demeure indispensable. Or l'aide publique au développement subit une érosion constante depuis une décennie : elle ne représente plus que le tiers du flux de capitaux vers le monde en développement (investissements directs et achats de titres compris) contre la moitié en 1985. Alors que l'objectif assigné par l'ONU fixe à 0,7 % la part de richesse nationale consacrée par les pays industrialisés au développement des pays du sud, la moyenne, pour l'ensemble des pays donateurs ne dépasse pas 0,3 %. L'Afrique reçoit près de 30 % de l'aide au développement et demeure ainsi le premier continent bénéficiaire, même si par ailleurs sa part stagne d'une année sur l'autre.

b) Le rôle éminent de la France

La France continue de se distinguer par l'effort exemplaire qu'elle consent en faveur de l'aide publique et l'intérêt qu'elle attache au problème de développement.

Si en 1995, quatre pays seulement consacrent à l'aide au développement dans le monde plus de 0,7 % de leur revenu national (la Norvège, le Danemark, la Suède et les Pays-Bas), la France approche de ce seuil (0,55 % du PNB consacré à l'aide publique au développement). En volume elle se classe au deuxième rang des donateurs (42 milliards de francs), derrière le Japon (13 milliards de dollars) mais devant l'Allemagne et les Etats-Unis désormais relégués en quatrième position.

Du reste, l'appui de la France ne se mesure pas seulement à l'aune des dépenses publiques : il se traduit par les initiatives prises par notre pays, au sein des instances multilatérales en faveur des pays en développement. Ainsi les appels du Président de la République au Sommet du Groupe des Sept pays les plus industrialisés (G7) à Lyon plaidant pour une réduction de la dette des pays les plus pauvres ont-ils fini par être entendus.

Cependant la France ne se distingue pas seulement par l'intérêt que les pouvoirs publics accordent à l'Afrique mais aussi par l'engagement de nos entreprises sur le continent. D'après une enquête du Conseil des investisseurs français en Afrique (rapport 1995) sur un échantillon de filiales significatives de 548 unités -dont 284 en zone franc- 70 % de ces entreprises prévoyaient d'investir sur le continent dans les trois années à venir. Ces résultats témoignent d'un état d'esprit sans exemple, sans doute dans les autres pays industrialisés.

C'est dans ce contexte qu'il convient d'apprécier les rôles respectifs de la France et des Etats-Unis sur le continent. L'effort consacré par les Etats-Unis à l'aide au développement ne représente guère que 0,15 % de leur produit national brut et s'oriente d'ailleurs principalement vers Israël, l'Egypte et le continent latino-américain. La France destine à l'Afrique 62 % de son aide, les Etats-Unis 21 % de leurs versements. En outre, le Congrès américain avait décidé de réduire de près de moitié la contribution des Etats-Unis pour 1996 (soit 775 millions de dollars au lieu de 1,38 milliard de dollars) à l'Association internationale au développement (AID), l'agence de la Banque mondiale chargée d'accorder des prêts aux pays les plus pauvres.

L'Afrique occupe également une place marginale pour les opérateurs privés américains : les prêts des banques commerciales ne dépassent pas 2 milliards de dollars (12 milliards de dollars pour les banques françaises -soit le tiers de l'ensemble des prêts consentis au continent africain), 48 groupes industriels et 12 banques ou compagnies nord-américains sont représentés en Afrique (contre 121 groupes industriels et 68 banques ou compagnies d'assurances françaises).

Ces différents éléments chiffrés 4 ( * ) permettent de prendre la mesure de l'engagement des deux pays sur le continent. L'intérêt des Etats-Unis pour le continent africain, bien que contenu dans des bornes étroites, n'en apparaît pas moins vif quand des intérêts financiers ou économiques sont en jeu.

Les ambitions des sociétés pétrolières américaines se sont aiguisées au Congo , au Gabon et au Tchad -où de nouveaux gisements d'hydrocarbure ont été mis en évidence par des sociétés américaines. Or dans ces pays, ainsi d'ailleurs qu'en Angola ou au Nigeria , la France bénéficie de solides positions acquises à la faveur de son savoir-faire et de sa longue expérience en Afrique. Aujourd'hui les rivalités pourraient se déplacer vers le secteur des télécommunications où tout reste à faire sur le continent. Les financements des bailleurs de fonds ouvrent à cet égard des marchés solvables pour les grandes compagnies intéressées. La France qui apporte un concours suivi et important aux pays africains doit ici pouvoir faire valoir ses compétences et sa technologie.

Ces considérations conduisent à souligner l'intérêt pratique d'une aide dont le principe est parfois contesté dans notre pays. La France demeure en 1995 le premier partenaire économique de l'Afrique et nos exportations représentent 20 % (70 milliards de francs) des achats africains -même si notre position s'érode légèrement au profit des Etats-Unis et du Japon. Nos échanges se soldent par un excédent de 24 milliards de francs. S'il est aujourd'hui encore très difficile d'évaluer l'effet-retour de notre aide, l'effort que nous consacrons à l'Afrique nous permet d'assurer non seulement une présence conforme à la vocation de la France, à ses intérêts géostratégiques, mais encore et aussi, on l'oublie trop souvent, aux intérêts économiques de nos entreprises .

Si la justification de l'aide ne fait pas de doute, les cadres institutionnels de notre action, les choix et les méthodes n'échappent pas aux interrogations.

La réforme de l'aide au développement reste encore inachevée.

2. Une réforme de l'aide encore inachevée

Le Premier ministre avait assigné au ministre délégué à la coopération, dans la lettre de mission qu'il lui avait adressée, de renforcer « l'unité, la cohérence et la transparence des différents outils de la coopération française ». La mise en oeuvre d'une meilleure coordination a pu se concrétiser sans remettre en cause les attributs d'un ministère de la coopération, dont votre rapporteur a déjà souligné combien il importait de garantir la pérennité afin d'assurer à nos partenaires la présence d'un interlocuteur privilégié, témoignage de l'intérêt que nous portons au continent et à sa spécificité.

Le Président de la République a lui-même réaffirmé en décembre 1995 au Premier ministre, à la veille du sommet sur la francophonie de Cotonou, que le ministère de la coopération demeurerait « indépendant ».

a) Des avancées certaines

Le souci de réforme du Premier ministre s'est traduit par une réorganisation administrative et institutionnelle de l'aide publique au développement autour du triptyque : coordination, clarification, évaluation.

A l'issue d'une réunion ministérielle présidée par le Premier ministre, M. Alain Juppé a approuvé la création d'un comité interministériel de l'aide au développement (CIAD). Cette instance présidée par le Premier ministre réunit le ministre des affaires étrangères, le ministre de l'économie et des finances, le ministre délégué à la coopération, le ministre délégué au budget, le ministre délégué au commerce extérieur et tout ministre intéressé par l'ordre du jour. Au cours de sa réunion annuelle, dont le ministre des affaires étrangères assurera le secrétariat, en coordination avec le ministre délégué à la coopération, le CIAD définit l'aide publique au développement dans ses aspects bilatéraux et multilatéraux.

Dans l'intervalle un « comité permanent » regroupant des hauts fonctionnaires, et notamment le directeur du Trésor, le secrétaire général du Quai d'Orsay et le directeur général de la Caisse française de développement, assurera la continuité de la concertation sur les grandes orientations de notre coopération. Enfin, troisième maillon d'une chaîne qui vise à restaurer la cohérence de notre action, un comité local d'aide au développement (CLAD), présidé par l'ambassadeur dans chaque pays du champ, rassemblera les chefs de service concernés et le directeur de l'agence locale de la Caisse française de développement afin d'échanger des informations et d'assurer l'harmonisation et le suivi des programmes d'aide.

L'impératif de concertation se traduit également par le rapprochement entre les ministères des affaires étrangères et de la coopération, sous la forme d'un comité de pilotage présidé par le ministre des affaires étrangères chargé d'établir une plus grande cohérence entre les orientations politiques générales, les programmes de coopération par pays, les procédures budgétaires enfin.

Au chapitre de la clarification, la réforme procède à une définition plus précise des compétences de la Caisse française de développement, chargée du rôle de banquier et d'opérateur pour le secteur profuctif, les infrastructures et l'aménagement rural et urbain.

Enfin, la nécessité de mieux évaluer les conséquences de l'aide au développement est mieux prise en compte à travers la mise en place d'un groupe de travail (où seront représentés les ministres membres du CIAD), chargé d'élaborer chaque année un rapport sur l'évaluation de l'aide publique au développement diffusée, après approbation par le Comité interministériel, aux présidents et rapporteurs compétents du Parlement.

b) Un processus inabouti

Il est certainement trop tôt pour se prononcer sur la portée d'une réforme dont la nécessité ne fait aucun doute.

Sans doute, au-delà des réformes de structure, faudra-t-il convaincre les esprits. Or, l'inertie d'administrations souvent jalouses de leurs compétences ne dispose guère les services à travailler de concert. Certes, la « forteresse » Bercy devra accepter d'évoquer dans un cadre interministériel des questions qu'elle traitait jusqu'à présent dans un cadre restreint.

Mais l'équilibre des forces induit par la répartition des crédits entre ministères ne pourra évoluer que lentement.

« Le département ministériel en charge de la coopération n'a qu'une place marginale dans l'action correspondante. Seule une faible partie des crédits d'aide au développement (11,5 % en 1994) est inscrite à son budget (...). Mais par ailleurs, 40 % des crédits du ministère de la coopération ne sont inscrits à son budget que pour ordre, la responsabilité réelle de leur mise en oeuvre appartenant au Premier ministre (chapitre 69-91, article 20), à la mission militaire de coopération (chapitre 41-42) où à des comités interministériels, comme en matière d'enseignement à l'étranger, de francophonie ou d'aide humanitaire ... » : ces constats de la Cour des comptes dans son rapport annuel 1996 reprennent des observations déjà maintes fois répétées.

Que les habitudes administratives soient longues à changer, un exemple particulièrement préoccupant permettra de le montrer. L'intégration, dans le champ d'attribution de la rue Monsieur, de 34 nouveaux pays relevant précédemment du ministère des affaires étrangères, devait s'accompagner d'un transfert de crédits correspondants de l'ordre de 150 millions de francs à compter du 1er janvier 1996. Or ce transfert n'a pas eu lieu. Cette situation n'est pas tolérable, tant sur le plan des principes -le ministère de la coopération n'ayant ainsi qu'une compétence purement nominale sur l'étendue de son champ élargi- que de la pratique : à quel interlocuteur doivent s'adresser les représentants des pays du nouveau champ ? La mise en place d'une cellule chargée de les orienter manifeste moins un effort de coordination que l'embarras suscité par cette réforme inachevée.

Selon votre rapporteur, il est indispensable que la volonté politique dont la réforme porte témoignage puisse prévaloir sur les résistances administratives.

Le processus doit être conduit à son terme. N'est-ce pas là une exigence minimale pour une réforme qui aurait pu aller plus loin ? Ainsi le partage des compétences sur le terrain entre les missions de coopération et l'agence de la Caisse française de développement, s'il apporte une clarification, reste sans doute en deçà de l'équilibre souhaitable. Il serait nécessaire d'aller jusqu'au bout de la logique des compétences développée par chaque institution : la Caisse française a réuni un savoir-faire dans la conduite des travaux d'infrastructure. Pourquoi dès lors ne pas lui confier une responsabilité prépondérante dans tous les projets « lourds » même s'ils concernent des secteurs comme la santé ou l'éducation ? Les missions de coopération pourraient, quant à elles, se recentrer sur des missions de conseil dans le cadre de leurs attributions traditionnelles adaptées au haut degré de qualification des cadres de la coopération.

Le CIAD, officialisé par le décret du 20 mars 1996, s'est réuni pour la première fois le 20 juin dernier sous la présidence du Premier ministre. Il a retenu notamment le principe d'une cellule indépendante chargée de l'évaluation de l'efficacité de l'aide française et d'analyser les actions des différentes administrations.

Ce comité aujourd'hui constitué sous la direction d'un inspecteur des finances, M. Jean-René Bernard, s'est fixé pour priorité l'analyse de la répartition par pays et par secteurs de notre aide au développement. Ce travail -auquel votre rapporteur s'était pour sa part essayé dans son précédent avis budgétaire avec les informations mises à disposition- peut paraître le "b-a ba" d'une réflexion sur notre coopération et on peut s'étonner qu'une telle initiative intervienne si tard.

Il n'est guère possible en effet d'assigner des orientations précises à notre action à partir d'une connaissance encore par trop approximative de notre politique de coopération actuelle.

Il est impératif aujourd'hui de tracer des choix clairs, pour nos méthodes d'action comme pour nos priorités sectorielles et géographiques.

B. UNE COOPÉRATION DÉSORMAIS OUVERTE SUR DE NOUVELLES MÉTHODES ET DE NOUVELLES PRIORITÉS

1. Le choix des principes d'action

a) Le souci d'un développement de proximité

Quel type de développement souhaite-t-on promouvoir ? Au cours de ses missions sur le continent africain, votre rapporteur a pu prendre la mesure d'une évolution des caractéristiques des projets de développement. Les projets les plus coûteux, les plus lourds par l'ampleur des infrastructures mises en place, les moyens humains mis en oeuvre, les coûts de fonctionnement générés ne tiennent plus lieu de sésame dans une politique de développement.

Quelques échecs, quelques gaspillages ont discrédité des projets parfois trop ambitieux. A l'inverse, une action moins spectaculaire, inscrite dans la longue durée, plus attentive aux besoins de la population répond parfois mieux aux exigences du développement.

Qu'il soit permis ici de citer le programme exemplaire du Ganzourgou au Burkina-Faso : il repose sur une gestion décentralisée de l'aide. Il revient à des comités locaux ad hoc de sélectionner des projets soumis par des particuliers ou des représentants de villages portant sur différents domaines (aménagements hydroagricoles et forestiers, puits, marchés, équipements financiers). Les financements, sur la base d'une subvention de la CFD, requièrent en principe une participation, même minimale des intéressés. Responsabilisation des partenaires (chargés de présenter des dossiers détaillés sur les travaux à conduire et l'échéancier des paiements), souci d'une intervention proche des attentes des populations : ce type de projet correspond à une inflexion notable de notre coopération.

Cette nouvelle orientation s'inspire des leçons des expériences passées et traduit aussi une prise de conscience : les retards économiques peuvent trouver leur origine dans des faits de sociétés profondément enracinés dans l'histoire et la culture. Dans ces conditions, certains grands projets constituent des greffes superficielles condamnées à ne pas prendre. En voudra-t-on un exemple ? L'absence de cadastre laisse planer des incertitudes sur la répartition des propriétés et n'incite guère à une valorisation optimale des terres cultivées par les paysans. Elle constitue un frein au développement qui ne pourrait être levé que par une vaste clarification du droit foncier -d'ailleurs en cours dans certaines régions. Mais l'entreprise ne peut qu'entamer les pouvoirs traditionnels souvent chargés de l'attribution des terres.

La réhabilitation d'actions plus discrètes ne discrédite pas des projets plus ambitieux dont la mise en oeuvre exige toutefois une rigueur sans faille. Le souci de la diversité -accordé à la grande variété des situations africaines- le sens du pragmatisme, une certaine défiance à l'égard des grands modèles supposés de développement, tout ceci paraît, par petites touches, composer un visage nouveau à notre politique de coopération.

Pour favoriser une intervention de proximité soucieuse de mieux répondre aux besoins exprimés sur le plan local, la politique de coopération développe désormais la pratique de crédits déconcentrés. Une instruction ministérielle prenant effet au 1er janvier 1996 a ainsi prévu que les crédits déconcentrés devaient représenter au moins 15 % des crédits du Fonds d'aide et de coopération (FAC) programmés annuellement et spécifiquement en faveur de chaque pays. Désormais dans tous les pays de la zone franc (ainsi que ceux pour lesquels la programmation annuelle des crédits du FAC dépasse 12 millions de francs) les crédits déconcentrés sont divisés en deux guichets. Le premier, doté d'un tiers des crédits au maximum, permet de financer les projets bénéficiant à l'Etat et à ses démembrements. Le second disposant des deux tiers des crédits au minimum, est affecté aux projets présentés par les acteurs de la société civile et les collectivités territoriales.

Ce second guichet permet en fait, sous la forme d'un « fonds social de développement » d'institutionnaliser le « fonds spécial de développement » mis en place entre 1994 et 1996 afin d'accompagner la dévaluation du franc CFA. L'expérience reposant sur une gestion déconcentrée des interventions et la rapidité des décaissements, s'était révélée en effet très fructueuse.

Le rapprochement entre la prise de décision et la mise en oeuvre des projets FAC de petite taille (entre 50 000 F et 2 millions de francs) devrait favoriser ainsi une meilleure adéquation aux réalités locales, ainsi que l'émergence de nouveaux partenaires, issus de la société civile, et associés à la préparation et la sélection des projets au sein d'un comité consultatif.

Le fonds social de développement encouragera plus particulièrement les investissements dans les secteurs sociaux et les services collectifs, notamment lorsqu'ils sont porteurs de créations d'emplois et de revenus.

La Caisse française de développement restera associée, comme elle l'était déjà dans le cadre du Fonds spécial de développement, à cette nouvelle démarche. En outre, elle financera, sur ses crédits, et selon des procédures propres, des opérations répondant à une inspiration comparable comme, par exemple, le financement des « très petites entreprises ».

b) Aide liée ou déliée ?

Le choix des méthodes doit, certes, nous inviter à nous interroger en priorité sur l'adéquation de notre aide aux besoins des populations. Il doit également nous appeler à réfléchir sur la portée de notre aide sur notre propre économie. Les contraintes budgétaires, les préoccupations quotidiennes de nos concitoyens ne permettent pas d'esquiver la question. Aujourd'hui plus de 50 % de l'aide française revient à notre pays sous la forme d'achat de biens et services . Si aucune étude sérieuse n'a permis de chiffrer cet effet retour, nul doute n'est cependant permis sur l'impact positif de l'aide. Un faisceau de signes, parmi lesquels le solde excédentaire de nos échanges avec le continent, permet de s'en convaincre. Le souhait manifesté par M. Yves Marchand, dans son rapport, par ailleurs excellent ("Une urgence : l'afro-réalisme") de mettre fin à l'aide liée suscite, dans ce contexte , une certaine circonspection. L'« effet retour » de notre aide constitue une garantie, qui, il ne faut pas se leurrer, est la justification pour beaucoup de nos concitoyens du maintien de notre aide en Afrique. A un moment où notre coopération fait l'objet de contestations, votre rapporteur ne pense pas qu'il soit opportun de remettre en cause le principe d'une aide liée .

2. Restaurer une «société de confiance » en Afrique

S'il ne peut constituer un substitut à l'aide publique, l'investissement privé constitue l'une des meilleurs assurances en faveur du développement. Or les entreprises occidentales se sont détournées de l'Afrique. Aujourd'hui le retour à la croissance, l'assainissement en cours des bases économiques : autant d'éléments dont la combinaison devrait permettre de restaurer la confiance dans une partie du continent. Les investisseurs étrangers ne sont pas seuls à faire montre de prudence. Les opérateurs privés africains existent -les ressources ne manquent pas si l'on en juge par la liquidité des banques locales- mais tardent à se manifester.

On sait que les éléments de fait ne sont pas tout, l'instauration d'un climat de confiance demeure un préalable pour une véritable reprise de l'investissement privé. Or les incertitudes politiques, les faiblesses du cadre juridique ont une part de responsabilité déterminante dans la prévention dont nombre de pays africains demeurent l'objet. De même l'endettement excessif des Etats du continent inhibe les investisseurs.

a) Un impératif : la construction d'un Etat de droit

La définition d'un cadre législatif et réglementaire stable, clair, précis et effectivement appliqué doit constituer une priorité dans notre politique de développement. Il s'inscrit à la croisée d'une double orientation de notre politique d'aide : le soutien à l'intégration régionale d'une part, à la consolidation d'un Etat de droit d'autre part.

L'intégration régionale ne se résume pas en effet à la mise en place d'institutions communes ou à la formation d'unions douanières, et peut-être, à terme, de marchés communs ; elle se manifeste également par l'élaboration de règles de droit harmonisées et modernisées , à l'échelle de vastes ensembles géographiques.

Votre rapporteur soulignera, en particulier, l'importance de l'harmonisation du droit des affaires destiné à offrir aux investisseurs l'indispensable sécurité juridique et judiciaire et la création de tribunaux de commerce dans de nombreux pays.

L'initiative prise dans ce sens par les ministres des finances de la zone franc réunis à Ouagadougou en 1991 s'est trouvé consacrée sous la forme d'un traité signé en 1993 et aujourd'hui ratifié par le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la Centrafrique, les Comores, la Côte-d'Ivoire, le Gabon, la Guinée équatoriale, le Togo, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Tchad. Seuls la Guinée et le Congo, tous deux signataires du texte, ne l'ont pas ratifié.

Une organisation pour l'harmonisation du droit des affaires en Afrique s'est mise en place, constituée d'un Conseil des ministres de la justice et des finances, d'un secrétariat permanent -à Douala- d'une Cour commune de justice et d'arbitrage -à Abidjan- et d'une Ecole régionale supérieure de la magistrature -à Cotonou-. Ces deux dernières institutions devraient fonctionner à compter de 1997. La France s'est engagée à assurer une partie des dépenses liées à la mise en place de ces institutions, mais l'intervention d'autres bailleurs de fonds demeure indispensable pour un projet aussi ambitieux. Le soutien français reste subordonné à la création d'un fonds de capitalisation -dont les intérêts permettraient la prise en charge des dépenses de fonctionnement des institutions -financé pour moitié par les Etats parties et les bailleurs de fonds. Le programme des Nations Unies pour le développement, chargé de concrétiser l'initiative spéciale pour l'Afrique lancée par M. Boutros-Ghali le 15 mars 1996, et notamment le volet destiné à renforcer les capacités institutionnelles (500 millions de dollars), devrait participer à l'entreprise.

Au-delà du dispositif institutionnel, la vocation du traité demeure la mise en place de normes harmonisées. Plusieurs avant-projets ont d'ores et déjà été adoptés (droit commercial général en février 1995, doit des sociétés commerciales en octobre 1995) ou sont en passe de l'être (régimes relatifs aux procédures collectives, aux voies d'exécution, aux sûretés et au droit comptable). En outre de nouveaux chantiers pourraient s'ouvrir dans le domaine du droit du travail ou du droit de l'arbitrage.

Au chapitre de l'intégration régionale, il convient également de citer l'harmonisation des marchés des assurances et le contrôle des entreprises intervenant dans ce secteur dans le cadre du traité CIMA (Conférence interafricaine des marchés d'assurances), la création d'une conférence interafricaine de la prévoyance sociale (la CIPRES) destinée à assainir la gestion des organismes de prévoyance sociale.

La transparence et la sécurité juridique requièrent un effort de formation particulier au profit des cadres chargés de l'application du droit. Dans cette perspective, deux pôles régionaux de formation, l'un à Ouagadougou, l'autre à Libreville, ont été institués à l'intention des cadres du ministère de l'économie et des finances.

En outre, une Ecole régionale supérieure de la magistrature devrait former les magistrats et auxiliaires de justice africains au nouveau droit des affaires harmonisées.

Un cadre juridique stable et rigoureux ne se conçoit que dans une société pacifiée. Trop de conflits meurtrissent encore l'Afrique et nourrissent un afropessimisme, prétexte au désengagement pour les pays occidentaux. A cet égard, la France s'efforce de longue date de promouvoir la création d'une force africaine de paix dont le principe avait été posé lors du sommet France-Afrique de 1994. Comme le rappelait votre rapporteur dans son avis sur le budget de la coopération en 1996, la mise en oeuvre d'une force d'interposition de quelque 5 000 hommes suppose que deux conditions soient satisfaites : « en premier lieu l'initiative appartient aux pays africains et un défaut de volonté commune condamnerait la force d'interposition à l'échec. En second lieu, la France ne peut soutenir seule financièrement une telle entreprise à laquelle nos partenaires de l'Union de l'Europe occidentale devraient être intéressés ».

Au cours d'une récente visite en Afrique, le secrétaire d'Etat américain a tenté de défendre un projet alternatif afin d'intervenir dans les pays en proie à des « insurrections, la guerre civile ou des campagnes de génocide menaçant de faire des victimes civiles à grande échelle ». Cette « force interafricaine de réaction aux crises » serait composée d'une dizaine de milliers de soldats africains et financée en partie par les Etats-Unis qui prendraient à leur charge la moitié du coût de mise en oeuvre (estimé à 40 millions de dollars). Après son déploiement, cette force serait cependant financée entièrement par l'organisation des Nations Unies.

Plusieurs problèmes demeurent toutefois en suspens au premier rang desquels le choix des pays « éligibles » au regard des critères américains pour constituer la force. Six pays pourraient être retenus : le Ghana, le Kenya, l'Ouganda, la Tanzanie, le Zimbabwe et le Sénégal. Ils s'engageraient à mettre à disposition au moins trois bataillons (soit chacun 1 800 hommes), des « contingents en attente » en quelque sorte, équipés et entraînés grâce à l'appui des Etats-Unis. Le choix très restrictif des pays s'explique difficilement : à l'exception du Sénégal, il laisse de côté les pays francophones dont un grand nombre n'a rien à envier aux Etats anglophones choisis, en matière de respect des droits de l'homme.

La participation la plus large conditionne l'efficacité d'une telle initiative. Les liens de cette force avec l'Organisation de l'unité africaine constituent également une autre source d'interrogation. Trop d'incertitudes demeurent en définitive sur un projet dont, toutefois, il faut espérer qu'il ne se limite pas à une inspiration purement circonstancielle : votre rapporteur dénonce trop souvent l'indifférence des grandes puissances pour ne pas se réjouir du mouvement d'intérêt américain.

Au-delà des projets, ou des bonnes intentions, la France, pour sa part, en maintenant une « force de présence » de quelque 24 555 hommes -principalement en Afrique- contribue au rôle de stabilisation dont la récente intervention en Centrafrique a d'ailleurs souligné toute l'utilité. Sans doute le dispositif outre-mer est-il appelé à se réduire et à se simplifier. En effet, même si dans chaque implantation un seul régiment groupera les unités opérationnelles et les unités de soutien -, la présence française sera maintenue au Sénégal, en Côte-d'Ivoire, au Gabon, en Centrafrique, au Tchad. A Djibouti, les effectifs (3 435 avec 2 régiments) seront préservés et votre rapporteur s'en félicite : la position stratégique de Djibouti présente pour la France, il faut le rappeler, un intérêt essentiel.

b) La priorité à la réduction de l'endettement

. Le poids de l'endettement

En 1994, la dette globale des pays situés au sud du continent s'élevait à 193,4 milliards de dollars. L'encours de la dette des pays de la zone franc représente près du quart de ce montant (49,38 milliards de dollars). Si la dette extérieure de l'Afrique ne compte que pour 12,6 % de l'encours total des pays en développement, rapportée au PIB ou aux exportations elle pèse plus lourdement en Afrique que partout ailleurs. Ainsi la dette extérieure de la Côte d'Ivoire représente trois fois son revenu national. En Amérique latine cette part ne dépasse pas en moyenne la moitié du PNB.

Le remboursement de la dette requiert de la part des Etats africains un effort considérable obtenu au prix de sacrifices dans des domaines pourtant essentiels pour le développement. Ainsi, tandis que la Zambie consacrait 1,3 milliard au remboursement de sa dette entre 1990 et 1993, elle ne pouvait guère consacrer, sur la même période, que 37 millions de dollars au secteur éducatif.

Certes, le bilan de l'endettement ne peut s'apprécier sous un jour exclusivement négatif. Compte tenu des conditions d'octroi des prêts des bailleurs de fonds internationaux, il a constitué un ressort décisif pour l'assainissement des structures économiques de nombre de pays africains.

Aujourd'hui que se dessine un mouvement de reprise encore fragile dans certains pays africains, l'endettement demeure cependant un handicap considérable pour le décollage économique.

La communauté internationale commence aujourd'hui à mieux prendre la mesure des difficultés auxquelles un endettement excessif expose les pays les plus pauvres. La France a joué dans cette prise de conscience une part décisive. La constance de sa vocation aux côtés des pays en développement lui assignait ce rôle. Sa place parmi les pays créanciers lui permettait de montrer l'exemple. La France se classe en effet au quatrième rang des créanciers internationaux (derrière le Japon -236 milliards de dollars- les Etats-Unis -147 milliards de dollars- et l'Allemagne -106 milliards de dollars-). Ses créances (103 milliards de dollars) portent principalement sur l'Asie (31 milliards de dollars). Toutefois les prêts qu'elle a accordés à l'Afrique (23 milliards de dollars) la placent -et de très loin- au premier rang des créanciers du continent.

. La dynamique imprimée par les initiatives françaises

Notre pays a inscrit son action en faveur de la réduction de la dette des pays africains dans un double cadre bilatéral et multilatéral.

Pour ne s'en tenir qu'aux mesures destinées spécifiquement aux pays de la zone franc, il n'est pas inutile de revenir sur les principales étapes des efforts français. Le Sommet de la Baule (juin 1990) a permis de reprendre l'initiative en faveur des pays à revenu intermédiaire d'Afrique francophone. Le Cameroun, le Congo, la Côte-d'Ivoire et le Gabon ont ainsi pu bénéficier de prêts de la CFD à un taux réduit à 5 %. En septembre 1992, la création à l'issue du Sommet de Libreville d'un fonds de conversion de créances de 4 milliards de francs, a permis de favoriser des annulations de créances en contrepartie d'un effort fourni par les pays intéressés pour mettre en oeuvre des projets précis liés à l'environnement, au soutien des activités productives de base, au développement social et, depuis 1995, à toutes formes d'autres projets utiles, notamment la restructuration des secteurs publics. Au 30 juin 1996, le Comité de gestion du fonds avait retenu quarante-deux projets et procédé à des annulations de dettes pour un montant de 818 millions de francs (252 millions de francs pour le Cameroun, 7 millions de francs pour le Congo, 380 millions de francs pour la Côte-d'Ivoire et 179 millions de francs pour le Gabon).

En outre, à la suite de la dévaluation du franc CFA en janvier 1994, la France, dans le cadre des remises de dette (dites Dakar II) a décidé, d'une part, pour les pays les moins avancés, l'annulation de la totalité des encours d'aide publique au développement -subsistant après une première remise de dettes en 1989 dite de Dakar 1- et d'autre part, pour les pays à revenu intermédiaire, une annulation bilatérale de la moitié de la dette d'aide publique au développement (arriérés inclus). L'indemnisation versée à la CFD au titre de ces remises de dettes entraînera une dépense budgétaire cumulée de 1996 à 2019 d'un montant de 16,5 milliards de francs.

Parallèlement aux efforts de réduction de la dette bilatérale, la France plaide pour un allégement de la dette des pays les plus pauvres contractée auprès des organisations multilatérales. L'initiative française avancée lors du G7 à Halifax en 1995, devenue par la suite, grâce au soutien du Président français, l'un des thèmes majeurs du G7 de Lyon en juin dernier, a enfin reçu l'assentiment des principaux bailleurs de fonds à l'occasion des réunions annuelles du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale à l'automne 1996.

Au terme de mécanismes complexes où interviennent le Club de Paris (gestion de la dette publique par les principaux pays prêteurs), le FMI, la Banque mondiale et les banques régionales de développement, la réduction concernera pour la première fois une partie de la dette multilatérale des pays les plus pauvres et pourrait porter, selon certaines estimations, sur 7,7 milliards de dollars (soit environ 38 milliards de francs). Ces mesures pourraient se concrétiser rapidement, avant même la fin de l'année 1996, pour certains pays, sous réserve du respect habituel des critères de bonne gestion déterminés par les bailleurs de fonds multilatéraux.

III. LE PROJET DE BUDGET DU MINISTÈRE DE LA COOPÉRATION : UN EFFORT DE RIGUEUR COMMANDÉ PAR L'OBJECTIF DE MAÎTRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES

Le projet de budget pour 1997 s'élèvera à 6 720 millions de francs, soit une diminution de 7,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1996. Les autorisations de programme se contractent de 14,5 % (2 425,6 millions de francs au lieu de 2 837 millions de francs en 1996).

(en millions de francs)

Catégorie de dépenses

LFI 96

PLF 97

Evolution (en %)

Part dans les crédits du ministère (en %)

96/95

97/96

PLF 96

LFI 97

Assistance technique civile (chap. 42-23-10)

1 491

1 445

- 13,6

- 3,1

21

21,5

FAC (chap. 68-91)

AP

CP

2 787

2 121

2 375

1 891

+ 10,02

- 11,7

- 14,8

- 10,8

29

28

Coopération technique (Bourses, formation, échanges, appui aux organismes concourant au développement)

573

547

+ 1

- 4,5

7,8

8

Concours financiers (chapitre 41-43)

1 033

810

+ 3

- 21,6

15,8

12

Assistance technique et coopération militaire (chapitre 41-42)

776

739

- 0,9

- 4,7

10,5

11

Appui aux initiatives privées et décentralisées (chapitre 42-44)

147

153

+ 4

+ 3,8

2

2,2

Le projet de budget prolonge certaines orientations antérieures, notamment la déflation des effectifs de l'assistance technique ; il tient compte également des évolutions intervenues dans les pays du champ et procède ainsi à une réduction des concours financiers conforme à l'achèvement du programme exceptionnel d'accompagnement de la dévaluation du franc CFA. Toutefois la contrainte budgétaire ne permet pas que la marge de manoeuvre ainsi dégagée bénéficie à l'aide-projet, élément pourtant prioritaire de notre coopération .

A. UNE PRÉSENCE FRANÇAISE DANS LES PAYS DU CHAMP DÉSORMAIS À L'ÉTIAGE

1. Les moyens du ministère sous contrainte

a) Les crédits dévolus aux services : une progression limitée

. Emplois et rémunérations : un effort de rationalisation

Le ministère de la Coopération perdra 21 emplois, dont 12 à l'administration centrale 5 ( * ) et 9 dans les services extérieurs. Cette dernière mesure traduit la rationalisation des services extérieurs entreprise dans le cadre du Comité interministériel (CIMEE) : trois emplois de chefs de mission sont supprimés par fusion des fonctions d'ambassadeur et de chef de mission au Cap Vert, en Guinée-Bissau et aux Petites Antilles. A ces restructurations s'ajoute la disparition de 6 emplois d'agents contractuels de catégorie C.

Le ministère de la Coopération pourra compter sur un effectif total de 1 041 emplois (637 pour l'administration centrale, 366 pour les missions de coopération et 38 pour les centres médico-sociaux).

Quant aux centres culturels, l'érosion de leurs effectifs se poursuit avec la suppression de 5 emplois de catégorie C.

La progression des rémunérations (5,24 %) pourrait surpendre en l'absence de revalorisation du point d'indice de la fonction publique et dans un contexte marqué par des suppressions d'emplois. Elle résulte en fait principalement de l'ajustement aux besoins constatés de la dotation consacrée aux indemnités de résidence, sous-évaluée au cours des dernières années.

. Un effort en faveur de la modernisation des moyens de fonctionnement

L'évolution positive des crédits de fonctionnement trouve son origine, d'une part, dans le renforcement des moyens destinés à l'informatique (majorés de 8,6 %), et d'autre part, dans le transfert au sein du titre III (chapitre 34-04, article 10) des crédits destinés aux achats des livres pour les centres culturels, inscrits jusqu'à présent, et sans raison valable, au titre VI (Fonds d'aide et de coopération).

b) L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger : des moyens heureusement préservés mais des perspectives de développement limitées

Chargée de la gestion de l'ensemble des établissements d'enseignement français à l'étranger, l'Agence rémunère les enseignants sur ses crédits (supposés couvrir ainsi le traitement brut, les indemnités d'expatriation et de résidence, les rémunérations supplémentaires pour enfants à charge, les mesures de revalorisation, les indemnités et avantages statutaires à l'exception des primes de vie chère et autres rémunérations supplémentaires).

L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger est placée sous la double tutelle du ministère des affaires étrangères et du ministère de la coopération. Ce dernier ne participe toutefois que pour un cinquième aux ressources totales de l'Agence.

La dotation inscrite au budget du ministère -chapitre 57-10- s'élève à 368 millions de francs (soit une baisse de 1 %, plus importante que celle de la dotation inscrite au budget du ministère des affaires étrangères - 0,3 %).

Le maintien des effectifs d'enseignants recouvre en fait la substitution de 7 postes de résidents à autant de postes d'expatriés.

Par ailleurs les dotations pour équipement (43,3 millions de francs en crédits de paiement, et 47 millions de francs en autorisations de programme), permettent de couvrir des opérations déjà lancées (le lycée français de Tananarive pour l'essentiel).

2. Une assistance technique confrontée à une rigoureuse déflation des effectifs

a) L'assistance civile : la baisse continue des effectifs

Depuis 1986, le nombre d'assistants techniques aura été réduit de près de 5 000. Après la suppression de 310 postes d'enseignants et de 33 postes de techniciens en 1997, l'effectif passera au-dessous du seuil de 3 000 agents.

On peut aujourd'hui juger que la logique visant à réduire le nombre de postes de coopérants dits de substitution, est parvenue à son terme . De nouvelles contractions hypothéqueraient la capacité même de la France à former des cadres locaux destinés à prendre la relève des coopérants.

Assistance technique - postes Etats et inter-Etats

Effectifs sous statut - mars 1996

Etats

Enseignants

Techniciens

Total

Angola

10

4

14

Bénin

23

35

58

Burkina Faso

80

69

149

Burundi

9

10

19

Cambodge

2

14

16

Cameroun

119

101

220

Cap Vert

5

9

14

Centrafrique

84

75

159

Comores

29

34

63

Congo

35

46

81

Côte d'Ivoire

407

89

496

Djibouti

167

68

235

Gabon

231

79

310

Gambie

4

2

6

Guinée

29

43

72

Guinée Bissau

6

13

19

Guinée équatoriale

10

16

26

Haïti

10

11

21

Madagascar

138

79

217

Mali

63

59

122

Maurice

16

6

22

Mauritanie

92

54

146

Mozambique

11

10

21

Namibie

4

9

13

Niger

72

61

133

Petites Antilles

10

28

38

Saint-Thomas

4

8

12

Sénégal

222

115

337

Seychelles

8

8

16

Tchad

43

76

119

Togo

14

7

21

Zaïre

1

0

1

TOTAL

1 958

1 238

3 196

Les incertitudes de l'avenir ont parfois développé un climat de doutes parmi les coopérants. Dans ces conditions, la situation matérielle des assistants techniques doit naturellement retenir une attention particulière. A cet égard votre rapporteur se réjouit que deux mesures aient pu être adoptées dans le cadre du projet de budget.

D'une part, le principe d' une indemnité de logement des coopérants a enfin reçu l'agrément de Bercy en contrepartie d'un assujettissement à l'impôt sur le revenu en France. Cette mesure bénéficiera d'abord aux assistants techniques de Côte-d'Ivoire et pourra concerner le Cameroun quand ce pays aura ratifié la convention fiscale relative au rapatriement en France de l'impôt sur le revenu.

D'autre part, le mécanisme d'ajustement des rémunérations des coopérants à l'évolution des prix locaux, bloqué depuis la dévaluation du franc CFA, pourra s'appliquer de nouveau à compter du 1er janvier 1996.

Votre rapporteur souhaite que ces dispositions, lorsqu'elles auront été approuvées par le parlement, ne soient pas retardées ou vidées partiellement de leur contenu par une définition trop sévère des critères d'application par la direction du budget.

Enfin le ministère de la coopération a procédé à une réactualisation de la hiérarchie des rémunérations entre les différents Etats du champ au regard des conditions d'existence.

Votre rapporteur regrette de nouveau que la titularisation des contractuels de l'assistance technique autorisée par la loi 84-16 du 11 janvier 1984 (dite loi "Le Pors") n'ait reçu qu'une application très partielle.

Certes un millier d'enseignants ont bénéficié d'une titularisation grâce aux décrets d'application pris par le ministère de l'éducation nationale en 1985, mais les autres personnels, que leurs compétences destinaient à un emploi au sein d'un corps technique de l'Etat se sont heurtés à l'inertie des ministères concernés. Une réunion interministérielle a permis toutefois, sous l'autorité du Premier ministre, le réemploi, entre 1993 et 1996, d'environ quatre-vingts agents.

La solution retenue pour les autres personnels, soit quelque deux cents ayants droit parvenus après juillet 1993 au terme de leur mission en coopération et en instance d'affectation, ne peut être que provisoire. Le Ministère des affaires étrangères et le ministère de la coopération rémunèrent ces personnels dans l'attente de leur réinsertion dans une administration. Une solution possible reposerait sur l'ouverture au sein des différents ministères d'emplois budgétaires destinés à disparaître au moment du départ à la retraite des personnels concernés. Il convient en tout cas de mettre un terme à une situation qui n'est guère satisfaisante ni au regard des principes posés par le législateur ni au regard de la situation des intéressés .

Votre rapporteur ne saurait conclure toutefois sur le chapitre de l'assistance technique civile, sans évoquer les incertitudes que soulève la réforme du service national sur les postes de coopérants aujourd'hui pourvus par des appelés. Le remplacement des 804 coopérants du service national (CSN) actuels, par des professionnels, pourrait entraîner une dépense supplémentaire de 200 millions de francs pour le budget du ministère qui consacre aujourd'hui 77 millions de francs aux CSN. Toutefois, M. Jacques Godfrain parie sur l'attrait de la coopération pour les volontaires, et souhaite d'ailleurs ouvrir encore davantage les postes concernés à un éventail plus large de qualifications.

b) L'assistance militaire technique : moins d'hommes mais une aide en matériel plus soutenue

Les crédits liés à la coopération militaire (chapitre 41-42) connaissent une baisse limitée à 4,73 % (739 millions de francs contre 776 millions de francs en 1996). L'effort exigé du budget du ministère portera exclusivement sur l'assistance militaire technique tandis que la contraction de la dotation consacrée à l'aide en matériel se trouve enrayée et l'effort en faveur de la formation des stagiaires, maintenu.

. Les effectifs réduits de 10 %

Les effectifs d'assistants militaires techniques s'étaient stabilisés en 1995. Mais pouvaient-ils échapper longtemps à la lente érosion qui les atteint chaque année depuis 1990 (- 1,5 % en 1991, - 2 % en 1992, - 3 % en 1993,  - 9,7 % en 1994, - 11,6 % en 1995) ? La forte contraction prévue cette année le nombre d'assistants militaires passant de 714 à 640 soit une baisse de 10 %, s'inscrit dans une tendance de fond que commandent en effet deux ressorts durables : la contrainte budgétaire d'une part, la logique de l'assistance d'autre part, les coopérants militaires devant progressivement céder leur place à des cadres nationaux.

L'assistance en personnels permet, il convient de le rappeler, de mettre à la disposition des pays du champ des instructeurs ou conseillers français pour des séjours de courte durée (moins de 6 mois) ou pour des séjours longs (2 ans). La dernière hypothèse concerne 80 % des assistants militaires techniques. Cette présence répond à une forte demande des États d'Afrique francophone soucieux de favoriser l'adaptation de leur appareil militaire aux nouvelles missions liées aux avancées du processus démocratique. Compte tenu des circonstances politiques que l'on sait et d'un contexte diplomatique particulier, le Tchad a bénéficié, au cours des dernières années, d'une présence renforcée : 50 assistants militaires techniques effectuant des séjours d'une durée de 2 ans et 200 assistants militaires en mission de courte durée. Toutefois depuis l'été 1996 l'effectif de ces derniers a été ramené à 100 et devrait encore baisser dans les mois à venir.

Prenons garde que l'équilibre en-deçà duquel l'aide directe ne serait plus contrôlée ne soit pas rompu .

Sans doute, aujourd'hui, l'une des voies à développer afin de limiter les effets négatifs de la réduction du nombre d'assistants militaires serait de favoriser les synergies avec les forces françaises partout où elles sont implantées en Afrique.

Répartition des effectifs de coopérants militaires

(évolution des postes AMT 1995-1996 et prévisions 1997*)

1995

1996

Prévisoins 1997

ANGOLA

2

2

2

BENIN

23

24

22

BURKINA FASO

14

14

14

BURUNDI

24

24 (1)

0

CAMBODGE

17 (2)

17 (2)

15

CAMEROUN

56

54

50

CAP VERT

0

1

0

CENTRAFRIQUE

67

63

59

COMORES

36

34

28

CONGO

23

25

23

COTE D'IVOIRE

52

50

45

DJIBOUTI

49

47

41

GABON

60

60

51

GUINEE

27

29

27

GUINEE EQUATO

4

4

4

HAITI

1

0

0

MADAGASCAR

25

25

24

MALAWI

0

1

1

MALI

25

25

23

MAURITANIE

53

52

47

MOZAMBIQUE

2

4

2

NIGER

49

50

44

RWANDA

0

0

0

SENEGAL

30

32

31

TCHAD

60

60

55

TOGO

31

34

32

ZAIRE

2

0

0

ZIMBABWE

0

0

0

TOTAL

715

714

640

* postes budgétaires (1) Coopération militaire suspendue en juin 1996

(2) Pour mémoire, effectifs sur le budget des Affaires étrangères

. L'aide militaire réajustée

Les crédits affectés à l'aide en matériels retrouvent le niveau qui était le leur en 1995 (180 millions de francs) après la diminution de 10 % décidée par la loi de finances initiale pour 1996. En fait, il s'agit d'une mise à niveau aux besoins constatés au cours de cette année -soit près de 197 milliards de francs compte tenu des reports non affectés de l'année précédente liés le plus souvent à des mesures de dégel tardives et des allocations exceptionnelles accordées en cours d'année. Cette aide en matériel se concrétise partiellement sous la forme de mise en place ou de renforcement d'ateliers de réparation. Toutefois une partie de la dotation prévue en 1997 ne reçoit ainsi aucune affectation précise afin de faire face à ces situations d'urgence.

Aussi malgré les priorités affichées pour l'année à venir (écoles de formation, forces de sécurité intérieure, réorganisation des forces armées pour aider à leur stabilisation, entretien des matériels), l'aide en matériels permettra comme dans le passé de prendre en charge partiellement les dépenses ordinaires du fonctionnement des armées, et notamment le paiement des soldes.

Bilan financier de l'assistance en matériel (Aide directe)

PAYS

ADC 94

avec (1) transport

AD 95

avec (1) transport

AD 96

sans (1) transport

ANGOLA

0.01

0.11

0.11

BENIN

8.20

9.02

4.50

BURKINA-FASO

9.90

6.33

6.00

BURUNDI

7.90

12.31

4.50

CAMEROUN

7.20

5.16

8.03

CAP-VERT

0.50

0.50

0.94

CENTRAFRIQUE

15.60

13.00

9.00

COMORES

5.90

5.13

4.00

CONGO

7.90

5.78

5.00

COTE D'IVOIRE

15.90

15.70

13.00

DJIBOUTI

7.80

3.27

6.00

GABON

6.30

5.50

5.54

GAMBIE

0.40

0

0

GUINEE-BISSAO

1.30

1.27

0.90

GUINEE CKY

6.80

9.54

6.63

GUINEE EQUATO

1.30

1.60

0.90

MADAGASCAR

13.50

11.10

7.69

MALI

10.80

5.52

3.76

MAURITANIE

9.90

5.30

4.40

MOZAMBIQUE

0.60

0.00

0

NIGER

12.90

12.85

8.93

RWANDA

1.30

0.00

0

SENEGAL

24.20

15.92

14.50

TCHAD

49.80

37.53

18.75

TOGO

4.50

5.63

4.46

ZAIRE

0

0

0

Transport

30.00 (2)

Non affecté

30.00 (3)

TOTAUX

230.41

195.34

196,89

(1) Ces chiffres recouvrent la dotation LFI à laquelle s'ajoutent les reports non affectés de l'année précédente (liés le plus souvent à des mesures de dégel tardives) ainsi que des allocations exceptionnelles accordées en cours d'année et au collectif budgétaire de fin d'année.

(2) Ce montant correspond aux frais de transport à destinaiton des pays bénéficiaires des matériels achetés en France par la MMC. Le coût du transport estimé statistiquement à 20 % du coût d'achat de ces matériels, était intégré en 94 et 95 dans le calcul de l'aide par pays. Pour des facilités de gestion et un souci de transparence vis-à-vis des pays africains, le coût de transport a été différencié en 96.

(3) Ce montant permet à la MMC de faire face à des demandes inopinées en cours d'année liées aux situations de crise fréquentes en Afrique.

. La priorité maintenue en faveur de la formation des stagiaires militaires

Le projet de budget pour 1997 préserve la dotation destinée à la formation des stagiaires militaires, maintenue à 91,7 millions de francs. Cette formation prend place soit en France dans les écoles de formation ou les centres spécialisés, soit en Afrique dans les écoles interafricaines, et nationales à vocation régionale ou non.

Les écoles françaises ont accueilli en 1996 quelque 1300 cadres de haut niveau (officiers, spécialistes). Cet effectif, sans doute maintenu en 1997, apparaît en nette réduction par rapport au maximum atteint en 1987 (2200). Deux motifs conduisent en effet aujourd'hui à privilégier la formation dans les établissements africains. D'une part la formation dispensée en France n'apparaît pas toujours en phase avec les réalités africaines (contexte politique particulier, décalage technologique) malgré l'effort accompli ces dernières années pour mieux satisfaire les aspirations des cadres africains (cours supérieur international de gendarmerie à Melun, cours supérieur du commissariat de l'armée de terre à Montpellier, cours supérieur de l'école de l'air à Salon de Provence, Cours supérieur de l'école navale à Lanvéoc Poulmic).

D'autre part, la réduction du format des armées ne devrait pas rester sans incidence sur le système de formation des militaires et partant, le nombre de place ouvertes aux stagiaires étrangers. Cependant, peu de pays africains sont en mesure de proposer un système complet de formation. C'est pourquoi la mission militaire de coopération souhaite promouvoir la coopération régionale. Dans cette perspective, différents pays se trouveraient en charge d'un secteur de formation pour l'ensemble des stagiaires de la région. La France a ainsi apporté son concours à l'école à vocation régionale de formation des officiers et sous-officiers d'administration qui s'est ouverte à la rentrée scolaire 1996 à Koulikoro, au Mali.

Répondant à une même inspiration d'autres projets pourraient voir le jour en Mauritanie (Corso, technique automobile) et au Togo (Lomé, médecine).

B. UNE MARGE DE MANOEUVRE EXCESSIVEMENT ÉTROITE POUR FAVORISER L'AIDE-PROJET

L'aide publique a principalement vocation à financer des projets de développement. Cependant, l'accumulation des difficultés budgétaires rencontrées par nombre d'Etats africains a contraint la France, ainsi d'ailleurs que les autres bailleurs de fonds, à contribuer de façon toujours plus importante au rééquilibrage de budgets défaillants.

Cette orientation s'est trouvée encore renforcée dans le cadre du plan d'accompagnement de la dévaluation.

En bonne logique les concours financiers devaient se réduire progressivement. La tendance est aujourd'hui amorcée et il convient de s'en réjouir. Cependant cette évolution ne s'accompagne pas d'un renforcement concomitant de l'aide-projet. La contrainte budgétaire ne le permet pas. Du moins doit-on se satisfaire que la part dévolue aux dotations du Fonds d'action et de coopération au sein des crédits du ministère soit préservée.

1. Les concours financiers : l'amorce d'une décrue longtemps attendue (chapitre 41-43)

Il convient sans doute de rappeler que les concours financiers sont de trois ordres :

- l'aide budgétaire d'urgence destinée au financement d'opérations exceptionnelles ;

- les bonifications de prêts d'ajustement structurel accordés par la Caisse française de développement pour soutenir les programmes économiques et financiers mis en oeuvre par les pays à revenus intermédiaires (Côte-d'Ivoire, Cameroun, Gabon, Congo) avec l'approbation du FMI ;

- les dons en faveur de l'ajustement structurel accordés par la Caisse française de développement pour soutenir les plans de redressement mis en oeuvre par les pays les moins avancés avec l'approbation du FMI.

Les crédits destinés aux concours financiers s'élèvent à 810 millions de francs, soit une contraction de 21,6 %. Cette évolution recouvre en fait deux processus distincts : une clarifiation des ressources affectées à l'aide budgétaire d'une part, l'achèvement du programme d'accompagnement de la dévaluation du franc CFA d'autre part.

a) Une plus grande transparence de l'aide budgétaire

Les dons en faveur de l'ajustement structurel sont désormais complétés par un crédit de même montant inscrit précédemment au budget des charges communes de la direction du Trésor.

Le projet de budget pour 1997 procède au regroupement sur le seul budget du ministère de la coopération de l'ensemble des crédits finançant l'aide budgétaire. Cette mesure, après la décision prise l'an passé de regrouper sur le seul budget de la coopération, à l'article 40 du chapitre 68-91, les crédits destinés aux dons-projets (provenant auparavant pour les deux tiers du budget du ministère de la coopération et pour le solde du budget des charges communes), s'inscrit dans l'effort de clarification et de transparence entrepris par le gouvernement dans le domaine de l'aide publique.

Compte tenu d'ailleurs de cette modification de nomenclature, les crédits d'ajustement structurel se réduisent de près de 36 %.

b) L'achèvement du programme d'accompagnement de la dévaluation

La réduction de l'aide budgétaire traduit, dans une certaine mesure, le succès du processus d'assainissement économique enclanché par la dévaluation du franc CFA. L'Afrique a progressé dans les voies de l'équilibre. Aux extrémités opposées de l'éventail des niveaux de développement, deux pays en témoignent chacun à sa manière.

En Côte-d'Ivoire , le solde de base de la balande des paiements s'est amélioré au cours des dernières années (+ 128 milliards de francs CFA en 1994, + 232 milliards de francs CFA en 1995, soit 4,67 % du PIB). Au Burkina Faso les recettes fiscales ont augmenté en raison notamment de l'amélioration des résultats de nombreuses entreprises : elles ont dépassé ainsi 28 milliards de francs CFA, soit 4 milliards de plus que l'objectif fixé initialement.

N'y a-t-il pas cependant quelque optimisme dans cette confiance affichée dans la pérennité des équilibres financiers ? Votre rapporteur croit l'avoir déjà suffisamment montré, les avancées, incontestables, restent fragiles. Le retour au pouvoir de gestionnaires inexpérimentés, et plus encore, sans même que la capacité des hommes soit en cause, le retournement des marchés de matières premières dont dépendent encore très largement les économies, peuvent réduire à néant plusieurs années d'effort.

Les mauvaises surprises ne peuvent donc être a priori exclues. Ainsi en 1996, la dotation prévue pour l'aide budgétaire d'urgence -d'ailleurs reconduite au même niveau en 1997 (90 millions de francs)- n'a pas suffi à couvrir les dépenses constatées -près de 219 millions de francs- liées en fait à la recapitalisation d'Air Afrique. En contrepartie, il est vrai, les crédits destinés aux dons d'ajustement structurels n'ont pas été entièrement consommés et il convient en conséquence, de plus en plus, de considérer ce chapitre budgétaire comme une unité cohérente au-delà des trois articles qui le constituent.

2. L'aide-projet : une priorité pour notre coopération

a) Une aide-projet vulnérable

Le chapitre 68-91 comprend principalement la dotation du Fonds d'aide et de coopération (article 10) et les dons-projets relevant de la Caisse française de développement (article 40).

Les autorisations de programme liées aux projets mis en oeuvre sur décision du comité directeur du FAC sont amputées de 14,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1996. A structure constante, cette contraction doit être ramenée à 10,5 % dans la mesure où l'ensemble des interventions en matière d'audiovisuel extérieur -soit 52 millions de francs- a été transféré du titre VI au titre IV, plus adapté en effet, comme le souligne d'ailleurs le rapport de la Cour des Comptes, aux dépenses régulières, renouvelées chaque année et différentes de ce fait, de l'aide-projet.

Toutefois, si l'on considère l'enveloppe prévue pour 1997 au regard des moyens réellement disponibles en 1996, la perspective apparaît radicalement transformée. La baisse constatée se change en hausse (+ 9 %). En effet, compte tenu des annulations de crédit intervenues en cours d'année, la dotation du FAC s'est trouvée diminuée de 20 %.

Ces pratiques budgétaires, devenues hélas récurrentes au fil des années, peuvent paraître indolores sur le papier, elles n'en ont pas moins de conséquences tout à fait pratiques. Ainsi, dans le domaine de la santé, les annulations ont porté sur la lutte contre la mortalité maternelle (10 millions de francs), les appuis à la maintenance médicale (10 millions de francs), les appuis à l'information médicale (10 millions de francs) et cette liste n'est pas exhaustive .

Incontestablement, le FAC constitue l'une des principales variables d'ajustement dans la contribution du ministère de la coopération aux régulations budgétaires.

Cette situation n'est désormais plus admissible pour l'avenir, d'éventuelles annulations remettraient en effet totalement en cause l'équilibre fragile de ce budget .

Les priorités sectorielles du FAC pour 1996 n'ont pas été marquées de changements notables par rapport à l'année 1995. L'enseignement, la francophonie et le développement institutionnel constituent dans l'ordre décroissant les trois principaux domaines concernés par l'aide-projet.

La répartition par pays ne fait pas davantage apparaître de réorientation majeure, même si, contrecoup des événements politiques de l'année, le Burundi n'a bénéficié d'aucune aide au titre du FAC cette année, tandis que le Niger a enregistré une baisse significative de l'enveloppe qui lui était destinée.

Les dons-projets mis en oeuvre sur décision du comité directeur de la Caisse française de développement, subissent, quant à eux, une baisse de 15,4 %. D'après le ministère de la coopération, cette réduction traduit seulement une « économie de pure constatation » liée à la consommation ralentie des crédits de paiement des dons-projets.

Mais la baisse de cette enveloppe se confirme d'année en année : la mise en oeuvre des dons-projets de la CFD s'échelonnerait-elle dès lors sur des périodes toujours plus longues ? Il y a là pour votre rapporteur, quelques motifs de perplexité, pour ne pas dire d'inquiétude.

b) La coopération privée et décentralisée : une complémentarité à préserver

Compte tenu de la relative modicité de leur dotation (152,5 millions de francs), il était exclu que la coopération décentralisée ou l'action des ONG puissent faire jeu égal avec l'aide-projet au titre du FAC. Toutefois l'effort annoncé dans ce domaine pour le budget 1996 ouvrait d'intéressantes perspectives.

La dotation allouée à la coopération décentralisée progressait de 44 % entre 1995 et 1996 (de 8,4 à 12 millions de francs). Elle a toutefois été pour un tiers remise en cause par les annulations de crédits intervenues en cours d'année. L'enveloppe prévue pour 1997 se trouve d'ailleurs légèrement réduite (- 4 %).

Votre rapporteur pense toutefois que cette forme de coopération ouvre, sous certaines conditions, au premier rang desquelles un effort impératif de coordination, un champ très fructueux pour le développement du continent africain.

Quatre tendances remarquables se sont confirmées au cours des dernières années :

- l'émergence de véritables politiques de coopération internationale menées par des collectivités territoriales françaises (par exemple l'action du département de Loire-Atlantique en faveur du département de Kindia en Guinée ) ;

- le développement d'actions concertées entre collectivités françaises d'une même région (par exemple, la coopération des villes et du département de la Vienne avec des villes du Burkina-Faso ) ;

- l'engagement de relations entre le ministère de la coopération et les collectivités territoriales pour la mise en oeuvre de programmes bilatéraux (lutte contre la bilharzioze au Sénégal avec la région Nord-Pas-de-Calais) ;

- la reconnaissance de la coopération décentralisée française par les bailleurs de fonds multilatéraux, les collectivités territoriales accédant désormais aux cofinancements de l'Union européenne.

Au chapitre de la coordination, il convient de citer l'installation officielle de la Commission nationale de la coopération décentralisée en juillet 1996 composée paritairement d'élus locaux et de représentants de l'Etat.

Les crédits destinés aux organisations non gouvernementales progressent, conformément au souci manifesté par le gouvernement d'associer l'ensemble de la société civile à l'action en faveur du développement.

L'effort dont bénéficient les associations permettra le financement du dispositif d'appui aux volontaires, adopté dans le cadre du décret du 30 janvier 1995. Aux aides destinées à la protection sociale, sont venues s'ajouter des contributions aux autres dépenses prises en charge par les associations qui recourent à des volontaires : formation, gestion, versement d'indemnités de retour.

Le chapitre 42-24 n'épuise pas toutes les ressources affectées à l'aide aux ONG. Le FAC dans le cadre de conventions d'objecifs avec des associations reconnues pour la qualité de leurs interventions, permet le financement de projets pluriannuels. Deux ONG, Vétérinaires sans frontières et Eau Vive, figurent ainsi parmi les bénéficiaires d'engagements de dépenses sur FAC dont le montant s'élève à 75 millions de francs pour 1996.

CONCLUSION

La réduction du budget de la coopération ne signifie pas un déclin de l'attachement de la France à l'Afrique, comme certains bons esprits le prétendent parfois, mais s'inscrit malheureusement dans le contexte financier difficile que connaît actuellement notre pays. Faut-il le rappeler, la France figure désormais au 2e rang des donateurs. L'efficacité de l'aide n'est pas toujours fonction des moyens disponibles. La contrainte budgétaire impose plus de rigueur dans le choix des projets, mais une intervention intelligente requiert parfois plus de patience et de persévérance que de moyens financiers. Un investissement lourd et coûteux ne répond pas toujours.aux réalités du terrain et aux attentes de la population.

L'aide au développement n'est donc pas seulement une question de chiffre : elle appelle aussi à une réflexion sur les méthodes. On l'avait un peu oublié dans le passé.

Il n'en reste pas moins que le budget du Ministère de la Coopération a désormais peut-être aujourd'hui contribué plus qu'à son tour à l'effort légitime et nécessaire de maîtrise des dépenses publiques. Les crédits, comme les effectifs de l'assistance technique, paraissent aujourd'hui à l'étiage. La coopération française a réussi au cours des décennies qui ont suivi les indépendances un savoir faire, une compétence, qui demeurent sans doute sans exemple parmi les autres contributeurs. Ces acquis doivent être sauvegardés .

N'oublions pas d'autre part que les opérateurs privés français sur le continent africain jouent un rôle essentiel tant en faveur du développement que de nos intérêts économiques et commerciaux. Or, leur situation n'a pas toujours été considérée avec suffisamment d'attention par les pouvoirs publics, notamment au lendemain de la dévaluation. La facilité d'ajustement structurel mise en place à cette occasion n'a bénéficié que de façon limitée à nos entreprises. En outre, la dévaluation a dégradé les revenus des français expatriés rémunérés en franc CFA. Les cas les plus difficiles concernent toutefois la situation des retraités dont les pensions libellées en Franc CFA ont été divisées par deux. Un rapport de l'inspection générale des affaires sociales consacré à cette question a été récemment soumis au premier ministre. Votre rapporteur souhaite vivement connaître les conclusions de ce rapport, les recommandations faites et insiste pour qu'une solution satisfaisante et rapide puisse être apportée à ce dossier -nos compatriotes concernés n'ayant déjà que trop attendu.

L'influence de la France en Afrique demeure plus que jamais un atout majeur pour notre diplomatie et notre poids sur la scène internationale. Notre politique de coopération doit certes s'adapter. Elle a su prendre à cet égard au cours des dernières années le tournant nécessaire.

Il est impératif cependant que notre aide puisse aujourd'hui être maintenue au moins à son niveau actuel. La moindre régulation budgétaire risquerait de compromettre définitivement quatre décennies d'investissements et de fidélité au continent africain au moment même où notre engagement commence enfin à porter ses fruits comme le montrent les résultats encourageants de nombreux pays de la zone franc.

Sous le bénéfice de ces observations, votre rapporteur vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère de la Coopération.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées a examiné le présent rapport pour avis lors de sa réunion du 13 novembre 1996.

A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Michel Caldaguès a souligné que le rôle de la France en Afrique s'était trouvé injustement remis en cause à l'occasion des préparatifs de mise en oeuvre d'une force d'intervention dans la région des grands lacs. M. Xavier de Villepin, président, a ajouté, pour le regretter, que semblait s'être constitué au coeur de l'Afrique un foyer plutôt hostile à la France. Mme Paulette Brisepierre a partagé ces préoccupations, en indiquant que cette situation résultait, en partie, de l'amertume qu'avait suscitée, dans certains pays, l'opération Turquoise organisée par la France.

M. Jean Faure a insisté sur le contraste qui pouvait exister entre les efforts déployés par la France en faveur du développement, et les difficultés que pouvaient rencontrer certains de nos concitoyens installés dans les pays africains. Il a cité l'exemple récent d'un ressortissant français expulsé des Comores. Il a souhaité que nos compatriotes puissent toujours bénéficier, auprès des autorités françaises, du soutien nécessaire.

Mme Paulette Brisepierre a évoqué à ce sujet les difficultés que pouvait soulever, pour nos ambassades ou nos consulats, la présence d'un grand nombre de Français installés en Afrique. M. Xavier de Villepin, président , s'est félicité, pour sa part, de la rapidité d'intervention des services français dans les cas difficiles, en citant l'action exemplaire de notre consul général à Pondichéry et du Gouvernement français pour obtenir la libération de jeunes Français retenus en Inde.

M. Marcel Debarge, après avoir souligné la rigueur du cadre budgétaire imposé à la coopération, a regretté que le ministère de la coopération ne soit pas encore un ministère à part entière. Il a également souhaité que notre politique de coopération poursuive sa réforme en mettant fin à la coopération de substitution et en privilégiant la formation dans le cadre d'une intégration régionale. Il a souligné que le renouveau en Afrique viendrait sans doute de nouvelles générations de cadres, mieux formés et désireux de rompre avec certaines traditions politiques du continent. Il a jugé par ailleurs qu'un meilleur équilibre pouvait être recherché dans la répartition des ressources au sein de pays africains qui bénéficiaient d'importantes richesses naturelles. Il a souligné en outre l'émergence de nouvelles puissances au sein du continent, tels l'Afrique du Sud et les pays du Maghreb, avec lesquelles il faudrait désormais compter. Enfin, il a rappelé que la France avait cherché pendant sa période coloniale, quel que soit par ailleurs le jugement que l'on pouvait porter sur cette partie de notre histoire, à favoriser l'intégration des populations.

Mme Paulette Brisepierre a insisté sur le souci des jeunes Africains formés à l'étranger de revenir dans leur pays. Cette nouvelle tendance, ainsi que les bons résultats enregistrés par nombre de pays africains souffrant pourtant, comme le Burkina Faso et le Mali, de lourds handicaps naturels, justifiant, à ses yeux, que l'on conserve un sentiment optimiste sur l'avenir du continent.

M. Daniel Goulet a rappelé l'intérêt de la coopération décentralisée, en soulignant toutefois qu'elle méritait un effort de concertation. Il a souligné l'importance que revêtaient les transports pour le bon fonctionnement de cette aide.

M. Jacques Habert a évoqué avec le rapporteur pour avis les objectifs à venir de notre politique de coopération et les transferts de crédits attendus pour tenir compte de l'élargissement du champ de la coopération.

M. Xavier de Villepin, président, a rappelé l'inquiétude que lui inspirait la situation des retraités affectés par la dévaluation du franc CFA, en indiquant que les fonds prévus à cette fin n'avaient été que très partiellement utilisés. Il a également souligné que le continent africain se caractérisait par de forts contrastes, comme en témoignait la situation préoccupante de Madagascar ou, pour des raisons différentes, de la région des grands lacs.

La commission a alors émis un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère de la coopération inscrits dans le projet de loi de finances pour 1997, le groupe socialiste et le groupe communiste indiquant qu'ils ne pourraient approuver le budget proposé.

* 1 l'UEMOA se compose du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d'Ivoire, du Mali,du Niger, du Sénégal, du Togo.

* 2 La CEMAC se compose du Cameroun, du Congo, du Gabon, de la Guinée équatoriale, de la République centrafricaine et du Tchad.

* 3 Société dont le capital est détenu à hauteur de 15 % par les Etats burkinabé et ivoirien et de 67 % par une holding - Sitarail - composées de sociétés privées européennes, burkinabé et ivoiriennes.

* 4 Cités dans l'article, Afrique : la fausse querelle franco-américaine par J-A. Fralon et J-P. Tuquoi in Le Monde, 20-21 octobre 1996.

* 5 11 emplois de titulaires (1 secrétaire administratif, 4 adjoints administratifs, 6 agents administratifs) et 1 emploi contractuel.

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