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Rapport n° 278 (2002-2003) de M. Yann GAILLARD , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 mai 2003

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N° 278

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 mai 2003

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , relatif au mécénat , aux associations et aux fondations,

Par M. Yann GAILLARD,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Roger Karoutchi, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, René Trégouët.

Voir les numéros:

Assemblée nationale (12 e législ.) : 678 , 690 et T.A. 109

Sénat : 234 (2002-2003)

Impôts et taxes.

INTRODUCTION

L'État n'a pas le monopole de l'intérêt général. Le présent projet de loi tire les conséquences de ce principe en aménageant le cadre juridique et plus spécialement fiscal du mécénat et de la vie associative au sens le plus large, afin d'inciter les Français à manifester leur esprit de solidarité et leur volonté de participer à la vie collective.

En soutenant le mécénat sous toutes ses formes, le gouvernement s'efforce de donner une impulsion décisive, qui devrait permettre à la France de rattraper et même de dépasser les autres grands pays développés en matière de solidarité privée.

L'essor du mécénat en France date du début des années soixante lorsque, sous l'impulsion d'André Malraux, ont été mis en place des mécanismes fiscaux incitatifs et créée la Fondation de France. En dépit du nouvel élan donné à la fin des années 1980 par la loi du 23 juillet 1987 sur le mécénat et par celle du 4 juillet 1990 sur les fondations d'entreprises, la dynamique du mécénat a marqué le pas, au point que l'on peut parler d'un véritable retard français en matière de mécénat , surtout par comparaison avec les pays anglo-saxons.

Au regard des 12.000 fondations américaines et des 3.000 « Charity trusts » britanniques, mais aussi des 2.000 fondations allemandes, on ne compte en France que 476 fondations d'utilité publique, 70 fondations d'entreprise. C'est peu, même s'il faut y ajouter les quelques 500 fondations sous l'égide de la Fondation de France.

Cette disproportion de nombres se traduit par un déséquilibre en terme de poids économique et social. Tandis qu'aux États-Unis, le mécénat atteint 2,1 % du produit intérieur brut, il n'en représente que 0,09 % en France.

S'agissant d'activités d'intérêt général, il est légitime de leur accorder un statut fiscal privilégié reconnaissant leur utilité sociale éminente. Telle est la raison pour laquelle le contenu du présent projet de loi consiste essentiellement en des mesures d'incitation fiscale, ce qui justifie qu'il ait été renvoyé au fond à la commission des finances.

Ce texte d'une portée très générale, bien qu'il soit présenté au Parlement par M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication, constitue un grand progrès, qui devrait mettre la France au niveau de ses principaux partenaires.

La révolution que ce texte a pour ambition de déclencher, dans une conjoncture dont on répétera souvent tout au long de ce rapport qu'elle est peu propice à de grandes largesses fiscales, soulève cependant une série de questions techniques et surtout de principe.

La principale concerne le juste équilibre à trouver entre le légitime souci du suivi de l'argent public et la nécessité de respecter la liberté d'association ou celle de fonder, que le présent projet de loi a précisément pour objet de conforter ou de stimuler.

Mais une autre, moins importante, certes, est la question de la banalisation relative du statut fiscal des organismes reconnus d'utilité publique ainsi que des organismes d'aide aux personnes en difficulté . En dépit de son titre, qui mentionne explicitement les fondations et, désormais, à l'initiative de l'Assemblée nationale, les associations, on ne voit rien dans ce texte qui vienne inverser une évolution qui a commencé, il y a quelques années déjà, lorsque ces organismes ont perdu le plafond spécifique en terme de pourcentage de revenu imposable, dont ils bénéficiaient pour la déductibilité des dons.

Certes, on peut se rallier à l'option du gouvernement qui a consisté à faire l'économie d'une grande loi sur les fondations pour, respectant la nature traditionnellement prétorienne du droit français en la matière, s'en remettre à la sagesse du Conseil d'État pour mettre au point les statuts-types modernisés. Il n'en reste pas moins que l'on peut légitimement se demander si le régime des fondations est suffisamment attractif par rapport à celui des autres organismes d'intérêt général.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UN NOUVEL ÉLAN POUR LE MÉCÉNAT ET LA GÉNÉROSITÉ PUBLIQUE

Le présent projet de loi déposé par le gouvernement le 5 mars 2003 sur le bureau de l'Assemblée nationale, prolonge les dispositifs existants en matière de mécénat des entreprises comme des particuliers.

Il s'agit d'un texte d'une portée très générale qui amplifie et simplifie les mécanismes actuellement prévus par le code général des impôts.

Lors de la première lecture, le 1 er avril dernier, l'Assemblée nationale a apporté des précisions et des compléments utiles, ne serait-ce que parce que, malgré leur forme imparfaite par suite de changements rédactionnels de dernière minute, ils soulèvent de vraies questions de fond.

1. Un texte de portée générale

En dépit de son intitulé qui mentionne les notions de mécénat, de fondation et d'association, le texte couvre un champ très vaste dépassant largement celui de la culture et recouvrant toutes les activités à caractère philanthropique.

Si l'appellation ne présentait pas un caractère quelque peu désuet, le texte aurait pu s'intituler « Projet de loi tendant à encourager le mécénat et la générosité publique ».

La meilleure façon de souligner le caractère très général de ce texte, est de faire état de l'énumération du code général des impôts qui, par sa diversité, au-delà même de son caractère largement redondant, témoigne de la variété des domaines dans lesquels peut se manifester la générosité publique.

On peut rappeler qu'en l'état actuel de la rédaction très générale de l'article 200 du code général des impôts , peuvent bénéficier de dons ouvrant droit à un avantage fiscal des « oeuvres ou organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ». Comme si cette énumération n'était pas exhaustive, le législateur précise que sont également visés, les organismes d'intérêt général « concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ». C'est dire que la générosité ouvrant droit à un avantage fiscal, peut s'exercer dans presque tous les domaines, dès lors qu'il s'agit d'une activité « d'intérêt général ».

S'il n'est pas exigé explicitement que le don concerne des bénéficiaires français ou présents sur le territoire national, dans les faits, l' organisme bénéficiaire doit exercer son activité sur le territoire national . Ce principe a été toutefois adapté, s'agissant des associations françaises qui ont pour objet de recueillir des dons et d'organiser, à partir de la France, un programme humanitaire d'aide en faveur des populations en détresse dans le monde. En outre, certains organismes concourant à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances françaises, sont éligibles à l'avantage fiscal, dès lors qu'ils exercent pour partie leur activité culturelle en France. La réduction d'impôt est toutefois refusée lorsque les dons sont faits directement à des organismes, comme les lycées français, exerçant leur activité uniquement à l'étranger.

Mais il ne faut pas oublier que, pour donner droit à l'avantage fiscal, le don doit être fait dans un but philanthropique comme défini ci-dessus, certes, mais à une double condition : que le bénéficiaire en soit un organisme d'intérêt général , c'est-à-dire ne bénéficiant pas à un cercle restreint de personnes , et que le don ne s'accompagne d'aucun avantage personnel pour le donateur .

Le mécénat est ainsi défini comme « le soutien matériel apporté sans contrepartie directe de la part du bénéficiaire à une personne pour l'exercice d'activités présentant un intérêt général ». A cet égard, il se distingue du parrainage qui comporte, précisément, une contre-partie en facilités diverses et en terme d'image pour l'entreprise.

2. Des mécanismes simples

L'autre axe important du présent projet de loi est la simplification et l'unification des régimes fiscaux, qu'il s'agisse de celui applicable aux particuliers ou aux entreprises.

Non seulement la définition des organismes d'intérêt général susceptibles de recevoir des dons ouvrant droit à l'avantage fiscal, est quasiment identique entre les articles 200 et 238 bis du code général des impôts, relatifs respectivement aux particuliers et aux entreprises, mais encore le taux de la réduction est désormais le même dans les deux cas, pour être porté à 60 % de montant du don.

Jusqu'à présent, les organismes sans but lucratif procédant à la fourniture gratuite de repas ou favorisant le logement de personnes en difficulté étaient les seuls à bénéficier de la réduction d'impôt maximale de 60 %. Cette uniformisation est un gage de lisibilité, mais elle a l'inconvénient de mettre sur le même plan tous les organismes d'intérêt général , alors même que certaines d'entre elles pourraient apparaître comme poursuivant des objets prioritaires du point de vue de la solidarité sociale.

En outre, on aurait tort de méconnaître la novation introduite par le présent projet de loi s'agissant des entreprises, pour lesquelles on passe d'un régime de déduction des résultats à un régime de réduction d'impôts . Sous réserve des limites liées au respect de l'objet social de l'entreprise, un tel système aboutit au quasi-doublement de l'avantage fiscal.

A ce progrès important en terme d'avantage fiscal, s'ajoute un élargissement des possibilités de déduction par rapport aux capacités économiques des agents, revenus imposables pour les particuliers, personnes physiques, chiffre d'affaires pour les entreprises.

La limite que peut représenter le don par rapport au revenu imposable, passe ainsi de 10 % à 20 % pour les particuliers . Plus audacieux encore, est la possibilité ouverte par le texte, de report en cas de dépassement sur une période de cinq ans : ainsi un contribuable assujetti à l'impôt sur le revenu, pourra déduire jusqu'à 100 % de son revenu imposable sur cinq ans.

Pour les entreprises, le plafond est porté à 5 %o du chiffre d'affaires contre un double taux de 2,25 %o ou 3,25 %o dans le régime actuel. Comme pour les particuliers, en cas de dépassement, l'excédent peut être reporté sur les quatre années suivantes.

3. Des mesures ponctuelles en faveur des fondations

Bien que l'essentiel de la politique de promotion des fondations entreprise par le gouvernement, soit d'ordre réglementaire, le présent projet de loi comporte deux mesures ponctuelles favorables à ces organismes.

Le gouvernement n'a pas souhaité donner un caractère législatif aux diverses mesures qu'il envisage pour stimuler la création des fondations.

C'est au niveau des statuts-types qu'il va s'efforcer d'assouplir les modalités de constitution des dotations , qui pourront notamment être à capital consomptible ou résulter de versements périodiques dans le cadre de fondations de flux , et d'aménager les organes dirigeants en prévoyant la possibilité d'exécutifs bicéphales à directoire et conseil de surveillance .

C'est également au niveau réglementaire qu'il va s'efforcer d'encourager la création de fondations en mettant en place un système d'approbation tacite au bout de deux mois de façon à éviter à ce que la consultation des différents ministères concernés n'aboutisse à retarder indéfiniment le décret en Conseil d'État de création .

Le présent projet de loi se contente de mesures très ponctuelles. Il s'agit, d'une part, de l'augmentation de l'abattement spécifique, dont bénéficient les fondations reconnues d'utilité publique, qui passe de 15.000 à 30.000 euros ; et d'autre part, de la mise en place d'un mécanisme spécifique à l'article 4 permettant à une fondation reconnue d'utilité publique de recevoir des héritiers une somme en numéraire en franchise de droits de succession.

4. Les apports de l'Assemblée nationale

En première lecture, l'Assemblée nationale a, sur le rapport de notre collègue député Laurent Hénart, rapporteur de la commission des finances, adopté une série d'amendements.

En premier lieu, si l'Assemblée nationale a préservé la spécificité des fondations en élevant, à l'initiative de notre collègue député Michel Herbillon, au niveau de 40.000 euros l'abattement en matière d'impôt sur les sociétés dont ces dernières bénéficient, elle a étendu aux associations reconnues d'utilité publique une mesure initialement réservée aux fondations : tel est le cas de l'exonération de droits de mutation pour les sommes reçues par un héritier ou un donataire.

En second lieu, l'Assemblée nationale s'est efforcée, à l'initiative de notre collègue député Charles de Courson, de préciser dans la loi une pratique de « rescrit » par laquelle l'administration répondait à une association pour lui préciser si elle était un organisme d'intérêt général habilité à délivrer des reçus fiscaux ouvrant droit pour les donateurs à un avantage fiscal au titre de l'impôt sur le revenu.

En troisième lieu, nos collègues députés ont adopté des mesures de clarification du régime juridique et fiscal des fondations et associations : exonération explicite de droits de mutation sur les dons manuels, suppression de l'article 11 de la loi du premier juillet 1901 interdisant aux associations de recevoir des dons sous réserve d'usufruit .

En quatrième lieu, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative du rapporteur et de notre collègue député Charles de Courson un ensemble de dispositions, qui, bien que situées à des niveaux différents du texte, tendent à renforcer , au-delà d'un certain seuil de dons, les obligations de certaines associations en matière de publicité et de certification des comptes et les soumettant au contrôle de la Cour des comptes.

Enfin, l'Assemblée nationale a adopté sur proposition du gouvernement l' extension du dispositif d'incitation fiscale , entré récemment en application dans le cadre de la loi relative aux musées de France, aux Trésors nationaux présents sur les marchés internationaux afin de favoriser leur retour ou leur entrée en France.

II. UNE SÉRIE DE QUESTIONS TECHNIQUES OU DE PRINCIPE EN SUSPENS

Le présent projet de loi tel qu'il a été déposé par le gouvernement, ne crée pas de mécanismes nouveaux. Il se contente d'augmenter substantiellement les avantages actuellement prévus par le code général des impôts en cas de dons aux organismes d'intérêt général.

Toutefois, les progrès sont suffisamment importants pour que l'on puisse se demander si les mécanismes ne changent pas de dimension et presque de nature.

Non seulement, le coût du projet reste difficile à déterminer, mais le saut qualitatif auquel on procède avec ce texte, révèle des difficultés techniques ou soulève des questions de principe qu'on n'avait pas lieu de se poser dans le régime actuel.

A côté de points techniques tels ceux des dons en nature ou de l'articulation des avantages fiscaux redimensionnés par le présent projet de loi, avec ceux dont sont assortis d'autres types de libéralités en vertu d'autres articles du code général des impôts, se pose une série de questions essentielles concernant les modalités de contrôle et de suivi de l'emploi des dons et celles de la non-prise en compte de la spécificité des fondations et associations à caractère humanitaire.

1. Un coût difficile à déterminer

Le ministère des finances a fait savoir à votre rapporteur que la dépense fiscale supplémentaire résultant de la nouvelle rédaction de l'article 200 du code général des impôts figurant au sein de l'article premier du présent projet de loi, pourrait s'élever à 73 millions d'euros.

Ce montant correspond à :

- 65 millions d'euros, au titre du passage du taux de la réduction d'impôts de 50 % à 60 % (sauf pour les organismes d'aide aux personnes en difficulté) ;

- 8 millions d'euros, pour le passage de 10 % à 20 % du plafond des dons déductibles en pourcentage du revenu imposable.

Ces chiffres sont à comparer à l'augmentation de la dépense fiscale qui figure dans le tome II du fascicule « Évaluation des voies et moyens », soit 390 millions d'euros. A cet égard, l'on remarque que l'augmentation prévue représente pour la seule conséquence de l'augmentation du taux de la réduction, 16 % de la dépense, chiffre cohérent avec le fait qu'une partie des dons, celle allant vers les organismes d'aide aux personnes en difficulté, profite déjà du taux maximal de réduction d'impôt de 60 %.

L'estimation, au niveau de seulement 8 millions d'euros de l'augmentation de la dépense fiscale consécutive au doublement du plafond des dons déductibles en pourcentage du revenu imposable, tient compte du petit nombre de contribuables atteignant le plafond actuel. Elle pourrait se révéler faible dans le cas où le nouveau régime susciterait un changement de comportement des Français.

La dépense fiscale résultant du mécénat des entreprises n'est pas chiffrée dans les « Voies et moyens ». L'administration fiscale ne dispose pas, en effet, des éléments permettant de calculer ce que les entreprises déduisent de leur résultat imposable. L'estimation officieuse du coût des mesures prévues à l'article 3 du présent projet de loi, qui est de l'ordre de 75 millions d'euros, doit donc être prise avec une certaine prudence.

Au total, la dépense fiscale devrait se monter à 150 millions d'euros . Cet effort est d'autant plus appréciable qu'il intervient alors même que les finances publiques traversent une passe difficile.

2. Des modalités de contrôle et de suivi de l'emploi des fonds à préciser

Les articles 1 er ter et 7 (nouveau) introduits par l'Assemblée nationale, ont trait au contrôle des associations et autres organismes d'intérêt général, qui vont être habilités à délivrer des certificats ouvrant droit à l'avantage fiscal.

La question du suivi des dons par les donateurs, comme celle du contrôle par l'État d'organismes ainsi autorisés à délivrer aux contribuables des certificats donnant droit à des réductions d'impôts, est légitime.

On peut, en effet, estimer que le contrôle de l'argent public se justifie aussi bien lorsque cet argent résulte d'une subvention, que lorsqu'il procède de la délivrance d'un reçu fiscal .

Il faut rappeler qu'en application de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, les associations ayant reçu annuellement de l'État , de ses établissements publics ou des collectivités locales une subvention de plus de 150.000 euros sont tenues à certaines obligations : tenue d'une comptabilité, présence d'un commissaire aux comptes :

- d'une part, les organismes d'intérêt général doivent produire chaque année un bilan, un compte de résultat et une annexe ; ils doivent également appliquer le plan comptable général prévu pour les associations ;

- d'autre part, ces organismes doivent nommer un commissaire aux comptes 1 ( * ) et un suppléant. Celui-ci peut attirer l'attention des dirigeants sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'activité de l'organisme...

Par ailleurs, il faut rappeler qu'en vertu d'une série de textes parfois anciens, les associations et organismes bénéficiant d'une subvention de l'État ou de ses établissements publics ou des organismes soumis à son contrôle, sont tenus de justifier de leurs dépenses en application de l'article 14 du décret-loi du 2 mai 1938 et sont soumis au contrôle de diverses inspections administratives 2 ( * ) .

Les administrés peuvent avoir accès aux comptes des organismes recevant une subvention d'un montant supérieur à 153.000 euros . Ceux-ci sont en effet tenus de déposer, en application de l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 mai 2000 à la préfecture du département où se trouve leur siège social, un certain nombre de documents : budget, comptes annuels...

Enfin, les Chambres régionales des comptes peuvent exercer un contrôle sur les organismes auxquels les collectivités publiques ont accordé une subvention supérieure à 15.000 euros. La Cour des comptes, de son côté, est compétente en application de la loi n° 91-772 du 7 août 1991 pour contrôler les associations faisant appel à la générosité du public, conjointement avec l'Inspection générale des affaires sociales. Ce contrôle, qui porte sur le compte d'emploi des ressources et leur affectation aux dons par type de dépenses, comporte la possibilité d'un accès « sur place ».

Les associations faisant appel à la générosité du public doivent établir un compte d'emploi annuel des ressources collectives auprès du public précisant l'affectation des dons par type de dépense.

Ce bref rappel est l'occasion de montrer que le contrôle existant actuellement est très étendu. Il n'est manifestement pas dans l'esprit de ce texte, qui, pour reprendre l'expression de notre collègue député Laurent Hénart, rapporteur, s'analyse comme marquant le passage d'une « culture de suspicion à l'égard des fondations et du monde associatif » à une « culture de confiance », de prévoir des contrôles aussi tatillons.

Pour votre rapporteur, il convient de se situer par rapport à deux philosophies du contrôle de la dépense, que l'on peut qualifier, respectivement, de régalienne ou de libérale : dans la première, la plus classique, il convient que la puissance publique organise a priori le contrôle et soumette les organismes amenés à recevoir de l'argent public à des corps de contrôle ou à des juridictions spécialisées ; dans l'autre, d'inspiration plus libérale, on cherche à s'appuyer sur l'initiative individuelle de tous ceux qui, ayant donné ou cotisé sont soucieux du bon emploi de leur argent.

Toute la question est de savoir :

- si l'État, qui par suite de l'adoption du présent projet de loi va se trouver le principal contributeur de nombre d'associations, estime que c'est à la puissance publique de se donner les moyens matériels et juridiques de suivre ce qui constitue, pour partie, de l'argent public et qu'elle doit, au-dessus d'un certain seuil au moins, en charger ses propres instances de contrôle ;

- ou s'il peut s'en remettre au libre-jeu des intérêts particuliers dans le cadre d'un processus qui ne serait pas sans rappeler les assemblées générales d'actionnaires ou de copropriétaires : il suffirait alors d'édicter de simples droits d'accès aux comptes voire aux pièces justificatives, elles-mêmes, en spéculant que, sur le nombre, il se trouvera toujours quelqu'individu attentif pour faire rendre des comptes à la direction de l'organisme.

En l'occurrence, il convient de se déterminer par rapport aux différentes obligations de transparence et possibilités de contrôle envisageables . Du moins au plus contraignant, on aurait ainsi le choix entre : la simple communication sur demande des comptes de l'association à toute personne ayant un intérêt pour le demander et, notamment, à un donateur ; la publication des comptes ou leur mise à disposition dans une administration ou sur Internet ; la certification des comptes dans des conditions à déterminer ; le contrôle enfin au-dessus d'un certain seuil des inspections sectorielles compétentes et de la Cour des comptes.

3. Le problème des dons en nature et de l'articulation du texte avec certaines dispositions fiscales

Le présent projet de loi ne tend en aucune façon à introduire de nouveaux mécanismes fiscaux dans le code général des impôts. On pourrait s'attendre à ne pas avoir à s'interroger sur des questions techniques.

Pourtant, précisément parce qu'il donne une nouvelle dimension à des avantages existants, ce texte ouvre des horizons tels qu'il conduit à se pencher sur des « frottements » actuellement imperceptibles. Votre rapporteur en évoquera deux : les dons en nature et l'articulation de l'article 200 du code précité relatif aux dons des particuliers avec les autres dispositions avantageuses favorisant déjà les donations aux organismes d'intérêt général ou à l'État.

On peut rappeler, en premier lieu, que les dons ouvrant droit aux avantages fiscaux tant pour les entreprises que pour les particuliers, peuvent aussi bien revêtir la forme de versements en espèces que de dons en nature. Dans ce cas, ils sont évalués à la valeur vénale du bien déterminée sous la responsabilité du donateur et soumise au contrôle de l'Administration. Comme le précise l'article 200 précité, les sommes peuvent correspondre à « l'abandon express de revenus ou de produits ». C'est ainsi que la non-perception de loyers, l'abandon de droits d'auteurs ou de produits de placement peuvent donner lieu à réduction d'impôts. Il en est de même des frais, notamment de transport, auxquels les bénévoles ont renoncé à demander le remboursement.

Il faut noter au passage que, nonobstant la lettre de l'article 238 bis du code général des impôts, qui emploie le terme de « versements », les dons en nature effectués par les entreprises sont acceptés et évalués à leur valeur en stock, à leur prix de revient, ou à leur valeur vénale.

L'élan nouveau donné par ce texte aux dons sous toutes leurs formes pourrait ainsi attirer l'attention sur certaines imperfections de la législation actuelle.

On peut notamment se demander, dès lors que sera supprimée l'interdiction pour les associations reconnues d'utilité publique de recevoir des dons sous réserve d'usufruit, à quelle valeur il faudra évaluer ces dons 3 ( * ) .

On peut également se demander si les dons auxquels a procédé une personne décédée, ouvrent droit à une réduction d'impôt pour l'impôt sur le revenu dû par cette dernière au titre de la période allant jusqu'à la date de son décès et payé par ses héritiers.

Dans la même perspective, on pourrait se demander si un don à l'État effectué en application de l'article 1131 du code général des impôts, exonéré de droits de mutation, donne droit à son auteur au bénéfice de l'article 200 du même code. On peut estimer, soit qu'il faut appliquer le principe non bis in idem et récuser le cumul de l'exonération de droits de mutation -mais alors il faut le préciser comme on le fait à l'article 4- soit qu'il conviendrait en toute justice de rendre éligible à la réduction d'impôt de l'article 200 la libéralité effective, déduction faite des droits de mutation auxquels le donateur a échappé.

Le souci de cohérence pourrait aller jusqu'à articuler l'article 200 à l'article 1716 bis du code général des impôts, relatif à la dation en paiement, et considérer que, si les droits dus dont inférieurs à la valeur agréée, il serait légitime d'accepter la libéralité résiduelle au titre de l'article 200 du même code.

D'une façon générale, votre rapporteur estime qu'il faudra voir à l'usage comment de texte sera appliqué et utilisé par les contribuables.

S'il ne souhaite pas encourager une attitude soupçonneuse des services fiscaux de nature à vider de leur contenu les intentions très généreuses et très libérales du gouvernement, comme cela est semble-t-il le cas en matière de donation temporaire d'usufruit, il faut aussi que ces services soient vigilants et veillent à ce que certains utilisent le texte à des fins d'optimisation fiscale. Or, on ne peut exclure que des dons en nature ne permettent à des contribuables de liquider, à bon compte et sans le risque de la mise sur le marché, certains actifs qui, s'ils avaient dû les vendre, auraient supporté l'impôt sur les plus-values.

Votre rapporteur n'a pas souhaité proposer des amendements sur ces questions considérant que la navette parlementaire permettrait de faire le point sur ces questions.

4. La méconnaissance de la spécificité des fondations et des organismes humanitaires

Le souci de simplification et donc d'uniformisation des règles doit trouver ses limites naturelles dans la prise en compte des différences de situation objective. A cet égard, on peut se demander si l'on n'est pas allé trop loin s'agissant tant des organismes à vocation humanitaire que des fondations.

La volonté du gouvernement d'aboutir à un texte simple et lisible, l'a conduit à supprimer toute discrimination positive en faveur des organismes d'intérêt général venant en aide aux personnes les plus démunies.

La perte de cet avantage comparatif inquiète un certain nombre de ces organismes, dont l'action apparaît tout à fait essentielle du point de vue du lien social et de la solidarité.

Tout en considérant qu'il était impossible d'augmenter encore le taux de la réduction d'impôts et qu'il ne fallait pas introduire de complexité inutile, votre commission des finances a considéré qu'il était difficile de ne pas marquer le caractère prioritaire de ce type d'action.

De même, une autre conséquence du texte, surtout après le vote de l'Assemblée nationale, est la relative banalisation du statut des fondations . Il est paradoxal que ce texte aboutisse à fondre dans le droit commun le régime fiscal des fondations, alors que ces organismes se distinguent précisément des associations, même reconnues d'utilité publique, en ce qu'elles doivent vivre en principe essentiellement des seuls revenus de leurs dotations.

III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE RAPPORTEUR

Compte-tenu de ces observations, votre rapporteur a proposé à la commission des finances d'axer ses propositions autour de trois lignes directrices :

- trouver le juste équilibre entre les exigences de contrôle et la préservation de la liberté d'association ;

- aménager un régime spécifique pour les fondations et les organismes venant en aide aux personnes en difficulté ;

- adapter le régime des achats d'art contemporain par les entreprises.

Prenant acte en effet de la brèche introduite dans le principe d'universalité du texte -qui avait conduit à écarter les mesures à caractère sectoriel, avec l'amendement du gouvernement relatif aux trésors nationaux- votre rapporteur a considéré que l'on pouvait saisir l'opportunité offerte par ce texte pour donner un « coup de pouce » fiscal aux achats d'art contemporain par les entreprises.

1. Trouver le bon équilibre entre le contrôle et la liberté d'association et de fondation

Après avoir examiné tous les termes du débat, votre rapporteur a proposé à la commission des finances de s'en tenir à la publication et la certification des comptes au-dessus d'un certain seuil.

Dans le même esprit, votre rapporteur n'a pas cru utile de proposer à la commission des finances de retenir le dispositif adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Charles de Courson, tendant à prévoir le contrôle de la Cour des comptes.

Votre commission des finances a pris acte de ce que le gouvernement avait admis que la Cour des comptes n'avait pas les moyens en personnel pour procéder à de tels contrôles et qu'en tout état de cause, la plupart des organismes lui étaient déjà soumis au titre de sa compétence en matière d'appel à la générosité publique.

En outre, elle a estimé qu'il en résulterait une sécurité fallacieuse dans la mesure où les organismes concernés sauraient qu'ils ont de très faibles chances d'être contrôlés.

Telles sont les raisons pour lesquelles, votre commission des finances a préféré substituer au contrôle de la Cour des comptes ceux de l'inspection générale des finances et des inspections générales des ministères techniques compétentes en la matière.

2. Prévoir un régime spécifique pour les fondations et organismes d'aide humanitaire

Si votre rapporteur n'a pas cru possible de porter atteinte à la cohérence du régime fiscal des associations et fondations en soustrayant à l'impôt sur les sociétés certaines activités lucratives, même étroitement liées aux objectifs des organismes, il lui a paru financièrement supportable et symboliquement important de ne pas soumettre à l'impôt sur les sociétés les revenus issus de la dotation.

Il est ainsi proposé d' exonérer d'impôt sur les sociétés les revenus des fondations actuellement soumis aux taux préférentiels de 24 % et de 10 % en application du I de l'article 219 bis du code général des impôts.

Dans le même esprit, si votre commission a estimé très difficile d'augmenter encore le taux de la réduction d'impôt qui atteint déjà 60 % et qu'on imagine guère pouvoir être porté au-delà 4 ( * ) , elle a voulu marquer le caractère prioritaire des organismes humanitaires d'aide aux personnes les plus démunies en prévoyant que les versements effectués au profit d'organismes procédant à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté ou contribuant au logement de celles-ci, bénéficient d'un plafond spécifique de déductibilité des dons, plus élevé en pourcentage du revenu imposable.

Ainsi, selon votre commission, le pourcentage de 20 % serait porté à 25 % pour cette catégorie d'organismes tout à fait prioritaires. En d'autres termes, si les particuliers seront autorisés à donner à des organismes d'intérêt général l'équivalent de leur revenu imposable annuel sur cinq ans, ils pourront aller plus loin pour les organismes à caractère humanitaire qui pourront recevoir ce même revenu imposable annuel sur quatre ans seulement . Certes, cela n'apporte aucun avantage spécifique pour les petits dons mais cela peut faciliter les libéralités importantes, ce qui peut être appréciable notamment pour les organismes s'efforçant de loger des personnes démunies.

3. Aménager le régime des achats d'art contemporain

L'Assemblée nationale a élargi le champ d'application de l'article 238 bis 0-A du code général des impôts, relatif à la réduction d'impôt de 90 % dont bénéficient les entreprises qui versent de l'argent à l'État pour lui permettre d'acquérir un Trésor national.

Laissant à la commission des affaires culturelles saisie pour avis -et qui était saisie au fond du texte sur les musées de France dont cet article est issu- le soin d'examiner l'extension du champ d'application de cet article, votre commission des finances a souhaité simplement souligner qu'il est paradoxal que l'amendement du gouvernement relatif à l'acquisition d'oeuvres majeures à l'étranger soit valable sans limitation de durée, alors que, dans la rédaction actuelle de l'article 238 bis 0-A du code général des impôts, le mécanisme de droit commun doit prendre fin le 31 décembre 2006.

Dans le même esprit, et pour donner suite à certaines initiatives antérieures du rapporteur de votre commission des finances, il est proposé d' aménager le régime des achats directs d'oeuvres originales d'artistes vivants par les entreprises en application de l'article 238 bis AB du code général des impôts.

Certes, la transformation du système de déduction de charges en un système de réduction d'impôts au niveau élevé de 60 % va donner aux fondations d'entreprises une impulsion décisive. On peut donc espérer que se constitueront un plus grand nombre de collections d'entreprises tournées vers l'art contemporain pour le plus grand bénéfice des jeunes créateurs vivant et travaillant dans notre pays.

Une des raisons de l'échec de ce dispositif est sans doute le caractère excessivement rigoureux de l'obligation d'exposition attachée à cette possibilité d'amortissement des oeuvres. Aussi, vous est-il proposé de limiter l'obligation à la seule durée pendant laquelle l'oeuvre est en cours d'amortissement, et de prévoir qu'il s'agit d'un lieu accessible au public étant entendu que cette accessibilité doit être définie de la façon la plus souple possible.

*

* *

Ce texte vient opportunément donner une chance à la France de se hisser en matière de solidarité privée aux niveaux atteints par ses principaux partenaires.

La plupart d'entre eux viennent comme permet de s'en rendre compte l'étude très instructive du service de législation comparée du Sénat (LC 120 ) de faire évoluer dans un sens incitatif le régime discal des dons aux oeuvres et du mécénat.

La France devrait rattraper son retard. Il ne faudrait pas d'ailleurs s'étonner que, d'ici à quelques années, à la fois sous l'effet de la générosité spontanée de nos compatriotes -mais également du fait du développement d'un véritable marché de la générosité-, l'on voit sensiblement baisser le taux d'imposition de nos compatriotes au titre de l'impôt sur le revenu.

De ce point de vue, le présent projet de loi s'inscrit dans la politique de baisse des prélèvements obligatoires entamée courageusement dans une conjoncture difficile par le présent gouvernement.

Nul doute en effet que l'impulsion ainsi donnée au mécénat sera d'autant plus vigoureuse que la baisse des prélèvements obligatoires sera plus forte.

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE PREMIER

Augmentation de la réduction d'impôt sur le revenu en cas de dons
à des organismes d'intérêt général

Commentaire : le présent article a pour objet de renforcer et de simplifier l'avantage fiscal dont bénéficient les particuliers qui donnent à des organismes d'intérêt général.

En vertu de l'article 200 du code général des impôts, les particuliers qui font des dons, en argent mais également en nature, à des organismes d'intérêt général répondant à certaines conditions énoncées au paragraphe 1 dudit article bénéficient d'une réduction d'impôt.

Le présent article propose de porter cette réduction d'impôt de 50 % à 60 % du montant des dons ; il prévoit également de relever de 10 % à 20 % le plafond en pourcentage du revenu imposable du revenu ouvrant droit à la réduction d'impôt.

A l'heure actuelle, on ne compte que près de 45.000 contribuables atteignant le plafond de 10 %. C'est ce qui explique que le coût du relèvement du plafond, 8 millions d'euros, soit beaucoup plus faible que celui du relèvement de 50 % à 60 % du taux de la réduction d'impôt, soit 65 millions d'euros.

On peut rappeler que la dépense fiscale correspondant à l'article 200 est évaluée pour 2003 dans le fascicule des « Voies et moyens » à 390 millions d'euros.

L'autre novation importante est la simplification des mécanismes fiscaux.

Le taux de 60 % est désormais valable pour toutes les catégories d'organismes d'intérêt général, alors que dans le régime actuel seuls les organismes ayant pour vocation à venir en aide aux personnes en difficulté, y avaient droit.

De même, le seuil de 20 % est valable pour les dons effectués en faveur de toutes les catégories d'organismes, ce qui n'a pas toujours été le cas dans le passé.

On peut rappeler que le régime en vigueur ces dernières années était relativement complexe . On devait distinguer

- les versements effectués au profit d'organismes d'intérêt général qui bénéficiaient de la réduction d'impôt sur le revenu au taux de droit commun de 50 %, dans la limite de 6 % puis de 10 % avec l'adoption de l'article 6 de la loi de finances pour 2002.

- et le régime des dons au profit des organismes d'aide aux personnes en difficulté, qui donnait droit à une réduction d'impôt de 60 % plafonnée à 315 euros. Ce plafond avait d'ailleurs été l'origine de problèmes techniques dans la mesure où, du fait de son taux d'indexation sur le barème de l'impôt sur le revenu, il n'était connu que très tard, ce qui gênait les organismes concernés dans leur campagne de souscription.

Le 3° du texte de cet article reprend dans l'énumération la définition des organismes d'aide aux personnes en difficulté qui figure actuellement au 4 de cet article. Il y a là un transfert purement formel, légitime certes, mais qui n'apporte rien aux organismes en question dans la mesure où ils rentrent à l'évidence dans la définition de droit commun des organismes éligibles.

Votre commission des finances s'est longuement interrogée sur l'opportunité de supprimer toute discrimination positive en faveur des organismes d'aide aux personnes en difficulté. La volonté de simplicité, aussi légitime soit-elle, ne doit pas forcément primer sur la nécessité d'établir une hiérarchie de priorités entre les différentes actions d'intérêt général. A cet égard, quelle que soit la noblesse de certaines causes culturelles ou éducatives, il faut admettre qu'elles devraient bénéficier d'un degré de priorité moindre que les actions de bienfaisance en faveur des plus défavorisés.

Deux solutions étaient envisageables pour rétablir une certaine discrimination positive en faveur des organismes d'aide aux personnes en difficulté :

- relever le taux de la réduction de 60 % à 70 % ;

- prévoir un plafond global supérieur des dons déductibles en pourcentage du revenu imposable.

Le seuil de 60 % ayant paru un maximum qu'il ne fallait pas dépasser si l'on voulait conserver au don sa pleine signification, votre commission des finances a préféré, en dépit de la complexité de gestion que cela peut introduire, prévoir un plafond de déductibilité plus élevé de 25 % lorsque le don est effectué à un organisme d'aide aux personnes en difficulté.

Pour limiter, autant que faire se peut les problèmes de gestion, compte tenu notamment des possibilités de report, il a été prévu que ce plafond ne serait valable qu'à la condition que le don pris en compte concerne exclusivement les organismes d'aide aux personnes en difficulté .

Dans un tout autre ordre d'idée, votre commission des finances a voulu mentionner dans l'énumération des activités des organismes d'intérêt général non seulement la mise en valeur des patrimoines mais encore l'encouragement à la création contemporaine.

On peut rappeler qu'en l'état actuel de l'article 200 du code général des impôts, peuvent bénéficier de dons ouvrant droit à un avantage fiscal des « oeuvres ou organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ». Comme si cette énumération n'était pas exhaustive, le législateur précise que sont également visés, les organismes d'intérêt général « concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ».

C'est dire que la générosité ouvrant droit à un avantage fiscal, peut s'exercer dans presque tous les domaines, dès lors qu'il s'agit d'une activité « d'intérêt général ».

Bien que consciente de ce que la mention de la création contemporaine n'apporte pas de véritable novation, votre rapporteur a cru utile d'afficher clairement que la culture ne se réduisait pas à la mise en valeur du patrimoine mais comportait, également, un encouragement à la création artistique sous toutes ses formes.

Enfin, à l'initiative du rapporteur de sa commission des finances, l'Assemblée nationale, a adopté un paragraphe 7 pour le texte du 1 de l'article 200 du code général des impôts prévoyant qu'un organisme qui reçoit des dons et qui peut délivrer des reçus fiscaux, peut demander aux services fiscaux s'il est bien habilité à les délivrer, et s'il répond aux critères fixés par le 1 de l'article 200 en ce qui concerne tant la nature de ses activités que son caractère d'intérêt général.

Le dispositif de rescrit prévoyait qu'en cas de silence de l'administration pendant six mois, l'organisme était réputé habilité à délivrer des reçus fiscaux. Votre commission des finances a considéré qu'en dépit de la charge administrative qui pouvait résulter pour l'administration de ce type de mesure, elle constituait un bon moyen d'assurer aux associations et organismes d'intérêt général la sécurité juridique nécessaire au développement de leur activité.

Il est proposé au Sénat d'adopter un amendement déplaçant cette disposition dans le livre de procédure fiscale pour des raisons de cohérence et pour bien signifier qu'elle est valable aussi bien pour le bénéfice de l'article 200 que pour celui de l'article 238 bis .

La rédaction proposée, certes moins lisible que celle adoptée par l'Assemblée nationale, a le mérite de la cohérence par rapport à toutes les autres procédures de « rescrit » en vigueur pour d'autres avantages fiscaux.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE PREMIER BIS (nouveau)

Exonération de droits de mutation des dons manuels faits aux organismes d'intérêt général

Commentaire : le présent article a pour objet de faire figurer explicitement dans la loi l'exonération des droits de mutation des organismes d'intérêt général pour les dons manuels qui leur sont consentis.

L'Assemblée nationale a souhaité que figure explicitement dans la loi, l'exonération des droits de mutation des organismes d'intérêt général en matière de dons manuels.

En fait, il s'agit de revenir sur certaines interprétations contraires à la pratique traditionnelle d'exonération, qui avaient pu être faites par les services fiscaux au moment où il s'agissait de lutter contre les sectes.

Il convient de rappeler que l'expression de « dons manuels » recouvre tous les dons dont les organismes peuvent bénéficier, billets de banques, meubles meublants, chèques, à la condition que les transferts s'effectuent avant le décès du donateur, car, dans cette hypothèse, il s'agit d'une libéralité que seules certaines associations spécialement désignées peuvent recevoir.

Votre commission des finances approuve cette initiative qui vise à apporter une sécurité juridique accrue aux associations et de les protéger contre des contrôles pouvant aboutir à la taxation des biens à concurrence de 60 %, c'est-à-dire au taux applicable entre non-parents.

Sur le plan formel, elle s'est ralliée à la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale et a considéré que la référence à l'article 200 du code général des impôts est suffisante sans qu'il soit besoin de faire référence aux organismes définis au 238 bis du même code.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE PREMIER TER (nouveau)

Obligation de publicité applicable à certains organismes bénéficiaires de dons ouvrant droit à un avantage fiscal

Commentaire : le présent article a pour objet de prévoir que les associations et fondations reconnues d'utilité publique, les associations ayant pour but exclusif l'assistance, la bienfaisance, la recherche scientifique ou médicale, ainsi que tout organisme d'intérêt général bénéficiaire de dons ouvrant droit à l'avantage fiscal, doivent assurer la publicité de leurs comptes annuels.

Le présent article qui crée un nouvel article 4-1 dans la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, a été introduit à l'Assemblée nationale, en première lecture, à l'initiative du rapporteur de la commission des finances dans le but de permettre aux citoyens d'être mieux informés sur l'utilisation de leurs dons.

Dans cette perspective, il tend à créer pour les organismes susmentionnés une obligation de publicité des comptes annuels.

Ce dispositif doit être considéré conjointement avec celui de l'article 7 ( nouveau) tendant à prévoir la compétence de la Cour des comptes et l'obligation d'établir des comptes certifiés pour certaines associations recevant un volume de dons important.

Une telle initiative doit être remise dans son contexte. De nouvelles règles comptables sont applicables depuis le 1 er janvier 2000 en application d'un règlement de février 1999 du comité de la réglementation comptable.

Si la tenue d'une comptabilité n'est pas juridiquement une obligation, de nombreuses catégories d'associations sont tenues d'en établir une au titre de diverses réglementations. On note que, dans le silence de la loi de 1901, le statut-type proposé aux associations déclarées se contente de formules très générales du type « le trésorier rend compte de sa gestion et soumet le client à l'approbation de l'assemblée ».

En application de dispositions légales ou réglementaires , une série d'associations et notamment les associations ayant une activité économique, celles agréées par une autorité publique ou celles concernant des activités diverses, telles la pêche, les courses de chevaux, les organismes de formation, etc. doivent respecter des prescriptions en matière comptable .

De même, les statuts-types des associations reconnues d'utilité publique prévoient l'établissement de comptes annuels, ainsi qu'un rapport annuel . Même si leur contenu n'est pas réglementé, il faut pour appliquer ces prescriptions se référer au code de commerce.

D'autres types d'associations sportives ou cultuelles sont également assujetties à des obligations comptables de même que les associations de financement électoral ou de mouvements politiques.

A ces obligations générales, s'ajoutent le cas échéant des obligations spécifiques lorsque l'association bénéficie de financements publics. C'est ainsi que la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique des procédures publiques a rendu obligatoire, en application de son article 81, l'établissement de comptes annuels et le contrôle d'un commissaire aux comptes pour les organismes recevant plus de 150.000 euros de subventions de l'État , des collectivités territoriales et de leurs établissements publics.

Un autre texte important est la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations aux administrations et en particulier son article 10 5 ( * ) .

On note que cette loi prévoit non seulement l'établissement de comptes-rendus financiers mais également l'accès aux comptes et autres documents financiers pour toutes les personnes qui en font la demande auprès de l'organisme de financement .

Les associations ayant reçu annuellement une subvention supérieure à 150.000 euros doivent déposer à la préfecture du département de leur siège social leur budget, leurs comptes et l'occasion, le cas échéant, d'un compte-rendu financier des subventions reçues. Effectivement, lorsqu'une subvention est affectée à une dépense déterminée, l'association bénéficiaire doit établir un compte-rendu financier qui atteste de la dépense effectuée suivant un modèle défini par voie réglementaire.

Il faut remarquer que le non-respect de ces obligations comptables comporte, -à la différence des obligations prévues au présent article qui devront être assorties de sanctions contraventionnelles au niveau des décrets d'application- un certain nombre de sanctions : mise en cause de la responsabilité des dirigeants sur le plan civil ou pénal, impossibilité de bénéficier des financements publics voire remboursement de la collectivité ayant fourni le financement. Pour les associations ayant une activité économique, le non-respect de ces obligations est puni d'une amende de 9.000 euros.

Compte tenu des considérations développées dans l'exposé général, votre commission des finances a, sur proposition de son rapporteur, considéré qu'on ne pouvait s'en tenir à une simple obligation de communication des comptes aux donateurs. Elle s'est donc ralliée à la rédaction issue de l'Assemblée nationale en se contenant de prévoir explicitement une obligation de publicité et de certification des comptes annuels, applicable au-dessus d'un certain seuil de dons reçus défini par décret simple. Cela a paru plus souple que de faire fixer ce montant par le décret en Conseil d'État qui devrait définir les modalités d'application de l'article, et notamment les sanctions contraventionnelles dont seraient passibles les associations ne respectant pas cette obligation de publicité.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2

Augmentation du montant de l'abattement d'impôt sur les sociétés accordé aux fondations reconnues d'utilité publique

Commentaire : le présent article a pour objet, d'augmenter l'abattement de l'impôt sur les sociétés accordé aux fondations reconnues d'utilité publique sur leurs revenus à caractère non lucratif.

Les associations et les fondations reconnues d'utilité publique bénéficient en application du I de l'article 219 bis du code général des impôts de taux réduits d'impôts sur les sociétés pour leurs revenus provenant de leurs activités non lucratives.

Ainsi, ces revenus sont taxés au taux de 24 % par comparaison aux 33,3 % de droit commun, tandis que ceux issus des valeurs mobilières sont taxés au taux de 10 %.

Le III de l'article 19 bis prévoit à la suite d'un amendement introduit dans la loi du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, que les seules fondations reconnues d'utilité publique bénéficient en outre d'un abattement spécifique . Celui-ci se montait à 15.000 euros ; le présent projet de loi l'a porté à 30.000 euros ; l'Assemblée nationale a obtenu qu'il soit fixé à 40.000 euros.

Plutôt que de gravir un échelon supplémentaire dans le relèvement de l'abattement, votre commission des finances a préféré poser un principe fort : l'exonération totale d'impôt sur les sociétés des revenus des fondations reconnues d'utilité publique tirés de leur dotation .

Il s'agit de marquer aussi nettement que possible la spécificité des fondations qui, à la différence des associations, doivent financer leurs activités d'intérêt général sur leurs ressources propres, sans faire appel à des cotisations.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 3

Renforcement des incitations fiscales au mécénat des entreprises

Commentaire : le présent article a pour objet de renforcer et de simplifier le régime du mécénat d'entreprise par la substitution d'une réduction d'impôt au taux de 60 % au système actuel de déduction de charges du résultat imposable.

Les dépenses de mécénat des entreprises sont actuellement régies par un mécanisme d'une grande complexité défini aux articles 238 bis et suivants du code général des impôts, qui est valable aussi bien pour l'impôt sur les sociétés que pour l'impôt sur le revenu.

Il s'agit d'un système de déduction de charges dans lequel les entreprises peuvent déduire de leur résultat imposable le montant des dons, ce qui aboutit à leur octroyer un avantage fiscal égal au taux de l'impôt sur les sociétés soit 33,33 %, auxquels s'ajoutent diverses majorations.

Le plafond de déductibilité varie selon le bénéficiaire du don. Pour les organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises, le plafond est fixé à 2,25 %o du chiffre d'affaires. Ce même plafond est applicable aux versements réalisés au profit d'une fondation d'entreprise.

Le plafond est porté à 3,25 %o du chiffre d'affaires lorsque les versements sont faits à des fondations ou associations reconnues d'utilité publique ou à des musées de France, ainsi qu'à des associations cultuelles ou de bienfaisance -habilitées à recevoir des dons et legs- et à des établissements publics des cultes reconnus d'Alsace-Lorraine.

Le mécanisme est rendu encore plus complexe du fait de la possibilité de report sur 5 ans des dons, lorsque ceux-ci dépassent l'un ou l'autre des deux plafonds sus-mentionnés.

On note que certains organismes reconnus d'utilité publique peuvent recevoir des versements pour le compte d'oeuvres d'intérêt général au sens énoncé, dès lors que leurs statuts ont été agréés à cet effet.

Le nouveau régime est à la fois plus simple et plus incitatif.

Il est plus incitatif parce que la réduction d'impôt sur les sociétés est portée à 60 % des sommes versées et parce que le plafond est porté à 5 %o du chiffre d'affaires.

Il est plus simple parce que ce plafond de 5 %o est désormais valable quel que soit l'objet de l'organisme bénéficiaire et parce que le taux de 60 % est le même que celui applicable aux dons des particuliers régis par l'article 200 du code général des impôts.

Le dispositif du présent article tire les conséquences de ces choix en s'efforçant, en outre, de simplifier et d'harmoniser la rédaction sur celle de l'article 200 précité en ce qui concerne la définition des organismes d'intérêt général.

Dès lors que le I est organisé d'une façon très voisine de celle de l'article 200, l'on peut procéder à une série de simplifications  et de coordination : c'est ainsi que l'on retrouve au d) du 1 les organismes actuellement visés au 238 bis A et qu'un sixième alinéa au 1 de l'article 238 bis reprend les dispositions du 5 actuel relatif aux organismes habilités à accueillir des fondations et l'alignement des plafonds permet, enfin, d'abroger l'article 238 bis AA.

On note, d'une part, qu'il est explicitement proposé que les versements ouvrant droit à la réduction d'impôt ne peuvent être déduits des résultats imposables et que le V du présent article permet aux entreprises de déduire les versements intervenus depuis cinq ans..

Le III du présent article modifie par coordination le régime de déduction des achats d'oeuvres à des artistes vivants.

Votre commission des finances vous propose de reprendre cette coordination et d'aménager l'obligation d'exposition des oeuvres d'art contemporain pour relancer un mécanisme, qui n'a jamais bien fonctionné .

En l'occurrence, il est proposé de prévoir d'une part, la limitation de l'obligation d'exposition à la seule durée pendant laquelle l'oeuvre est « amortie », soit 5 ans, et d'autre part, de préciser que l'exposition doit avoir lieu dans un lieu « accessible au public » et pas simplement un lieu spécialement destiné à l'exposition des oeuvres. De ce point de vue, il ne serait pas nécessaire pour une entreprise d'ouvrir une galerie d'exposition, mais il suffirait que les oeuvres soient par exemple présentes dans un hall d'entrée.

Dans le même esprit d'encouragement à l'art contemporain, votre commission des finances vous propose d'expliciter la notion d'intérêt général en prévoyant que les organismes peuvent non seulement avoir pour objet la mise en valeur du patrimoine artistique, mais comprendre également l'encouragement à la création contemporaine .

Cette proposition, symétrique de celle déjà faite à l'article 200 précité, est plus emblématique que véritablement indispensable, car il s'agit simplement de faire préciser, par le gouvernement, que la création contemporaine peut effectivement faire partie des objectifs des organismes d'intérêt général susceptibles de recevoir des dons ouvrant droit à l'avantage fiscal.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 4

Exonération de droits de succession pour les sommes versées aux fondations ou associations reconnues d'utilité publique

Commentaire : le présent article a pour objet de permettre aux héritiers de faire don, en franchise de droits de mutation à une association ou fondation reconnue d'utilité publique et ayant un caractère d'intérêt général, de sommes reçues dans le cadre d'une succession.

En l'état actuel du droit, seuls peuvent recevoir des libéralités, à condition d'être dotés de la personnalité juridique au jour de la donation ou de l'ouverture de la succession, les organismes suivants : fondations et associations reconnues d'utilité publique, associations cultuelles, unions d'associations familiales agréées et associations ayant pour objet exclusif l'assistance, la bienfaisance ou la recherche scientifique ou médicale. A cette liste, il faut ajouter les associations de financement électoral et de financement d'un parti politique agréées es-qualité .

Pour être autorisée à accepter une libéralité, une association ou une fondation doit obtenir l'approbation du préfet ou du ministre de l'intérieur.

En application de l'article 795 du code général des impôts, certains organismes publics ou d'intérêt général bénéficient déjà d'une exonération de droits de mutation à titre gratuit . Il s'agit, outre quelque cas probablement très théoriques comme les organismes HLM, des organismes suivants :

1° - les établissements publics ou d'utilité publique, à caractère désintéressé, dont les ressources sont exclusivement affectées à des oeuvres scientifiques, culturelles, artistiques à caractère désintéressé ;

2° - les établissements publics charitables, les mutuelles et toutes sociétés reconnues d'utilité publique dont les ressources sont affectées à des oeuvres d'assistance ou de bienfaisance à la défense de l'environnement naturel ou à la protection des animaux ;

3° - les associations d'enseignement supérieur reconnues d'utilité publique et sociétés d'éducation populaire gratuite reconnues d'utilité publique et subventionnées par l'État  ;

4° - les associations cultuelles, union d'associations cultuelles et congrégations autorisées.

5° - l'office national des anciens combattants et victimes de guerre ainsi que les associations recevant des dons ou legs affectés par la volonté expresse du donateur testateur à l'érection de monuments commémoratifs de guerre.

En outre, la Croix-Rouge française, est exonérée de tous droits d'enregistrement en application de l'article 1071 du code général des impôts.

A ces exonérations définies en fonction de la qualité du bénéficiaire, s'ajoutent des exonérations tenant à la nature des biens transmis :

- toujours en application de l'article 795 du code général des impôts les dons et legs d'oeuvres d'art, de monuments ou d'objet ayant un caractère historique, de livres, d'imprimés ou de manuscrits, ainsi que les dons d'autres biens destinés à l'achat de tels oeuvres ou objets, lorsque ces oeuvres ou objets sont destinés à figurer dans une collection publique ;

- en application de l'article 795 A du même code, les monuments historiques classés ou inscrits lorsqu'ils sont ouverts au public et que les donataires ou les légataires ont souscrit une convention avec le ministre de la culture ;

- en application de l'article 1131 du code général des impôts, pour les oeuvres d'art , de livres, d'objets de collection ou de documents de haute valeur artistique ou historique donnés à l'État, après agrément, par leur acquéreur, donataire, héritier ou légataire.

En l'absence d'exonération, les tarifs applicables sont :

- ceux exigibles dans les transmissions entre frères et soeurs, lorsque l'association est reconnue d'utilité publique, c'est-à-dire 35 % jusqu'à 23.000 euros et 45 % au-delà ;

- et pour les autres organismes, le taux d'imposition est celui applicable entre non-parents, c'est-à-dire 60 %.

Dans tous les cas, la fondation ou l'association bénéficie d'un abattement de 1.000 euros.

L'objet du présent article, tel qu'il est issu des délibérations de l'Assemblée nationale tend à permettre aux héritiers d'une succession de transmettre en franchise de droits de mutation à une fondation ou à une association reconnue d'utilité publique d'intérêt général une somme d'argent provenant de ladite succession. L'extension aux associations résulte d'un amendement de l'Assemblée nationale.

Deux caractéristiques sont à remarquer dans le mécanisme proposé :

- il s'agit de versements en argent et non de dons en nature, qui sont délibérément exclus . Dans le rapport de l'Assemblée nationale, il est précisé que le mécanisme est destiné à s'appliquer à tous les types de successions, quel qu'en soit le contenu, argent liquide, valeurs mobilières ou biens immobiliers. Dans le cas d'un immeuble, il faudra que l'héritier transfère le produit de la vente, comme cela est indiqué dans le dispositif qui mentionne le « remploi des sommes, droits ou valeurs reçus du défunt ».

- le versement doit être effectué en pleine propriété dans les six mois du décès et accompagné de pièces justificatives .

On doit souligner qu'il est expressément prévu que l'application de cet abattement n'est pas cumulable avec la réduction d'impôt prévue à l'article 200 du code général des impôts .

De fait, ainsi que l'expose le rapport de l'Assemblée nationale, le contribuable va devoir choisir entre le bénéfice de deux avantages fiscaux :

- l'exonération des droits de mutation ;

- la réduction d'impôt de l'article 200 précité.

Le choix entre ces deux possibilités va dépendre de son degré de parenté et de son taux marginal d'imposition.

Plus le lien de parenté sera éloigné, et a fortiori lorsqu'on se trouve dans le cas de non-parent, l'exonération de droit de mutation devient a priori avantageuse.

De l'autre côté, lorsque l'héritier se trouve dans la tranche supérieure d'imposition au titre de l'impôt sur le revenu, il aura avantage à se prévaloir de l'article 200 précité, d'autant plus que la déduction peut être impliquée sur cinq exercices.

Votre commission des finances s'est interrogée sur le point de savoir s'il était cohérent de ne pas accepter directement les dons en nature et s'il convenait en fait d'obliger l'héritier à liquider lui-même le bien, le cas échéant, à bref délai, dans de mauvaises conditions, pour être en mesure de transférer le produit de la vente à la fondation ou à l'association reconnue d'utilité publique.

Il est d'autant plus cohérent de laisser le choix et d'admettre le don de biens en nature que ceux-ci sont admissibles au titre de l'article 200 sans aucune restriction a priori .

On peut même ajouter que, s'il peut paraître généreux d'admettre la déductibilité des dons de biens immobiliers au titre de l'impôt sur le revenu dans la mesure où le donateur s'il avait vendu aurait eu à supporter l'impôt sur les plus-values, il n'en est pas de même du don d'un bien immobilier reçu par héritage, puisque celui-ci entre dans le patrimoine de l'héritier à la valeur déclarée dans la succession sans application de l'impôt sur les plus-values au niveau du patrimoine du défunt.

On note que l'Assemblée nationale a ajouté dans la liste des organismes susceptibles de bénéficier de l'avantage fiscal, l'État, les collectivités territoriales, les établissements publics.

Par souci de cohérence , la rédaction de votre commission des finances pour le présent article fait référence à l'ensemble des organismes mentionnés à l'article 794 du code général des impôts , dont on rappelle qu'il est précisément modifié par l'article 4 bis nouveau ci-après.

Ce souci de cohérence aboutit à inclure parmi les bénéficiaires du dispositif les centres d'action sociale et les établissements publics hospitaliers.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 4 BIS (nouveau)

Inclusion des établissements publics de coopération dans la liste des organismes publics pouvant recevoir des dons en franchise de droits de succession

Commentaire : le présent article a pour objet d'ajouter à la liste des organismes exonérés de droits de mutation, en application de l'article 794 du code général des impôts, les établissements publics de coopération entre les collectivités territoriales.

A l'initiative de notre collègue député Charles de Courson, l'Assemblée nationale a introduit le présent article pour prévoir que l'exonération de droits de mutation dont bénéficient les régions, les départements, les communes ainsi que les établissements publics hospitaliers et les centres d'action sociale, doit aussi viser les établissements publics de coopération entre collectivités territoriales.

On note que l'expression d'« établissement de coopération » recouvre tous les types d'établissements qu'ils aient ou non de fiscalité propre.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5

Possibilité pour les salariés de faire des dons à la fondation de leur entreprise

Commentaire : le présent article a pour objet, de permettre aux salariés de faire des dons à la fondation créée par leur entreprise.

En application de l'article 19 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, tel qu'il résulte de la loi n° 90-559 du 4 juillet 1990, relative aux fondations d'entreprises, il n'est pas possible pour ces organismes de faire appel à la générosité publique ou de recevoir des dons et legs.

Le présent article tend à lever cette interdiction en permettant aux salariés d'une entreprise de participer au financement d'une fondation de ce type.

Une telle disposition est apparue de nature à favoriser le développement des fondations d'entreprise sans comporter de risque quelconque pour les salariés concernés.

Le 2° de l'article premier du présent projet de loi a tiré, par anticipation, les conséquences de cet article au niveau du 2° du I.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 6 (nouveau)

Application aux biens culturels d'intérêt majeur situés à l'étranger de la réduction exceptionnelle d'impôt sur les sociétés relative aux Trésors nationaux

Commentaire : le présent article a pour objet d'élargir le champ d'application de la mesure d'incitation fiscale relative aux Trésors nationaux au cas des biens culturels d'intérêt majeur situés à l'étranger.

L'article 238 bis - 0 A, tel qu'il résulte de la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, a mis en place une mesure d'incitation fiscale très importante pour permettre le maintien sur le territoire national de biens reconnus comme des Trésors nationaux.

Les entreprises imposées à l'impôt sur les sociétés, peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt égale à 90 % des versements effectués en faveur de l'achat de Trésors nationaux ayant fait l'objet d'un refus de délivrance d'un certificat d'exportation.

Il s'agit d'un avantage substantiel, même s'il ne s'agit pas d'un crédit d'impôt classique. Le taux de 90 % applicable aux versements effectués par les entreprises pour permettre l'achat par l'État de Trésors nationaux, évoqué fréquemment pour justifier des demandes d'augmentation du niveau de la réduction, ne doit pas, selon votre rapporteur, être considéré comme correspondant à une réduction d'impôt mais plutôt, si ce n'est comme une sorte de dation en paiement d'impôt sur les sociétés, du moins comme un paiement affecté de l'impôt, combiné avec une action de mécénat d'une entreprise .

D'un côté, c'est bien l'État qui a décidé de l'achat, et c'est lui qui paye. Simplement, au lieu d'inscrire les crédits au budget du ministère de la culture, il accepte une moins-value de recettes qui a le grand avantage de ne pas comporter d'effet de cliquet car, si les crédits étaient mis en réserve « au cas où », la tentation serait grande de les utiliser et de les reconduire.

De l'autre, une entreprise peut mener une action de mécénat particulièrement visible, dans laquelle l'avantage diffus de notoriété et d'image citoyenne passe par un effort financier égal à 10 % de la valeur de l'oeuvre.

En dépit du taux très élevé du crédit d'impôt, il faut reconnaître que ce mécanisme connaît un début d'application relativement timide, puisqu'on ne compte, pour l'instant, qu'un seul cas d'acquisition : une série de panneaux du peintre Jean-Baptiste Oudry ont pu ainsi rejoindre les collections du musée du Louvre.

Ce début relativement modeste devrait être de nature à rassurer le ministère des finances qui a toujours considéré cette procédure avec beaucoup de méfiance.

L'Assemblée nationale a, sur proposition du gouvernement -qui a, dans ce cas particulier, fait une exception au principe de généralité du texte-, introduit le présent article pour étendre l'utilisation du dispositif à des oeuvres majeures du point de vue de l'histoire de l'art ou de l'archéologie située à l'étranger. Il est en effet paradoxal que l'on puisse intervenir pour retenir des oeuvres sur le territoire national et de ne pas pouvoir faire revenir -et même, pourquoi pas, entrer- des oeuvres plus importantes sous prétexte qu'elles sont hors du territoire national.

M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication, a cité, lors de la discussion en première lecture à l'Assemblée nationale, le cas du mobilier de Versailles dont nombre de pièces essentielles se trouvent déjà à l'étranger ou celui de tableaux espagnols de la collection de Louis-Philippe, alors que dans ce cas particulier on sait qu'il s'agit d'une des plus grandes faiblesses du Louvre.

L'on note que cet amendement ne comporte aucune limite temporelle alors que le dispositif initial n'est valable que jusqu'au 31 décembre 2006.

Votre commission des finances se contente de souligner cette incohérence et s'en remet à la sagesse du Sénat sur le point de savoir s'il convient de réintroduire une limite temporelle dans le dispositif de l'article 6 pour rester cohérent et garder à cette procédure son caractère expérimental, ou s'il faut saisir l'occasion de ce texte pour rendre pérenne la procédure de l'article 238 bis -0 A précité.

Un autre point important est la définition des oeuvres susceptibles de faire l'objet de cette procédure exceptionnelle d'acquisition. Faut-il la réserver aux seules oeuvres situées hors du territoire douanier national, ou faut-il considérer que cette définition est finalement restrictive et laisse de côté tous les Trésors nationaux que l'Etat n'a pas pu acquérir ?

Ce qui est souhaitable, c'est que des oeuvres essentielles, tel « Le Jardinier Vallier » de Cézanne, ne sortent pas du champ d'application du texte sous prétexte qu'elles n'ont peut-être pas encore quitté le territoire national.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 7 (nouveau)

Obligation d'établissement de comptes certifiés pour les organismes bénéficiaires de dons ouvrant droit à un avantage fiscal et contrôle de la Cour des comptes

Commentaire : le présent article a pour objet de modifier l'article L. 111-8 du code des juridictions financières, pour prévoir que tout organisme bénéficiaire de dons ouvrant droit à un avantage fiscal, doit établir des comptes certifiés et est soumis, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, au contrôle de la Cour des comptes.

De façon complémentaire avec les dispositions adoptées à l'article premier ter , l'Assemblée nationale a souhaité, à l'initiative de notre collègue député Charles de Courson, modifier l'article du code des juridictions financières donnant compétence à la Cour des comptes pour contrôler les organismes faisant appel à la générosité publique, pour prévoir une série d'obligations à la charge d'organismes bénéficiant de dons ouvrant droit à un avantage fiscal en matière d'impôt sur les sociétés ou d'impôt sur le revenu.

La première obligation consiste à imposer à ces organismes la tenue de « comptes annuels certifiés des dépenses financées par ces dons ». Il y a là une référence implicite, à la fois au contrôle par la Cour des comptes du compte d'emploi des ressources collectées pour les établissements faisant appel à la générosité publique, et aux comptes financiers que doivent établir les associations tenues de justifier de l'emploi des subventions qu'elles reçoivent.

Cette disposition, logique dans son principe, a l'inconvénient de créer un nouveau périmètre comptable, ce qui pourrait compliquer la gestion des associations, mais a l'avantage de cantonner le contrôle et donc de mieux respecter la liberté d'association.

En outre, il reste à expliciter la notion de certification des comptes mentionnée par la rédaction de l'Assemblée nationale.

La nomination d'un commissaire aux comptes n'est pas obligatoire, toutefois elle est imposée pour un grand nombre d'associations, soit en vertu d'une obligation légale ou réglementaire touchant notamment aux associations ayant une activité économique d'une certaine taille, ou à diverses associations spécialisées (fédérations sportives, centres de formation, etc...), soit parce que l'organisme reçoit plus de 150.000 euros de subventions publiques. On note qu'en dessous de ce seuil, les associations bénéficiant d'une aide supérieure à 75.000 euros doivent établir un bilan certifié conforme, ce qui semble leur imposer d'appliquer le plan comptable des associations.

Lorsqu'une association, qui n'est pas soumise à l'obligation légale, décide de désigner un commissaire aux comptes, elle peut soit nommer un commissaire aux comptes inscrit, soit désigner toute autre personne qui, sous le titre de censeur ou de contrôleur, effectuera une mission déterminée par les statuts ou par un organe statutaire de l'association.

Le commissaire aux comptes nommé volontairement est soumis aux mêmes obligations que s'il avait été nommé en vertu d'obligations légales. Il doit, à ce titre, vérifier les valeurs et les documents comptables. Il a un devoir général d'alerte en cas de difficulté, sans que cela l'amène à s'immiscer dans la gestion de l'organisme. C'est le commissaire aux comptes qui vérifie notamment la sincérité et la concordance des informations données dans le compte d'emploi annuel des ressources collectées auprès du public.

Votre commission des finances s'est interrogée sur la pertinence de la référence aux pouvoirs de la Cour des comptes en matière de contrôle des organismes faisant appel à la générosité publique, pour assurer celui des organismes recevant des dons ouvrant droit à un avantage fiscal.

D'un côté, on peut dire que, du point de vue du budget de l'État, une dépense fiscale n'est pas fondamentalement différente d'une subvention. Il s'agit d'une charge dont soit l'État, par l'intermédiaire des organismes de contrôle spécialisés, soit les citoyens, ont le droit de vérifier la pertinence.

De l'autre, il faut admettre que le système adopté par l'Assemblée nationale est, bien qu'il ne doive en principe s'appliquer qu'au-dessus d'un certain seuil de dons reçus par les associations, particulièrement lourd et peut porter atteinte à la liberté d'association.

La compétence de la Cour des comptes constitue à l'évidence une mesure « recentralisatrice », alors que toute la philosophie du présent projet de loi consiste, au contraire, à faire confiance aux citoyens et aux organismes d'intérêt général qui agissent sur le terrain.

En outre, prévoir la compétence de la Cour des comptes constitue une protection illusoire dans la mesure où celle-ci n'a pas les moyens matériels de l'exercer. Le ministre de la culture et de la communication l'a signalé devant les commissions des finances et des affaires culturelles réunies, et ce point a été nettement confirmé par les représentants de la Cour des comptes lors de leur audition par votre rapporteur.

En revanche, il est plus difficile de suivre la Cour des comptes lorsqu'elle estime que le contrôle des associations bénéficiant de l'avantage fiscal relève des services fiscaux.

Ceux-ci procèdent à un contrôle de régularité et non d'opportunité. Or, il ne s'agit pas simplement de savoir si l'argent des dons dans lequel l'État est désormais majoritaire, n'a pas été détourné à des fins personnelles, mais aussi d'évaluer l'efficacité de l'action soutenue par l'État.

Telle est la raison pour laquelle votre commission des finances a, sur proposition de son rapporteur, décidé de supprimer la référence au contrôle de la Cour des comptes pour réintroduire explicitement la compétence de l'inspection générale des finances et des inspections générales des ministères concernés.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 8 (nouveau)

Suppression de l'interdiction faite aux associations reconnues d'utilité publique de recevoir des donations avec réserve d'usufruit

Commentaire : le présent article a pour objet, de supprimer l'interdiction faite par l'article 11 de la loi du 1 er juillet 1901 aux associations reconnues d'utilité publique de recevoir des donations avec réserve d'usufruit.

Sans doute à cause d'une vieille méfiance à l'égard des biens de main morte, la loi du 1 er juillet 1901 relative aux contrats d'associations a prévu au dernier alinéa de l'article 11 que les associations reconnues d'utilité publique « ne peuvent accepter une donation mobilière ou immobilière avec réserve d'usufruit au profit du donateur ».

L'Assemblée nationale a introduit le présent article, qui lui est apparu dépourvu aujourd'hui de justification.

Votre commission des finances approuve cette initiative sous réserve des observations générales qu'elle a pu faire au sujet de la prise en compte de l'usufruit dans l'estimation du montant du don ouvrant droit à l'avantage fiscal.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

AUDITION DE M. JEAN-JACQUES AILLAGON,
ministre de la culture et de la communication

Réunie le mardi 29 avril 2003 , sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé conjointement, avec la commission des affaires culturelles, à l'audition de M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication, sur le projet de loi n° 234 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, relatif au mécénat, aux associations et aux fondations dont elle est saisie au fond.

Présentant tout d'abord l'esprit du projet de loi, le ministre a souligné qu'il s'agissait de traduire la confiance que le Gouvernement plaçait dans l'initiative privée et dans la générosité de nos concitoyens et que ce projet avait été défini en pleine concertation avec tous les acteurs concernés, privés et publics, qu'il s'agisse des ministères de la santé, de la recherche ou des sports notamment, sans oublier les ministères de l'intérieur et du budget.

Le ministre a mis l'accent sur le retard que la France accusait en matière de mécénat et, tout particulièrement, en ce qui concernait les fondations :

- à peine 15 % des Français faisaient des dons à des oeuvres d'intérêt général pour un montant d'un peu moins d'un milliard d'euros, tandis que les entreprises étaient peu nombreuses à se lancer dans le mécénat, moins de 2.000 selon l'annuaire de l'ADMICAL, pour un montant de dons de l'ordre de 340 millions d'euros ;

- au total, la France ne comptait que 476 fondations d'utilité publique, 78 fondations d'entreprises et environ 500 fondations sous l'égide de la Fondation de France, ce qui était faible comparé aux 12.000 fondations américaines ou au 3.000 « charity-trusts » britanniques.

Considérant que les apports du mécénat représentaient moins de un pour mille du PIB de la France, contre plus de 2 % aux Etats-Unis, M. Jean-Jacques Aillagon a souligné que la générosité des Français n'était pas en cause et qu'elle ne demandait qu'à être mobilisée.

C'est dans cette perspective que le projet de loi prévoyait un certain nombre de dispositions très incitatives :

- l'augmentation, de 50 % à 60 % du don, de la réduction d'impôt dont bénéficiaient les particuliers en cas de dons à des oeuvres d'intérêt général ;

- le doublement, de 10 % à 20 %, du plafond que pouvaient représenter les dons en pourcentage du revenu imposable ;

- la possibilité, pour des héritiers, d'être exonérés totalement de droits de succession sur les dons aux organismes d'intérêt général.

Pour les entreprises, le projet de loi introduisait également des dispositions tout à fait favorables :

- le don à un organisme d'intérêt général n'était plus simplement déductible du revenu imposable mais ouvrait droit à une réduction d'impôt de 60 % ;

- le plafond du montant des dons en pourcentage du chiffre d'affaires était augmenté pour atteindre 5 %o contre 2,25 %o ou 3,25 %o auparavant.

En ce qui concernait les fondations, le ministre a insisté sur les mesures positives contenues dans le texte : l'abattement d'impôt sur les sociétés, qui passait de 15.000 euros à 40.000 euros, ainsi que le droit des salariés de faire des dons à leurs fondations d'entreprise. Il a ajouté que la possibilité offerte aux particuliers de reporter sur cinq ans l'éventuel excédent d'un don par rapport à la limite de 20 % du revenu imposable était de nature à favoriser la constitution de dotations importantes pour les fondations.

Ensuite, M. Jean-Jacques Aillagon a résumé les apports de l'Assemblée nationale lors de l'examen du texte en première lecture. Il s'agissait :

- de l'extension de certaines mesures d'incitations fiscales initialement réservées aux fondations, aux associations reconnues d'utilité publique, aux collectivités territoriales ou aux établissements publics ;

- de la possibilité, pour les organismes d'intérêt général, d'interroger préventivement l'administration fiscale afin de savoir s'ils entraient dans le champ d'application de la réduction d'impôt ;

- de l'exonération des droits de donation sur les dons manuels dont bénéficiaient les organismes d'intérêt général ;

- des mesures garantissant la transparence et les contrôles des fonds collectés par les organismes d'intérêt général, étant noté, à cet égard, que le dispositif pouvait en être amélioré ;

- enfin, une extension du dispositif d'incitations fiscales relatif aux trésors nationaux, permettant de favoriser l'entrée ou le retour en France d'oeuvres d'art exceptionnelles présentes sur les marchés internationaux.

Le ministre s'est déclaré ensuite ouvert à la possibilité d'améliorer le texte du projet de loi pour permettre à toutes les institutions du spectacle vivant -festivals, orchestres, ensembles musicaux, compagnies dramatiques- de bénéficier du mécénat, afin que le statut fiscal de ces organismes ne puisse faire obstacle au bénéfice du mécénat pourvu que leur gestion soit désintéressée.

Il a conclu son intervention en réaffirmant que la promotion du mécénat n'était pas le signe d'un désengagement de l'Etat en matière de culture, et que c'était à la collectivité nationale qu'il incombait d'associer tous les acteurs dans le sens de l'intérêt général pour que celui-ci devienne encore plus largement l'affaire de tous.

A l'issue de cette présentation, M. Yann Gaillard, rapporteur pour la commission des finances , saisie au fond, du projet de loi relatif au mécénat, aux associations et aux fondations, est intervenu pour exposer son analyse d'un texte qui lui était apparu caractérisé par sa portée générale et la simplicité des mécanismes fiscaux qu'il comportait.

Il a noté que cette volonté de simplification avait pour contrepartie la fin des régimes de faveur dont bénéficiaient certaines catégories d'organismes d'intérêt général, qu'il s'agisse de ceux qui se consacraient essentiellement à la fourniture de repas gratuits ou des fondations, dont il a regretté que le texte ne reconnaisse pas suffisamment la spécificité. Puis M. Yann Gaillard, rapporteur de la commission des finances, a évoqué la délicate question du contrôle des organismes d'intérêt général recevant des dons ouvrant droit à des réductions d'impôt. A cet égard, il a indiqué qu'il était difficile d'arbitrer entre le souci de suivi de la dépense fiscale et celui, non moins légitime, de ne pas créer un climat de suspicion ou des contraintes inutiles, notamment pour les petites associations.

Après avoir évoqué la question d'éventuelles réductions d'impôt en matière d'impôt de solidarité sur la fortune, M . Yann Gaillard a interrogé le ministre sur les perspectives ouvertes par le projet de loi en matière de promotion de l'art contemporain, considérant qu'un assouplissement des règles en matière d'exposition des oeuvres d'art achetées par les entreprises viendrait utilement compléter la possibilité pour les fondations d'entreprises de constituer des collections d'art contemporain.

Enfin, il a demandé au ministre des précisions sur les nouveaux statuts-types applicables aux fondations et a conclu son intervention en considérant qu'il y avait un important travail de communication à mener, dans la mesure où, il l'avait lui-même constaté en rencontrant des chefs d'entreprise, l'opinion n'était pas véritablement consciente de la révolution que constituait ce texte en matière de mécénat.

Répondant au rapporteur de la commission des finances, M. Jean-Jacques Aillagon , ministre de la culture, a d'abord rappelé que ce texte était un compromis entre « l'idéal et le possible » et qu'il avait dû tenir compte d'une conjoncture financière difficile, rendant hommage à cette occasion à la compréhension dont avait fait preuve M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.

Au sujet du contrôle des organismes d'intérêt général, il a fait savoir qu'il fallait trouver un « juste milieu » entre une absence totale de transparence de nature à favoriser des refuges fiscaux injustifiés, et un contrôle tatillon et bureaucratique. Il a également indiqué que la Cour des comptes avait nettement fait savoir qu'elle ne souhaitait pas une extension du champ de ses compétences.

Ensuite, il a reconnu qu'il y avait un problème de promotion du texte, citant l'exemple du nouveau dispositif relatif aux trésors nationaux qui, en dépit de son caractère très avantageux, n'avait connu qu'une seule application. Il fallait donc, selon lui, mener une politique déterminée de communication de nature à diminuer une certaine inertie qui entravait le dynamisme du mécénat.

Après avoir rappelé tout l'intérêt des nouveaux statuts-types applicables aux fondations qui allaient assouplir leur mode d'organisation financière ou institutionnelle, il a souligné que l'essentiel était d'accélérer la procédure et que l'on devrait mettre en place un système d'approbation tacite, dans lequel les ministères chargés de donner leur avis seraient tenus de le faire dans un délai de deux mois, ce qui éviterait l'attente parfois interminable des personnes désireuses de créer une fondation.

Enfin, M. Jean-Jacques Aillagon a insisté sur le fait que ce texte était de portée générale. Pour cette raison, il avait voulu éviter de l'assortir de mesures sectorielles qui auraient affecté la lisibilité des intentions, très générales, du Gouvernement.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles , après avoir excusé M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis, a noté, à titre liminaire, que le projet de loi visait à diversifier les sources de financement de la politique culturelle et non à substituer les recettes du mécénat aux dépenses publiques. A ce titre, la commission des affaires culturelles ne pouvait qu'y être favorable.

Notant le caractère généraliste du dispositif proposé, il s'est interrogé sur l'opportunité de le compléter par des mesures plus ciblées destinées à encourager le mécénat culturel.

Il s'est demandé si, au-delà des mesures proposées par le projet de loi, il ne serait pas opportun d'assouplir encore le régime fiscal des fondations reconnues d'utilité publique, afin de tenir compte du statut juridique spécifique de ces organismes. Par ailleurs, il a souhaité obtenir des précisions sur les mesures réglementaires prises pour assouplir leur régime juridique.

Après avoir rappelé que le patrimoine était un sujet cher au coeur des Français, il a déploré que le mécénat en faveur des monuments historiques, et en particulier ceux appartenant à des propriétaires privés, soit encore peu développé. Il s'est interrogé sur les moyens de remédier à cette lacune en mettant en place un cadre juridique et fiscal favorable au développement d'actions de mécénat au profit de ces monuments, en usant par exemple de la possibilité de créer des fondations abritées. En outre, il a attiré l'attention du ministre sur le relatif arbitraire qui présidait à l'évaluation de ces biens par les services fiscaux.

Evoquant la question du contrôle des organismes recevant des dons ouvrant droit à un avantage fiscal, M. Jacques Valade a estimé qu'un équilibre pourrait être trouvé entre la volonté de garantir la transparence de leur action et le souci d'alléger les contraintes administratives qui pesaient sur eux, en fixant un seuil au-dessus duquel les obligations comptables devraient s'appliquer.

M. Jean-Jacques Aillagon a estimé nécessaire de mettre enfin un terme au débat largement rhétorique opposant l'action publique aux initiatives privées. Dans le domaine culturel, ces deux formes d'intervention étaient complémentaires. A l'exception du dispositif introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement destiné à encourager l'achat d'oeuvres majeures situées hors du territoire national, qui répondait à une urgence, le projet de loi avait vocation à couvrir l'ensemble des secteurs de l'action du Gouvernement et non pas spécifiquement le champ d'intervention du ministère de la culture.

Le ministre a toutefois rappelé qu'une disposition avait été introduite par le Sénat dans la loi de finances pour 2003 afin d'affecter à la Fondation du patrimoine une part du produit des successions vacantes. Par ailleurs, la loi de programme sur le patrimoine en cours de préparation devrait comporter des mesures destinées à assurer une meilleure protection des monuments historiques en donnant à leurs propriétaires, particuliers ou collectivités publiques, les moyens d'en assurer la charge.

Il a indiqué, en outre, que serait proposée, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2004, une mesure destinée à éviter la délocalisation à l'étranger des tournages de films. Cette mesure s'inscrira dans un plan destiné à soutenir les industries techniques.

En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances , qui appelait l'attention du ministre de la culture sur l'intérêt qu'il y aurait à encourager la remise de monuments historiques restaurés à une fondation chargée de les animer et de les ouvrir au public, M. Jean-Jacques Aillagon a indiqué que, s'il partageait, à titre personnel, le souci ainsi exprimé, d'ailleurs non seulement pour les monuments historiques mais également pour les oeuvres d'art, il fallait tenir compte des contraintes budgétaires et donc se rapprocher du ministre délégué au budget.

M. Yann Gaillard , rapporteur de la commission des finances, a signalé, à ce sujet, qu'il comptait soumettre à la commission des finances un amendement élargissant aux dons en nature et donc aux biens immobiliers et aux oeuvres d'art, l'exonération de droits de mutation prévue à l'article 4 du projet.

Puis M. Michel Charasse est intervenu pour signaler d'abord que, si l'on voulait abréger le « parcours du combattant » que constituait la création d'une fondation, l'on ne pouvait s'en remettre au seul droit prétorien du Conseil d'Etat et qu'il fallait que le législateur retrouve toute sa compétence en la matière. Ensuite, il a évoqué la question de la publicité des comptes et des modalités de contrôle des associations délivrant des certificats fiscaux, que ce soit par la Cour des comptes ou par les inspections générales des ministères. Enfin, il s'est inquiété de la situation des organismes d'assistance aux personnes démunies dans la mesure où la perte de leur traitement fiscal privilégié pouvait leur faire subir une chute de leurs ressources de mécénat.

M. Ivan Renar a regretté que les mesures d'encouragement au mécénat n'aient pas été présentées à l'occasion d'un projet de loi cadre sur la culture, qui aurait permis d'éviter la polémique sur le risque d'un désengagement de l'Etat. Il a souligné la nécessité de passer d'un mécénat de contributions à un mécénat d'initiatives. Les acteurs culturels et les entreprises devaient établir un partenariat dans la perspective de la promotion du développement durable. Les entreprises étaient susceptibles à travers leurs salariés de concourir à la démocratisation de l'accès à la culture.

S'appuyant notamment sur l'exemple du dispositif introduit par la loi relative aux musées de France, afin d'inciter les entreprises à acquérir des trésors nationaux, M. Philippe Richert a souligné les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre de ces mesures. Il a insisté sur la nécessité de promouvoir des mécanismes à la fois incitatifs et lisibles. A cet égard, il s'est félicité des mesures de simplification proposées par le projet de loi qui permettait également un renforcement significatif des avantages fiscaux bénéficiant aux entreprises et aux particuliers. Il a fait observer que, loin de marquer un désengagement de l'Etat, le projet de loi traduisait à travers une augmentation de la dépense fiscale un effort financier important de la part du Gouvernement.

Au sujet des organismes d'aides aux personnes démunies dont la situation avait inquiété M. Michel Charasse, le ministre de la culture a fait savoir qu'il serait toujours possible de réagir au cas où ils auraient effectivement des difficultés à maintenir leurs ressources. Il a également précisé en réponse aux questions de M. Michel Charasse qu'il fallait trouver le bon niveau du seuil au-dessus duquel on pouvait raisonnablement imposer des obligations de publicité ou de certification des comptes des associations.

Répondant à M. Ivan Renar, M. Jean-Jacques Aillagon a souligné l'intérêt d'une approche progressive et pragmatique des réformes législatives dans le domaine culturel. Il a relevé que le mécénat s'orientait de plus en plus vers le soutien à des projets publics, à l'image de la manifestation Lille 2004. Il a souligné toutefois la nécessité de promouvoir des dispositifs souples permettant aux actions de mécénat de s'orienter dans le sens souhaité par ceux qui en prenaient l'initiative.

Prenant acte du souci exprimé par M. Philippe Richert , il a indiqué qu'il conviendrait d'assurer une large promotion des modifications introduites par le projet de loi afin d'en garantir l'efficacité.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 7 mai 2003, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a examiné le rapport de M. Yann Gaillard, rapporteur, sur le projet de loi n° 234 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, relatif au mécénat, aux associations et aux fondations.

Rappelant le contexte dans lequel s'insérait cette initiative du gouvernement, M. Yann Gaillard, rapporteur, a rappelé les éléments chiffrés constitutifs d'un certain retard français en matière de mécénat : les quelque centaines de fondations reconnues d'utilité publique françaises pesaient peu au regard des 12.000 fondations américaines, des 3.000 « charity trust » britanniques et des 2.000 fondations allemandes.

Puis il a insisté sur les caractéristiques du projet de loi que sont la simplicité et la généralité des mécanismes fiscaux mis en place pour stimuler le mécénat et la générosité publique en général.

D'une part, le champ ouvert par le texte était très vaste, puisqu'il couvrait non seulement les activités à caractère culturel mais également toutes celles présentant le caractère d'oeuvres de bienfaisance, étant précisé que l'organisme bénéficiaire devait avoir un caractère d'intérêt général, c'est-à-dire qu'il ne devait pas agir au bénéfice d'un cercle restreint de personnes et ne comporter aucune contrepartie directe pour le donateur.

D'autre part, le rapporteur a évoqué les grandes lignes des mécanismes fiscaux prévus par le projet de loi tant pour les particuliers que pour les entreprises :

- le taux de la réduction d'impôt sur le revenu, dont bénéficiaient les dons aux organismes d'intérêt général, était porté à 60 % pour toutes les catégories d'organismes quel que soit leur objet social ; le plafond des dons en pourcentage du revenu imposable passait de 10 % à 20 %, tandis que les dépassements étaient reportables sur les quatre exercices suivants, ce qui avait pour conséquence de permettre à une personne de déduire un don égal à son revenu imposable sur une période de cinq ans ;

- le régime du mécénat d'entreprise était profondément transformé par la substitution au système actuel de déduction de charges du résultat imposable, d'un mécanisme de réduction d'impôt de 60 %, soit le même taux que celui applicable aux particuliers. Parallèlement, le plafond des déductibilités était unifié et porté à 5 %o avec une possibilité de report des excédents sur les quatre exercices suivants.

M. Yann Gaillard, rapporteur, a ensuite évoqué les autres sujets abordés par le texte notamment en matière de régime fiscal des fondations et associations reconnues d'utilité publique, ainsi que des organismes d'aide aux personnes en difficulté dont la spécificité ne lui semblait pas suffisamment reconnue dans le droit existant.

Après avoir évoqué les apports de l'Assemblée nationale, notamment pour renforcer tant la sécurité juridique des organismes d'intérêt général que pour assurer un meilleur contrôle de la dépense fiscale, il a présenté les grandes lignes des amendements qu'il avait l'intention de soumettre à la commission. Ceux-ci s'efforcaient de répondre à trois soucis :

- la définition d'un juste équilibre entre la nécessité d'un contrôle de l'emploi des dons et la liberté d'association et de fondation ;

- l'accentuation de la spécificité des régimes fiscaux des fondations reconnues d'utilité publique et des organismes d'aide aux personnes en difficulté ;

- l'assouplissement du régime fiscal des achats d'art contemporain par les entreprises.

Il a conclu son intervention en soulignant l'importance du projet de loi du point de vue de la baisse des prélèvements obligatoires entreprise courageusement par le gouvernement en dépit d'une conjoncture économique et financière difficile.

M. Philippe Marini, rapporteur général, est alors intervenu pour regretter que le projet de loi n'aille pas aussi loin qu'il eût été souhaitable dans la définition d'un cadre législatif de nature à favoriser le développement des fondations ; il s'est inquiété, en outre, du régime fiscal applicable en cas de dons d'un monument historique à l'Etat ou à un organisme d'intérêt général.

Un large débat a alors eu lieu au cours duquel sont intervenus MM. Jean Arthuis, président, Gérard Miquel, François Trucy, Claude Belot, Aymeri de Montesquiou, Paul Loridant, yyves Fréville et Yann Gaillard, rapporteur , et où ont notamment été évoquées les questions de transparence fiscale et de suivi des dons par les organismes de contrôle, de dons d'oeuvres d'art et de monuments historiques, ainsi que du choix entre les systèmes de la réduction ou du crédit d'impôt.

Puis la commission a procédé à l'examen des articles.

A l'article premier , la commission a adopté, sur proposition du rapporteur, trois amendements :

- le premier, à caractère essentiellement rédactionnel, tendant à prévoir que les organismes d'intérêt général pouvaient concourir non seulement à la mise en valeur du patrimoine artistique mais aussi à un encouragement à la création contemporaine ;

- le second disposant que les organismes d'aide aux personnes en difficulté pouvaient bénéficier d'un plafond spécifique de 25 % en pourcentage du revenu imposable ;

- le troisième procédant à une nouvelle rédaction de la procédure de « rescrit » introduite par l'Assemblée nationale pour permettre aux associations qui le désiraient, de savoir si elles rentraient dans le champ d'application de l'article 200 du code général des impôts.

A l'article premier ter , la commission a adopté un amendement prévoyant que certains organismes et notamment ceux bénéficiant de dons ouvrant droit à un avantage fiscal devaient assurer la publicité et la certification de leurs comptes annuels dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, lorsque les dons qu'ils recevaient étaient supérieurs à un montant fixé par décret.

A l'article 2 , la commission a adopté un amendement exonérant les fondations reconnues d'utilité publique d'impôt sur les sociétés pour la part de leurs revenus actuellement soumis au taux privilégié de 24 % et de 10 %.

A l'article 3 , la commission a adopté deux amendements :

- le premier de nature purement rédactionnelle reprenant la mention de la création contemporaine déjà évoquée au niveau du régime fiscal des entreprises ;

- le second tendant à assouplir les obligations d'exposition au public des oeuvres originales d'artistes vivants en réduisant la durée de cette obligation à la période d'amortissement de l'oeuvre.

A l'article 4 , la commission a élargi aux dons en nature, et non plus seulement aux versements en espèces, le bénéfice de l'exonération de droits de mutation dont pouvaient bénéficier les héritiers, donataires ou légataires, donnant à des oeuvres d'intérêt général une fraction des biens qu'ils recevaient en héritage.

A l'article 7 , la commission a adopté un amendement prévoyant que les organismes bénéficiaires de dons ouvrant droit à un avantage fiscal étaient soumis au contrôle de l'inspection générale des finances et à l'inspection générale des ministères techniques dans leur champ de compétences respectif.

A l'issue d'un ultime échange de vues, la commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

* 1 C'est seulement dans le cas où la loi n'impose pas à un organisme de nommer un commissaire aux comptes qu'il est possible de désigner une autre personne qu'un commissaire aux comptes inscrit qui, sous un autre titre, effectuera contractuellement une mission particulière définie par les statuts ou par un autre organe de l'association. On note que ce commissaire aux comptes est désigné pour six exercices et reste en fonction même si les conditions ayant déclenché sa nomination, ne sont plus satisfaites par ailleurs.

* 2 L'inspection générale des finances en application d'une ordonnance du 23 septembre 1958 et des comptables supérieurs du Trésor en application de la loi du 12 avril 1996. Ces mêmes organismes sont soumis au contrôle spécifique de l'inspection générale de l'administration du ministère de l'intérieur, ou des inspections générales ministérielles et notamment de l'inspection générale des affaires sociales.

* 3 Faudra-t-il appliquer le tarif -dont la commission des finances a maintes fois souligné le caractère obsolète- de l'article 762 du code général des impôts ? Quelle que soit la réponse apportée à cette question, il paraît logique de ne retenir que la valeur « économique » du bien considéré, en tenant donc compte de la réserve d'usufruit.

* 4 Le taux de 90 % applicable aux versements effectués par les entreprises pour permettre l'achat par l'État de Trésors nationaux, évoqué fréquemment pour justifier des demandes d'augmentation du niveau de la réduction, ne doit pas, selon votre rapporteur, être considéré comme correspondant à une réduction d'impôt mais plutôt, si ce n'est comme une sorte de dation en paiement d'impôt sur les sociétés, du moins comme un paiement affecté de l'impôt, combiné avec une action de mécénat d'une entreprise.

D'un côté, c'est bien l'Etat qui a décidé de l'achat, et c'est lui qui paye. Simplement, au lieu d'inscrire les crédits au budget du ministère de la culture, il accepte une moins-value de recettes qui a le grand avantage de ne pas comporter « d'effet de cliquet » ; de même, si les crédits, étaient mis en réserve « au cas où », la tentation serait grande de les utiliser.

De l'autre, une entreprise peut mener une action de mécénat particulièrement visible, dans laquelle l'avantage diffus de notoriété et d'image citoyenne passe par un effort financier égal à 10 % de la valeur de l'oeuvre.

* 5 Article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 :

« Les budgets et les comptes des autorités administratives mentionnées à l'article 1er et dotées de la personnalité morale sont communicables à toute personne qui en fait la demande, dans les conditions prévues par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée.

La communication de ces documents peut être obtenue tant auprès de l'autorité administrative concernée que de celles qui les détiennent.

L'autorité administrative qui attribue une subvention doit, lorsque cette subvention dépasse un seuil défini par décret, conclure une convention avec l'organisme de droit privé qui en bénéficie, définissant l'objet, le montant et les conditions d'utilisation de la subvention attribuée.

Lorsque la subvention est affectée à une dépense déterminée, l'organisme de droit privé bénéficiaire doit produire un compte rendu financier qui atteste de la conformité des dépenses effectuées à l'objet de la subvention. Le compte rendu financier est déposé auprès de l'autorité administrative qui a versé la subvention dans les six mois suivant la fin de l'exercice pour lequel elle a été attribuée.

Le budget et les comptes de tout organisme de droit privé ayant reçu une subvention, la convention prévue au présent article et le compte rendu financier de la subvention doivent être communiqués à toute personne qui en fait la demande par l'autorité administrative ayant attribué la subvention ou celles qui les détiennent, dans les conditions prévues par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée.

Les organismes de droit privé ayant reçu annuellement de l'ensemble des autorités administratives une subvention supérieure à un montant fixé par décret doivent déposer à la préfecture du département où se trouve leur siège social leur budget, leurs comptes, les conventions prévues au présent article et, le cas échéant, les comptes rendus financiers des subventions reçues pour y être consultés ».

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