2. Une organisation des cours d'appel statuant en matière commerciale contrastant fortement avec l'organisation séculaire des tribunaux de commerce

Le mode de fonctionnement des cours d'appel compétentes en matière commerciale contraste avec la variété des règles de fonctionnement prévalant pour les juridictions commerciales du premier degré tant en ce qui concerne leur composition que leur organisation.

Tout d'abord, les magistrats siégeant dans les formations collégiales des cours d'appel compétentes en matière commerciale sont exclusivement des juges professionnels , contrairement à ceux siégeant dans les tribunaux de commerce, dans les chambres commerciales des tribunaux de commerce situés en Alsace-Moselle ou dans les tribunaux mixtes de commerce, composés majoritairement de juges ou d'assesseurs élus 30 ( * ) . Les cours d'appel font donc figure d'exception dans le paysage de l'organisation de la justice commerciale, qui n'est plus rendue par un citoyen élu comme en premier ressort, mais par un magistrat de carrière à l'instar des autres contentieux civils.

Les emplois de conseiller de cour d'appel figurent parmi les emplois de magistrats du premier grade dont l'accès est actuellement régi par le décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 qui exige sept ans d'ancienneté 31 ( * ) (dont cinq ans de services effectifs en position d'activité ou de détachement). En effet, les conseillers de cour d'appel sont des magistrats d'un rang élevé dans la hiérarchie, bénéficiant d'une expérience professionnelle reconnue, et qui, après avoir commencé leur carrière dans une juridiction du premier degré, ont accédé par leur mérite à ces fonctions.

De plus, le traitement des affaires commerciales en appel ne relève pas d'une organisation particulière. En conséquence, il n'existe pas obligatoirement de chambre identifiée et spécialisée dans chaque cour d'appel (voir en annexe : organisation des cours d'appel en matière commerciale).

Le code de l'organisation judiciaire ne consacre pas l'existence d'une formation à compétence commerciale, à la différence d'autres formations. Chaque cour d'appel est en fait divisée en chambres spécialisées comprenant pour la plupart d'entre elles : une chambre civile appelée à connaître des appels exercés contre les décisions des juridictions civiles, une chambre des appels correctionnels et une chambre sociale (dont l'existence est obligatoire en vertu de l'article R. 221-1 du code de l'organisation judiciaire). Dans certaines cours d'appel, il n'existe pas de chambre spécialisée en matière commerciale, la chambre civile étant appelée à statuer en ce domaine (c'est le cas des cours d'appel d'Agen, de Bastia, Besançon, Dijon, Limoges, Metz, Pau, Reims, Riom, Rouen).

L'organisation des cours d'appel relève de la libre décision du chef de cour qui prévoit la répartition des affaires par une ordonnance annuelle de roulement (article L. 710-1 du code de l'organisation judiciaire).

En vertu de l'article R. 213-8 du code de l'organisation judiciaire, le président de la cour d'appel fixe la répartition des magistrats au sein des différentes formations collégiales 32 ( * ) . A cet effet, il détermine le nombre, le jour et la nature des audiences dans la première quinzaine du mois précédant l'année judiciaire. Cette répartition change chaque année.

Cette procédure permet de s'assurer que les magistrats ne sont pas désignés au cas par cas sur un contentieux, mais que la répartition des affaires attribuées à chaque magistrat s'effectue dans le cadre de l'organisation interne de la juridiction à laquelle ils appartiennent. Seuls des ajustements justifiés par l'urgence ou la modification de l'effectif des magistrats de la juridiction peuvent conduire le président de la cour d'appel à modifier cette ordonnance.

Dès lors qu'il n'existe pas systématiquement de chambre commerciale au sein de chaque cour d'appel, il apparaît en tout état de cause que les conseillers de cour d'appel exerçant à titre temporaire seraient conduits à exercer des fonctions juridictionnelles strictement limitées.

* 30 Rappelons que les tribunaux de commerce sont aujourd'hui exclusivement composés de juges consulaires élus, que les chambres commerciales des tribunaux de grande instance situés en Alsace-Moselle sont composées d'un magistrat professionnel, président, et d'assesseurs élus, et enfin que les tribunaux mixtes de commerce sont présidés par un magistrat professionnel -le président du tribunal de grande instance ou de première instance- et composés de deux juges élus selon des modalités identiques à celles prévalant pour l'élection des juges consulaires en métropole. Le projet de loi portant réforme des tribunaux de commerce tend à faire présider certaines formations de jugement par un magistrat professionnel.

* 31 Précisons que ces règles d'accès ont été modifiées récemment (décret n°2001-1380 du 31 décembre 2001) et s'inscrivent dans le cadre de la réforme du déroulement de carrière des magistrats issue de la loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats tendant à remédier au blocage actuel de l'avancement des magistrats.

* 32 Soulignons qu'un magistrat peut être affecté à plusieurs chambres (article R. 213-8 du code de l'organisation judiciaire).

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