B. L'ÉVOLUTION DES CENTRES D'EXPERTISE ET D'ESSAIS ET DES STRUCTURES INDUSTRIELLES DE LA DGA

La DGA a entrepris une délicate adaptation de ses activités industrielles, d'expertise et d'essais, qui se traduit par une forte déflation des effectifs, et qui est dominée par la question de l'avenir de la Direction des constructions navales (DCN).

1. Les centres d'expertise et d'essais

Créée en 1997, la Direction des centres d'expertise et d'essais, qui constitue désormais, en terme d'effectifs, la principale direction de la DGA dans sa partie étatique, regroupe 20 centres de recherche et d'études, d'évaluation, d'expertise et d'essais qui dépendaient jusqu'alors de diverses directions.

Cette nouvelle organisation met en relief la mission assignée aux centres d'expertise et d'essais, qui est celle de jouer le rôle de prestataire de service au profit des autres directions de la DGA, mais aussi de développer une activité commerciale d'expertise auprès de clients extérieurs.

Par son poids en termes d'effectifs, la Direction des centres d'expertise et d'essais se situe au coeur de l'effort entrepris par la DGA pour réduire son coût de fonctionnement.

Dans ce cadre, plusieurs orientations ont été retenues :

- développer la "culture du client", généraliser la contractualisation et renforcer la présence auprès des services de programmes de la DGA,

- fournir des prestations globales et développer des pôles d'excellence,

- élargir la clientèle au delà du ministère de la Défense afin de mieux rentabiliser les moyens d'essais et de s'exercer à la concurrence : le "chiffre d'affaires" de diversification a atteint 119 millions de francs en 1997, 202 millions de francs en 1998 et sera proche de 275 millions de francs en 1999 , l'objectif étant d'atteindre 500 millions de francs en 2002.

L'analyse prévisionnelle de l'activité des centres d'expertise et d'essais pour la période couverte par la loi de programmation a fait apparaître une diminution d'environ 20 % de l'activité pour les besoins de la défense française , baisse qui atteindrait 30 % dans le secteur de l'aéronautique, alors que parallèlement s'ouvrira de plus en plus, du fait du développement des programmes de coopération, une concurrence de plus en plus affirmée entre les 150 centres d'expertise et d'essai existant en Europe . Ce contexte s'accompagne également d'une évolution des techniques, les essais étant souvent remplacés par des simulations moins consommatrices de main-d'oeuvre , et par une maîtrise d'oeuvre croissante des industriels sur les systèmes d'armes.

La DGA a donc entrepris une forte réduction des effectifs de la direction des centres d'expertise et d'essais qui passeront de 12 000 personnes début 1997 à 9 700 personnes fin 1999. Cette diminution doit se poursuivre pour atteindre un niveau de près de 9 000 personnes en 2002.

Cette évolution sera normalement réalisée sans fermeture de site, compte tenu notamment des investissements qui y ont été réalisés, à l'exception du centre d'essais en vol de Brétigny, qui disparaîtra en 1999 et dont les activités seront répartis dans les centres d'Istres et de Cazaux.

Votre rapporteur avait évoqué l'an passé le projet de passage sous compte de commerce des centres d'expertise et d'essais, qui a été étudié au regard de la possibilité de faciliter l'évolution de leur mode de gestion vers les pratiques d'entreprises. Ce passage en compte de commerce n'est plus envisagé aujourd'hui, et les quatre derniers établissements de la DCE encore dans le périmètre comptable du compte de commerce de la DGN devraient rejoindre la zone budgétaire en 2001.

2. Le service de la maintenance aéronautique

Les trois ateliers industriels de l'aéronautique de la DGA, spécialisés dans la maintenance aéronautique militaire, sont regroupés depuis 1997 au sein du service de la maintenance aéronautique, directement rattaché au délégué général pour l'armement.

Ils prennent en charge les activités de maintenance qui ne peuvent être effectuées au sein des armées elles-mêmes, à l'exclusion de celles qui en raison de leur complexité sont directement confiées aux constructeurs.

L'atelier de Bordeaux est spécialisé dans la réparation des moteurs d'aéronefs, celui de Clermont-Ferrand dans la maintenance et la réparation d'aéronefs et d'équipements des armées de l'air et de terre, et celui de Cuers-Pierrefeu, dans la maintenance et la réparation d'aéronefs et d'équipements de l'aéronautique navale.

Ces activités sont gérées sous compte de commerce.

Au 31 décembre 1998, les effectifs des trois ateliers industriels de l'aéronautique, qui étaient de 3 600 personnes en 1997, avaient été ramenés à 3 327 personnes, dont 1 243 à Clermont-Ferrand 1 102, à Bordeaux et 982 à Cuers-Pierrefeu.

Leur plan de charge devrait s'établir, pour 2000, à un niveau légèrement inférieur à celui de 1999, mais supérieur à celui de 1998.

3. La Direction des constructions navales : l'urgence d'une profonde évolution

L'adaptation de la Direction des constructions navales (DCN), demeure la principale source de difficulté et d'inquiétude pour l'avenir au sein de la DGA.

Votre rapporteur souhaite tout d'abord rappeler les données essentielles des contraintes qui s'imposent aujourd'hui à la DCN.

La DCN est confrontée depuis trois ans à une baisse très importante (- 30 %) de son activité de construction neuve au profit de la Marine nationale, cette diminution, combinée à un tassement des activités d'entretien des bâtiments de la flotte, n'étant pas compensée par les activités d'exportation, par nature fluctuantes et pour lesquelles, dans un marché de plus en plus concurrentiel, se pose un problème évident de compétitivité.

Face à cette situation difficile, la DCN, deuxième acteur de la construction navale militaire dans le monde, reconnue pour sa haute technicité, doit impérativement entreprendre une profonde mutation si elle ne veut pas progressivement s'affaiblir. Il lui faut à la fois adapter ses effectifs à son plan de charge , pour trouver les conditions d'un équilibre économique, et opérer sa transformation d'une administration qu'elle est toujours en une entreprise compétitive.

Selon les informations fournies à votre rapporteur, le plan de charge prévisible de la DCN évoluera d'ici 2000 comme l'indique le tableau ci-dessous.

Evolution du plan de charge de la DCN

(en millions d'heures)


 

1998

1999
(estimation)

2000 (prévision)

2001
(prévision)

Etudes et constructions neuves

7 204

5 120

4 080

4 370

Entretien

5 985

6 330

6 060

6 440

Export et divers

5 399

7 090

4 640

3 920

Total

18 588

18 540

14 780

14 730

Face à ces perspectives très difficiles, la DCN a entrepris une réduction de ses effectifs , qui sont passés de 21 000 agents début 1997 à 17 500 début 1999, l'effectif prévisionnel de la fin 1999 étant de 16 300 , soit 1 200 postes de moins qu'en début d'année.

Cette réduction des effectifs a été obtenue par trois types de mesures :

- le dégagement des cadres applicable aux ouvriers ayant atteint l'âge de 55 ans et, depuis 1998, 52 ans (2 175 départs de 1997 à la mi-99),

- les départs volontaires indemnisés (408 départs),

- les mutations dans les armées et les services communs, particulièrement la Marine (1 272 départs).

Ces mesures sont financées par un fonds d'adaptation industrielle imputé sur le titre V de la Marine. Elles ont représenté 411 millions de F en 1997 et 404 millions de F en 1998. Elles sont estimées à 480 millions de F pour 1999 et pourraient atteindre 600 millions de F en 2000. Elles se décomposent comme suit :

- pensions, allocations différentielles et suppléments de pensions pour des personnels dégagés des cadres,

- indemnités de départ volontaire, allocations chômage, indemnités diverses d'aide à la création d'entreprises pour les personnels ayant opté pour le départ volontaire,

- indemnités de mutation, de déménagement, frais de formation et dépenses correspondant au maintien de la rémunération pour les personnels volontaires pour une mutation.

En ce qui concerne les mutations vers les armées , les candidatures se sont surtout manifestées la première année et dès 1998 , les candidatures se sont taries. En effet, aux problèmes géographiques s'ajoutent ceux liés aux profils des postes proposés par les armées, souvent peu qualifiés puisque destinés à remplacer des appelés. Enfin, il est probable que la perspective d'un départ anticipé dès 52 ans a découragé un certain nombre de candidatures. Seules 261 mutations ont été opérées hors de la DGA en 1998 et 110 seulement au premier semestre 1999.

Ces éléments confirment que ces mesures, fondées sur le volontariat sont insuffisantes pour atteindre les objectifs de réduction d'effectif et permettre à la DCN de rallier au plus vite le format qui la rendrait compétitive.

Rappelons que l'objectif retenu vise un effectif de 12 500 agents , étant précisé que l'application des 35 heures hebdomadaires pourrait conduire à réviser ce chiffre.

S'agissant de l' évolution des structures de la DCN , on doit bien constater la modestie et le rythme prudent des changements opérés.

Cette évolution s'est pour l'instant limitée à la séparation des activités industrielles des activités dites " étatiques " de maîtrise d'ouvrage, qui relèvent désormais du suivi des programmes navals. L'étape suivante consiste à faire de la DCN un service à compétence nationale , retiré du périmètre de la DGA et rattaché directement au ministre de la Défense. Cette mesure ne modifie en rien la nature de la DCN, qui demeure un service industriel de l'Etat et n'emporte aucune conséquence sur les modes de gestion . Elle ne présente donc, en elle-même, que peu d'intérêt, si ce n'est qu'elle s'accompagne d'une réorganisation de la DCN en trois branches (constructions neuves, maintien en condition opérationnelle et systèmes de combat) et surtout d'une charte de gestion , conclue entre le ministère de la Défense et celui de l'Economie et des Finances, qui doit apporter des assouplissements en matière de code des marchés publics, de règles d'embauche, de règle de gestion et d'affectation du résultat.

Votre rapporteur rappelle que la transformation du mode de gestion de la DCN, en particulier au travers d'une logique de résultat et non plus de coûts constatés et facturés à la Marine nationale, constitue un enjeu essentiel, pour l'exportation tout d'abord mais aussi pour le marché national. Une telle évolution n'est possible que si parallèlement la DCN se voit autorisée à s'inspirer des règles de fonctionnement d'une entreprise pour son action commerciale et sa capacité d'autofinancement.

Il tient également à souligner le handicap considérable que constitue pour la DCN son statut actuel, dans lequel sont confondues en la personne de l'Etat les fonctions d'employeur, d'actionnaire et de client. Pernicieux pour la gestion de la DCN, ce statut l'est aussi au plan extérieur du fait de l'incapacité actuelle de la DCN de prendre part aux importantes restructurations industrielles entreprises dans le secteur de la construction navale marquées par la reprise du GEC-Marconi par British Aerospace et par les regroupements en Allemagne, notamment autour de HDW pour les sous-marins, qui a repris le Suédois Kockums, alors que se préparent des privatisations en Espagne et en Italie.

Tout en saluant l'effort entrepris par l'actuelle direction de la DCN dans le cadre du plan d'entreprise présenté au printemps dernier, votre rapporteur ne peut que marquer sa très vive inquiétude face au report à une échéance ultérieure de la question de l'évolution du statut de la DCN, c'est-à-dire sa transformation en établissement public industriel et commercial ou en société nationale. Tout laisse à craindre en effet que l'adaptation de la DCN risque de ne pas être suffisamment rapide pour donner les meilleures chances de préparer son avenir dans un contexte de concurrence accrue.

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