ANNEXE

ÉTUDE D'IMPACT

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Projet de loi portant amnistie

Etude d'impact

I. IMPACT JURIDIQUE ET ADMINISTRATIF

1. Présentation et plan de la loi

Sur la forme, la présentation de la loi est, par rapport à la loi d'amnistie du 3 août 1995, simplifiée et rendue plus cohérente, afin qu'elle soit véritablement accessible aux justiciables : toutes les précédentes lois d'amnistie sont en effet critiquées pour leur extraordinaire technicité.

Le plan général est légèrement modifié, le chapitre sur les exclusions de l'amnistie venant, logiquement, avant celui sur les effets de l'amnistie (les précisions contenues dans ce dernier chapitre étant en effet pour partie la conséquence du domaine de l'amnistie qui a été retenu, et donc des exclusions).

Le chapitre Ier sur l'amnistie de droit est introduit par un article 1 er qui, d'une part, fixe la date d'effet de l'amnistie (ce qui évite de la répéter dans quasiment chacun des articles qui suivent), annonce la distinction entre l'amnistie par nature et l'amnistie au quantum, et rappelle l'existence d'exclusions à l'amnistie en renvoyant à l'article fixant la liste de ces exclusions, ce qui permet une lecture plus aisée. Cet article précise également que l'amnistie bénéficie aux personnes physiques et aux personnes morales.

Les dispositions figurant habituellement dans la section sur l'amnistie par nature ont été regroupées en deux articles, le premier (art. 2) fixant la liste des infractions amnistiées en raison de leur nature même, le second (art. 3) fixe la liste des infractions amnistiées en raison des circonstances de leur commission. Ce second article est logiquement complété par un alinéa indiquant que ces circonstances doivent être constatées par le parquet et par un alinéa relatif à l'amnistie en cas de condamnation unique pour des infractions multiples, dispositions traditionnelles qui ne concernent que les hypothèses de l'amnistie par nature dont elles précisent les conditions d'application, mais qui se trouvaient pourtant, dans les lois d'amnisties précédentes, dans un autre chapitre.

Les dispositions figurant dans la section sur l'amnistie en raison du quantum ou de la nature de la peine prononcée sont présentées de façon plus concise et plus logique, en distinguant les peines d'amende ou de jour-amende (art. 4), les autres peines et les dispenses de peines (art. 5 et 6).

Les chapitres II et III sur l'amnistie par mesure individuelle et l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles conservent leur structure traditionnelle.

Le chapitre IV sur les exclusions de l'amnistie - qui était auparavant le dernier chapitre de la loi - comporte un unique article (art. 13) fixant la liste des exclusions. D'une manière générale, la dénomination simplifiée des infractions faisant l'objet d'une exclusion est toujours mentionnée (alors que dans de nombreux cas la loi de 1995 se bornait à renvoyer aux articles de répression). Les visas des articles ont parfois été complétés pour tenir compte de la codification ou de la recodification du code de l'environnement et du code de la santé publique.

Enfin, la présentation de certaines infractions de la liste a été modifiée mais décrit le même champ d'infractions que la liste de la loi d'amnistie de 1995. Ainsi, la terminologie employée pour mentionner les délits énoncés à l'article 13-14° a été précisée pour mieux correspondre aux intitulés du code du travail. Les délits en matière de patrimoine visés par l'article 13-20° ne comportent plus les délits prévus par les articles 21 et 22 de la loi du 2 mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque qui ont été codifiés aux articles L. 341-1 à L. 341-22 du code de l'environnement et sont à ce titre désormais visés par l'article 13-21° qui exclut de l'amnistie tous les délits du code de l'environnement.

Les dispositions du chapitre V sur les effets de l'amnistie - ex chapitre IV - sont présentées de façon plus concise et plus cohérente. Les dispositions « pérennes » propres à toutes les lois d'amnistie et figurant désormais dans les articles 133-9 à 133-11 du code pénal ne sont pas reproduites, comme le faisait inutilement la loi de 1995, mais il y est simplement renvoyé (art. 14). Il est de même renvoyé aux articles 6 et 769 du code de procédure pénale prévoyant l'extinction de l'action publique du fait de l'amnistie et la suppression du casier judiciaire des condamnations amnistiées, dispositions évidemment essentielles, que, pourtant, ne reprenait ni ne citait la loi de 1995.

2. Champ d'application et effets de la loi

Sur le fond, le projet reprend les dispositions de la loi de 1995, sous les principales réserves suivantes :

Si l'amnistie au quantum en matière de peine d'emprisonnement - ferme ou avec SME (art. 5) est identique à celle de 1995 (seuil de 3 mois), le seuil est de 6 mois pour les peines avec sursis simple, au lieu de 9 mois.

Pour les peines d'amende ou de jour amende, le seuil de 5.000 F à partir duquel l'amnistie est subordonnée au paiement de l'amende devient 750 euros, ce qui correspond à la conversion intervenue en janvier 2002.

L'amnistie de la peine de travail d'intérêt général étant, comme en 1995, subordonnée à l'exécution du travail, cette condition est également prévue, par cohérence, pour toutes les peines de sursis-TIG de moins de 6 mois, et pas uniquement pour celles de plus de 3 mois, comme c'était le cas en 1995.

Les tableaux joints en annexe I et II permettent de comparer, dans les quatre lois d'amnistie les plus récentes, les dispositions prévues en ce qui concerne d'une part les seuils choisis pour l'amnistie au quantum et d'autre part, la nature des infractions et les circonstances de leur commission que ces lois retiennent pour l'amnistie par nature d'infraction.

La liste des exclusions (art. 13) reprend celle de la loi d'amnistie du 3 août 1995 avec de nombreux ajouts qui sont énumérés dans l'annexe III. Un tableau joint en annexe IV récapitule l'évolution de la liste des exclusions dans les quatre dernières lois d'amnistie.

S'agissant du chapitre relatif aux effets de l'amnistie (chapitre V), contrairement à la loi du 3 août 1995, il n'est pas nécessaire de prévoir que l'amnistie est sans effet sur la réduction de points affectant le permis de conduire, puisque toutes les infractions du code de la route susceptible d'entraîner un retrait de points sont exclus de l'amnistie (art. 16).

Il est enfin précisé (art. 17) que l'amnistie n'oblige pas à supprimer les mentions figurant dans les fichiers de police judiciaire, dans la mesure où ces mentions ne portent que sur des faits constatés, et non sur des condamnations, et où l'amnistie efface les condamnations et non les faits eux-mêmes.

3. Impact juridique du projet de loi

L'impact de l'amnistie sur les condamnations prononcées peut être estimé à partir de l'examen de l'impact qu'aurait la loi sur les condamnations prononcées en 2000 inscrites au casier judiciaire.

504.900 des 575.837 peines prononcées en matière délictuelle et de contraventions de cinquième classe (les contraventions des quatre premières classes ne faisant pas l'objet d'une inscription systématique au casier judiciaire, ne peuvent être prises en compte), soit 88 %, entrent dans le champ de la loi d'amnistie au titre du quantum de peine fixé par le projet de loi avant prise en compte des exclusions.

Le total des exclusions prévu par l'article 13 représente 287.000 des peines entrant initialement dans le champ de l'amnistie.

Ce sont donc 217.900 peines qui bénéficieraient de l'amnistie, soit près de 38 % des personnes condamnées en 2000 qui pourront bénéficier de la prochaine loi d'amnistie.

Cette estimation n'est qu'une indication sur les conséquences de la loi. En effet, il est pratiquement impossible de mesurer avec certitude et précision tous les effets de la loi d'amnistie et cela pour plusieurs raisons :

- les condamnations amnistiées en raison des circonstances de la commission des faits ne peuvent être comptabilisées à partir du casier judiciaire puisque ces circonstances relèvent d'appréciation de faits et non de catégories juridiques.

- l'amnistie s'applique aux faits commis antérieurement au 17 mai 2002. Or de nombreuses procédures, mais qu'il est impossible de quantifier, portant sur des faits amnistiés en raison de la nature de l'infraction, des circonstances de sa commission ou des peines encourus sont en cours au moment de l'entrée en vigueur de la loi. Si la juridiction de jugement n'a pas été saisie, ces procédures font l'objet, selon les cas, d'un classement sans suite par le parquet ou d'un non-lieu par le juge d'instruction sans, de ce fait, faire l'objet d'une inscription et d'une comptabilisation au casier judiciaire.

- s'agissant des amnisties au quantum, il est impossible de faire la distinction, essentielle du point de vue de l'action publique, entre les condamnations qui sont amnistiées avant d'avoir commencé à être exécutées et celles qui le sont après qu'une partie ou la totalité de la peine ait reçu exécution (hormis les peines pour lesquelles l'amnistie est subordonnée à l'exécution de la condamnation, comme les peines d'amendes supérieures à 750 euros ou les peines de travail d'intérêt général). En effet, les délais d'exécution de la peine sont variables selon les tribunaux de sorte qu'à la date d'entrée en vigueur de la loi, la proportion des condamnations amnistiées déjà exécutées par rapport aux condamnations en attente d'exécution est également variable.

II. IMPACT SOCIAL, ÉCONOMIQUE ET BUDGÉTAIRE

1. Impact social et économique

La loi d'amnistie efface, par application de l'amnistie en raison des circonstances de la commission des infractions prévue par l'article 3 du projet de loi, les sanctions judiciaires ou disciplinaires résultant de la plupart des conflits économiques et sociaux. Elle contribue pour cette raison à l'apaisement des relations sociales.

Par ailleurs, l'amnistie a pour effet, en mettant fin ou en empêchant la mise à exécution des peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois, de diminuer le nombre de personnes incarcérées ou susceptibles de l'être, ce qui a une incidence sur les taux d'occupation des maisons d'arrêt dans lesquels s'exécutent les courtes peines.

De la même façon l'amnistie sans condition d'exécution des peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois assortis d'un sursis mise à l'épreuve, allège temporairement, la charge de travail des services pénitentiaires d'insertion et de probation.

2. Impact budgétaire

La loi d'amnistie a un effet budgétaire positif mais non précisément quantifiable en ce qu'elle allège pour partie les coûts de prise en charge de personnes détenues ou suivies par les SPIP.

La loi d'amnistie a un effet négatif du point de vue des finances publiques puisque le produit du recouvrement des amendes est diminué des amendes amnistiées.

Cet effet peut être estimé à la lumière des effets enregistrés lors de l'application de la loi d'amnistie du 3 août 1995.

Ainsi, le produit du recouvrement des amendes, constaté dans l'exécution du budget de l'Etat, est passé de 475 millions d'euros pour l'année 1994 à 267 millions d'euros pour l'année 1995 et à 416 millions d'euros pour l'année 1996. En effet, l'effacement des condamnations a une peine d'amende a un impact non seulement sur le recouvrement des amendes l'année de l'entrée en vigueur de la loi d'amnistie, mais également l'année suivante en raison de la diminution du stock des amendes en attente de recouvrement.

Au total la diminution de recettes de l'Etat consécutive à l'amnistie des peines d'amende prévue par la loi du 3 août 1995 peut donc être estimée à 267 millions d'euros (208 millions en 1995 et 59 millions en 1996).

Les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie estiment que l'effet budgétaire du projet de loi d'amnistie devrait être de l'ordre de 300 millions d'euros. En effet, le nombre des condamnations à des peines d'amendes transmises au service du trésor pour être mises en recouvrement sont en augmentation régulière depuis plusieurs années. Aussi, malgré l'augmentation du nombre des infractions exclues de l'amnistie, cette dernière portera sur un plus grand nombre de condamnations.

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