TITRE III :

MODERNISATION DU CONTRÔLE LÉGAL DES COMPTES ET TRANSPARENCE

CHAPITRE PREMIER :
DU CONTROLE LÉGAL DES COMPTES
ARTICLE 60 A (nouveau)

Conditions de nomination d'un commissaire à la transformation

Commentaire : le présent article a pour objet de clarifier les conditions de nomination des commissaires à la transformation en cas de changement de forme d'une société.

I. LE DROIT EXISTANT

Avant l'intervention de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, la doctrine s'était interrogée sur le point de savoir si la transformation en société par actions simplifiée (SAS) d'une société d'une autre forme nécessitait l'intervention d'un commissaire à la transformation.

En effet, l'article 72 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales disposait qu' « en cas de transformation en société anonyme d'une société d'une autre forme, un ou plusieurs commissaires à la transformation, chargés d'apprécier sous leur responsabilité la valeur des biens composant l'actif social et les avantages particuliers, sont désignés, sauf accord unanime des associés, par décision de justice à la demande des dirigeants sociaux ou de l'un d'entre eux ».

Dans un arrêt du 26 mai 2000, la cour d'appel de Paris avait estimé que l'article 72-1 de la loi du 24 juillet 1966 visait la transformation en société anonyme d'une société d'une autre forme et non sa transformation en sociétés par actions, donc par exemple en société par actions simplifiée ou en société en commandite par actions.

Pour remédier à cette situation, l'article 100 de la loi relative aux nouvelles régulations économiques a donc modifié l'article 72 de la loi n°66-537 du 24 juillet 1966, devenu l'article L. 224-3 du code de commerce . Cet article prévoit désormais qu'en cas de transformation « en une des formes de sociétés par actions d'une société d'une autre forme », un ou plusieurs commissaires à la transformation sont désignés.

II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

Le présent article, adopté à l'initiative de notre collègue député Jean de Gaulle, sans avis du gouvernement, a pour objet dans son 1° de procéder à une nouvelle rédaction de l'article L. 224-3 du code de commerce en substituant à l'expression actuelle de transformation « en une des formes de société par actions d'une société d'une autre forme », l'expression de transformation « d'une société en l'une des formes de société par actions ».

Il s'agit que toute société, quelle soit ou non une société par actions, qui se transforme en une autre société par actions, nomme un commissaire à la transformation.

Dans son 2°, le présent article propose de créer, pour les transformations intervenues avant la date de promulgation de la présente loi, une procédure de régularisation des transformations irrégulières par décision de l'assemblée générale prise aux conditions de majorité requise pour voter la transformation.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. DES DIFFICULTÉS D'INTERPRÉTATION DU TEXTE DE LOI

Votre commission des finances constate que, malgré les efforts du législateur pour clarifier la procédure de transformation des sociétés, des doutes ont encore conduit à proposer une nouvelle rédaction de l'article L. 224-3 du code de commerce.

Ces doutes sont nés d'une divergence entre l'intention du législateur et l'application du texte de loi.

En effet, dans la loi relative aux nouvelles régulations économiques, le législateur souhaitait régler les cas d'une société autre qu'une société par actions se transformant en société par actions, qu'elle soit société anonyme, société par actions simplifiée ou société en commandite par actions.

Or, en réponse à une question de notre collègue Paul Loridant 38 ( * ) , le garde des sceaux a indiqué que, suite au vote de la loi relative aux nouvelles régulations économiques, la désignation d'un commissaire à la transformation était également nécessaire dans le cas d'une transformation d'une société par actions en une société par actions d'une autre forme (ex : SA en SAS).

Le 1° du présent article a donc pour objet de modifier une nouvelle fois l'article 224-3 du code de commerce afin de se conformer à cette interprétation.

Par ailleurs, d'après des informations publiées dans la presse spécialisée, depuis la publication de la loi relative aux nouvelles régulations économiques, de nombreuses transformations de SA en SAS ont eu lieu sans qu'un commissaire à la transformation soit désigné.

Or, le défaut de nomination et de rapport du commissaire à la transformation sur l'évaluation des biens et l'octroi des avantages particuliers entraîne la nullité de la transformation, qui peut être demandée par toute personne justifiant d'un intérêt légitime en application de l'article 31 du nouveau code de procédure civile, c'est-à-dire tout actionnaire ou créancier.

Ainsi, le 2° procède-t-il à une régularisation des transformations intervenues avant la promulgation de la présente loi.

B. FIXER UNE RÈGLE SIMPLE

Votre commission des finances estime qu'il n'est pas opportun de modifier à plusieurs reprises le code de commerce concernant la nomination des commissaires à la transformation, sans s'interroger sur les raisons de leurs nominations.

Afin de mettre une fois pour toutes un terme au débat sur la nécessité, ou non, de nommer un commissaire à la transformation, votre commission des finances vous propose de revenir à un principe simple : dans la mesure où les sociétés qui ont un commissaire aux comptes bénéficient déjà d'un rapport de celui-ci sur la transformation, et que la pratique montre que le commissaire aux comptes est souvent nommé commissaire à la transformation, il apparaît que l'utilité de ce dernier n'est réelle que lorsque la société qui prend la décision de se transformer en société par actions n'a pas de commissaire aux comptes .

En conséquence, votre commission des finances vous soumet un amendement tendant à préciser que le commissaire à la transformation ne sera nécessaire que pour les sociétés ne disposant pas, avant leur transformation, de commissaire aux comptes.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 61

Création d'une division regroupant les dispositions relatives au contrôle et à l'organisation de la profession

Commentaire : le présent article a pour objet d'ajouter au titre deuxième du livre VIII du code de commerce des dispositions concernant le contrôle et l'organisation de la profession des commissaires aux comptes sous la forme d'un nouveau chapitre.

I. LE VOTE DU SÉNAT EN PREMIERE LECTURE

En première lecture, le Sénat a :

- clarifié les missions du Haut conseil , en adoptant une nouvelle rédaction de l'article L. 821-1 du code de commerce qui distingue mieux ses missions générales (surveillance, respect de la déontologie, etc.) et ses attributions précises (programmes de contrôle, avis sur les normes d'exercice professionnel, inscription, etc.) qui sont simplement la déclinaison des missions précitées ;

- fixé dans la loi la durée du mandat des membres du Haut conseil, en précisant que les membres du Haut conseil sont nommés pour six ans renouvelables et renouvelés par moitié tous les trois ans ;

- supprimé l'existence de suppléants au Haut conseil, afin d'asseoir son autorité ;

- précisé que le Haut conseil mettrait en place des commissions consultatives « spécialisées » afin qu'elles soient permanentes et garantissent la qualité de l'expertise du Haut conseil dans des domaines très spécifiques et pour lesquels un haut niveau de technicité est requis ;

- adopté un amendement visant à s'assurer que, en cas de projet de regroupement des compagnies régionales de commissaires aux comptes, celles-ci seront automatiquement consultées ;

- ajouté la Commission bancaire et la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance aux organes auxquels le garde des sceaux peut faire appel dans le cadre des inspections ;

- précisé les personnes qui peuvent intervenir lors des inspections diligentées par l'AMF. Il s'agit de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes et des personnes et autorités qui peuvent prêter leur concours à l'AMF en vertu de l'article L. 621-9-2 du code monétaire et financier (corps de contrôle extérieur, commissaires aux comptes, experts judiciaires, personnes ou autorités compétentes) ;

- précisé que les contrôles menés par les compagnies régionales ont lieu, le cas échéant, avec le concours de magistrats des chambres régionales des comptes ou de l'ordre judiciaire . Ainsi, le concours des magistrats ne sera pas systématique ;

- encadré la possibilité offerte au garde des sceaux de prononcer la suspension temporaire d'un commissaire aux comptes .

Les faits reprochés doivent apparaître de nature à justifier des sanctions pénales ou disciplinaires et le commissaire aux comptes suspendu est nécessairement une personne physique. Il s'agit ainsi d'indiquer que tous les collaborateurs d'une personne morale ne sont pas suspendus du seul fait que l'un d'entre eux fait l'objet d'une mesure de suspension.

Il est également prévu que le garde des sceaux peut prononcer la suspension provisoire « dès l'engagement des poursuites » et que le président de l'Autorité des marchés financiers et le président de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes peuvent le saisir à cet effet.

Le garde des sceaux peut mettre fin à la suspension provisoire de sa propre initiative, à la demande de l'intéressé, du président de l'AMF ou du président de la compagnie nationale. La suspension provisoire cesse de plein droit dès que les actions pénale et disciplinaire sont éteintes.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements au présent article.

A l'initiative de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a adopté cinq amendements rédactionnels dont l'un ôte au Haut Conseil la mission de définir les bonnes pratiques professionnelles, mais lui donne compétence pour les identifier et les promouvoir.

Par sous-amendement de la commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté, contre l'avis du gouvernement, une disposition précisant qu'au lieu « d'organiser » les contrôles périodiques visés à l'article L. 821-7, le Haut conseil était chargé de « définir les orientations et le cadre des contrôles périodiques prévus à l'article L. 821-7 et d'en superviser la mise en oeuvre et le suivi dans les conditions définies par l'article L. 821-9 ».

Le garde des sceaux a fait valoir que le Haut Conseil ne sera pas «équipé» pour aller aussi loin dans le contrôle et qu'il serait ennuyeux de le charger par la loi d'une mission qu'il ne pourrait pas assurer.

Notre collègue député François Goulard, rapporteur au nom de la commission des finances, a fait valoir que dans son esprit il n'était pas question que le Haut Conseil « refasse » le travail de contrôle qui relève soit de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes, soit des compagnies régionales mais qu'il s'agissait d'un suivi des contrôles, par exemple au sens statistique du terme, afin de s'assurer que les organes chargés du contrôle font bien leur travail.

A l'article L. 821-3, à l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel et ajouté que les décisions du Haut conseil étaient prises à la majorité des voix ; en cas de partage égal des voix, la voix du président étant prépondérante. Le gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.

A l'article L. 821-9, à l'initiative de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel avec un sous-amendement de sa commission des finances, supprimant la faculté de faire appel aux magistrats des chambres régionales des comptes ou de l'ordre judiciaire pour les contrôles périodiques . Le gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.

A l'initiative de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a modifié l'article L. 821-10 concernant la suspension temporaire des commissaires aux comptes . Il a rendu cette suspension possible avant même l'engagement des poursuites, tout en fixant comme condition l'urgence et l'intérêt public, et en précisant que l'intéressé aura été en mesure de présenter ses observations. Il a également ajouté que la suspension provisoire cessait de plein droit lorsqu'aucune poursuite pénale ou disciplinaire n'était engagée dans un délai de quatre mois.

A l'article L. 821-11, à l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

S'agissant des « bonnes pratiques professionnelles », votre commission des finances avait relevé, en première lecture, la difficulté de distinguer ce qui relevait de la compétence de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes et de la compétence du Haut conseil. La mention de « l'identification » et de la « promotion » des bonnes pratiques professionnelles ne résout pas entièrement cette question, mais y contribue.

Concernant la supervision et le suivi des contrôles périodiques , votre commission note que le rapporteur de la commission des finances avait pour principal objectif que le Haut conseil puisse être informé de manière continue des contrôles en cours. Compte tenu de cette interprétation, elle vous propose de conserver la nouvelle rédaction de l'Assemblée nationale.

S'agissant de la précision selon laquelle les décisions du Haut conseil sont prises à la majorité des voix avec voix prépondérante du Président , votre commission s'interroge sur la nécessité d'inscrire dans la loi une précision qui lui paraît davantage de portée réglementaire.

Concernant la faculté de faire appel aux magistrats des chambres régionales des comptes ou de l'ordre judiciaire pour les contrôles périodiques, votre commission rappelle que le Sénat avait déjà, en première lecture, remplacé une obligation de prêter concours en simple faculté. Cette modification lui semblait de nature à répondre aux inquiétudes tout en laissant une certaine souplesse aux contrôles. Elle n'est toutefois pas opposée, dans un souci de clarté, et en l'absence de précisions sur les modalités réelles de concours des magistrats, à la suppression complète de ces dispositions.

Enfin, pour la suspension provisoire des commissaires aux comptes, votre commission des finances vous soumet un amendement proposant de revenir pour partie à la rédaction adoptée en première lecture au Sénat à l'initiative de sa commission des lois. Celle-ci avait souhaité que la suspension du commissaire aux comptes ne puisse intervenir qu'à compter de l'engagement des poursuites pénales ou disciplinaires.

En effet, la suspension provisoire d'un professionnel a, pour l'ensemble des professions, lieu après l'engagement des poursuites pénales ou disciplinaires, sauf pour les notaires, mais dans ce cas, il faut que des éléments précis aient été découverts à l'occasion d'inspections, et la suspension provisoire est prononcée par le tribunal de grande instance.

Aux termes de l'article 32 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels, tout officier public ou ministériel qui fait l'objet d'une poursuite pénale ou disciplinaire peut se voir suspendre provisoirement l'exercice de ses fonctions. En cas d'urgence, la suspension provisoire peut être prononcée, même avant l'exercice des poursuites pénales ou disciplinaires, si des inscriptions ou vérifications ont laissé apparaître des risques pour les fonds, effets ou valeurs qui sont confiés à l'officier public ou ministériel à raison de ses fonctions.

Aux termes de l'article 33 de la même ordonnance, la suspension provisoire est prononcée par le tribunal de grande instance à la requête soit du procureur de la République, soit du président de la chambre de discipline agissant au nom de celle-ci.

Dans le cas des commissaires aux comptes, aucune précision n'est apportée sur les cas dans lesquels la suspension temporaire pourrait être décidée, et cette suspension sera décidée par le seul garde des sceaux . Il s'agit d'une décision particulièrement lourde pour le commissaire aux comptes concerné. Il est préférable que la suspension puisse être prononcée en même temps que l'engagement des poursuites pénales ou disciplinaires, lorsque l'urgence et l'intérêt public le justifient, et après que le commissaire aux comptes ait pu présenter ses observations. Votre commission des finances vous soumet un amendement en ce sens.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 64

Dispositions relatives à l'inscription et à la discipline

Commentaire : le présent article a pour objet de détailler les dispositions relatives à l'inscription et à la discipline des commissaires aux comptes, qui font l'objet de deux sous-sections au sein de la section I du chapitre II du titre deuxième du livre VIII du code de commerce.

En première lecture, le Sénat a adopté quatre amendements sur proposition de sa commission des lois :

- un amendement consistait à modifier la composition des commissions régionales et à préciser la durée du mandat de leurs membres. Deux sous-amendements de nos collègues François Zochetto et Jacques Oudin ont par ailleurs, pour le premier élargi le champ de compétence des personnes qualifiées, en faisant référence à des qualifications juridiques, et pour le second rétabli l'existence des suppléants dans les commissions régionales ;

- deux amendements consistaient à supprimer des énumérations non exhaustives (suppression de l'adverbe « notamment ») ;

- enfin, le dernier amendement corrigeait une mention erronée.

L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de sa commission des finances, deux amendements rédactionnels et un amendement précisant que les décisions des commissions régionales étaient prises à la majorité des voix, avec voix prépondérante du président. Sur ce dernier point, le gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 65

Dispositions tendant à prévenir les conflits d'intérêts

Commentaire : le présent article a pour objet de compléter les dispositions du code de commerce relatives à la déontologie et à l'indépendance des commissaires aux comptes.

I. LE VOTE DU SÉNAT EN PREMIERE LECTURE

Les amendements adoptés par le Sénat visaient à :

- remplacer l'interdiction « d'une prestation de services, notamment sous forme de conseil, d'avis ou de recommandation » et « d'une prestation de service, notamment sous forme de conseil » par la formule générale selon laquelle « tout conseil ou toute autre prestation de service » n'entrant pas dans les diligences directement liées à la mission de certification, sera interdite. Il s'agissait de poser le principe général dans la loi, sans l'illustrer d'une manière non exhaustive, au risque d'oublier certaines missions ;

- préciser que, s'agissant des réseaux, l'appréciation du Haut conseil ne portera pas sur les diligences directement liées à la certification des comptes mais sur les prestations directement liées à la mission de certification, puisqu'il s'agira en l'occurrence de traiter la question des prestations fournies par des membres du réseau non commissaires aux comptes ;

- renforcer les modalités de séparation de l'audit et du conseil, en interdisant les prestations de services réalisées par les membres d'un réseau de commissaires aux comptes auprès des sociétés mère ou filiales de l'entreprise dont les comptes sont certifiés par un membre du réseau.

En effet, votre commission des finances a considéré que si le présent article posait un principe d'interdiction pour les prestations de service fournies par le réseau à l'égard de la société dont les comptes sont certifiés, il renvoyait au code de déontologie pour « prendre en compte » dans des conditions vagues les prestations de services fournies par un réseau aux sociétés mère ou filiales de l'entreprise qui fait l'objet de la certification. Or, ces prestations de services, réalisées au niveau du groupe, peuvent être significatives et obérer ainsi l'indépendance du commissaire aux comptes.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES A L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de sa commission des lois et de notre collègue député Jean de Gaulle, l'Assemblée nationale a adopté un amendement ouvrant la possibilité pour le commissaire aux comptes d'exercer ses fonctions dans plusieurs sociétés simultanément si ces dernières sont liées par des liens capitalistiques à hauteur de 50 % ou si elles ont des associés communs pour la moitié d'entre eux. Il s'agit de faciliter la rotation des associés signataires, surtout dans les cabinets de taille réduite, en permettant à un commissaire aux comptes d'exercer ses fonctions dans plusieurs sociétés dès lors que celles-ci sont liées par des liens capitalistiques.

Elle a également adopté un amendement rédactionnel à l'article L. 822-11 du code de commerce à l'initiative de sa commission des lois.

A l'initiative de sa commission des lois, elle a supprimé l'interdiction stricte de cumul de l'audit et du conseil pour les réseaux de commissaires aux comptes (à la fois dans la société mère et dans les filiales) introduite par le Sénat, et l'a remplacé par la disposition selon laquelle le code de déontologie « précise en particulier les situations dans lesquelles l'indépendance du commissaire aux comptes est affectée, lorsqu'il appartient à un réseau pluridisciplinaire, national ou international, dont les membres ont un intérêt économique commun, par la fourniture d'une prestation de services à une personnes contrôlée ou qui contrôle, au sens des I et II de l'article L. 233-3, la personne dont les comptes sont certifiés par ledit commissaire aux comptes ».

Dans son rapport au nom de la commission des finances, notre collègue député François Goulard avait estimé que la mesure adoptée par le Sénat paraissait inapplicable, « en particulier dans le contexte actuel de concentration de la profession qui compte désormais seulement quatre grands réseaux de taille internationale. Une société ne pourra choisir un commissaire aux comptes membre du même réseau que le prestataire de services auquel a recours une de ses filiales. Par conséquent, si cette société possède quatre filiales faisant appel à des prestations de services auprès des quatre réseaux internationaux, elle ne pourra plus faire appel à un commissaire aux comptes membre d'un des quatre grands réseaux, ce qui restreint dangereusement, voire rend impossible, son choix. Ce système obligera par ailleurs les sociétés à mettre en place un système de centralisation de l'information concernant les prestataires de services et les commissaires aux comptes auxquels font appel toutes les entités du groupe, ce qui entraînera de nouvelles lourdeurs administratives ».

A l'initiative de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a apporté une précision sur la notion de réseau en ajoutant la notion d'« intérêt économique commun ».

A l'initiative de sa commission des finances, avec un sous-amendement de la commission des lois, l'Assemblée nationale a ajouté que le code de déontologie « précise également les restrictions à apporter à la détention d'intérêts financiers par les salariés et collaborateurs du commissaire aux comptes dans les sociétés dont les comptes sont certifiés par celui-ci ».

Enfin, à l'initiative du rapporteur au nom de la commission des finances et de nos collègues députés Jean de Gaulle et Eric Woerth, avec un sous-amendement de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a allégé les dispositions relatives à la nomination des commissaires aux comptes comme dirigeants de personnes morales dont ils ont certifié les comptes. L'interdiction ne vise plus que les seuls commissaires aux comptes et membres signataires, et concerne les fonctions de dirigeant mais aussi de salarié.

Tous les amendements adoptés par l'Assemblée nationale ont reçu un avis favorable du gouvernement.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LA QUESTION DE LA SÉPARATION DE L'AUDIT ET DU CONSEIL

En première lecture, votre commission des finances a souhaité, en proposant au Sénat qui l'a adoptée, une nouvelle rédaction pour la séparation de l'audit et du conseil appliquée aux réseaux de commissaires aux comptes, mettre l'accent sur la nécessité de prendre en compte l'existence de comptes consolidés dans les entreprises .

Il lui est apparu en effet totalement inutile d'afficher une séparation entre la certification des comptes et les autres prestations comme le conseil, sans prendre en compte le fait que les grands réseaux de commissaires aux comptes interviennent auprès de groupes de sociétés.

En effet, contrairement à l'interdiction pesant sur le commissaire aux comptes d'une société, qui s'étendait à toute prestation de service au sein du groupe (mère et filiales), l'interdiction posée par le présent article ne portait pour les réseaux de commissaires aux comptes que sur l'entreprise elle-même et non sur le groupe auquel elle appartenait.

Ainsi, une société de commissaires aux comptes pouvait certifier les comptes d'une entreprise dont une ou plusieurs filiales recevaient par ailleurs d'importantes prestations de conseils d'un membre de son réseau.

Votre commission des finances estimait qu'il n'était pas suffisant que le code de déontologie « prenne en compte » ces éléments . Il convenait d'être plus directif. Elle avait donc proposé une interdiction forte, étendue aux réseaux, avec évidemment pour intention que l'interdiction porte sur les seules prestations de services significatives.

L'Assemblée nationale a souhaité en revenir au code de déontologie de la profession, tout en modifiant la rédaction proposée par le gouvernement. Le code de déontologie « précise en particulier les situations dans lesquelles l'indépendance du commissaire aux comptes est affectée , lorsqu'il appartient à un réseau pluridisciplinaire, national ou international ».

Cette nouvelle rédaction « va dans le bon sens » dans la mesure où elle indique précisément que, dans certaines situations, à définir par le code de déontologie, l'indépendance du commissaire aux comptes serait affectée. Il importe ensuite que le Haut conseil fasse pleinement respecter ces règles de déontologie.

Par ailleurs, en complément de cette disposition, l'Assemblée nationale a modifié l'article 68 du présent projet de loi pour prévoir une obligation pour le commissaire aux comptes d'informer par écrit la personne dont il se propose de certifier les comptes de son affiliation à un réseau, national ou international , et, le cas échéant, du montant global des honoraires perçus par ce réseau au titre des prestations réalisées auprès des sociétés mère ou filiales de la société dont il se propose de certifier les comptes, lorsque ces prestations ne sont pas directement liées à la mission de commissaires aux comptes.

Ces informations sont intégrées aux documents mis à la disposition des actionnaires en application de l'article L. 225-108.

Elles sont actualisées chaque année par le commissaire aux comptes et mises à disposition, au siège de la personne dont il certifie les comptes, des associés et actionnaires, et pour les associations, des adhérents et donateurs.

Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale, dans sa globalité, constitue une solution satisfaisante pour prendre en compte les prestations de services effectuées par les réseaux de commissaires aux comptes. Son application dépendra bien entendu de la manière dont le Haut conseil pourra détecter et, le cas échéant, sanctionner, les abus.

B. LES AUTRES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

Les apports de l'Assemblée nationale constituent une souplesse pour l'exercice du commissariat aux comptes, s'agissant tant de l'exercice simultané dans plusieurs sociétés que de la nomination des commissaires aux comptes comme dirigeants d'entreprises.

Votre commission des finances vous propose toutefois, par un amendement , une nouvelle rédaction de l'article L. 822-12 du code de commerce, tant pour corriger une erreur matérielle que pour permettre d'appliquer de nouvelles dispositions en matière de nomination des commissaires aux comptes dans les entreprises dont ils ont certifié les comptes.

En effet, le texte initial du gouvernement prévoyait, au deuxième alinéa de l'article L. 822-12 du code de commerce, que ne peuvent exercer les fonctions de dirigeants dans les personnes morales possédant au moins 10 % du capital de la personne morale contrôlée par eux ou dont celle-ci possède au moins 10 % du capital lors de la cessation des fonctions du commissaire. Le rapporteur au nom de la commission des finances proposait d'assouplir légèrement ce dispositif en précisant qu'ils ne pouvaient exercer les mêmes fonctions dans une personne morale contrôlée ou qui contrôle au sens des I et II de l'article L. 233-3 la personne morale dont ils ont certifié les comptes. Au lieu d'adopter cet assouplissement, l'Assemblée nationale, par le jeu de divers sous-amendements, a supprimé toute disposition.

Il vous est donc proposé de rétablir le second alinéa de l'article L. 822-12 dans la rédaction proposée initialement par la commission des finances de l'Assemblée nationale.

Par ailleurs, les nouvelles dispositions de transparence introduites au présent article par l'Assemblée nationale, en particulier la disposition selon laquelle le code de déontologie « précise également les restrictions à apporter à la détention d'intérêts financiers par les salariés et collaborateurs du commissaire aux comptes dans les sociétés dont les comptes sont certifiés par celui-ci » sont tout à fait opportunes.

Votre commission des finances vous propose toutefois un amendement tendant à modifier l'insertion de cette disposition pour la rattacher clairement au code de déontologie.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 66

Procédure de désignation des commissaires aux comptes et modification de l'organisation du co-commissariat

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser les modalités de désignation des commissaires aux comptes d'une société anonyme et de modifier l'organisation du co-commissariat aux comptes.

I. LE VOTE DU SÉNAT EN PREMIERE LECTURE

Le Sénat a adopté, à l'initiative de votre commission des finances, un amendement supprimant l'interdiction, pour les administrateurs salariés de voter pour le choix du commissaire aux comptes soumis à la désignation de l'assemblée générale des actionnaires.

Cette suppression a été réalisée au motif que le conseil d'administration devait avoir une responsabilité collégiale, c'est-à-dire répondre en son entier des décisions qu'il prend, et pour cela il ne devait évidemment pas être fait de distinction entre les membres du conseil d'administration, dont certains seraient considérés a priori comme suspects.

Le Sénat a également adopté deux amendements de précision.

- l'un visant à s'assurer que le projet de résolution émanant des actionnaires pour la désignation du commissaire aux comptes se conformera aux dispositions en vigueur notamment à l'article L. 225-105 du code de commerce : le projet de résolution ne peut être déposé que par un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital, ou par une association d'actionnaires agréée etc. ;

- l'autre pour préciser que, pour l'application de la règle de la non-coïncidence des mandats de commissaires aux comptes (« tuilage »), les dérogations joueront seulement pour réduire la durée du mandat des commissaires aux comptes, c'est-à-dire dans la limite de six exercices.

Le Sénat a adopté un amendement pour poser le principe d'un co-commissariat « équilibré » pour les sociétés astreintes à publier des comptes consolidés.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a tout d'abord, à l'initiative de sa commission des finances, supprimé le « tuilage » en estimant que cette nouvelle disposition risquait d'avoir pour conséquence de favoriser les gros cabinets au détriment des cabinets de petite taille, sans nécessairement assurer l'effectivité du co-commissariat. Dans son rapport, la commission des finances de l'Assemblée nationale rappelle que sur les 900 sociétés cotées qui font appel public à l'épargne, une cinquantaine de mandats de second commissaire aux comptes sont détenus par des cabinets autres que les quatre plus importants réseaux.

L'Assemblée nationale a également, sur l'initiative de sa commission des lois, supprimé l'un des amendements adoptés par le Sénat, consistant à préciser que les commissaires aux comptes, dans le cadre du co-commissariat , mettent en oeuvre des moyens comparables pour se livrer ensemble à un examen contradictoire des comptes.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Concernant l'amendement adopté par l'Assemblée nationale sur le « tuilage », votre commission des finances rappelle les réserves qu'elle avait formulées dans le rapport de première lecture :

« S'agissant des dispositions relatives à la non-coïncidence des mandats de commissaires aux comptes, votre commission s'interroge sur la portée réelle de cette mesure.

En effet, le co-commissariat est un moyen efficace de prévenir les atteintes à l'indépendance dans la mission de certification des comptes et la durée des mandats (6 ans) permet souvent un approfondissement des missions.

Les nouvelles mesures, appelées familièrement « tuilage », combinées avec l'obligation de rotation du commissaire aux comptes personne physique tous les six ans, devraient conduire à des décalages dans l'information des commissaires aux comptes, le second prenant ses fonctions trois ans après le premier. Par ailleurs, cela conduira les entreprises à procéder à des appels d'offre plus fréquents. »

Il vous est donc proposé de confirmer la suppression du « tuilage » votée par l'Assemblée nationale.

Concernant ce qu'il convient d'appeler le « co-commissariat équilibré », votre commission des finances s'étonne de la manière dont la mesure que le Sénat a adoptée a été interprétée.

Lors du débat en séance publique, le rapporteur pour avis au nom de la commission des lois, notre collègue député Philippe Houillon, a déclaré qu'il supprimait ainsi « la discrimination introduite par le Sénat entre les cabinets selon leur taille ».

Il est évident que la disposition introduite par le Sénat n'avait pas cet objet. Celui-ci était très précis et mentionné dans le rapport de votre commission des finances en première lecture : le Sénat signifiait par son amendement que l'exercice d'un co-commissariat « déséquilibré » ne présenterait pas les garanties que l'on prête volontiers au modèle français de co-commissariat aux comptes. Il rappelait à cette occasion que l'article 14 du code de déontologie des commissaires aux comptes dispose que « les modalités pratiques de l'exercice collégial du commissariat aux comptes se fondent essentiellement sur une répartition équilibrée - au regard des situations de fait - du programme de travail entre les co-commissaires aux comptes et une revue réciproque des dossiers ».

Pour mettre fin aux inquiétudes de l'Assemblée nationale sur toute forme de discrimination, votre commission des finances vous soumet un amendement proposant une nouvelle rédaction, qui renverra aux normes d'exercice professionnel pour définir les principes de répartition des diligences à mettre en oeuvre par les commissaires aux comptes. Il faut rappeler que les normes d'exercice professionnel sont élaborées par la Compagnie nationale des commissaires aux comptes et homologuées par arrêté du garde des sceaux après un avis du Haut conseil. Elles pourront donc être sanctionnées par les chambres régionales de discipline et par le Haut conseil en appel.

Par ailleurs, votre commission des finances vous propose de reprendre un amendement de portée technique, présenté par la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui avait dû être retiré en séance publique malgré l'avis favorable du gouvernement, en raison de quelques imperfections rédactionnelles soulignées par le rapporteur pour avis.

Enfin, par coordination avec l'amendement de suppression qu'elle vous propose à l'article 70 du présent projet de loi, votre commission des finances vous soumet un amendement précisant que lorsque le commissaire aux comptes a vérifié, au cours des deux derniers exercices, les opérations d'apports ou de fusion de la société ou des sociétés que celle-ci contrôle au sens des I et II de l'article L. 233-16, le projet de résolution qui le soumet à la désignation des actionnaires en fait état.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 67 bis (nouveau)

Poursuite du mandat par la société absorbante d'une société de commissaire aux comptes

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser que, lorsqu'une société de commissaires aux comptes est absorbée par une autre société de commissaires aux comptes, cette dernière poursuit le mandat de la société absorbée jusqu'à son échéance.

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des lois, avec l'avis favorable du gouvernement, complète l'article L. 225-229 du code de commerce par deux alinéas :

- le premier alinéa précise que lorsqu'une société de commissaires aux comptes est absorbée par une autre société de commissaires aux comptes, cette dernière poursuit le mandat de la société absorbée jusqu'à son terme ;

- le second alinéa introduit une dérogation à ce principe : l'assemblée générale de la société qui fait l'objet du contrôle peut, lors de sa première réunion postérieure à l'absorption, délibérer sur le maintien du mandat, après avoir entendu le commissaire aux comptes.

Les dispositions du présent article permettent utilement de prendre en compte des modifications intervenues dans une société de commissaires aux comptes en cours de mandat.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 67 ter (nouveau)

Convocation obligatoire des commissaires aux comptes à certaines réunions

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser que les commissaires aux comptes sont convoqués à toutes les réunions du conseil d'administration, ou du directoire et du conseil de surveillance qui examinent ou arrêtent les comptes annuels ou intermédiaires, ainsi qu'à toutes les assemblées d'actionnaires.

L'article L. 225-238 du code de commerce dispose que les commissaires aux comptes sont convoqués à la réunion du conseil d'administration ou du directoire, selon le cas, qui arrête les comptes de l'exercice écoulé, ainsi qu'à toutes les assemblées d'actionnaires.

Le présent article, adopté à l'initiative de la commission des finances de l'Assemblée nationale, avec l'avis favorable du gouvernement, procède à une nouvelle rédaction de l'article L. 225-238 du code de commerce afin d'ajouter aux convocations obligatoires des commissaires aux comptes les convocations à toutes les réunions qui examinent ou arrêtent les comptes intermédiaires, et toutes les réunions du conseil de surveillance ayant le même objet.

Les réunions concernant les comptes en cours d'année sont essentiellement les réunions d'examen des comptes semestriels ou, le cas échéant, trimestriels pour les sociétés qui en publient. Il est très important que les commissaires soient présents pour pouvoir faire leurs observations.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 68

Information sur le montant des honoraires versés aux commissaires aux comptes

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser les modalités de mise à disposition du montant des honoraires versés à chacun des commissaires aux comptes.

En première lecture, le Sénat a adopté le présent article sans modification.

A l'initiative de sa commission des lois, avec un sous-amendement de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a complété l'article L. 820-3 du code de commerce.

La nouvelle disposition fait obligation au commissaire aux comptes d'informer par écrit la personne dont il se propose de certifier les comptes de son affiliation à un réseau, national ou international , et, le cas échéant, de l'informer du montant global des honoraires perçus par ce réseau au titre des prestations réalisées auprès des sociétés mère ou filiales de la société dont il se propose de certifier les comptes, lorsque ces prestations ne sont pas directement liées à la mission de commissaires aux comptes.

Ces informations sont intégrées aux documents mis à la disposition des actionnaires en application de l'article L. 225-108.

Elles sont actualisées chaque année par le commissaire aux comptes et mises à disposition, au siège de la personne dont il certifie les comptes, des associés et actionnaires, et pour les associations, des adhérents et donateurs.

Les modifications apportées au présent article par l'Assemblée nationale, qui viennent en complément de la nouvelle rédaction des dispositions de l'article 65 relatives aux prestations de conseil des réseaux, vont dans le sens, préconisé par le Sénat, d'une meilleure prise en compte les prestations de conseil réalisées par les réseaux de commissaires aux comptes.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 70

Incompatibilité avec le commissariat aux apports

Commentaire : le présent article a pour objet d'interdire la nomination comme commissaire aux comptes de professionnels chargés, au cours des deux derniers exercices, de vérifier les opérations d'apports ou de fusion de la société ou des sociétés que celle-ci contrôle.

En première lecture, le Sénat a adopté le présent article sans modification.

Le présent article interdit aux professionnels chargés, au cours des deux derniers exercices, de vérifier des opérations d'apports ou de fusion, de devenir commissaire aux comptes d'une société, de sa mère ou de l'une de ses filiales.

L'Assemblée nationale a souhaité revenir sur le principe d'interdiction posé par le présent article, et le remplacer par un principe d'information.

Elle a donc, à l'initiative de sa commission des finances, malgré l'avis défavorable du gouvernement, modifié la rédaction de l'article L. 225-224 du code de commerce pour disposer que lorsque les candidats au commissariat aux comptes ont vérifié, au cours des deux derniers exercices, les opérations d'apports ou de fusion de la société ou des sociétés que celle-ci contrôle au sens des II et III de l'article L. 233-16, ils sont tenus d'en faire état auprès du conseil d'administration ou du conseil de surveillance appelé à adopter un projet de résolution relatif à leur désignation par l'assemblée générale.

Votre commission des finances n'avait pas souhaité, en première lecture, remettre en cause cet article, en notant que l'idée était de favoriser le commissariat aux apports indépendant et en soulignant que la mesure ne s'appliquait qu'aux professionnels et non aux sociétés de commissaires aux comptes.

Elle est toutefois disposée à remplacer un principe d'interdiction, qui a pu paraître trop rigide, par un principe d'information .

En conséquence, elle vous soumet un amendement proposant une nouvelle rédaction, insérée à l'article 66 du présent projet de loi, aux termes de laquelle lorsque le commissaire aux comptes a vérifié, au cours des deux derniers exercices, les opérations d'apports ou de fusion de la société ou des sociétés que celle-ci contrôle au sens des I et II de l'article L. 233-16 du code de commerce, le projet de résolution qui le propose à la désignation de l'assemblée générale en fait état.

Elle vous propose donc, par coordination, un amendement au présent article abrogeant l'article L. 225-224 du code de commerce.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 72

Relations entre l'Autorité des marchés financiers et les commissaires aux comptes des personnes faisant publiquement appel à l'épargne

Commentaire : le présent article a pour objet d'introduire dans le code de commerce des dispositions relatives aux relations de l'Autorité des marchés financiers avec les commissaires aux comptes.

I. LE VOTE DU SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

Le Sénat a adopté, sur proposition de votre commission des finances, un amendement visant à préciser que les commissaires aux comptes informeront l'AMF de tout fait ou décision « de nature à entraîner » un refus de certification des comptes. S'agissant d'une décision particulièrement grave, il lui semblait logique que l'AMF soit prévenue en amont.

Votre commission des finances avait précisé qu'il ne s'agissait pas d'introduire une obligation d'informer sur les faits ou décisions susceptibles d'entraîner des réserves de la part des commissaires aux comptes, mais d'une obligation d'informer l'AMF sur les faits les plus graves qui, s'ils n'étaient corrigés, aboutiraient au refus de certification.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté une nouvelle rédaction pour la procédure d'alerte des commissaires aux comptes à l'égard de l'AMF : au lieu d'informer l'AMF de tout fait ou décision « de nature à entraîner un refus de certification des comptes », les commissaires aux comptes l'informeraient de « tout fait ou décision justifiant leur intention de refuser la certification des comptes ».

Notre collègue député François Goulard, rapporteur au nom de la commission des finances, a fait valoir que « l'AMF ne doit pas être inondée d'observations émanant des commissaires aux comptes dans le travail normal d'examen auquel ils procèdent, points qui seront réglés dans la discussion entre l'entreprise et son commissaire aux comptes. Il ne s'agit pas non plus d'adopter une rédaction si restrictive que ce devoir d'information ne sera pas respecté. Nous en sommes à un stade où les choses sont assez graves. Les commissaires aux comptes s'apprêtent à refuser la certification des comptes, ils ne l'ont pas encore fait, et c'est, à notre avis, le bon moment pour que l'AMF soit saisie d'une difficulté substantielle ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances n'est pas à même de déterminer si la rédaction de l'Assemblée nationale, aux termes de laquelle les commissaires aux comptes informent l'AMF de tout fait ou décision « justifiant leur intention de refuser la certification des comptes », apporte un réel changement à la rédaction du Sénat selon laquelle les commissaires aux comptes informent l'AMF de tout fait ou décision « de nature à entraîner un refus de certification des comptes ».

N'ayant aucun « orgueil d'auteur », elle se rallie bien volontiers à la nouvelle rédaction souhaitée par l'Assemblée nationale qui répond en tous points à ses observations.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 73

Dispositions transitoires

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser les modalités d'entrée en vigueur de certaines dispositions du présent projet de loi.

En première lecture, le Sénat a adopté un amendement rédactionnel ayant pour objet de rectifier une erreur matérielle et un amendement permettant d'assurer la continuité des travaux des commissions régionales d'inscription

L'Assemblée nationale a, sur l'initiative de sa commission des finances, contre l'avis du gouvernement, et par coordination avec la suppression du « tuilage » à l'article 66 du présent projet de loi, supprimé le I du présent article .

A l'initiative de sa commission des finances et de sa commission des lois, pour compléter les dispositions adoptées par le Sénat à l'article 61, elle a adopté un amendement précisant que lors de la première constitution du Haut conseil, la moitié de ses membres (sauf le président et le président de l'AMF) sont nommés pour trois ans selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat.

Par coordination avec sa position à l'article 66 du présent projet de loi, votre commission des finances est favorable à l'amendement de coordination supprimant le I du présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 74

Disposition balai

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser que, dans toutes les dispositions législatives et réglementaires, les références faites à la commission nationale d'inscription des commissaires aux comptes et à la chambre nationale de discipline sont remplacées par la référence au Haut conseil du commissariat aux comptes.

En première lecture, le Sénat n'a pas modifié le présent article.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement précisant que la chambre « nationale » de discipline était visée par le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 75

Disposition balai

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser que dans tous les textes législatifs et réglementaires, les références aux articles L. 225 - 219, L. 225-220, L. 225-221, L. 225-222, L. 225-223, L. 225-225 et L. 225-226 et au dernier alinéa de l'article L. 225-240 du code de commerce, sont remplacées par les références L. 822-1, L. 822-2, L. 822-5, L. 822-8, L. 822-3, L. 822-10, L. 822-11, L. 822-13.

En première lecture, le Sénat a adopté le présent article sans modification.

A l'initiative de sa commission des finances, avec l'avis favorable du gouvernement, l'Assemblée nationale a ajouté de nouvelles dispositions de coordination : dans tous les textes législatifs et réglementaires, la référence au deuxième alinéa de l'article L. 225-228 du code de commerce est remplacée par une référence au troisième alinéa de l'article L. 225-228 du même code et la référence à l'article L. 225-218 du même code par une référence à l'article L. 822-9 du même code.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

CHAPITRE II :
DE LA TRANSPARENCE DANS LES ENTREPRISES
ARTICLE 76

Information des actionnaires sur les méthodes de travail du conseil d'administration ou du conseil de surveillance

Commentaire : le présent article a pour objet d'imposer au président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance de rendre compte à l'assemblée générale des méthodes d'organisation des travaux du conseil et des procédures de contrôle interne. Le rapport mentionne également les restrictions que le conseil d'administration apporte, le cas échéant, aux pouvoirs du directeur général.

I. LE VOTE DU SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

A l'initiative de votre commission des finances, le Sénat a adopté quatre amendements :

- deux amendements pour indiquer que le président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance rendent compte des procédures de contrôle interne et de l'organisation des travaux du conseil dans un rapport joint au rapport mentionné à l'article L. 225-102 du code de commerce (il s'agit du rapport annuel de gestion) ou au rapport mentionné au dernier alinéa de l'article L. 225-68 39 ( * ) ;

- deux amendements visant à préciser que le rapport rend compte non pas des « méthodes appliquées pour organiser les travaux » du conseil  d'administration ou du conseil de surveillance mais des « conditions de préparation et d'organisation des travaux du conseil ». Il s'agit en effet d'informer les actionnaires non pas sur les méthodes mais sur la manière dont s'organisent concrètement les travaux du conseil d'administration ou du conseil de surveillance.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements précisant que le rapport sur l'organisation des travaux du conseil et sur les procédures de contrôle interne accompagne non seulement le rapport annuel mais également le rapport sur les comptes consolidés.

Elle a également adopté deux amendements rédactionnels à l'initiative de sa commission des lois concernant les pouvoirs du président du conseil d'administration.

Enfin, à l'initiative de sa commission des finances et de nos collègues députés Eric Woerth et Jean de Gaulle, avec un sous-amendement de sa commission des lois, elle a adopté la précision selon laquelle les dispositions de l'article entreront en vigueur pour les exercices comptables ouverts au 1 er janvier 2003.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 76 bis

Représentation de la société par actions simplifiée

Commentaire : le présent article, introduit par le Sénat sur l'initiative de votre commission des finances, a pour objet de permettre aux statuts de désigner comme représentant de la société par actions simplifiée (S.A.S.) une ou plusieurs personnes autres que le président.

A l'initiative de notre collègue député Jean-Michel Fourgous, et contre l'avis du gouvernement, l'Assemblée nationale a ajouté un paragraphe II au présent article selon lequel les dispositions statutaires limitant les pouvoirs du président « ou de ses représentants désignés par les statuts » sont inopposables aux tiers.

La modification introduite par l'Assemblée nationale ne semble pas cohérente.

En effet, si les dispositions statutaires limitant les pouvoirs du président ne peuvent être opposables aux tiers, il ne peut évidemment en être de même de ses représentants désignés par les statuts, dont les pouvoirs sont logiquement limités par ceux du président.

En conséquence, votre commission des finances vous propose un amendement de suppression du paragraphe II du présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 77

Amélioration de l'information des actionnaires en vue de la tenue de l'assemblée générale

Commentaire : le présent article a pour objet d'imposer une diffusion des projets de résolution des actionnaires avant leur discussion en assemblée générale et de prévoir une communication à l'assemblée générale de l'avis du comité d'entreprise dans les cas de modifications de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise.

En première lecture, le Sénat a adopté un amendement visant à préciser que les projets de résolution sont « communiqués » et non « diffusés » aux actionnaires, ce terme permettant des modes de publicité des projets de résolution plus variés qu'une « diffusion » qui pourrait être comprise comme prenant la forme obligatoire de courriers personnalisés.

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels au présent article, l'un à l'initiative de sa commission des finances et l'autre à l'initiative de sa commission des lois. Cette dernière a ainsi préféré que les projets de résolution soient « portés à la connaissance » des actionnaires plutôt que « communiqués » aux actionnaires.

Bien qu'elle n'en mesure pas toujours la portée concrète, votre commission des finances est favorable aux deux modifications rédactionnelles apportées par l'Assemblée nationale.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 78

Rapport du commissaire aux comptes sur les méthodes et procédures de contrôle interne

Commentaire : le présent article a pour objet de prévoir que les commissaires aux comptes présentent à l'assemblée générale un rapport concernant les procédures de contrôle interne relatives à l'élaboration et au traitement de l'information comptable et financière.

I. LE VOTE DU SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

Par coordination avec sa position sur l'article 76, le Sénat a adopté un amendement précisant que le rapport des commissaires aux comptes à l'assemblée générale, présentant leurs observations sur les procédures de contrôle interne et de l'organisation des travaux du conseil, en ce qui concerne l'élaboration et le traitement de l'information comptable et financière, est joint au rapport spécial qu'ils présentent déjà en vertu de l'article L. 225-100 du code de commerce.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements au présent article, l'un à l'initiative de sa commission des lois, et l'autre à l'initiative de notre collègue député Jean de Gaulle.

Le premier amendement, de portée rédactionnelle, adopté avec l'avis favorable du gouvernement, supprime la formulation selon laquelle les commissaires aux comptes « donnent toutes les observations utiles à la justification de leurs observations » et la remplace par la formulation, plus simple, « justifiant de leurs appréciations ».

Le second amendement ajoute au présent article que le rapport des commissaires aux comptes sera un rapport « spécifique » joint au rapport spécial, pour « celles des procédures de contrôle interne qui sont relatives à l'élaboration et au traitement de l'information comptable et financière ».

La commission des finances de l'Assemblée nationale, comme le gouvernement, ont estimé que cette nouvelle rédaction était inutile car la mention d'un rapport « joint » au rapport spécial des commissaires aux comptes était déjà suffisamment explicite.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances est favorable à la précision rédactionnelle adoptée à l'initiative de la commission des lois de l'Assemblée nationale, d'autant qu'elle avait critiqué la formulation choisie par le gouvernement.

Tout en conservant l'essentiel de l'amélioration rédactionnelle de notre collègue député Jean de Gaulle, elle vous propose un amendement tendant à supprimer le terme de rapport « spécifique » joint au rapport spécial des commissaires aux comptes, l'expression de « rapport joint » étant pleinement suffisante et coordonnée avec les dispositions de l'article 76 du présent projet de loi, qui traitent du rapport sur les procédures de contrôle interne joint au rapport annuel du conseil d'administration ou du conseil de surveillance.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 78 bis (nouveau)

Obligations comptables des associations recevant des subventions

Commentaire : le présent article a pour objet d'obliger toute association recevant annuellement une ou plusieurs subventions dont le montant global est fixé par décret d'établir chaque année un bilan et un compte de résultat.

L'article L. 612-4 du code de commerce dispose que toute association ayant reçu annuellement de l'Etat ou de ses établissements publics ou des collectivités locales une subvention dont le montant est fixé par décret doit établir chaque année un bilan, un compte de résultat et une annexe dont les modalités d'établissement sont précisées par décret.

Ces associations sont tenues de nommer au moins un commissaire aux comptes.

En vertu du décret n° 2001-379 du 30 avril 2001, le montant de subvention annuelle est fixé à 150.000 euros.

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des finances avec l'avis favorable du gouvernement, a pour objet de préciser que les obligations figurant à l'article 621-4 du code de commerce précité s'appliqueront aux associations recevant « une ou plusieurs » subventions dont le montant est défini par décret.

Il s'agit de prendre en compte les cas où des associations reçoivent plusieurs subventions qui, chacune étant inférieure à 150.000 euros, n'en font pas moins un montant cumulé important.

Votre commission des finances est tout à fait favorable au présent article qui répond à un objectif de transparence et de renforcement des droits des adhérents.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 79

Publicité de certains mouvements de titres concernant une personne faisant appel public à l'épargne

Commentaire : le présent article a pour objet de prévoir que les acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges de titres d'une personne faisant appel public à l'épargne, réalisées par certaines personnes physiques, sont communiquées à l'Autorité des marchés financiers et rendues publiques.

A l'initiative de votre commission des finances, le Sénat a adopté un amendement prenant en compte pour la communication à l'Autorité des marchés financiers, les transactions réalisées par les dirigeants ou mandataires sociaux sur les titres de la personne faisant appel public à l'épargne au moyen d'instruments financiers à terme .

Par ailleurs, s'agissant des personnes concernées, le Sénat a adopté un amendement selon lequel seraient concernées par la même obligation de publicité, les personnes ayant, « dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat », des liens personnels étroits avec l'un des dirigeants ou mandataires sociaux . Le qualificatif « étroits » reprend un terme figurant dans la directive communautaire 2003/6/CE du 28 janvier 2003 sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché (abus de marchés).

A l'initiative du gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement apportant la précision selon laquelle les transactions de titres des dirigeants et de leurs proches ne seront pas communiquées à l'AMF « sans délai » mais « dans un délai déterminé par le règlement de l'AMF ».

Elle a également adopté deux amendements rédactionnels à l'initiative de sa commission des finances.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 80

Régime des conventions courantes et des conventions réglementées

Commentaire : le présent article a pour objet d'exclure des dispositions relatives à la communication et à la publicité des conventions courantes celles d'entre elles qui, en raison de leur objet ou de leurs implications financières, sont significatives pour l'une des parties.

I. LE VOTE DU SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

En première lecture, le Sénat a adopté deux amendements de notre collègue Jacques Oudin :

- un amendement supprimant la disposition excluant du dispositif d'information les conventions courantes de « faible importance pour l'ensemble des parties » pour y inclure les seules conventions courantes « significatives » pour l'une des parties ;

- un amendement portant à 10 % le seuil de 5 % des droits de vote détenus par un signataire d'une convention avec la société dont il est actionnaire, seuil retenu dans la loi du 15 mai 2001 pour le déclenchement de la procédure d'autorisation préalable du conseil d'administration ou du conseil de surveillance concernant les conventions réglementées.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Après que la commission des finances de l'Assemblée nationale a envisagé de supprimer complètement les obligations relatives aux conventions courantes, comme votre commission l'avait également proposé dans un premier temps en première lecture, avant de se rallier à une solution de compromis 40 ( * ) , l'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable du gouvernement, un amendement de sa commission des lois, supprimant les obligations relatives aux conventions courantes et aux conventions réglementées pour les conventions conclues entre la société coopérative et ses membres lorsqu'elles ont pour objet la mise en oeuvre des statuts.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances comprend parfaitement les spécificités des sociétés coopératives.

Cependant, elle regrette la propension à légiférer par exception.

Elle s'étonne ainsi des difficultés à obtenir un allègement des procédures pour les conventions courantes conclues à des conditions normales dans l'ensemble des sociétés et de l'exception qui serait faite, pour les sociétés coopératives, pour les conventions courantes comme pour les conventions réglementées.

Or, il apparaît évident que les sociétés coopératives ne sont pas moins exposées aux risques que les autres types de sociétés et ne requièrent pas moins de transparence et de contrôle.

Il appartiendra donc aux commissaires aux comptes ou réviseurs de ces sociétés de suivre avec vigilance l'application de cette nouvelle règle, et de bien distinguer les conventions qui relèveront strictement de la mise en oeuvre des statuts des autres conventions, qui n'ont pas vocation à échapper au régime normal de transparence.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 80 bis (nouveau)

Droit préférentiel de souscription d'actions nouvelles

Commentaire : le présent article a pour objet de compléter le régime juridique applicable au droit préférentiel de souscription d'actions nouvelles.

I. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

Le présent article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues députés Philippe Auberger et Jérôme Bignon, contre l'avis de la commission des finances et du gouvernement, a pour objet de réduire une source d'insécurité juridique dans les émissions de valeurs mobilières en direction des salariés.

En effet, le III de l'article L. 225-129 du code de commerce prévoit la possibilité pour l'assemblée générale extraordinaire de déléguer ses pouvoirs au conseil d'administration ou au directoire pour les émissions de valeurs mobilières, dès lors que cette délégation s'inscrit dans des plafonds qu'elle fixe elle-même et qu'elle est informée de l'opération.

Cette délégation, qui est particulièrement utile lorsque l'assemblée générale extraordinaire ne veut pas arrêter la liste des bénéficiaires et le montant pour chaque bénéficiaire des émissions de valeurs mobilières, souffre toutefois de textes réglementaires d'application ambigus, qui créent dès lors une insécurité juridique.

Ainsi, ces textes sont interprétés par certains comme obligeant l'assemblée générale extraordinaire à établir, dès l'autorisation de l'opération, la liste nominative des bénéficiaires et le nombre de titres à leur attribuer, ce qui vide la disposition législative de sa portée.

Le texte proposé par le présent article a donc pour objet de compléter l'article L. 225-138 du code de commerce afin de préciser expressément que l'assemblée générale extraordinaire peut déléguer au conseil d'administration ou au directoire la liste précise des bénéficiaires des émissions de valeurs mobilières, le nombre de titres à leur attribuer et le prix de l'émission dans la limite des plafonds. Le conseil d'administration ou le directoire présentent un rapport sur ces opérations.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances partage le souci de l'Assemblée nationale de clarifier le régime de l'émission de valeurs mobilières.

Elle estime que les dispositions du présent article, qu'elle juge utiles, pourront être complétées par la réforme plus large prévue dans le cadre de la procédure d'habilitation décrite par le récent rapport de notre collègue Gérard Braun 41 ( * ) .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 82

Droit d'ester en justice des associations d'investisseurs

Commentaire : le présent article a pour objet de réformer et d'assouplir les modalités d'action et d'agrément des associations de défense des investisseurs.

I. LE VOTE DU SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

En première lecture, le Sénat a adopté deux amendements visant à :

- maintenir une procédure d'agrément des associations d'investisseurs tout en inscrivant dans la loi des conditions minimales et très inférieures aux seuils actuels pour que ces associations soient agréées (six mois d'existence et 200 membres cotisant individuellement). Pour garantir la qualité de ces associations, appelées à jouer un rôle important, leurs dirigeants devront répondre à des conditions d'honorabilité et de compétence . En dehors de ces associations agréées, seraient également représentatives les associations répondant aux critères en matière de droit de vote, c'est-à-dire atteignant le seuil de 5 % de l'actionnariat (ce seuil étant abaissé jusqu'à 1 % pour les grandes entreprises) ;

- supprimer une entrave à l'action des associations d'investisseurs agréées .

L'article L. 452-2 du code monétaire et financier dispose que lorsque plusieurs investisseurs ont subi des préjudices individuels qui ont été causés par le fait d'une même personne et qui ont une origine commune, une association agréée peut, si elle a été mandatée par au moins deux des investisseurs concernés, agir en réparation devant toute juridiction, au nom de ces investisseurs. Il s'agit d'une action en justice en « représentation conjointe ».

Cependant, le mandat ne peut être sollicité par voie d'appel public télévisé ou radiophonique, ni par voie d'affichage, de tract ou de lettre personnalisée.

L'amendement adopté par le Sénat permet que, lorsque qu'une association agréée agit en réparation devant les juridictions civiles ou commerciales, le président du tribunal de grande instance ou le président du tribunal de commerce selon le cas peut, par ordonnance de référé, l'autoriser à solliciter des actionnaires un mandat pour agir en leur nom en ayant recours, à ses frais, aux moyens de publicité précités.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale n'a pas remis en cause le dispositif adopté par le Sénat et a adopté, à l'initiative de sa commission des lois, une disposition nouvelle aux termes de laquelle, sans préjudice des articles L. 612-1 à L. 612-5 du code de commerce qui imposent des obligations comptables à certaines associations subventionnées et autres personnes morales, les associations d'investisseurs agréées établissent chaque année un bilan, un compte de résultat et une annexe qui sont approuvés par l'assemblée des adhérents.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission des finances est favorable au renforcement des obligations de transparence des associations d'investisseurs agréées, dans la mesure où ces obligations ne sont pas une contrainte de nature à les empêcher d'agir.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 82 bis (nouveau)

Réparation du préjudice subi par l'actionnaire individuel
en cas de faute de gestion

Commentaire : le présent article a pour objet d'autoriser les actionnaires ou les associations d'investisseurs agissant en leur nom à demander réparation d'un préjudice subi personnellement, distinct du préjudice social.

I. LE DROIT EXISTANT

Les actionnaires peuvent invoquer deux types de préjudices :

- lorsque l'actionnaire ou un tiers demande la réparation d'un préjudice subi personnellement, distinct de celui de la société, il s'agit de l'action individuelle ;

- lorsque l'actionnaire demande la réparation d'un préjudice subi par la société, il s'agit de l'action sociale ou de l'action ut singuli.

A. L'ACTION INDIVIDUELLE

L'action en responsabilité contre des dirigeants pour des fautes commises dans la gestion de la société n'est recevable que si les associés ou actionnaires ont subi un préjudice personnel distinct du préjudice social. Les dommages et intérêts alloués à l'issue d'une telle action reviennent intégralement aux associés et non à la société.

L'existence d'un préjudice personnel est appréciée de façon stricte par la jurisprudence. Le préjudice doit être réellement personnel et spécifique et ne doit pas être le reflet du préjudice social. Elle l'a admis, par exemple, lorsqu'un actionnaire reproche à un administrateur un abus de majorité l'ayant privé de dividendes, ou lorsqu'un actionnaire se plaint d'avoir systématiquement été tenu à l'écart des assemblées générales.

En revanche, selon une jurisprudence constante, l'actionnaire qui invoque une dépréciation de la valeur de ses titres due à une mauvaise gestion des dirigeants ne caractérise pas un préjudice individuel distinct du préjudice social. La demande en réparation doit, en conséquence, prendre la voie de l'action sociale.

B. L'ACTION SOCIALE

Les associés ou actionnaires peuvent agir individuellement ou en se groupant. Les dommages et intérêts sont versés à la société, ce qui explique la rareté de ces actions.

II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

A l'initiative de sa commission des lois, avec un avis « réservé » du gouvernement, l'Assemblée nationale a modifié la première phrase de l'article L.225-252 du code de commerce ainsi qu'il suit :

« Outre l'action en réparation du préjudice propre, subi personnellement, distinct du préjudice social , les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par une association répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120 soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en conseil d'Etat, intenter l'action sociale en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article pourrait être interprété comme une simple reprise, dans la loi, de la jurisprudence, puisque celle-ci a reconnu, dans des cas stricts, l'existence du préjudice personnel distinct du préjudice social.

Toutefois, le rapport de notre collègue député Philippe Houillon, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois est explicite sur la référence à la faute de gestion :

« Reste que la reconnaissance et l'indemnisation du préjudice subi par l'actionnaire individuel en cas de faute de gestion sont insuffisamment prises en compte aujourd'hui . En pratique, l'action individuelle intentée en réparation du préjudice personnel sur le fondement de l'article 1382 du code civil, auquel se réfère l'article L. 225-252 du code de commerce évoqué à l'article précédent, est soumise à de telles conditions de recevabilité qu'elle est peu attrayante aux yeux de l'actionnaire, dont le patrimoine personnel aura été réduit en conséquence d'une diminution du patrimoine social liée à une faute de gestion de la part des dirigeants de la société. Aux yeux du juge, en effet, une telle action n'est recevable que si l'actionnaire fait état d'un préjudice qui lui soit direct et personnel, c'est-à-dire d'un préjudice propre qui soit distinct du préjudice social. Par exemple, le préjudice personnel est reconnu lorsque le dirigeant détourne de manière sélective les dividendes ou les titres revenant à l'actionnaire ou qu'il interdit à ce dernier l'accès à l'assemblée générale. En revanche, aux yeux du juge, l'actionnaire ne subit pas de préjudice personnel lorsque la faute de gestion porte atteinte au patrimoine social et se répercute arithmétiquement sur la valeur des actions. Dans cette hypothèse, le juge considère en effet que l'actionnaire ne subit pas un préjudice spécial et que le préjudice financier n'est que le corollaire du préjudice subi par la société.

« C'est pourquoi la Commission a adopté un amendement tendant à modifier la rédaction de l'article L. 225-252 du code de commerce, afin de préciser que l'action en responsabilité civile exercée par l'actionnaire individuel a pour objet de réparer le préjudice propre qu'il a subi en cas de faute de gestion, préjudice distinct du préjudice social » .

Par ailleurs, lors du débat en séance publique, notre collègue député Pascal Clément, président de la commission des lois, a fortement soutenu cette analyse, en indiquant notamment que « nous légiférons précisément parce que l'actionnaire se trouvait sans réponse face aux fautes de gestion ou aux turpitudes, comme dans le cas d'Enron ».

Ainsi, alors que le présent article ne mentionne pas la faute de gestion, la jurisprudence pourrait cependant évoluer pour se mettre en conformité avec l'intention supposée du législateur . Dès lors, elle pourrait considérer que la perte de la valeur des actions due à une mauvaise gestion des dirigeants, caractérise le préjudice propre subi personnellement, distinct du préjudice social. On pourrait assister alors à une augmentation très importante des actions contentieuses émanant d'actionnaires individuels.

Votre commission des finances estime prématuré de s'aventurer sur ce terrain. Elle préfère en rester, à ce stade, aux dispositions du présent projet de loi, qui permettront désormais aux associations de défense des investisseurs d'être autorisées par le juge à solliciter des mandats de tiers pour défendre leurs intérêts, et à recourir à la publicité à cette fin.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission des finances vous propose de supprimer le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

* 38 JO, Sénat, 28 mars 2002, p. 932.

* 39 En application des dispositions actuelles de l'article L. 225-68, le conseil de surveillance présente à l'assemblée générale ses observations sur le rapport du directoire ainsi que sur les comptes de l'exercice. S'agissant du président du conseil de surveillance, cela signifie qu'il joint son rapport sur le contrôle interne et l'organisation des travaux du conseil à ce rapport, qui revêt une forme écrite.

* 40 Le rapport de notre collègue député François Goulard note « relevant, à juste titre selon votre Rapporteur, que l'assouplissement proposé par le Gouvernement est davantage source de risques contentieux que de simplification, la commission des finances du Sénat souhaitait aller plus loin que le projet. Cohérente avec ses positions de 2000, lors de l'examen du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques, elle souhaitait revenir sur la loi du 15 mai 2001, estimant que le régime des conventions libres était devenu (..) excessivement et inutilement rigide. Mais c'est une solution de compromis qui a été, in fine, retenue, et qui n'emporte guère la conviction de votre Rapporteur ».

* 41 Avis n° 269 (2002-2003), commission des finances - Sénat.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page