B. DES EFFORTS INSUFFISANTS POUR PROMOUVOIR LE GÉNÉRIQUE ET LE BON USAGE DU MÉDICAMENT

1. Le maigre bilan du développement des génériques

La loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a instauré le droit de substitution pour les pharmaciens des spécialités appartenant au même groupe générique. Les pharmaciens se sont engagés sur un objectif de substitution dans le protocole d'accord additionnel du 28 avril 1999, lequel prévoit notamment les modalités de son suivi.

Pourtant, les médicaments génériques, copies de molécules tombées dans le domaine public, progressent lentement : ils sont passés de 1,8 % du marché des médicaments en France en 1998 à 2,4 % au début de 2001 et 2,9 % fin avril (en valeur).

Le marché des groupes génériques (princeps et génériques) représentait, sur la période de mai 2000 à avril 2001, un chiffre d'affaires de 13,6 milliards de francs. La part en valeur des médicaments génériques au sein des groupes représentait 10 % en 1998, 12 % en 1999 et 19 % à fin avril 2001 sur 12 mois (ou 21 % sur les 4 premiers mois de l'année 2001).

En cumul mobile sur 12 mois à fin avril 2001, les génériques représentent environ 6,2 % de l'ensemble des unités vendues de médicaments remboursables (contre 4 % en 1999) et 2,9 % du chiffres d'affaires (contre 2 % en 1999).

Comme le rappelle la Cour des comptes, le plan de février 1998 prévoyait un objectif (« doubler la part des génériques dans la consommation pharmaceutique entre début 1998 et fin 1999 ») et quatre mesures pour développer les génériques : achèvement du répertoire des génériques 32 ( * ) , contrôle de la qualité de tous les génériques, droit de substitution et incitation des industriels à promouvoir les génériques.

Des incitations financières ont été décidées : réforme des marges des officines 33 ( * ) en 1999, qui a institué l'égalité de la marge entre princeps et génériques, et a prévu un engagement des officines de développer les génériques, en échange d'une révision du système de marge coûtant 300 millions de francs (45,7 millions d'euros) à l'assurance maladie en 1999 et 600 millions de francs (91,5 millions d'euros) en 2000 ; relèvement du plafond des remises versées par les laboratoires aux pharmacies ; exemption des remises quantitatives de fin d'année dues par les laboratoires à l'assurance maladie ; exonération de la taxe sur les ventes directes aux officines et abattement de 30 % sur la taxe frappant les dépenses de promotion.

Des efforts de communication ont été entrepris, avec notamment la publication depuis 1998 d'un guide des équivalents thérapeutiques par la CNAMTS.

Par ailleurs, le passage en commission de la transparence a été supprimé pour les génériques. Parallèlement, la CNAMTS avait inclut dans le dispositif conventionnel des médecins référents un volet « développement du générique » 34 ( * ) .

Cependant, comme le constate la Cour des comptes, l'objectif de doublement de la part de marché des génériques n'a pas été atteint.

La Cour des comptes distingue plusieurs obstacles à ce développement :

- une partie des médecins et des pharmaciens mettent en avant la réticence des patients au changement d'habitudes, notamment lorsqu'il s'agit de malades chroniques ou de personnes âgées ;

- l'intérêt financier des laboratoires non spécialisés dans le générique est de limiter l'arrivée de génériques.

Selon la Cour, deux mesures permettraient de développer davantage les génériques :

- la publication mensuelle et sans délai du répertoire des génériques ; aujourd'hui, l'AFSSAPS n'actualise le répertoire que deux à trois fois par an et la publication au journal officiel n'intervient qu'après un délai de deux mois ;

- l'autorisation de prescrire les médicaments en dénomination commune internationale (DCI) qui reporterait le choix de la marque des médecins vers les pharmaciens.

Cette dernière mesure est prévue par l'article 10 du présent projet de loi, ce dont votre rapporteur se félicite.

Au total, les économies pour l'assurance maladie liées au développement des génériques ont été de l'ordre de seulement 600 millions de francs en 2000 . Les efforts pour promouvoir le générique ont donc vocation à être nettement amplifiés.

2. L'absence de mesure significative en faveur du bon usage du médicament

Un effort significatif reste à accomplir pour promouvoir le bon usage du médicament.

La Cour des comptes note ainsi dans son rapport que le plan de 1998 accordait une place importante au développement du bon usage, avec notamment la définition d'indicateurs de suivi des prescriptions dans cinq classes prioritaires et la réalisation d'un référentiel public sur le médicament dès 1998. Elle relève qu'aucune mesure de « bon usage » n'a en réalité été prise. Le chapitre sur la « maîtrise des dépenses pharmaceutiques » s'ouvrait sur le « choix qui a été fait de responsabiliser au premier chef les prescripteurs » : la Cour constate une nouvelle fois qu'aucune mesure n'a été prise en ce sens.

Une illustration assez significative de cette inaction peut être trouvée dans le Fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique , créé par l'article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Ce fonds devait être chargé, selon le Gouvernement, de « l'information à destination des professionnels de santé indépendante de l'industrie pharmaceutique sur l'utilisation des médicaments. »

Pour justifier sa création, le Gouvernement avait fait valoir qu'aujourd'hui, « cette « information » des prescripteurs s'appuie sur un réseau de 15.000 visiteurs médicaux (21.000 en comptant les réseaux extérieurs) et les laboratoires y ont consacré plus de 12 milliards de francs selon leur dernière déclaration de dépenses pour la taxe publicité. L'information diffusée par les laboratoires a un caractère promotionnel. Aujourd'hui, l'information publique, notamment produite par l'AFSSAPS, qui reprend l'état de la science, n'arrive pas suffisamment, sous une forme facilement utilisable, jusqu'au prescripteur. C'est la raison pour laquelle la création de ce fonds s'imposait. »

A ce jour, près d'un an après sa création, ce fonds ne fonctionne toujours pas. En effet, les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds ainsi que les conditions dans lesquelles sont arrêtées les actions d'information et de communication en matière de bon usage des produits de santé et de stratégie thérapeutique que le fonds finance ou au financement desquelles il participe, sont fixées par un décret, qui « est en cours d'élaboration ».

L'article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoyait également que serait mise en place, d'ici le 1er janvier 2003, une base de données administratives et scientifiques sur les médicaments et les dispositifs médicaux. Là encore, les travaux de préparation du décret fixant les conditions de l'accessibilité de cette base au public sont en cours...

* 32 Le répertoire des groupes génériques, géré par l'AFSSAPS et publié au Journal Officiel, énumère les spécialités de référence et les spécialités qui en sont génériques. La substitution ne peut avoir lieu qu'à l'intérieur d'un même groupe générique.

* 33 Cf. le rapport de la Cour sur le financement de la sécurité sociale de septembre 1999.

* 34 Cf. Le rapport sur le financement de la sécurité sociale de septembre 2000 où la Cour a étudié les effets de cette disposition.

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