EXAMEN DES ARTICLES


TITRE PREMIER
CONCOURS FINANCIERS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AUX SOCIÉTES D'ÉCONOMIE MIXTE LOCALE

Article premier
(art. L. 1522-4 et L. 1522-5 du code général des collectivités territoriales)
Concours financiers des collectivités territoriales
aux sociétés d'économie mixte

Afin de clarifier les règles applicables aux concours financiers des collectivités territoriales aux sociétés d'économie mixte locales, cet article insère un chapitre II bis (" Concours financiers des collectivités territoriales et de leurs groupements ") dans le titre II (" Sociétés d'économie mixte locales ") du livre V (" Dispositions économiques ") de la première partie (" Dispositions générales ") du code général des collectivités territoriales. Ce chapitre serait composé des articles L. 1522-4 et L. 1522-5 (nouveaux).

Dans le droit en vigueur, les collectivités territoriales peuvent tout d'abord verser à une société d'économie mixte des apports en capital.

Sauf exceptions (par exemple, pour les sociétés d'économie mixte à objet sportif) les collectivités locales doivent en principe détenir, séparément ou conjointement, la majorité du capital social. La part des actionnaires autres que les collectivités locales ne peut être inférieure à 20%. Celle des collectivités est donc limitée à 80%. En revanche, dans l'état actuel du droit, elles ne peuvent verser aux sociétés d'économie mixte des avances en compte courant d'associés.

Or, on rappellera qu'en pratique les associés des sociétés de droit commun, indépendamment de leurs apports, peuvent consentir à la société des avances ou des prêts. Au cours de la vie sociale, ils peuvent notamment contribuer à l'augmentation de la masse de manoeuvre financière de l'entreprise, en consentant des avances en compte courant en sus de leur part de capital.

Cette prohibition actuellement faite aux sociétés d'économie mixte locales présente des inconvénients majeurs. Certes, les apports en capital permettent à une collectivité de doter utilement une société d'économie mixte dans sa phase de création et de croissance. Ils peuvent également lui permettre de la recapitaliser si elle traverse des difficultés. Cependant, les collectivités locales ne peuvent exercer pleinement leurs responsabilité d'actionnaires majoritaires vis à vis de leurs sociétés d'économie mixte en raison de l'interdiction qui leur est faite de leur accorder des avances en compte courant d'associés.

La jurisprudence administrative a considéré que les collectivités locales ne peuvent leur accorder légalement des aides directes ou indirectes que sous réserve de respecter les règles de droit commun fixées pour les aides des collectivités locales aux entreprises ( Conseil d'Etat, 17 janvier 1994, Préfet des Alpes de Haute Provence ; 6 novembre 1995, Commune de Villenave d'Ornon ).

En vertu de l'article L. 1511-1 du code général des collectivités territoriales - qui a codifié les dispositions de la loi n° 82-6 du 7 janvier 1982 -, " les collectivités locales et leurs groupements peuvent, lorsque leur intervention a pour objet la création ou l'extension d'activités économiques, accorder des aides directes ou indirectes à des entreprises ".

La loi de 1982 avait entendu distinguer les aides directes qui ne pouvaient être accordées par les collectivités locales que si elles avaient été expressément autorisées par la loi et les aides indirectes dont l'octroi était en principe libre. Mais ce dispositif initial a été corrigé, le législateur ayant ultérieurement réglementé certaines aides indirectes.

En principe, toute aide directe non prévue par la loi est illégale .

Cependant, selon l'article L. 1511-5 du code général des collectivités territoriales, " des actions de politique agricole et industrielle peuvent être entreprises par les collectivités territoriales ou leurs groupements dans le cadre de conventions conclues par eux avec l'Etat et fixant les modalités des aides qu'ils peuvent consentir ". Dans la pratique, des aides de ce type ont été autorisées principalement dans le cadre des contrats de plan.

Le législateur a, par ailleurs, entendu affirmer une priorité régionale en matière d'aides directes.

L'article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales dispose, en effet, que " les aides directes sont attribuées par la région dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat ".

En conséquence, les départements et les communes ne peuvent, en principe, accorder d'aides directes que si la région est intervenue préalablement ( Conseil d'Etat, 11 juillet 1991, Préfet de Haute Saône ). Le second alinéa de l'article L. 1511-2 précise que les différentes formes d'aides directes " peuvent être complétées par le département, les communes ou leurs groupements, lorsque l'intervention de la région n'atteint pas le plafond fixé par le décret mentionné à l'alinéa précédent ".

Les aides directes sont constituées de la prime régionale à la création d'entreprises et de la prime régionale à l'emploi, des prêts, avances et bonifications d'intérêt.

L'article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales dispose que " les aides indirectes peuvent être attribuées par les collectivités territoriales ou leurs groupements, seuls ou conjointement ". Ecartant une primauté régionale, le législateur n'a pas non plus établi de liste limitative des aides indirectes qui sont donc en principe libres . Toutefois, la réglementation ultérieure de certaines de ces aides conduit à distinguer deux catégories : les aides indirectes réglementées , à savoir les rabais sur les ventes et locations immobilières, les garanties d'emprunt et cautionnements, les participations au capital de sociétés ; les autres aides qui sont entièrement libres.

En matière d'immobilier d'entreprise, la revente et la location de bâtiments par les collectivités doivent se faire aux conditions du marché. Toutefois, il peut être consenti des rabais sur ces conditions, selon des modalités qui ont été précisées par le décret n° 82-809 du 22 décembre 1982.

Les sociétés d'économie mixte peuvent bénéficier d'une garantie d'emprunt de la part d'une collectivité. Cette garantie doit néanmoins répondre aux conditions de droit commun qui ont été plus strictement définies au cours des dernières années. Les collectivités locales peuvent également choisir de recourir aux services d'une société locale de garantie financière.

S'agissant des opérations menées dans un cadre contractuel (concession d'aménagement, autres délégations de service public...), des dispositions spécifiques autorisent sous certaines conditions les participations financières, avances de fonds et subventions d'équilibre.

C'est ainsi que l'article L. 1523-2 du code général des collectivités territoriales autorise les collectivités locales à accorder une participation financière ou une avance de fonds à une société d'économie mixte , sous réserve que l'aide ne soit pas versée dans le cadre d'une prestation de services, qu'elle soit octroyée dans le cadre d'une convention et qu'elle porte uniquement sur la réalisation de la mission confiée.

Ces dispositions spécifiques concernent le financement d'opérations réalisées d'ordre à ordre et pour le compte de la collectivité. Les aides qu'elles régissent ne doivent pas être confondues avec les aides directes et indirectes des collectivités locales aux entreprises.

En dehors des cas prévues par ces dispositions spécifiques, une collectivité locale ne peut accorder de participation financière ou d'avance de fonds à une société d'économie mixte que dans les conditions du droit commun des aides aux entreprises.

Ce bref rappel met en évidence les insuffisances du cadre juridique en vigueur, lequel ne met pas les collectivités locales en position d'apporter aux sociétés d'économie mixte les concours financiers nécessaires à l'accomplissement des missions d'intérêt général qu'elles leur confient et n'assure pas aux relations contractuelles une sécurité juridique suffisante.

Le présent article tend à clarifier le régime applicable dans deux nouveaux articles insérés dans le code général des collectivités territoriales.

L'article L. 1522-4 reconnaît la faculté aux collectivités territoriales et à leurs groupements d'allouer des concours financiers aux sociétés d'économie mixte locales, soit en leur qualité d'actionnaires, soit en tant que cocontractants.

Il ne reprend pas le premier alinéa du texte que l'article 2 de la proposition de loi prévoit pour l'article L. 1523-1 du code général des collectivités territoriales. Etablissant la faculté pour les collectivités territoriales et leurs groupements, en leur qualité d'actionnaires ou de cocontractants, d'allouer des concours financiers aux sociétés d'économie mixte locales, cet alinéa apparaît, en effet, trop général, les concours financiers en cause étant en tout état de cause expressément énoncés dans les alinéas suivants qui précisent en outre les conditions dans lesquels ils peuvent être versés.

Le premier alinéa du texte qui vous est proposé prend en compte les concours financiers que les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent accorder en leur qualité d'actionnaires.

Le texte de la proposition de loi les habilite, dans les conditions fixées par la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, à allouer de tels concours aux sociétés d'économie mixte locales. Il prend soin de préciser que parmi ces concours figurent notamment les apports en compte courant d'associés , apports que les collectivités territoriales ne sont pas actuellement autorisées à verser aux sociétés d'économie mixte.

Votre commission des Lois vous propose une rédaction plus précise qui renvoie aux conditions fixées par la convention prévue par le présent article.

Le deuxième alinéa autorise les collectivités territoriales et leurs groupements - cette fois ci en leur qualité de cocontractants des sociétés d'économie mixte locales - à allouer à ces dernières des concours financiers, dans le cadre des opérations d'intérêt général ou des missions de service public qu'ils leur confient. Ces concours seront régis par les conditions fixées par ailleurs soit dans le code général des collectivités territoriales, soit dans le code de l'urbanisme en ce qui concerne les opérations d'aménagement.

Enfin, le dernier alinéa spécifie que les concours financiers ainsi autorisés ne sont pas soumis au dispositif régissant les aides des collectivités locales aux entreprises.

L'article L. 1522-5 précise les conditions dans lesquelles l'apport en compte courant d'associés peut être accordé. Il exige la conclusion d'une convention expresse entre la collectivité territoriale ou le groupement et la société d'économie mixte locale.

A peine de nullité, cette convention devra préciser l'objet et la durée de l'apport ainsi que le montant, les conditions de remboursement, éventuellement de rémunération ou de transformation en augmentation de capital dudit apport.

Il paraît en outre préférable que la convention spécifie la nature de l'apport afin d'éviter toute ambiguïté avec les autres formes de concours que la collectivité locale peut verser à la société d'économie mixte.

Cependant, l'apport en compte courant d'associés ne pourra pas être consenti pour une durée supérieure à deux ans , éventuellement renouvelable une fois. Au terme de cette période, la société d'économie mixte locale devra rembourser l'apport, à moins que celui-ci ne soit transformé en augmentation de capital.

Les trois derniers alinéas de l'article L. 1523-2 précise les conditions dans lesquelles les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires se prononcent sur l'octroi, le renouvellement ou la transformation en capital d'un apport en compte courant d'associé.

Elles devront se prononcer au vu de deux documents : d'une part, un rapport d'un représentant de la collectivité territoriale ou du groupement au conseil d'administration ou au conseil de surveillance de la société d'économie mixte locale ; d'autre part, une délibération du conseil d'administration de cette dernière, exposant les motifs d'un tel apport et justifiant son montant, sa durée ainsi que les conditions de son remboursement, de son éventuelle rémunération ou de sa transformation en augmentation de capital.

Il paraît néanmoins indispensable de préciser que la somme de la participation en capital et des avances en compte courant d'associé ne dépassera pas le plafond de 80% prévu pour la participation financière de la collectivité.

En outre, il paraît nécessaire qu'une disposition réglementaire détermine les modalités de rémunération des avances ainsi versées. Cette question devrait faire l'objet d'un décret en Conseil d'Etat.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 1er ainsi rédigé.

Article 2
(art. L. 1615-11 du code général des collectivités territoriales)
Remboursement par le FCTVA de participations financières versées par les collectivités territoriales aux sociétés d'économie mixte locales dans le cadre d'opérations d'aménagement

Cet article insère un article L. 1615-11 dans le code général des collectivités territoriales afin de rendre éligibles au Fonds de compensation pour la TVA la fraction de la participation d'une collectivité territoriale ou d'un groupement affectée au financement d'une opération d'aménagement dans les conditions prévues par le code de l'urbanisme.

Conformément aux règles régissant ce fonds, ne peuvent être éligibles que les dépenses d'investissement concernant des immobilisations destinées à intégrer le patrimoine de la collectivité concernée.

En revanche, sont exclues des attributions du FCTVA, les immobilisations cédées ou mises à disposition au profit d'un tiers ne figurant pas au nombre des collectivités ou établissements bénéficiaires du Fonds.

Dans le cadre des opérations d'aménagement réalisées par des sociétés d'économie mixte locales, les subventions d'équilibre versées par les collectivités ne peuvent, en raison de leur caractère global, être éligibles au FCTVA.

Cependant, à côté des subventions d'équilibre, les collectivités versent désormais des participations financières au coût de l'opération. Ces participations sont expressément mentionnées par l'article L. 300-4-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains. Dans le cadre d'une opération d'aménagement, la collectivité ou le groupement, qui a confié l'opération à une société d'économie mixte locale, peut décider de financer tout ou partie des acquisitions foncières et des équipements publics . La convention passée avec la société d'économie mixte doit alors préciser notamment les modalités de cette participation financière.

Les versements que la collectivité ou le groupement effectue dans ce cadre sont individualisées conformément aux principes comptables régissant les sociétés d'économie mixte locales. Il est donc possible d'identifier parmi les participations financières celles qui concernent des acquisitions foncières et des équipements publics destinés à intégrer le patrimoine de la collectivité qui les a versées.

Dès lors que les dépenses correspondantes pourraient faire l'objet d'un remboursement par le Fonds si elles étaient engagées directement par la collectivité, il paraît logique de prévoir leur éligibilité au Fonds dans le cas où une société d'économie mixte est chargée de la réalisation de l'opération.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 2 ainsi rédigé.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page