PJL loi de finances pour 1999

BIZET (Jean)

AVIS 68 (98-99), Tome XVIII - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES

Table des matières




N° 68

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 novembre 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 1999 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XVII

ENVIRONNEMENT

Par M. Jean BIZET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Xavier Dugoin, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Bernard Murat, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1078 , 1111 à 1116 et T.A. 193 .

Sénat : 65 et 66 (annexe n° 5 ) (1998-1999).


Lois de finances.

INTRODUCTION

Le projet de loi de finances pour 1999 traduit deux orientations majeures en ce qui concerne la protection de l'environnement.

D'un strict point de vue budgétaire et à périmètre constant, les crédits augmentent de 15,6%, soit une progression plus de sept fois supérieure à la progression moyenne des dépenses de l'Etat. Elle prend en compte le développement continu des responsabilités incombant à ce ministère du fait de l'accroissement des normes européennes en ce domaine, des aspirations croissantes de nos concitoyens, et plus généralement de la prise de conscience de la nécessité d'un développement économique plus respectueux de cet environnement.

D'administration de mission, le ministère de l'environnement est peu à peu devenu une administration de gestion et il est certainement heureux que les crédits de fonctionnement soient définis en conséquence.

Faut-il pour autant considérer que la gestion de l'environnement constitue désormais une activité régalienne de l'Etat au même titre que la justice ou les affaires étrangères? On peut en douter. N'y-a-t-il pas derrière cette affirmation, un risque de dérive des dépenses publiques à travers notamment des créations de postes importantes pour constituer, à tous les niveaux administratifs un corps de fonctionnaires de l'environnement? Plus généralement, n'y-a-t-il pas à craindre une recentralisation progressive des procédures de gestion et de décision, alors même qu'il est admis par tous que pour être efficiente, la prise en compte de l'environnement doit être gérée au plus près des réalités de terrain, par les acteurs économiques eux-mêmes.

La seconde innovation majeure de la loi de finances pour 1999 en matière d'environnement, réside dans la mise en place de la taxe générale sur les activités polluantes, qui inaugure une nouvelle étape en matière de fiscalité écologique. Rompant avec le principe des taxes fiscales ou parafiscales affectées à la lutte contre telle ou telle forme de pollution, la TGAP entend faire une stricte application du principe " pollueur-payeur " pour orienter les comportements des acteurs économiques dans le sens d'une plus grande protection de l'environnement.

Cette orientation majeure mérite d'être analysée de manière approfondie, car elle constitue un pari risqué sur l'avenir. Elle ne doit pas en effet se traduire par une aggravation des prélèvements publics ni par une remise en cause des sommes affectées jusque là à la lutte contre la pollution, alors même que les besoins en ce domaine sont considérables et ne feront que s'accroître dans un futur proche.

PREMIÈRE PARTIE -

LES PRINCIPALES ORIENTATIONS BUDGÉTAIRES EN MATIÈRE D'ENVIRONNEMENT

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS

PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS PAR AGRÉGAT

(dépenses ordinaires - crédits de paiement - autorisations de programme)

(millions de francs)

 

DO + CP

AP

 

LF 98

PLF 99

%

LF 98

PLF 99

%

Administration générale

574,6

644,6

12,8

23,00

49,68

116

Connaissance de l'environnement et coopération internationale

82,7

110,6

33,74

18,40

27,48

49,35

Protection de l'eau et des milieux aquatiques

229,8

265

15,32

192,68

204,20

5,96

Prévention des pollutions et des risques

386,6

2 192,3

467,07

168,35

1 827,60

985,61

- hors conséquences de la TGAP

 

757,3

95,89

 
 
 

- hors conséquences de la TGAP et MEER (*)

 

424,3

9,75

192,6

204,2

6

Protection de la nature sites et paysages

536,3

654,5

22,04

327,43

364,53

11,33

Recherche

75,5

80,7

6,89

70,00

66,00

-5,71

TOTAL

1 885,5

3 947,7

109,37

799,87

2 539,50

297,49

Total hors conséquence de la TGAP

1 885,5

2 512,7

33,26

 
 
 

Total hors conséquence de la TGAP et MEER (*)

1 885,5

2 179,7

15,60

 
 
 

(*) MEER : Dotation pour la maîtrise de l'énergie et le développement.

Source : Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement

Dans le projet de loi de finances pour 1999, les crédits demandés au titre de l'environnement s'établissent à 3,95 milliards de francs (dépenses ordinaires et crédits de paiements), soit une progression d'environnement 110 % par rapport à 1998. Les autorisations de programme enregistrent une hausse de 217,49 % pour s'établir à 2,53 milliards de francs.

Cette très forte progression résulte de trois paramètres qu'il convient de rappeler ici :

- à périmètre constant , le budget de l'environnement augmente de 15,60 % , ce qui traduit la volonté du Gouvernement d'en faire un ministère de plein exercice ;

- une dotation nouvelle de 500 millions de francs, dont 333 millions versés par le ministère en charge de l'environnement, est affectée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) pour relancer la politique menée en matière de maîtrise de l'énergie et de développement des énergies renouvelables. En tenant compte de cette dotation le budget augmente de 33 % ;

- enfin, le ministère bénéficie à hauteur de 1,43 milliard de francs d'une dotation nouvelle, qui est la conséquence budgétaire de la mise en place de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) et de la suppression par voie de conséquence des taxes affectées directement à l'ADEME.

Compte tenu de ce troisième paramètre, les crédits consacrés à l'environnement dans le projet de loi de finances pour 1999 progressent de 110 %. Avec 3,94 milliards de francs, ils représentent désormais 0,3 % du budget civil de l'Etat au lieu de 0,14 % depuis 1991 .

Cette progression traduit la volonté du Premier ministre de faire de l'environnement une véritable priorité gouvernementale et de donner des moyens suffisants au ministère en charge de l'environnement. En effet, conçu à l'origine sur le modèle d'une administration de mission, force est de reconnaître que le champ d'actions et de compétences du ministère s'est considérablement développé depuis 25 ans.

Il s'agit désormais d'un ministère de gestion, qui négocie des directives de plus en plus nombreuses en matière d'environnement, prépare les lois et les règlements, veille à leur exécution, exerce des missions de police et de contrôle, met en oeuvre des politiques de prévention et de réparation des pollutions et dommages commis en ce domaine, mais en aucun cas l'environnement ne doit être considéré comme une activité régalienne relevant de la compétence exclusive de l'Etat.

Compte tenu de ces nouveaux moyens, trois grandes priorités se dessinent dans le projet de loi de finances pour 1999 :

- un accroissement important des effectifs du ministère et des moyens des services ainsi que le renforcement des effectifs des établissements publics sous tutelle ;

- le développement des moyens de communication et de soutien aux associations ainsi que le renforcement de la présence de la France dans les négociations communautaires et internationales ;

- le renforcement des politiques menées dans les domaines de la gestion des espaces naturels, des milieux aquatiques et de prévention des risques naturels.

II. LES PRIORITÉS FORTES EN MATIÈRE D'ENVIRONNEMENT

A. DES CRÉDITS FORTEMENT AUGMENTÉS POUR L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE, LA CONNAISSANCE DE L'ENVIRONNEMENT ET LA COOPÉRATION INTERNATIONALE

1. L'accroissement des moyens de l'administration générale

Globalement, les moyens budgétaires pour l'administration générale augmentent de 12 % en 1999 pour s'établir à 644,6 millions de francs.

Le renforcement des effectifs programmé pour 1999 se fait par création nette d'emplois.

Depuis cinq ans, les effectifs du ministère avaient peu progressé, soit par création d'emplois, soit le plus souvent par transfert. Ainsi, en 1997, le ministère de l'environnement avait bénéficié du transfert de 27 emplois du ministère de l'équipement provenant de la direction de l'architecture et de l'urbanisme. En 1998, le ministère a enregistré la création de 34 emplois, notamment pour renforcer l'inspection des installations classées industrielles et accélérer la procédure d'élaboration des plans risques, le programme d'annonce des crues et renforcer la police de l'eau.

Le projet de loi de finances pour 1999 s'inscrit en rupture par rapport aux années précédentes en décidant la création de 140 emplois .

L'accroissement des effectifs et les mesures d'équilibrage de certains corps représentent 29,8 millions en mesures nouvelles et les créations de postes se répartissent ainsi :

* Quatre-vingt neuf emplois dans les directions régionales de l'environnement, pour renforcer la police de l'eau, la gestion de l'eau, la mise en oeuvre des plans risques, l'assainissement, la protection et la gestion de la nature, des sites et des paysages, l'évaluation des infrastructures ;

* Vingt-deux emplois pour renforcer l'inspection des installations classées industrielles. On peut rappeler que les effectifs budgétaires des installations classées industrielles dépendant des directions régionales de l'industrie de la recherche et de l'environnement s'élevaient en 1998 à 753 postes, et que la Cour des Comptes en avait souligné l'insuffisance notoire. Pour y remédier, un plan pluriannuel de renforcement de ces services a été mis en place, et c'est à ce titre que sont prévus les 22 postes pour 1999, ce qui portera les effectifs dépendants du ministère de l'environnement à 775.

A ces postes, il convient d'ajouter les services vétérinaires, avec 195 agents qui se consacrent à l'inspection des installations classées agricoles et agro-alimentaires. Ces agents sont rémunérés sur les postes budgétaires du ministère de l'agriculture, mais seulement 21 emplois d'inspecteurs sont comptabilisés en tant que tels.

En définitive, 796 emplois seront affectés en 1999 à l'inspection des installations classées, ce qui reste sans doute encore faible au regard des 63.000 installations classées soumises à autorisation.

* Vingt-neuf emplois en administration centrale afin de renforcer les fonctions de gestion du ministère : budgétaire, fiscalité, communautaire, tutelle des établissements publics, affaires statutaires, gestion des ressources humaines.

En revanche, la création de deux emplois d'inspecteurs généraux des monuments historiques, des sites et des paysages a été gagée par la suppression de trois emplois de contractuels. Le bilan global des créations-suppressions s'établit donc à + 139 emplois.

Votre rapporteur pour avis admet que l'accroissement et la diversification des tâches incombant au ministère en charge de l'environnement suppose un renforcement de ses moyens, notamment en personnel. Il s'inquiète néanmoins du poids que représentent les dépenses d'administration générale -autant que les crédits consacrés à la protection de la nature et des paysages- et regrette que l'augmentation des postes ne se fasse pas par redéploiement ou transfert. Cette pratique aurait été plus conforme à la nécessaire maîtrise des dépenses publiques, permettant d'éviter d'accroître la masse des emplois publics, et les risques de surenchère entre services déconcentrés appartenant à des administrations distinctes et souvent concurrentes.

L'ÉVOLUTION DES EFFECTIFS BUDGÉTAIRES DU MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENT EST LA SUIVANTE DEPUIS 1994

 

1994

1995

1996

1997

1998

1999 (prévision)

 

Administration centrale

522

515

506

497

503

532

Effectifs totaux

DRIRE (*)

732

736

743

743

753

775

 

DIREN (**)

1 076

1 100

1 102

1 138

1 156

1 245

 

TOTAL

2 330

2 351

2 351

2 378

2 412

2 552

Créations d'emplois par rapport à l'année précédente

10

21

0

0

34

139

Transferts d'emplois par rapport à l'année précédente

0

0

0

27

0

0

(*) DRIRE : Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement

(**) DIREN : Direction régionale de l'environnement.


Les dotations en moyens de fonctionnement et en équipements immobiliers progressent de 11,2 % pour accompagner la création des 140 emplois prévue en 1999. A cela s'ajoute une progression des frais généraux liée à l'action internationale du ministère, une augmentation des dépenses informatiques pour la mise en place d'outils de gestion pour les DIREN et la diffusion d'information sur Internet, ainsi qu'une majoration de 60 % des crédits affectés à l'information.

2. La très forte progression des crédits consacrés à la connaissance de l'environnement et à la coopération internationale

La nécessaire maîtrise des dépenses budgétaires avait conduit à plafonner en 1996 et 1997 les crédits consacrés à la connaissance de l'environnement et à la coopération internationale.

Déjà en 1998, les ressources prévues en ce domaine avaient fortement progressé (+8,97 % en crédits de paiement et +37,31 % en autorisations de programmes) et pour l'essentiel ceci résultait de la très forte augmentation des subventions aux associations dont le montant total passait de 22,7 à 25,8 millions de francs.

Le projet de loi de finances pour 1999 poursuit -voire même accentue- cette politique puisque les crédits consacrés à la communication et à l'information augmentent de 33,8 % pour atteindre 110,6 millions de francs en moyens de paiement et 27,4 millions de francs en autorisations de programme. Les crédits d'intervention au service des affaires internationales seront notamment renforcés afin de mieux répondre aux engagements internationaux de la France.

Les moyens disponibles en faveur des associations progressent encore fortement, pour être fixés à 34 millions de francs, permettant ainsi de subventionner plus de 300 associations aux niveaux central et déconcentré sur un total de 1.500 associations agréées au titre de l'environnement. On peut rappeler qu'il s'agit, en principe, d'aider les associations d'environnement à vocation nationale à réaliser des actions de protection de l'environnement et d'aider les associations régionales, par des crédits délégués aux directions régionales de l'environnement, à participer aux actions du ministère de l'environnement sur les trois programmes suivants : vie associative régionale, journées de l'environnement et chantiers de jeunes.

S'agissant de la forte progression des crédits destinés aux associations, votre rapporteur pour avis déplore le manque de lisibilité du document budgétaire sur les critères d'éligibilité aux subventions et regrette d'avoir reçu tardivement la liste des associations ayant bénéficié de subventions en 1997 et 1998. Il suggère également que l'octroi de subventions prenne effectivement en compte la participation des associations à des opérations de sensibilisation ou d'information sur l'environnement afin d'écarter celles qui n'ont comme seule raison sociale que l'obstruction systématique et par tout moyen, y compris la désinformation, à l'encontre de chaque projet d'aménagement ou de développement local .

S'il faut se réjouir que le ministère de l'environnement soit parvenu aujourd'hui à un âge adulte, ce qui lui confère des missions de gestion importantes, il faut souhaiter que les associations de protection de l'environnement parviennent également à ce stade de maturité .

En outre, pour appuyer la définition de nouvelles filières et de nouveaux métiers dans le domaine de l'environnement -notamment à travers les emplois jeunes- les effectifs des établissements publics placés sous la tutelle du ministère de l'environnement vont sensiblement progresser.

Le projet de budget pour 1999 prévoit la création de :

- 225 postes créés dans les agences de l'eau pour susciter l'émergence de projets locaux dont l'objectif est la création de 8.000 emplois-jeunes dans le domaine de l'eau ;

- 100 postes créés à l'ADEME, dans le cadre de la relance de la politique de maîtrise de l'énergie et du développement des énergies renouvelables ;

- 28 emplois au Conseil supérieur de la pêche ;

- 23 emplois dans les Parcs nationaux ;

- 19 emplois à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) ;

- 9 emplois à l'Institut français de l'environnement (IFEN);

- 4 emplois pour le Conservatoire du littoral et des rivages lacustres ;

- 4 emplois pour la Museum national d'histoire naturelle.

Une fois encore, on ne peut que déplorer que ces emplois soient obtenus par création nette, ce qui accroît le niveau des emplois publics, notamment pour les agences de l'eau.

S'agissant des emplois jeunes, au 31 juillet 1998, 4.122 jeunes bénéficiaient de ce dispositif dans le secteur de l'environnement et fin 1998, ils pourraient être entre 8.000 et 10.000 à être embauchés sur ces postes.

Ces emplois concernent notamment quatre filières professionnelles : les conseillers ou animateurs environnement (32 % des emplois), les agents d'entretien des espaces naturels (23 %), les animateurs de développement local (16 %) et les agents de traitement des pollutions (8 %).

Deux programmes, qui concernent deux importants gisements d'emplois dans le secteur de l'environnement, sont en cours de lancement. D'une part, le 20 mai 1998, les agences de l'eau ont été autorisées à recruter, durant les années 1998 et 1999, 225 chargés d'affaires ou chargés de mission ayant pour fonction de susciter des " nouveaux emplois/nouveaux services " utilisant le dispositif emplois-jeunes. Le gisement estimé est de 8.000 emplois-jeunes. En outre, les agences fourniront un complément de financement aux porteurs de projets. D'autre part, la mise en place de la nouvelle fiscalité écologique permettra le recrutement d'emplois-jeunes dans les délégations régionales de l'ADEME, en vue d'assurer des prestations de détection, d'aide à l'émergence et de suivi de projets dans le domaine des déchets, de la maîtrise de l'énergie et de l'habitat durable. Il existe, en particulier, des besoins d'organisation dans la filière déchets, notamment des fonctions de conseil et de coordination auprès des collectivités locales et de sensibilisation auprès des populations.

A propos de ce dispositif, votre rapporteur pour avis s'interroge sur la pérennité effective de ces emplois au-delà de cinq ans et sur le risque d'une augmentation massive des emplois publics si le secteur privé ne prend pas le relais ! Dans l'immédiat, il attire également l'attention sur quelques effets de substitution constatés encore localement, qui faussent le jeu de la concurrence.

B. LE RENFORCEMENT DES MOYENS CONSACRÉS À LA PROTECTION DE L'EAU À TRAVERS LA MISE EN PLACE D'UN NOUVEAU FONDS DE CONCOURS À LA CHARGE DES AGENCES DE L'EAU

Les orientations du projet de loi de finances pour 1999 traduisent en matière financière, une partie des mesures énoncées dans la communication faite par Mme Dominique Voynet au conseil des ministres du 20 mai 1998 sur la réforme des instruments d'intervention publique dans le domaine de l'eau. Etaient ainsi annoncées l'extension du principe " pollueur-payeur " à la prévention des inondations ainsi que la participation financière des agences de l'eau au renforcement de la police des eaux.

1. La politique des fonds de concours au secours du budget de l'Etat

Par rapport à la loi de finances pour 1998, les crédits consacrés à la politique de l'eau augmentent de 14 % pour atteindre 265 millions de francs et les autorisations de programme s'élèvent à 204,2 millions de francs soit une hausse de 6 %.

Mais il faut rappeler que ces dotations sont complétées, depuis 1997 par un fonds de concours des agences de l'eau fixé à 110 millions de francs, pour abonder les dotations budgétaires en gestion. Prévu pour toute la durée du VIIe programme, c'est-à-dire jusqu'en 2001, il doit permettre de mobiliser 550 millions de francs sur cinq ans pour la participation au financement des travaux de restauration des rivières et d'aménagement des zones nouvelles d'expansion des crues.

Mais ce dispositif pourrait ne pas aller jusqu'à son terme si une nouvelle redevance pour modification de régime des eaux était mise en place. Elle serait perçue ou reversée -selon les modalités d'application de la TGAP- aux agences de l'eau qui, en contre partie, financeraient chacune pour leur bassin ce programme de restauration des rivières et des zones d'expansion des crues.

Pour 1998, la répartition des contributions et des dotations des agences de l'eau sur le fonds de concours est la suivante :


 

Répartition proposée pour 1998

Contribution du bassin

Dotation 1997

Adour Garonne

19 500 000

9 020 000

17 945 471

Artois Picardie

4 250 000

8 140 000

5 420 000

Loire Bretagne

32 000 000

15 290 000

28 276 444

Rhin Meuse

11 250 000

10 230 000

9 729 650

RMC

28 000 000

24 750 000

33 616 035

Seine Normandie

15 000 000

42 570 000

15 012 400

TOTAL PAR ACTION

110 000 000

110 000 000

110 000 000

Le projet de loi de finances pour 1999 instaure un second fonds de concours à la charge des agences de l'eau. Il s'agit pour elles de contribuer par des moyens supplémentaires au financement de la police de l'eau exercée par l'Etat, de la collecte et de l'exploitation des données sur l'eau effectuées par l'Etat, de la police de l'eau et des milieux aquatiques exercées par les gardes-pêches. Le montant de cette contribution est fixée à 140 millions de francs. L'avenir de ce fonds dépend des conditions de mise en oeuvre et d'extension de la taxe générale sur les activités polluantes(TGAP).

A l'évidence, l'instauration de ce fonds de concours constitue une atteinte supplémentaire au principe fondamental d'autonomie de gestion des organismes de bassin . Par ce procédé et en méconnaissance totale du principe de décentralisation, l'Etat récupère pour financer des activités régaliennes, comme la police de l'eau, une partie du produit des redevances par lesquelles les collectivités territoriales et les acteurs socio-économiques cotisent à la protection, à la remise en état et l'aménagement de leur propre bassin.

Comme en 1996, lors de l'instauration du premier fonds de concours pour le financement d'opérations d'entretien de cours d'eau et restauration de zones d'expansion des crues, votre Commission des affaires économiques ne peut que se déclarer très hostile à la mise en place d'un tel dispositif. D'autant plus qu'il ne fait malheureusement qu'anticiper sur les intentions du Gouvernement s'agissant de l'intégration future des redevances des agences dans l'assiette de la taxe générale sur les activités polluantes.

2. Les actions menées au titre de la politique de l'eau

La majeure partie des dotations budgétaires est consacrée à la mise en oeuvre des plans gouvernementaux décidés les 4 et 24 janvier 1994, à savoir le plan Loire et le plan décennal de restauration des rivières arrêtés dans le cadre du programme pluriannuel de prévention des risques naturels.

En 1997 et 1998, ce sont respectivement 200 millions de francs et 203 millions de francs qui auront été consacrés à la mise en oeuvre de ces programmes. Dans le projet de budget pour 1999, il est prévu d'y consacrer à nouveau 214 millions de francs de crédits budgétaires. Si on y ajoute 110 millions de francs en provenance du fonds de concours de agences de l'eau, ainsi que 22 millions de francs de crédits transférés des budgets de l'agriculture et de l'équipement, la mise en oeuvre du plan Loire et du programme pluriannuel de prévention des inondations bénéficiera en 1999 de 346 millions de francs.

A la fin 1998, le plan Loire grandeur nature arrive à mi-parcours. Plusieurs propositions sont actuellement soumises à concertation, afin de relancer le programme dans le cadre de la préparation des prochains contrats de plan, mais certains acteurs économiques locaux s'interrogent sur la volonté réelle du ministère en charge de l'environnement de vouloir réaliser des travaux d'aménagement pourtant indispensables pour régulariser le cours du fleuve.

La réalisation du plan Loire était évaluée en 1994 à 1,8 milliards de francs de travaux, que l'Etat s'était engagé à financer à hauteur de 700 millions de francs. Compte tenu de l'urgence des travaux de mise en sécurité, une part importante des investissements a été réalisée entre 1994 et 1997, permettant notamment la réalisation d'aménagements de la Loire à Brives Charensac. Sur la période 1994-1998, l'Etat aura ainsi engagé 597,3 millions de francs. En 1999, il est prévu de financer principalement des travaux de restauration et d'entretien du lit de la Loire (16 millions de francs) et d'accélérer, avec le concours des régions et départements concernés, le programme de renforcement des levées (20 millions de francs).

Le programme décennal de prévention des risques naturels décidé en janvier 1994, concerne l'ensemble des bassins, et une partie de ses actions est intégrée dans le plan Loire. Son coût global a été estimé à 11 milliards de francs, et il a pour objectif d'améliorer la gestion des zones inondables et de renforcer les systèmes d'annonces des crues. Mais la majeure partie des crédits est destinée à un programme décennal de restauration et d'entretien des cours d'eau (10,2 milliards de francs).

L'amélioration des systèmes d'annonce des crues a bénéficié de 192,8 millions de francs de crédits engagés par l'Etat entre 1994 et 1998, notamment par le financement de cinq nouveaux radars météorologiques plus particulièrement installés dans le Sud-Est de la France, ainsi que pour la modernisation des réseaux de surveillance des crues. Dans le projet de loi de finances pour 1999, 40 millions de francs dont 2 millions de francs de mesures nouvelles sont prévus.

Des mesures nouvelles sont également inscrites pour financer les études préalables à l'élaboration des schémas d'aménagement et de gestion des eaux dans les départements d'outre-mer, les études préalables à la restauration du caractère maritime du Mont-Saint-Michel, et enfin pour lancer le second plan de reconquête de l'étang de Berre.

S'agissant du programme décennal de restauration des cours d'eau, l'intervention du ministère de l'environnement porte sur les cours d'eau non navigables et pour l'essentiel sur l'entretien du lit de la Loire. En ce qui concerne les cours d'eau domaniaux -7.500 kilomètres de cours d'eau-, l'Etat n'est tenu qu'au maintien des capacités naturelles d'écoulement du lit. En ce qui concerne les cours d'eau non domaniaux, qui totalisent 270.000 kilomètres, leur entretien est la chargé intégrale des propriétaires riverains.

Mais compte tenu des difficultés que ces derniers éprouvent à remplir cette obligation, ont été mis en place depuis 1981, des contrats de rivière. Dans ce cadre juridique, se trouve réuni l'ensemble des acteurs concernés par la gestion d'un patrimoine commun, à travers les participations financières des collectivités territoriales, de l'agence de l'eau concernée, de l'Etat et des professionnels. En 1998, avec la signature de 64 contrats de rivière et de six contrats de baie, la participation de l'Etat s'élève à 248 millions de francs.

Les subventions apportées par le ministère sont des subventions d'investissements qui s'inscrivent pour la plupart d'entre elles dans les contrats de plan conclus entre l'Etat et les régions.

C. LES CRÉDITS CONSACRÉS À LA PRÉVENTION DES POLLUTIONS PROGRESSENT PRINCIPALEMENT DU FAIT DE L'INSTAURATION DE LA TAXE GÉNÉRALE SUR LES ACTIVITÉS POLLUANTES (TGAP)

La mise en place de la TGAP entraîne l'inscription de 2,19 milliards de francs de crédits soit une progression de 467 % et de 1,82 milliards de francs au titre des autorisations de programme.

Mais à périmètre constant, les crédits progressent de 9,75 % pour être fixés à 424,3 millions de francs et les autorisations de programme s'élèvent à 204,2 millions de francs.

Les crédits consacrés à la prévention des pollutions et des risques étaient principalement consacrés à la prévention des risques naturels et industriels ainsi qu'au financement des mesures d'application de la loi sur l'air. Compte tenu de la création de la TGAP, ces crédits vont financer également les moyens d'intervention de l'ADEME, puisqu'une subvention budgétaire remplace désormais le produit des taxes directement affectées jusqu'à présent à l'Agence.

1. La prévention des risques naturels

La loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement a prévu plusieurs dispositions portant sur les risques naturels.

Les mesures de sauvegarde des populations menacées par certains risques naturels majeurs

Un fonds de prévention des risques majeurs alimenté à partir de la surprime " catastrophes naturelles " des contrats d'assurance a été institué après le vote de la loi de 1995 et il représente environ 125 millions de francs par an.

Sur ce fonds, sont financées des opérations d'expropriations -trois opérations ont été menées depuis 1995- et une vingtaine de dossiers sont en cours d'instruction ainsi que des travaux de prévention de certains risques naturels majeurs en application de l'article 38 de la loi de finances rectificative pour 1997 du 29 décembre 1997.

Deux sites sont concernés par ces nouvelles dispositions.

Au 1er août 1998, 173,4 millions de francs avaient été versés par le fonds de prévention des risques majeurs depuis sa mise en place en 1995.

Les plans de prévention des risques naturels prévisibles institués par la loi du 2 février 1995 doivent simplifier l'ancien dispositif réglementaire.

Les PPR remplacent les plans d'exposition aux risques (PER), les périmètres de risques délimités en application de l'article R.111-3 du code de l'urbanisme, les plans de surfaces submersibles (PSS) et les plans de zones sensibles aux incendies de forêt (PZSIF). Leur réalisation est totalement déconcentrée sous l'autorité du préfet de département.

Les moyens financiers consacrés à la prise en compte des risques naturels ont été portés de 20 millions de francs en 1993, à 35 millions de francs en 1997, à 42 millions de francs en 1998 et à 67 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 1999 (dont 45 millions de francs de crédits déconcentrés et 22 millions de francs de crédits non déconcentrés). Ils devraient notamment permettre de réaliser 2.000 plans de prévention de risques avant l'an 2000.

Au 15 juillet 1998, 1831 PPR, anciens PER et périmètres de risques délimités en application de l'article R 111-3 du code de l'urbanisme, approuvés, étaient recensés, auxquels il convient ajouter environ 2.000 PSS qui valent également PPR. Près de 1.800 autres documents sont en cours d'élaboration

Documents

Approuvés

En cours

PER (2 )

396

182

R 111-3 (2 )

1 065

34

PZSIF (2 )

0

17

PPR ( 1 )

370

1 550

TOTAL

1 831

1 783

(1) PPR plan de prévention des risques

(2) Documents antérieurs ou en cours valant PPR :

PER : plan d'exposition aux risques

R 111-3 l: périmètre de risques (article R 111-3 du code de l'urbanisme)

PZSIF : plan de zone sensibles aux incendies de forêt


En un peu plus de deux ans et demi, depuis octobre 1995, (publication du décret relatif aux PPR), 1.310 PPR ont été prescrits et 370 documents approuvés. Il y a donc une relance significative de la réalisation des PPR, notamment de leur prescription, qui devrait se poursuivre en 1999.

2. La prévention des risques industriels

En matière de prévention des risques industriels et technologiques, 6 millions de francs sont inscrits en mesures nouvelles, qui serviront notamment au financement des études et expertises imposées par l'application de la directive européenne 96/82/CEE du 9 décembre 1996 dite SEVESO2 et qui abrogera la directive 82/501/CEE le 4 février 1999. La réglementation devra également être adaptée en ce qui concerne la sécurité de certaines installations potentiellement dangereuses, notamment les stockages de liquides inflammables, les gaz combustibles liquéfiés et les gaz toxiques sous pression.

Les points forts de la directive SEVESO 2 sont :

- la réalisation par l'exploitant d'un rapport de sécurité plus élaboré ;

- la prise en compte des effets " domino " ;

- le renforcement de l'information du public ;

- la nécessité d'une maîtrise de l'urbanisation ;

- la réalisation de plans d'urgence plus détaillée.

Une étude, réalisée par l'INERIS, à la demande du ministère de l'environnement, montre que le nombre d'établissements qui seraient visés en France par la prochaine directive " risques majeurs " est de l'ordre de 500. Une enquête a été diligentée auprès des préfectures pour recenser ces établissements.

De plus, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques, créé en 1990 bénéficie de moyens financiers accrus. En 1998, l'INERIS a restructuré son activité en pôles thématiques en privilégiant plus particulièrement les risques liés aux explosions de gaz et poussières, les effets de la pollution de l'atmosphère et des sols sur la santé et les risques liés aux séquelles de l'exploitation du sous-sol.

Dans le projet de loi de finances, les dotations à l'INERIS sont en augmentation pour être fixées à 119,36 millions de francs (dont 13,75 millions au titre du budget civil de la recherche et du développement -BCRD-) contre 97,1 millions en 1998. Les autorisations de programme progressent également très sensiblement pour s'établir à 33,9 millions de francs (dont 9 millions au titre du BCRD), contre 10 millions de francs en 1998.

S'agissant de la politique du ministère en matière de réhabilitation des sites et sols pollués, une circulaire, datée du 31 mars 1998 a demandé aux préfets d'indiquer les actions effectuées ou prévues à court terme sur les 896 sites recensés dans la mise à jour de l'inventaire des sites pollués effectuée en septembre 1997.

Depuis son instauration par la loi du 2 février 1995, le produit de la taxe sur l'élimination des déchets industriels spéciaux est affecté à la réhabilitation des sites pollués " orphelins ". En 1997 et 1998, les montants collectés au titre de cette taxe ont été respectivement de 90,7 et 93,2 millions de francs. Dans le projet de loi de finances pour 1999, en contrepartie de la suppression de cette taxe et de l'institution de la TGAP, est prévue une dotation de 107 millions de francs pour la prise en charge de ces sites.

3. La mise en oeuvre de la loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie

Bilan de l'extension de la surveillance de la qualité de l'air sur le territoire national

La loi prévoit la surveillance de toutes les agglomérations de plus de 100.000 habitants à partir du 1er janvier 1998 et la surveillance de l'ensemble du territoire à partir du 1er janvier 2000. De plus, la directive communautaire du 27 septembre 1996 concernant l'évaluation et la gestion de la qualité de l'air ambiant prévoit la surveillance à terme de 13 polluants ou familles de polluants.

Sur ces bases, un programme d'équipement des associations de surveillance de la qualité de l'air a été élaboré. Des crédits ont été délégués à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), coordonnateur technique de la surveillance de la qualité de l'air.

Du fait de la durée des études préalables à l'implantation des capteurs et du temps nécessaire à la constitution d'associations rassemblant l'Etat, les collectivités territoriales, les industriels et les associations de protection de l'environnement, certaines agglomérations de plus de 100.000 habitants n'étaient pas surveillées à la date du 1er janvier 1998, mais la plupart devraient l'être au 1er janvier 1999 (Angers, Annecy, Avignon, Le Mans, Lorient, Maubeuge, Nîmes, Perpignan et Troyes). Le retard risque d'être plus important pour Valence, Fort de France (Martinique), Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) et Saint-Denis de la Réunion.

Il faut en revanche déplorer le retard pris dans l'élaboration des plans de déplacements urbains, dont la loi impose la réalisation pour les agglomérations de plus de 100.000 habitants avant le 1er janvier 1999.

Il semble bien qu'en dépit de réflexions engagées par les autorités organisatrices de transport, aucune des 58 agglomérations concernées n'aura élaboré son plan à la fin de l'année 1998.

Mesures d'urgence en cas de pics de pollution

Dès le mois de janvier 1997, des premières mesures d'urgence étaient prises en application de l'article 12 de la loi du 30 décembre 1996 (itinéraire de contournement de Lyon pour les poids lourds notamment).

L'arrêté interpréfectoral instituant la circulation alternée en cas d'épisode de pollution atmosphérique en Ile-de-France a été signé le 11 avril 1997. D'autres arrêtés similaires ont ensuite été signés dans d'autres régions (Colmar, Strasbourg, Lyon, Mulhouse, ...).

Pour la première fois en France, la circulation alternée a été mise en oeuvre en Ile-de-France le 1er octobre 1997.

De plus, le décret n° 98-704 du 17 août 1998 relatif à la pastille verte a été publié au Journal Officiel du 18 août 1998 et 9 millions de pastilles ont été envoyées aux propriétaires des véhicules intéressés. Pour les nouvelles immatriculations, la distribution de la pastille verte se fera en préfecture.

Les encouragements réglementaires ou fiscaux sur les carburants de substitution et les véhicules propres.

- Le décret n° 98-701 d'application de l'article 24-III de la loi du 30 décembre 1996 imposant aux gestionnaires de flottes publiques l'achat d'un minimum de véhicules propres lors du renouvellement de leur parc a été publié au Journal Officiel du 18 août 1998.

En revanche, aucun décret n'est encore paru pour rendre applicable la disposition issue d'un amendement sénatorial et codifiée à l'article L.8-C du code de la route. Ce texte prévoit que d'ici le 1er janvier 1999, à l'intérieur des agglomérations de plus de 100.000 habitants, les véhicules de transport public en commun de voyageurs pourront utiliser un carburant dont le taux minimum d'oxygène a été relevé. Les véhicules concernés par cette mesure sont des bus fonctionnant aujourd'hui essentiellement avec une motorisation diesel. Or, si les essais conduits depuis plusieurs mois, voire plusieurs années dans certains cas, sur plusieurs flottes, ont confirmé que les émissions d'un véhicule consommant un gazole additionné d'au moins 30 % d'ester de colza, ou de tournesol, sont nettement réduites pour les particules, le monoxyde de carbone et les hydrocarbures et sensiblement équivalentes, en milieu urbain, pour les oxydes d'azote, les émissions d'aldéhydes doivent encore faire l'objet d'investigations.

- Le décret du 20 juillet 1998 modifie le décret du 9 mai 1995 en triplant l'aide accordée par l'Etat pour l'acquisition d'un véhicule électrique commandé à partir du 1er septembre 1998 et facturé au plus tard le 31 décembre 1999.

Cette aide est donc portée à 15.000 francs mais le nombre de véhicules aidés sur la période est plafonné à 3.000.

- Le projet de loi de finances pour 1999 comprend, par ailleurs, plusieurs mesures d'incitation pour les carburants de substitution et les véhicules propres d'incitation.

L'amortissement exceptionnel sur douze mois, réservé jusqu'à présent aux véhicules neufs fonctionnant exclusivement à l'électricité, au gaz naturel ou au gaz de pétrole liquéfié et aux accumulateurs nécessaires à ces véhicules électriques est étendu aux véhicules neufs fonctionnant en bicarburation et aux accumulateurs nécessaires aux véhicules hybrides . Cette extension concerne également les matériels installés a posteriori sur les véhicules pour leur permettre d'utiliser en bicarburation le gaz de pétrole liquéfié, ainsi que les stations de ravitaillement.

Fin 1998, les statistiques montrent les bonnes performances du GPL avec 1.100 stations-service, 130.000 véhicules et 150.000 tonnes de GPL vendus par an. Les prévisions sont de 500.000 véhicules en l'an 2000 et 2.000 stations équipées en l'an 2002.

Enfin, le Gouvernement amorce un rattrapage au niveau de la TIPP entre le gazole et l'essence.

Considérant que le différentiel de taxation entre le gazole et l'essence sans plomb est injustifié sur le plan économique, écologique et de la santé, il a été décidé d'augmenter chaque année la TIPP sur le gazole de sept centimes par litre pendant sept ans, afin de réduire cet écart et de l'aligner sur l'écart moyen communautaire. Cette hausse progressive est censée permettre aux consommateurs et aux constructeurs automobiles de s'adapter au rééquilibrage de la fiscalité des différents cargurants.

Par ailleurs, le Gouvernement a souhaité ne pas pénaliser le secteur des transports routiers vis-à-vis de ses concurrents européens, en accompagnant cette disposition de mesures en leur faveur.

Engagements budgétaires pour 1999 au titre de la loi sur l'air

Il est proposé d'affecter 395,35 millions de francs à la lutte contre la pollution de l'air et à la mise en oeuvre de la loi sur l'air qui se répartissent ainsi :

- 50 millions de francs d'aide au fonctionnement des associations de gestion des réseaux de surveillance de la qualité de l'air et de la banque de données sur la qualité de l'air (chapitre 44-10, articles 80 et 90) ;

- 11 millions de francs pour la mise en place des outils de planification prévus par la loi, à savoir les plans régionaux pour la qualité de l'air, les plans de protection de l'atmosphère et les plans de déplacements urbains (chapitre 34-10 - article 40) ;

- 109,6 millions de francs pour l'équipement des réseaux de surveillance de la qualité de l'air, par l'intermédiaire de l'ADEME (chapitre 67-30 - article 70 ;

- 60 millions de francs d'études et travaux divers dans le domaine de la pollution de l'air (chapitre 57-20 - article 50) ;

- 159 millions de francs pour la prévention et le traitement de la pollution (par l'intermédiaire de l'ADEME) (chapitre 67-30 - article 60).

4. Les nouvelles orientations de l'ADEME à travers la " rebudgétisation " de ses crédits

La création de la TGAP met fin au dispositif des ressources affectées dont bénéficiait jusqu'à présent l'ADEME. En effet, en 1999, la TGAP regroupera l'ensemble des taxes que l'agence percevait directement, à savoir la taxe sur les déchets ménagers et assimilés, la taxe sur les déchets industriels spéciaux, la taxe sur les nuisances aéroportuaires, la taxe sur la pollution de l'air et la taxe sur les huiles usagées. En contrepartie, l'ADEME recevra une subvention de 1,435 milliard pour compenser la suppression des taxes affectées.

COMPARAISON ENTRE LE PRODUIT DES TAXES FISCALES ET PARAFISCALES AFFECTÉES EN 1998 ET LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES PRÉVUS EN 1999 POUR L'ADEME

(en millions de francs)

 

Produit taxes 1998 *

Dotations budgétaires 1999

Energie

 

293

Déchets ménagers

974,60

811

Dépollution sols

97,62

107

Ramassage des huiles

118,99

118,50

Isolation acoustique près des aérodromes

66,51

84,50

Lutte contre la pollution atmosphérique et surveillance de la qualité de l'air

185

269,50

TOTAL

1 442,72

1 683,50

* Estimation au 1er novembre 1998 (prises en charge et produits financiers)

Source : ADEME

Le remplacement d'un mécanisme de taxes affectées par le principe de dotations budgétaires donne toute faculté au Gouvernement pour peser sur les politiques menées par l'ADEME.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 1999, le Gouvernement privilégie deux grands axes, à savoir la réorientation de la politique des déchets ménagers et la relance de la politique française de maîtrise de l'énergie.

a) Une réorientation de la politique des déchets

On peut rappeler que la loi du 13 juillet 1992 relative à l'élimination des déchets fixe un cadre général en transposant en droit français la directive communautaire n° 91-156 du 18 mars 1991 relative aux déchets.

Elle institue plusieurs mesures et mécanismes pour permettre notamment :

- la limitation à compter du 1er juillet 2002 du stockage aux seuls déchets ultimes, et la valorisation de 75 % des emballages ménagers ;

- la mise en place de plans d'élimination des déchets ;

- la création d'une taxe sur le stockage des déchets pour améliorer les conditions de gestion des déchets. Le taux de la taxe était de 40 francs en 1998.

Outre le retard pris dans l'élaboration des plans d'élimination des déchets, l'analyse de leur contenu indique, d'après une étude réalisée par l'ADEME en 1997, que le recours à l'incinération a été, semble-t-il, largement surestimé, qu'à l'inverse la mise en décharge était sous-estimée et qu'enfin les filières de recyclage et de compostage n'étaient pas assez privilégiées.

Au 31 juillet 1998, 81 plans avaient été adoptés par arrêté préfectoral, 10 étaient approuvés par la commission d'élaboration et 8 étaient en cours d'élaboration.

En conséquence, la circulaire du 28 avril 1998 modifie et précise les objectifs qui doivent apparaître dans les plans d'élimination des déchets. Cette circulaire pose un objectif national de valorisation matière d'au moins la moitié des déchets collectés au titre du service public d'élimination des déchets ménagers et assimilés. Elle décrit également les moyens permettant aux préfets de décliner cet objectif national.

Ainsi, à l'horizon 2005-2007, il faudra parvenir à une stagnation globale de la capacité d'incinération, par ailleurs modernisée, et à une diminution des tonnages mis en décharge au profit d'un accroissement de la récupération de matériaux et du traitement biologique.

Pour répondre aux nouveaux objectifs ainsi définis le traitement des déchets pourrait s'organiser ainsi :

- 30 % de déchets en collecte séparative, avec des filières de tri en vue d'une récupération des matériaux ;

- 20 % des déchets (fermentescibles) traités par compostage ;

- 50 % des déchets dirigés vers l'incinération ou la mise en décharge.

Les nouvelles orientations de la politique des déchets favorisant la réduction à la source et la valorisation ont fait l'objet d'une communication au conseil des ministres du 26 août 1998. La circulaire du 28 avril 1998 se trouve ainsi complété par un programme d'actions pour développer les actions de prévention, infléchir l'évolution de la production de déchets, développer la valorisation et intégrer l'environnement dans la politique fiscale, et enfin renforcer la transparence par un meilleur suivi et une meilleure information du public. Parmi toutes les mesures annoncées dans le cadre de ce plan d'action, on retiendra plus précisément :

Une réorganisation de la collecte sélective est envisagée, notamment par une modification des barèmes d'Eco-emballages et Adelphe, afin que le " barème amont " versé par les conditionneurs incitent plus à la réduction des emballages et que le montant de l'aide versée aux collectivités locales tienne compte du coût de la collecte sélective, pour encourager cette filière.

Le projet de loi de finances pour 1999 propose d'appliquer le taux minoré de TVA aux opérations de collecte sélective, de tri et de valorisation matière.

Le Gouvernement entend également rééquilibrer progressivement les échelles des coûts de différentes filières de traitement des déchets. Ainsi, dans le projet de loi de finances, le taux des taxes sur l'incinération et la mise en décharge des déchets ménagers et industriels est augmenté de 50 % dans le cadre de la TGAP. De plus le Gouvernement souhaite engager une réflexion sur l'utilisation du FCTVA (Fonds de compensation de la TVA) qui privilégie les investissements des collectivités locales en matière de collecte séparative, tri et valorisation matière.

Enfin, pour favoriser une meilleure mobilisation du Fonds de modernisation de la gestion des déchets (FMGD), le conseil d'administration de l'ADEME a adopté le 7 janvier 1998 de nouveaux taux d'aides qui favorisent notamment la valorisation, avec effet rétroactif au 1er janvier 1997. Désormais, les investissements de collecte séparative, de tri, de transfert ainsi que les déchetteries peuvent être aidés à hauteur de 50 % de leur montant ; de même, le taux d'aide aux unités de compostage et de méthanisation des déchets organiques passent de 20 à 50 % si les déchets sont triés à la source.

Votre rapporteur pour avis prend acte de ces nouvelles orientations, dont il approuve les grandes lignes. Il souhaite néanmoins attirer l'attention des pouvoirs publics sur la nécessité de ne pas modifier trop souvent les objectifs fixés en ce qui concerne le traitement des déchets. Certes les orientations doivent pouvoir évoluer, mais il ne faut pas oublier que les investissements réalisés pour répondre à ces objectifs sont très lourds financièrement ; il est important de préserver une certaine stabilité des normes réglementaires et de ne pas remettre en cause sans cesse les objectifs, au risque sinon, d'aggraver la situation des finances locales .

Enfin, s'agissant de l'accent mis sur la filière du compostage, il faut souligner que seul le compost provenant de déchets végétaux peut être réutilisé, notamment par la profession agricole. En revanche, peu de débouchés s'offrent aux autres types de compost, et la question se pose de leur devenir.

b) La relance d'une politique de maîtrise de l'énergie et de développement des énergies renouvelables.

Conformément aux engagements du Premier ministre, annoncés en janvier 1998, une dotation de 500 millions de francs sera attribuée à l'ADEME en 1999, à hauteur de 333 millions de francs en provenance du budget de l'environnement et de 167 millions de francs en provenance du budget de l'industrie.

Au titre de la maîtrise de l'énergie, la priorité ira au renforcement de la réglementation thermique dans l'habitat et le secteur tertiaire. L'accent sera mis aussi sur la maîtrise de la demande d'électricité, tant en ce qui concerne la diffusion de lampes de basse consommation pour l'éclairage que l'amélioration des équipements électroménagers.

Le développement des énergies renouvelables est le second axe de cette stratégie. L'ADEME va d'abord renforcer son soutien à la filière bois-énergie. Deux nouveaux programmes ont été initiés en 1998 : le premier est destiné à la valorisation énergétique des déchets de la filière bois et des résidus de l'exploitation forestière, qu'un taux de TVA réduit devrait conforter au même titre que le tri sélectif des déchets ménagers ; le second vise à encourager les gestionnaires de décharges d'ordures ménagères et de stations d'épuration à se doter d'installations de combustion propres à valoriser sous forme de chaleur ou d'électricité le gaz naturel (méthane) issu de la fermentation de ces matières, sans compromettre pour autant l'utilisation des boues des stations d'épuration à des fins agricoles, là où leur composition le permet.

La dotation de l'ADEME devrait également permettre d'accélérer le programme Eole 2005, conduit par EDF en liaison avec l'Agence, et porter le potentiel du parc à 500 mégawatts à l'horizon 2005. Une nouvelle tranche de 100 mégawatts a été lancée, dont 25 seront réservés à la Corse et aux départements d'outre-mer, régions non reliées au réseau alimenté par l'énergie nucléaire et où les coûts de production d'électricité sont très élevés.

D. LA FORTE PROGRESSION DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA PROTECTION DE LA NATURE

Pour la mise en oeuvre des mesures en faveur de la protection de la nature des sites et des paysages, le ministère a toujours été son propre opérateur, ce qui explique le poids important des crédits qui y sont consacrés. Au-delà, la progression importante des crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 1999 traduit une volonté politique forte qui veut dépasser la stricte préservation d'espaces naturels exceptionnels pour favoriser l'intégration des préoccupations d'environnement dans toutes les actions concernant les espaces, qu'ils soient naturels, agricoles ou en partie urbanisés. Il s'agit de privilégier une approche de développement durable appliquée à travers des outils diversifiés mais principalement contractuels.

Dans le projet de loi de finances pour 1999, les crédits augmentent de 19 % au titre des dépenses ordinaires et des crédits de paiement, pour être fixés à 654 millions de francs contre 546,7 en 1998 et de 11,3 % pour les autorisations de programme (364,5 millions de francs en 1999 contre 327,4 millions de francs en 1998).

Les choix budgétaires privilégient trois axes majeurs, qui sont la création du Fonds de gestion des milieux naturels, le renforcement du réseau d'espaces naturels protégés et l'attribution de moyens supplémentaires à l'Ecole nationale supérieure du paysage.

1. La création du Fonds de gestion des milieux naturels (FGMN)

Pour une meilleure lisibilité dans l'affectation des crédits budgétaires, il est institué un Fonds de gestion des milieux naturels (FGMN) dont l'existence sera confirmée au niveau législatif par le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire qui devrait être examiné par le Parlement au cours du premier trimestre 1999. L'article 23 du projet de loi propose de compléter la loi du 4 février 1995 par un article 38-1 qui institue le FGMN et dont les fonctions sont ainsi définies :

" le fonds contribue au financement des projets d'intérêt collectif concourant à la protection, à la réhabilitation ou à la gestion des milieux et habitats naturels " .

" Il prend en compte les objectifs fixés par le schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux ".

Ce schéma de service devrait fixer pour les vingt années à venir les orientations fondamentales de la gestion des espaces naturels et ruraux en vue de leur " valorisation économique, environnementale et sociale ".

Les crédits affectés en 1999 au FGMN s'élèvent à 164 millions de francs, dont 90 de mesures nouvelles, le solde provenant d'un redéploiement de crédits existants. L'essentiel des mesures nouvelles sera affecté à la mise en oeuvre du réseau Natura 2000.

La mise en oeuvre du réseau Natura 2000 doit déboucher en 1999, au-delà de la désignation des sites à la Commission européenne, sur la définition de moyens spécifiques et d'un cadre juridique adapté à la gestion des sites Natura 2000.

- Soixante six millions de francs seront consacrés à la définition de ces moyens, qui feront l'objet de documents d'objectifs. A travers la signature de cahiers des charges, il est prévu par voie de contractualisation d'indemniser les propriétaires et les gestionnaires des espaces notamment forestiers situés dans un site Natura 2000.

Le Gouvernement entend également donner un cadre législatif à ce dispositif contractuel et un projet de loi est en cours d'élaboration et soumis à concertation. Par certains aspects, il rejoint les préoccupation du Sénat qui a adopté en juin dernier les conclusions de M. Jean-François Le Grand au nom de la Commission des Affaires économiques sur la proposition de loi 1( * ) relative à la mise en oeuvre du réseau écologique européen, dénommé Natura 2000. Par ce texte, qui reprend nombre de propositions du groupe de travail constitué au sein de la Commission des Affaires économiques en 1997, il est créé un conseil départemental du patrimoine naturel, qui institutionnalise le comité départemental de constitution et de suivi du réseau Natura 2000 en précisant sa composition notamment en ce qui concerne la représentation des collectivités territoriales.

C'est au sein de ces conseils départementaux dont l'existence et la composition ne devraient pas dépendre du seul bon vouloir de l'administration, que doit se dérouler la concertation sur les sites à proposer et le contenu des documents d'objectifs.

S'agissant de l'indemnisation des propriétaires et gestionnaires des sites Natura 2000, la proposition de loi prévoit que la mise en oeuvre des mesures de gestion définies dans les documents d'objectifs se fasse par voie contractuelle associant l'Etat, les collectivités territoriales et les différents propriétaires et gestionnaires concernés. Cette procédure doit permettre de rémunérer des services rendus à la collectivité ou de compenser des contraintes acceptées ou des pertes de revenu résultant de l'inscription d'un site dans le réseau Natura 2000 et permettant ainsi pour la première fois de prendre en compte et d'indemniser des servitudes environnementales décidées par la collectivité. Cependant, la limitation du pouvoir du Parlement s'agissant de l'accroissement des dépenses publiques a fait que cette disposition a été déclarée irrecevable en application de l'article 40 de la Constitution.

La Commission des Affaires économiques examinera avec d'autant plus d'attention , dans le projet de loi annoncé par le Gouvernement, les dispositions relatives à ces mesures de compensation. Votre rapporteur regrette seulement de n'avoir pas plus de renseignements sur la répartition des crédits affectés à la gestion des sites Natura 2000.

- S'agissant des propositions de sites, une première liste a été transmise fin 1997, qui comprend 543 sites couvrant 901.000 hectares, soit 1,6 % du territoire national. Au mois de juin 1998, 151 nouvelles propositions ont été reçues et le total des sites proposés représente désormais 1.571.000 hectares, soit 2,8 % du territoire.

Au niveau européen, le retard pris par nombre d'Etats membres dans la fourniture de propositions complètes ou l'insuffisance des informations scientifiques bloquent la tenue de nouvelles réunions pour les régions " alpine ", " méditerranéenne ", " atlantique " et " continentale ". Ces réunions dites biogéographiques ont pour objet d'arrêter la liste des habitats naturels et des espèces d'intérêt communautaire présents dans chacun des Etats membres et d'évaluer si ces habitats naturels et si ces espèces sont suffisamment bien représentées dans les propositions des Etats membres.

La participation de l'Etat à la politique des parcs naturels régionaux, des conservatoires régionaux d'espaces naturels et des réserves de la biosphère bénéficie de 6 millions de francs de mesures nouvelles.

S'agissant plus particulièrement des parcs naturels régionaux, les dotations de fonctionnement augmentent de 18 %, ce qui devrait permettre la remise à niveau des dotations pour les 36 parcs existants et permettre en 1999 la création de cinq parcs supplémentaires : Narbonnais, Causses du Quercy, Guyane, Châtaigneraie et sucs d'Ardèche, Gâtinais français.

Le renforcement du programme de conservation des espèces animales sauvages et le réseau des conservatoires botaniques nationaux se traduit par 8 millions de francs de mesures nouvelles, pour notamment :

- accompagner le retour du loup dans les Alpes françaises et de poursuivre le renforcement de la population d'ours des Pyrénées (dépenses ordinaires : 2.000.000 francs, autorisations de programmes : 1.350.000 francs, crédits de paiements : 675.000 francs) ;

- développer le réseau des conservatoires botaniques nationaux avec la mise en place de leur fédération nationale, facteur de synergie et de rayonnement du réseau des conservatoires qui devrait s'étendre aux Pyrénées en 1999, des études préalables étant engagées pour la Guadeloupe (dépenses ordinaires : 1.340.000 francs) ;

- développer des plans d'action pour des espèces menacées telles que le gypaète barbu, le vison d'Europe, la loutre ou le grand hamster (dépenses ordinaires : 1.500.000 francs, autorisations de programmes : 1.330.000 francs, crédits de paiement : 665.000 francs) ;

- développer des actions de conservation pour les mammifères marins, les reptiles et amphibiens ainsi que les insectes (autorisations de programmes : 640.000 francs, crédits de paiement : 320.000 francs) ;

- augmenter la subvention versée par le ministère chargé de l'environnement au Muséum national d'histoire naturelle (Institut d'écologie et de gestion de la biodiversité) pour développer sa capacité d'expertise sur la diversité biologique (12.000.000 francs) ;

En matière de faune sauvage, cette politique de réintroduction ou d'encouragement de certaines espèces crée à de multiples endroits des problèmes de cohabitation avec des activités humaines telles que le pastoralisme, la pêche et même le tourisme.

Les mesures préventives que privilégie le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement s'avèrent très vite bien insuffisantes. Le cas du grand cormoran en est une bonne illustration. Si désormais -et après des années de démarches infructueuses auprès de la Commission européenne- cet oiseau ne fait plus partie des espèces menacées nécessitant des mesures de protection particulière de leur habitat (annexe I de la directive 79/409/CEE Oiseaux sauvages) et que le prélèvement national autorisé a été porté à 12 % des effectifs avec une priorité reconnue sur les zones d'activité économique menacées, ces mesures restent encore très insuffisantes pour préserver l'activité économique des piscicultures en eau libre.

Votre rapporteur pour avis souhaite qu'une réflexion s'engage sur les solutions efficaces à mettre en oeuvre pour que les politiques de réintroduction d'espèces en voie de disparition ne mettent pas en péril l'équilibre financier des activités économiques locales.

2. Des moyens nouveaux pour le réseau d'espaces naturels protégés.

Il s'agit des espaces gérés par les établissements publics placés sous la tutelle du ministère ou dépendant directement de l'aide de l'Etat pour la mise en oeuvre de leurs actions.

Des moyens supplémentaires sont attribués pour les parcs nationaux, le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres et pour les réserves naturelles.

Le réseau des parcs nationaux bénéficie de moyens en augmentation -173,4 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement contre 164 millions de francs en 1998- pour assurer la mise en place du parc national de la forêt guyanaise et le fonctionnement des missions d'études pour le projet du parc national marin de Corse et le projet de création du parc national marin de la mer d'Iroise. Vingt-trois emplois sont créés dans les parcs, dont 8 nouveaux pour la Guyane et trois pour le Conservatoire botanique du parc national des Pyrénées.

Le Conservatoire de l'espace littoral bénéficie d'une mesure nouvelle de 5,9 millions de francs et les crédits qui lui sont affectés -dépenses ordinaires et crédits de paiement- sont portés à 147,35 millions de francs. Ceci permettra la création de quatre emplois supplémentaires, ce qui devrait aider le Conservatoire à faire face à l'augmentation très nette de ses activités et à la diversification de ses compétences. Par ailleurs, l'augmentation des crédits devrait permettre au Conservatoire d'élargir son programme d'acquisition, sachant qu'à l'heure actuelle de très grands domaines sont en vente et qu'ils sont situés dans des secteurs d'intérêt primordial, notamment dans le Var ou les Bouches-du-Rhône. On peut rappeler que depuis sa création, le Conservatoire a acquis un peu plus de 53.000 hectares d'espaces naturels fragiles ou menacés répartis sur 396 sites différents et qu'il assure ainsi la protection de plus de 10 % du linéaire côtier métropolitain.

Enfin, le réseau des réserves naturelles bénéficie d'un crédit supplémentaire de 7,5 millions de francs, ce qui porte la dotation du ministère à 44,24 millions de francs, pour assurer la gestion des réserves existantes et permettre le classement éventuel de onze nouvelles réserves.

En 1998, il existe 141 réserves pour une superficie totale de 443.795 hectares.

3. Des moyens supplémentaires pour l'Ecole naturelle supérieure des paysages

L'ambition du Gouvernement est de traiter l'ensemble des paysages sans se limiter aux sites exceptionnels. Elle est de plus en plus soutenue par les responsables des collectivités locales. Il s'agit de mettre en application effective l'esprit de la loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages et modifiant certaines dispositions législatives en matière d'enquêtes publiques. Par ailleurs, la qualité des paysages devient une exigence de la part des Français, qui relient cette aspiration à celle d'un cadre de vie de meilleure qualité. Compte tenu de cette évolution, les communes, les départements et les régions consacrent des moyens accrus à leurs paysages dont la qualité constitue maintenant l'un des atouts utilisés par la recherche du développement économique.

Les actions relevant directement des compétences de l'Etat sont de favoriser les connaissances sur les paysages, par l'établissement de documents méthodologiques à l'intention des services déconcentrés, des élus et des professionnels, le développement de l'Observatoire photographique du paysage, et de soutenir les actions de formation -initiale et permanente- des professionnels du paysage.

A partir de 1999, le ministère en charge de l'environnement exercera la co-tutelle -avec le ministère de l'agriculture- de l'Ecole nationale supérieure des paysages. Trois millions de francs en mesures nouvelles sont affectés à cet établissement.

E. LE RENFORCEMENT DES MOYENS CONSACRÉS À LA RECHERCHE

Depuis le sommet de Rio en 1992, les conventions internationales mettent en avant le principe de précaution comme fondement des politiques de l'environnement. Cette démarche exige un effort de recherche important visant à une meilleure prise en compte de la veille scientifique dans la politique du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

La politique de recherche s'effectue au travers des programmes de recherche finalisée, répartis en trois domaines d'intervention -milieux et écologie, risques et santé, économie et société- et en huit priorités : prévenir la pollution atmosphérique, gérer les ressources en eau et en sols, préserver et gérer la biodiversité et le patrimoine naturel, évaluer les effets de substances sur les écosystèmes et maîtriser les risques, protéger la santé humaine, maîtriser l'environnement urbain, développer la métrologie et l'instrumentation, mobiliser les sciences économiques et sociales.

Cette activité de recherche fait l'objet de contrats passés avec des organismes de recherche publics et avec le secteur privé.

Ainsi, deux programmes de recherche ont été lancés en 1998, intitulés " Environnement et santé " et " PRIMEQUAL, orienté vers la recherche et les impacts de la qualité de l'air.

Par ailleurs, une veille scientifique sur les principales évolutions dans le champ de la recherche en environnement a été mise en place, dont les résultats sont diffusés chaque mois sur le site Internet du ministère.

Enfin, la Commission des comptes et de l'Economie de l'Environnement, créée par le décret du 21 juillet 1998, a pour mission d'assurer l'analyse des données économiques décrivant les activités concourant à la protection et à la mise en valeur de l'environnement, les impacts des différents secteurs économiques sur l'environnement et les ressources et patrimoine naturels. La commission devrait publier un premier rapport début 1999.

Dans le projet de loi de finances pour 1999, le budget de la recherche est en augmentation de 6,9 % par rapport à 1998 pour s'établir à 80,7 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement et 66 millions de francs en autorisation de programme. Il s'agit de financer l'ensemble des moyens relevant du budget civil de la recherche et du développement, consacrés aux activités scientifiques et à la recherche concernant les trois domaines d'intervention énoncés ci-dessus.

La hausse des crédits de paiement permettra une consolidation de cette action, articulée autour des huit priorités citées précédemment.

Une dotation complémentaire est attribuée à l'INERIS en dépenses ordinaires correspondant à la création de deux emplois de chercheurs.

DEUXIÈME PARTIE -

LES INCERTITUDES LIÉES À L'INSTAURATION DE LA TAXE GÉNÉRALE SUR LES ACTIVITÉS POLLUANTES

I. LE DISPOSITIF DE LA TAXE GÉNÉRALE SUR LES ACTIVITÉS POLLUANTES (TGAP)

Le projet de loi de finances pour 1999 traduit la volonté du Gouvernement de s'engager dans la voie d'une fiscalité plus écologique. Ceci s'inscrit dans les objectifs du développement durable, qui cherche à concilier les aspirations économiques et sociale et la préservation de l'environnement. Cette démarche s'appuie également sur les conclusions du Sommet de Kyoto sur la préservation du climat, qui ont montré que le développement économique devait intégrer les perturbations qu'il cause à la planète et recommandent que les politiques environnementales aient plus systématiquement recours à des instruments économiques.

A. LES FONDEMENTS THÉORIQUES DE LA TAXE GÉNÉRALE SUR LES ACTIVITÉS POLLUANTES

1. Les principes environnementaux qui justifient un recours aux instruments économiques

L'article 1-I de la loi n° 95-10 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement énonce plusieurs principes dont :

- l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs " ;

- le principe " pollueur-payeur ", selon lequel les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur.

Ces principes justifient une intervention économique, notamment par le biais de la fiscalité.

Le principe pollueur-payeur a une double fonction :

- la couverture comptable des coûts, à savoir les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci ;

- un signal-prix envoyé au pollueur, c'est-à-dire que l'intégralité des frais doivent être supportés par le pollueur.

Il justifie ainsi l'intégration des effets externes, notamment par le biais de taxes sur les pollutions.

L'efficacité du signal-prix doit se mesurer à différentes échelles de temps : efficience statique et efficience dynamique. Par exemple, si les déplacements motorisés urbains assumaient la totalité de leurs coûts, le signal-prix pourrait avoir un effet immédiat (éventuellement limité à court terme) en réduisant la circulation routière ; il pourrait aussi, après adaptation, susciter des modifications de comportements dans certaines niches, comme celle des déplacements courts qui pourraient devenir attractifs par d'autres modes (marche, vélo...), voire à plus long terme des modifications dans la répartition spatiale des activités.

Le développement durable suppose la tarification progressive de l'usage de ressources non renouvelables

Conformément à l'objectif de développement durable, il faut éviter des ruptures et des crises coûteuses aux générations futures. Ceci justifie une tarification progressive de l'usage de ressources naturelles non renouvelables pour infléchir progressivement les comportements en ce sens.

D'un point de vue économique, il s'agit ici d'anticiper sur la règle dite de Hotelling qui prévoit, sous des hypothèses économiques standard, l'augmentation (au taux d'actualisation) du prix d'une ressource rare au fur et à mesure de sa diminution. En effet, cette règle n'est pas toujours prise spontanément en compte par les marchés en raison de leurs imperfections.

2. Le mécanisme de la taxe générale sur les activités générales polluantes

Le projet de TGAP constitue un élément parmi d'autres de la fiscalité écologique qui comprend, selon la définition donnée par l'OCDE, les impôts, taxes, et redevances dont l'assiette est constituée par un polluant, ou plus généralement par un produit ou un service qui détériore l'environnement ou qui se traduit par un prélèvement sur des ressources naturelles renouvelables ou non renouvelables.

Elle se différencie néanmoins très nettement des taxes environnementales existantes, comme les redevances sur l'eau ou les taxes sur les déchets. Celles-ci sont prélevées et affectées pour financer des travaux préventifs ou de réparation ; elles seront donc calculée proportionnellement au montant de ces travaux.

A l'inverse, le calcul de la TGAP est totalement déconnecté du coût de la prévention ou des réparations des atteintes à l'environnement, et il s'agit d'une taxe incitative.

Son objectif principal est de lancer un signal-prix fort (comme les taxes sur le tabac par exemple) et pour cela son niveau peut être plusieurs fois supérieur à celui d'une taxe affectée. Son utilisation n'est pas affectée à un usage précis puisque c'est un impôt qui participe au financement public général. L'idée de neutralité budgétaire avancée pour justifier de la création de cette taxe, sous entend qu'elle sera en théorie compensée par une baisse équivalente des autres prélèvements.

Cette réforme fiscale d'envergure fait application de la théorie du double-dividende, pour promouvoir simultanément une croissance plus riche en emplois et plus soutenable sur le plan environnemental par une modification des prix relatifs du travail et des ressources environnementales à travers une réforme fiscale fondée sur deux volets :

* la mise en place d'une fiscalité environnementale pour intégrer les effets externes environnementaux ;

* l'allégement du volet fiscal pesant sur le travail grâce aux recettes engendrées par les écotaxes pour promouvoir une croissance plus riche en emplois.

Les partisans de la TGAP soulignent que la thèse du double dividende ne constitue pas seulement une approche théorique, puisque dans les années récentes, un certain nombre de pays de l'OCDE ont utilisé les revenus engendrés par les écotaxes pour réduire le volet fiscal sur le travail. C'est notamment le cas au Danemark, aux Pays-Bas, en Suède et au Royaume-Uni.

Ainsi, en France, la TGAP doit constituer le cadre naturel d'accueil de la future écotaxe européenne (taxe " carbone-énergie "). Cette taxe aura pour fonction, d'une part, de dissuader les comportements émetteurs de carbone et de renforcer la maîtrise de l'énergie, -c'est le premier dividende- et, d'autre part, de procurer des ressources affectées au budget général qui, à prélèvements globaux constants, permettront d'abaisser les prélèvements pesant sur le travail, et c'est le deuxième dividende.

Ce deuxième dividende ne pourra exister que si la déconnexion entre le montant de la ressource procurée par la taxe et les financements nécessaires pour réparer les dommages occasionnés à l'environnement est effective. C'est pourquoi, le produit de la TGAP est affecté au budget de l'Etat. Mais, naturellement, les organismes jusqu'alors financés par la fiscalité affectée devront continuer à travailler, à se développer et à mettre en oeuvre de nouvelles politiques. Aussi, ces organismes bénéficieront de dotations, versées essentiellement par le ministère chargé de l'environnement, et à hauteur du montant nécessaire au financement de ces politiques. Le montant de ces dotations devrait bénéficier d'une garantie pluri-annuelle.

B. LE MÉCANISME DE LA TGAP DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1999

1. La TGAP se substitue aux taxes affectées perçues par l'ADEME

La TGAP est une taxe générale, comportant différentes accises sur des activités polluantes. En tant que taxe générale, elle a une vocation, à terme, à s'appliquer à l'ensemble des activités polluantes.

La TGAP, telle qu'elle est prévue par l'article 30 du projet de loi de finances, regroupe l'ensemble des taxes perçues jusqu'alors directement par l'ADEME, qui sont au nombre de cinq :

- la taxe sur les déchets ménagers et assimilés créée par la loi du 13 juillet 1992 et acquittée par les exploitants de décharges ;

- la taxe sur les déchets industriels spéciaux créée par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement et acquittée par les exploitants des installations de traitement ou de stockage de déchets industriels spéciaux ;

- la taxe d'atténuation des nuisances sonores aéroportuaires créée par la loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit et acquittée par les compagnies aériennes utilisant les aérodromes concernés ;

- la taxe sur la pollution atmosphérique créée en 1985 et acquittée par les exploitants d'installations émettant certains rejets dans l'atmosphère ;

- la taxe sur les huiles de base créée en 1986 et acquittée par les personnes mettant sur le marché des huiles neuves ou régénérées.

2. Le produit de la TGAP est supérieur à celui des cinq taxes existantes

Le produit de la taxe est évalué à 1,936 milliard de francs et il est supérieur à celui des cinq taxes auxquelles elle se substitue en raison de majorations décidées sur certaines de ses composantes.

- Le taux appliqué aux lubrifiants et aux huiles usagés passe de 150 à 200 francs par tonne.

- Conformément à l'article 103 de la loi de finances pour 1998, qui prévoyait le doublement sur deux ans du tarif de la taxe d'atténuation des nuisances sonores, le taux de la taxe passe de 51 francs à 68 francs.

- Enfin, la très forte augmentation du taux appliqué aux déchets ménagers mis en décharge explique, pour une large part, la progression du produit de la TGAP. Ce taux est majoré de 50 %, tant pour les déchets ménagers et assimilés que pour les déchets industriels spéciaux ; pour les uns, le tarif de la taxe passe de 40 francs à 60 francs par tonne de déchets stockés ; pour les autres, il est porté de 80 à 120 francs par tonne.

Quant au montant minimal annuel de la taxe qui avait été abaissé de 5.000 francs à 2.000 francs par loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, il est désormais fixé à 3.000 francs.

A travers ces majorations, la TGAP dégagera une ressource supplémentaire de 613,1 millions de francs, soit une augmentation de 46,3%.

En se substituant aux cinq taxes affectées aujourd'hui à l'ADEME, la TGAP introduit une rupture profonde dans le mode de financement de l'ADEME qui est totalement rebudgétisé. La globalisation des ressources de l'agence introduit des éléments de souplesse dans la gestion en mettant fin aux cloisonnement entre les différentes sources de financement et en supprimant ainsi des reports de crédits trop importants d'une année sur l'autre, faute de consommation. Mais il ne donne aucune assurance quant à la pérennité de ses crédits d'investissements.

II. LES INCERTITUDES GRAVES QUI PÈSENT SUR L'IMPACT DE LA TGAP ET SUR SON CONTENU FUTUR

A. L'IMPACT DE LA TGAP EST MAL MAÎTRISÉ

1. Le risque réel d'un accroissement des prélèvements publics

Dès la première année de mise en oeuvre de la TGAP, celle-ci se traduit par un alourdissement de la fiscalité à travers l'augmentation de la taxe sur les déchets et sur les huiles usagées.

Aucune statistique disponible ne permet d'affirmer que l'application du taux réduit de TVA sur la collecte sélective, le tri et la valorisation-matière compense intégralement cette augmentation de la taxe déchets.

Plus généralement, on rappellera que la mise en oeuvre du double dividende implique au nom du premier dividende, une fiscalité écologique lourde pour avoir un effet réellement dissuasif .

Cet alourdissement de la fiscalité n'a aucun effet redistributif et en se traduisant par une hausse des prix à la production , il va entraîner une hausse des prix à la consommation et donc une baisse du pouvoir d'achat.

De plus, si les salariés s'efforcent de maintenir leur pouvoir d'achat, en obtenant des augmentations de salaire, la mise en place de la taxe environnementale entraînera un accroissement du coût du travail, qui pourrait peser sur l'emploi. Ceci viendra en tout état de cause annuler les effets espérés du second dividende, à savoir la baisse des charges sociales sur le travail.

2. Les conséquences négatives pour la protection de l'environnement

La déconnexion imposée par l'instauration de la TGAP entre le produit de la taxe et le montant des travaux de prévention ou de réparation nécessités pour la protection de l'environnement suscite de légitimes inquiétudes.

En échange de la " désaffectation " des taxes écologiques, le Gouvernement s'engage à promouvoir une programmation pluriannuelle des travaux, mais les précédents en ce domaine font émettre les plus grands doutes sur la pérennité des engagements de l'Etat même contractuels.

- Ainsi, entre 1982 et 1986, l'Etat a augmenté la taxe intérieure sur les produits pétroliers de douze centimes pour rembourser des emprunts qui avaient alimenté le fonds spécial de grands travaux. Il s'agissait alors de relancer la politique d'équipement de l'Etat. Ces douze centimes, une fois les emprunts remboursés, n'avaient plus d'objet. Mais la taxe n'a pas diminué et les budgets du ministère de l'équipement n'ont pas bénéficié d'une ressource supplémentaire. Les douze centimes ont été maintenus et sont allés alimenter le budget général, c'est-à-dire à 90 % des dépenses de fonctionnement.

- L'expérience des contrats de plan Etat-région incite tout autant à la méfiance. Ces contrats, et notamment leur volet routier, avaient en théorie une durée de vie de cinq ans. Unilatéralement, l'Etat a décidé, en 1996, que les contrats 1994-1998, seraient prolongés d'un an, devenant les contrats 1994-1999. Or, à la lecture du projet de loi de finances, on constate qu'à la fin 1999, l'Etat n'aura rempli que 80 % des engagements financiers qu'il avait pris six ans plus tôt.

Si le montant des dotations budgétaires inscrit sur des programmes de réparation ou de prévention en matière d'environnement diminue, le coût des investissements à réaliser en sera alourdi d'autant et sera répercuté à terme sur le prix du produit final, ce qui pèsera d'autant sur le pouvoir d'achat des consommateurs.

Bien plus, on peut craindre que des investissements de lutte contre la pollution ne soient plus réalisés, ce qui est de toute évidence préjudiciable à la qualité de l'environnement.

Enfin, l'instauration de la TGAP met fin à un système qui avait le grand mérite d'associer directement les acteurs économiques, dont les industriels, aux choix effectués en matière d'aide aux investissements réalisés par les pollueurs en vue de réduire leurs émissions.

L'instauration de la TGAP modifie ainsi profondément, voire supprime les compétences du fonds de modernisation de la gestion des déchets et du fonds de gestion des déchets industriels.

Votre rapporteur est très hostile à la remise en cause de cette approche partenariale de la protection de l'environnement qui réunissait collectivités locales, associations de protection de l'environnement, industriels et administration.

3. Des effets mal mesurés sur la compétitivité des entreprises

La TGAP a pour fonction première d'adresser un signal-prix fort à l'intention des agents économiques, qu'ils soient d'ailleurs producteurs ou simples consommateurs. Si on s'intéresse aux effets de l'écotaxe mixte assise sur le carbone et sur l'énergie qu'il est envisagé d'instituer au niveau communautaire, il faut souligner tout d'abord que ce dispositif n'a plus beaucoup de liens avec la lutte contre l'effet de serre puisque l'énergie nucléaire sera taxée alors même qu'elle ne rejette pas de CO 2 . Force est de constater que l'écotaxe sera instituée pour prélever de façon soi-disant " indolore " des masses financières considérables.

Par ailleurs, si cette écotaxe augmente le prix des combustibles, ceci aura pour effet d'augmenter le prix des produits qui consomment beaucoup d'énergie et incitera les entreprises qui les produisent à se délocaliser vers des pays moins développés et surtout " moins regardants " en ce qui concerne la protection de l'environnement.

Mais il est avéré que ces pays consomment beaucoup plus d'énergie que les pays développés par unité produite. Les délocalisations induites par l'instauration de la taxe pourraient entraîner ainsi une augmentation du chômage au sein de l'Union européenne, une augmentation de l'énergie consommée dans les pays moins développés et donc globalement -à l'échelle de la planète- plus de carbone rejeté et une aggravation de l'effet de serre.

La question de la compétitivité des entreprises est centrale s'agissant de la mise en oeuvre de l'écotaxe, et force est de constater que les pays qui ont expérimenté ce type de taxe prennent leurs précautions. Ainsi, la Suède a exempté l'industrie de 75 % de la taxe sur le carbone (et une exemption totale de la taxe sur l'énergie). Au Danemark, un rabais de 50 % de la taxe sur le CO 2 a été accordé à l'industrie sur la période 1993-1995.

B. LES EFFETS NÉGATIFS DE L'INTÉGRATION DES REDEVANCES DES AGENCES DE L'EAU DANS L'ASSIETTE DE LA TGAP

1. Rappel chronologique

Dans un communiqué de presse en date du 22 juillet 1998 sur le projet de loi de finances pour 1999, Mme Dominique Voynet et M. Dominique Strauss-Kahn annonçaient la création de la TGAP. Ce communiqué, de façon lapidaire, annonçait que la TGAP avait " vocation à intégrer les redevances relatives à la pollution de l'eau en l'an 2000 ", en ajoutant cependant " après concertation avec les acteurs concernés ".

Cette affirmation brutale, même si le mot " concertation " était prononcé, s'inscrit en totale contradiction avec la communication du ministre en charge de l'environnement sur la politique de l'eau faite au Conseil des ministres du 20 mai dernier et sur la base de laquelle des premières réunions de concertation sérieuses et approfondies avaient commencé avec pour thème :

- mieux associer le Parlement à la redéfinition de la politique de l'eau ;

- améliorer la transparence du secteur de l'eau et de l'assainissement et renforcer le caractère démocratique du système des agences de l'eau ;

- élargir et mieux appliquer le principe général " pollueur-payeur " ;

- accroître l'efficacité de l'action publique dans le domaine de l'eau.

Ces grandes orientations avaient fait l'objet d'un accueil plutôt favorable et les groupes de travail avaient intégré les associations d'élus qui s'étaient déclarés prêts à accompagner la réforme des instruments d'intervention publique relatifs à l'eau, à réfléchir sur les redevances et sur leur évolution en termes de péréquation, tout en rappelant leur attachement au principe d'autonomie et de décentralisation des décisions.

Bien plus, cette annonce bouleverse et remet en cause les fondements mêmes de l'organisation de la politique de l'eau.

2. La politique de l'eau à travers le dispositif des agences de bassin

La loi de 1964, confirmée par celle de 1992, a mis en place, à partir de 1968, un système venant compléter l'action réglementaire de l'Etat dans le domaine de l'eau par une planification active et des financements complémentaires fondés sur le bassin hydrographique.

On peut en résumer comme suit les principes :

- une gestion décentralisée des ressources en eau en quantité et qualité établie à travers six bassins hydrographiques ;

- une programmation pluriannuelle des investissements nécessaires à partir d'une planification tripartite revue tous les cinq ans par des Comités de bassin et des agences de bassin, réunissant des responsables de l'Etat, des élus des départements et des régions ainsi que les usagers ;

- des ressources financières autonomes collectées et gérées par les organismes de bassin pesant sur les prélèvements d'eau, la pollution déversée et la modification du régime des eaux, destinés à aider au financement des ouvrages d'intérêt commun au bassin.

L'autonomie des organismes de bassin a été organisée par les pouvoirs publics, qui ont fixé le cadre, découpé la France en six bassins, arrêté le mode de désignation ou d'élection des membres des Comités de bassin et des Conseils d'administration des agences et défini les assiettes de redevances. L'Etat nomme enfin le président et le directeur des agences de l'eau et doit donner son approbation aux programmes pluriannuels de cinq ans pour qu'ils soient opérationnels, ainsi qu'aux redevances dont les taux sont votés par le Comité de bassin pour chaque programme. Les taux qui définissent les recettes des organismes de bassin sont fixés par le Comité sur proposition de l'agence, de façon à équilibrer les financements en subventions et prêts qu'ils apportent au programme de cinq ans.

Ce dispositif se trouve en quelque sorte consacré au niveau communautaire, puisque le projet de directive-cadre sur l'eau se fonde sur trois principes essentiels qui sont : la référence au bassin hydrographique, la participation des usagers et du public, et la mise en oeuvre du principe " pollueur-payeur ".

Sans être exempt de critiques et donc susceptible d'évolution et d'aménagements, le dispositif des agences de l'eau a néanmoins fonctionné avec succès, en permettant une forte réduction des pollutions industrielles déversées, l'organisation et le financement d'opérations concertées, et la préparation des schémas directeurs d'aménagement et de gestion de l'eau prescrits par la loi de 1992. Il faut certes convenir de résultats plus mitigés, s'agissant de l'épuration des rejets domestiques ou de l'amélioration trop lente des milieux naturels en raison notamment de l'insuffisante -ou de la tardive- prise en compte des pollutions d'origine agricole et de la non prise en compte de la pollution fluviale. Mais les chiffres sont là pour témoigner de l'ampleur des investissements réalisés au cours des derniers programmes des agences de bassin : 40 milliards de francs d'investissement au cours du Ve programme, 80 milliards de francs prévus et finalement 90 milliards de francs réalisés au cours du VIe programme et 105 milliards de francs d'investissement programmé pour le VIIe programme.

Il faut souligner également l'effet de levier considérable lié aux interventions des agences de l'eau : dans le cas de l'industrie, ces aides ont représenté globalement 25 % du montant total des investissements , qui sont souvent allés très au-delà des exigences réglementaires en vigueur. Il est donc faux d'affirmer que les entreprises récupéraient d'une main ce qu'elles donnaient de l'autre : elles ont investi pour dépolluer sans être subventionnées à 100 %.

3. Une remise en cause inacceptable du dispositif des agences de l'eau par l'instauration de la TGAP

L'impossibilité d'établir une taxe forfaitaire sur une assiette simplifiée.

Comme le rappellent les acteurs économiques concernés, la perception des redevances est nécessairement assise sur un système complexe.

En effet, les assujettis aux redevances de pollution ne paient -en fait- qu'une " redevance nette " qui est la différence entre une redevance brute (liée à chaque activité polluante ou à une mesure réelle de la pollution) diminuée d'une " prime d'épuration " représentative de l'effort réalisé par l'assujetti pour dépolluer.

La détermination de cette redevance nette (redevance pollution moins prime) nécessite des calculs particulièrement difficiles qui varient avec la situation de chaque redevable et il a fallu des années, au début de la mise en place des agences entre 1967 et 1970, pour mettre au point les méthodes actuellement utilisées, qui ont été formalisées par un arrêté de 1975.

Parmi les problèmes les plus complexes, il y a celui des entreprises exerçant des activités multiples, des modalités d'appréciation des performances des dispositifs d'épuration, ainsi que celui des dispositions particulières à l'épandage ou d'une façon plus spécifique à la destination finale des boues.

Si l'on ajoute à l'ensemble de ces paramètres -complexes mais relativement maîtrisables- la possibilité de recourir à des mesures directes, nécessitant des analyses de laboratoire, il est quasiment impossible d'harmoniser un tel système avec celui d'une taxe " générale ".

En optant pour une taxe forfaitaire générale, on va à l'encontre du principe " pollueur/payeur " puisque -finalement- les entreprises paieraient tout autant qu'elles aient ou non réalisé des efforts importants pour dépolluer. On les décourage de plus, d'accepter des surcoûts importants s'ajoutant à celui de la taxe.

L'impossibilité d'accepter un taux dissuasif unique sur le prix de l'eau.

Si la TGAP doit générer un double dividende, -c'est-à-dire, tout en dissuadant les pratiques polluantes, procurer des ressources permettant de réduire les prélèvements pesant sur l'emploi-, une part très importante de la TGAP sera affectée à cette compensation. En conséquence, soit la part restante consacrée à la lutte contre la pollution sera fortement diminuée, soit le taux de la TGAP sera très élevé pour rester dissuasif et viendra grever lourdement le prix de l'eau.

La très forte augmentation des taxes vis-à-vis de la redevance et la non-redistribution des produits aux pollueurs, va avoir un double effet :

- accroître les coûts des produits industriels ou agricoles par leur impact direct et par le remplacement d'aides versées sous forme de subvention par des emprunts plus coûteux. L'effet sera identique sur le prix de l'eau ;

- peser donc sur les citoyens par le prix des produits achetés ou par le prix de l'eau. A court terme, cette TGAP pourrait devenir une " TVA bis ", et les maires auraient à répondre de cette aggravation du prix de l'eau, alors qu'ils n'en seront pas responsables.

Ces effets pourront-ils être totalement effacés, directement, par l'affectation des produits des taxes à la réduction des impôts ou indirectement par le bénéfice résultant par exemple de la création de nouveaux emplois ?

On peut enfin craindre que le nouveau système ait un coût de gestion important s'agissant de la perception des taxes et de leur redistribution partielle dans des circuits de lutte contre la pollution.

L'incertitude sur la validité des aides dans le système de la TGAP

A l'heure actuelle, les aides qui sont attribuées par les agences sur des opérations de dépollution, d'amélioration du milieu naturel ou de mobilisation de ressources supplémentaires ne sont pas contrôlées par la Commission européenne, car le dispositif qui les attribue est mutualiste. Le régime actuel est donc dérogatoire, mais lorsque ces aides -déconnectées du montant des taxes versées par les acteurs économiques- transiteront par le budget de l'Etat, elles seront, selon toute vraisemblance, soumises aux règles de plafonnement européen.

Ainsi, s'agissant du domaine de l'eau, caractérisé par son extrême complexité, il apparaît que l'instauration de la taxe générale serait une erreur grave, car elle fait peser trop d'incertitudes sur l'avenir d'un dispositif qui a fait ses preuve jusqu'à présent.

Au nom du " principe de précaution " qu'on se doit d'appliquer pour la protection de l'environnement, votre rapporteur pour avis refuse l'instauration de la TGAP dans le domaine de l'eau ; il opte pour l'amélioration du système des agences, à travers l'intervention du Parlement qui devrait pouvoir se prononcer sur les programmes quinquennaux des agences, la mise en oeuvre d'actions d'intérêt commun, et l'amélioration de la connaissance des milieux naturels.

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La commission, sur les propositions de son rapporteur pour avis, a alors émis -les commissaires des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste s'abstenant - un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'environnement inscrits dans le projet de loi de finances pour 1999 .

EXAMEN EN COMMISSION

Après la présentation par M. Jean Bizet, rapporteur pour avis, des crédits consacrés à l'environnement dans le projet de loi de finances pour 1999, un large débat s'est instauré.

M. Jean-Pierre Raffarin, président, est intervenu pour souligner les graves menaces pesant sur les agences de l'eau du fait de l'instauration de la TGAP, qui remet en cause leur gestion décentralisée organisée en partenariat avec les collectivités locales et les acteurs économiques.

M. Marcel-Pierre Cleach, après s'être déclaré d'accord avec les conclusions du rapporteur pour avis et avoir dénoncé le défaut de transparence dans le mode de fonctionnement des associations -dont les actions menées localement entraînent parfois des retards lourds de conséquences sur les projets d'infrastructures-, s'est également vivement opposé à l'instauration d'un fonds de concours supplémentaire à la charge des agences de l'eau pour participer au financement de la police de l'eau.

Il a dénoncé le risque de recentralisation du mode de gestion des crédits de l'environnement induit par l'instauration de la TGAP, et a regretté que les ressources affectées jusqu'alors à la protection de l'environnement aillent désormais alimenter le budget de l'Etat.

M. Gérard Cornu a dénoncé les effets pervers qu'aurait la TGAP sur le dispositif des agences de l'eau, alors même qu'une bonne gestion de cette ressource supposait plus de décentralisation, comme en témoignaient les expériences positives menées par l'Agence Seine-Normandie sur la protection de la nappe phréatique de la Beauce. Il a jugé qu'en matière d'environnement, il fallait soutenir l'action des élus locaux et leur donner les moyens financiers de faire face aux obligations très lourdes résultant de la mise en oeuvre des directives communautaires. Evoquant le problème de l'épandage des boues résiduaires des stations d'épuration, qui reste une solution moins coûteuse que l'incinération, mais à laquelle les industries agro-alimentaires sont désormais très hostiles, il a souhaité que le ministère de l'environnement engage des actions de concertation entre les différentes parties prenantes pour définir une solution acceptable par tous et supportable pour les finances locales.

M. Jean Huchon s'est déclaré préoccupé par l'état d'esprit de certains défenseurs de l'environnement, qu'ils soient au ministère ou dans les associations, qui refusaient de travailler dans un esprit de concertation avec les élus locaux et les acteurs du développement économique local, notamment en ce qui concerne la désignation et la gestion des zones Natura 2000. Il s'est déclaré très opposé à l'instauration de la TGAP, qui remet en cause un processus de gestion décentralisée de l'environnement.

M. Pierre André a jugé que le projet de budget du ministère de l'environnement ne résolvait pas deux problèmes essentiels pour les collectivités locales, à savoir la gestion des ordures ménagères et l'assainissement, qui représentent des investissements très lourds, notamment pour les communes rurales. Il a fait valoir que les mesures fiscales favorisant le tri sélectif ne réglaient rien et qu'une véritable politique des déchets devait définir ce qu'on entendait par " déchet ultime ", redonner sa place à l'incinération et résoudre le problème des boues résiduaires des stations d'épuration. Il a enfin fait remarquer qu'en 2002, le coût de mise en décharge contrôlée serait quasiment équivalent à celui du traitement par incinération.

Mme Anne Heinis a déclaré partager l'ensemble des opinions émises contre le budget de l'environnement et s'est étonnée de ce que l'on choisisse de renforcer les contrôles avant même d'avoir donné aux responsables politiques et économiques les moyens financiers nécessaires pour mettre en oeuvre les obligations résultant des directives européennes en matière d'eau, d'assainissement et de traitement des ordures ménagères. Elle a considéré que le principe de déconnexion entre la taxe et la réparation des atteintes à l'environnement qui fondait la TGAP était très critiquable et qu'en définitive cela permettrait à l'Etat de récupérer les fonds gérés par les agences de l'eau.

S'agissant du rôle des associations, elle a jugé que certaines se livraient à une politique systématique de désinformation, largement relayée par les médias, ce qui était profondément traumatisant, tant pour l'opinion publique que pour les élus locaux, soucieux de l'intérêt général.

M. Gérard Le Cam a considéré que le budget de l'environnement comportait des avancées positives mais s'est déclaré très hostile à l'instauration de la TGAP, qui portait atteinte à l'autonomie des agences. Il a condamné les pratiques de certaines associations de protection de l'environnement qui, sur des fonds publics, achetaient des plans d'eau ou des forêts pour les soustraire ultérieurement à la pratique de la pêche et de la chasse. Il a déclaré qu'en conséquence, le groupe communiste, républicain et citoyen s'abstiendrait sur le vote de ce budget.

M. Jean-Pierre Raffarin, président, est alors intervenu pour déplorer qu'en certaines occasions on puisse avoir le sentiment d'une confusion entre les objectifs défendus par les services du ministère de l'environnement et ceux défendus par les associations de protection de l'environnement, ce qui nuisait à la crédibilité de ce ministère, qui en toute occasion devait défendre l'intérêt général.

M. Rodolphe Désiré a fait part de ses hésitations sur le contenu du budget de l'environnement, mais il a jugé qu'en matière de développement économique local, l'action systématique, tant des associations que parfois des administrations locales au nom d'une doctrine écologique intransigeante, empêchait dans certains cas la réalisation de tout projet, que ce soit dans le secteur du tourisme ou en matière agricole. Il a évoqué l'impossibilité d'installer en Martinique une usine de fabrication de produits pour le bétail, ce qui freinait le développement de l'élevage. Il a déclaré en conséquence s'abstenir sur le vote du budget de l'environnement.

En réponse aux différents orateurs, M. Jean Bizet, rapporteur pour avis, a salué l'unanimité des opinions émises et souligné qu'en définitive la TGAP constituait une variable d'ajustement pour permettre à l'Etat d'équilibrer son budget. Il a rappelé que selon les chiffres transmis, la future écotaxe sur le carbone et l'énergie pouvait rapporter entre 15 et 25 milliards de francs.

Il a appelé l'attention sur le fait que dans le nouveau dispositif, les subventions versées par l'Etat pour protéger l'environnement seraient soumises à la règle du plafonnement communautaire. Il s'est inquiété de l'accroissement du nombre de fonctionnaires du ministère de l'environnement décidé pour 1999, alors même que la France occupe déjà le deuxième rang mondial s'agissant du poids de la fonction publique. En ce qui concerne le traitement des ordures ménagères par incinération, il a indiqué que le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement avait fixé la norme d'émission de dioxyne à 0,1 nanogramme/m3 de fumée, mais il a jugé que le discrédit jeté sur cette filière favorisait a contrario des multinationales qui, grâce à la maîtrise de surfaces foncières importantes, allaient pouvoir développer les centres d'enfouissement technique.

Il a soutenu personnellement que la solution de l'incinération était la moins mauvaise possible, en faisant valoir que le tri sélectif ou le compostage ne pouvaient concerner qu'une infime part des ordures ménagères. Il a suggéré que soit organisée dans le cadre de la commission une journée d'auditions sur le traitement des déchets, étant donné l'enjeu que cela représente pour les collectivités locales. Après avoir émis des doutes sur la réalité économique du deuxième dividende, M. Jean Bizet, rapporteur pour avis, a jugé que " trop de taxe écologique allait tuer la protection de l'environnement ".

M. Jean-Pierre Raffarin, président, a fait valoir que la notion de " double-dividende " lui paraissait peu pertinente, puisque l'obtention du premier dividende -dissuader les pollueurs- empêchait l'obtention du second, à savoir affecter les surplus de fiscalité écologique à la baisse des prélèvements sociaux sur le travail.

La commission, sur les propositions de son rapporteur pour avis, a alors émis -les commissaires des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste s'abstenant- un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'environnement inscrits dans le projet de loi de finances pour 1999 .



1 Proposition de loi déposée par M. Jean-François Le Grand, Mme Janine Bardou, MM. Michel Doublet, Michel Souplet, Louis Minetti et Paul Raoult relative à la mise en oeuvre du réseau écologique européen dénommé Natura 2000.



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