II. BAISSER DURABLEMENT LE DÉFICIT ET LA DETTE DE L'ÉTAT

Pour votre commission des finances l'orthodoxie budgétaire consistant à réduire prioritairement le déficit budgétaire et à diminuer le poids de la dette publique n'est pas un dogme absolu s'imposant erga omnes . Elle estime cependant que la situation actuelle permet d'accroître l'effort de réduction du déficit afin de se rapprocher de la moyenne de nos principaux partenaires.

A ce titre, elle relève avec satisfaction que son analyse est reprise par le gouvernement qui déclare ainsi : " d'une façon générale, il faut avoir le courage de reconnaître nos retards : ils constituent un handicap mais ouvrent d'importantes opportunités de rattrapage. C'est vrai pour les nouvelles technologies. C'est vrai pour le poids de la dette qui tend à évincer des investissements privés ou publics susceptibles de relever notre potentiel de production. Une politique constante de réduction des déficits est donc nécessaire " 39 ( * ) . S'interrogeant sur les orientations à adopter en matière de politique de la dette, le gouvernement émet même deux sages recommandations : " Eviter une dérive auto-entretenue de l'endettement public ; réserver le financement par emprunt aux dépenses ayant le caractère d'investissement " 40 ( * ) .

La vertu budgétaire en paroles

Lors de la discussion générale du projet de loi de finances pour 2001 (1) , notre collègue député Jean-Pierre Balligand, a émis de sages préconisations consistant à ne pas accroître les dépenses publiques, à réduire le niveau des déficits publics ainsi que celui des impôts :

" M. Jean-Pierre Balligand : Faut-il d'abord accroître la dépense publique ? (...) J'observe même qu'en Italie, en Espagne, aux Pays-Bas ou en Irlande, on assiste à la fois à une baisse de la dépense publique et à une hausse du taux d'investissement public. Ainsi, pour être en cohérence avec ce qui se passe ailleurs en Europe, le choix raisonnable consiste à ne pas profiter de cette phase de croissance pour accroître les dépenses publiques. S'il ne faut donc pas augmenter la dépense publique, faut-il alors réduire le niveau des déficits publics ? Au moins deux cas peuvent justifier la réduction des déficits publics. Premier cas : la dette publique et le déficit public créent un effet d'éviction de l'investissement privé. Second cas : il faut réduire le déficit public pour être capable de le réaugmenter suffisamment ensuite en cas de récession.

Nous constatons en Europe la persistance de déficits publics, y compris dans un pays comme l'Espagne qui connaît un taux de croissance annuelle de l'ordre de 4 %. En même temps, le taux d'endettement public diminue lentement, sauf aux Pays-Bas et en Irlande. Enfin, la remontée des taux d'investissement privé est encore beaucoup trop récente et fébrile.

Dans ces conditions, il n'est pas illogique que la France accompagne le mouvement européen de réduction des déficits publics. D'ailleurs, pour l'ensemble de la zone euro, il n'est pas non plus illogique de réduire les déficits publics alors que la zone dégage un déficit de la balance courante. (...) Cela dit, à plus court terme, la réduction des déficits publics doit conduire aussi à la réduction des impôts.

Quel enseignement tirer de la concurrence fiscale européenne ? Si l'on se situait dans un cadre d'harmonisation fiscale européenne, on pourrait espérer que les décisions fiscales seraient prises de manière coopérative, de façon à éviter une concurrence fiscale excessive.

M. Michel Bouvard : Ce n'est, hélas, pas le cas !

M. Jean-Pierre Balligand : Chaque pays ne chercherait pas à attirer des entreprises et des facteurs mobiles de production. Dès lors, si la tendance en Europe est de baisser les taux d'imposition et si la priorité est la coopération fiscale, il n'est pas choquant de jouer la coopération plutôt que l'inverse. (...) Mon sentiment est que nous sommes dans une phase intermédiaire qui nous autorise la réduction des taux d'imposition, sans toutefois verser dans le jeu sans fin de la concurrence fiscale européenne. De ce point de vue, il est tout à fait salutaire de ramener nos taux d'imposition à des niveaux comparables à ceux de nos voisins et en même temps de relancer la coopération fiscale en Europe ".

(1) In JO Débats Assemblée nationale - 17 octobre 2000, page 6920.

Votre commission a cependant le sentiment que, en ce domaine comme dans d'autres, les faits tardent à rejoindre les intentions surtout lorsque celles-ci sont vertueuses.

A. LE JUGEMENT TRÈS CRITIQUE DES INSTITUTIONS EUROPÉENNES SUR " L'EXCEPTION FRANÇAISE "

Qu'il s'agisse de la Commission européenne ou de la Banque centrale européenne (BCE), celles-ci critiquent la voie retenue par la France pour réduire son déficit public qui consiste à tirer profit d'une conjoncture favorable sans entamer les réformes de structure seules en mesure de réduire le poids des dépenses publiques et ainsi de diminuer durablement, tant le montant du déficit que l'encours de la dette.

1. Les conclusions du Conseil européen des 23-24 mars 2000 : assainissement, qualité et viabilité des finances publiques

Rappelant l'opportunité que constitue aujourd'hui pour les pays européens la croissance, le Conseil de Lisbonne de mars dernier a souhaité que se poursuive plus avant le mouvement d'assainissement des finances publiques.

A ce titre, il a préconisé que soient réorientées les dépenses publiques, réduite la pression fiscale qui pèse sur le travail et que soit mieux pris en compte le vieillissement des populations afin d'assurer la viabilité à long terme des finances publiques.

* 39 Rapport économique, social et financier - PLF 2001 ; Avant-propos, page 4.

* 40 Rapport précité pages 70-71.

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