Rapport n° 206 (2000-2001) de M. Philippe NOGRIX , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 30 janvier 2001

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N° 206

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 30 janvier 2001

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la proposition de loi de MM. Alain LAMBERT et Philippe MARINI, portant création du Revenu Minimum d'Activité ,

Par M. Philippe NOGRIX,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Jean-Yves Autexier, Paul Blanc, Mme Claire-Lise Campion, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Alain Hethener, Claude Huriet, André Jourdain, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jacques Machet, Max Marest, Georges Mouly, Roland Muzeau, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.

Voir le numéro :

Sénat : 317 (1999-2000)

Emploi.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Il est frappant qu'après deux années de croissance soutenue, le nombre des titulaires de minima sociaux n'ait pas connu un reflux plus marqué.

Cette situation est dangereuse car si le mouvement de créations d'emploi devait à nouveau ralentir, la France devrait assumer à nouveau l'inexorable montée en charge des bénéficiaires de revenus d'assistance financés par la solidarité nationale, sans avoir saisi les opportunités qui lui étaient ouvertes de leur réintégration dans le monde de l'entreprise.

Le revenu minimum d'activité (RMA), issu de la réflexion de MM. Alain Lambert, président de la commission des Finances, et Philippe Marini, rapporteur général, est l'outil qui peut mobiliser les entreprises au service de la cause de l'insertion devant laquelle les collectivités locales se sentent désarmées faute d'instrument adapté.

Le RMA sera d'autant plus efficace qu'il viendra compléter au niveau de l'offre d'emploi par les entreprises, le caractère incitatif des mesures de crédit d'impôts qui devraient être mises en place en faveur des ménages dont les revenus d'activité sont les plus modestes.

Le RMA est un outil d'insertion puissant qui ne met nullement en cause les protections nécessaires offertes aujourd'hui par les minima sociaux.

Bien appliqué, il permettra à des personnes aujourd'hui durablement éloignées du monde du travail de retrouver une dignité tout en échappant au double écueil de la précarité et de l'assistance.

I. LES OBSTACLES QUI PÈSENT SUR LE RETOUR À L'EMPLOI DES TITULAIRES DE MINIMA SOCIAUX

Il convient de rappeler les principales caractéristiques des minima sociaux en France avant d'étudier les facteurs qui peuvent expliquer le maintien du nombre élevé de leurs titulaires.

A. LA DIVERSITÉ DES MINIMA SOCIAUX

A la fin de 1999, huit minima sociaux étaient versés à plus de 3 millions de foyers dans notre pays ; ils assuraient, compte tenu des ayants droit, une protection à une population de 5,5 millions de personnes, soit un peu moins de 10 % de la population métropolitaine. C'est dire l'importance de l'enjeu auquel s'efforce de répondre la présente proposition de loi.

Notre système de protection sociale comprend d'abord un volet " assurantiel ", mais également un volet de solidarité financé principalement par le budget de l'Etat et qui comprend actuellement huit allocations différentes. Comme le rappelle M. Jean-Michel Belorgey, " l'existence de huit minima sociaux s'explique par la tension entre universalisme et organisation à base professionnelle qui sous-tend l'histoire du système français de protection sociale " 1 ( * ) .

Les minima sociaux présentent tous la particularité d'être des allocations différentielles. Ils sont donc soumis à des plafonds de ressources variables selon la catégorie de prestation envisagée et la configuration familiale.

Le montant de l'allocation versée est déterminé en fonction des autres ressources de l'allocataire de sorte que la somme des deux n'excède pas le plafond fixé.

Parmi les minima sociaux, il apparaît nécessaire de distinguer ceux qui concernent des personnes susceptibles de se réinsérer sur le marché du travail de ceux qui visent à compenser le mauvais état de santé d'une personne ou à tenir compte de son âge.

Synthèse de la législation sur les minima sociaux

Institué en 1988, le revenu minimum d'insertion (RMI) garantit des ressources minimales à toute personne de plus de 25 ans (cette condition d'âge n'est pas exigée pour les personnes ayant au moins un enfant né ou à naître). La personne qui demande le RMI s'engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle. Les actions d'insertion concernent l'allocataire et éventuellement ses ayants droit. La prestation est financée par l'Etat et les collectivités territoriales et elle est versée par le régime général (CAF) ou la MSA.

L'allocation de parent isolé (API) a été créée en 1976 pour apporter un minimum de ressources aux personnes isolées assumant seules la charge d'enfant(s) . La femme seule enceinte est, pour l'enfant à naître, assimilée à un parent isolé. L'allocation est versée par la CAF ou la MSA jusqu'au troisième anniversaire du dernier enfant. Elle est financée par le fonds national de prestations familiales géré par la CNAF.

Instituée en 1984, l'allocation de solidarité spécifique (ASS) est servie par les ASSEDIC aux chômeurs qui ont épuisé leurs droits à l'allocation unique dégressive (AUD) de l'assurance chômage. Le bénéficiaire doit justifier d'au moins cinq années d'activité salariée au cours des dix dernières années précédant la rupture du contrat qui a ouvert droit à l'indemnisation au titre de l'assurance-chômage. Elle est financée par une subvention de l'Etat et par la contribution de solidarité des fonctionnaires.

Comme l'ASS, l'allocation d'insertion (AI) a été créée en 1984 et est gérée par les ASSEDIC pour le compte de l'Etat. Initialement destinée à certains demandeurs d'emploi ne pouvant prétendre à l'indemnisation du chômage, car ne justifiant pas d'une activité professionnelle passée suffisante, elle est réservée depuis 1992 aux populations très particulières : les détenus libérés à l'issue d'une période au moins égale à deux mois de détention et les personnes en attente de réinsertion ou en instance de reclassement (rapatriés, apatrides, réfugiés et personnes ayant sollicité l'asile en France, salariés expatriés non couverts par le régime d'assurance chômage, etc.). Le bénéficiaire doit avoir moins de 60 ans. Elle est versée pendant un an au maximum. Elle est financée par une subvention de l'Etat et par la contribution de solidarité des fonctionnaires.

Instituée en 1975, en remplacement de l'allocation aux handicapés adultes, l'allocation aux adultes handicapés (AAH) permet d'assurer un minimum de ressources aux personnes handicapées sans ressources, ou disposant de revenus modestes, qui ne peuvent prétendre à un avantage de vieillesse ou d'invalidité ou à une rente d'accident de travail. Le bénéficiaire doit justifier d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % ou de 50 % en cas d'impossibilité reconnue de se procurer un emploi du fait du handicap. Il doit être âgé de 20 ans et plus (16 ans pour tout enfant n'ouvrant plus droit aux allocations familiales). Un complément d'AAH (16 % du montant de l'AAH), de même qu'une allocation compensatrice peuvent être servis sous certaines conditions. Le financement, à l'origine effectué par le fonds national de prestations familiales, est depuis 1984 remboursé à la CNAF l'année suivante par l'Etat.

Créée en 1930, l'allocation supplémentaire d'invalidité permet d'assurer un minimum de ressources aux titulaires d'une pension d'invalidité servie par un régime de sécurité sociale au titre d'une incapacité permanente ayant réduit des deux tiers au moins la capacité de travail, lorsque cette pension d'invalidité est inférieure à un certain montant. Le bénéficiaire doit être âgé de moins de 60 ans. L'allocation est servie par la Caisse régionale d'assurance maladie (CRAM) ou la Mutualité sociale agricole (MSA). Elle est financée par le fonds de solidarité invalidité de l'Etat.

L'allocation supplémentaire de vieillesse est un complément de ressources qui permet de porter au niveau du minimum vieillesse les revenus des personnes âgées disposant de faibles moyens d'existence. Créée en 1956, elle était gérée jusqu'en 1993 par le Fonds national de solidarité (FNS) et depuis le 1 er janvier 1994 par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Le bénéficiaire doit être âgé de plus de 65 ans (ou de plus de 60 ans en cas d'inaptitude au travail), être titulaire, soit d'un ou plusieurs avantages de base, contributifs ou non, attribués par des régimes obligatoires d'assurance vieillesse (salariés ou non-salariés), soit d'une allocation spéciale servie par le Service de l'allocation spéciale vieillesse. Elle est versée par les caisses de retraite et ne peut être suspendue que si la condition de ressources n'est plus vérifiée. Le FSV est financé par le produit de la majoration de la CSG (1,3 %) depuis 1994 et par l'essentiel des droits sur les alcools et les boissons non alcoolisées.

L'allocation d'assurance veuvage a été créée en 1980 pour assurer un minimum de ressources au conjoint survivant d'un assuré social. Le bénéficiaire doit être âgé de moins de 55 ans et avoir élevé au moins un enfant pendant 9 ans avant son 16 e anniversaire ou élever, au moment du veuvage, au moins un enfant. Il ne doit pas vivre maritalement avec une autre personne. L'allocation est gérée par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) et la MSA et versée pendant 3 ans, avec dégressivité. Elle a deux sources de financement : le fonds national d'assurance veuvage, géré par la CNAV et alimenté par les cotisations sociales des salariés, et un fonds géré par la MSA et alimenté par les cotisations à la charge des exploitants agricoles.

Source : Données sociales - La société française - INSEE 1999

Dans la première catégorie , se trouve le revenu minimum d'insertion (RMI), institué par la loi du 1 er décembre 1988 pour garantir des ressources minimales à toute personne de 25 ans ou plus. Le RMI est la dernière prestation créée afin d'assurer un ultime " filet de sécurité " aux personnes qui ne bénéficiaient pas auparavant de mesures spécifiques.

Parmi celles-ci, on retrouve les titulaires de l'allocation de parent isolé (API), créée en 1976 pour assurer un minimum de ressources aux personnes isolées assumant seules la charge d'enfants. Par ailleurs, l'allocation de solidarité spécifique (ASS), instaurée en 1984, est servie par les ASSEDIC aux chômeurs qui ont travaillé au moins cinq ans et qui ont épuisé leurs droits à l'assurance chômage. Est également gérée par les ASSEDIC pour le compte de l'Etat, l'allocation d'insertion (AI), créée en 1984, réservée aux détenus libérés et aux personnes en attente de réinsertion ou de reclassement, telles que les rapatriés, les apatrides, les demandeurs d'asile et les Français de l'étranger dépourvus de couverture sociale. Enfin, l'allocation d'assurance veuvage (AAV) a été créée en 1980 pour assurer un minimum de ressources au conjoint survivant d'un assuré social, âgé de moins de 55 ans et ayant élevé ou élevant un enfant, mais ne vivant pas maritalement avec une autre personne.

Dans la seconde catégorie de minima sociaux, doivent être inscrites l'allocation aux adultes handicapés (AAH), destinée aux personnes justifiant d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 %, ainsi que l'allocation supplémentaire invalidité (ASI) pour les titulaires d'une pension d'invalidité servie par la sécurité sociale au titre d'une incapacité permanente et l'allocation supplémentaire vieillesse (ASV) pour les personnes âgées de plus de 65 ans et n'ayant pas cotisé suffisamment pour l'obtention d'un droit à la retraite. La réinsertion professionnelle de ces personnes n'est guère envisageable en raison de leur âge ou nécessite le recours à un accompagnement médico-social assuré par des institutions spécialisées ou à des aides à l'adaptation professionnelle financées par l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (AGEFIPH).

Pour donner un ordre de grandeur, ces trois derniers minima sociaux représentent au total environ 1,5 million de bénéficiaires : il reste cependant environ 1,7 million de personnes bénéficiaires de la première catégorie, dont on peut penser qu'elles pourraient trouver un emploi dans une entreprise du secteur marchand classique .

On ne peut que constater que la reprise de la croissance économique n'a pas eu un impact fort sur la diminution du nombre des allocataires de minima sociaux . Tout au plus peut-on dire que la progression s'est ralentie. Ainsi, entre 1994 et 1999, le nombre de bénéficiaires s'est accru de moins de 3 % alors que le taux de progression était proche de 9 % entre 1990 et 1994.

Concernant le RMI, la situation est également relativement décevante. Le taux de croissance du RMI, qui était de 7,5 % en 1996 et de 6 % en 1997, a atteint enfin 4 % en 1998 et 2,5 % en 1999. L'année 2000 doit être marquée par une certaine stabilité et il serait observé une baisse récente de 4 % des titulaires au cours des six derniers mois, au moins en métropole.

L'ASS fait apparaître des données plus satisfaisantes dans la mesure où l'évolution de la situation de l'emploi a bien un effet direct sur cette prestation : en évolution annuelle, en mai 2000, le taux de diminution des titulaires de l'ASS a atteint 23,6 %.

Effectifs des allocataires de minima sociaux
au 31 décembre en France métropolitaine

(en milliers)

Comme l'a déclaré le Président de la République, le 8 janvier dernier lors de la présentation de ses voeux aux forces vives de la Nation, " il n'est pas normal qu'en dépit de l'amélioration de la situation de l'emploi, le nombre de bénéficiaires du RMI commence à peine à diminuer. On ne peut pas non plus se satisfaire que plus de la moitié des allocataires du RMI le soient depuis deux ans ou plus ".

Pour expliquer cette situation, il faut faire appel à deux catégories de causes qui appellent chacune un remède différent.

B. L'EFFET DE TRAPPE À INACTIVITÉ DÛ À L'INSUFFISANCE DES REVENUS SALARIÉS

Pour certains économistes, il est économiquement utile d'éviter que la faiblesse de l'écart entre le niveau de revenus procurés par les minima sociaux et les bas salaires soit de nature à engendrer ce que l'on appelle une " trappe à inactivité " qui ferait que le titulaire du minimum de ressources préférerait continuer à toucher une allocation plutôt que de rechercher un travail.

En d'autres termes, l'existence d'un revenu de remplacement rendrait moins nécessaire le recours à une activité professionnelle ou tout au moins n'inciterait pas à la recherche effective d'un emploi parce que le revenu associé à ce dernier serait insuffisant.

1. Le risque de " trappe à inactivité "

Il faut souligner que la comparaison entre revenus procurés par un minimum social et revenus d'activité est compliquée par plusieurs facteurs : tout d'abord, la très grande hétérogénéité du dispositif des minima sociaux lui-même est un facteur de complexité. Ensuite, la mise en oeuvre de la politique familiale , à travers les allocations familiales ou les allocations logement, a une incidence importante et peut réduire considérablement l'écart avec le revenu salarial. Par exemple, les allocations logement représentaient en moyenne en 1997, 20 % des ressources des allocataires du RMI ; 3 % de ressources étaient constituées par des allocations chômage et les prestations familiales représentaient en moyenne 9 % des ressources. Mais les aides au logement peuvent représenter 26 % des ressources des couples au RMI avec enfants 2 ( * ) .

Enfin, il faut tenir compte de facteurs propres au marché du travail qui ont également un effet dissuasif.

Comme le rappelle M. Jean-Michel Belorgey et Mme Annie Fouquet dans leur rapport de mai 2000 3 ( * ) , les années quatre-vingt ont été marquées par l'accroissement des formes d'emploi à durée déterminée (contrats à durée déterminée, intérim, stages professionnels rémunérés) pour répondre à la demande de flexibilité des entreprises, et parfois aussi des personnes : stages, contrats aidés et temps partiel représentent aujourd'hui 20 % de la population active alors que le taux était de 9 % en 1982 et de 5 % en 1971 !

Or, le travail à temps partiel génère automatiquement des ressources moindres pour son titulaire ; les contrats à durée déterminée sont perçus comme des éléments d'insécurité pour le titulaire d'un revenu d'assistance qui craint la période intermédiaire entre le moment où il peut perdre son emploi et celui où il va bénéficier à nouveau d'un minimum de ressources.

A la limite, le revenu d'assistance sécurise plus que l'emploi ce qui est pour le moins paradoxal sinon dangereux.

Ainsi, comme l'indiquait récemment dans la presse 4 ( * ) , Mme Alix de la Bretesche, présidente de la Fédération nationale des associations de réinsertion sociale (FNARS) : " Il y a une réelle mise en danger des personnes qui reprennent un travail par définition précaire au début. Avec le RMI et les APL (aides au logement), au moins on sait où on va . En revanche avec un emploi précaire, la personne n'a aucune visibilité ".

La réflexion sur la " trappe à l'inactivité " s'est fortement développée depuis un an.

Dans le rapport précité du Commissariat Général du Plan de mai 2000, M. Jean-Michel Belorgey présente les résultats d'une étude de la Direction de la prévision réalisée, sur la base de la législation applicable en 1998 qui s'est efforcée d'analyser les effets de seuil dus au changement de situation pour les ménages dont les budgets sont les plus restreints et pour lesquels les allocations familiales et les allocations logement représentent dans certains cas les trois quarts des ressources, ou bien souvent plus de la moitié.

Il en ressort que le gain net obtenu par un bénéficiaire du RMI isolé et locataire est de 1.543 francs par mois, lorsqu'il reprend un emploi à temps plein payé au SMIC. Par contre, s'il ne reprend qu'un emploi à mi-temps toujours payé au SMIC, il subit une perte nette de revenus, du fait du mode de calcul des allocations logement, dès que l'intéressement s'interrompt. Au bout de neuf mois, il apparaît un " gain négatif " de 216 francs mensuels.

Enfin, il apparaît que, d'une manière générale, plus une famille est importante, plus le gain net engendré par un retour à l'activité est faible, ce qui apparaît contradictoire avec les objectifs assignés à la politique familiale.

Les analyses économétriques sur échantillon et notamment celles de MM. Laroque et Salanié, font utilement apparaître l'incidence du système de prélèvement et de transfert en 1997 5 ( * ) .

Cette étude est notamment reprise dans le rapport du Conseil d'Analyse Economique (CAE) sur le plein emploi 6 ( * ) présenté au Premier ministre en septembre 2000.

Effet de la reprise d'un emploi (niveau)

Emploi à plein temps rémunéré au SMIC

Gain net en francs

Chômeurs

Inactifs

Ensemble

moins de 1.000

12,2 %

6,9 %

9,0 %

1.000-2.000

32,5 %

20,4 %

25,3 %

2.000-3.000

8,7 %

8,6 %

8,6 %

3.000-4.000

20,5 %

33,1 %

28,0 %

plus de 4.000

26,2 %

31,1 %

29,1 %

Total (en millions)

1,9

2,9

4,9

Emploi à mi-temps rémunéré au SMIC

Gain net en francs

Chômeurs

Inactifs

Ensemble

moins de 500

54,0 %

33,9 %

42,0 %

500-1.000

3,0 %

5,1 %

4,2 %

1.000-1.500

2,0 %

1,8 %

1,9 %

1.500-2.000

20,0 %

18,7 %

19,2 %

plus de 2.000

21,1 %

40,5 %

32,7 %

Total (en millions)

1,9

2,9

4,9

Source : MM. Laroque et Salanié (Economie et Statistiques)

Il apparaît que " 20 % de la population étudiée, essentiellement parmi les bénéficiaires d'allocations différentielles comme le RMI ou l'allocation de parent isolé, subissaient un taux d'imposition marginal supérieur à 90 %. En d'autres termes, pour 4 millions de personnes, un supplément de revenu du travail de 100 francs rapportait moins de 10 francs de revenu net. De manière plus précise, pour 57 % des chômeurs, la reprise d'un emploi à mi-temps au SMIC ne procurait qu'un gain inférieur à 1.000 francs par mois et pour 45 % des chômeurs la reprise d'un emploi à plein temps au SMIC ne procurait que moins de 2.000 francs par mois. Dans la réalité, la situation était très probablement plus défavorable encore en raison des prestations différentielles locales non prises en compte dans l'étude ".

Sur ce point, le rapport de M. Jean Pisani-Ferry souligne que les collectivités territoriales accordent souvent aux familles à bas revenus un certain nombre d'avantages sociaux (crèche, cantine, accès aux équipements collectifs, etc.) dont la perte joue aussi comme un impôt sur le travail. Par ailleurs, pour les ménages surendettés, la reprise d'un emploi implique généralement la sortie des procédures de suspension ou d'allégement des dettes antérieurement contractées.

Dans une autre analyse, toujours conduite à partir des éléments de l'enquête relative à l'emploi de 1997, MM. Laroque et Salanié s'efforcent de présenter une analyse des causes du chômage à partir des données individuelles 7 ( * ) : ils estiment que les chômeurs se classent pour 46 % dans le " non-emploi volontaire " c'est-à-dire qu'ils sont désireux de travailler mais ne le font pas notamment " parce que l'emploi auquel ils peuvent prétendre n'accroît pas leurs ressources de manière suffisante pour compenser les contraintes associées à un emploi ". 23 % des chômeurs seraient en situation de non-emploi " classique ", c'est-à-dire qu'ils ne sont pas suffisamment productifs pour que les employeurs leur offrent un salaire au moins égal au SMIC ; 31 % des chômeurs relèvent de l'autre non-emploi et sont, soit en situation de chômage keynésien, soit en situation de chômage frictionnel correspondant à une transition entre deux emplois.

Enfin, il convient de noter que dans le rapport déposé par le Gouvernement pour le débat d'orientation budgétaire en mai 2000, sont reconnus les obstacles qui pèsent sur le retour à l'activité des personnes en difficulté titulaires de minima sociaux.

" Il faut également veiller à ce que le système de prélèvements et de transferts ne vienne pas entretenir un phénomène de " trappe à inactivité ", en décourageant la reprise d'un emploi. Or, compte tenu de la réglementation actuelle, le surcroît de revenu résultant d'un travail salarié faiblement rémunéré est très modeste, tout particulièrement s'il s'agit d'un temps partiel. Par exemple, un couple marié avec deux enfants dont aucun conjoint ne travaille dispose d'un revenu (RMI + allocation logement + allocations familiales) de près de 7.200 francs. Si l'un des conjoints obtient un travail rémunéré au SMIC horaire et à mi-temps, le revenu familial reste inchangé ; s'il s'agit d'un travail à plein temps, le revenu familial s'accroît de 600 francs, soit moins de 4 francs par heure travaillée.

" L'envie ou le besoin de rester actif, de demeurer intégré dans le marché du travail existent et tous les ménages ne sont pas sensibles à ces faibles gains. A l'inverse, il serait excessif d'affirmer qu'elles sont sans effet ".

2. La réponse apportée par le crédit d'impôt

Pour mettre fin à ces phénomènes de désincitation à la reprise d'activité, diverses mesures ont été récemment mises en place : la réforme de l'allocation logement entrée en vigueur à partir de septembre 2000 ainsi que la réforme des règles d'exonération de la taxe d'habitation.

A l'issue de la Conférence de la famille du 15 juin 2001, il a été décidé de procéder en deux étapes au 1 er janvier 2001 puis au 1 er janvier 2002, à la réforme du barème des aides personnelles au logement, pour assurer une meilleure égalité de traitement des bénéficiaires quelle que soit l'origine de leurs revenus, qu'il s'agisse des revenus de transfert ou issus du travail, jusqu'à un niveau équivalent, en moyenne, aux trois quarts du niveau du RMI.

Concernant la taxe d'habitation , le Gouvernement a présenté dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2000, un dispositif tendant à exonérer du paiement de la taxe d'habitation un nombre plus important de contribuables modestes.

Mais l'élément le plus important devait être, dans l'esprit du Gouvernement, la mise en place d'une ristourne de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Votre rapporteur ne reprendra pas ce débat mais renvoie à l'excellent rapport de M. Charles Descours 8 ( * ) , qui avait montré que cette mesure était profondément injuste pour les ménages non imposables avec deux enfants ou dont l'un des conjoints ne travaille pas et qu'elle portait atteinte au principe d'universalité du financement de la protection sociale . Il avait souligné, en conséquence, que la constitutionnalité de la mesure était " douteuse ".

Sur ce point, M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des Finances, avait également bien montré, dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2001, que la mesure était particulièrement injuste envers les ménages dont l'un des conjoints ne travaille pas et qui disposent d'un revenu compris entre 1,4 et 2 SMIC.

Aussi, la commission des Finances et votre commission avaient-elles proposé un dispositif de crédit d'impôt en faveur des revenus d'activité jusqu'à 1,8 SMIC, plus neutre, plus juste et plus favorable aux familles.

Le Gouvernement aurait été bien inspiré de l'approuver puisque, le 19 décembre dernier, le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 2000-437-DC, a invalidé le dispositif de ristourne sur la CSG et la CRDS.

Le Conseil constitutionnel a relevé que si le législateur pouvait modifier l'assiette de la CSG en faveur des contribuables les plus modestes, c'était " à la condition de ne pas provoquer de rupture caractérisée de l'égalité entre les contribuables ". Or, s'agissant de l'allégement de CSG-CRDS, la mesure contestée " ne tient compte ni des revenus des contribuables autres que ceux tirés d'une activité, ni des revenus des autres membres du foyer, ni des personnes à charge au sein de celui-ci ". Le Conseil constitutionnel a donc constaté que, ce faisant, le Législateur n'avait pas pris en compte l'ensemble des facultés contributives et créé entre les contribuables une disparité manifeste contraire à l'article 13 de la Déclaration de 1789.

Bien que prévisible, la décision du Conseil constitutionnel a semble-t-il plongé le Gouvernement dans une longue réflexion : après que divers points de vue se furent exprimés au sein de la majorité plurielle en faveur, soit d'un relèvement du SMIC assorti d'un allégement des cotisations patronales, soit d'un allégement des cotisations salariales, soit d'un crédit d'impôt, le Premier ministre devait finalement arbitrer le 10 janvier dernier en faveur de cette dernière solution, préconisée par le Sénat par trois fois au cours de cet automne : lors du vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, lors du vote du projet de loi de finances pour 2001 et enfin lors du vote du projet de loi de finances rectificative pour 2000.

Le Président de la République, lors de la présentation des voeux aux forces vives de la Nation le 8 janvier dernier avait préalablement indiqué que " l'instauration d'un crédit d'impôt, déjà expérimenté dans d'autres pays, pourrait notamment permettre aux actifs les plus modestes de ne pas voir leurs revenus stagner, voire diminuer, quand ils reprendront une activité. "

Suivant ces avis de sagesse réitérés, le Conseil des ministres du 31 janvier dernier, a adopté le projet de loi portant création d'une prime pour l'emploi (PPE) qui, sur le fond, s'apparente à un dispositif de crédit d'impôt , sous une appellation qui n'a pour seul avantage que d'être différente de celle retenue en décembre dernier par notre Assemblée.

La prime pour l'emploi, qui prend la forme d'un article additionnel au code général des impôts, serait attribuée à chaque membre du foyer fiscal ou non salarié. Les revenus du foyer ne devraient pas dépasser un certain montant. Le revenu procuré par l'activité professionnelle devrait être compris entre 0,3 et 1,4 SMIC. Le montant de la prime serait croissant jusqu'au niveau d'un SMIC à temps plein et décroissant pour les revenus d'activité compris entre 1 et 1,4 SMIC. Le montant de la prime, qui serait versée au plus tard le 15 septembre 2001, serait majoré dans les foyers où un seul des deux conjoints travaille. Elle serait augmentée en fonction du nombre de personnes à charge.

Il est à noter que lors de la présentation du projet de loi au Conseil des ministres, le Président de la République a souhaité que " le débat parlementaire sur ce texte permette, à revenu égal, d'éviter les inégalités entre les familles selon que leurs revenus proviennent d'un ou de deux salaires. "

C. UNE OFFRE DE TRAVAIL À DÉVELOPPER DANS LE SECTEUR MARCHAND

Le second grand facteur qui explique un maintien élevé du nombre de titulaires de minima sociaux tient à la difficulté de faire coïncider les aspirations de ces personnes à l'emploi avec les besoins et les contraintes des entreprises.

1. Une exclusion durable de l'emploi

Dans le rapport de juin 2000 de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale 9 ( * ) , Mme Marie-Thérèse Join-Lambert, présidente, distingue quatre catégories d'allocataires du RMI.

Le premier groupe rassemble les individus qui cumulent le plus grand nombre de difficultés : ils sont éloignés du marché du travail, ont des problèmes de santé, sont isolés socialement, ont peu de contacts avec les organismes sociaux, sont relativement âgés et ont un faible niveau de formation.

Un deuxième groupe est composé de personnes fortement éloignées de l'emploi mais qui continuent à en rechercher. Il s'agit de gens plus jeunes dans des zones où le chômage est moins fort et qui ont toujours des contacts avec des organismes sociaux.

Le troisième groupe comprend une population davantage insérée dans l'emploi mais toutefois confrontée à une grande précarité ; les relations familiales ou administratives sont suivies mais les périodes de travail sont courtes et l'emploi retrouvé est le plus souvent un contrat emploi-solidarité (CES) ou un contrat emploi consolidé (CEC).

Enfin, il reste les allocataires du quatrième groupe , insérés professionnellement, en bonne santé, disposant d'une assise familiale solide, diplômés et relativement jeunes. Ces derniers parviennent à sortir rapidement du RMI, même si leurs contacts avec les organismes sociaux sont faibles.

La reprise économique a certes un effet positif en termes de diminution du nombre de titulaires du RMI, mais il faut bien voir qu'elle a pour l'instant une incidence sur les personnes les plus proches de l'emploi -celles du quatrième groupe-, tandis que les allocataires qui sont plus âgés et dotés d'une faible aptitude professionnelle sont encore dans le dispositif.

Une étude de la DREES, publiée en octobre 2000 10 ( * ) , montre ainsi que la diminution des effectifs du RMI a porté en priorité sur des jeunes de moins de 30 ans, le plus souvent des hommes seuls avec ou sans enfant, et qui étaient entrés dans le dispositif du RMI depuis moins d'un an.

Les études statistiques sur les durées de versement de l'allocation montrent que si près d'un tiers des allocataires du RMI ne perçoit l'allocation que pendant moins de six mois, à l'inverse plus d'un tiers des allocataires reste dans le dispositif plus de quatre ans .

Il est symptomatique que deux allocataires sur trois restent dans le dispositif plus de six mois . Plus une personne reste longtemps en dehors de la vie professionnelle, plus il sera difficile pour elle de retrouver sa place dans l'entreprise.

L'INSEE avait publié en 1999 11 ( * ) les résultats d'une étude approfondie sur le devenir des allocataires du RMI, afin d'éclairer les raisons pour lesquelles 30 % des allocataires de décembre 1996 ne percevaient plus le RMI un an plus tard soit le 1 er janvier 1998.

La reprise d'une activité rémunérée n'était un motif de sortie que dans deux tiers des cas : le taux de sortie vers l'emploi ou un stage rémunéré était donc de 20 % seulement .

Les autres motifs de sortie sont liées à la perception d'une autre allocation (chômage, AAH, API ou minimum vieillesse), à un changement de situation familiale ou encore à des " problèmes administratifs ".

Une autre étude de la DREES 12 ( * ) , qui porte sur des données de 1998, fait apparaître que la création d'emplois nouveaux, en nombre significatif, par l'économie française ne suffirait pas, et de loin, à effacer le retard pris en matière de réinsertion des allocataires du RMI.

L'étude précitée s'appuie sur une modélisation simple à partir de l'identification d'un certain nombre de paramètres structurels. Il en ressort que :

- une hausse de 100.000 emplois conduit à une baisse de 13.000 allocataires du RMI ;

- la croissance autonome du nombre d'allocataires, liée à la pression démographique, étant estimée à environ 60.000 par an. Il faut en conséquence une augmentation de l'ordre de 400.000 par an de l'emploi pour stabiliser le nombre d'allocataires si les autres variables sont constantes (barème, taux de couverture du régime d'assurance chômage et du régime de solidarité).

Cette étude repose sur des données recueillies de 1992 à 1999 : elle ne constitue pas une projection en dynamique, mais elle reflète une situation instantanée.

Cette situation est d'autant plus paradoxale que l'on sait qu'il existe aujourd'hui dans l'économie des pénuries de main-d'oeuvre en particulier dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics et de l'hôtellerie-restauration.

2. Les besoins des entreprises

La Chambre de commerce et d'industrie de Paris a présenté une étude intéressante en décembre dernier sur cette question 13 ( * ) .

Cette étude fait ressortir que la pénurie de main-d'oeuvre se fait sentir non seulement dans des domaines où la formation demandée est élevée, tels que les services informatiques et l'édition de logiciels, mais aussi dans des activités où une qualification est plus aisée à acquérir : métiers d'employé polyvalent en hôtellerie ou de serveur en restauration ; métiers de bouche ; métiers de caissière et employés de libre service dans le secteur de l'alimentation ; divers métiers d'ouvrier non qualifié, de technicien ou d'agent de maîtrise dans le secteur du bâtiment et des travaux publics ; métiers d'ouvrier non qualifié du bois, de la mécanique ou de l'électricité dans l'industrie où 72 % des établissements rencontrent une difficulté lors d'un recrutement ; emplois de conducteur de véhicule dans le secteur des transports.

Il ressort également de cette étude que dans divers secteurs, la moitié des emplois proposés sont à durée indéterminée.

Sur ce point, votre rapporteur ne peut que renvoyer à l'excellent rapport 14 ( * ) de notre collègue, M. Alain Gournac, qui a conduit à l'adoption d'une proposition de loi par notre Assemblée le 14 décembre dernier.

Le dernier paradoxe enfin est que les dispositifs d'aide à l'emploi qui sont si nombreux 15 ( * ) et dont on connaît la complexité ne permettent pas de réduire en profondeur le nombre de titulaires de minima sociaux alors que selon une étude de l'INSEE, les trois quarts des allocataires du RMI se déclarent bien à la recherche d'un emploi 16 ( * ) .

Parmi le quart restant, 33 % des allocataires déclarent avoir renoncé à la recherche d'un travail pour des raisons de santé, 19 % pour des raisons familiales (difficultés de faire garder les enfants notamment) et 9 % en raison de l'absence d'emploi dans leur domaine d'activité.

Il est important de souligner que, malgré les considérations de nature économique sur les effets de désincitation à la reprise d'un travail résultant des minima sociaux, beaucoup de titulaires du RMI et de l'ASS sont désireux de reprendre une activité professionnelle, parce que celle-ci leur apporte une reconnaissance sociale et un sentiment de dignité retrouvée que les équations ne peuvent prendre en compte.

Il est révélateur que dans l'analyse réalisée par l'INSEE sur les trajectoires de sortie du RMI 17 ( * ) , les deux tiers des titulaires du RMI qui ont repris un emploi s'estiment dans une meilleure situation financière que lorsqu'ils percevaient l'allocation et que 82 % des anciens bénéficiaires déclarent " qu'ils se sentent mieux " depuis qu'ils ont repris un travail.

Il est donc aujourd'hui d'autant plus important d'inventer des mécanismes nouveaux pour mettre en relation ce besoin de main-d'oeuvre exprimé par les entreprises et la ressource humaine considérable en valeur et en compétence que représentent les personnes bénéficiant des minima sociaux.

Tel est l'objet du revenu minimum d'activité présenté par le président et le rapporteur général de la commission des Finances.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

La question de l'activation des dépenses passives mobilisées au titre des minima sociaux a été évoquée depuis longtemps .

M. Jean-Paul Virapoullé, député de La Réunion, avait présenté en septembre 1996 , des " éléments de réflexion " intitulés " expérimenter le revenu minimum d'activité (RMA) ". Le dispositif original qu'il proposait avait vocation à s'appliquer tout d'abord dans les départements d'outre-mer.

Il s'agissait d'autoriser la conclusion de contrats de travail prévoyant une rémunération, exonérée de cotisations sociales, calculée " de telle sorte que le cumul du salaire et de l'allocation (de RMI) soit égal à la rémunération mensuelle minimale en vigueur ".

L'intéressé conservait son droit au RMI : les revenus supplémentaires n'étaient pas pris en compte au titre de ses ressources de manière à ce que l'allocation puisse venir compléter le niveau du salaire d'activité. Le dispositif était mis en oeuvre dans le cadre de " convention revenu minimum d'activité " pour des emplois du secteur marchand.

Aussi, lors de la discussion à l'Assemblée nationale en avril 1997 du projet de loi relatif au renforcement de la cohésion sociale , précurseur de la loi relative à la lutte contre les exclusions, M. Jacques Barrot, alors ministre du Travail et des Affaires sociales, avait fait adopter, sous l'impulsion de M. Jean-Paul Virapoullé, une disposition autorisant, à titre expérimental, les bénéficiaires du RMI depuis plus de trois ans, à cumuler durant une période limitée à un an leur allocation avec le revenu d'une activité professionnelle ( art. 11 bis du texte adopté ).

Par ailleurs, lors de la discussion de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions en juin 1998 , le Sénat avait adopté, à l'initiative du rapporteur de votre commission, M. Bernard Seillier, un dispositif novateur visant précisément à résoudre la question du caractère peu incitatif de la reprise d'un travail à temps partiel pour les titulaires du RMI, alors même que ce type de contrat est souvent un moyen privilégié de retour à l'emploi pour des personnes depuis longtemps au chômage.

Le principe était de prévoir, dans le cadre d'un contrat initiative-emploi (CIE) et pendant toute la durée de celui-ci, soit pendant deux ans, la possibilité pour le titulaire de conserver son allocation de RMI. La convention de CIE serait alors devenue convention de RMA. Cette disposition a toutefois été rejetée à la fois par le Gouvernement et l'Assemblée nationale, alors que le débat actuel sur la " prime pour l'emploi " confirme bien la nécessité soulignée alors par votre commission d'améliorer les revenus liés à la reprise d'une activité.

La notion de RMA, telle qu'elle ressortait des initiatives antérieures à la présente proposition de loi, cherchait à répondre à la fois à la nécessité d'améliorer les revenus nets des personnes reprenant une activité et à celle d'alléger le coût de l'embauche de ces personnes pour les entreprises.

La création d'un dispositif de crédit d'impôt pour les revenus d'activité modeste permet de clarifier les enjeux et de recentrer le dispositif du RMA.

A. UN DISPOSITIF SIMPLE ET INNOVANT

Dès l'automne 1999 , au cours d'une conférence de presse sur l'actualité économique, la commission des Finances avait proposé un mécanisme simple qui permettrait à une entreprise qui recruterait un bénéficiaire du RMI ou un chômeur indemnisé de longue durée, de percevoir une contrepartie payée par l'Etat et qui correspondrait au montant de l'allocation de solidarité précédemment versée à la personne en situation d'exclusion.

Cette proposition de loi a été déposée le 25 avril 2000 : elle a repris toute son actualité au cours de la discussion de la loi de finances pour 2001, puisque, comme l'a souligné M. Philippe Marini, rapporteur général, en séance publique le 24 novembre 2000, elle a naturellement vocation à venir compléter le système du crédit d'impôt en redonnant du pouvoir d'achat aux salariés les plus défavorisés et en favorisant l'accès au monde de l'entreprise aux personnes qui en sont aujourd'hui le plus éloignées.

La proposition de loi repose donc sur trois éléments essentiels.

1. Trois éléments essentiels

Tout d'abord, le revenu minimum d'activité prend la forme d'une convention conclue entre le bénéficiaire du minimum social, l'employeur et l'Etat.

Extrait du dossier de la Conférence de presse
de la commission des Finances du 7 octobre 1999
sur " les dossiers d'actualité économique "

Un constat : il faut mettre fin à cette spirale de l'inactivité mise en place par le RMI et développer grâce au RMA un cercle vertueux de l'activité.

En effet, le niveau élevé de certaines prestations sociales en font souvent un frein puissant à la reprise du travail et à la réinsertion sociale. Par exemple, le bénéficiaire du RMI hésite à accepter un poste relativement précaire qui le conduirait à abandonner son allocation et les exonérations diverses qui y sont associées. Ceci nourrit l'exclusion sociale et a un coût élevé pour l'Etat : même le Conseil d'analyse économique (CAE) placé auprès du Premier ministre, l'a récemment admis.

Lutter contre le chômage et l'exclusion sociale

Le revenu minimum d'activité (RMA) a pour buts principaux :

de favoriser la reprise d'activité des bénéficiaires du RMI et des chômeurs de longue durée, s'agissant des personnels les moins qualifiés ;

•  d'augmenter le niveau de l'emploi et de réduire l'exclusion sociale.

Une prestation sociale résolument tournée vers l'activité

Le niveau des prestations délivrées aux titulaires du RMI et aux chômeurs en fin de droit contraste avec leur faible retour à l'activité : les prestations ne servent plus qu'à l'assistance. On peut dès lors se demander si le RMI n'est pas désormais " un revenu minimum d'inactivité ". Il est au demeurant frappant de rappeler que la charge du RMI pour l'Etat a augmenté de 30 % depuis 1996, lorsque nous connaissions une période de vive croissance de l'économie.

Par ailleurs, de nombreux gisements d'emplois existent mais ne sont pas occupés pour deux raisons : trop coûteux pour les entreprises (poids des charges sociales sur les bas salaires) ; trop faiblement rémunérateurs pour les bénéficiaires de prestations d'assistance et notamment du RMI (leur revenu augmente, mais leur pouvoir d'achat peut diminuer en raison de la perte du bénéfice de certaines prestations ou bien des impositions nouvelles auxquelles ils deviennent assujettis, comme les taxes locales).

Le RMA veut donc renverser ces effets pervers en proposant une solution servant les intérêts des exclus comme des entreprises par une réorientation totale des aides publiques.

Un mécanisme simple

Le bénéficiaire du RMI ou le chômeur indemnisé de longue durée devenant salarié perçoit un RMA. Celui-ci correspond d'une part au salaire qui est versé par l'entreprise, et d'autre part à un complément de ressources payé par l'Etat. Cela doit lui assurer un gain net de revenu par rapport à sa prestation d'origine. Il y a un intérêt objectif pour le bénéficiaire à travailler.

Par souci de simplification, le RMA est versé par l'entreprise qui touche également de l'Etat le complément de ressources. Celui-ci n'est pas soumis aux charges sociales.

Ceci se fait dans le cadre d'un contrat de longue durée (cinq ans) qui assure au salarié une stabilité de ses revenus et qui définit les engagements auxquels souscrit l'entreprise vis-à-vis de l'Etat. Le niveau du RMA tient compte de la prestation d'origine et pourrait par exemple se situer à 1,2 RMI, c'est-à-dire de 20 % le montant de la prestation antérieure.

Le RMA profite à tous

Pour l'ancien bénéficiaire de prestations d'assistance : il retrouve un emploi ; il est assuré de ne pas perdre de ressources ; il jouit d'une forte stabilité (cinq ans) qui lui permet de faire des projets personnels et professionnels et de véritablement sortir de l'exclusion sociale ;

•  Pour les entreprises : cette aide de l'Etat diminue singulièrement le coût du travail pour les bas salaires et permet, ainsi, de rendre rentables certaines activités qui ne l'étaient pas toujours ; elle sera donc créatrice de nouveaux emplois marchands ;

•  Pour l'Etat : meilleure utilisation des sommes consacrées aux personnes défavorisées : perspective de voir ces dépenses se réduire en cas d'emploi durable des bénéficiaires : mise en oeuvre d'une politique contractuelle de l'emploi avec les entreprises ;

•  Pour la société : il est préférable de favoriser le retour à l'activité plutôt que de se cantonner dans une simple assistance sans lendemain.

Bien évidemment, de nombreux points restent à préciser, à commencer par le chiffrage, les seuils de ressources, etc. avec le souci de proposer un mécanisme aussi simple que possible pour les entreprises comme les exclus, et avec celui d'éviter les effets d'aubaines.

Le RMA signifie moins de charges pour les entreprises, plus de stabilité, de revenu, de perspectives d'avenir pour les bénéficiaires, une dépense mieux orientée pour l'Etat et l'UNEDIC. On passerait ainsi de l'insertion, devenue simple assistance déresponsabilisante, à la promotion de l'emploi, de l'activité, productive et profitable à tous. Nous avons tous à y gagner !

Ensuite, le salaire versé correspond à un revenu minimum d'activité qui comprend en fait deux parts : une " aide dégressive " versée à l'entreprise pendant trois ans qui correspond au départ à l'allocation de minimum social que recevait le bénéficiaire ; la seconde part est le " salaire négocié " et il correspond à la différence entre le montant du revenu minimum d'activité et celui de l'aide dégressive.

Enfin, le montant du revenu minimum d'activité est mis en place dans le cadre d'un accord de branche .

2. Trois innovations importantes

La proposition de loi présente ainsi trois innovations importantes.

Tout d'abord, elle fait délibérément le choix de ne pas procéder à des renvois pour modifier le code du travail ou les lois relatives aux minima sociaux , et notamment la loi du 1 er juillet 1988 relative au revenu minimum d'insertion.

Outre qu'il est important de ne pas revenir sur un texte dont on connaît la valeur symbolique pour une grande partie de l'opinion publique, même s'il est sans doute perfectible, la solution retenue présente aussi l'avantage de mettre en place un dispositif d'une grande lisibilité . Sur ce point, les personnes reçues au cours des auditions de votre rapporteur, et notamment les représentants des entreprises, se sont félicitées de la très grande clarté de ce texte, clarté qui rompt avec certains défauts trop souvent soulignés des textes législatifs. L'un d'entre eux a même commencé son entretien par un " enfin ! " démonstratif de sa satisfaction.

L'objectif de simplicité n'aboutit pas pour autant à des incohérences : le mécanisme proposé est parfaitement compatible avec les dispositions existantes ; il vient seulement les compléter sans les remplacer ou les affaiblir.

Ensuite, ce dispositif est résolument orienté vers l'insertion des personnes en difficulté dans le secteur marchand . C'est essentiel car on sait que 80 % des titulaires du RMI qui retrouvent un emploi aidé le font dans le secteur non marchand par le biais d'un CES, d'un CEC ou d'un emploi-jeune et que 20 % seulement accèdent à un emploi aidé sous la forme d'un CIE.

Le RMA fait délibérément le choix d'éviter un ciblage sur certains publics qui aboutirait à restreindre l'effet des aides publiques tout en compliquant la tâche des gestionnaires d'entreprises.

Le dispositif est orienté vers tous les titulaires de minima sociaux depuis six mois au moins afin d'assurer un vrai " appel d'air " vers le secteur marchand. De ce point de vue, ce texte n'est pas sans lien avec la proposition de loi n° 248 (1994-1995) que notre collègue, M. André Jourdain, avait déposée pour permettre la conclusion de conventions de coopération entre les ASSEDIC et les employeurs prévoyant des allégements de charges sociales en cas d'embauche d'un chômeur.

Enfin, il est important de souligner que ce texte rompt avec la logique discrétionnaire des aides au retour à l'emploi en secteur marchand , telles qu'elles ont été mises en place dans le cadre du code du travail.

Le RMA se différencie des dispositifs existants, y compris du contrat initiative-emploi (CIE) mis en place par Jacques Barrot en août 1995 qui avait étendu et amélioré le contrat pour l'emploi des bénéficiaires du RMI (CERMI), introduit par le Gouvernement d'Edouard Balladur en février 1995.

Le CIE a eu incontestablement une efficacité puisque, depuis sa création jusqu'à la fin de 1998, 860.000 CIE ont été signés par 475.000 établissements, ce qui témoigne de la capacité des entreprises à assurer une mission de réinsertion.

Il reste que le CIE est financé par une subvention de l'Etat qui fait l'objet d'un contingentement budgétaire et dont l'attribution est subordonnée à l'avis préalable des services de l'ANPE et de la DDTEFP sur les demandes de conventions présentées par les entreprises.

Le contrat initiative-emploi (CIE)

Le CIE est entré en vigueur en application de la loi du 4 août 1995. Il a remplacé le contrat de retour à l'emploi (CRE) et le contrat pour l'emploi des bénéficiaires du RMI (CERMI).

Le CIE s'adresse aux chômeurs de longue durée (plus de douze mois), aux titulaires du RMI ainsi qu'à leur conjoint ou concubin, aux bénéficiaires de l'ASS et de l'allocation de veuvage, aux personnes de plus de 50 ans privées d'emploi, aux handicapés, aux femmes isolées assumant ou ayant assumé des charges de famille, aux Français ayant involontairement perdu leur emploi à l'étranger, aux détenus libérés, aux jeunes chômeurs de 18 à 26 ans sans condition de durée et aux personnes ayant bénéficié d'un contrat aidé dans le secteur non marchand. Les conditions d'éligibilité sont vérifiées par l'ANPE.

La conclusion d'un CIE entre l'employeur privé et l'Etat donne lieu à l'exonération des cotisations sociales patronales et à une aide forfaitaire : 1.000 francs par mois pour l'embauche d'un demandeur d'emploi de plus de 24 mois et 2.000 francs par mois pour l'embauche d'un demandeur d'emploi depuis plus de 36 mois ou d'autres personnes visées dans les catégories ci-dessus, notamment les titulaires de minima sociaux.

Dans la loi de finances pour 2001, le CIE a entraîné l'inscription de 7,1 milliards de francs de crédit au budget de l'emploi, soit 2,8 milliards de francs au titre des primes versées à l'employeur (pour 125.000 CIE prévus en 2001) et 4,3 milliards de francs au titre des exonérations de cotisations sociales compensées à la sécurité sociale.

Le RMA est un dispositif qui aura un caractère automatique pour les entreprises qui y recourront. En d'autres termes, l'entrepreneur n'a plus à s'interroger sur la position que prendra l'Etat et ses motivations avouées ou supposées, car il sait que le mécanisme du RMA est un véritable droit dès l'embauche du titulaire d'un minimum social depuis six mois au moins.

L'autre avantage est qu'il apparaît une relation directe entre le montant de l'allocation qui était versée à l'allocataire et le nouveau salaire d'activité. Il s'agit d'un véritable système d'activation des dépenses passives d'indemnisation ou d'assistance. Il faut tenir compte également des gains qui résultent pour l'économie du retour au travail de personnes antérieurement plongées dans une situation d'exclusion appelée à se pérenniser.

Le RMA est un véritable dispositif de lutte contre le chômage structurel par un allégement du coût du travail pour les entreprises qui pratiqueront le recrutement de personnes relevant d'un minimum social et assureront ainsi leur réinsertion professionnelle.

B. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur a déjà largement exposé ci-dessus les principales caractéristiques du RMA, par ailleurs commentées avec précision et clarté dans l'exposé des motifs de la proposition de loi.

Il présentera donc dans cette partie les modifications que la commission a souhaité ajouter au texte initial sans en altérer la cohérence.

Le mécanisme du RMA pourrait présenter une difficulté que votre rapporteur ne vous proposera pas de rectifier à ce stade de la discussion parlementaire.

Dans la mesure où les allocations des titulaires de minima sociaux sont des allocations différentielles, elles sont effectivement variables suivant le niveau des ressources des intéressés, mais aussi en fonction de la dimension du foyer familial. Cela pourrait surprendre les entreprises candidates au RMA puisque le niveau de l'aide auquel elles auraient droit pourrait varier selon la catégorie du minimum social envisagée, le niveau de ressources de l'intéressé et le nombre de personnes à sa charge.

Au regard de l'objectif de réinsertion, ce dispositif ne serait pas dépourvu de logique puisque ce sont les salariés qui ont les allocations de minimum social les plus importantes -et qui ont donc le moins d'intérêt économique à reprendre un travail- qui seraient donc les plus sollicités par les entreprises. Les personnes concernées auraient une marge de manoeuvre accrue pour améliorer le niveau du " salaire négocié " qui détermine leur revenu disponible.

Par ailleurs, le mécanisme présenterait ainsi l'avantage de s'inscrire en cohérence avec le dispositif de crédit d'impôt en faveur des ménages les plus modestes qui aboutit, en parallèle, à tenir compte des charges familiales.

Il serait certes envisageable de modifier le dispositif en faisant éventuellement référence à un montant forfaitaire d'aide dégressive qui devrait correspondre au montant moyen des diverses allocations de minimum social effectivement versées.

Toutefois, introduire cet amendement à ce stade de la discussion risquerait de soumettre le texte à l'invocation de l'article 40 de la Constitution par le Gouvernement. Il est donc préférable actuellement de conserver le mécanisme en l'état car, comme le soulignent les auteurs du texte, " le coût de la présente proposition de loi est nul. Elle est même susceptible d'entraîner des économies budgétaires ".

Les impératifs auxquels la Constitution de 1958 soumet les initiatives parlementaires en matière financière conduisent ainsi à ne pas modifier, au cours de cette première lecture, le mécanisme de calcul de l'aide dégressive.

Par ailleurs, votre commission a souhaité améliorer le texte initial de la proposition de loi sur trois points.

1. La nécessité d'une formation des salariés réinsérés

Il apparaît incontestable que les entreprises devront consentir un effort en termes de formation des personnes qu'elles embaucheront.

Il pourra s'agir d'une formation mais aussi d'actions de tutorat afin de rappeler simplement au nouveau salarié, ne serait-ce que les règles élémentaires de ponctualité et de présentation.

Toutes les personnes entendues par votre rapporteur ont insisté sur la nécessité absolue d'inscrire la formation dans tout contrat de travail d'une personne entrée depuis longtemps dans un mécanisme de minimum social. Il est donc proposé d'indiquer que l'accord de branche relatif au RMA portera sur les actions de formation ou de tutorat au profit des bénéficiaires. Ces mesures qui devront être clairement prévues dans l'accord de branche pourront, au demeurant, être mises en oeuvre en mobilisant les financements de droit commun au titre de la formation professionnelle.

On ne peut pas exclure d'ailleurs que les collectivités territoriales et notamment les départements, qui doivent consacrer une fraction de leurs crédits budgétaires à l'insertion des titulaires du RMI, décident par elles-mêmes de participer aux frais de formation des personnes issues du RMI et bénéficiant du futur RMA. Toutefois, il est peut-être prématuré d'inscrire d'ores et déjà cette faculté de participation des collectivités locales dans le texte, qui pourrait être interprétée comme un possible risque de transfert de charges.

2. La prise en compte des frais de retour à l'emploi

Par ailleurs, ce dispositif nouveau soulève la question du maintien des procédures d'intéressement.

La loi du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions a réformé et étendu les mécanismes qui permettent à une personne qui reprend un travail de conserver pendant une durée limitée le bénéfice du RMI, de l'ASS, de l'AI, de l'API ou de l'allocation de veuvage.

L'intéressement est souvent opaque pour les intéressés qui ont du mal à savoir combien de temps et à quel niveau ils conservent leur allocation antérieure. De surcroît, il est largement tributaire du fait que le contrôle des ressources des titulaires du RMI est effectué sur la base de déclarations trimestrielles. L'intéressement se justifie pourtant car il permet d'assurer le financement des dépenses nouvelles qui sont entraînées par la reprise d'un emploi : achat de vêtements, frais de transport, recherche d'une garde d'enfants, etc.

Il importe là encore que la négociation de branche portant sur le montant du RMA mette en place une " prime de retour à l'activité " qui aura un caractère temporaire et qui viendra naturellement se substituer au mécanisme de l'intéressement.

Bien entendu, les modalités de la prise en charge des frais de retour à l'emploi s'inscrivent dans le cadre de la négociation salariale globale : à cet égard, le supplément salarial par rapport au SMIC, éventuellement prévu par la négociation de branche, peut être un élément de prise en compte des frais de reprise d'un emploi.

Cumul d'un minimum social avec un revenu d'activité

Afin de faciliter l'insertion professionnelle des bénéficiaires de minima sociaux, l'article 9 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions pose le principe que les personnes bénéficiaires de certains minima sociaux peuvent cumuler leur allocation avec des revenus tirés d'une activité professionnelle salariée ou non salariée, selon des modalités fixées par voie réglementaire.

Ces modalités de cumul sont fixées par le décret n° 98-1070 du 27 novembre 1998 pour ce qui concerne le RMI, l'AI, l'ASS et l'API. Les règles concernant l'allocation veuvage sont définies par le décret n° 99-286 du 13 avril 1999.

L'objectif est d'encourager la transition vers l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux par un renforcement et une harmonisation des règles de cumul, afin de permettre aux allocataires de faire face aux dépenses entraînées par la prise d'un emploi et créer des conditions favorables à la reprise d'une activité.

S'agissant, par exemple du RMI ou de l'API, le mécanisme mis en place est conçu de manière à ce que les allocataires qui prennent une activité professionnelle puissent cumuler les revenus tirés de cette activité professionnelle avec leur allocation dans les conditions suivantes :

- pendant trois mois, un cumul intégral ;

- pendant neuf mois, un cumul de 50 %, c'est-à-dire que le montant de l'allocation est réduit de 50 % du revenu d'activité.

Du fait des modalités de gestion du RMI et de l'API (déclarations trimestrielles de revenus, avec une prise en compte décalée d'un trimestre sur l'autre des ressources pour le calcul de l'allocation), les règles suivantes ont été retenues pour les revenus d'activité salariée ou non salariée autres que ceux tirés d'un contrat emploi-solidarité ou de la création ou reprise d'une entreprise :

- pendant le trimestre de droit de la prise d'une activité, les revenus sont intégralement cumulables avec l'allocation ;

- lors de la première révision trimestrielle qui suit la reprise d'activité, les revenus du trimestre écoulé sont appréciés en moyenne mensuelle et affectés d'un abattement de 50 %. Ceci permet de tenir compte du cas dans lequel l'activité n'a pas atteint trois mois au cours du premier trimestre ;

- pour les trois révisions trimestrielles suivantes, les revenus du trimestre écoulé sont affectés d'un abattement de 50 %.

Des règles particulières s'appliquent pour les allocataires exerçant une activité dans le cas d'un CES et pour ceux qui créent ou reprennent une entreprise.

Près de 145.000 titulaires du RMI, soit 12 % des allocataires, bénéficieraient de l'intéressement ainsi que 50.000 bénéficiaires de l'ASS (10,5 %) et 10.000 allocataires de l'API (6,5 %).

3. La prévention de tout recours abusif au dispositif

Il convient d'éviter toute forme d'abus qui se ferait au détriment des salariés : c'est pourquoi votre commission a souhaité ajouter une disposition, au demeurant classique, qui visera à éviter qu'une entreprise, qui a procédé à des licenciements au cours des derniers mois, puisse embaucher directement une personne dans le cadre d'un RMA.

Par ailleurs, elle a proposé de préciser explicitement que le contrat de travail du bénéficiaire du RMA est bien un contrat de travail à durée indéterminée.

*

* *

Votre commission vous propose d'adopter les conclusions sur la proposition de loi qui permet, dans un cadre juridique simple et clair, d'afficher un objectif de réinsertion professionnelle des personnes en difficulté dans le monde de l'entreprise.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier
Instauration du revenu minimum d'activité (RMA)

Cet article pose le principe de l'instauration d'un RMA pour les personnes relevant d'un minimal social depuis six mois au moins. Cet article effectue un renvoi opportun à la disposition du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui dispose que " chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi ".

Par rapport au texte de la proposition de loi initiale, votre commission a prévu de citer expressément les minima sociaux pour lesquels le RMA serait applicable. La liste des allocations est fixée à l'article 5 ci-après.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

Art. 2
Convention de RMA

Cet article prévoit que le RMA est mis en oeuvre après conclusion d'une convention d'embauche entre le bénéficiaire, l'employeur et l'organisme chargé de la gestion de l'allocation de minimum social.

Le bénéficiaire perçoit une rémunération salariale qui correspond en montant au niveau du revenu minimum d'activité tel qu'il doit être fixé par un accord de branche professionnelle.

Le revenu minimum d'activité comprend deux parts :

- la première part est appelée " aide dégressive " et elle est versée à l'employeur qui l'affecte à la rémunération du nouvel embauché, ce dernier tirant ainsi l'ensemble de ses ressources de son employeur, au lieu de bénéficier d'un revenu d'assistance ;

- la seconde part est dénommée " salaire négocié " et son montant est égal à la différence entre le montant total du RMA et l'aide dégressive susvisée ; ce montant serait appelé à progresser au fur et à mesure de la diminution de la première part tout au long de la période de trois ans couverte par la convention.

Par rapport à la proposition de loi initiale, votre commission a procédé à quelques modifications rédactionnelles et a préféré se référer à " l'institution gestionnaire du minimum social " plutôt qu'à l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC). En effet, si l'UNEDIC est chargée de gérer l'ASS, il convient de remarquer que l'API est gérée par les caisses d'allocations familiales et que l'allocation de veuvage est gérée dans le cadre de la branche vieillesse. La formule proposée par la commission est donc la plus large possible.

Dans les départements d'outre-mer, l'Etat pourra déléguer la conclusion de la convention de RMA aux agences locales d'insertion.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

Art. 3
Mise en oeuvre du RMA par un accord de branche

Cet article prévoit que le RMA est mis en oeuvre dans le cadre d'un accord de branche professionnel. Le choix de la branche apparaît justifié, car il permet de tenir compte des pratiques salariales en vigueur dans une branche déterminée, ainsi que des caractéristiques des offres d'emploi dans cette branche.

Par rapport au dispositif initial, proposé par MM. Alain Lambert et Philippe Marini, votre commission a souhaité tout d'abord ne plus faire référence à la notion de salaire minimum de branche, préférant ainsi laisser toute liberté aux partenaires sociaux de fixer le RMA au niveau souhaitable. En tout état de cause, ce dernier ne saurait être inférieur au montant du SMIC.

Par ailleurs, votre commission a prévu que l'accord de branche devrait porter également sur :

- les mesures de formation ou de tutorat qui semblent indispensables en faveur des personnes susceptibles de bénéficier du RMA ;

- la prise en charge des frais de retour à l'emploi du salarié ; ce dernier ne devrait en effet ne plus avoir droit aux mesures d'intéressement, car la signature de la convention de RMA mettra fin au versement du minimum social à l'intéressé.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

Art. 4
Contrat de travail à durée indéterminée

Cet article prévoit que le contrat de travail du bénéficiaire du RMA est obligatoirement un contrat de travail à durée indéterminée (CDI).

Cette disposition est de nature à réduire les risques de précarité auxquels s'exposent les titulaires d'un minimum social, lorsqu'ils reprennent une activité rémunérée. Près de la moitié des contrats de travail, dont relèvent les personnes qui sont sortis du RMI, sont des contrats à durée déterminée. La mise en place du RMA devrait réduire sensiblement cette proportion.

Par rapport au texte initial de la proposition de loi, votre commission a choisi de prévoir plus clairement l'obligation de la signature d'un CDI. La formule choisie par les auteurs de la proposition de loi visait à montrer par ailleurs que le contrat de RMA était un contrat de travail de droit commun qui ouvrait droit, pour les entreprises, aux mêmes exonérations que celles généralement applicables, notamment pour les bas salaires. Votre commission a considéré qu'en l'absence de dispositions écartant clairement le bénéfice des exonérations de droit commun, celles-ci demeureraient entièrement applicables.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

Art. 5
Minima sociaux ouvrant droit au RMA

Cet article fixe la liste des minima sociaux ouvrant droit au RMA par référence à ceux pour lesquels la loi d'orientation du 29 juillet 1998, relative à la lutte contre les exclusions, a prévu d'appliquer des mécanismes d'intéressement au retour à l'activité. Il s'agit des cinq minima sociaux versés à des personnes pouvant accéder directement à un emploi en entreprise.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

Art. 6
Catégories d'employeurs pouvant conclure une convention de RMA

Cet article, qui est le seul de la proposition de loi à faire référence à une disposition du code du travail, est destiné à fixer la liste des employeurs pouvant recruter des titulaires de minima sociaux dans le cadre d'une convention de RMA.

Ces employeurs sont les mêmes que ceux habilités à conclure un contrat initiative emploi (CIE) : il s'agit, à l'exception des particuliers, de tous les employeurs assujettis au régime d'assurance chômage, ainsi que les employeurs de pêche maritime.

Sont donc compris dans le champ d'application de la mesure :

- les établissements industriels et commerciaux ou agricoles ainsi que les groupements d'employeurs ;

- les offices publics et ministériels, les professions libérales, les sociétés civiles, les syndicats professionnels et les associations ;

- les établissements publics industriels et commerciaux, les sociétés d'économie mixte et les entreprises nationales.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

Art. 7
Prévention du risque d'un recours abusif au licenciement

Cet article reprend le contenu d'une disposition prévue à l'article L. 322-4-3 du code du travail pour le CIE : il s'agit de prévoir qu'aucun convention de RMA ne pourra être conclue en cas de licenciement économique dans les six mois ou pour exercer les mêmes missions qu'un salarié titulaire d'un CDI qui aurait été préalablement licencié.

Bien entendu, le non-respect de la règle précitée entraînera la rupture de la convention de RMA et le remboursement des aides versées à l'entreprise.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

Art. 8
Allégement des effets de seuil

Cet article reprend les termes d'une disposition prévue à l'article L. 322-4-5 du code du travail : il s'agit de prévoir que les personnes embauchées dans le cadre d'un RMA n'interviendront pas dans le calcul des seuils découlant du code du travail (seuil relatif à l'obligation de constitution d'un comité d'entreprise par exemple).

Cette souplesse réglementaire demeurera valable durant la période de versement de l'aide dégressive au titre de la convention de RMA, c'est-à-dire trois ans.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

Art. 9
Modalités d'application

Cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat les conditions d'application du dispositif du RMA.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi rédigé.

TRAVAUX DE COMMISSION

I. AUDITIONS

A. AUDITION DE M. GUY LAROQUE, DIRECTEUR DES ÉTUDES ET SYNTHÈSES ÉCONOMIQUES À L'INSTITUT NATIONAL DE LA STATISTIQUE ET DES ÉTUDES ÉCONOMIQUES (INSEE)

La commission s'est réunie le mercredi 28 juin 2000 sous la présidence de M. Jean Delaneau, président, pour procéder à des auditions sur le retour à l'emploi et sur la notion de " trappe à inactivité " .

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que la commission était saisie de la proposition de loi de MM. Alain Lambert, président de la commission des finances, et Philippe Marini, rapporteur général, portant création d'un revenu minimum d'activité, et a considéré que l'examen de ce texte fournissait l'occasion de se pencher sur la question de la " trappe à inactivité ".

Evoquant le rapport présenté par le Gouvernement pour le débat d'orientation budgétaire, ainsi que la réforme des aides au logement annoncée lors de la conférence de la famille du 15 juin dernier, il a souligné que la question de l'incitation financière à la reprise d'un emploi pour les titulaires de minima sociaux semblait particulièrement d'actualité.

Après avoir rappelé que l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) avait approfondi sa réflexion depuis deux ans et demi sur la question des minima sociaux et de l'incitation financière au travail, M. Guy Laroque a tout d'abord rappelé que le chômage était resté, en France, à un niveau élevé au cours des vingt dernières années, malgré les fluctuations conjoncturelles.

M. Guy Laroque a indiqué que, si l'on distinguait les causes du chômage à partir des comportements individuels, l'on pouvait identifier trois types de situations :

- ceux qui ne veulent pas travailler, parce que le salaire net auquel ils peuvent prétendre n'accroît pas leurs ressources de manière suffisante pour compenser les contraintes liées à un emploi et la réduction des revenus distribués par " l'Etat-providence " ;

- ensuite, ceux qui ne travaillent pas, parce qu'ils ne sont pas assez productifs pour que les employeurs potentiels leur offrent un salaire égal ou supérieur au salaire minimum de croissance (SMIC) ;

- enfin, ceux qui ne travaillent pas parce qu'ils sont entre deux emplois, ou parce que l'économie traverse une phase de conjoncture défavorable.

Si l'on opère, suivant cette modélisation, une distinction entre le " non-emploi volontaire ", le " non-emploi classique " et le " non-emploi frictionnel ou conjoncturel ", il ressort, d'après l'étude de l'INSEE consacrée à " une analyse descriptive des incitations au travail " que 50 % du " non-emploi " s'explique par un " non-emploi " volontaire provoqué par l'Etat-Providence, et que le non-emploi " classique " d'une part et le non-emploi " conjoncturel ou frictionnel ", d'autre part, pèsent chacun pour 25 % dans les facteurs d'explication.

M. Guy Laroque a rappelé que la première étude de l'INSEE portait sur le " coin socio-fiscal " qui est le résultat de l'ensemble complexe de prélèvements et de transferts sociaux qui s'interpose entre les rémunérations que les employeurs versent aux ménages, et le revenu disponible de ces mêmes ménages.

L'étude, conduite à partir de l'enquête annuelle " Emplois " de l'INSEE de mars 1997, porte sur un échantillon représentatif de 19,9 millions d'individus, qui se répartit en 14,8 millions d'actifs occupés, 2 millions de chômeurs et 3,1 millions d'inactifs. L'enquête ne prend en compte ni les pensions de retraite ou de préretraite, ni les revenus du patrimoine, ni les revenus des travailleurs indépendants.

L'enquête évalue le taux marginal de prélèvement, c'est-à-dire la somme prélevée par le système socio-fiscal quand l'employeur augmente de 100 francs le coût du travail de l'individu considéré.

Il apparaît que, pour 3,8 millions d'individus sur 19,9 millions, soit 19,3 % de l'échantillon considéré, le taux marginal de prélèvement est égal ou supérieur à 95 %. En particulier, la quasi-totalité des personnes qui perçoivent une allocation différentielle se voit confisquer tout accroissement marginal de revenus (20 % de l'échantillon) ; les salaires inférieurs au SMIC connaissent un prélèvement de l'ordre de 35 à 45 % ; le taux passe à 60 % pour les salariés recevant un salaire compris entre le SMIC et 1,33 fois le SMIC ; le taux atteint de 45 % à 65 % pour les salariés rémunérés au-delà de 1,33 fois le SMIC : au-delà de 30.000 francs de revenu mensuel, le taux augmente fortement en raison de l'impôt sur le revenu.

Il est à noter que cette étude se place dans une optique de long terme et qu'elle ne prend donc pas en compte les mécanismes d'intéressement qui réduisent à court terme le taux marginal.

M. Guy Laroque a observé que ce sont les personnes qui ont les revenus les plus bas qui ont les taux marginaux les plus élevés.

L'étude porte également sur l'avantage financier que les chômeurs ou inactifs retirent de la prise d'un emploi, à temps plein ou à temps partiel rémunéré au SMIC.

Il en ressort que 45 % des chômeurs ont un gain net mensuel inférieur à 2.000 francs lorsqu'ils reprennent un emploi à temps plein rémunéré au SMIC ; par ailleurs, pour 54 % des chômeurs, la reprise d'un emploi à mi-temps rémunéré au SMIC représente un gain net qui ne dépasse pas 500 francs.

Une fraction de la population concernée, de l'ordre de 12 %, n'a pas intérêt financièrement à prendre un emploi à mi-temps rémunéré au SMIC parce que, perdant le bénéfice du RMI, elle devient redevable de la taxe d'habitation et connaît, en outre, une réduction brutale de son allocation logement.

La seconde étude de l'INSEE, consacrée à la " décomposition du non-emploi en France ", s'efforce de montrer comment les personnes en situation de non-emploi répondent à une incitation financière à la reprise d'un emploi.

Elle repose sur deux variables que l'on peut associer à chaque individu : la première -" le salaire potentiel net "- est le coût mensuel qu'un employeur est prêt à payer pour embaucher cette personne à temps plein, compte tenu de ses diplômes et de son expérience ; la seconde, dénommée " salaire de réserve ", est la somme mensuelle que la personne demande pour effectivement prendre un travail. Le salaire de réserve dépend de multiples éléments, notamment du nombre d'enfants à charge et du salaire du conjoint ou des frais de transport.

Schématiquement, sans tenir compte des prélèvements ni des transferts sociaux, le croisement des deux variables permet de déterminer les différentes formes de non-emploi, le cas où le " salaire de réserve " est supérieur au salaire net potentiel, correspond à la situation de " non-emploi volontaire ". Un autre cas est celui où le salaire de réserve est inférieur au salaire potentiel net, mais où les intéressés ne trouvent pas d'emploi parce que ce dernier est inférieur au SMIC ; la rigidité du marché du travail induit donc un " non-emploi classique " ; d'autres personnes enfin dont la productivité est supérieure au SMIC ne parviennent pas à trouver un emploi du fait de " frictions " dans l'économie ou de la conjoncture.

L'étude est effectuée sur un échantillon représentatif d'une sous-population de 9,6 millions d'adultes entre 25 et 49 ans dont 6,35 millions ont un emploi à temps plein et 3,25 millions sont sans emploi, comprenant 1,5 million de personnes au chômage. L'échantillon exclut les salariés à temps partiel et les fonctionnaires.

Le modèle, fonctionnant à partir du croisement des variables relatives au salaire de réserve et au salaire potentiel net, montre que, sur les 3,25 millions de personnes sans emploi, 57 % sont volontairement dans cette situation, 20 % en sont empêchées par le niveau du SMIC et 23 % sont en situation autre (chômage frictionnel ou conjoncturel).

M. Guy Laroque a souligné que la notion de non-emploi volontaire ne signifiait pas que la personne concernée ne cherchait pas un emploi, mais simplement que ces personnes gagneraient peu à prendre un emploi de sorte, qu'au vu du comportement moyen de la population, elles ne devraient effectivement pas participer au marché du travail.

M. Guy Laroque a estimé que le taux de 20 % de " chômage classique ", correspondant à ceux qui souhaitent travailler, mais dont la qualification est insuffisante, est apparu sensiblement plus élevé que les hypothèses généralement retenues par les économistes.

L'étude comporte également une simulation de l'effet d'une suppression des allégements de charge sur les bas salaires.

Il ressort de cette simulation que les mesures d'allégement des charges sociales patronales sur les bas salaires en vigueur en 1997 devraient créer environ 500.000 emplois à long terme, soit sensiblement plus que les 250.000 emplois à long terme retenus par les estimations actuelles.

La simulation de l'effet d'une augmentation de 10 % du SMIC montre en revanche que les destructions d'emplois seraient très nombreuses et représenteraient la perte d'environ 290.000 emplois.

M. Philippe Nogrix s'est interrogé sur les effets des mesures d'intéressement au retour à l'emploi, les conséquences de la mise en place de la couverture maladie universelle (CMU) et les pistes de réforme du RMI.

M. Guy Laroque a indiqué que les mécanismes d'intéressement avaient certainement un effet positif, puisqu'ils permettaient d'accroître l'écart entre le minimum social et le revenu d'activité, mais que le modèle de la direction de la prévision n'avait pas pris en compte ce paramètre qui aurait considérablement compliqué l'analyse, en raison des effets complexes de calendrier.

Il a observé que, sur un plan économique, il pouvait apparaître des effets pervers du fait de multiples " allers et retours " entre les situations d'activité et le minimum social pour optimiser les effets financiers de l'intéressement. Ce type de phénomène est observé au niveau de l'assurance chômage des intermittents du spectacle.

Concernant l'effet de la CMU, M. Guy Laroque a indiqué que l'étude de l'INSEE prenait en compte les données de 1997 et que celle-ci ne pouvait donc intégrer les effets de la réforme entrée en vigueur au 1 er janvier 2000.

En première analyse, il a considéré que l'effet désincitatif principal proviendrait du mécanisme d'assurance complémentaire et non pas du dispositif de la couverture de base dans la mesure où les personnes qui ne sont pas couvertes par l'assurance maladie sont celles qui sont plus éloignées du marché de l'emploi.

Concernant les pistes de réforme, il a rappelé qu'il n'incombait pas à l'INSEE de se prononcer sur ce point tout en observant cependant, qu'au-delà du simple raisonnement économique, beaucoup de chômeurs étaient prêts à faire beaucoup d'efforts pour pouvoir accéder à un véritable travail.

Il a remarqué que les femmes en couple, dont le conjoint était sans emploi, avaient un taux d'emploi de 31,1 %, beaucoup plus faible que celui des femmes dont le conjoint détient un emploi (46 %).

Le modèle économétrique montre que la différence provient du " non-emploi volontaire " : une femme dont le conjoint travaille gagne en moyenne 5.500 francs par mois en prenant un emploi, alors que le supplément de revenu n'est plus que de 2.800 francs pour les épouses dont le conjoint est sans emploi, du fait de la perte d'une partie non négligeable des prestations sociales.

Le fait que le conjoint travaille est donc un facteur incitatif pour sortir de la " trappe à pauvreté ".

M. Guy Laroque a rappelé qu'en économie, il fallait opérer de nombreux arbitrages entre l'efficacité et l'équité, et qu'il appartenait aux décideurs politiques de fixer le curseur des minima sociaux, afin d'assurer un équilibre entre l'incitation au travail salarié et la " trappe à inactivité ".

M. Louis Souvet a souligné l'importance des créations d'emplois générées par les allégements de charges et s'est félicité que l'étude montre les effets pervers d'une augmentation du RMI.

M. Jean Chérioux a souligné que la situation de " non-emploi volontaire " recouvrait le cas de personnes handicapées qui pouvaient difficilement accéder au marché du travail. Il s'est interrogé sur les effets d'une inscription systématique des titulaires du RMI à l'ANPE.

M. Alain Vasselle s'est interrogé sur les effets de l'intéressement en se demandant si des effets concrets étaient mesurés par les études économiques.

M. Jean Delaneau, président, s'est enquis des conséquences de la réforme des allocations logement annoncée lors de la Conférence de la famille du 15 juin dernier.

En réponse, M. Guy Laroque a souligné que l'impact des politiques d'allégement des charges sociales sur les bas revenus pouvait être différent, selon que la mesure concerne les employeurs ou les salariés.

Il a rappelé que les études de l'INSEE ne permettaient pas de quantifier les effets des mesures d'intéressement, et que le coût budgétaire de ces politiques était relativement élevé, ce qui conduisait à des arbitrages délicats.

S'agissant du dispositif d'allocation logement, il a rappelé qu'avant la réforme annoncée par le Gouvernement, le dispositif actuel aboutissait paradoxalement à une légère baisse de revenus, de l'ordre de 400 francs par mois, pour certaines catégories de ménages qui passaient du RMI au SMIC. Il a rappelé par ailleurs qu'en France 50 % des ménages étaient locataires et que 40 % bénéficiaient d'une allocation logement, ce qui prouvait que le dispositif était peu sélectif.

S'agissant du rôle de l'ANPE vis-à-vis des bénéficiaires du RMI, il a rappelé que ces derniers étaient souvent des personnes peu employables, car très éloignées du marché du travail. Il a évoqué par ailleurs le maintien à un niveau élevé des effectifs de titulaires de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) versée à des chômeurs de longue durée pourtant inscrits à l'ANPE.

B. AUDITION DE M. BERTRAND FRAGONARD, CONSEILLER MAÎTRE À LA COUR DES COMPTES

Puis la commission a entendu M. Bertrand Fragonard, Conseiller maître à la Cour des comptes .

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que M. Bertrand Fragonard avait été le premier délégué interministériel au revenu minimum d'insertion (RMI) et qu'il avait exercé cette fonction de 1988 à 1996, puis l'a invité à s'exprimer sur la question de savoir si le dispositif des minima sociaux en France encourageait suffisamment la reprise d'un emploi.

M. Bertrand Fragonard, après avoir rappelé qu'il s'exprimait à titre personnel et que ses prises de position n'engageaient naturellement pas la Cour des comptes, a souligné que la question posée s'inscrivait dans la problématique dominante exprimant la crainte que l'existence de minima sociaux ne dissuade de reprendre un emploi.

Il a estimé que la première question était de savoir si le fait de bénéficier, sur des critères largement inconditionnels, d'un minimum social, pouvait entraîner le refus de prendre un travail " déclaré ".

Il a rappelé que, selon une thèse qui s'appuie sur une intuition présentée comme une évidence, certaines personnes préféreraient s'accommoder d'un minimum social, plutôt que d'accomplir un travail pénible pour un avantage financier faible. Les partisans de cette thèse mettent en avant le caractère trop faible de l'écart entre le niveau du RMI et celui du SMIC ou, a fortiori, du salaire correspondant à un travail à temps partiel.

M. Bertrand Fragonard a souligné que la thèse en question était en fait une simple intuition qui ne reposait sur aucune analyse méthodologique sérieuse depuis dix ans. Il a regretté, à cet égard, que les mises en garde des associations de lutte contre l'exclusion ne soient pas suffisamment entendues sur ce point.

Il a rappelé qu'une étude du Centre de recherche et de documentation sur la consommation (CREDOC), de juin 1992, avait mis en évidence que le refus du travail chez les titulaires du RMI était un phénomène qui existait mais qui était rare et justifié par des raisons ne tenant pas à la mauvaise volonté des intéressés.

Une autre enquête réalisée par l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) avait montré que le titulaire du RMI ne faisait pas preuve de moins d'énergie qu'un chômeur relevant de l'assurance chômage pour rechercher un emploi.

M. Bertrand Fragonard a rappelé en effet que, pour le titulaire d'un minimum social dont les revenus sont très faibles, une augmentation de ressources même minime en valeur absolue pouvait représenter beaucoup : un gain supplémentaire de 1.000 francs représente une augmentation de 40 % des revenus pour le titulaire d'un RMI qui perçoit 2.552 francs.

Par ailleurs, M. Bertrand Fragonard a souligné que l'analyse des motivations des titulaires d'un RMI ne donnait pas lieu à une réponse globale simple et que l'aspect financier n'était pas le seul qui devait être pris en considération.

Il a indiqué par exemple qu'une jeune femme de 18 à 25 ans, sans qualification, ayant un enfant et vivant chez ses parents, ne reprendrait un travail que si elle bénéficiait d'un véritable accompagnement social à cette fin ; la situation serait différente pour la même personne si elle ne bénéficiait pas d'un environnement familial ou si elle était mieux qualifiée.

De même, une femme de 40 à 45 ans, au chômage après avoir travaillé, bénéficiant de l'allocation de solidarité spécifique (ASS), dont le conjoint dispose d'un revenu modique décent et est propriétaire de son logement, ne développera que peu d'énergie à retrouver un travail ; la situation est évidemment différente si cette personne vit seule.

Par ailleurs, M. Bertrand Fragonard s'est interrogé sur l'opportunité de la démarche qui consisterait à demander à un titulaire du RMI de 50 ans ou plus, usé par de nombreuses années de travail et ne bénéficiant pas d'une pension d'invalidité, de reprendre une activité, alors même que d'autres personnes ayant le même âge dans la même branche d'activité bénéficient d'une préretraite et que les chômeurs de plus de 50 ans, relevant de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC), sont officiellement dispensés de recherche d'emploi.

M. Bertrand Fragonard a considéré qu'il n'existait pas de preuve de l'existence d'un effet majeur de contre-incitation au travail provoquée par les minima sociaux. Il a souhaité alors répondre à la question de savoir quelle politique publique devrait être mise en place pour réduire cet effet de contre-incitation, lorsqu'il existe.

Il a indiqué que la première réponse, d'inspiration libérale, consistait à accroître l'écart entre le revenu minimum d'insertion et le revenu salarié de base d'un actif.

Estimant " irréaliste " de baisser les niveaux actuels du RMI et des minima sociaux, M. Bertrand Fragonard a mis l'accent sur les moyens d'améliorer les revenus de base de l'actif au SMIC.

La première possibilité est d'autoriser le cumul partiel pendant un temps limité du salaire d'activité et de tout ou partie du minimum social.

M. Bertrand Fragonard a souligné néanmoins que cette mesure se heurtait à deux types d'inconvénients : tout d'abord, il est essentiel que cette disposition soit très " lisible " et que l'intéressé soit conscient du caractère temporaire du mécanisme d'intéressement afin d'ajuster ses dépenses à la " date butoir " d'arrêt du dispositif ; ensuite, une telle mesure entraîne un coût financier immédiat pour les finances publiques.

En tout état de cause, M. Bertrand Fragonard a estimé que l'intéressement n'était pas la raison principale d'une reprise du travail par un titulaire du RMI et que des études devraient être conduites sur ce problème à partir d'entretien sur le terrain.

Par ailleurs, M. Bertrand Fragonard a observé que l'écart entre le niveau du RMI et celui du SMIC s'était accru structurellement de façon importante en raison du décalage entre le premier indexé sur les prix et le second, qui intègre une part de hausse de pouvoir d'achat. Ainsi, depuis 1988, le niveau du SMIC a augmenté de 42 %, tandis que celui du RMI n'a augmenté que de 25 %.

Il s'est interrogé, au demeurant, sur la possibilité d'indexer durablement les minima sociaux sur la seule inflation. Il a observé que les primes de fin d'année accordées correspondaient en réalité au souci de faire participer les titulaires des minima sociaux à l'évolution du pouvoir d'achat.

Par ailleurs, une autre solution est de conférer au travailleur salarié rémunéré au SMIC les mêmes avantages connexes que ceux qui sont accordés au titulaire de minima sociaux. A cet égard, il apparaît que, depuis la mise en place de la couverture maladie universelle (CMU), une famille au SMIC avec un ou deux enfants dispose d'une aide médicale gratuite, ce qui n'était pas le cas auparavant. Par ailleurs, les règles d'exonération en matière de taxe d'habitation ont été réaménagées de manière à ce que celles-ci soient étendues à toutes les personnes à ressources modiques qu'elles travaillent ou non ; enfin, le barème de l'allocation logement devrait être prochainement modifié, ce qui permettra d'accroître sensiblement le niveau de l'aide pour les salariés au niveau du SMIC.

M. Bertrand Fragonard a indiqué qu'au total, par rapport au titulaire du RMI, la situation relative d'un salarié au SMIC serait améliorée de 18 % pour un salarié célibataire, et de 25 % pour un couple avec un ou deux enfants.

M. Bertrand Fragonard a souligné que les titulaires de minima sociaux ne réagissaient pas uniquement selon un raisonnement économique et a ensuite évoqué les solutions consistant à réformer le dispositif même du RMI.

La première voie consisterait à durcir le mécanisme en prévoyant une dégressivité de l'allocation, en limitant sa durée d'attribution ou en supprimant son versement en cas de refus de reprendre un travail.

Concernant la dégressivité, M. Bertrand Fragonard a rappelé que les niveaux de base du RMI étaient déjà relativement faibles, en particulier pour un célibataire, et a estimé que cette réforme serait paradoxale, au moment où il est proposé de revenir sur le principe de la dégressivité en matière d'assurance chômage.

En outre, il a émis des doutes sur la possibilité de limiter à 5 ans la durée de versement de l'allocation en rappelant que le RMI avait déjà été conçu comme un ultime " filet de sécurité " et que l'apparition de nouvelles catégories de personnes sans ressources entraînerait inéluctablement la création d'un nouveau dispositif d'allocation de secours. Il s'est demandé également si l'économie qui serait réalisée pouvait être perçue comme une " priorité radicale " dans une période de relative aisance des finances publiques.

Enfin, il a indiqué, concernant les mécanismes de sanctions en cas de refus de travailler, que la loi du 1 er décembre 1988 avait déjà prévu la suspension du versement de l'allocation du RMI lorsque le titulaire ne respecte pas les engagements du contrat d'insertion. Il a observé toutefois que cette mesure n'était pas appliquée en raison d'un déficit de gestion administrative du dispositif.

M. Bertrand Fragonard a évoqué une autre voie de réforme consistant à renforcer les politiques actives d'accompagnement social.

Rappelant que dans les pays nordiques ou au niveau communal au Royaume-Uni, de multiples intervenants étaient présents pour s'occuper des chômeurs, M. Bertrand Fragonard a estimé que l'accompagnement social était insuffisant en France. Il a rappelé à cet égard l'échec des mesures de tutorat en entreprise pour les personnes en difficulté ainsi que les différences qui avaient été constatés entre les départements pour mobiliser les crédits départementaux d'insertion obligatoire fixés, aux termes de la loi, à 20 % du montant des allocations de RMI versées par l'Etat dans le département. Il a souligné par ailleurs que ce souci d'insertion était propre au RMI et ne concernait pas, par exemple, les titulaires de l'allocation parent isolé (API).

Evoquant les projets de réforme de l'assurance chômage, il a estimé que les mesures d'incitation financière seraient inefficaces sans une politique publique nouvelle visant à améliorer le retour à l'emploi des personnes en difficulté. Le renforcement des politiques d'intéressement et des dépenses ne doit pas faire oublier le caractère essentiel des discriminations positives à l'embauche et de l'amélioration des politiques actives d'accompagnement social pour favoriser la rencontre, dans de meilleures conditions, entre les titulaires de minima sociaux d'insertion et les employeurs.

M. Louis Souvet s'est félicité du réalisme de la position de M. Bertrand Fragonard. Il a rappelé qu'en Suède, les maires disposaient de la liste des personnes bénéficiant d'un minima social, et pouvaient leur demander de participer à un travail d'intérêt général pour la collectivité publique.

M. Philippe Nogrix a rappelé que les départements qui étaient les plus rigoureux en terme de gestion du RMI, étaient ceux qui avaient obtenu les meilleurs résultats en matière d'insertion. Il s'est demandé si on pouvait distinguer trois tiers dans la population de bénéficiaires du RMI : ceux qui sont très " désocialisés " et ne peuvent accéder à un emploi ; ceux qui pourraient accéder à un emploi à condition de bénéficier d'un accompagnement ou d'une formation ; ceux qui pourraient travailler directement, mais ne le font pas pour des raisons financières.

M. Bertrand Fragonard a estimé que la théorie des " trois-tiers " était dangereuse. Il a considéré en effet que le risque serait de consacrer prioritairement l'aide publique à l'insertion des personnes qui sont les moins éloignées du marché du travail et de sélectionner en quelque sorte les meilleurs, ceux qui sont les plus dynamiques. Il a rappelé à cet égard que les nouveaux entrants au RMI étaient ceux qui avaient le taux de sortie le plus rapide.

Raisonnant par analogie avec les négociations sur le programme d'aide au retour à l'emploi (PARE) conduites au sein de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC), il a souligné que si le dispositif pouvait être efficace pour les chômeurs qui peuvent le plus facilement retrouver un emploi, la question resterait entière de savoir comment aider les chômeurs qui échouent systématiquement dans leur recherche d'emploi.

Il a rappelé que la France avait beaucoup souffert de la crise de l'emploi dans les années 90, et a estimé que si l'amélioration de la situation économique ne s'accompagnait pas d'un effort plus ambitieux de réinsertion, le nombre de titulaires du RMI ne baisserait pas aussi vite que le chômage de longue durée.

Evoquant la situation suédoise, il a rappelé que les maires étaient dotés d'une véritable responsabilité, assortie de moyens, en matière d'offres d'emplois ou d'activités aux personnes en difficulté. Il lui est apparu possible de suspendre le versement d'un minimum social seulement lorsque la certitude existe que tout a été fait pour améliorer la situation de la personne bénéficiant de l'aide publique.

Or, aujourd'hui en France, il n'est pas exclu que des mesures de suspension puissent pénaliser des allocataires du RMI qui auraient pu retrouver du travail avec une formation adaptée. En d'autres termes, le système administratif n'est pas en mesure de distinguer les allocataires en fonction de leur plus ou moins bonne volonté à reprendre un emploi.

M. Philippe Nogrix a souligné le caractère insatisfaisant du principe de cogestion entre l'Etat et les départements en matière d'insertion, et a rappelé que le Sénat avait souhaité, dès l'origine, une véritable décentralisation en ce domaine.

M. Bertrand Fragonard a considéré que la gestion des crédits départementaux d'insertion avait été plus ou moins efficace selon des départements, mais qu'en tout état de cause, des résultats avaient été obtenus lorsque des équipes performantes avaient été mises en place. Il a évoqué néanmoins des problèmes de " lassitude " ou de " banalisation " qui avaient pu apparaître en matière de réinsertion du fait de la durée de la crise économique et de l'ampleur du chômage.

M. Philippe Nogrix s'est interrogé sur une intervention accrue de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) en direction des titulaires du RMI.

M. Bertrand Fragonard a constaté que les titulaires du RMI avaient été perçus comme une population marginalisée alors qu'en réalité, le gros des effectifs était composé de chômeurs de longue durée, mal formés, dans des régions en crise.

Il a estimé que, dans ce contexte, l'ANPE avait parfois pu avoir un " comportement d'évitement ", surtout dans une situation où la France comptait déjà près de 3,3 millions de chômeurs relevant de l'assurance chômage.

Estimant révélatrice l'absence de véritable proposition de réforme globale du RMI, M. Bertrand Fragonard a considéré, rétrospectivement, que les collectivités locales auraient dû être mieux impliquées dans le dispositif.

M. Alain Gournac a souhaité que la gestion du RMI soit rapprochée du terrain, tout en s'interrogeant sur l'utilité du " volet insertion " du RMI, et en constatant que certaines personnes semblaient s'être " installées " dans le dispositif.

M. Bertrand Fragonard a considéré que renoncer à la notion d'insertion serait " un échec de toute la société ", et que le volet relatif à l'insertion était utile, même si les gestionnaires avaient été débordés par l'effet de masse et si le dispositif était parfois trop éloigné du terrain.

Il a rappelé que lorsqu'un bénéficiaire du RMI avait refusé par trois fois un emploi qui lui était proposé, les gestionnaires avaient bien la possibilité législative de suspendre le versement de l'allocation mais qu'ils ne le faisaient pas en invoquant diverses raisons.

Concernant l'écart entre le niveau du RMI et celui de la rémunération d'un salarié au SMIC, il a rappelé que, pour un couple avec un enfant, si l'on tenait compte de la réforme à venir de l'allocation logement, l'aide au titre de la couverture maladie universelle (CMU) et des exonérations de taxe d'habitation, cet écart se serait accru de 1.330 francs entre 1988 et 2002, soit 25,8 % du RMI total.

M. Alain Vasselle a regretté que le maire ne soit pas mieux associé à la procédure d'attribution du RMI et a rappelé que la collectivité locale de droit commun compétente en matière d'aide sociale était le département, et non la commune. Il s'est demandé si le fait d'exiger une contrepartie du bénéficiaire du RMI sous forme de travail aurait un caractère dissuasif pour les demandeurs.

M. Bernard Seillier a souhaité un renforcement des politiques d'accompagnement social des personnes en difficulté s'inspirant de l'exemple des missions locales d'insertion. Il a estimé que le maire pouvait jouer un rôle important en terme d'animation de la politique d'aide sociale de proximité. Il a regretté la volonté parfois hégémonique d'intervention de l'ANPE en matière d'insertion.

M. Michel Esneu a rappelé que les élus locaux, mis à part les contrats aidés, tels que les contrats emploi-solidarité et les chantiers d'insertion, n'avaient eu que peu de moyens pour assurer une insertion par l'emploi des titulaires du RMI, et qu'ils s'étaient donc reportés sur la démarche d'insertion sociale.

M. Philippe Nogrix s'est fait l'interprète de M. Jean Chérioux, en s'interrogeant sur les conséquences de l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) par les commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnels (COTOREP) au motif d'un " handicap social ".

M. Bertrand Fragonard a rappelé que la construction du RMI sur la notion d'unité de consommation, afin de prendre en compte la dimension familiale de la politique sociale, avait des effets négatifs en termes d'incitation à la reprise d'un travail. Le rapport du RMI au SMIC atteint en effet le taux de 40 % pour un célibataire contre 62 % pour un couple avec un enfant.

Il a précisé que la mise en oeuvre de la CMU et la prochaine réforme des allocations logement conduiraient à réorienter le barème des aides en faveur des célibataires.

Concernant le rôle du maire, il a rappelé que la loi du 29 juillet 1992 avait prévu que le maire serait informé des ouvertures du droit au RMI mais que cette mesure n'avait pas eu d'effet significatif sur la gestion du dispositif.

Il a rappelé que les missions locales d'insertion avaient fait la preuve de leur efficacité, mais qu'elles étaient inégalement réparties sur le territoire et qu'elles souffraient d'un manque chronique de moyens.

Concernant l'AAH, il a constaté que les statistiques territoriales qui avaient été fournies fort tardivement par les COTOREP montraient une dispersion importante des taux d'attribution de l'allocation en fonction des départements.

Il a rappelé que les cas d'attribution de l'AAH, pour handicap social, avaient été les plus importants dans les bassins d'emplois sinistrés, et que ce problème était au demeurant antérieur à l'institution du RMI.

Il a souligné que l'une des difficultés actuelles tenait à l'écart entre le niveau de l'AAH et celui du RMI, notamment pour un célibataire, qui rendait très difficile le passage du premier dispositif au second.

Il a estimé que le dispositif des pensions d'invalidité était conçu en France de manière trop restrictive en faisant valoir que, dans les Pays-Bas, les chômeurs âgés pouvaient plus facilement avoir accès à une pension d'invalidité dès lors qu'ils avaient exercé un travail pénible.

II. EXAMEN DU RAPPORT

Réunie le mardi 30 janvier 2001, sous la présidence de M. Jean Delaneau, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Nogrix sur la proposition de loi n° 317 (1999-2000) présentée par MM. Alain Lambert et Philippe Marini, portant création du revenu minimum d'activité (RMA).

M. Philippe Nogrix, rapporteur, a tout d'abord exposé le régime des différents minima sociaux existant en France, en opérant une distinction entre ceux qui étaient destinés à des personnes susceptibles de se réinsérer et ceux qui étaient destinés à pallier un handicap ou qui étaient versés à des personnes ayant dépassé l'âge de la retraite.

Il a rappelé que la reprise de la croissance économique n'avait eu que tardivement un effet sur la diminution du nombre des allocataires de minima sociaux et que cet impact était encore modéré.

Il a considéré tout d'abord que ce phénomène pouvait s'expliquer par le fait que l'écart trop faible entre les revenus de remplacement liés aux minima sociaux et les revenus d'activité professionnelle pouvait engendrer une " trappe à inactivité ".

Soulignant l'incidence de la mise en oeuvre de la politique familiale et de l'évolution de la précarité sur le marché du travail, il a évoqué les analyses présentées dans le rapport de M. Jean-Michel Belorgey sur les minima sociaux et dans le rapport du Conseil d'analyse économique sur le plein emploi.

Il a rappelé les conditions dans lesquelles le Gouvernement avait présenté, lors de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, un mécanisme de ristourne sur la contribution sociale généralisée (CSG) et sur la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), qui avait été invalidé par le Conseil constitutionnel parce qu'il portait atteinte au principe d'égalité.

M. Philippe Nogrix, rapporteur, a estimé que le second facteur du maintien à niveau élevé du nombre de titulaires des minima sociaux tenait à la difficulté d'embauche de ces derniers dans les entreprises du secteur marchand.

Il a constaté que, dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre, la reprise économique facilitait la sortie des minima sociaux des personnes les plus jeunes et les plus diplômées sans résoudre la question de la réinsertion de celles qui étaient durablement installées dans des situations d'assistance.

Il a estimé que le revenu minimum d'activité serait un dispositif complémentaire de la future " prime pour l'emploi ", en permettant de favoriser l'embauche de titulaires de minima sociaux par les entreprises afin de réduire le chômage structurel.

Il a indiqué que le RMA reposait sur une convention, conclue entre le bénéficiaire du minimum social, l'employeur et l'Etat, qui prévoyait, dans le cadre d'un accord de branche, le versement en trois ans d'une aide dégressive en faveur de l'entreprise calculée à partir du niveau du minimum social.

M. Philippe Nogrix, rapporteur, a souligné que cette proposition de loi présentait l'avantage d'être d'une grande lisibilité, d'être résolument orientée vers l'insertion dans le secteur marchand des personnes en difficulté et de mettre en place un dispositif qui aurait un caractère automatique pour les entreprises qui y auraient recours.

Soulignant que l'équilibre financier de ce dernier voulu par ses auteurs devait impérativement être respecté, il a indiqué que le dispositif méritait d'être amélioré afin de prévoir un effort de formation en faveur des personnes embauchées, de permettre la prise en charge, dans le cadre de la négociation de branche, des frais de reprise d'un emploi et de veiller à ce qu'il ne soit pas appliqué dans les entreprises qui auraient procédé récemment à des licenciements.

M. Roland Muzeau a estimé que la proposition de loi obéissait à la même logique que celle qui sous-tendait tant la proposition de loi, rapportée par M. Alain Gournac, pour faire face aux pénuries de main-d'oeuvre que le débat sur la " refondation sociale " engagé à l'initiative du mouvement des entreprises de France (MEDEF). Il a estimé qu'en privilégiant le retour des personnes en situation d'exclusion dans le secteur marchand, le dispositif ne ferait qu'intégrer un nombre croissant de salariés dans un régime de précarité du travail et de pression à la baisse des salaires. Il s'est déclaré en accord avec l'analyse du rapporteur concernant l'absence de disposition prévue dans la proposition de loi concernant la formation des personnes embauchées. Il a estimé que les griefs adressés au RMI étaient à la fois " fondés et infondés " dans la mesure où, malgré les difficultés rencontrées par les conseils généraux à mettre en oeuvre le volet relatif à l'insertion, des progrès avaient été constatés depuis deux ans en ce domaine.

M. André Jourdain s'est félicité de la présentation de ce dispositif, en soulignant que le principe de l'activation des dépenses passives d'indemnisation du chômage, pour lequel il avait plaidé depuis de nombreuses années, tardait à être compris par l'Etat. Il a souligné que le dispositif était conçu pour recouvrir le plus largement possible la population des titulaires de minima sociaux, et pas seulement les chômeurs de longue durée.

M. Michel Esneu s'est félicité que le dispositif proposé permette " de lever l'obstacle de l'assistanat " et d'éviter la " déresponsabilisation " des titulaires de minima sociaux. Il a souligné que le RMA viendrait corriger utilement les insuffisances du volet relatif à l'insertion du RMI, dont les départements ne pouvaient être tenus pour responsables. Il a estimé que les entreprises pouvaient jouer un rôle prépondérant pour favoriser l'insertion durable de personnes en difficulté.

M. Alain Gournac s'est déclaré favorable à un dispositif qui permettrait d'éviter l'installation durable des bénéficiaires de minima sociaux dans une situation d'assistance. Il a estimé que le niveau des minima sociaux et la pratique du " travail au noir " se conjuguaient pour rendre peu incitatifs les avantages financiers liés à la reprise d'un emploi salarié.

M. Paul Blanc a estimé que la proposition de loi avançait dans la bonne direction, en regrettant les insuffisances des contrôles sur les revenus liés au travail au noir des bénéficiaires des minima sociaux.

M. Louis Souvet a considéré que la proposition de loi était à la fois réaliste et généreuse. Il a estimé que la proposition de loi pourrait aller de pair avec un toilettage des aides aux entreprises, qui étaient trop complexes, et s'est interrogé sur la durée de la convention de RMA.

En réponse, M. Philippe Nogrix, rapporteur, a rappelé, s'agissant du RMI, que les dispositifs d'insertion n'étaient pas en situation d'échec dans tous les départements, tout en reconnaissant que les commissions locales d'insertion (CLI) rencontraient toujours de nombreuses difficultés concrètes à réinsérer certaines personnes.

S'agissant du champ du dispositif, il a indiqué que celui-ci devait être large et qu'il pourrait être ajusté à mesure que se dérouleraient les navettes parlementaires.

Il a souligné que le dispositif avait pour but de réinsérer à part entière les titulaires de minima sociaux dans les entreprises et d'éviter ainsi que les principes de solidarité collective n'affaiblissent la responsabilité individuelle.

Concernant le retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux, il a estimé que celui-ci reposait à la fois sur la reprise de la croissance économique, l'amélioration de l'incitation financière à la reprise d'un travail et l'allégement du coût du travail pour l'entreprise, qui devait être considérée à la fois comme partenaire et responsable du dispositif.

Il a précisé que la durée de la convention de RMA résultait de celle de la période de versement de l'aide, c'est-à-dire trois ans, mais que le contrat de travail du salarié serait à durée indéterminée.

La commission a alors adopté les conclusions sur la proposition de loi telles que proposées par le rapporteur.

CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

SUR LA PROPOSITION DE LOI
PORTANT CRÉATION DU REVENU MINIMUM D'ACTIVITÉ

Article premier

Afin de favoriser le retour à l'emploi, conformément au cinquième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, il est institué un revenu minimum d'activité pour les personnes sans emploi et titulaires depuis au moins six mois d'un minimum social visé par la présente loi.

Article 2

Le revenu minimum d'activité prend la forme d'une convention d'embauche conclue entre le bénéficiaire, l'employeur, et, selon le cas, l'Etat ou l'institution gestionnaire du minimum social. Une rémunération égale au montant du revenu minimum d'activité est versée en totalité par l'employeur au bénéficiaire.

Le revenu minimum d'activité comprend deux parts :

- la première, appelée aide dégressive, correspond pour un contrat de travail à temps plein à l'allocation de minimum social perçue par le bénéficiaire ; cette dernière est désormais versée à l'employeur pendant trois ans de manière dégressive ;

- la seconde, appelée salaire négocié, correspond à la différence entre le montant du revenu minimum d'activité et l'aide dégressive.

Article 3

Le revenu minimum d'activité est mis en oeuvre en application d'un accord de branche qui détermine le montant du revenu minimum d'activité et les modalités de la formation ou du tutorat prévus en faveur du bénéficiaire ainsi que de la prise en charge des frais de son retour à l'emploi.

Le montant du revenu minimum d'activité ne peut être inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance.

Article 4

Le contrat de travail conclu dans le cadre d'une convention de revenu minimum d'activité est à durée indéterminée.

Article 5

Les minima sociaux ouvrant droit à la conclusion d'une convention de revenu minimum d'activité sont le revenu minimum d'insertion, l'allocation de solidarité spécifique, l'allocation d'insertion, l'allocation d'assurance veuvage et l'allocation de parent isolé.

Article 6

Peuvent conclure des conventions de revenu minimum d'activité les employeurs relevant de l'article L. 322-4-3 du code du travail.

Article 7

Aucune convention de revenu minimum d'activité ne peut être conclue pour le compte d'un établissement ayant procédé à un licenciement économique dans les six mois précédant la date d'effet de ladite convention.

La convention ne peut être conclue lorsque l'embauche résulte du licenciement d'un salarié sous contrat à durée indéterminée.

Article 8

Pendant la durée de la convention de revenu minimum d'activité, les salariés bénéficiaires ne sont pas pris en compte dans le calcul de l'effectif du personnel de l'entreprise dont ils relèvent pour l'application à cette entreprise des dispositions législatives et réglementaires qui se réfèrent à une condition d'effectif minimum des salariés, exception faite de celles qui concernent la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles.

Article 9

Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application de la présente loi.

ANNEXE N° 1
-
MONTANT GARANTI DES ALLOCATIONS
ET PLAFONDS DE RESSOURCE EN JANVIER 2001

Montant de revenu garanti mensuellement

Plafonds de ressources mensuelles

Durée de versement


Revenu minimum d'insertion

Allocataire seul : 2.608,50 F
Deux personnes : 3.912,75 F
Pour le 1 er et le 2 ème enfant supplémentaire : 782,55 F
Par enfant à partir du 3 ème : 1.043,20 F


Montant mensuel garanti du RMI pour la configuration familiale correspondante



3 mois renouvelables


Allocation de parent isolé

Femme enceinte : 3.295 F
Parent isolé avec un enfant à charge : 4.393 F
Par enfant en plus : 1.098 F

Montant mensuel garanti de l'API pour la configuration familiale correspondante

12 mois consécutifs jusqu'au 3 ème anniversaire du plus jeune enfant


Allocation de solidarité spécifique



Taux normal (moins de 55 ans) : 2.577,30 F

Personne seule : 6.013,70 F
Couple : 12.027,40 F (si attribution antérieure au 1 er janvier 1997) ou 9.450,10 F (si attribution postérieure au 31.12.1996)



Par période de 6 mois renouvelables


Allocation d'insertion



1.815,60 F par mois

Personne seule : 5.446,80 F (soit 90 fois le montant journalier)
Couple : 10.839,60 F (soit 180 fois le montant journalier)



12 mois maximum

Allocation d'assurance veuvage


3.230 F les deux premières années

L'allocation est dégressive dans la limite d'un plafond de 12.113 F par trimestre (4.037 francs par mois)

3 ans maximum sauf si le titulaire a plus de 55 ans

ANNEXE N° 2
-
PRINCIPALES ACTIONS DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI

France métropolitaine

MESURES APPLICABLES

Effectifs fin. 1999

EXONÉRATIONS A L'EMBAUCHE

Exonération pour l'embauche d'un 1er salarié: embauches

140.000

Exonération zone de redynamisation urbaine (1er - 50ème salarié)

3.400

Exonération zone de revitalisation rurale(1er - 50ème salarié)

11.900

Abatt. pour l'embauche à temps partiel :nb. de personnes concernées

484.000

CONTRATS EN ALTERNANCE

Contrats de qualification ( Adultes) : nouveaux contrats enregistrés

3.000

Contrats d'apprentissage : nouveaux contrats enregistrés

374.000

Contrats de qualification( Jeunes) : nouveaux contrats enregistrés

153.000

Contrats d'adaptation : nouveaux contrats enregistrés

43.000

Contrats d'orientation : nouveaux contrats enregistrés

2.000

CONTRATS DE RETOUR À L'EMPLOI

11.000

CONTRATS INITIATIVE EMPLOI

283.000

INSERTION PAR L'ÉCONOMIQUE

Associations intermédiaires : Nombre de personnes mises à disposition

45.387

Entreprises d'insertion :Embauches sous CDD/Aide forfaitaire

nd

Entrep. travail temp. d'insertion : Nbre de personnes mises à disposition

nd

EMPLOIS FAMILIAUX

Nombre de salariés du mois (Régime mandataire)

nd

Nombre de salariés du mois (Associations agréées/Régime prestataire)

nd

AIDES A LA CRÉATION D'ENTREPRISE

Aides aux chômeurs créateurs d'entreprises : bénéficiaires

nd

Encouragement aux dévelop. d'entreprises nouvelles: Bénéficiaires

nd

CES ,CEC,CEV, EMPLOIS-JEUNES

Contrats Emploi-Solidarité : nouveaux contrats et avenants

223.218

Contrats Emplois consolidés : nouveaux contrats et avenants

112.349

Contrats Emplois ville : nouveaux contrats et avenants

3.026

Contrats Emploi Jeune :Total des embauches

170.490

STAGES DE FORMATION

Stages d'insert.et de formation à l'emploi(SIFE Collec.): entrées en stage

54.000

Stages cadres privés d'emploi : entrées en stage

2.200

Stages d'accès à l'entreprise : entrées en stage

6.000

SIFE individuels :entrées en stage

5.000

PROGRAMME TRACE

Total des entrées dans le programme

nd

MESURES D'ACCOMPAGNEMENT DES RESTRUCTURATIONS

Conventions de conversion : premiers paiements (UNEDIC)

39.300

PRÉRETRAITES

Allocations spéciales du FNE : premiers paiements(UNEDIC)

74.842

Préretraite progressive : premiers paiements (UNEDIC)

46.330

Dispensés de recherche d'emploi indemnisés (UNEDIC)

318.760

Source : DARES

TABLEAU COMPARATIF

* 1 Minima sociaux, revenus d'activité, précarité - Commissariat Général du Plan mai 2000 - Rapport du groupe de concertation présidé par M. Jean Michel Belorgey.

* 2 DREES, Etudes et résultats, n° 62 mai 2000.

* 3 Minima sociaux, revenus d'activité, précarité - Commissariat Général du Plan - mai 2000.

* 4 Le Figaro - 12 mai 2000 .

* 5 Prélèvements et transferts sociaux : une analyse descriptive des incitations financières au travail. Guy Laroque et Bernard Salanié Economie et statistiques n° 328 1999-8.

* 6 Plein Emploi - rapport de M. Jean Pisani-Ferry - Conseil d'analyse économique - La Documentation française.

* 7 Une décomposition du non-emploi en France - Guy Laroque et Bernard Salanié - Economie et statistiques - juin 2000.

* 8 Rapport n° 67 (2000-2001) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (Tomes I et IV).

* 9 Rapport 2000 - Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale : la typologie s'appuie sur l'étude " les allocataires du revenu minimum d'insertion : une population hétérogène " in France : Portrait social, 1999-2000, INSEE.

* 10 DREES, Etudes et résultats, n° 86, octobre 2000.

* 11 DREES, Etudes et résultats, n° 16, mai 1999.

* 12 DREES, Etudes et résultats, n° 86, octobre 2000.

* 13 Les difficultés de recrutement : quelles réalités ? Quels remèdes ? - Rapport présenté par M. Jean-Paul Vermès, au nom de la commission du travail et des question sociales et adopté par l'Assemblée générale du 21 décembre 2000 - Chambre de commerce et d'industrie de Paris.

* 14 Rapport n° 125 (2000-2001) fait au nom de la commission des Affaires sociales sur la proposition de loi de MM. Alain Gournac, Jean Arthuis, Pierre Laffitte, Henri de Raincourt et Josselin de Rohan, permettait de faire face aux pénuries de main-d'oeuvre et de lever les obstacles à la poursuite de la croissance économique.

* 15 Votre rapporteur a souhaité reprendre en annexe le " tableau de bord " publié mensuellement par la DARES qui récapitule l'ensemble des principales actions de la politique de l'emploi et le nombre de bénéficiaires.

* 16 INSEE Première n° 720, juin 2000.

* 17 INSEE Première, n° 632, février 1999.

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