Rapport n° 60 (2001-2002) de M. Dominique LECLERC , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 7 novembre 2001

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N° 60

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 novembre 2001

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Dominique LECLERC,

Sénateur.

Tome III : Assurance vieillesse

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Joël Billard, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Jean-René Lecerf, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Valérie Létard, MM. Jean Louis Masson, Serge Mathieu, Mmes Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3307 , 3319, 3345 et T.A. 717

Sénat : 53 et 61 (2001-2002)

Sécurité sociale.

AVANT PROPOS

Mesdames, Messieurs,

« L'Histoire jugera », dit-on. Pour ce qui est de la façon dont le Gouvernement a préparé l'avenir des retraites par répartition, il n'est pas certain qu'il faille attendre une telle échéance. Le bilan de la législature, alors même que la branche vieillesse était dans une situation démographique exceptionnelle et qu'elle bénéficiait des fruits de la croissance retrouvée, est en effet catastrophique : cinq années de discussion, cinq années de gesticulation, cinq années d'inaction.

Le Gouvernement s'appuie vaille que vaille sur la double création d'une « commission de concertation » supplémentaire, le Conseil d'orientation des retraites, et du Fonds de réserve pour les retraites.

La remise du « premier rapport » du Conseil d'orientation des retraites, qui n'interviendra qu'à l'issue du dernier débat de la législature sur le financement de la sécurité sociale, ne sera pas pour autant suivie de décisions, celles-ci étant renvoyées aux calendes électorales.

Entre temps, le Gouvernement propose de revaloriser les pensions de retraite de 2,2 %, accordant une nouvelle fois un « coup de pouce » aux retraités. En l'absence d'une réflexion sur un mécanisme pérenne de revalorisation, compatible avec les enjeux financiers de demain, cette mesure apparaît insuffisante aux retraités d'aujourd'hui.

Le Gouvernement porte ainsi atteinte à la visibilité de l'action publique.

Le Fonds de réserve pour les retraites a été l'objet d'un double bouleversement de son plan de financement, d'abord en substituant aux excédents de la branche vieillesse et du FSV -ponctionnés par le financement des trente-cinq heures- le produit des licences téléphoniques de troisième génération, puis, devant la déconfiture de l'aventure UMTS, par le remplacement in extremis d'une partie du produit de ces licences par la vente des « bijoux de famille ».

La promotion du Fonds de réserve, construite sur le chiffre mythique de « 1.000 milliards de francs » avait fonctionné : il avait suscité un réel espoir chez les Français, même si le montant envisagé pour 2020 ne correspond en rien aux besoins de financement des régimes de retraite.

L'objectif des 55 milliards de francs prévus par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 n'a pas été atteint : au 30 octobre 2001, le Fonds de réserve dispose d'un peu plus de 25 milliards de francs ; à peine 43 milliards de francs seront « en caisse » au début de l'année 2002. Qu'importe ! Le Gouvernement annonce désormais, pour la fin de l'année 2002, 85 milliards de francs, montant hautement improbable.

Tous ces « mouvements de yoyo » 1 ( * ) , tous ces objectifs non respectés, tous ces « plans de financement » bouleversés portent une nouvelle fois atteinte à la crédibilité de l'action publique.

Dès lors, le Gouvernement n'a plus d'autre ressource que de faire appel à l'Histoire, en évoquant les mouvements sociaux de 1995, qui auraient compromis le dossier de la réforme des retraites. Encore un effort et il reprochera à l'ancienne majorité l'échec de la loi sur les retraites ouvrières et paysannes de 1910.

Ce Gouvernement sait-il seulement qu'il sera jugé au regard de son action présente ?

I. LA BRANCHE VIEILLESSE : UN ÉQUILIBRE FINANCIER FRAGILE ET COMPLEXE

La branche vieillesse est aujourd'hui à la veille du « cyclone » qui la frappera à partir de 2006. Le « choc » des retraites est une certitude démographique.

La branche n'a pas pour autant profité des années exceptionnelles, tant sur le plan démographique que sur le plan économique, qui correspondent aux années 1997 à 2001, pour préparer l'avenir, au-delà de « l'ectoplasme » 2 ( * ) que constitue le Fonds de réserve créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.

Sa situation financière apparaît pour le moins fragile.

A. UN ÉQUILIBRE FINANCIER VARIABLE ET FRAGILE

1. L'objectif de dépenses atteint désormais près de 900 milliards de francs

La branche vieillesse-veuvage rassemble les prestations d'assurance vieillesse correspondant à des droits directs ou dérivés, les prestations d'assurance veuvage et les prestations d'invalidité servies à des bénéficiaires de droits directs âgés de plus de soixante ans, ou des bénéficiaires de droits dérivés. Seuls les régimes de base sont concernés, les régimes complémentaires étant exclus du « champ » des lois de financement de la sécurité sociale.

Même si l'attention de l'opinion publique est attirée sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie, l'objectif de dépenses de la branche vieillesse est le plus important en termes financiers.

Les dépenses vieillesse : quelques conventions comptables

La définition des dépenses de vieillesse est précisée dans l'annexe c) du projet de loi : leur champ couvre l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de 20.000 cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres. L'objectif de dépenses porte sur l'ensemble des dépenses des régimes et non sur les seules prestations.

Ces dépenses comprennent :

•  les prestations sociales légales ou extralégales ;

•  les prestations des services sociaux (notamment la prise en charge partielle des cotisations des praticiens et auxiliaires médicaux) ;

•  les frais de gestion engagés par les organismes de sécurité sociale ;

•  les transferts entre régimes de protection sociale ;

•  les frais financiers et les autres dépenses.

L'objectif de dépenses de la branche vieillesse-veuvage du projet de loi de financement est défini à partir du total des dépenses de l'ensemble des régimes de base obligatoires, en retranchant les dépenses des régimes de moins de 20.000 cotisants ou bénéficiaires, les transferts internes aux régimes de base considérés (mécanismes de compensation), ainsi que les dépenses constituant la contrepartie des cotisations prises en charge par la sécurité sociale.

L'objectif de dépenses de la branche vieillesse-veuvage pour 2002, prévu à l'article 31 du projet de loi, s'élève en droits constatés à 136,06 milliards d'euros (892,7 milliards de francs), en progression de 3,99 % par rapport à l'année 2001 .

En encaissements-décaissements, l'objectif révisé 2001 est égal à 830,8 milliards de francs, ce qui permet d'établir la statistique suivante : de 1997 (année pour laquelle l'objectif s'élevait à 721,8 milliards de francs) à 2001, 109 milliards de francs supplémentaires ont été affectés à la branche vieillesse-veuvage, soit une progression de l'ordre de 15,1 %. Cette progression est de même nature que celle de la branche maladie-maternité-invalidité-décès et est légèrement supérieure à la progression des dépenses globales. Le taux de progression annuel moyen est supérieur à 3,5 %.

Année

1997

1998

1999

2000

2001

Montant

721,8

753,5

777,8

799,6

830,8

% d'évolution

nd

+ 4,39 %

+ 3,22 %

+ 2,80 %

+ 3,90 %

(en encaissements-décaissements et milliards de francs)

La série disponible en droits constatés débute à partir de 1999.

1999

2000

2001

2002

122,5

126,8

130,9

136,1

nd

+ 3,48 %

+ 3,23 %

+ 3,99 %

(en droits constatés et milliards d'euros)

Les dépenses vieillesse des régimes de base correspondent en quasi-intégralité aux dépenses de prestations, qui évoluent en 2002 à un rythme de 4,04 %. Les dépenses de gestion ont tendance à stagner en francs constants.

Les dépenses vieillesse des régimes de base

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

Prestations (1)

123.908

128.693

133.892

Transferts entre organismes de sécurité sociale (2)

11.464

10.656

11.034

Transferts entre organismes de sécurité sociale « non consolidables » (3)

15

20

20

Autres charges techniques (4)

2

2

2

Diverses charges techniques (5)

826

65

59

Charges financières (6)

56

57

52

Autres charges techniques (7)

32

31

31

Charges de gestion courante (8)

1.932

2.009

2.033

Total brut (9)

138.236

141.522

147.124

Objectif de dépenses (9)-(2)

126.772

130.866

136.089

Source : annexe c) du PLFSS 2002, p.13, 23 et 24.

Pour des raisons historiques, le système français d'assurance vieillesse est morcelé. Ainsi, seuls les dix-neuf régimes dépassant les 20.000 cotisants ou retraités titulaires de droits propres font l'objet, à travers les lois de financement de la sécurité sociale, d'une attention particulière du Parlement 3 ( * ) .

Ces dix-neuf régimes peuvent être regroupés en cinq catégories :

- le régime général des salariés ;

- les « régimes » de la fonction publique , qui comprennent la CNRACL pour la fonction publique et territoriale et le « régime » fictif des fonctionnaires civils et militaires ;

- le régime agricole , qui comprend les exploitants et les salariés agricoles ;

- les régimes spéciaux de salariés , qui couvrent l'essentiel du secteur public ou anciennement public et certaines professions à statut ;

- les régimes des non salariés non agricoles , constitués de quatre caisses différentes, l'ORGANIC pour les retraités de l'industrie et du commerce, la CANCAVA pour les artisans, la CNAVPL pour les professions libérales et la CNBF pour les avocats.

Leurs dépenses brutes progresseront l'an prochain au rythme de 3,96 %, contre 2,38 % en 2001.

Les dépenses vieillesse des régimes de base

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

Régime général

63.765

65.429

68.069

Salariés agricoles

4.704

4.728

4.826

Exploitants agricoles

8.494

8.461

8.660

Fonctionnaires civils et militaires

31.020

31.917

33.487

FSPOIE (ouvriers de l'Etat)

1.479

1.495

1.511

CNRACL

10.081

10.348

10.986

Mines

2.295

2.269

2.258

EGF

2.850

3.001

3.104

SNCF

4.303

4.390

4.471

RATP

665

678

693

ENIM

1.002

1.039

1.058

CRPCEN

430

442

456

Banque de France

263

270

277

ORGANIC

2.993

3.046

3.143

CANCAVA

2.125

2.188

2.272

Cultes

239

239

240

CNAVPL

977

1.009

1.033

CNBF

120

125

143

SASV

433

446

438

Total brut

138.236

141.522

147.124

Objectif de dépenses

126.772

130.866

136.089

L'étude des dépenses de prestations permet d'apprécier avec davantage de finesse la part des différents régimes.

Les dépenses de prestations des régimes d'assurance vieillesse

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

Régime général

57.460

59.948

6.2485

Fonctionnaires civils et militaires

28.199

29.320

30.763

Salariés agricoles

4.479

4.546

4.641

Exploitants agricoles

8.104

8.249

8.484

FSPOIE - ouvriers de l'Etat

1.469

1.485

1.499

CNRACL

6.954

7.431

7.910

Mines

1.931

1.923

1.907

EGF

2.663

2.792

2.792

SNCF

4.258

4.322

4.379

RATP

631

646

659

ENIM

967

1.004

1.020

CRPCEN

411

431

451

Banque de France

257

265

273

ORGANIC

2.829

2.919

3.013

CANCAVA

2.046

2.108

2.189

Cultes

225

227

228

CNAVPL

544

570

597

CNBF

58

60

62

SASV

426

439

431

Total des dépenses de prestations

123.911

128.685

133.783

Objectif de dépenses

126.772

130.866

136.089

Le ratio dépenses de prestations/objectif de dépenses s'améliore, puisqu'il sera de 98,3 % en 2002, contre 97,7 % en 2000.

La somme des prestations servies par le régime général et par les régimes dits alignés ne représente pas même la moitié du total des prestations, tandis que le groupe « secteur public » au sens large, comprenant les régimes de la fonction publique et les régimes spéciaux, en verse près de 40 %.

C'est dire le poids financier des régimes publics et l'importance de leur réforme.

Part dans le total des prestations des régimes de retraite en 2002

Régime général

46,71 %

Régimes de la Fonction publique

30,03 %

Régime agricole

9,81 %

Régimes spéciaux

9,07 %

Régimes non salariés non agricoles

4,38 %

TOTAL

100,00 %

2. La branche vieillesse parvient tout juste à l'équilibre

Le Gouvernement présente fréquemment la branche vieillesse-veuvage sous l'angle d'une branche « excédentaire ».

Cette situation « excédentaire » mérite tout d'abord deux rappels :

- la branche est d'ores et déjà délestée du poids des avantages non contributifs , pris en charge par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) depuis 1993 ;

- le versement par la CNAF d'une contribution censée financer l'allocation vieux parents au foyer (AVPF) soulage chaque année les comptes de la CNAV , au détriment de ceux de la branche famille, pour un montant estimé en 2002 à 22,9 milliards de francs .

Votre rapporteur a estimé intéressant, dans la droite ligne de la proposition de l'article 1 er de la proposition de loi organique présentée par M. Charles Descours et de plusieurs de ses collègues 4 ( * ) , de rapprocher les dépenses des recettes de la branche vieillesse.

La loi organique du 22 juillet 1996 relative aux lois de financement de la sécurité sociale a prévu le vote de prévisions de recettes par catégorie et d'objectifs de dépenses par branche . Or, il est essentiel de déterminer l'équilibre de chaque branche de la sécurité sociale, ce qui permet ainsi de dépasser le seul débat portant sur l'équilibre du régime général.

Les recettes consolidées de la branche vieillesse 5 ( * )

(en millions d'euros)

1999

2000

2001

2002

Cotisations effectives

71.292

71.181

73.929

77.001

Cotisations fictives vieillesse

27.303

27.936

29.102

30.664

Impôts et taxes affectés

4.418

3.508

4.325

3.636

pm : Transferts avant consolidation

27.110

29.276

29.723

30.532

Transferts entre organismes de SS

11.957

14.711

15.585

16.130

Contributions publiques

4.216

4.601

4.853

4.776

Produits de gestion courante

425

390

383

386

Total des produits - vieillesse

120.657

123.158

128.984

133.444

La part des impôts et taxes affectés ne représentera, de manière apparente, que 2,72 % des recettes en 2002. Certes, il convient d'inclure les recettes fiscales affectées au FSV, classées dans la catégorie « transferts », qui bénéficient indirectement à la branche. Il n'en demeure pas moins que le paradoxe du financement de la branche vieillesse, noté par la Cour des comptes dans son dernier rapport sur la sécurité sociale, est patent : soumises, dans un avenir proche, à un « choc » important, ses ressources sont principalement assises sur les cotisations, alors que les branches famille et maladie ont connu depuis le début des années quatre-vingt-dix une diversification beaucoup plus importante.

La comparaison des recettes consolidées et des dépenses consolidées de la branche vieillesse montre un déficit compris entre 2 et 4 milliards d'euros (soit de 13,1 à 26,2 milliards de francs).

C'est bien par le seul mécanisme de l'AVPF, exclue des recettes consolidées, mais qu'il convient de réintégrer afin de comparer utilement les dépenses et les recettes de la branche vieillesse, que celle-ci tend à un équilibre variable, comme l'atteste le déficit 2000, et fragile.

« L'équilibre » de la branche vieillesse 2000-2002

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

Recettes consolidées

123.158

128.984

133.444

Objectif de dépenses consolidé

126.772

130.866

136.089

Dépenses des - 20.000

442

442

442

Total des dépenses

127.214

131.308

136.531

SOLDE

- 4.056

- 2.324

- 3.087

AVPF

3.374

3.424

3.493

SOLDE APRES AVPF

- 682

+ 1.100

+ 406

Le déficit pour 2000 a pour origine la dette « FOREC », tandis que la réduction de l'excédent entre 2001 et 2002 s'explique par une progression des recettes (+ 3,46 %) inférieure à celle des dépenses (+ 3,98 %).

Une telle présentation démontre l'urgence de présenter les comptes de la sécurité sociale par branche .

3. La CNAV souffre du financement des trente-cinq heures

L'analyse des comptes de la branche vieillesse du régime général des salariés (la CNAV) est bouleversée par la prise en compte, au titre de l'exercice 2000, de la dette du « Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales » (FOREC).

a) L'exercice 2000 : un excédent transformé en déficit du fait du projet de loi

L'article 5 du projet de loi, en violation du principe même des droits constatés, met à la charge des régimes sociaux la « dette » du FOREC sur l'exercice 2000. Cette dette a pour conséquence inattendue de « créer » un déficit de la branche vieillesse du régime général pour l'année 2000.

Une branche vieillesse en déficit en 1997 ?

Le Gouvernement utilise souvent l'argument d'une « branche vieillesse en déficit de 5 milliards de francs en 1997 » . Cet argument a encore été utilisé par Mme Elisabeth Guigou, le 23 octobre 2001, lors de la discussion générale du PLFSS à l'Assemblée nationale 6 ( * ) : « Nous avions trouvé la branche vieillesse en déficit. Celle-ci renoue désormais avec les excédents et devrait afficher environ 1 milliard d'euros d'excédents en 2002 » .

En fait, le Gouvernement compare deux soldes comptables de nature fort différente, puisqu'à partir du 1 er janvier 1998 est entré en vigueur le système RACINE. Le système RACINE ventile à la source -au niveau des URSSAF- les recettes de la sécurité sociale, à l'inverse du mécanisme précédent, qui répartissait au niveau national, selon une méthode « statistico-comptable ».

Cette modification introduit une rupture dans la série des encaissements recensés, ce qui rend non significatives les évolutions entre 1997 et 1998 et rend difficile la compréhension du niveau même de ces encaissements.

RACINE a profondément modifié la répartition des encaissements entre branches du régime général. Cette modification, défavorable à la branche maladie, a été au contraire très favorable à la branche vieillesse, qui a bénéficié en 1998, à ce titre, d'un surcroît de recettes de 5,22 milliards de francs.

Ce qui revient à dire que la branche vieillesse du régime général était probablement à l'équilibre en 1997. Le Gouvernement utilise donc un argument peu scrupuleux.

L'excédent de la CNAV pour 2000, arrêté par le conseil d'administration et approuvé par la tutelle, est de 1,0 milliard de francs en encaissements/décaissements et de 3,3 milliards de francs en droits constatés. Le compte en droits constatés tient compte d'une « créance » sur les allégements de charges compensés à la sécurité sociale par le FOREC.

Le manque à gagner de la CNAVTS en 2000

Milliers de francs

Millions d'euros

Produits à recevoir

22.058.652

3.362.820

Encaissements

17.381.928

2.649.858

Solde

4.676.724

712.962

L'application de l'article 5 du projet de loi conduirait à l'annulation d'une créance de 4,7 milliards de francs sur le compte 2000, et ainsi à un déficit de 1,5 milliard de francs. Il est ainsi tout à fait aventureux, comme l'annonce Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, d'affirmer que la branche vieillesse « renoue avec les excédents ».

En conséquence, le versement au Fonds de réserve de l'excédent 2000, prévu par le dossier de la conférence de presse du 20 septembre 2001, est devenu sans objet.

L'amélioration des comptes de la CNAV sur la période repose sur une augmentation soutenue de ses recettes, compte tenu de l'augmentation de la masse salariale. Le pourcentage moyen de progression annuelle est compris, sur la période, entre 3,8 et 3,9 %.

Les recettes de la CNAV (1997-2002)

(encaissement-décaissement, en millions de francs)

1998

1999

2000

2001

2002

Cotisations

274.011

287.960

295.483

306.760

322.987

Cotisations prises en charge (Etat+FOREC)

19.106

18.232

23.844

33.102

29.953

Recettes fiscales affectées

4.653

5.241

3.625

3.781

3.955

Transferts reçus

22.828

22.605

23.046

22.520

22.966

Contribution FSV

58.172

63.605

59.842

58.875

60.972

Versements rétroactifs

972

952

915

906

906

Contribution FSI

34

35

37

43

44

Produits financiers

96

134

418

306

256

Recettes diverses

9

7

11

11

11

Recettes DOM

5.420

5.611

5.793

5.962

6.118

TOTAL

385.386

403.528

412.245

432.417

448.325

Source : rapport CCSS, tome I, p. 203.

b) Les comptes de la CNAV en 2001 et en 2002 : une lisibilité brouillée à dessein

Les comptes 2001 et 2002 de la CNAV, annoncés par le rapport présenté à la commission des comptes de la sécurité sociale du 20 septembre 2001, ont été construits -au mépris de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 qui prévoit explicitement que les régimes sociaux doivent être équilibrés par une dotation de l'Etat, en cas de déséquilibre du fonds de financement des trente-cinq heures- en tenant compte d'une compensation partielle des exonérations de charges financées par le FOREC.

Solde de la CNAVTS « tendanciel » en droits constatés - 2001/2002

2001

2002

Millions de francs

Millions d'euros

Millions de francs

Millions d'euros

Charges (1)

433.314

66.058

449.340

68.501

Produits (2)

438.035

66.778

453.775

69.178

Solde « tendanciel » (3)

4.721

720

4.435

677

Exonérations non compensées (4)

1.680

256

5.359

817

Produits révisés (2) + (4)

439.715

67.034

459.134

69.995

Véritable solde tendanciel

6.401

976

9.794

1.493

Source : d'après le rapport CCSS, septembre 2001.

Le jeu des différentes tuyauteries « rectificatives » pour l'exercice 2001, qui consiste à ponctionner des recettes de la CNAMTS, n'affecte pas la CNAVTS.

Ainsi le solde 2001, « corrigé » par le PLFSS 2002, est-il -de manière tout à fait artificielle- « amélioré ». Ce montant de 6,4 milliards de francs serait affecté au Fonds de réserve pour les retraites.

En ce qui concerne le PLFSS 2002, l'effet des mesures du projet de loi consiste à diminuer ce solde tendanciel.

Solde « après mesures » de la CNAVTS en 2002

(en millions de francs)

2002

Produits

Charges

Compte tendanciel

459.134

449.340

Solde tendanciel

+ 9.794

Diminution des recettes du prélèvement social de 2 %

- 1.980

Retours FSV (liés au coup de pouce)

+ 57

Cotisations

- 13

Transfert régimes intégrés

- 150

Coup de pouce 0,3 % sur les pensions

+ 1.156

Compte après mesures

457.198

450.346

Solde après mesures

+ 6.852

L'excédent prévu pour 2002 serait ainsi de 6.852 millions de francs (un peu plus d'un milliard d'euros).

Le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale dégrade de 164 millions de francs ce solde, qui s'établirait désormais à 6.688 millions de francs.

Il reste naturellement que cet excédent, comme celui prévu pour 2001, repose sur des hypothèses de croissance très « favorables », comme l'a rappelé devant votre commission Mme Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la CNAV 7 ( * ) .

Votre rapporteur vous renvoie sur ce point aux analyses du rapport présenté par M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie 8 ( * ) .

4. Le Fonds de solidarité vieillesse est désormais structurellement déficitaire

Le Fonds de solidarité vieillesse, à la fois pierre angulaire du financement des trente-cinq heures et « plaque tournante » des prélèvements 9 ( * ) , a connu depuis 2000 une profonde modification de son financement.

Désormais, le FSV est structurellement déficitaire , compte tenu de l'affectation au FOREC des droits sur les boissons, de la diminution du taux de CSG qui lui est affecté (de 1,3 % à 1,15 % par la loi de financement pour 2001, de 1,15 % à 1,05 % par la loi « allocation personnalisée d'autonomie » du 20 juillet 2001) et de la prise en charge de la dette de l'Etat à l'égard des régimes complémentaires AGIRC-ARRCO 10 ( * ) .

Le Fonds de solidarité vieillesse : 1997-2002

(droits constatés, en millions de francs)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Recettes

72.092

75.531

82.711

74.298

75.167

73.913

dont CSG

58.546

60.479

68.174

67.550

63.024

60.020

dont prélèvement social 2 %

2.520

2.637

dont droits sur les boissons

11.713

11.935

11.341

- 525

0

0

dont C3S

4.085

3.616

4.454

dont versements CNAF

273

2.886

6.010

dont produits financiers

71

107

112

154

300

72

Dépenses

72.333

73.936

80.466

72.418

75.853

77.206

Solde

- 241

1.595

2.245

1.880

- 686

- 4.013

Solde cumulé (1)

4.795

6.390

8.635

10.515

9.829

3.937

Versement au F2R (2)

1.880

Solde cumulé (1)-(2)

4.795

6.390

8.635

10.515

7.949

3.937

Source : Fonds de solidarité vieillesse.

Son compte est aujourd'hui maintenu à flot en raison de trois nouvelles « recettes » :

- les versements de la branche famille : 2,9 milliards de francs en 2001, puis 6 milliards de francs en 2002 ; ces versements sont soumis à une augmentation régulière jusqu'en 2007, où la branche s'acquitterait de l'intégralité des majorations de pensions pour enfants ;

- les ponctions sur le compte de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés (C3S) , dont le solde avait été affecté au FSV pour alimenter le Fonds de réserve pour les retraites : ces ponctions représentent un montant de plus de 12 milliards de francs sur les exercices 2000 à 2002 cumulés ;

- les ponctions sur son fonds de roulement (c'est-à-dire ses excédents cumulés), qui était censé également alimenter le Fonds de réserve pour les retraites.

5. La branche vieillesse n'a pas pu profiter d'une situation démographique exceptionnelle pour préparer l'avenir

Les années 1998-2002 constituent des années doublement « exceptionnelles » pour la branche vieillesse du régime général :

- La situation démographique est pour l'instant très favorable.

Evolution des cotisants et retraités du régime général

(en milliers)

Comme le montre le graphique, la progression du nombre de retraités est quasiment parallèle au nombre de cotisants avec un écart important entre les deux courbes. Cette situation démographique est exceptionnelle.

En effet, la période de la guerre a donné lieu à une chute du taux de natalité. Ces classes démographiques creuses arrivent à l'âge de la retraite entre 1999 et 2006-2007. Cet effet sera provisoire car, à partir de 2006, les classes pleines de 1946 et suivantes arriveront en âge de retraite et seront à l'origine d'une plus forte croissance du nombre de retraités, donc des pensions versées.

Comme l'écrit la Cour des comptes dans son rapport 2001 : « L'arrivée à l'âge de la retraite des classes d'âge peu nombreuses nées à la fin des années trente ou au début des années quarante génère un faible flux de nouveaux retraités, ce qui réduit le taux d'accroissement en nombre de la population des retraités. On sait que cette situation va se renverser brutalement lorsque les classes nombreuses nées à partir du milieu des années quarante vont parvenir à l'âge de la retraite » 11 ( * ) .

- Les recettes de la branche vieillesse ont bénéficié d'une croissance dynamique de la masse salariale .

Résultats 1998-2002 en droits constatés et en millions de francs

1998

1999

2000

2001

2002

Produits

389.700

407.100

416.415

439.715

457.198

Charges

386.800

402.100

417.766

433.314

450.346

SOLDE

+ 2.829

+ 5.033

- 1.351

+ 6.401

+ 6.852

Versement au F2R

+ 5.033

+ 6.401

L'excédent cumulé sur les années 1998-2002 serait de 19,7 milliards de francs, dont seulement 5 milliards de francs ont été versés, pour l'instant, au Fonds de réserve.

La série des soldes de la branche vieillesse du régime général, établie en encaissements-décaissements, montre un solde cumulé moins flatteur, puisqu'il serait de 16,9 milliards de francs sur la même période 1998-2002, et de seulement 11,7 milliards de francs en incluant l'année 1997.

Résultats de la CNAV 1997-2002 en encaissements décaissements
et en milliards de francs

1997

1998

1999

2000

2001

2002

SOLDE

- 5,2

- 0,2

+ 3,7

1,0

+ 5,4

+ 7,0

Si l'on ajoute aux 5 milliards de francs en provenance de la CNAV le 1,9 milliard de francs du Fonds de solidarité vieillesse, versé le 10 octobre dernier au Fonds de réserve des retraites, la contribution de la branche vieillesse au financement de son avenir est de 6,9 milliards de francs, soit un peu plus de 1 milliard d'euros.

Votre rapporteur constate ainsi qu'un tel excédent cumulé, compte tenu des perspectives aussi favorables de la branche vieillesse du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse, qui aurait dû bénéficier à plein de la baisse du chômage et de l'augmentation de la ressource dynamique de la CSG, est un piètre résultat.

B. L'URGENCE D'UNE SIMPLIFICATION ET D'UNE ÉQUITÉ DES TRANSFERTS FINANCIERS

La plupart des régimes de retraite sont structurellement déficitaires ; des transferts financiers, de plus en plus complexes, ont ainsi été imaginés pour les équilibrer 12 ( * ) .

L'équilibre financier courant des caisses est maintenu par trois types de ressources.

1. La contribution sociale de solidarité sur les sociétés : un détournement du principe fondant cette taxe

L'équilibre des régimes de non-salariés (commerçants et artisans) est assuré par l'affectation d'une part de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).

Cette taxe qui pèse sur le chiffre d'affaires hors taxe a été instituée par la loi du 3 janvier 1970 afin de compenser aux régimes des non salariés non agricoles les pertes de recettes liées à l'extension du salariat. Il ne s'agit en aucun cas d'un transfert d'une ressource fiscale de l'Etat, mais d'une imposition dont la caractéristique sui generis est d'avoir été affectée aux régimes de sécurité sociale. Elle a fait l'objet d'une réforme destinée à accroître son rendement en 1995. La C3S présente des caractéristiques intéressantes : son taux est bas (0,13 %), son assiette est large (entreprises de chiffre d'affaires de plus de cinq millions de chiffre d'affaires) et son produit extrêmement dynamique en période de croissance économique.

La C3S a contribué à l'équilibre du régime du commerce et l'industrie, l'ORGANIC 13 ( * ) , pour 3,3 milliards de francs en 2000 et à hauteur de 5,4 milliards de francs en 2001. Le régime des artisans, par l'intermédiaire de la CANCAVA, se voit attribuer respectivement 1,9 milliard de francs et 3,1 milliards de francs en 2000 et 2001. Grâce à ce mécanisme, le solde de ces régimes fluctue autour de l'équilibre.

ORGANIC - régime de base

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

Produits

2.799,0

3.285,0

2.961,6

Charges

3.088,4

3.146,5

3.236,4

SOLDE

- 289,3

+ 138,6

- 274,8

CANCAVA - régime de base

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

Produits

1.953,8

2.251,4

2.118,9

Charges

2.163,3

2.225,4

2.303,9

SOLDE

- 209,5

+ 26,0

- 185,0

La C3S fait aujourd'hui l'objet d'un double détournement :

- premier détournement, elle contribue à nouveau 14 ( * ) au financement du régime agricole , ce qui constitue un moyen pour l'Etat de réduire ses dépenses budgétaires, par le biais de la subvention d'équilibre qu'il verse au BAPSA ;

- second détournement, elle est désormais appelée comme ressource supplétive du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), afin de masquer son déficit structurel : le financement du FOREC, de la dette de l'Etat à l'égard des régimes complémentaires AGIRC-ARRCO et de l'allocation personnalisée d'autonomie l'a, en effet, rendu exsangue. Ce détournement est une conséquence imprévue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, qui avait inclus le FSV comme destinataire des excédents de C3S. En effet, il s'agissait à l'époque d'alimenter le Fonds de réserve.

Compte emplois-ressources de la C3S

(en millions d'euros)

1999

2000

2001

2002

EMPLOIS

2.438

2.262

2.279

2.147

dotation de gestion et autres charges

10

10

10

11

transferts versés aux régimes des non salariés non agricoles

CANAM

270

1259

598

855

ORGANIC

1.029

513

818

419

CANCAVA

626

288

477

401

Régime complémentaire bâtiment

45

40

43

42

BAPSA

152

152

332

520

transfert Fonds de réserve

305

RESSOURCES

2 . 638

2 . 813

2 . 951

3 . 041

Encaissements C3S

2.612

2.761

2.921

3.018

Revenus financiers

26

52

30

23

Solde des opérations courantes

200

551

679

894

transfert versé au FSV

623

551

679

Réserves du compte

623

551

679

894

Sur l'année 2002, le total des sommes ainsi distraites sera de 1.199 millions d'euros (soit près de 8 milliards de francs).

La présence, malgré ce double détournement, de réserves florissantes (plus de 5,8 milliards de francs à la fin de l'année 2002), laisse malheureusement présager, au cas où le solde budgétaire de l'Etat et la situation financière du Fonds de solidarité vieillesse se dégraderaient, un nouveau « siphonnage » 15 ( * ) .

Le Sénat, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, avait proposé un dispositif tendant à affecter la C3S par une clé de répartition en pourcentages fixée par la loi : 35 % pour la CANAM, 30 % pour l'ORGANIC et le régime complémentaire du bâtiment, 15 % pour la CANCAVA et 20 % pour le Fonds de réserve. Un tel dispositif, rejeté par le Gouvernement au seul motif de sa « rigidité », présentait l'avantage de la lisibilité.

2. Le système des compensations : la nécessité d'une réforme

Le système français de sécurité sociale est caractérisé par un grand nombre de régimes organisés sur le principe de la répartition au sein d'un groupe socioprofessionnel. Ces régimes, créés à des époques différentes, ont chacun leurs spécificités. Leur démographie varie sensiblement, leurs moyens financiers également. Ces derniers sont d'autant plus élevés que le nombre de cotisants est supérieur au nombre de retraités et que le salaire moyen du groupe sur lequel sont assises les cotisations est important.

Aussi est-il apparu juste, à défaut de la création du régime « unique » souhaité en 1945, d'instaurer un mécanisme de solidarité entre les régimes.

a) La compensation généralisée : un mode de calcul de plus en plus arbitraire

La loi du 24 décembre 1974 a instauré un système de compensation généralisée. Son objet est d'empêcher que certains régimes n'encourent la faillite ou ne soient dans l'obligation de mettre en oeuvre des mesures d'économie sévères pour atteindre un équilibre interne manifestement hors de leur portée.

A ce « jeu » de compensation entre régimes -qui est établie au titre des trois risques 16 ( * ) -, certains sont contributeurs nets et d'autres bénéficiaires nets.

Comme les régimes ne fonctionnent pas selon des règles similaires, il serait inéquitable de répartir les transferts de compensation en se limitant à redistribuer aux régimes déficitaires les excédents des autres régimes. Ainsi, le troisième alinéa de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale précise les objectifs des mécanismes de compensation : « La compensation tend à remédier aux inégalités provenant des déséquilibres démographiques et des disparités de capacités contributives entre les différents régimes ».

Il s'agit de déterminer la situation des différents régimes si on leur appliquait les caractéristiques d'un régime fictif qui servirait une prestation dite « de référence ». Seuls les régimes de sécurité sociale dont l'effectif des actifs cotisants et des retraités titulaires de droits propres âgés de 65 ans 17 ( * ) ou plus dépasse au total 20.000 personnes participent à cette compensation.

Le dispositif comporte deux étapes :

- une compensation entre régimes de salariés, où les capacités contributives des régimes sont prises en compte puisque les cotisations du régime fictif sont assises sur les masses salariales. La prestation de référence est la pension moyenne servie aux salariés agricoles, dont le montant est le plus modique de toutes les pensions servies ;

- une compensation entre les régimes de salariés (ceux-ci étant agrégés dans un seul régime global) et les régimes de non-salariés. Celle-ci repose sur l'application d'un régime fictif, mais la cotisation est uniforme par cotisant et non proportionnelle aux masses salariales.

A l'origine, la prestation de référence retenue fut celle du régime des exploitants agricoles en tant que prestation moyenne la plus basse servie par les régimes en présence. Pour les exercices 1993, 1994 et 1998, elle céda la place à celle de l'ORGANIC, puis à celle de la CAVIMAC en 1999, puis à nouveau à celle l'ORGANIC à compter de 2000.

La compensation généralisée vieillesse

(en millions d'euros)

1999

2000

2001

2002

REGIMES CONTRIBUTEURS

Régime général

1.721,9

1.745,1

1.882,7

1.950,9

Fonctionnaires

1.795,2

1.825,5

1.804,7

1.764,8

CNRACL

1.484,1

1.493,0

1.513,0

1.537,3

SNCF

11,1

17,2

20,3

RATP

27,4

27,9

28,7

28,7

EGF

114,4

118,5

116,9

113,6

Banque de France

5,8

5,4

5,0

4,4

CNAVPL

392,1

398,1

405,2

414,0

CNBF

43,9

47,2

51,1

64,6

TOTAL en euros

5 . 584,9

5 . 671,7

5 . 824,5

5 . 898,6

TOTAL en francs

36.635

37.204

38.206

38.692

REGIMES BENEFICIAIRES

BAPSA (exploitants agricoles)

3.981,0

4.046,9

4.149,0

4.197,3

ORGANIC

732,1

745,5

783,8

805,5

CANCAVA

299,9

320,5

324,3

327,3

CANSSM

320,5

319,3

317,8

312,2

CAVIMAC

171,4

173,4

175,8

175,4

ENIM

49,7

51,4

54,3

56,3

SNCF

19,4

FSPOIE

8,3

12,2

16,4

20,2

CRPCEN

2,6

2,5

3,1

4,4

TOTAL

5.584,9

5.671,7

5.824,5

5.898,6

TOTAL en francs

36.635

37.204

38.206

38.692

Source : d'après le rapport CCSS, septembre 2001, p. 114-115.

b) La compensation spécifique : un mécanisme confiscatoire

Pour corriger l'insuffisance de transferts de compensation généralisée vis-à-vis des régimes spéciaux, la loi du 30 décembre 1985 a institué une compensation supplémentaire spécifique aux régimes spéciaux qui s'ajoute à la compensation généralisée.

Les principales règles de la « surcompensation »

Les régimes concernés sont ceux dont l'effectif des retraités titulaires de pensions de droit direct, âgés de 60 ans ou plus, dépasse 5.000 personnes : fonctionnaires de l'Etat, CNRACL, ouvriers de l'Etat (FSPOIE), marins (ENIM), mines (CANMSS), salariés des chemins de fer secondaires (CAMR), EDF-GDF, Banque de France, clercs de notaire (CRPCEN), régimes de la RATP et de la SEITA.

Dans un premier temps, une nouvelle compensation est calculée entre l'ensemble des régimes participant à la compensation spécifique. Cette nouvelle compensation se distingue de la compensation généralisée sur plusieurs points : elle concerne à la fois les retraités de droit direct et les retraités de droit dérivé ; les effectifs de retraités incluent tous les retraités de 60 ans et plus (contre 65 ans pour la compensation généralisée) ; les prestations de référence (droit direct et droit dérivé) sont des prestations moyennes et non des prestations minimales . Le coût global est réparti entre les régimes au prorata des rémunérations servant de base au versement des cotisations d'assurance vieillesse.

Dans un second temps, il est opéré une redistribution des transferts versés au titre de la compensation généralisée. Tous, à l'exception de la SEITA et de la CAMR, participent à la compensation généralisée et sont globalement débiteurs. La première étape de la compensation spécifique consiste à redistribuer entre ces régimes, au prorata de leurs masses salariales, le total de leurs versements à la compensation généralisée. Dans ce nouveau calcul, tous les régimes sont débiteurs. On calcule pour chaque régime la différence entre le versement à la compensation généralisée calculé « après redistribution » et le transfert (débit ou crédit) initial à cette compensation.

Pour chaque régime, la somme des deux transferts précédents définit le transfert de compensation spécifique, mais compte tenu des montants excessifs auxquels ces calculs aboutissent, la compensation spécifique n'est appliquée que partiellement. Le taux d'application, de 22 % à l'origine, a été augmenté jusqu'à 38 %, puis ramené à 34 % en 2000 et 30 % en 2001. En outre, le transfert de compensation est limité pour chaque régime à 25 % de ses charges totales de pensions de droits directs de plus de 60 ans et de droits dérivés.

Après avoir atteint un sommet en 1999, les transferts de compensation spécifique avaient entamé une décrue en 2000 et en 2001. Ils repartent à la hausse en 2002.

Le régime fictif des fonctionnaires de l'Etat et la CNRACL sont les deux principaux régimes débiteurs.

La compensation spécifique vieillesse

(en millions d'euros)

1999

2000

2001

2002

RÉGIMES CONTRIBUTEURS

Fonctionnaires

1.306,4

1.209,1

1.030,5

970,4

CNRACL

1.536,2

1.382,8

1.256,6

1.337,8

EGF

77,3

64,7

61,7

63,4

TOTAL en euros

2.919,9

2.656,6

2.348,8

2.371,6

TOTAL en francs

19.153,3

17.426,8

15.407,1

15.556,7

RÉGIMES BÉNÉFICIAIRES

FSPOIE

217,6

205,3

189,1

197,6

CANSSM

1.520,7

1.385,1

1.229,4

1.237,7

ENIM

318,0

296,0

270,7

281,7

SNCF

666,3

592,9

503,6

497,0

RATP

16,8

13,9

10,5

9,4

CRPCEN

52,4

49,5

45,4

49,1

Banque de France

8,2

8,9

8,7

10,0

SEITA

35,7

33,9

31,7

32,4

CAMR

84,2

71,2

59,7

56,7

TOTAL en euros

2.919,9

2.656,7

2.348,8

2.371,6

TOTAL en francs

19.153,3

17.426,8

15.407,1

15.556,7

c) L'exemple de deux régimes fortement contributeurs : la CNAVPL et la CNRACL

La Caisse nationale des professions libérales, qui regroupe les douze sections professionnelles de ces professions, à l'exception notable des avocats ayant préféré constituer leur propre caisse, la Caisse nationale des barreaux français (CNBF), est un exemple des effets pervers de la compensation généralisée.

Son rapport démographique, excellent, s'érode néanmoins. Il atteindrait, selon les estimations réalisées par la commission Charpin, 1,1 cotisant pour 1 retraité à l'horizon 2040. Tout dépend non seulement du contexte économique mais également du choix effectué entre « libéralat » et « salariat ».

Le régime de base est fortement handicapé par la compensation, qui représentera 69,3 % des prestations versées en 2002. Même si ce ratio -qui atteignait 81 % en 1999- s'est amélioré, il n'existe aujourd'hui aucun plafonnement des mécanismes de compensation généralisée.

Les comptes de la CNAVPL

(en millions de francs)

1999

2000

2001

2002

EMPLOIS

Prestations

3.463

3.568

3.738

3.919

Compensations

2.804

2.679

2.742

2.716

Autres emplois techniques

221

252

340

351

TOTAL EMPLOIS

6.488

6.499

6.820

6.986

RESSOURCE S

Cotisations affectées

6.274

6.504

6.727

6.958

Autres ressources techniques

334

447

238

256

TOTAL RESSOURCES

6.608

6.951

6.965

7.214

Résultat net

119

452

146

230

Le régime des professions libérales est inquiet des projets évoqués en commission de compensation. Il serait notamment question de prendre en compte, dans le calcul de la compensation, les retraités à partir de 60 ans. Or, la CNAVPL reste l'un des deux seuls régimes où la retraite est attribuée à taux plein à 65 ans.

Les professionnels libéraux ne rejettent pas le principe de la compensation. Ils se bornent à demander une réforme des mécanismes, permettant un plafonnement de l'effort de solidarité. De plus, ils constatent que leur régime est exclu d'un certain nombre de mécanismes de solidarité :

- la CNAVPL ne bénéficie pas de la C3S, alors qu'elle devrait être l'un des destinataires potentiels ;

- la CNAVPL ne fait pas partie des régimes éligibles au Fonds de réserve des retraites ;

- la majoration pour conjoint à charge, attribuée dans les mêmes conditions que dans le régime général et les régimes alignés, n'est pas remboursée par le FSV 18 ( * ) .

Quant à la CNRACL, celle-ci est touchée à la fois par la compensation généralisée et la « surcompensation » des régimes spéciaux.

Malgré une dégradation continue depuis quinze ans, le rapport démographique de la CNRACL reste encore le plus favorable de l'ensemble des régimes de retraite de salariés.

Le rapport démographique de la CNRACL

1982

1987

1999

4,5

4,0

2,7

Depuis 1974, la caisse a versé 267,4 milliards de francs, dont 147 milliards de francs au titre de la compensation généralisée et 119 au titre de la compensation spécifique.

Les comptes de la CNRACL

(en milliards de francs)

1999

2000

2001

2002

EMPLOIS

Prestations

45,0

47,7

51,1

54,3

Compensations

19,8

19,3

18,0

19,1

dont généralisée

10,1

9,8

9,7

10,0

dont spécifique

8,9

8,6

7,9

8,4

dont régularisations n-2, n-1

0,8

0,8

0,4

0,6

Autres emplois techniques

1,0

1,0

1,1

1,1

TOTAL EMPLOIS

65,8

67,6

69,6

73,9

RESSOURCES

Cotisations affectées

61,1

64,1

67,4

70,1

Autres ressources techniques

1,9

2,2

2,1

2,1

TOTAL RESSOURCES

63,4

66,5

69,6

72,2

Résultat technique

18,0

18,5

18,4

17,8

Résultat net

- 2,2

- 1,1

- 0,1

- 1,7

Report à nouveau

0,8

- 0,2

- 0,3

- 2,0

Structurellement excédentaire, la CNRACL est déficitaire du fait des transferts de compensation, ce qui l'a tout d'abord conduit, à partir de 1992, à utiliser les « réserves » qu'elle avait engrangées (une quinzaine de milliards de francs).

Mais les réserves se sont épuisées, et il a fallu se résoudre -ce qui est ubuesque compte tenu du « résultat technique » de la Caisse- à recourir à l'emprunt.

Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, la CNRACL est « autorisée » à faire appel aux marchés financiers, à travers l'une des seules dispositions véritablement normative des lois de financement de la sécurité sociale que constitue le vote des plafonds d'avances de trésorerie.

Depuis 1998, ce plafond s'élève à 2,5 milliards de francs. Cette facilité n'a toutefois pas été utilisée en 1998 et en 1999, la trésorerie s'étant finalement révélée meilleure que prévu.

En revanche, en 2000 et en 2001, il a été nécessaire de recourir à l'emprunt, jusque dans la limite du plafond, et même au-delà. Votre rapporteur a en effet constaté que le plafond avait été dépassé à la fin du mois de février 2001, et que la CNRACL et la Caisse des dépôts 19 ( * ) avaient décidé de « jouer » sur les dates de valeur, afin d'éviter de demander au Gouvernement, conformément à la loi organique du 22 juillet 1996, de prendre un décret portant majoration de ce plafond.

Votre rapporteur comprend qu'un souci de bonne gestion ait prévalu, mais regrette que l'autorisation parlementaire ait été, dans une certaine mesure, bafouée : la nécessité d'un décret portant majoration aurait eu le mérite de mettre en lumière la situation de la CNRACL.

La diminution des transferts de compensation, observée en 2000 et 2001, ne se confirme pas en 2002, ce qui place la CNRACL dans une situation particulièrement délicate.

Le projet de loi propose en conséquence d'élever le plafond d'avances de trésorerie à 500 millions d'euros (3,3 milliards de francs). Selon les calculs de la CNRACL, ce plafond serait nettement insuffisant pour « tenir » lors des mois de novembre et décembre 2002 : 4,5 milliards de francs seraient au minimum nécessaires.

Votre rapporteur constate que le profil de trésorerie de l'annexe c) est beaucoup plus optimiste que celui prévu par la CNRACL.

d) La réforme de la compensation : aménagement ou suppression ?

Les mécanismes de compensation atteignent aujourd'hui leurs limites, excellemment décrites par un rapport de MM. Yves Ullmo et Louis-Paul Pelé, remis en septembre 2001 au Conseil d'orientation des retraites.

Le système est devenu tout d'abord trop complexe . Comme on l'a vu, il repose sur des règles différentes entre la compensation généralisée et la compensation spécifique. La référence à une « prestation minimale » a été, dans les faits, écartée : la Direction du budget a proposé d'exclure les petits régimes de la détermination de cette prestation. Il est certain que la référence au régime « atypique » de la CAVIMAC n'était pas peut-être pertinente. Cependant, les manipulations de variables permettent d'une année sur l'autre des écarts importants, créditant l'idée chez les régimes débiteurs, pas toujours inexacte, que la compensation n'est qu'un savant habillage d'une « ponction ».

Le système est ensuite devenu inéquitable . Certains régimes créditeurs peuvent devoir financer pour les retraités des autres régimes, par l'intermédiaire de la compensation, des prestations supérieures à celles qu'ils versent à leurs propres retraités. Les avantages familiaux pris en charge par le Fonds de solidarité vieillesse sont intégrés dans la prestation de référence. Lorsqu'un régime bénéficie de la compensation, et reçoit un transfert du FSV au titre des majorations familiales, ces majorations lui sont en quelque sorte remboursées deux fois.

Enfin, le système est devenu totalement illisible . Des régimes « contributeurs » de la compensation généralisée sont « bénéficiaires » de la compensation spécifique 20 ( * ) . Les différents mécanismes de plafonnement de la contribution des régimes, en ce qui concerne la compensation spécifique, n'ont pas correctement fonctionné. En effet, ils ne prenaient pas en compte la progression des transferts dus au titre de la compensation généralisée. La situation de la CNRACL, seul régime de retraite officiellement déficitaire , et obligée de recourir à l'emprunt, alors qu'il s'agit d'un régime structurellement excédentaire , illustre au plus haut chef les limites des mécanismes de compensation.

Votre rapporteur constate qu'il existe trois possibilités de réforme.

Le scénario minimal consiste à tenter de définir des règles stables et des mécanismes de plafonnement, évitant que les régimes soient trop lourdement ponctionnés. Ce scénario minimal aboutirait inévitablement à une complication encore plus grande du système de compensation.

Le scénario médian nécessite de réformer la compensation généralisée et de supprimer la compensation spécifique.

La réforme de la compensation généralisée nécessiterait, par exemple, d'exclure les majorations pour enfants de la prestation de référence et de prendre en compte la durée de carrière 21 ( * ) .

La suppression de la compensation spécifique est clairement envisagée par MM. Yves Ullmo et Louis-Paul Pelé.

« La compensation spécifique a peu de justifications... »

« De fait, la compensation spécifique a peu de justifications. Telle qu'elle fonctionne, elle met à la charge d'un régime des transferts pour d'autres régimes (mines, SNCF, marins...) qui par ailleurs sont équilibrés par une subvention de l'Etat. Sans homogénéité entre les régimes, il est difficile de mettre en place une compensation équitable, qui complète la compensation généralisée. Dans ce cas, il faudrait peut-être recourir à d'autres mécanismes de solidarité, du moins pour les régimes les plus atypiques ou les plus déséquilibrés démographiquement (mines, marins), dont l'équilibre pourrait être assuré par l'Etat ou par le FSV ».

Rapport de MM. Yves Ullmo et Louis-Paul Pelé, septembre 2001, p. 25.

La suppression de la compensation spécifique nécessiterait, afin d'équilibrer les régimes spéciaux aujourd'hui bénéficiaires, d'augmenter les subventions d'équilibre de l'Etat à ces mêmes régimes. Cependant, cette augmentation serait pour partie compensée pour le budget de l'Etat par la suppression parallèle de la « participation » du « régime » des fonctionnaires de l'Etat : ainsi, l'effet net sur les dépenses serait de 1.401,2 millions d'euros (environ 9,2 milliards de francs) 22 ( * ) .

Conséquences sur le budget de l'Etat de la suppression de la « surcompensation »

(en millions d'euros)

2002

Augmentation de la subvention d'équilibre aux régimes spéciaux

2.371,6

Réduction des transferts de compensation du « régime » des fonctionnaires

- 970,4

SOLDE en euros

1.401,2

SOLDE en francs

9.191,0

Un scénario radical consisterait à supprimer tout mécanisme de compensation entre les régimes.

En effet, le principe de la compensation consiste à rétablir la « solidarité nationale » entre les régimes de sécurité sociale. L'effet consiste à créer une forme « d'impôt » sur les régimes contributeurs. La « solidarité » s'exprime par une contraction entre les recettes et les dépenses des régimes, ce qui est contestable du point de vue comptable, et ne donne pas une vue exacte de l'état des régimes.

Total des transferts de compensation

(en millions d'euros)

Compensation généralisée

5.584,9

5.671,7

5.824,5

5.898,6

en millions de francs

36.635

37.204

38.206

38.692

Compensation spécifique

2.919,9

2.656,7

2.348,8

2.371,6

en millions de francs

19.153,3

17.426,8

15.407,1

15.556,7

TOTAL GENERAL

8.504,8

8.328,4

8.173,3

8.268,2

TOTAL GENERAL
en millions de francs

55.787,8

54.360,7

53.613,3

54.235,8

Les effets d'une suppression de la compensation seraient les suivants :

- maintien d'excédents structurels dans les régimes fortement contributeurs (CNRACL, CNAVPL) leur permettant de mettre en place une « répartition provisionnée », cette constitution de réserves leur étant utile pour les années à venir, particulièrement dans le cas de la CNRACL ;

- création parallèle de besoins de financement importants dans les régimes aujourd'hui fortement bénéficiaires.

Afin de financer de tels besoins, votre rapporteur considère que deux solutions sont envisageables :

- soit la création d'une imposition ad hoc ou l'augmentation d'une imposition existante (par exemple, la CSG) : cette solution représente l'inconvénient d'augmenter les prélèvements obligatoires ;

- soit un concours du budget de l'Etat, qui est l'expression même de la solidarité nationale.

Le montant en cause aggraverait fortement les dépenses publiques.

Cependant, ce montant pourrait être limité :

- les régimes ORGANIC et CANCAVA pourraient pallier la disparition de leurs recettes de compensation par une augmentation de la fraction de C3S qui leur est affectée : ainsi serait conforté le fondement même de cette contribution, qui a pour but de prendre en compte l'extension du salariat ;

- le régime des exploitants agricoles pourrait également bénéficier soit d'une augmentation de la subvention d'équilibre (augmentation des dépenses budgétaires), soit -si l'on souhaite limiter l'augmentation des dépenses budgétaires- d'une augmentation de la fraction de TVA qui lui est affectée (diminution des recettes budgétaires disponibles) ;

- seuls les autres régimes (petits régimes bénéficiant de la compensation généralisée, régimes spéciaux bénéficiant de la compensation spécifique) auraient alors recours aux concours financiers du budget de l'Etat.

L'augmentation des dépenses budgétaires serait ainsi très limitée, compte tenu de la suppression des transferts de compensation pour le régime des fonctionnaires de l'Etat ; l'effet sur le solde budgétaire serait quasi exclusivement concentré sur la perte de la fraction supplémentaire de TVA affectée au régime des exploitants agricoles.

Bilan pour le budget de l'Etat d'une suppression de la compensation

(en millions d'euros)

Recettes

Dépenses

Suppression des transferts de compensation

- 2.724,0

Augmentation de la fraction de TVA affectée au BAPSA

- 4.197,3

Augmentation des subventions d'équilibre aux régimes spéciaux (nette des économies réalisées sur la compensation généralisée par certains de ces régimes)

+ 2.318,2

Augmentation des subventions d'équilibre aux petits régimes

+ 568,5

TOTAL en euros

- 4.197,3

+ 162,7

TOTAL en francs

- 27.535,0

+ 1.067,0

La dégradation sur le solde budgétaire serait ainsi « limitée » à 4,36 milliards d'euros (soit 28,6 milliards de francs).

3. La contribution de la branche famille : le cas de l'Assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF)

A la suite du rapport de la Cour des comptes sur la sécurité sociale de septembre 2000, M. Alain Vasselle, rapporteur pour l'assurance vieillesse du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 avait consacré un long développement au cas de l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF).

Votre rapporteur en rappellera les principales conclusions.

Cette assurance vieillesse, créée en 1972 et soumise à des critères d'attribution restrictifs, permet de prendre en charge les années passées par les parents au foyer et de compléter d'éventuelles années validées au titre de leur activité professionnelle. La Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) est, en quelque sorte, l'employeur fictif des ayants droit. La branche famille verse donc à la CNAV une somme qui atteindra 22,9 milliards de francs en 2002 au titre de ces « cotisations ».

Les prestations servies par la CNAV, de l'ordre de 3 milliards de francs, sont aujourd'hui sans commune mesure avec le montant des « cotisations » réglées par la CNAF.

En revanche, elles devraient, selon le rapport de 1997 de M. Jean-François Chadelat, inspecteur général des affaires sociales, atteindre au moment des pics démographiques (2015-2040) 30 milliards de francs, puis 50 milliards de francs .

Or, les cotisations versées par la CNAF sont aujourd'hui comptabilisées comme des cotisations courantes et dépensées dans le cadre de l'exercice. Elles ne sont pas mises en réserve pour procéder à la liquidation des droits le moment venu.

Entre 2000 et 2040, l'effet de l'AVPF passera d'un allégement de 19 milliards de francs à une charge nette de 35 milliards de francs. L'effet de dégradation sur les comptes sera de 54 milliards de francs.

Cette redoutable dégradation des comptes ne manquera pas de poser la question du maintien de cet avantage. Devant les difficultés considérables de financement des retraites, certains poseront immanquablement la question de la suppression des avantages familiaux en matière de retraites.

Pour maintenir cette prestation qui sera certainement « menacée » au sein de la branche vieillesse -dont on sait aujourd'hui qu'elle rencontrera de grandes difficultés à compter de 2020-, il y a un fort risque que la branche famille soit appelée une nouvelle fois à la rescousse.

Une telle démarche, qui ne serait pas -hélas- incohérente avec celle conduite aujourd'hui par le Gouvernement, présenterait toutefois la particularité de conduire la branche famille à prendre deux fois l'AVPF à sa charge, une première fois au titre ses « cotisations » qu'elle paye depuis 1975 et une deuxième fois en versant les prestations lorsque celles-ci deviendront significatives.

Votre rapporteur estime infiniment souhaitable de mettre fin à ce transfert inter-branches, et de supprimer ce versement de la branche famille. Il serait alors nécessaire d'assurer à la branche vieillesse une recette équivalente à celle de l'AVPF (environ 23 milliards de francs). Un simple transfert d'une fraction de CSG permettrait de le réaliser, ce qui conduirait à « débrancher » l'une des « tuyauteries » du financement de la sécurité sociale et à établir, avec davantage de clarté, un « compte » de la branche vieillesse.

4. L'imbrication Etat-sécurité sociale en matière de financement des régimes de retraite : l'urgence d'une clarification

L'Etat joue d'ores et déjà le rôle de « garant » de l'équilibre des régimes spéciaux, par l'intermédiaire d'une subvention d'équilibre. Cette recette a été étendue au régime de protection sociale des exploitants agricoles, en raison de la structure démographique particulièrement défavorable de ce régime et de l'existence du « budget annexe », adopté chaque année en loi de finances.

Un recours supplémentaire à la C3S -ou à la compensation spécifique- permet de limiter, voire de diminuer d'une année sur l'autre la charge financière de l'Etat. Ainsi, le « siphonnage » de la C3S au profit du BAPSA, opéré par l'article 18 du projet de loi de finances pour 2002, a pour conséquence une diminution de près de 4 milliards de francs du total des subventions d'équilibre entre 2001 et 2002.

Leur évolution est ainsi privée de sens.

Les subventions d'équilibre

(en millions d'euros)

2001

2002

SNCF

2.208

2.282

ENIM

733

708

Régime Minier

504

457

BAPSA

877

271

SEITA

89

97

CRRFOM 23 ( * )

8

7

Imprimerie nationale

0,3

0,2

TOTAL en euros

4.419

3.822

TOTAL en francs

28.987

25.071

L'étude du « jaune » budgétaire « Bilan des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale » montre que l'étude des relations Etat-sécurité sociale en matière de retraite est encore plus complexe qu'il n'y apparaît.

En effet, différents chapitres budgétaires regroupent ces engagements.

Ainsi, même si des efforts ont été réalisés, le budget des charges communes (chapitre 46-90) ne regroupe pas l'intégralité des subventions d'équilibre, la plus importante, celle versée à la SNCF, relevant du budget des transports terrestres (chapitre 47-41), tandis que celle versée à l'Etablissement national des invalides de la marine est inscrite au budget de la mer (chapitre 47-37).

Les charges nettes de compensation entre régimes d'assurance vieillesse relèvent du budget des charges communes, mais d'un chapitre différent : le chapitre 33-91.

Les charges nettes de pensions des agents civils et militaires sont réparties entre les différents ministères, tout en étant regroupées au sein du chapitre 32-97.

Enfin, il est nécessaire de ne pas oublier les charges du FSPOIE (régime de pensions des ouvriers de l'Etat), qui relèvent du chapitre 32-92.

Si l'on tente d'additionner les différents concours financiers de l'Etat aux régimes d'assurance vieillesse, le résultat est le suivant :

Charges « retraites » du budget de l'Etat

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

Charges nettes de pensions des agents civils et militaires

20.353

21.242

22.447

Charges brutes

28.538

29.660

31.063

Cotisations des actifs

- 4.341

- 4.511

- 4.627

Recettes diverses

- 3.844

- 3.907

- 3.989

Charges de compensation du régime des fonctionnaires

2.544

2.207

2.718

Contributions budgétaires au financement du FSPOIE

1.026

1.053

1.075

Subventions d'équilibre

4.204

4.419

3.822

TOTAL

28.127

28.921

30.062

TOTAL en francs

184.501

189.709

197.194

Source : Commission des Affaires sociales du Sénat, d'après le jaune budgétaire « Bilan des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale »

Votre rapporteur constate que les débats de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances n'ont pas abordé la question du « traitement » en loi de finances des charges « retraites » du budget de l'Etat. Il serait pour le moins nécessaire de réfléchir à une individualisation par branche des transferts financiers entre le budget de l'Etat et les régimes sociaux.

Au-delà, votre rapporteur estime souhaitable la création d'un véritable régime de retraite des fonctionnaires de l'Etat, ou son inclusion dans l'actuelle CNRACL, ce qui aurait l'avantage de regrouper dans la même caisse les trois fonctions publiques et de contribuer à une « transparence » unanimement souhaitée.

II. LES PISTES PERDUES DE LA RÉFORME : DE LA CONCERTATION À LA CONCERTATION

Annoncée en 1997-1998, la réforme des retraites n'a finalement pas eu lieu. La méthode « diagnostic, dialogue, décision » a connu ici un échec cuisant.

Après avoir annoncé, à l'automne 1999, des « décisions » du Premier ministre 24 ( * ) , et parce que ces « décisions » se sont transformées en « orientations », il a fallu se résoudre à créer une commission 25 ( * ) , le conseil d'orientation des retraites.

Dès lors, le discours tourne en boucle : la concertation des années 2000-2001 succède à la concertation des années 1998-1999.

De 1998 à 2001 : de la concertation à la concertation

Mme Martine Aubry, JO Débats Sénat, 12 novembre 1998 :

« La méthode que j'ai évoquée et qui consiste à instaurer une concertation avant de prendre une décision reste valable s'agissant de la politique des retraites. Ainsi, comme vous le savez, le Premier ministre a confié une mission de concertation au Commissariat général du Plan, lequel a déjà dressé un bilan, ce qui était nécessaire pour que soit prise en compte la réalité du régime général et des régimes spéciaux, à savoir le montant des retraites, celui des contributions que chacun avait pu apporter, mais aussi le niveau des salaires (...) Le diagnostic fait actuellement l'objet d'une concertation approfondie avec les partenaires concernés. J'espère que nous aboutirons au plus large consensus possible et que nous pourrons, à partir du mois de février et sur la base des scénarios proposés par le Commissariat général du Plan, lancer un véritable débat public » .

Mme Elisabeth Guigou, JO Débats Assemblée nationale, 23 octobre 2001 :

« Nous avons installé en mai 2000 le conseil d'orientation des retraites. Présidé par Mme Yannick Moreau et composé de parlementaires, de partenaires sociaux, de personnalités qualifiées, de représentants de l'administration, il doit organiser dans la durée la concertation sur l'avenir des retraites (...) »

A. LE CONSEIL D'ORIENTATION DES RETRAITES : UN CONSENSUS SUR LA QUALITÉ DES TRAVAUX RÉALISÉS

Chacun s'accorde sur la qualité des travaux réalisés sur le Conseil d'orientation des retraites. Il convient de rappeler toutefois que le MEDEF n'a pas souhaité désigner de représentants . La réduction des divergences qu'évoque volontiers la présidente du COR est naturellement plus facile à observer dès lors qu'un partenaire, et non des moindres, est absent.

1. Les missions et les réunions du Conseil d'orientation des retraites

Suivant une proposition de l'avis de M. René Teulade, le Premier ministre a annoncé le 21 mars 2000 la création du « conseil d'orientation des retraites ».

Mission du Conseil d'orientation des retraites
(article 2 du décret du 10 mai 2000)

Le Conseil d'orientation des retraites a pour missions :

1° de décrire la situation financière actuelle et les perspectives des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques ;

2° d'apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ;

3° de veiller à la cohésion du système de retraite par répartition, en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité, tant entre les retraités qu'entre les différentes générations.

Le conseil peut formuler toutes recommandations ou propositions de réformes qui lui paraissent de nature à répondre aux objectifs précédemment définis. Il remet au Premier ministre, au moins tous les deux ans, un rapport d'ensemble analysant la situation des régimes de retraite et proposant les mesures jugées nécessaires pour assurer leur équilibre à long terme. Ce rapport est communiqué au Parlement et rendu public.

A l'issue de la première réunion du COR en septembre 2000, qui a examiné les conclusions des rapports Charpin (Commissariat général du Plan) et Teulade (Conseil économique et social) sur l'avenir des retraites en France, trois groupes de travail ont été constitués :

- âge et travail ;

- diversité et inégalités de situation vis à vis de la retraite ;

- prospective générale et perspectives financières.

Par ailleurs, le rythme des réunions plénières a eu tendance à s'accélérer, compte tenu de la rédaction du fameux « premier rapport », qui serait présenté en décembre 2001... après le débat sur le présent projet de loi.

Réunions plénières du Conseil d'orientation des retraites

6 novembre 2001

Projet de plan de la troisième partie
Fin de l'examen de la deuxième partie

16 octobre 2001

Examen de la deuxième partie

3 octobre 2001

Plan détaillé des deux premières parties
Examen de la fin de la première partie (chapitres III à VI)

19 septembre 2001

Préparation du rapport première partie chapitres I et II

4 septembre 2001

Taux de remplacement
Projet de plan des parties I et II du rapport
Le Fonds de réserve pour les retraites : création de l'établissement public et projection des ressources

4 juillet 2001

Projections financières - politiques et mesures de rééquilibrage des systèmes de retraite

5 juin 2001

Projections financières pour les régimes de retraite

5 avril 2001

Colloque « Age et travail »

2 mai 2001

Prospective générale et perspectives financières

7 novembre 2000

Diversité et inégalités de situation vis-à-vis de la retraite

27 septembre 2000

Le Fonds de réserve des retraites

5 septembre 2000

Bilan critique des travaux sur les régimes de retraite et diagnostic sur la situation des régimes

Il reste que la bibliothèque fournie des contributions sur l'avenir des retraites s'enrichira, dès fin 2001, d'un nouveau rapport.

2. La confirmation du diagnostic posé par le rapport Charpin

Le Conseil d'orientation des retraites a fait connaître, le 17 mai dernier, de nouvelles projections qui confirment largement le constat établi par le rapport Charpin, et infirment par là même l'optimisme de l'avis de M. Teulade, qui reposait sur une grossière erreur méthodologique : l'absence de prise en compte de « l'effet de noria » 26 ( * ) .

Si le déficit du régime général est moins élevé que prévu, ceux des régimes de la fonction publique et des régimes spéciaux se situent à un niveau nettement supérieur.

Les nouvelles projections de besoins annuels de financement

(en millions de francs)

2005

2010

2015

2020

2040

Prévision Charpin

CNAV

25.782

6.477

- 32.052

- 71.657

- 252.760

- 379.600

Salariés agricoles

- 12.951

- 14.066

- 15.206

- 16.621

- 19.416

- 22.008

Agirc

4.805

6.627

- 5.008

- 12.514

- 26.949

- 20.989

Arrco

31.725

35.549

14.311

- 7.010

- 93.454

- 25.916

Ircantec

1.574

329

- 1.500

- 3.782

- 13.202

- 12.664

Fonction publique Etat

- 23.251

- 61.997

- 99.903

- 132.424

- 241.134

- 254.785

CNRACL

14.168

- 2.517

- 24.608

- 48.754

- 137.138

- 110.269

SNCF

- 17.295

- 17.686

- 18.715

- 17.879

- 19.700

- 24.348

Cancava

- 5.216

- 6.320

- 7.373

- 8.084

- 11.980

- 12.973

CNAVPL

3.303

3.063

1.988

923

1.586

1.140

Exploitants agricoles

- 41.908

- 38.177

- 34.039

- 30.396

- 21.976

- 24.820

Autres régimes

- 42.859

- 47.132

- 52.809

- 58.617

- 58.566

-

Source : Conseil d'orientation des retraites.

Le déficit de la seule CNAVTS, pour la seule année 2020, est ainsi de 71,6 milliards de francs. Toujours pour la seule année 2020, le déficit des régimes de base s'élève à plus de 380 milliards de francs, soit plus du tiers des encours annoncés du Fonds de réserve (les fameux « 1.000 milliards de francs »).

B. LE RÔLE DU CONSEIL D'ORIENTATION DES RETRAITES : UN DISCOURS ÉVOLUTIF ET AMBIGU DU GOUVERNEMENT

Le discours du Gouvernement sur le COR présente la double caractéristique d'avoir évolué depuis un an et d'être marqué d'une profonde ambiguïté.

1. Un discours évolutif

L'évolution depuis un an est majeure : après avoir annoncé que le Gouvernement prendrait (enfin) des décisions sur la base des propositions du COR, la ministre de l'emploi et de la solidarité précise désormais que ces décisions seront prises... après les échéances électorales 27 ( * ) .

La réforme... un an après

« Je voudrais aussi souligner la qualité et l'intérêt des travaux que le conseil d'orientation des retraites, installé par le Premier ministre, a engagés. Ce conseil mène, vous le savez, une concertation active avec les élus et les partenaires sociaux et explore avec eux différents scénarios, différentes perspectives financières, compte tenu de l'évolution -heureusement positive- de la croissance et de l'emploi. Le conseil d'orientation des retraites fera des propositions sur la base des consultations qu'il mène pour tous les régimes et le Gouvernement prendra, sur ces bases, ses décisions ».

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité,
in JO Débats Sénat, 14 novembre 2000

« Dès le lendemain des élections législatives, une négociation tripartite pourra être organisée sur une réforme d'ensemble des retraites et déboucher sur des orientations à mettre en oeuvre par la loi » .

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, in JO Débats Assemblée nationale, 2 ème séance du 23 novembre 2001, p. 6445.

2. Un discours ambigu

La création de ce conseil est tout d'abord considérée par le Gouvernement comme une réussite « en soi ». Elle fait partie, avec celle du Fonds de réserve pour les retraites, d'un argumentaire « tout terrain » ayant pour objectif de rejeter les critiques portant sur son inaction.

Au-delà, le rôle que doit jouer le COR reste flou : s'agit-il de poser un diagnostic , d'engager un dialogue ou d'élaborer des décisions ?

a) Le retour du « diagnostic partagé »

Votre commission a été surprise d'assister au retour de la fonction de « diagnostic », qui lui semblait avoir été assurée par la commission Charpin.

Le 7 juin 2001, Mme Elisabeth Guigou s'exprimait ainsi devant la commission des comptes de la sécurité sociale : « Le premier acquis de ses travaux est d'avoir réduit les divergences qui pouvaient encore persister sur le diagnostic des changements démographiques et de leur incidence prévisible sur les régimes de retraite. C'est également fort judicieusement qu'il a choisi la question des liens entre âge et travail pour son premier colloque tenu en avril dernier. Car c'est certainement en éliminant sans délai les obstacles qui existent aujourd'hui à l'emploi des travailleurs âgés que l'on facilitera demain les évolutions nécessaires en matière de durée d'activité » .

Le rapport annexé au projet de loi de financement pour 2002, dans son chapitre relatif à « la politique à l'égard des personnes âgées », va un peu plus loin encore ; il indique en effet que « le premier rapport » du Conseil, « qui doit être rendu public avant la fin de l'année 2001, portera un diagnostic partagé sur les prévisions des régimes de retraite, et présentera les différentes mesures envisageables pour assurer la garantie de notre système de retraite » .

« Diagnostic partagé » : une expression ancienne

29 mai 1998 - la lettre de M. Lionel Jospin confie à M. Jean-Michel Charpin, Commissaire général du Plan, le soin d'établir, sur la situation et les perspectives de notre système de retraite, « un diagnostic aussi partagé que possible par les partenaires sociaux et les gestionnaires des différents régimes ».

Rapport annexé à la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (octobre 1998)

« Le Gouvernement entend aborder les évolutions nécessaires de nos régimes de retraite sur la base d'un diagnostic précis des problèmes auxquels ils sont confrontés. L'élaboration de ce diagnostic a été confiée au Commissariat général du Plan. Il portera sur l'ensemble des régimes de retraite. Les partenaires sociaux et les représentants des régimes sont associés à l'établissement de ce diagnostic afin que l'ensemble des hypothèses qui conditionnent l'avenir de nos systèmes de retraite soient prises en compte. C'est sur la base de ce diagnostic partagé que pourra s'ouvrir un dialogue sur les réformes à entreprendre ».

Lors de son audition par votre commission des Affaires sociales 28 ( * ) , Mme Yannick Moreau, présidente du Conseil, a pourtant bien précisé que l'expression de « diagnostic partagé » rendait méfiants les organisations syndicales, qui craignent « une forme d'instrumentalisation ».

b) Le double discours du Gouvernement

Le rôle du Conseil d'orientation des retraites serait de « présenter les différentes mesures envisageables » 29 ( * ) . Selon Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, « Ce dispositif [la loi APA] devra être complété par une réforme concernant les régimes de retraite. C'est le rôle du conseil d'orientation des retraites, mis en place par le Gouvernement l'année dernière, de réunir tous les acteurs concernés pour faire le point sur l'évolution des régimes et pour présenter des propositions sur cette indispensable réforme » 30 ( * ) .

Mais lorsque le Gouvernement est interrogé sur les réflexions du COR, sa prudence est tout à fait remarquable.

Interrogé 31 ( * ) par exemple sur l'allongement de la durée de cotisation pour les fonctionnaires, il 32 ( * ) indique : « Le conseil d'orientation des retraites, créé par le décret n° 2000-393 du 10 mai 2000, a engagé une réflexion sur l'avenir des régimes de retraite à laquelle participent divers partenaires : syndicats, parlementaires, personnalités qualifiées et représentants de l'Etat. Parmi les thèmes abordés figure effectivement l'éventualité d'un allongement de la durée de cotisation des fonctionnaires pour l'aligner sur celle des salariés du secteur privé (160 trimestres). D'autres hypothèses ont également été envisagées pour préparer le régime spécial des fonctionnaires aux mutations démographiques à venir et, en l'état, aucune solution n'est privilégiée. L'objectif poursuivi est de réunir sur ce sujet essentiel le consensus le plus large possible et de concilier le respect de l'identité du régime spécial des fonctionnaires avec la notion de solidarité. En tout état de cause, les travaux du conseil d'orientation des retraites ont d'ores et déjà montré que les mesures techniques envisageables pour adapter les régimes de retraite n'étaient qu'un des éléments d'une réflexion plus vaste sur le vieillissement et les fins de carrière ».

Tout ceci n'empêche pourtant pas le Gouvernement de « faire parler » le Conseil d'orientation des retraites lorsque cela l'arrange ; ainsi, M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, répondait à notre excellent collègue Joël Bourdin, lors d'une séance de questions d'actualité 33 ( * ) : « Ces évolutions - je tiens à le souligner - viennent d'être confortées par des travaux qui ont fait récemment l'objet d'une présentation devant le conseil d'orientation des retraites » .

M. le ministre délégué à la ville ne précisait pas que cette présentation avait été faite par le directeur de la sécurité sociale.

C. LES CONSÉQUENCES DE LA CRÉATION DU CONSEIL : UNE RÉFORME DÉSORMAIS RENVOYÉE AU LENDEMAIN DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES

Il est des chiffres qui frappent.

Le sondage CSA/Liaisons sociales/Manpower, rendu public en septembre dernier, est particulièrement instructif : si 85 % des Français se déclarent « très inquiets » ou « assez inquiets » pour l'avenir financier des régimes de retraite, ce qui est peu étonnant, ils sont 92 % à juger qu'il s'agit d'un dossier « très urgent » ou « assez urgent ».

Pour autant, le Gouvernement a choisi de privilégier les 8 % de Français qui jugent ce dossier peu urgent.

1. Une réforme privilégiant désormais la « forme » au « fond »

Le bilan de la politique conduite depuis 1997 en matière de réforme des retraites est proche de l'ensemble vide. Selon le Gouvernement lui-même, un tel bilan repose sur deux éléments, la création du Fonds de réserve pour les retraites et l'installation du conseil d'orientation des retraites.

Faute de présenter une « réforme », le Gouvernement explique qu'il a « préparé la réforme ». Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, n'hésite pas à affirmer : « Nous avons ainsi mis en place le socle de la future et nécessaire réforme des régimes de retraite par répartition » 34 ( * ) . Le « discours » sur la réforme des retraites glisse ainsi vers un nouveau « discours de la méthode », par opposition à la politique conduite par le gouvernement de M. Alain Juppé, même si Mme la ministre reconnaît qu'il importe de « progresser aussi bien sur le fond que sur la méthode » .

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité a annoncé devant l'Assemblée nationale un véritable calendrier :

- remise du premier rapport du COR en décembre, qui devrait, d'une part, « faire état d'une convergence des analyses » et, d'autre part, « avancer des propositions » ;

- travaux complémentaires effectués « dans la concertation » sur les avantages familiaux dans la retraite et sur la prise en compte du handicap ;

- choix à faire « tout de suite après les échéances électorales ».

En somme, il était et il est urgent d'attendre.

2. La chimère du desserrement de  « l'étau de l'urgence »

Le Gouvernement recourt à nouveau à une argumentation, cette fois-ci totalement infondée, selon laquelle « la question de l'emploi est évidemment le coeur du sujet dans la mesure où plus d'emploi génère plus de cotisations. C'est grâce à l'amélioration de l'emploi que nous avons desserré l'étau de l'urgence, sans toutefois, bien entendu, supprimer la nécessité de cette réforme » 35 ( * ) .

Le diagnostic posé par la commission Charpin a pourtant montré que, même dans le cadre d'un chômage à 3 %, les conséquences sur le besoin de financement des régimes de retraite étaient mineures : l'effet principal est bien l'effet démographique, contre lequel les politiques de l'emploi restent impuissantes. De plus, la « question de l'emploi » ne peut rien pour améliorer la situation des régimes spéciaux, dont la dégradation du solde démographique apparaît inévitable.

Certes, il est évidemment préférable que le régime général bénéficie du plus grand nombre de cotisants possible, ce qui impose notamment de relever le taux d'emploi des plus de cinquante-cinq ans.

Mais affirmer que l'amélioration de l'emploi a permis de desserrer « l'étau de l'urgence » relève au mieux de l'ignorance, au pire de la mystification.

3. L'abrogation d'une loi restée virtuelle pour solde de tout compte

La XI e législature risque, s'agissant des retraites, de se conclure sur une seule véritable mesure : l'abrogation de la loi du 25 mars 1997 relative aux plans d'épargne retraite, dite « loi Thomas ».

En effet, l'article 11 du projet de loi de modernisation sociale, encore en cours de discussion devant les assemblées, prévoit l'abrogation d'une telle loi. La commission mixte paritaire, réunie le 30 octobre 2001, a du reste échoué sur cet article.

Sur la forme comme sur le fond, le feuilleton de l'abrogation de la « loi Thomas » fait partie des zones d'ombre du bilan de la majorité plurielle.

Sur la forme, M. Lionel Jospin avait annoncé cette abrogation dès son discours de politique générale du 19 juin 1997.

Pourtant, le Gouvernement s'était réfugié pendant longtemps dans un scénario « ni abrogation, ni application », refusant de publier les décrets de la loi du 25 mars 1997.

L'article 11 du projet de loi de modernisation sociale constitue ainsi la troisième tentative d'abrogation de la loi n° 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite, dite « loi Thomas ».

Une première tentative avait échoué lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Le Gouvernement avait réussi à dissuader in extremis la composante de sa majorité favorable à une telle abrogation, qui aurait été censurée par le Conseil constitutionnel.

Une deuxième tentative a réussi à franchir le cap de la séance publique, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. C'était avec un enthousiasme prophétique que le Gouvernement avait, cette fois, donné un avis favorable à l'amendement. Le Conseil constitutionnel n'en a pas moins censuré l'article.

Sur le fond, le Gouvernement justifie cette abrogation par « la volonté d'assurer en priorité la pérennité des régimes de retraite par répartition ». En quelque sorte, la « réforme des retraites » attendue par les Français débutera lors de la promulgation de la loi de modernisation sociale, qui interviendra au début de l'année 2002, près de cinq ans après le discours de politique générale de M. Lionel Jospin. La seule proposition, le seul projet du Gouvernement, en dehors d'un Fonds de réserve largement insuffisant et dont il a de surcroît lui-même pillé les excédents, est d'abroger une loi restée virtuelle, faute de décrets d'application...

A opposer la répartition à la capitalisation, le Gouvernement s'est lui-même enfermé dans un piège dialectique. Le financement des retraites de demain est-il assuré grâce à l'abrogation de la loi créant les plans d'épargne retraite ? En aucune façon.

La « loi Thomas » était certes perfectible : quelle loi ne l'est pas ? Il était de la responsabilité du Gouvernement, sans idéologie mais avec pragmatisme, d'en proposer des modifications sur les différents points ayant cristallisé, à tort ou à raison, le rejet de certains partenaires sociaux.

Des personnalités imminentes, parmi lesquelles l'actuel ministre de l'économie et des finances, alors président de l'Assemblée nationale, se sont ralliées à l'idée de « fonds de pension à la française ».

Le Sénat, en adoptant le 14 octobre 1999 les conclusions de votre commission des Affaires sociales sur les propositions de M. Charles Descours et de M. Jean Arthuis avait « tendu une perche » au Gouvernement. Ce dernier ne l'a pas saisie.

Le constat est accablant : la France a perdu de nouveau cinq ans. A l'heure où l'Allemagne rejoint les pays disposant d'un dispositif de retraite par capitalisation, les 14,5 millions de salariés français ne peuvent toujours pas avoir accès à un troisième étage facultatif de retraite, alors même que les fonctionnaires y ont droit, à travers le CREF ou la Préfon, bénéficiant de « carottes » fiscales tout à fait substantielles.

III. LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT : LE VIDE ET LA GESTICULATION

En raison du nouveau report des décisions, la partie relative à l'assurance vieillesse du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 mélange le vide , au-delà de quelques « mesurettes » techniques, et la gesticulation , symbolisée par le Fonds de réserve pour les retraites.

A. LA REVALORISATION DES PENSIONS : LES LIMITES DE LA POLITIQUE DES « COUPS DE POUCE »

L'article 26 du projet de loi procure un « coup de pouce » aux retraités, sans pour autant satisfaire leurs revendications, comme en attestent les réactions de leurs représentants, que votre rapporteur a reçus.

Cette politique des « coups de pouce » nuit profondément à la lisibilité de l'action publique.

1. Une forme de vide juridique

Dans le régime général et les régimes alignés, depuis 1987, les pensions liquidées sont indexées sur les prix. Entre 1987 et 1993, les dispositions fixant l'indexation étaient annuelles.

La loi du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale a modifié les modalités de revalorisation des pensions. Le dispositif institué par cette loi comportait trois éléments :

- une revalorisation annuelle fixée en rapport avec l'indice d'évolution prévisionnelle des prix hors tabac ;

- un ajustement permettant de corriger un éventuel écart entre le taux prévisionnel et le taux réel d'évolution annuelle des prix ;

- une compensation positive ou négative pour les assurés titulaires, à la date de la revalorisation, d'un avantage vieillesse ou d'invalidité correspondant à l'écart constaté au titre de l'année précédente.

Or ce mécanisme mis en place en 1993 était provisoire et ne prenait effet en 1994 que pour une durée de cinq ans.

En septembre 1998 (loi de financement pour 1999), le Gouvernement n'a pas tranché entre l'indexation en vigueur -c'est-à-dire essentiellement fondée sur les prix- et une indexation fondée sur l'évolution des salaires -solution à laquelle la majorité actuelle s'était déclarée favorable lors de la campagne électorale précédant les élections législatives de 1997.

Le Gouvernement s'est rangé en réalité à une politique des « coups de pouce » confirmant sa gestion « conjoncturelle » du dossier des retraites .

Dans le projet de loi de financement pour 1999, l'exposé des motifs justifiait une prolongation des mécanismes provisoires « dans l'attente du diagnostic que doit établir le Commissaire général au plan en concertation avec les partenaires sociaux et portant sur la situation de l'ensemble des régimes de retraite ».

Dans le projet de loi de financement pour 2000, le Gouvernement avait reconduit ce mécanisme au motif que « l'élaboration d'une règle pérenne de revalorisation des pensions pour les années suivantes sera examinée dans le cadre de la concertation pour les retraites ».

Comme l'année dernière (loi de financement pour 2001), la méthode discrétionnaire du Gouvernement est reconduite sans autre commentaire ni référence à la définition à venir d'une règle pérenne.

2. Une mesure discrétionnaire

Comme en 2001, la revalorisation des pensions retenue par l'article 26 du projet de loi de financement de la sécurité sociale est de 2,2 %.

L'évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation des ménages (hors tabac) est en prévision de 1,5 % (rapport économique social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2002).

Le rattrapage au titre de la sous-évaluation des prix en 2000 est de 0,4 %. L'évolution « neutre » des pensions en 2001 était donc de 1,9 %.

Le Gouvernement a choisi de majorer cet indice de 0,3 % au titre de la participation des retraités aux fruits de la croissance. Le coût de cette mesure pour le régime général est estimé à 1,3 milliard de francs, dont 1,1 milliard de francs pour la seule branche vieillesse.

Revalorisation des pensions

(en %)

1999

2000

2001

2002

Prix hors tabac estimés pour l'année N de la revalorisation (PLF N)

(1)

1,2

0,9

1,2

1,5

Prix hors tabac estimés pour l'année N-1 de la revalorisation (PLF N)

(2)

0,8

0,5

1,4

1,6

Prix hors tabac estimés pour l'année N-1 de la revalorisation (PLF N-1)

(3)

1,3

1,2

0,9

1,2

Ecart dans les prévisions dans les prix hors tabac entre les PLF et N-1

(4) = (2) - (3)

- 0,5

- 0,7

0,5

0,4

Revalorisation par application de la règle de rattrapage

(5) = (1) - (4)

0,2

1,7

1,9

Coup de pouce

(6)

0,3

0,5

0,3

Revalorisation au 1 er janvier N

(7) = (6) - (5)

1,2

0,5

2,2

2,2

Source : d'après le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2001, p. 127, actualisation commission des Affaires sociales du Sénat.

Cette revalorisation est sans nul doute économiquement possible aujourd'hui, dans un contexte caractérisé par une croissance forte des recettes et un rapport démographique favorable. D'aucuns trouveront d'ailleurs cette revalorisation insuffisante.

De fait, la branche vieillesse du régime général affiche un excédent tendanciel de plus de 9 milliards de francs pour 2002.

Mais le Gouvernement, en vertu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, a choisi d'affecter les excédents de la CNAVTS au Fonds de réserve, fonds destiné selon lui à garantir l'avenir des retraites.

Votre rapporteur analyse longuement ci-après le mécanisme du Fonds de réserve.

Dans la logique même défendue par le Gouvernement, votre rapporteur observe qu'à ce stade tout « coup de pouce » aux retraites d'aujourd'hui, réduit d'autant les sommes mises en réserve pour « garantir l'avenir des retraites ».

Le coût cumulé des revalorisations de 2000, 2001 et 2002 sur les comptes du seul régime général serait de 41 milliards de francs en 2010 : en conséquence, l'effet des revalorisations, à cette même date, est bien de priver le Fonds de réserve de cette somme.

Effets des « coups de pouce » de 2000, 2001 et 2002
sur les comptes de la CNAV

(en millions de francs)

Coût

Coût cumulé

2000

958

958

2001

2.686

3.644

2002

3.739

7.383

2003

3.825

11.208

2004

3.918

15.126

2005

4.012

19.138

2006

4.151

23.289

2007

4.302

27.591

2008

4.457

32.049

2009

4.613

36.661

2010

4.772

41.433

Source : CNAV, réponse au questionnaire de votre rapporteur.

Cet arbitrage est-il fondé ? En l'absence de toute perspective de réforme, de toute indication sur l'ampleur de l'effort nécessaire et sur sa nature même, le Gouvernement ne peut répondre.

Aussi, cette revalorisation parfaitement acceptable, voire insuffisante, aujourd'hui, souffre pourtant d'un grief majeur : elle ne s'inscrit dans aucune politique permettant de garantir les pensions qui seront versées demain.

3. Une situation insatisfaisante

Votre rapporteur juge que cette situation n'est pas satisfaisante : elle n'assure aucune garantie aux retraités qui se voient chaque année soumis, pour leur revalorisation de pension, à l'arbitraire des décisions gouvernementales . Selon les années, le Gouvernement choisit d'appliquer un « coup de pouce » plus ou moins généreux.

La Cour des comptes, dans son rapport de septembre 2001, consacre à cette question un rapide développement : « L'impossibilité de prévoir exactement le taux de l'inflation un an à l'avance induit nécessairement que l'indexation des prestations sur le taux de l'inflation ne peut être, chaque année, qu'approximative. Plusieurs méthodes peuvent être mises en oeuvre pour réaliser ces approximations successives : l'important n'est pas toujours de perfectionner ces méthodes mais simplement de s'assurer que l'évolution à moyen terme des prestations ne dérive pas par rapport à l'inflation » 36 ( * ) .

Comme une note du secrétariat général du Conseil d'orientation des retraites, présentée lors de la réunion plénière du 4 septembre 2001, le précise : « les pensions liquidées évoluent en moyenne légèrement plus vite que les prix dans tous les régimes, mais sans que cette évolution puisse être formalisée et que la norme sociale intègre explicitement le principe d'une participation des retraités à la croissance » 37 ( * ) .

En outre, votre rapporteur rappelle que, si les pensions de retraite augmenteront de 2,2 %, les prestations familiales croîtront de 2,1 %. En gain de pouvoir d'achat, les retraites seront revalorisées de 0,3 % alors que les prestations familiales ne le seront pas. Il n'y a guère de raison pour que les familles soient désavantagées alors que leur branche génère des excédents considérables confisqués par le Gouvernement 38 ( * ) .

B. LE FONDS DE RÉSERVE : UN ALIBI DE PLUS EN PLUS FRAGILE

Conscient que la création du conseil d'orientation des retraites n'est pas, à elle seule, susceptible de constituer une « mesure », le Gouvernement s'arc-boute sur la création du Fonds de réserve des retraites.

Alors que le principe de la création de ce dernier a fait l'objet d'un relatif consensus, les vicissitudes de son financement risquent d'avoir une conséquence dommageable : une perte supplémentaire de crédibilité de l'action publique.

1. La mission de contrôle de votre commission des Affaires sociales

Votre rapporteur rappellera les quatre principaux enseignements du contrôle que M. Alain Vasselle a effectué sur pièces et sur place le 8 mars 2001 39 ( * ) :

Premièrement , le Fonds de réserve est construit sur l'hypothèse d'un taux de chômage de 4,5 % en 2020 ; ce « scénario pédagogique », censé convaincre les partenaires sociaux que, même en retenant des hypothèses extrêmement favorables, une réforme des retraites était inéluctable, est devenu un an plus tard, dans l'esprit du Gouvernement, une « prévision crédible », qui permet de rassurer les Français avec un Fonds de réserve aux recettes gonflées et aux échéances dédramatisées.

Deuxièmement , ce scénario repose sur une hypothèse de stricte indexation sur les prix de l'évolution des pensions. Or, ce scénario se révèle irréaliste dès les trois premières années d'application puisque le Gouvernement a choisi de donner un « coup de pouce » pour faire participer les retraités aux fruits de la croissance.

Troisièmement, le « plan de financement » du Fonds de réserve est sans cesse contredit par les ponctions exercées sur le Fonds de solidarité vieillesse -dont les excédents constituent la principale source d'alimentation du Fonds de réserve- pour financer les trente-cinq heures et l'allocation personnalisée d'autonomie.

Prélèvement sur le FSV
au titre du financement des trente-cinq heures : effet cumulé en 2020

(en milliards de francs)

Droits alcools

- 244*

Part de CSG

- 167

Total

- 411

Source : commission des Affaires sociales
Source : * Direction de la Prévision

Le principal objectif de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 était ainsi d'essayer de compenser au FSV les pertes de recettes liées au financement des trente-cinq heures et à l'allocation personnalisée d'autonomie, et le surcroît de dépenses engendré par la prise en charge de la dette de l'Etat à l'égard des régimes complémentaires AGIRC-ARRCO. Le Gouvernement a ainsi imaginé de solliciter la branche famille, par l'intermédiaire des majorations pour enfants, de telle sorte que c'est désormais une illusion de prétendre que les excédents du FSV financent le Fonds de réserve. C'est aujourd'hui la branche famille qui est censée alimenter le Fonds de réserve.

« Ponctions » et compensation des « ponctions » (à échéance 2020)

(en milliards de francs)

« Ponctions »

Compensation des « ponctions »

Trente-cinq heures

411

Transfert majorations de pensions

375

Dette AGIRC-ARRCO

14

Part produit 2 %

40

APA

115

Total des « ponctions »

540

Total compensation

415

Source : commission des Affaires sociales, mars 2001.

Quatrièmement, le démarrage du Fonds de réserve est poussif, puisqu'il n'atteindra pas les 55 milliards de francs prévus par la loi de financement pour 2001 ; or un retard est contradictoire avec le principe sur lequel repose un fonds de réserve, c'est-à-dire l'accumulation de produits financiers. De fait, ceux-ci doivent représenter le tiers des actifs du Fonds en 2020.

Aussi le respect scrupuleux d'un échéancier est-il fondamental car le retard ne se rattrape jamais.

Est-il convenable que le Gouvernement obère les marges de manoeuvre financière de ses successeurs en renvoyant sur ceux-ci les efforts qu'il n'a pas faits ? A ce titre, une telle question est paradoxale puisque le Gouvernement crée un fonds ayant pour objet de répartir équitablement sur plusieurs générations la charge des retraites, alors que lui-même repousse à plus tard la charge de l'abonder !

La nature même des ressources du Fonds de réserve et la conjoncture économique rendent extrêmement peu crédible le rattrapage de ce retard.

2. Un diagnostic confirmé

Dépourvu de recettes pérennes, en dehors de l'affectation insuffisante d'une fraction du prélèvement de 2 % sur les produits de placement et les revenus du patrimoine, la grande majorité des encaissements du Fonds de réserve provient de recettes exceptionnelles et non reconductibles.

Les recettes provenant des excédents du FSV et de la C3S, qui sont censées constituer la principale recette du fonds, se résument aujourd'hui au versement de 1,9 milliard de francs au Fonds de réserve correspondant à l'excédent du FSV pour l'exercice 2000, intervenu le 10 octobre 2001, et au versement de 2 milliards de francs d'excédents de C3S , intervenu le 23 octobre 1999. La somme ainsi obtenue (3,88 milliards de francs) apparaît bien mince par rapport au montant annoncé le 2 mai dernier au Conseil d'orientation des retraites (650 milliards de francs à horizon 2020).

Il faudra attendre 2005, et la montée en charge des versements de la branche famille, pour que le FSV soit à nouveau dans une situation structurellement excédentaire et en situation de verser ses excédents au Fonds de réserve.

Fonds de réserve : le ministère de l'économie
et des finances attend 2005

« Les abondements du FSV et de la C3S au Fonds de réserve seraient faibles jusqu'en 2004 ; ils pourraient atteindre 10 milliards de francs (1,52 milliard d'euros) en 2005, puis augmenteraient au-delà. Le scénario de montée en charge [...] des versements du FSV au Fonds de réserve n'est donc pas linéaire, ce qui peut être estimé comme cohérent avec un scénario de baisse de chômage jusqu'en 2010, scénario retenu dans le cadre du conseil d'orientation des retraites ».

Source : réponse au questionnaire de M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, in rapport n°3320, tome II, XI e législature, p. 308

Les 650 milliards d'excédents du FSV et de la C3S en 2020

(en millions de francs)

Excédents FSV - C3S annoncés pour 2020

650.000

Excédents C3S versés le 23 octobre 1999

2.000

Excédent FSV versé le 10 octobre 2001

1.880

Reste à verser

646.120

Les Gouvernements des années 2005-2020 devront ainsi verser un montant de 646 milliards de francs (soit une moyenne annuelle de 43 milliards de francs) pour « tenir » le plan de financement annoncé par le Gouvernement de M. Lionel Jospin. Autant dire qu'un tel objectif tient désormais de la gageure.

3. Un statut en trompe-l'oeil

Il était temps que le législateur procure un statut au Fonds de réserve pour les retraites. En effet, ce Fonds avait été créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 sous la forme provisoire d'une section « spécifique » du Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Le titre II de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, en insérant dix articles au code de la sécurité sociale, permet de répondre, au moins formellement, à cette attente.

Le titre II de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001
portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel

Le F2R est un établissement public de l'Etat à caractère administratif chargé de gérer des sommes intangibles jusqu'en 2020 et qui seraient ensuite reversées, selon des modalités qui restent à déterminer, au régime général et aux régimes alignés, les autres régimes étant -pour l'instant ?- exclus. La particularité de cet EPA est d'être doté d'un directoire et d'un conseil de surveillance. Le conseil de surveillance est constitué de parlementaires, de partenaires sociaux, de représentants de l'Etat et de personnalités qualifiées. Il joue à la fois un rôle dans la définition des orientations générales de la politique de placement des actifs du Fonds, proposées par le directoire, et dans le contrôle des résultats et des comptes du Fonds.

Le pouvoir exécutif du Fonds est assuré par le directoire, composé de trois membres, dont le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations qui en assure la présidence. Parallèlement, la Caisse des dépôts et consignations assure « sous l'autorité du directoire » (et donc de son directeur général) la « gestion administrative » du Fonds. En revanche, la gestion financière est confiée sous forme d'appels d'offre « régulièrement renouvelés ».

Lors de la discussion du projet de loi, le Sénat avait souhaité la création d'un établissement particulier, placé sous l'autorité directe du Parlement. Par ailleurs, il avait tenté de séparer de manière plus stricte les missions de chacun, en précisant que la Caisse des dépôts ne participerait à aucun appel de gestion financière et en prévoyant la nomination des membres du directoire par les plus hautes autorités de l'Etat.

Si l'Assemblée nationale n'a pas retenu ce schéma alternatif, un certain nombre d'amendements ont été retenus : fixation des règles prudentielles par décret en Conseil d'Etat, pouvoirs de contrôle du Conseil de surveillance, respect des obligations de déontologie des membres du directoire. Le Conseil constitutionnel a considéré dans sa décision n°2001-450 du 11 juillet 2001, que l'exclusion des autres régimes d'assurance vieillesse n'était pas susceptible d'être censurée au regard du principe d'égalité, et que les dispositions du nouvel article L. 135-10 du code de la sécurité sociale ne portent, par elles-mêmes, aucune atteinte à l'égalité entre les entreprises d'investissement susceptibles de participer aux appels d'offres ouverts dans le cadre de la gestion financière du Fonds. Il a pris soin de préciser qu'il appartiendrait « tant aux autorités de contrôle qu'au juge compétent saisi par toute personne intéressée de veiller au respect du principe d'égalité qui, en l'espèce, implique la libre concurrence » .

Votre rapporteur observe que ces dispositions, votées en urgence, ne font toujours pas l'objet d'un début d'application. En effet, quatre décrets en Conseil d'Etat 40 ( * ) , nécessaires à la mise en place du Fonds, sont prévus :

- un décret « général » précisant les modalités d'application : attributions et fonctionnement du conseil de surveillance et du directoire, modalités de la tutelle, préparation et application du budget ;

- un décret précisant la composition du conseil de surveillance du Fonds de réserve ;

- un décret fixant les modalités de la gestion du Fonds par la Caisse des dépôts ;

- un décret décrivant les règles prudentielles auxquelles est soumis le Fonds de réserve.

Votre rapporteur a eu connaissance, avec inquiétude, de difficultés de rédaction d'un certain nombre de dispositions. Ainsi, la question du plan comptable applicable apparaît, pour l'instant, sans solution.

Ces décrets devaient être examinés par le Conseil d'Etat en octobre 2001, pour être promulgués dans le courant du mois de novembre. Il n'en reste pas moins que le Fonds de solidarité vieillesse et la Caisse des dépôts et consignations se « calent » sur la date du 1 er avril 2002 pour opérer le « transfert » entre ces deux organismes.

4. Un retard sur le plan de marche : le démarrage poussif du Fonds de réserve en 2000 et 2001

a) Un retard indiscutable dès 2000

Dès sa première année d'existence (2000), le Fonds de réserve connaît un retard d'abondement de l'ordre de 2,5 sur les 23,2 milliards de francs espérés. Cette déficience s'explique par le non-versement de l'acompte prévisionnel de 2,9 milliards de francs sur l'excédent 2000, prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 de la CNAVTS.

Ressources du Fonds de réserve en 2000 : des prévisions aux réalisations

(en millions de francs)

1999

2000 (prév.)

2000 (réalisations)

Ressources pérennes

Prélèvement 2 %

5.410

5.849

Ressources hypothétiques

C3S

2.000

Excédent CNAVTS n-1

5.033

5.034

Excédent FSV

0

Acompte excédent CNAVTS

2.900

Ressources exceptionnelles

Parts sociales Caisse d'épargne

4.719

4.711

Don Caisse des dépôts et consignations

3.000

3.000

Licences UMTS

Produits financiers

10

289

217

Dépenses

1

22

Total annuel

2.009

21.271

18.788

Total cumulé

23.278

20.797

b) Les licences UMTS au secours du Fonds de réserve

Devant la défaillance du Fonds de solidarité vieillesse, sollicité pour financer les trente-cinq heures, le Gouvernement a décidé de compenser cette « perte » par l'affectation du produit d'une fraction des licences UMTS.

Les recettes UMTS attendues il y a un an étaient de 32,5 milliards de francs par exploitant, soit un total de 130 milliards de francs. La moitié devait être versée à la fin de l'année 2002.

Versement initial des droits d'entrée UMTS par opérateur
en 2001 et 2002

(millions d'unités)

francs

Euros

30 septembre 2001

4.062

619

31 décembre 2001

4.062

619

31 mars 2002

2.031

310

30 juin 2002

2.031

310

30 septembre 2002

2.031

310

31 décembre 2002

2.031

310

TOTAL par opérateur

16.250

2.480

TOTAL pour 4 opérateurs

65.000

9.909

TOTAL pour le Fonds de réserve (57 %)

37.000

5.648

La bouffée d'oxygène que devait apporter cette recette au Fonds de réserve s'est toutefois brutalement raréfiée, selon un « feuilleton » difficile à suivre.

Le « feuilleton » des licences UMTS

Loi de finances pour 2001 : le schéma initial repose sur une recette totale de 130 milliards de francs, dont 28 milliards de francs sont versés à la CADEP pour les années 2001 et 2001 et le solde (102 milliards de francs) au Fonds de réserve, dont 37 milliards de francs pour les années 2001 et 2002.

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 : 18,5 milliards de francs sont attendus pour le F2R au titre de l'exercice 2001, dont le résultat attendu au 31 décembre est de 55 milliards de francs.

janvier 2001 : deux opérateurs de télécommunications (Bouygues et Suez Lyonnaise des Eaux) jettent l'éponge.

20 septembre 2001 : présentation du PLFSS respectant le partage « 57/43 » et reposant sur une répartition du produit des licences UMTS entre le F2R (9,25 milliards de francs) et la CADEP (7 milliards de francs)

30 septembre 2001 : la filiale de Vivendi Universal indique « avoir placé le montant [du premier versement] dans un compte bloqué à la Caisse des Dépôts et consignations » pour assurer « la défense naturelle de ses intérêts » , puis cède devant la réaction du Gouvernement.

16 octobre 2001 : M. Laurent Fabius annonce une réduction drastique des recettes tirées des licences UMTS. Une part fixe de 619 millions d'euros (un peu plus de 4 milliards de francs) suffit désormais, tandis qu'est créée une part variable, versée annuellement et calculée en pourcentage du chiffre d'affaires réalisé au titre de l'utilisation des fréquences allouées. Les licences sont attribuées pour vingt ans, et non plus quinze ans. L'intégralité des recettes 2001 est prévue pour le Fonds de réserve (8,12 milliards de francs).

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 a initialement prévu que le Fonds de réserve devait recevoir 18,496 milliards de francs au titre des produits UMTS. Mais l'article 36 de la loi de finances pour 2001, qui a fixé la règle de répartition du produit de ces licences, a instauré un mécanisme de préemption en faveur de la dette. La loi de finances dispose en effet qu'en 2001 et 2002, 14 milliards de francs seront attribués à la Caisse d'amortissement de la dette publique (CADEP). Seul le reliquat du produit des licences devait être versé au Fonds de réserve.

Dès le début de l'année 2001, ce schéma a été remis en cause, en raison de la défaillance de deux opérateurs pressentis. Si, avec la cession de quatre licences, le montant des produits s'élevait en 2001 et 2002 à 32,5 milliards de francs par an, avec seulement deux licences attribuées, le produit passe de 32,5 milliards de francs à 16,25 milliards de francs en 2001 et en 2002.

Si, dans le cas d'une distribution de quatre licences, le reliquat affecté au Fonds de réserve s'élevait bien à 18,5 milliards de francs (32,5 - 14) dès lors que seules deux licences sont acquises par des opérateurs, le montant versé au Fonds de réserve tombait de 18,5 à 2,25 milliards de francs (16,25 - 14).

Se trouvait ainsi légitimement posée la question d'une modification des règles posées par l'article 36 de la loi de finances pour 2001.

Après une forme d'autisme, le Gouvernement se décidait finalement, par le curieux intermédiaire d'une note de bas de page du rapport présenté à la commission des comptes de la sécurité sociale 41 ( * ) : « Compte tenu de ces dispositions [celles de l'article 36] le désistement de deux opérateurs en janvier 2001 aurait affecté exclusivement le FRR. Afin de préserver ses ressources, le Premier ministre a décidé que la répartition initiale entre le FRR et la CADEP serait rétablie en 2001, soit 57 % pour le FRR, 43 % pour la CADEP. Sur ces nouvelles bases, et pour 2001, le Fonds devrait percevoir 9,25 milliards de francs et la CADEP 7 milliards de francs ».

Cette répartition est confirmée par l'annexe f) du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mais, à la suite des déclarations de M. Laurent Fabius, ministre de l'économie et des finances, le 16 octobre 2001, cette clef de répartition est devenue caduque : c'est l'intégralité des recettes 2001 qui sera finalement affectée au Fonds de réserve.

c) Un compte 2001 évolutif

Le compte du Fonds de réserve annoncé pour l'année 2001 a connu ainsi bien des vicissitudes, entre celui adopté en loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, celui présenté à la commission des comptes de la sécurité sociale du 20 septembre 2001, celui présenté à l'annexe f) du projet de loi et celui résultant du « plan » présenté à l'Assemblée nationale, le 16 octobre dernier qui devrait se concrétiser dans le projet de loi de finances rectificative pour 2001.

Le versement de l'excédent de l'exercice n-1 de la CNAVTS (3,3 milliards de francs) a été annoncé lors de la commission des comptes. Mais si, comme le prévoit l'article 5 du projet de loi, la dette FOREC 2000 est inscrite sur les comptes de l'exercice 2000, ce versement n'a plus lieu d'être, puisque l'excédent se mue en déficit.

Une telle recette appelle en tout état de cause l'observation suivante : le Gouvernement aura tenté de « vendre » deux fois le même excédent, une première fois lors du débat du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, une seconde fois lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002...

Lors de la discussion de la loi DDOSEC du 17 juillet 2001, le Sénat avait proposé de supprimer la possibilité de procéder à ces « affectations prévisionnelles » d'excédents du FSV et de la CNAV. L'Assemblée nationale n'a malheureusement pas suivi cette position de bon sens, dont les conséquences pratiques pour le Gouvernement étaient pourtant proches de zéro.

Le Fonds de réserve en 2001 : des prévisions aux estimations

(en millions de francs)

2001

(sept. 2000)

2001 (annexe PLFSS)

2001 (16 octobre 2001)

Ressources pérennes

Prélèvement 2 %

5.750

6.300

6.300

Ressources hypothétiques

C3S

Excédent CNAVTS n-1

1.421

-

-

Excédent FSV

-

1.880

1.880

Acompte excédent CNAVTS

-

-

-

Ressources exceptionnelles

Parts sociales Caisse d'épargne

4.719

4.710

4.710

Don Caisse des dépôts et consignations

Licences UMTS

18.500

9.250

8.124

Produits financiers

1.400

900

900

Dépenses

91

91

Total annuel

31.790

22.949

21.823

Total au 31.12.2000

20.794

20.794

20.794

Total cumulé

55.068

43.743

42.642

Source : réponse au questionnaire de votre rapporteur

Au total, le Fonds de réserve n'atteint pas l'objectif fixé de 55 milliards de francs.

« Si vous adoptez ce projet de loi... »

« Si vous adoptez ce projet de loi de financement sécurité sociale, mesdames, messieurs les sénateurs, le Fonds de réserve disposera ainsi de plus de 50 milliards de francs à la fin de l'année prochaine ».

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.
in JO Débats Sénat, séance du 14 novembre 2000.

Encore convient-il de noter que le versement de 8,12 milliards de francs des licences UMTS ne pourra intervenir en tout état de cause que dans les premiers mois de janvier 2002 , compte tenu de la modification nécessaire de l'article 36 de la loi de finances pour 2001, modification qui n'interviendra que dans le collectif 2001.

De manière générale, les versements s'effectuent, pour la grande majorité d'entre eux, en fin d'année.

Au 31 octobre 2001, le Fonds de réserve ne comptait « en caisse » que 25,3 milliards de francs, résultat obtenu grâce au versement des 1.880 millions de francs d'excédents du FSV.

Le Fonds de réserve janvier - octobre 2001

(en francs)

Total mensuel recettes

Total mensuel dépenses

Solde

janvier

162.585.704

20.907.583.715

février

295.464.637

29.154

21.203.019.199

mars

194.715.297

21.397.734.495

avril

145.927.801

21.543.546.301

mai

224.777.575

115.995

21.768.323.876

juin

121.965.781

4.038

21.890.285.619

juillet

332.512.449

0

22.222.798.068

août

199.342.379

29.390

22.422.111.056

septembre

81.169.432

3.956

22.503.276.532

octobre

2.856.362.263

21.705.166

25.337.933.630

Une des conséquences inattendues de la loi du 17 juillet 2001 est la nécessité, pour le Fonds de solidarité vieillesse, de « liquéfier », avant le 30 juin 2002, les placements du Fonds de réserve. En effet, l'ancien gestionnaire du Fonds de réserve devra transmettre à la Caisse des dépôts et consignations, nouveau gestionnaire du fonds, des encours disponibles, afin qu'ils puissent faire l'objet d'une délégation de gestion, par voie d'appels d'offre, auprès des investisseurs du marché.

Les placements du Fonds de réserve au 30 octobre 2001

(en francs)

Euros

Francs

BTAN 12 janvier 2002

1.245.200.000

8.167.976.564

BTAN 12 mars 2002

876.000.000

5.746.183.320

BTAN 12 juillet 2002

499.000.000

3.273.225.430

Total BTAN

2.620.200.000

17.187.385.314

BTF

45.000.000

295.180.650

Total BTF

45.000.000

295.180.650

TOTAL GENERAL

2.665.200.000

17.482.565.964

Ce processus de « liquéfaction » est déjà bien entamé : le « taux de placement » 42 ( * ) , supérieur à 98 % à la fin du mois de juin, est déjà inférieur à 70 % à la fin du mois d'octobre.

La « liquéfaction » du Fonds de réserve

(en millions de francs)

Solde du Fonds

Montant du portefeuille en valeur d'achat

Taux de placement

30 juin 2001 43 ( * )

21.890

21.480

98,12 %

31 octobre 2001 44 ( * )

25.338

17.658

69,69 %

Le Fonds de solidarité vieillesse recourt désormais à des « pensions livret », qui pourront être basculées sans difficulté lors du transfert à la Caisse des dépôts.

5. Les prévisions pour 2002 : de quelques artifices pour « sauver » le Fonds de réserve

Confronté à un bouleversement du plan de financement « modifié » du Fonds de réserve, le Gouvernement recourt à quelques artifices, pour gonfler de manière artificielle les recettes du Fonds de réserve annoncées pour le 31 décembre 2002.

L'article 28 du projet de loi prévoit d'augmenter ses ressources structurelles : la part du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement est portée de 50 à 65 %. Cette disposition relève de l'affichage, puisque ce pourcentage supplémentaire (15 %) faisait partie des recettes de la CNAVTS... déjà affectées, par la voie de ses excédents, au Fonds de réserve.

L'article 29 du projet de loi affecte au Fonds 5 milliards de francs d'excédents de la branche famille. C'est dire le respect porté par le Gouvernement à la séparation des branches de la sécurité sociale, les recettes et les dépenses de celle-ci faisant visiblement partie d'un magma « fongible » , selon le qualificatif utilisé par Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

La « saga » des licences UMTS pèse sur le financement du Fonds de réserve.

Ainsi, l'article 17 du projet de loi de finances pour 2002 affecte intégralement au Fonds de réserve les recettes de redevances domaniales liées à l'exploitation des réseaux de téléphonie mobile. 16,24 milliards de francs (2,476 milliards d'euros) étaient initialement prévus : le résultat serait désormais d'un peu plus de 8 milliards de francs , si deux nouvelles licences font l'objet d'une attribution. Cet article a dû être complété par l'article 17 ter nouveau qui prévoit de nouvelles ventes par l'Etat de titres, de parts ou de droits de sociétés, dont un montant plafonné à 1,24 milliard d'euros ( 8,13 milliards de francs ) serait affecté au Fonds de réserve pour les retraites.

Quelques réactions des partenaires sociaux
aux « mouvements de yoyo » affectant le Fonds de réserve

CFTC : « Le Gouvernement se moque de nous. Il nous promène en vidant les fonds de tiroirs. Demain, il s'apercevra que les recettes issues de la privatisation des ASF ne sont pas suffisantes et il sortira une recette miracle de son chapeau ».

CFDT : « Le manque à gagner est d'autant plus dommageable que le Fonds de réserve est, à défaut d'une vraie réforme, la seule mesure prise pour garantir l'avenir des retraites ».

CGT : « Nous avons, dès la mise en place de ces mesures de financement du Fonds de réserve, considéré que ce n'était pas la bonne méthode pour le financer ».

Source : Liaisons sociales.

Le Fonds de réserve en 2002

(en millions de francs)

2002 (annexe PLFSS)

2002 16 octobre 2001 ( * )

2002
CAS ( ** )

Ressources pérennes

Prélèvement 2 %

8.580

8.580

8.580

Ressources hypothétiques

C3S

Excédent CNAVTS n-1

6.401

6.400

-

Excédent FSV

-

-

Acompte excédent CNAVTS

-

-

Ressources exceptionnelles

Parts sociales Caisse d'épargne

4.710

4.710

4.710

Don Caisse des dépôts et consignations

Excédents branche famille

5.000

5.000

5.000

Licences UMTS

16.240

8.124

Privatisations

8.124

Produits financiers

1.900

1.705

1.200

Total annuel

42.831

42.642

19.490

Solde au 31 décembre 2001

43.743

42.620

42.620

Total cumulé (solde au 31 décembre 2002)

86.574

85.261

62.110

(*) source : réponse au questionnaire de votre rapporteur

(**) hors excédent CNAVTS pour 2001, licences UMTS et recettes de privatisation

Entre le montant annoncé de 86,5 milliards de francs et l'hypothèse, davantage crédible, d'un montant compris entre 60 et 70 milliards de francs, une marge considérable existe.

Le nouveau « schéma » de financement du Fonds de réserve pour 2002 repose en effet sur trois conditions :

- l'existence d'un excédent de la CNAV en 2001 de 6,4 milliards de francs, la dégradation de la situation économique pouvant affecter fortement ce solde ;

- la participation de deux nouveaux candidats au processus d'attribution des licences UMTS ;

- l'effectivité d'une recette de privatisation de 8 milliards de francs.

Le Fonds de réserve n'est pas à une gesticulation près.

Ce qui n'empêche pas le Gouvernement de clamer haut et fort sa satisfaction d'avoir mis 80 milliards de francs dans le Fonds de réserve...

Votre rapporteur a souhaité déterminer ce qui aurait pu être versé au Fonds de réserve des retraites en cas de respect, par le Gouvernement, de son « plan de financement » initial.

6. Un total de près de 100 milliards de francs supplémentaires aurait pu être versé...

Rétrospectivement, il est possible de chiffrer les recettes du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse, qui auraient pu être versées au Fonds de réserve, en suivant la logique du Gouvernement, en l'absence du financement des trente-cinq heures, de l'APA et de la dette de l'Etat à l'égard des régimes complémentaires AGIRC-ARRCO.

Ce total atteint près de 100 milliards de francs, réparti de manière à peu près équivalente entre le FSV (50 milliards de francs) et les régimes sociaux (plus de 46 milliards de francs). 85 milliards de francs sont imputables au financement des trente-cinq heures.

Ce que le Gouvernement aurait pu affecter au Fonds de réserve
en cas de respect du plan de marche initial

(en millions de francs)

2000

2001

2002

TOTAL

FSV

Droits alcools

11.341

12.738

11.813

35.892

Taxe contrats prestations
complémentaires de prévoyance

2.867

2.867

total FSV 35 heures (1)

11.341

12.738

14.680

38.759

CSG APA

5.713

5.713

Dette AGIRC-ARRCO

2.893

2.893

5.786

Total FSV (2)

11.341

15.631

23.286

50.258

Régimes sociaux

Droits alcools CNAMTS

5.950

5.820

11.770

Tabacs CNAMTS

8.000

4.400

12.400

Taxe VTAM CNAMTS

6.100

6.100

Charge déficit 2000

16.137

16.137

Total régimes sociaux 35 heures (3)

16.137

13.950

16.320

46.407

Sous total 35 heures (1+2)

27.478

26.668

31.000

85.146

TOTAL (2+3)

27.478

29.581

39.606

96.665

7. Le Fonds de réserve en 2020 : le mystère des excédents du FSV

La Direction de la sécurité sociale a présenté au Conseil d'orientation des retraites, le 2 mai dernier, de nouvelles projections relatives au Fonds de réserve.

Comparaison entre les deux projections
des 21 mars 2000 et 2 mai 2001

(en milliards de francs)

Premier ministre
21 mars 2000

Conseil d'orientation des retraites
2 mai 2001

Différence

Excédents CNAVTS

100

30

- 70

Excédents C3S FSV

400

650

+ 250

2 % patrimoine

150

160

+ 10

Caisse d'épargne et CDC

20

20

-

Sous-total

670

860

+ 190

Produits financiers

330

320

- 10

Total

1.000

1.180

+ 180

Source : Commission des Affaires sociales

Ces nouvelles projections ne lassent pas d'intriguer votre commission :

- les excédents de la CNAVTS ne seront pas de 100 milliards de francs, mais de 30 milliards de francs ; il est possible d'y voir un effet des mesures de revalorisation des pensions de retraite : mais, selon le ministère de l'économie et des finances, ce montant serait atteint « sous l'hypothèse d'une indexation des pensions sur les prix » 45 ( * ) : est-ce à dire que les revalorisations de 2000 et de 2001 sont intégrées, mais pas les (éventuelles) suivantes, à commencer par celle de 2002 ?

- le montant des produits financiers diminue de 10 milliards de francs, alors même que le montant des abondements augmente de 190 milliards de francs : c'est bien l'aveu que le Fonds de réserve connaît un retard dans son plan de marche, puisque le montant des produits financiers sera d'autant plus important que les abondements l'auront été en début de période.

Mais, par un grand mystère, les excédents du Fonds de solidarité vieillesse et de la C3S progressent miraculeusement de 400 à 650 milliards de francs, alors même qu'est prise en compte la diminution de 0,1 point en 2002 du taux de CSG affecté au FSV pour financer l'allocation personnalisée d'autonomie. Cette progression étonnante explique que le Fonds serait désormais doté de 1.180 milliards de francs, et non de 1.000 milliards de francs.

Selon le ministère de l'économie et des finances, « L'excédent projeté du FSV résulte notamment de la baisse du chômage en projection, de la décrue du nombre d'allocataires du minimum vieillesse et du transfert progressif du coût des majorations pour enfants du FSV à la CNAF » 46 ( * ) .

On rappellera que les projections de mars 2000 reposaient déjà sur des hypothèses fort optimistes : un taux de chômage de 4,5 %. Il est impossible de recourir une nouvelle fois à cette explication, censée expliquer la « chute » des cotisations des chômeurs prises en charge par le FSV.

L'argument de la diminution du nombre de titulaires du minimum vieillesse ne peut pas non plus « servir » deux fois.

Interrogée sur cette question par M. Alain Vasselle, lors de son audition sur le projet de loi portant DDOSEC, la ministre de l'emploi et de la solidarité a indiqué que les « données » seraient communiquées ultérieurement. Votre commission les a attendues. En vain.

Une fois encore, le ministère de l'économie et des finances a été plus disert. Par l'intermédiaire d'une réponse à une question écrite de notre excellent collègue M. Louis Souvet, il apporte une partie des réponses :

- le chiffre de 400 milliards de francs annoncé en mars 2000 représentait une partie de l'estimation ;

- cette estimation tenait compte de l'affectation des droits sur les alcools pour financer la réduction du temps de travail : tout était écrit dès mars 2000 ;

- le financement de la dette AGIRC-ARRCO n'avait pas été prévu, mais représente un coût limité ;

- le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie est « compensé » par le versement de la branche famille.

« Répondre à des demandes sociales fortes »

Réponse à une question de M. Louis Souvet
(JO Questions Sénat 19 juillet 2001 p. 2387)

Dans son discours du 21 mars 2000, le Premier ministre a présenté le Fonds de réserve pour les retraites comme l'un des rares axes forts de sa politique en faveur des retraites, spécifiant par là-même l'objectif à atteindre de 1.000 milliards de francs à l'horizon 2020. Dans le schéma présenté à l'occasion de ce discours, la constitution des réserves tenait compte du versement, à hauteur de 400 milliards de francs, d'excédents du Fonds de solidarité vieillesse et de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés. Or, ce montant de 400 milliards de francs ne représente qu'une partie des excédents prévisionnels du Fonds de solidarité vieillesse et de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés. La marge de manoeuvre résiduelle pouvait donc être utilisée pour répondre à des demandes sociales fortes. Ainsi, une partie des excédents du FSV a été utilisée pour le remboursement de la dette envers les régimes ARRCO et AGIRC et pour le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie. En parallèle, le financement de la réduction du temps de travail est en partie assuré par les droits perçus sur les alcools qui ont été transférés à cet effet depuis les recettes du FSV. Ce transfert, en deux étapes, a été initié dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et achevé dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Il était intégré dans le schéma présenté par le Premier ministre en mars 2000. S'agissant de la dette à l'égard des régimes ARRCO et AGIRC, plusieurs engagements ont été pris depuis 1984 pour valider en retraite complémentaire les périodes de chômage et de préretraites indemnisées par l'Etat (ASS, ASFNE, PRP), sans qu'aucun accord ne soit trouvé avec les partenaires sociaux permettant d'y parvenir et conduisant ceux-ci à ne plus valider ces périodes à compter du 31 juillet 1996. Par la convention du 23 mars 2000, le Gouvernement a mis fin au contentieux de ces validations, les pouvoirs publics s'engageant à verser 9,45 milliards de francs (respectivement 7,425 milliards de francs et 2,025 milliards de francs) à l'ARRCO et à l'AGIRC au titre des validations des périodes antérieures au 1 er janvier 1999. Le projet de loi de modernisation sociale prévoit que cette « dette » des pouvoirs publics soit versée par le FSV. Le montant de cette dette à laquelle il est fait référence (9,425 milliards de francs) reste cependant sans commune mesure avec l'objectif de versement au FRR assigné au FSV. Quant à l'allocation personnalisée d'autonomie, son financement devrait se traduire par le transfert de 0,1 point de CSG du FSV mais on peut considérer que cette perte de recettes est compensée par la prise en charge progressive par la CNAF des majorations de pensions pour enfants versées par le FSV à certains régimes. Au total, les excédents prévisionnels du Fonds de solidarité vieillesse ne devraient pas être affectés, et donc l'alimentation du Fonds de réserve pour les retraites est préservée. Par ailleurs, les recettes des licences UMTS n'avaient pas été intégrées dans le schéma de mars 2000 et viendront compléter le schéma initial. En résumé, l'objectif de 1.000 milliards de francs en 2020 conserve toute sa crédibilité.

Devant l'insistance de vos rapporteurs, le ministère de l'emploi et de la solidarité s'est finalement décidé à répondre le 2 novembre dernier 47 ( * ) .

La première estimation de 400 milliards de francs donnée par le Premier ministre le 21 mars 2000 ne correspondait qu'à une fraction des excédents prévisibles du FSV et de la C3S, alors évalués à 600 milliards de francs. Il s'agissait « d'une évaluation prudente pour tenir compte d'éventuels facteurs potentiels de hausse, non prévisibles à cette date » .

L'estimation du 2 mai 2001 a réactualisé la précédente évaluation. Elle a supposé que la totalité des excédents futurs du FSV et de la C3S, soit un total de 650 milliards de francs pour la période 1999-2020, seraient versés au Fonds de réserve. Cette projection prend en compte « les pertes, mais aussi les gains de recettes sur les comptes de la C3S et du FSV, consécutifs aux arbitrages rendus par le Gouvernement entre mars 2000 et mai 2001 » :

- l'affectation d'une partie des excédents de la C3S au BAPSA depuis 1999, et par prudence supposée reconduite jusqu'en 2020 ;

-la suppression à partir de 2000 de l'affectation de la taxe sur les boissons au FSV et la baisse de 0,15 point du taux de CSG affecté au FS à partir de 2001, afin de contribuer au financement du FOREC ;

- la prise en charge par le FSV des cotisations préretraites automobile et des cotisations de retraite des chômeurs AGIRC-ARRCO à partir de 2001 ;

- la baisse de 0,1 point de CSG affectée au FSV à partir de 2002, représentant une contribution de la sécurité sociale au financement de l'APA ;

- l'affectation pérenne au FSV d'une ressource supplémentaire : 20 % du produit de la taxe de 2 % sur les revenus du patrimoine, à partir de 2001 ;

- l'allégement des charges du FSV, consécutif au transfert progressif de la totalité du coût des majorations de pensions pour enfants à la branche famille à partir de 2001.

Selon le Gouvernement, « la projection de mai 2001 tient également compte des rentrées fiscales de CSG et de C3S supérieures aux prévisions initiales pour 2000 et 2001, qui ont eu un impact positif sur le compte du FSV » . Globalement, « l'effet de ces différentes mesures a été faiblement positif sur le solde prévisionnel cumulé du FSV de la période 1999-2020 » , qui serait ainsi de 50 milliards de francs (différence entre les 600 milliards estimés en mars 2000, dont 400 avaient été affectés au fonds de réserve, et les 650 milliards annoncés en mai 2001).

Mais le Gouvernement « réactualise » à nouveau ses prévisions : « il a été décidé en septembre 2001 que la taxe de prévoyance serait affectée au FOREC à partir de 2002, mesure compensée au FSV sur la période 2002-2007 par un transfert plus rapide des charges de majoration de pensions à la CNAF. Toutefois, dans l'attente de nouvelles décisions d'affectation compensatoire de ressources au FSV à partir de 2008, la prudence conduit à ramener à 580 milliards de francs 2000 (88 milliards d'euros) environ l'estimation des excédents cumulés du FSV et de la C3S pour la période 1999-2020, ce qui ne remet pas en cause l'ordre de grandeur initial ».

Dont acte. Il reste qu'il convient de procéder à une nouvelle actualisation, puisque le montant de C3S affecté au BAPSA augmente fortement en 2002 et que les hypothèses économiques sur lesquelles repose un tel fonds sont extrêmement optimistes.

Le Gouvernement a toujours soutenu que les recettes UMTS n'étaient pas incluses dans les « 1.000 milliards de francs ». Dès lors, il convient de le prendre au mot et de recalculer les abondements hors UMTS et hors recettes de privatisation.

Le Fonds de réserve hors UMTS et recettes de privatisation

(en millions de francs)

2002

Ressources pérennes

Prélèvement 2 %

8.580

Ressources hypothétiques

C3S

Excédent CNAVTS n-1

-

Excédent FSV

-

Acompte excédent CNAVTS

-

Ressources exceptionnelles

Parts sociales Caisse d'épargne

4.710

Don Caisse des dépôts et consignations

Excédents branche famille

5.000

Produits financiers

1.000

Total annuel

19.290

Solde au 31 décembre 2001

34.493

Total cumulé (solde au 31 décembre 2002)

53.783

Le montant de 53,8 milliards de francs, à la fin décembre 2002, fait cruellement apparaître le retard sur le « plan de marche ». Le respect de l'objectif des 1.000 milliards aurait nécessité un fonds abondé à hauteur de 95 milliards de francs (soit un peu plus de 30 milliards).

IV. ASSURER L'AVENIR DES RÉGIMES DE RETRAITE : UNE RÉFORME NÉCESSAIREMENT PLURIELLE

Au-delà d'un bilan de législature et d'une analyse des comptes de la branche vieillesse, votre rapporteur a souhaité compléter son propos par un développement portant sur les différentes pistes d'une réforme des retraites.

En effet, celle-ci ne peut être constituée par un seul « volet » ou une seule « mesure ». Les exemples étrangers, comme les pistes évoquées par les partenaires sociaux, montrent qu'une telle réforme est nécessairement « plurielle ».

A. L'EXEMPLE DE L'ALLEMAGNE : UNE RÉFORME COMPORTANT PLUSIEURS VOLETS

L'Allemagne est, encore plus que la France, confrontée à la pression démographique. Le taux de fécondité (1,33 enfant par femme en 1998) est l'un des plus bas du monde. En 2050, à fécondité inchangée, l'Allemagne comptera autant de retraités que d'actifs.

La réforme des retraites en Allemagne, adoptée définitivement par le Bundesrat le 11 mai 2001, comprend trois volets. Elle montre que la réforme du régime de retraite par « répartition » est indissociable de l'introduction ou de l'encouragement d'un volet « capitalisation ».

1. La réforme du régime de retraite légal

La première loi, relative au régime de retraite légal, est appelée « Altervermögens-Ergänzungsgesetz » (AvmEG).

Aujourd'hui, le régime de base obligatoire allemand représente la plus grande partie du montant des retraites. Il permet d'accorder une « pension standard » (Standardrente) correspondant, en moyenne, à 70 % du salaire pour 45 années de cotisations. Cette durée peut paraître très longue ; elle tient compte de périodes non contributives (annuités pour enfants, formation professionnelle, service militaire, périodes de chômage, etc.). Cependant, à peine 50 % des assurés atteignent à l'heure actuelle le niveau de la « Standardrente ».

Le montant de la pension dépend du nombre d'années d'affiliation et des cotisations versées. Celles-ci sont liées aux salaires dans la limite d'un plafond dont le niveau (environ 53.400 euros) est presque le double du plafond français.

Le financement est tripartite. Les cotisations des employeurs et des salariés (en parité) constituent la majorité des recettes : 75,8 %. La subvention fédérale (23,5 % des ressources) est destinée notamment au financement des périodes de non cotisation. L'assurance retraite légale est dépourvue d'un dispositif de protection minimum.

La réforme de ce régime prévoit plusieurs mesures :

- une hausse maîtrisée et progressive du taux de cotisations ne devant pas dépasser 20 % du salaire brut en 2020, puis 22 % en 2030, contre 19,1 % en 2001 ;

- une baisse du taux de remplacement de 70 à 67 % en 2030 ;

- une baisse du taux de réversion de 60 à 55 % de la pension du conjoint décédé. La pension de réversion sera soumise à des conditions de ressources plus sévères (extension aux revenus du capital). A long terme, elle ne sera cumulable que pour les veufs ou veuves aux bas salaires, ne disposant pas d'autres ressources ;

- la possibilité pour les conjoints âgés de moins de quarante ans d'opter entre le « partage » des droits à retraite acquis par l'un ou l'autre ou la réversion ;

- l'introduction d'une majoration pour enfant pour les mères et pères ayant des bas salaires (moins de la moitié du salaire moyen).

Les retraites seront indexées sur les salaires nets, mais avant impôts.

2. Le développement des fonds de pension d'entreprise

Le plan du Gouvernement de M. Schroeder prévoit également la mise en place de fonds de pension à l'initiative des entreprises, les cotisations versées dans ces nouveaux fonds et dans les caisses déjà créées (régimes complémentaires d'entreprise, peu développés) bénéficiant d'une fiscalité attractive.

L'Allemagne avait été jusqu'alors rétive à une telle introduction.

3. Le développement des retraites individuelles par capitalisation

La réforme allemande encourage le développement de retraites individuelles par capitalisation (« Altervermögensgesetz »). Cet effort est facultatif.

Il est prévu d'introduire dès l'an prochain une épargne-retraite correspondant à 1% du salaire brut. Ce taux est appelé à augmenter chaque année pour atteindre 4% d'ici à 2008. Les produits d'épargne seront soumis au code des assurances. Les contrats doivent garantir aux assurés au moment de leur retraite un capital au moins équivalent à la somme des versements effectués (valeur nominale).

L'Etat versera une bonification annuelle par personne et par enfant. De 37,5 marks (19 euros) par personne l'an prochain, et 45 marks (23 euros) par enfant à 300 marks (153,3 euros) par an pour un célibataire et le double pour un couple marié en 2008. En sus, la prime par enfant atteindra à cette date 360 marks (184 euros). L'ensemble devrait peser à cette échéance autour de 20 milliards de marks (10,2 milliards d'euros) sur le budget.

Aides de l'Etat allemand à la prévoyance individuelle

en euros

Aide (montant annuel)

Supplément familial par an et par enfant

Cotisation à taux plein

2002 et 2003

38

46

1 %

2004 et 2005

76

92

2 %

2006 et 2007

114

138

3 %

à partir de 2008

154

185

4 %

B. L'APPEL DES PARTENAIRES SOCIAUX : L'ACCORD DU 10 FÉVRIER 2001 PEUT SERVIR DE BASE À UNE RÉFORME DES RETRAITES

L'accord du 10 février 2001 portant sur les régimes de retraite complémentaire, arraché dans la douleur, est finalement passé quelque peu inaperçu, alors qu'il comprend un premier volet consacré à la réforme des régimes de base.

1. Les « principes » de l'accord du 10 février 2001

L'adaptation des régimes complémentaires est effectivement indissociable de la réforme du régime de base.

L'adaptation des régimes de retraite complémentaire doit être articulée
avec la réforme du régime de base d'assurance vieillesse

Considérant le rôle et la mission d'intérêt général des régimes de retraite complémentaire dans le cadre de la protection sociale en France ;

Considérant l'importance de la retraite par répartition (régime général et régimes complémentaires) et la nécessité d'en préserver la place dans respect de l'équilibre entre les générations, qui est l'une des conditions de la cohésion sociale ;

Considérant la nécessité de pérenniser et d'assurer la solvabilité à moyen et long termes de la retraite par répartition dans le cadre d'une cohérence d'ensemble ;

Considérant les conséquences des évolutions démographiques - allongement de l'espérance de vie et arrivée à la retraite des générations pleines d'après-guerre - sur les équilibres financiers de l'ensemble des régimes de retraite par répartition ;

Considérant la nécessité de rechercher un traitement équitable en matière de retraite entre tous les salariés ;

Considérant la nécessité de maintenir la compétitivité des entreprises françaises ;

Considérant que l'adaptation des régimes de retraite complémentaire doit être articulée avec la réforme du régime de base d'assurance vieillesse.

Source : Accord du 10 février 2001

La nouveauté de l'accord du 10 février 2001 tient à ce que les partenaires sociaux ont pu aller au-delà de ces constats, pour esquisser un certain nombre de principes sur lesquels cette « réforme du régime de base par le législateur devrait reposer pour équilibrer le régime de retraite » .

Six principes ont ainsi été définis :

- premièrement : « Définir et garantir un niveau de pension pour les dix ans à venir, supposant l'arrêt de la dégradation du taux de remplacement ; définir une perspective de l'évolution du système de retraite à vingt ans, de façon à ce que les salariés et les employeurs disposent d'une bonne visibilité » ; votre rapporteur estime également nécessaire de rassurer les retraités à un horizon suffisamment éloigné, afin d'améliorer la « lisibilité » ou la « visibilité » du système ;

- deuxièmement : «  Stabiliser les taux de cotisation pour les dix ans à venir - sans exclure des redéploiements d'autres prélèvements connexes - afin de préserver les équilibres entre les générations et de ne pas reporter la charge sur les actifs tout en maintenant la compétitivité des entreprises » ; votre rapporteur souhaite que la réforme des retraites ne se traduise pas par une augmentation globale des prélèvements obligatoires, dont le niveau ne peut raisonnablement être dépassé ;

- troisièmement : «  Privilégier la variable de la durée de cotisation pour l'accès à la retraite à taux plein » ; votre rapporteur estime que le « couperet » de l'âge de la retraite à soixante ans n'a pas fini de peser sur les régimes de retraite ;

- quatrièmement : «  Mettre en place un dispositif favorisant la liberté de choix pour le départ à la retraite du salarié à partir de l'âge de 60 ans » ; votre rapporteur considère que les « décotes » prévues en cas d'absence de validation des 160 trimestres requis devront être revues à la baisse, afin de permettre aux salariés de partir à l'âge de 60 ans, sans que ce choix ne pèse trop sur leur pension 48 ( * ) ;

- cinquièmement : «  Introduire la possibilité de liquidation avant 60 ans des pensions des salariés ayant commencé à travailler tôt et/ou ayant accompli des travaux particulièrement pénibles, sous des conditions à définir » ; votre rapporteur constate qu'il existe un consensus sur cette question : définir des conditions uniques, pour tous les régimes et pour toutes les professions, est absurde et aujourd'hui inégalitaire, puisqu'un ouvrier dispose d'une espérance de vie à 60 ans bien moindre que celle d'un cadre.

- sixièmement : « Mettre en place un groupe de travail chargé d'étudier l'articulation entre les différents régimes d'assurance vieillesse » ; votre rapporteur estime que cette question rejoint celle des transferts de compensation, pour lesquelles il a formulé des propositions.

Ces principes montrent que les partenaires sociaux, et tous les partenaires sociaux, sont tout à fait en mesure de « dialoguer », de se « concerter » et de présenter des propositions sans recourir à l'instrument du COR.

2. Les questions fondamentales du taux de remplacement et de la durée de cotisation

La conduite de la réforme des retraites en Allemagne, comme la déclaration des partenaires sociaux du 10 février 2001, montre que la question du taux de remplacement, et de sa garantie dans les années à venir, est particulièrement fondamentale.

Ce taux de remplacement doit être, dans la mesure du possible, égal dans tous les régimes. Cependant, la question des « primes » dans la fonction publique, qui ne sont pas incluses dans l'assiette des cotisations, fausse les comparaisons.

En effet, si la pension représente chez les fonctionnaires 75 % du dernier salaire, le taux de remplacement « réel » sera bien inférieur. Ce constat est bien évidemment variable selon les catégories de fonctionnaires.

Le taux de remplacement chez les fonctionnaires

Taux de prime

Taux de remplacement réel

Cadres

36 %

55,1 %

Professeurs certifiés

12 %

67,0 %

Professeurs des écoles

4 %

72,1 %

Instituteurs

8 %

69,4 %

Employés et agents de service

14 %

65,8 %

Ouvriers

16 %

64,7 %

Infirmiers

21 %

62,0 %

Source : Conseil d'orientation des retraites.

La deuxième question fondamentale est celle de l'équité entre les régimes. Aujourd'hui, les salariés travaillant dans le secteur privé cotisent quarante ans, alors que les salariés du secteur public sont « restés » à trente-sept années et demie.

Si l'on se fie au sondage Liaisons sociales/CSA de septembre 2001, l'opinion publique est « mûre » pour un alignement des conditions de départ de retraite des salariés du secteur public, ce qui ne peut que nourrir des regrets compte tenu de l'inaction du Gouvernement, depuis 1997, sur cette question.

A la question : « Vous savez que depuis 1993, les salariés travaillant dans le secteur privé cotisent plus d'années (40 années) que ceux qui travaillent dans le secteur public (37 années et demi). Pensez-vous qu'il faut aligner les conditions de départ de retraite des salariés du secteur public sur ceux du privé ? », les Français répondent oui à une grande majorité, y compris dans le secteur public. Fait encore plus marquant, cette majorité se retrouve chez les sympathisants de tous les partis politiques, y compris le Parti communiste (51 % de « oui » contre 46 % de « non »).

Les Français favorables aux 40 ans de cotisations pour les fonctionnaires

Ensemble des salariés

Salariés du privé

Salariés du privé

Oui

77 %

87 %

59 %

Non

22 %

13 %

39 %

Ne se prononcent pas

1 %

-

2 %

TOTAL

100 %

100 %

100 %

Source : site Internet de CSA.

L'inclusion éventuelle des primes des fonctionnaires, sous réserve d'un plafond, dans l'assiette des cotisations, en contrepartie d'un allongement de la durée de cotisation, permettant d'aboutir à des « taux de remplacement » équivalents au secteur privé pourrait être l'un des éléments de la négociation.

Ces deux questions, étroitement imbriquées, montrent que les régimes publics sont concernés au premier chef, le régime général ayant fait l'objet d'une réforme courageuse en 1993. Les projections financières ne font que confirmer ce constat.

3. La question des régimes publics est au coeur de cette réforme

Les projections présentées au COR ont confirmé que la question centrale demeurait celle des régimes publics.

En termes de besoins de financement, la question ne se pose avec acuité, pour les régimes privés, et hors charges de compensation, qu'à partir de 2010-2015 : les effets de la réforme « Balladur » se font sentir.

En revanche, le besoin de financement des régimes du secteur public atteint dès 2005 environ 70 milliards de francs et 129 milliards de francs en 2010.

En 2020, le besoin de financement global du régime de base (hors régimes complémentaires) est chiffré à 383,5 milliards de francs. Les deux tiers seraient imputables aux régimes du secteur public.

Le déficit du régime de base (hors régimes complémentaires) est chiffré en 2040 à 761 milliards de francs, dont la moitié est constituée par le déficit du « régime » des fonctionnaires civils et militaires et par la CNRACL.

Les besoins annuels de financement : régimes du secteur privé
et régimes du secteur public

(en millions de francs)

2005

2010

2015

2020

2040

Régimes du secteur privé

- 30.990

- 49.023

- 86.682

- 125.835

- 304.546

Régimes publics et spéciaux

- 69.867

- 82.200

- 143.226

- 257.674

- 456.538

TOTAL

- 100.227

- 131.223

- 229.908

- 383.509

- 761.084

Source : commission des Affaires sociales du Sénat, d'après les projections du COR.

4. La capitalisation est un complément utile

Enfin, toutes les réformes menées à l'étranger montrent l'importance de prévoir la possibilité de compléter sa pension issue du mécanisme de répartition par une rente ou un capital représentant ses efforts d'épargne.

En opposant capitalisation et répartition , en faisant croire que l'ancienne majorité avait souhaité remplacé l'une par l'autre, alors que la capitalisation ne peut intervenir que sous la forme d'un « complément » utile, le Gouvernement porte une lourde responsabilité.

*

* *

Sous réserve de ces observations et des amendements qu'elle propose dans le tome IV du présent rapport, votre commission vous demande d'adopter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 pour ses dispositions relatives à l'assurance vieillesse.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

A. AUDITION DE MME DANIÈLE KARNIEWICZ, PRÉSIDENTE DU CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAVTS)

Réunie le mercredi 17 octobre 2001, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'audition de Mme Danièle Karniewicz, présidente de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), accompagnée de MM. Patrick Hermange, directeur, et de Pierre Raynaud, agent comptable, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

Mme Danièle Karniewicz a rappelé que le conseil d'administration de la CNAV avait émis un avis défavorable (19 voix contre, 2 pour, 9 prises d'acte) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002. Elle a précisé que ce désaccord portait sur trois points :

- la revalorisation des pensions, certaines délégations estimant qu'elle était « insuffisante », tandis que d'autres la jugeaient « imprudente » ;

- la mise à la charge de la sécurité sociale d'une partie du financement des allégements de charges décidés dans le cadre de la réduction du temps de travail ;

- la complexité des transferts opérés entre les différentes branches.

Mme Danièle Karniewicz a considéré qu'à cet égard, un plan de financement de la sécurité sociale ne pouvait reposer que sur des objectifs ou des orientations politiques clairement identifiés, et qu'en l'absence de tels objectifs ou de telles orientations, le système manquait de transparence.

En conclusion de son intervention liminaire, elle a insisté sur le fait que les hypothèses macro-économiques retenues pour 2002 étaient « très favorables » et qu'en conséquence, le solde annoncé (+ 1,1 milliard de francs) montrait que la branche vieillesse était « sur le fil ».

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a demandé si l'excédent pour 2000 de la CNAV, prévu à hauteur de 3,2 milliards de francs, serait reversé au fonds de réserve des retraites.

Mme Danièle Karniewicz a répondu que les comptes de la CNAV pour 2000, arrêtés par le conseil d'administration le 7 juillet 2001, faisaient effectivement apparaître un excédent de 3,2 milliards de francs. Elle a précisé que si l'article 5 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, procédant à une annulation de créances sur l'exercice 2000, était adopté par le Parlement, il serait nécessaire de procéder à une modification des comptes pour l'année 2000. Compte tenu de la créance de 4,7 milliards de francs qui serait ainsi « annulée », la CNAV serait désormais en déficit de 1,5 milliard de francs. Il serait alors impossible d'effectuer un quelconque versement au fonds de réserve pour les retraites.

M. Dominique Leclerc est alors revenu sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, qui avait prévu le versement au fonds de réserve, à titre d'acompte, d'une fraction de l'excédent prévisionnel de la CNAV pour 2000, soit un montant de 2,9 milliards de francs. Il a demandé quelles étaient les autorités qui avaient pris la décision de ne pas effectuer ce versement au cours de l'année 2000.

Mme Danièle Karniewicz a indiqué que le conseil d'administration de la CNAV, dans sa séance du 4 décembre 2000, avait émis un avis négatif sur un projet d'arrêté dont elle était saisie pour avis, compte tenu des incertitudes pesant sur le solde. Cet arrêté n'a jamais vu le jour.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a demandé de quelle manière serait financé le déficit de l'exercice 2000.

Mme Danièle Karniewicz a répondu que, compte tenu des résultats excédentaires des exercices précédents, la CNAV disposait d'un excédent cumulé de 2 à 3 milliards de francs qui lui permettrait d'éponger ce déficit.

M. Nicolas About, président, a demandé si le conseil d'administration de la CNAV avait été consulté sur une disposition prévue à l'annexe f) du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, selon laquelle la caisse verserait 6,4 milliards de francs au fonds de réserve, au titre de son excédent pour 2001.

M. Patrick Hermange a répondu par la négative.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a rappelé que le Premier ministre, le 21 mars 2000, avait annoncé que le fonds de réserve disposerait à l'horizon 2020 de 1.000 milliards de francs, dont 100 milliards de francs provenant des excédents de la CNAV entre 2000 et 2007. Il a demandé si la CNAV avait été consultée sur la révision de ce montant, effectuée lors du Conseil d'orientation des retraites (COR) du 2 mai 2001 : 30 milliards de francs seraient désormais attendus. Il s'est interrogé sur la crédibilité de cette nouvelle estimation.

Mme Danièle Karniewicz a indiqué que la CNAV effectuait des simulations dans le cadre des estimations macro-économiques communiquées par le COR. Elle a précisé que la première estimation de la CNAV prévoyait un excédent cumulé en 2010 compris entre 134 et 171 milliards de francs. Elle a ajouté qu'à partir de ces éléments, le COR avait établi un « solde élargi », prenant en compte le solde des salariés agricoles et le mécanisme de la compensation démographique. Elle a indiqué que l'écart entre le solde de la CNAV et ce solde élargi se chiffrait en 2001 à 8 milliards de francs et qu'en extrapolant sur la période 2001-2010, et en prenant pour hypothèse que cet écart de 8 milliards de francs reste stable, l'excédent cumulé en 2010 était chiffré désormais entre 53 et 90 milliards de francs. Elle a précisé que la CNAV ne s'était pas prononcée sur l'estimation de 30 milliards de francs, dont la responsabilité incombait à la Direction de la sécurité sociale.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a souhaité alors connaître le coût cumulé en 2010, pour la CNAV, des mesures de revalorisation des pensions de retraite décidées par les précédentes lois de financement de la sécurité sociale.

Mme Danièle Karniewicz a rappelé l'impact annuel de ces différentes mesures de revalorisation :

- « coup de pouce » de 0,3 % décidé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 : 1 milliard de francs ;

- « coup de pouce » de 0,5 % décidé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 : 1,7 milliard de francs ;

- « coup de pouce » de 0,3 % inscrit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 : 1,3 milliard de francs.

Elle a indiqué que le coût cumulé de ces « coups de pouce » serait communiqué ultérieurement à la commission.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a demandé si un mécanisme pérenne de revalorisation des pensions de retraite pouvait faire l'objet d'un consensus.

Mme Danièle Karniewicz a considéré qu'une indexation sur les salaires serait « dangereuse » pour les régimes de retraite et qu'une indexation sur les prix serait injuste pour les retraités. Elle a estimé que le consensus devrait se situer « entre les deux ».

M. Alain Gournac s'est interrogé sur le défaut de transparence caractérisant les régimes de retraite et sur les propositions faites par la CNAV pour y remédier.

Mme Danièle Karniewicz a considéré que le défaut de transparence du financement de la sécurité sociale ne concernait pas seulement la branche vieillesse, mais l'ensemble des régimes de protection sociale. Elle a estimé que l'opacité, reprochée par tous les partenaires sociaux, s'expliquait notamment en raison des modifications incessantes d'affectation de recettes.

M. Patrick Hermange a estimé qu'en raison des modifications de périmètre, le problème devait être appréhendé par toutes les branches de la sécurité sociale et que, par conséquent, la CNAV n'était pas en mesure de formuler des propositions concrètes d'amélioration. Il a considéré que l'intégralité du financement de la protection sociale devait être remis à plat.

M. Jean Chérioux , citant l'exemple de la majoration pour enfants, transférée de manière progressive à la branche famille, s'est interrogé sur l'impact financier de cette disposition.

M. Pierre Raynaud a rappelé que cette majoration pour enfants était financée, depuis 1993, par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Il a précisé que ce transfert s'élevait à environ 3 milliards de francs en 2001 et 6 milliards de francs en 2002. Il a ajouté que la charge annuelle, une fois les transferts achevés, était estimée entre 18 et 20 milliards de francs.

M. Guy Fischer, après avoir noté les propos de Mme Karniewicz sur l'équilibre fragile de la CNAV pour 2002, s'est interrogé sur le mécanisme actuel de revalorisation des pensions, qui ignore la perte du pouvoir d'achat des retraités constatée dans les années récentes.

Mme Danièle Karniewicz a rappelé qu'un mécanisme pérenne de revalorisation des pensions de retraite faisait aujourd'hui défaut et que les revalorisations décidées chaque année n'avaient aucun caractère obligatoire.

M. Jean-Pierre Fourcade s'est interrogé sur l'impact de la baisse du chômage sur les comptes du FSV et sur le taux moyen de progression des recettes de la CNAV.

M. Patrick Hermange a indiqué que la CNAV n'avait pas procédé pour l'instant à des hypothèses différentes de celles du COR, qui reposent sur un taux de chômage de 4,5 % en 2010. Il lui a semblé utile de disposer de projections construites sur un taux de chômage de 6 % et de 9 %.

S'agissant de la progression des recettes de la CNAV, il a précisé que les hypothèses de croissance de la masse salariale retenues par le COR étaient de 3 % entre 2001 et 2005, de 2,6 % entre 2006 et 2010 et de 1,5 % après 2010.

A la demande de M. Nicolas About, président, M. Patrick Hermange a confirmé que la CNAV fournissait des données au COR, construites sur la base des analyses macro-économiques communiquées par le même COR.

Après s'être félicité que le département des Alpes-de-Haute-Provence compte désormais deux présidents de caisses nationales de retraite, M. Claude Domeizel a estimé que « le juste milieu » de la revalorisation se situait entre les prix et les salaires et que, par conséquent, le Gouvernement avait trouvé une position consensuelle. Il s'est interrogé sur les résultats comptables des précédents et des prochains exercices de la CNAV.

Mme Danièle Karniewicz a rappelé ces résultats comptables : en 1996, un excédent de 301 millions de francs ; en 1997, un déficit de 4,9 milliards de francs ; en 1998, un excédent de 2,8 milliards de francs ; en 1999, un excédent de 5 milliards de francs, versé au fonds de réserve ; en 2000, un excédent de 3,2 milliards de francs, avant réouverture du compte pour annulation de la créance de 4,7 milliards de francs ; en 2001, un excédent estimé à 4,7 milliards de francs ; et en 2002, un excédent prévu après mesures du projet de loi de financement de 1,1 milliard de francs.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux, après avoir rappelé que la loi du 22 juillet 1993 avait instauré pour cinq ans un mécanisme de revalorisation des pensions de retraite sur les prix, a regretté qu'aucun mécanisme pérenne n'ait été proposé par l'actuel Gouvernement. Il a demandé si la CNAV avait formulé des propositions dans ce sens.

Mme Danièle Karniewicz a répondu par la négative, mais a reconnu qu'il lui semblait utile que le conseil d'administration se penche sur cette question.

B. AUDITION DE MME YANNICK MOREAU, PRÉSIDENTE DU CONSEIL D'ORIENTATION DES RETRAITES

Réunie le mercredi 24 octobre 2001, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de Mme Yannick Moreau, présidente du Conseil d'orientation des retraites sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

M. Nicolas About, président , a observé en préambule que le fonds de réserve pour les retraites (F2R) et le conseil d'orientation des retraites (COR) constituaient les « deux piliers » de l'action du Gouvernement en matière de réforme des retraites. Il a regretté que le premier rapport du COR ne soit disponible qu'après le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

Mme Yannick Moreau a rappelé que la proposition de créer un organisme permanent chargé de suivre la situation des régimes de retraite et les perspectives de réforme avait été avancée, dans des termes différents, à la fois par le rapport de la commission de concertation des retraites, dit « rapport Charpin », et l'avis du Conseil économique et social, présenté par M. René Teulade.

Elle a indiqué que la création d'un tel organisme était nécessaire pour deux raisons. En premier lieu, tous les pays réalisant des réformes de leurs régimes de retraite ont mis en place, sous une forme ou une autre, un organisme permettant un suivi et une concertation dans la durée : la réforme n'est pas un processus pouvant se réaliser « en une seule fois ». En deuxième lieu, il est nécessaire de procéder à l'actualisation régulière des projections. Elle a constaté que la France avait déjà effectué une réforme des retraites du régime général, par la loi du 22 juillet 1993, dont les effets étaient importants et rapides. Elle a considéré que la méthode souvent utilisée en France, « un rapport, une réforme », n'était plus adéquate. Elle a estimé que les événements de 1995 n'avaient pas facilité la tâche pour mener à bien une réforme des régimes spéciaux et du régime de la fonction publique. Elle a observé que les polémiques sur les chiffrages réalisés par la « commission Charpin » n'avaient pas pu faire l'objet d'un débat suivi, puisque cette commission n'avait pas de permanence. Elle a précisé enfin que les multiples régimes de retraite, obéissant à des règles fort différentes, étaient eux-mêmes soumis à une tutelle d'administrations différentes et que l'existence d'un organisme, chargé d'une analyse et d'une concertation concernant l'ensemble des régimes était, dans ce contexte, d'autant plus nécessaire.

Mme Yannick Moreau a rappelé les grandes lignes du décret du 10 mai 2000, intervenu à la suite du discours du Premier ministre du 21 mars 2000. Le Conseil comprend 33 membres : parlementaires, partenaires sociaux, personnalités qualifiées, représentants de l'Etat et représentants des retraités et des familles. Les missions du COR sont les suivantes : décrire la situation financière actuelle et les perspectives des différents régimes de retraite, compte tenu des évolutions économiques, sociales et démographiques ; apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ; veiller à la cohésion du système de retraite par répartition, en assurant la solidarité entre les régimes et le respect de l'équité, tant entre les retraités qu'entre les différentes générations.

Elle a indiqué que le COR avait pour mission « au moins tous les deux ans » de remettre au Premier ministre un rapport d'ensemble analysant la situation des régimes de retraite et proposant les mesures jugées nécessaires pour assurer leur équilibre à long terme. Elle a insisté sur le fait que le rapport qu'allait rendre le COR à la fin de l'année serait un « premier rapport ». Elle a précisé que le COR s'appuyait sur une « petite équipe » d'une dizaine d'emplois, comprenant notamment des statisticiens, et disposait de crédits d'études, lui permettant de disposer d'une expertise indépendante et de réaliser sous sa responsabilité des projections. Elle a ajouté que la taille réduite de ce secrétariat général n'était pas un handicap, puisque le COR travaillait « en réseau » avec l'ensemble des administrations et des caisses de sécurité sociale concernées.

Elle a précisé que le COR avait lui-même défini ses méthodes de travail. Les membres du COR doivent assister personnellement aux séances et ne peuvent pas se faire représenter. Les quatre représentants de l'Etat (Directeur du budget, Directeur général de la fonction publique, Directeur de la sécurité sociale, Commissaire général au plan) participent directement aux travaux comme les autres membres.

Mme Yannick Moreau a observé que les membres qui avaient le plus de difficultés pour assister aux séances étaient probablement les parlementaires, dont la participation est « inégale » en raison des obligations qui sont les leurs.

Elle a précisé que trois groupes de travail avaient été constitués : le premier est consacré au thème « âge et travail », le deuxième à la diversité et aux inégalités de situations vis-à-vis de la retraite et le troisième à la prospective générale et aux perspectives financières. Elle a ajouté que -contrairement aux réunions plénières- les membres pouvaient se faire représenter et/ou accompagner.

Elle a estimé que la méthode du COR était à la fois « active » et « interactive ». Elle a indiqué par exemple que les membres du conseil pouvaient être amenés à apporter des contributions propres, éventuellement de nature technique et qu'il fallait s'efforcer d'éviter que les membres du conseil aient le sentiment d'être « prisonniers d'une expertise administrative ».

S'agissant du regret exprimé par le président Nicolas About, elle a considéré que la date retenue pour la publication du premier rapport ne pouvait guère être différente : il était nécessaire de laisser un certain temps pour permettre un véritable travail de fond, comme il apparaissait impossible de procéder à la publication de ce rapport juste avant les échéances électorales ; dans ces conditions, le dernier trimestre 2001 était la seule date possible.

Mme Yannick Moreau a précisé que le COR n'avait pas recherché une « médiatisation exacerbée », mais qu'elle se tenait à la disposition des journalistes, sur demande. Elle a précisé qu'aucun membre du Conseil n'avait du reste « le monopole de la parole ». Elle a précisé que les documents de travail étaient rendus publics à l'issue de la séance.

Rappelant les thèmes abordés par les différentes réunions du Conseil, elle a indiqué que les activités du Conseil ne se limitaient pas à la seule préparation de son rapport. Elle a, en effet, constaté que si le COR limitait son information publique au rapport, « deux ou trois idées » risqueraient d'être retenues, ce qui n'est pas suffisant compte tenu de la complexité du sujet abordé. Elle a précisé que le COR pourrait, en dehors de l'échéancier minimal retenu par le décret, diffuser des études thématiques sur telle ou telle question. De même, elle a indiqué que le COR avait organisé, en avril 2001, un colloque sur le thème « Âge et travail », rassemblant 500 personnes. Elle a fait part également de l'intention du Conseil de réaliser des « fiches pédagogiques » et d'être présent sur le réseau Internet à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine.

Elle a indiqué que le MEDEF ne participait pas aux travaux du COR, en raison d'une « position de principe », ce qui ne signifiait pas une remise en cause de sa part du sérieux des travaux réalisés par le conseil.

Elle a estimé qu'il y aurait toujours « des points de désaccord » et que le COR n'était un organisme ni de négociation, ni de décision. Elle l'a qualifié d'organisme de « concertation ». Elle a indiqué que le rapport ferait part des points d'accord et des points de désaccord. Prenant l'exemple du taux de remplacement, qui pourrait être présenté comme un objectif, elle a précisé que le rapport ne présenterait pas de chiffres précis, mais plutôt des « fourchettes », laissant ouvert le champ de la négociation.

En conclusion de son propos liminaire, Mme Yannick Moreau a insisté sur le fait que le rapport de fin 2001 du COR serait un « premier rapport », faisant ensuite l'objet d'un suivi régulier et qu'en conséquence le « processus » classique était profondément modifié.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse , a cité les propos de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, en date du 7 juin 2001, selon lesquels le premier acquis des travaux du COR est d'avoir « réduit les divergences qui pouvaient encore persister sur le diagnostic des changements démographiques et de leur incidence prévisible sur les régimes de retraite ». Il s'est interrogé sur la manière d'apprécier cette « réduction des divergences ».

Mme Yannick Moreau a considéré qu'il convenait de rester prudent et ne pas préjuger des prises de position des uns et des autres avant la publication du rapport de fin 2001. Elle a ajouté que la discussion de sa troisième partie, qui allait commencer, serait nécessairement plus problématique. Elle a toutefois estimé que les polémiques désagréables, observées lors des derniers rapports sur les retraites, apparaissaient appartenir au passé. Elle a précisé que l'importance des facteurs démographiques n'était plus contestée (même si l'exemple de l'évolution de la mortalité à quarante ans repose, par définition, sur des conventions) et que les prospectives financières ne l'étaient pas davantage. Elle a considéré qu'il n'y avait pas de « faux débat » et que même les partenaires sociaux favorables à une indexation des pensions sur les salaires reconnaissaient que ce choix avait pour conséquence un besoin de financement des régimes de l'ordre de 6 points de PIB, contre un besoin de financement de l'ordre de 4 points de PIB dans le cas d'une indexation moins favorable.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse , a demandé quels étaient les atouts dont disposait le COR, qui est désormais chargé, selon le rapport annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, de porter un « diagnostic partagé » sur la situation des régimes de retraite, sachant qu'un tel objectif avait déjà été assigné à la commission du commissariat général du plan.

Précisant qu'elle s'exprimait à titre personnel, Mme Yannick Moreau a indiqué que le terme de « diagnostic partagé » ne lui apparaissait pas adéquat, parce qu'il donne l'impression que « tout » le diagnostic est partagé, alors qu'il existera nécessairement des points d'accord et des points de désaccord. Elle a observé que les organisations syndicales pouvaient craindre d'être « instrumentalisées » et avaient certaines réticences devant cette expression. Elle a considéré que les atouts du COR étaient de s'appuyer sur un travail déjà considérable effectué avant sa création et depuis sa création et d'être un organisme permanent, qui peut prendre le temps d'approfondir des questions jusqu'ici peu traitées et de revenir, en fonction de l'évolution de la situation, sur certains débats.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a demandé si le COR étudiait les réformes des retraites engagées dans d'autres pays européens comparables à la France (Suède, Italie, Allemagne).

Mme Yannick Moreau a précisé que le COR avait tenu un séminaire international d'une journée en janvier 2001 et que le secrétariat général suivait avec attention les réformes intéressantes engagées dans les pays cités par le rapporteur. Elle a précisé que le premier rapport comprendrait un chapitre international et qu'une étude plus approfondie serait ultérieurement menée sur la manière dont ces réformes ont été menées, leur sens et leurs résultats.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse , s'est alors intéressé aux travaux du COR relatifs au fonds de réserve. Il a demandé si le COR avait pu opérer, poste par poste, une comparaison entre le plan de financement du Fonds de réserve des retraites détaillé par le Premier ministre le 21 mars 2000, les nouvelles estimations communiquées au COR par la Direction de la sécurité sociale le 2 mai 2001 et les prévisions corrigées postérieures à la réduction drastique des recettes tirées des licences UMTS. Il s'est interrogé sur l'augmentation, entre le 21 mars 2000 et le 2 mai 2001, des recettes tirées des excédents du FSV et de la C3S de 400 à 650 milliards de francs, alors même que ces excédents étaient aujourd'hui affectés à d'autres finalités (financement des trente-cinq heures et de l'allocation personnalisée d'autonomie).

Mme Yannick Moreau a tout d'abord observé que l'idée même d'un fonds de réserve avait été bien accueillie, ce qui n'apparaissait pas au départ « tout à fait évident ». Elle a considéré que le F2R, qui allait prochainement être institué sous la forme d'un établissement public propre, faisait ainsi partie des points sur lesquels il y avait « convergence » de la quasi-totalité des membres. Elle a estimé qu'il n'y avait pas de « plan de financement » en tant que tel, mais deux documents, le premier annexé au discours du Premier ministre du 21 mars 2000 et le second faisant l'objet d'une note de projection remise par la Direction de la sécurité sociale lors de la réunion du COR du 2 mai 2001. Elle a observé que ces deux documents reposaient sur l'hypothèse d'un taux de chômage de 4,5 %.

Elle a indiqué que le COR avait constaté que le montant de 1.000 milliards de francs correspondait à un abondement annuel, d'ici 2020, de trente milliards de francs. Elle a précisé que le COR avait souhaité que des ressources pérennes soient affectées au F2R et qu'en conséquence ses membres n'étaient pas favorables à une trop grande variation de la nature des recettes du fonds, car ces « mouvements de yoyo » ne contribuent pas à sa visibilité, alors même que plus de 80 % des Français se disent inquiets pour leur retraite. Elle a cependant précisé également qu'il ne fallait en aucun cas exclure que des recettes exceptionnelles, comme celles qui peuvent être retirées d'une privatisation, soient affectées au F2R et que l'essentiel était qu'un abondement autour de 30 milliards de francs soit réalisé.

Elle a précisé avoir demandé à la direction de la sécurité sociale les raisons de l'écart entre les excédents du FSV et de la C3S annoncés le 21 mars 2000 et ceux présentés le 2 mai 2001. Elle a indiqué que cette direction lui avait répondu que le document du Premier ministre se fondait sur l'affectation au F2R des deux tiers de la ressource « excédents du FSV/excédents de la C3S », alors que le scénario présenté au COR reposait sur l'hypothèse d'une affectation exclusive de ces excédents au F2R, déduction faite du financement de l'allocation personnalisée d'autonomie. Elle a indiqué qu'en raison de carrières plus longues et en cas de baisse sensible du chômage, le FSV se trouverait dans une situation financière améliorée. Elle a considéré qu'une comparaison « poste par poste » ne faisait pas vraiment partie du rôle du COR, mais plutôt de celui du Parlement, et que le COR se sentait par rapport au fonds de réserve moins dans une approche « notariale » que dans celle d'un avocat rappelant la nécessité d'un abondement régulier. Elle a observé que les recettes du F2R s'établiraient à 40 milliards de francs à la fin de l'année 2001 et à plus de 60 milliards de francs à la fin de l'année 2002, sans tenir compte de la non-compensation des recettes UMTS.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse , a indiqué que le FSV ne serait pas excédentaire avant 2005 et qu'un montant de 650 milliards de francs apparaissait dès lors très difficile à atteindre.

Mme Yannick Moreau a considéré que l'objectif des 1.000 milliards de francs n'était pas assuré, chaque Gouvernement étant libre de ses décisions, mais qu'il était accessible. Elle a observé que la situation économique des prochaines années serait évidemment importante.

M. Nicolas About, président , a observé à cet égard que l'hypothèse d'un taux de chômage de 4,5 % était très optimiste.

M. Jean-Pierre Fourcade a considéré que la structure de l'emploi en France souffrait de deux défauts, l'importance du secteur public par rapport au secteur privé et le faible taux d'activité des plus de cinquante ans. Il a estimé qu'une telle situation s'expliquait en raison de l'effet couperet de la retraite à soixante ans et d'un système ne conférant aucun avantage en matière de retraite pour les personnes souhaitant travailler davantage. Il a demandé quelles étaient les orientations du COR sur cette question.

Il a évoqué ensuite le système de la Préfon, permettant à 315.000 anciens agents du secteur public de bénéficier d'un mécanisme de capitalisation, et s'est interrogé sur son extension éventuelle aux salariés du secteur privé.

Mme Yannick Moreau a observé que la question « âge et travail » était essentielle, ce qui expliquait la tenue en avril 2001 d'un colloque sur cette question, dont les actes viennent de paraître. Elle a estimé que la situation était aujourd'hui « totalement incompréhensible » pour l'opinion, puisqu'il était demandé aux actifs de cotiser le plus longtemps possible tout en poussant dans le même temps les plus de cinquante ans à la retraite. Elle a indiqué que les régimes étaient dans une situation très inégale. Elle a considéré que l'étude de la question des inégalités entre les régimes méritait de nombreux approfondissements et rappelé qu'un groupe de travail avait été constitué par le COR sur cette question. S'agissant des régimes de retraite du secteur public, elle a observé qu'il ne suffisait pas « d'avoir le courage d'appuyer sur le bouton de la décision », que les modalités techniques d'une éventuelle réforme étaient complexes et que la mise en place de quarante années de cotisations pour tous les régimes pouvait poser problème, par exemple compte tenu d'un âge moyen d'entrée dans la fonction publique de 28 ans. Elle a ajouté qu'il serait peut-être alors nécessaire de tenir compte d'une durée de cotisation « tous régimes », ce qui serait -si c'était la solution retenue- une grande innovation dans le droit de la fonction publique. Elle a évoqué la part importante (30 %) des polypensionnés en France.

S'agissant des « décotes », elle a indiqué que les fonctionnaires ne pouvaient pas partir en retraite avant soixante ans, et que si les trente-sept années de cotisations n'étaient pas atteintes à soixante ans, une annualité correspondant à une minoration de 2 % était retenue, alors que cette pénalisation était de 10 % dans le secteur privé.

Elle a précisé qu'il n'existait aucune « surcote », dans les régimes privés comme les régimes publics. Rappelant qu'elle s'exprimait à titre personnel, elle a considéré que l'instauration d'une « surcote » et une harmonisation des règles concernant la décote étaient souhaitables. Elle a ajouté que la « surcote » représenterait nécessairement un surcoût, mais qu'il était nécessaire de ne pas réaliser la réforme « en épicier ». Elle a fait observer que les questions concrètes relatives à la mise en oeuvre d'une réforme dans le secteur public n'avaient pas été discutées.

Elle a constaté que les salariés de cinquante-cinq ans ne se sentaient pas aujourd'hui valorisés, à la différence des « jeunes retraités dynamiques », échappant enfin au spectre du chômage. Elle a considéré que d'importants efforts de gestion des ressources humaines devaient être réalisés à la fois dans le secteur public et dans le secteur privé, afin de procurer aux salariés âgés un intérêt au travail.

Elle a considéré que l'inclusion des primes des fonctionnaires faisait partie de la discussion, mais qu'elle devrait nécessairement être plafonnée, compte tenu du coût.

S'agissant du régime Préfon , Mme Yannick Moreau , après avoir rappelé une nouvelle fois qu'elle s'exprimait à titre personnel, a observé que d'autres catégories professionnelles bénéficiaient de fonds de capitalisation. Elle a reconnu que l'ensemble des mécanismes n'était toutefois pas cohérent. Elle a rappelé que les mécanismes de capitalisation avaient été créés pour les fonctionnaires, en raison du refus d'intégrer les primes dans l'assiette des cotisations retraite. Elle a observé que les salariés du secteur privé bénéficiaient de mécanismes (épargne salariale, participation, intéressement) inexistant dans la fonction publique. Elle a indiqué que l'extension éventuelle du régime de la Préfon aux salariés du secteur privé impliquerait un avantage fiscal, mais par un abondement de l'employeur, qui est égal à zéro dans le cadre de la Préfon.

Elle a indiqué que tout mécanisme reposant sur une exonération de cotisations sociales était contradictoire avec la nécessité de procurer des ressources à la branche vieillesse.

Elle a estimé que la question générale de l'épargne retraite rejoignait le débat portant sur la politique de l'épargne. Elle a indiqué que la question n'avait pas été discutée au sein du COR.

M. Claude Domeizel a souhaité apporter à la commission le témoignage d'un parlementaire membre du COR. Il a estimé que le travail était « sérieux », de « haut niveau » et ne négligeant aucun détail. Il a estimé que la méthode retenue et la sérénité des débats, à laquelle la présidente n'était pas étrangère, garantissaient la qualité des réflexions. Il a observé une évolution du discours des organisations syndicales, les propos entendus « à l'intérieur » n'étant pas les mêmes que ceux tenus « à l'extérieur ». Il a considéré que la permanence était un atout majeur. Regrettant l'absence du MEDEF, il a constaté une « faiblesse » des actions de communication du conseil.

Mme Yannick Moreau a observé que les actions de communication avaient été volontairement très réduites, afin de dégager un « climat de confiance » nécessaire à la rédaction de la troisième partie du rapport. Elle a considéré qu'il serait nécessaire de développer la communication lorsque le premier rapport serait finalisé, dès lors que les membres du COR en exprimeraient le besoin.

* 1 Pour reprendre l'expression imagée de la présidente du conseil d'orientation des retraites, cf. travaux de la commission.

* 2 La paternité de cette expression revient au journal « Espace social européen ».

* 3 Le poids des régimes vieillesse comptant moins de 20.000 cotisants ou retraités titulaires de droits propres est évalué à 2,9 milliards de francs.

* 4 n° 268 (2000-2001).

* 5 Passer de recettes non consolidées à des recettes consolidées nécessite de supprimer les transferts intra-branche (les compensations démographiques), ce qui apparaît logique, mais également le transfert inter-branche que constitue l'AVPF.

* 6 JO Débats Assemblée nationale, 2 ème séance du 23 octobre 2001, p. 6440.

* 7 cf. infra, compte rendu de cette audition.

* 8 cf. tome I.

* 9 Selon l'expression de M. Alain Vasselle, alors rapporteur pour l'assurance vieillesse, in rapport n°382 (2000-2001), p. 154.

* 10 Cette disposition, annulée l'année dernière par le Conseil constitutionnel, n'est toujours pas entrée en vigueur : l'article 11 bis du projet de loi de modernisation sociale en est le support juridique. Elle est toutefois intégrée dans les comptes prévisionnels du FSV.

* 11 Et la Cour rappelle, par l'intermédiaire d'une note de bas de page, que l'année 1941 est celle où le nombre de naissances a été le plus faible, cf. rapport de la Cour des comptes sur la sécurité sociale, p. 57.

* 12 Votre rapporteur, soucieux de ne pas limiter son examen au seul régime général, profitera de ces développements pour aborder plus en détail les comptes des régimes des non salariés non agricoles (ORGANIC, CANCAVA et CNAVPL) ainsi que ceux de la CNRACL.

* 13 Ce régime vient d'approuver la création d'un véritable régime de retraite complémentaire obligatoire. Votre rapporteur se félicite de cette évolution, qu'il faudra « concrétiser » au niveau législatif.

* 14 En effet, « l'histoire bégaye » : la C3S avait déjà été utilisée à cette fin en 1992 et en 1993, ce qui avait amené M. Jean Marmot, alors secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité sociale, à utiliser le terme de « siphonnage ».

* 15 Compte tenu des perspectives financières désastreuses du BAPSA en 2001 (1,3 milliard de francs de déficit), le Gouvernement pourrait être tenté, dès le projet de loi de finances rectificative pour 2001, de « puiser » dans le compte C3S.

* 16 Risques maladie, vieillesse et famille.

* 17 Cet âge reste l'âge de la retraite dans deux régimes, celui des professions libérales et celui des ministres des cultes.

* 18 Le coût pour le FSV serait pourtant minime : 16 millions de francs.

* 19 Ce qui revient au même, la CNRACL étant gérée par la Caisse des dépôts et consignations.

* 20 C'est le cas de la SNCF et de la RATP.

* 21 Les règles actuelles ont cette conséquence : tout retraite, qu'il ait cotisé pendant quelques années ou pendant toute sa carrière, est compté pour un retraité.

* 22 Les conséquences sur le solde des administrations publiques sont nulles : l'augmentation nette des subventions d'équilibre est compensée par l'excédent retrouvé de la CNRACL.

* 23 Caisse de retraites des régies ferroviaires d'outre-mer.

* 24 « Le Premier ministre l'a dit, il annoncera un certain nombre de décisions, en début d'année, après le rapport... (...) Nous agirons sur les retraites avec détermination, sans précipitation, mais sans temporiser non plus, car il faut effectivement prendre des mesures», Martine Aubry, JO Débats Sénat, 16 novembre 1999.

* 25 Votre rapporteur n'aura pas la cruauté de rappeler le mot célèbre de Clemenceau.

* 26 cf. rapport de M. Alain Vasselle sur le PLFSS 2001.

* 27 cf. infra.

* 28 cf. infra compte rendu de cette audition.

* 29 cf. rapport annexé.

* 30 JO Débats Sénat, séance du 15 mai 2001.

* 31 Question écrite n° 34340 de M. René Trégouët du 12 juillet 2001, JO Questions Sénat, page 2292.

* 32 Ministère de réponse: Fonction publique - Publiée dans le JO Questions Sénat du 6 septembre 2001, p. 2899.

* 33 JO Débats Sénat, séance du 1 er juin 2001.

* 34 JO Débats Assemblée nationale, 2 ème séance du 23 octobre 2001, p. 6443.

* 35 JO Débats Assemblée nationale, op. cit.

* 36 Rapport Cour des comptes sur la sécurité sociale, septembre 2001, p. 57.

* 37 Conseil d'orientation des retraites, réunion plénière du 4 septembre 2001, note introductive « Taux de remplacement et indexation des pensions ».

* 38 Cf. Rapport sur le Projet de loi de financement de la sécurité sociale 2002, Tome III, Famille.

* 39 cf. « Le Fonds de réserve des retraites : l'avenir hypothéqué », in « Les fonds sociaux », rapport n°382 (2000-2001) de MM. Charles Descours, Jean-Louis Lorrain et Alain Vasselle.

* 40 Deux autres décrets, ainsi qu'un certain nombre d'arrêtés, devant préciser annuellement les fractions d'impositions ou d'excédents prévisionnels du FSV versés au fonds, sont également prévus.

* 41 Rapport présenté à la CCSS du 7 juin 2001, p. 39.

* 42 C'est à dire le ratio placements/solde cumulé du fonds.

* 43 D'après le rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, avis n° 3319, p. 117.

* 44 D'après les informations communiquées par le FSV à votre rapporteur.

* 45 Réponse au questionnaire de M. Didier Migaud, op. cit.

* 46 cf. réponse au questionnaire de M. Didier Migaud, op. cit.

* 47 Réponse au questionnaire complémentaire de la commission des Affaires sociales du Sénat du 22 octobre 2001.

* 48 Mme Yannick Moreau, présidente du Conseil d'orientation des retraites, a abordé cette question, cf. infra.

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