CHAPITRE IV
DISPOSITIONS RELATIVES AU JUGEMENT

SECTION 1
Dispositions relatives au jugement des délits
Article 57
(art. 41, 393, 396 et 397-1 du code de procédure pénale)
Procédure de comparution immédiate

Le présent article tend à apporter plusieurs modifications à la procédure de comparution immédiate définie par les articles 393 et suivants du code de procédure pénale.

Rappelons que la procédure de comparution immédiate est une procédure de jugement rapide applicable aux majeurs et que le procureur de la République peut décider de mettre en oeuvre lors du défèrement de la personne.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002, cette procédure est applicable, en cas de flagrant délit, lorsque la peine encourue est au moins égale à six mois d'emprisonnement sans excéder dix ans d'emprisonnement, peine maximale possible en matière correctionnelle.

Hors le cas du flagrant délit, cette procédure peut également, si le maximum de l'emprisonnement prévu par la loi est au moins égal à deux ans, être utilisée par le procureur de la République lorsqu'il lui apparaît que les charges réunies sont suffisantes et que l'affaire est en état d'être jugée.

Le prévenu est retenu jusqu'à sa comparution qui doit avoir lieu le jour même. Si la réunion du tribunal est impossible le jour même et si le placement en détention provisoire du prévenu jusqu'à sa comparution devant la juridiction du jugement lui semble justifié, le procureur de la République peut saisir le juge des libertés et de la détention afin que ce dernier ordonne le placement en détention provisoire. Ce magistrat statue après avoir recueilli les observations éventuelles du prévenu et de son avocat et avoir fait procéder, s'il y a lieu, à l'enquête sociale prévue par l'article 41 du code de procédure pénale. Le prévenu doit alors comparaître devant le tribunal au plus tard dans les deux jours, faute de quoi il est remis en liberté (article 396 du code de procédure pénale).

Lorsque le prévenu ne consent pas à être jugé séance tenante ou si l'affaire ne paraît pas en état d'être jugée, le tribunal, après avoir recueilli les observations des parties, renvoie l'affaire à une prochaine audience qui doit avoir lieu dans un délai compris entre deux et six semaines. Lorsque la peine d'emprisonnement est supérieure à sept ans d'emprisonnement, le prévenu peut demander à ce que l'affaire soit renvoyée à une audience fixée dans un délai compris entre deux et quatre mois (article 397-1 du code de procédure pénale).

Lorsque l'affaire est renvoyée, le prévenu peut être maintenu en détention provisoire pendant une durée de deux mois, ce délai étant porté à quatre mois lorsque la peine d'emprisonnement encourue est supérieure à sept ans et que le prévenu a demandé à bénéficier d'un délai pour préparer sa défense.

Enfin, en cas d'appel, la personne peut être maintenue en détention provisoire jusqu'à l'examen de l'affaire, qui doit intervenir dans le délai de quatre mois.

Le présent article tend à apporter plusieurs modifications à ces dispositions.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 41 du code de procédure pénale, qui prévoit notamment qu'en cas de poursuites contre un majeur âgé de moins de vingt-et-un ans au moment de la commission de l'infraction, lorsque la peine encourue n'excède pas cinq ans d'emprisonnement, le procureur doit requérir le service pénitentiaire d'insertion et de probation, un service de la protection judiciaire de la jeunesse, ou toute personne habilitée, afin de vérifier la situation matérielle, familiale et sociale de la personne .

Le présent paragraphe tend à compléter ces dispositions afin de rendre obligatoire cette enquête sociale en cas de poursuites selon la procédure de comparution immédiate ou selon la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité que le présent projet de loi tend à créer.

Une telle évolution paraît pleinement justifiée dès lors que les procédures concernées conduisent à un jugement extrêmement rapide de ces personnes. Elle implique cependant une amélioration des conditions dans lesquelles sont réalisées ces enquêtes sociales, afin qu'elles ne constituent pas une pure formalité .

Examinant le projet de loi, la commission des Lois de l'Assemblée nationale avait proposé de supprimer ce dispositif en invoquant l'inefficacité des enquêtes sociales. Elle a finalement renoncé à cette modification après que le garde des Sceaux a fait part de sa volonté d'améliorer les conditions de réalisation des enquêtes sociales pour renforcer l'effectivité des décisions de justice.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 394 du code de procédure pénale, qui permet au procureur de la République d'inviter la personne déférée à comparaître devant le tribunal dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours ni supérieur à deux mois (procédure de la convocation par procès-verbal ).

Dans un tel cas, si le procureur de la République estime nécessaire de soumettre le prévenu jusqu'à sa comparution devant le tribunal à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire, il le traduit devant le président du tribunal ou le juge délégué par lui.

Le présent paragraphe tend logiquement à attribuer au juge des libertés et de la détention la possibilité d'ordonner un contrôle judiciaire à l'égard des prévenus faisant l'objet d'une convocation par procès-verbal.

Le paragraphe III tend à modifier l'article 396 du code de procédure pénale sur trois points. Par coordination avec les dispositions modifiées de l'article 41, il tend tout d'abord à supprimer l'expression, « s'il y a lieu », appliquée à l'enquête sociale pour la remplacer par une mention précisant que ces vérifications ne sont pas nécessaires si elles ont déjà été effectuées. Le paragraphe I tend en effet à rendre l'enquête sociale systématique.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a par ailleurs souhaité modifier l'article 396 pour porter de deux à trois jours le délai à l'issue duquel le prévenu doit être jugé lorsque le tribunal ne peut pas se réunir le jour même.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer cette disposition, qui lui paraît aller à l'encontre du concept même de comparution immédiate. Le délai de deux jours ne résulte pas d'une réforme récente de la procédure pénale, mais a été arrêté dès la création de la procédure de comparution immédiate. Il n'apparaît pas justifié de le modifier aujourd'hui.

Enfin, le présent paragraphe tend à compléter l'article 396. Dans sa rédaction actuelle, cet article contraint le juge des libertés et de la détention, lorsqu'il refuse de placer un prévenu en détention provisoire dans l'attente de sa comparution devant le tribunal, à déférer de nouveau le prévenu devant le procureur de la République, afin que celui-ci puisse procéder à une convocation par procès-verbal. Dans un tel cas, le procureur, s'il souhaitait qu'un contrôle judiciaire soit ordonné, devrait demander ce placement au juge des libertés et de la détention, compte tenu des dispositions du paragraphe II du présent article.

Pour éviter ces allers-retours, le présent paragraphe tend à permettre au juge des libertés et de la détention d'ordonner un contrôle judiciaire lorsqu'il refuse le placement en détention provisoire avant de déférer de nouveau le prévenu devant le procureur de la République.

Le paragraphe IV tend à compléter l'article 397-1 du code de procédure pénale, qui permet le renvoi de l'affaire à la demande du prévenu ou lorsqu'elle ne paraît pas en état d'être jugée, pour permettre au prévenu ou à son avocat de demander au tribunal d'ordonner tout acte d'information nécessaire à la manifestation de la vérité relatif aux faits reprochés ou à la personnalité de l'intéressé. En cas de refus de faire droit à cette demande, le tribunal devrait rendre un jugement motivé.

Cette disposition, qui s'ajoute à celle du paragraphe I relative à l'enquête sociale, devrait permettre un renforcement des droits de la défense au cours de la procédure de comparution immédiate.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 57 ainsi modifié .

Article 57 bis
(art. 398-1 du code de procédure pénale)
Extension du champ d'application
de la procédure du juge unique

L'article 398 du code de procédure pénale prévoit que le tribunal correctionnel est composé d'un président et de deux juges. Toutefois, cet article dispose également que, pour le jugement des délits énumérés à l'article 398-1, sauf si la peine encourue, compte tenu de l'état de récidive légale du prévenu, est supérieure à cinq ans d'emprisonnement, le tribunal est composé d'un seul magistrat exerçant les pouvoirs conférés au président.

L'article 398-1 du code de procédure pénale contient une liste de délits donnant lieu à un jugement par un juge unique. Parmi ceux-ci figurent :

- les délits prévus par le code de la route ;

- les délits en matière de coordination des transports ;

- certains délits relatifs au régime des matériels de guerre, armes et munitions ;

- de nombreux délits figurant dans le code pénal : certaines violences, les appels téléphoniques malveillants, les menaces, l'exhibition sexuelle, l'abandon de famille, les atteintes à l'exercice de l'autorité parentale, le vol, la filouterie, le détournement de gage ou d'objet saisi, le recel, certaines destructions, dégradations et détériorations, les menaces et actes d'intimidation contre des personnes exerçant une fonction publique, l'outrage, la rébellion, l'usage de stupéfiants et les sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux ;

- les délits prévus par le code rural en matière de chasse, de pêche et de protection de la faune et de la flore ;

- les délits prévus par le code forestier et par le code de l'urbanisme pour la protection des bois et forêts.

Depuis la loi n° 2002-1138 d'orientation et de programmation pour la justice, cette procédure est également applicable aux délits pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue, à l'exception des délits de presse.

L'article 398-1 du code de procédure pénale prévoit que le tribunal est néanmoins composé de trois magistrats lorsque le prévenu est en état de détention provisoire lors de sa comparution à l'audience ou lorsqu'il est poursuivi selon la procédure de comparution immédiate.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Gérard Léonard, tend à compléter l'article 398-1, afin d'étendre la procédure du juge unique aux délits suivants :

- le racolage (article 225-10-1 du code pénal), tel qu'il a été défini par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ;

- l'installation en réunion et sans autorisation, en vue d'y installer une habitation, sur un terrain appartenant soit à une commune qui s'est conformée aux obligations lui incombant en vertu de la loi relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, soit à tout autre propriétaire (article 322-4-1 du code pénal). Ce délit résulte de la loi n° 2003-239 pour la sécurité intérieure.

Par ailleurs, le présent article tend à modifier certaines références figurant à l'article 398-1 du code de procédure pénale pour tenir compte d'autres modifications législatives. Ainsi, les articles 222-12 et 222-13 du code pénal punissent de peines aggravées les violences lorsqu'elles sont commises à l'encontre de certaines catégories de personnes ou dans certaines circonstances. L'article 398-1 prévoit que les délits prévus par les articles 222-12 et 222-13 du code pénal sont jugés par un juge unique tout en visant les 1° à 10° de ces articles. Or, la liste des circonstances aggravantes mentionnées dans les articles 222-12 et 222-13 du code pénal a été complétée depuis l'introduction de l'article 398-1 du code de procédure pénale, de sorte qu'il est nécessaire de viser désormais les 1° à 13° des articles 222-12 et 222-13.

De même, l'article 398-1 prévoit que la procédure du juge unique s'applique au délit prévu par l'article 433-3, premier alinéa, du code pénal. Jusqu'à il y a peu, l'article 433-3 comportait deux alinéas, le premier punissant la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes exerçant une fonction publique, le second sanctionnant le fait d'user de menaces, de violences ou de commettre tout autre acte d'intimidation pour obtenir d'une personne exerçant une fonction publique qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat.

La loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a modifié sensiblement l'article 433-3 du code pénal, qui comporte désormais quatre alinéas. Les deux premiers alinéas sanctionnent, comme précédemment, le fait de proférer des menaces à l'égard de personnes exerçant certaines fonctions ou missions. La liste des personnes protégées a été étendue et concerne notamment, outre les personnes dépositaires de l'autorité publique, les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, les gardiens d'immeubles et les professionnels de santé. Les conjoints, ascendants et descendants en ligne directe de certaines des personnes protégées bénéficient en outre désormais de la même protection.

Le troisième alinéa de l'article 433-3 punit de peines aggravées les menaces proférées contre les personnes protégées lorsqu'il s'agit de menaces de mort ou de menaces d'atteinte aux biens dangereuse pour les personnes. Enfin, comme précédemment, le quatrième alinéa sanctionne de peines très lourdes les menaces commises en vue de contraindre une personne exerçant une fonction publique d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction ou de sa mission.

Par coordination avec les modifications apportées à l'article 433-3 du code pénal, le présent article vise à mentionner les deux premiers alinéas de cet article et non plus le premier alinéa dans la liste des délits donnant lieu à un jugement par un juge unique.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 57 bis sans modification.

Article 57 ter
(art. 398-1 du code de procédure pénale)
Extension du champ d'application
de la procédure du juge unique

Comme le précédent, le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Gérard Léonard, a pour objet de compléter l'article 398-1 du code de procédure pénale pour étendre le champ d'application de la procédure du juge unique.

Cette procédure serait désormais applicable au délit prévu par l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation. Rappelons que cet article, créé par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, punit de deux mois d'emprisonnement et de 3.750 euros d'amende les voies de fait ou la menace de commettre des violences contre une personne ou l'entrave apportée de manière délibérée à l'accès et à la libre circulation des personnes ou au bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté, lorsqu'elles sont commises en réunion par plusieurs auteurs ou complices, dans les entrées, cages d'escaliers ou autres parties communes d'immeubles collectifs d'habitation. Les mêmes peines sont prévues lorsque ces faits sont commis sur les toits des immeubles collectifs d'habitation.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 57 ter sans modification .

Article 57 quater
(art. 399 du code de procédure pénale)
Fixation du nombre et du jour des audiences correctionnelles

L'article 399 du code de procédure pénale dispose que le nombre et le jour des audiences correctionnelles sont fixés à la fin de chaque année judiciaire pour l'année judiciaire suivante par une ordonnance du président du tribunal de grande instance prise après avis de l'assemblée générale.

En cas de nécessité, cette ordonnance peut être modifiée dans les mêmes conditions en cours d'année.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Jean-Luc Warsmann et Alain Marsaud, tend à modifier l'article 399 pour prévoir que le nombre et le jour des audiences correctionnelles sont fixés par une décision conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République prise après avis de l'assemblée générale du tribunal.

La préoccupation exprimée par cet amendement est légitime. Il est normal que le procureur de la République puisse être associé à la préparation de la décision relative au nombre et au jour des audiences correctionnelles.

La loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes avait, à l'inverse, inséré un nouvel article L. 311-15-1 dans le code de l'organisation judiciaire pour prévoir que la composition prévisionnelle des audiences pénales était déterminée conjointement par le président du tribunal et le procureur.

Jusqu'alors, en l'absence de texte, la composition prévisionnelle relevait essentiellement du procureur de la République.

Il est tout à fait essentiel que des décisions de cette nature soient prises après concertation entre les chefs de juridiction.

Pour autant, le texte proposé, comme celui adopté en juin 2000, soulève des difficultés dès lors qu'aucune solution n'est prévue en cas de désaccord. Un conflit entre le président du tribunal et le procureur pourrait donc conduire à une situation de blocage, alors que le présent article est conçu au contraire pour encourager le dialogue entre les chefs de juridiction.

En cas de conflit, votre commission estime normal que la décision relative au nombre et au jour des audiences correctionnelles puisse être fixée par le président du tribunal, qui est le mieux à même de veiller à l'équilibre entre les audiences civiles et les audiences pénales. Elle estime au contraire que la composition prévisionnelle des audiences correctionnelles doit alors être fixée par le procureur.

Votre rapporteur a été particulièrement sensible aux propos de Mme Danièle Entiope, présidente du tribunal de grande instance de Marseille, pour qui l'absence de traitement civil de certains conflits, notamment familiaux, conduit à alimenter ensuite le rôle des juridictions pénales, et singulièrement des cours d'assises .

En conséquence, par un amendement , votre commission vous propose de modifier l'article 399 du code de procédure pénale, pour prévoir que :

- le nombre et le jour des audiences correctionnelles, ainsi que la composition prévisionnelle de ces audiences sont fixés par décision conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République ;

- en cas d'impossibilité de parvenir à un accord, le nombre et le jour des audiences sont fixés par le président du tribunal, et la composition prévisionnelle est fixée par le procureur ;

- ces décisions issues d'un désaccord ne peuvent être prises qu'après avis du premier président de la cour d'appel et du procureur général . En cas de désaccord grave entre deux chefs de juridiction, il paraît en effet logique que les chefs de cour puissent intervenir, afin de contribuer à la solution du litige. Le risque de devoir solliciter l'avis des chefs de cour pourrait encourager les présidents et procureurs à parvenir à un accord.

Corrélativement, votre commission vous propose d'abroger l'article L. 311-15-1 du code de l'organisation judiciaire, qui devient inutile.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 57 quater ainsi modifié .

Article 58
(art. 410, 410-1, 411, 412, art. 412-1 et 412-2 nouveaux
du code de procédure pénale)
Jugement d'un prévenu en son absence

Le présent article tend à modifier profondément les règles applicables au jugement d'un prévenu en son absence , notamment pour tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.

1. Le droit actuel

Actuellement, tout prévenu est informé par voie de citation de la date de l'audience du tribunal correctionnel examinant son affaire.

La citation peut être faite à personne, à domicile lorsque le prévenu est absent de celui-ci mais qu'une personne y réside, à mairie lorsqu'il n'y a personne au domicile du prévenu ou enfin à parquet lorsque le prévenu est sans résidence ou domicile connu.

Le prévenu régulièrement cité à personne doit comparaître, à moins qu'il ne fournisse une excuse reconnue valable par la juridiction devant laquelle il est appelé. Il en est de même lorsque la citation a été délivrée à domicile ou à mairie, mais qu'il est établi que le prévenu a eu connaissance de la citation le concernant.

Si ces conditions sont réunies, les prévenus non comparants et non excusés sont jugés contradictoirement (article 410 du code de procédure pénale). Le jugement devient donc définitif à l'expiration du délai d'appel, qui est de dix jours à compter de la signification du jugement, quel que soit ce mode de signification, lorsque le prévenu n'a pas été informé du jour où le jugement serait prononcé.

Les prévenus cités pour une infraction passible d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement inférieure à deux années peuvent, par lettre, demander à être jugés en leur absence. Il en est de même en cas de citation directe délivrée par la partie civile quelle que soit la durée de la peine encourue.

L'avocat du prévenu est alors entendu et le prévenu est jugé contradictoirement (article 411 du code de procédure pénale).

Enfin, lorsque la citation n'a pas été délivrée à la personne du prévenu et qu'il n'est pas établi qu'il ait eu connaissance de cette citation, la décision, en cas de non-comparution du prévenu, est rendue par défaut (article 412 du code de procédure pénale). Dans ce cas, le prévenu dispose d'un délai de dix jours à compter de la signification du tribunal correctionnel pour faire opposition à sa condamnation. Lorsque la signification n'a pas été faite à personne et qu'il n'est pas établi que le prévenu en ait eu connaissance, l'opposition reste recevable jusqu'à l'expiration des délais de prescription de la peine. L'opposition formée contre une décision rendue par défaut rend celle-ci nulle et non avenue sous toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le mandat d'arrêt qui a pu être décerné et la provision allouée à la victime . Elle a pour effet de saisir à nouveau la juridiction ayant statué la première fois.

2. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme

La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit notamment dans son article 6-3 que tout accusé a droit notamment à se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent.

Sur le fondement de cette disposition, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France, en 1993, dans un arrêt Poitrimol 145 ( * ) . Dans cette affaire, une cour d'appel avait refusé de faire droit à une demande de jugement du prévenu en son absence, au motif que celui-ci faisait l'objet d'un mandat d'arrêt et était en fuite. Elle avait en conséquence refusé que le prévenu soit représenté par son avocat.

La Cour a condamné la France en estimant que la suppression du droit à l'assistance d'un défenseur était une sanction disproportionnée au refus du prévenu de comparaître .

La Cour a confirmé cette jurisprudence dans un arrêt Van Pelt 146 ( * ) plus récent. Dans cette affaire, une juridiction avait considéré comme non valables les motifs médicaux de non comparution du prévenu. Elle l'avait donc jugé contradictoirement sans entendre ses avocats sur le fond de l'affaire.

Dans un arrêt Von Geyseghem 147 ( * ) , la Cour européenne a ainsi résumé sa position : « Le droit de tout accusé à être effectivement défendu par un avocat figure parmi les éléments fondamentaux du procès équitable. Un accusé n'en perd pas le bénéfice du seul fait de son absence aux débats. Même si le législateur doit pouvoir décourager les abstentions injustifiées, il ne peut les sanctionner en dérogeant au droit à l'assistance d'un défenseur ».

La Cour de cassation a récemment modifié sa jurisprudence pour tenir compte des exigences posées par la Cour européenne des droits de l'homme. Elle a mis fin à la distinction opérée par le législateur entre les prévenus passibles d'une peine d'emprisonnement inférieure à deux ans et ceux passibles d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à deux ans, pour considérer que « le droit au procès équitable et le droit de tout accusé à l'assistance d'un défenseur s'opposent à ce que la juridiction juge un prévenu non comparant et non excusé sans entendre l'avocat présent à l'audience pour assurer sa défense 148 ( * ) ».

Le présent article tend en conséquence à modifier les dispositions du code de procédure pénale relatives au jugement des prévenus en leur absence.

3. Le dispositif proposé

Le paragraphe I tend à modifier l'article 410 du code de procédure pénale, qui prévoit que le prévenu cité à personne ou celui qui, sans avoir été cité à personne, a eu connaissance de la citation, doit comparaître à moins qu'il ne fournisse une excuse reconnue valable par la juridiction. Si ces conditions sont remplies, le prévenu non comparant et non excusé est jugé contradictoirement.

Le présent paragraphe tend tout d'abord à remplacer l'expression « jugé contradictoirement » par les termes « jugé par jugement contradictoire à signifier », qui sont ceux employés par les juridictions. Cette modification doit permettre de mieux distinguer le jugement rendu en présence du prévenu et le jugement rendu en son absence.

Le texte précise également que la personne n'est pas jugée par jugement contradictoire à signifier lorsqu'il est fait application des dispositions de l'article 411, qui, dans leur rédaction issues du présent projet de loi, tendent à permettre désormais à tout prévenu de demander à être jugé en son absence, son avocat entendu. Dans un tel cas, le jugement serait contradictoire, mais n'aurait pas à être signifié.

Enfin, le présent paragraphe tend à compléter l'article 410 du code de procédure pénale pour prévoir que si un avocat se présente pour assurer la défense du prévenu, il doit être entendu, même s'il n'a pas été mandaté pour le faire . Ce dispositif doit permettre de satisfaire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, qui n'exige pas de formalités particulières pour la désignation de l'avocat.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 410-1 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que lorsque le prévenu cité à personne ne comparaît pas et que la peine qu'il encourt est égale ou supérieure à deux années d'emprisonnement, le tribunal peut ordonner le renvoi de l'affaire et, par décision spéciale et motivée, décerner mandat d'amener.

Le prévenu arrêté en vertu du mandat d'amener est conduit dans les vingt-quatre heures devant le procureur de la République, qui procède à son interrogatoire d'identité. Lorsqu'il est arrêté à plus de 200 km du siège de la juridiction qui a délivré le mandat d'amener, il est conduit soit devant le procureur de la juridiction qui a délivré le mandat, soit devant celui du lieu de l'arrestation. Dans ce cas, il doit être transféré au plus tard dans les cinq jours.

Le prévenu doit comparaître devant la juridiction qui a décerné mandat d'amener dès que possible et au plus tard avant l'expiration du troisième jour à compter de son arrivée à la maison d'arrêt du siège de cette juridiction, faute de quoi il est mis en liberté d'office. La juridiction apprécie s'il y a lieu de le soumettre, jusqu'à l'audience de jugement, à une mesure de contrôle judiciaire ou de détention provisoire.

Le présent paragraphe a tout d'abord pour objet de permettre à la juridiction de délivrer non seulement mandat d'amener, mais également mandat d'arrêt. Le mandat d'arrêt est délivré à l'encontre des personnes en fuite.

Surtout, le présent paragraphe tend à modifier les règles applicables en cas d'arrestation de la personne. Le texte proposé prévoit que si le prévenu est arrêté à la suite du mandat d'amener ou d'arrêt, il est fait application des dispositions de l'article 135-2, dont l'insertion dans le code de procédure pénale est prévue par l'article 40 du présent projet de loi. Dans ces conditions, le prévenu pourrait être retenu pendant vingt-quatre heures par les services de police et de gendarmerie et aurait la possibilité, pendant ce délai, de faire prévenir une personne avec laquelle il vit habituellement et de se faire examiner par un médecin. Avant l'expiration du délai de vingt-quatre heures, il devrait être conduit devant le procureur de la République du tribunal du siège de la juridiction ayant décerné le mandat, qui le présenterait devant le juge des libertés et de la détention. Ce juge pourrait ordonner le placement du prévenu sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire, sa décision étant susceptible d'appel devant la chambre des appels correctionnels.

Si la personne était arrêtée à plus de deux cents kilomètres du siège de la juridiction de jugement et qu'il n'était pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant le procureur du tribunal dans le ressort duquel siège la juridiction qui a délivré le mandat, elle serait présentée au procureur du lieu de l'arrestation, qui mettrait le mandat à exécution en faisant conduire la personne à la maison d'arrêt après avoir avisé le procureur de la République de la juridiction de jugement ; ce dernier ordonnerait le transfèrement de la personne, qui devrait comparaître dans les quatre jours devant lui pour être présentée au juge des libertés et de la détention.

Le paragraphe III tend à modifier en profondeur l'article 411 du code de procédure pénale, relatif au droit d'une personne de demander à être jugée en son absence . Actuellement, cet article permet de formuler une telle demande, soit lorsque le prévenu encourt une peine d'amende ou une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure à deux années, soit en cas de citation directe délivrée par la partie civile quelle que soit la durée de la peine encourue. Dans les deux cas, l'avocat du prévenu est entendu. Le tribunal, s'il estime nécessaire la comparution du prévenu, peut procéder à sa réassignation pour une audience dont il fixe la date. Le prévenu qui ne répond pas est jugé contradictoirement.

Le présent paragraphe modifie substantiellement ces règles pour tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, désormais entérinée par la Cour de cassation.

Le texte proposé pour l'article 411 permet au prévenu de demander à être jugé en son absence en étant représenté par son avocat ou par un avocat commis d'office, quelle que soit la peine encourue , et quelles que soient les conditions dans lesquelles il a été cité .

L'avocat du prévenu pourrait intervenir dans les débats et serait entendu dans sa plaidoirie. Le prévenu serait alors jugé contradictoirement, sans qu'il soit besoin que le jugement soit signifié.

Comme actuellement, le tribunal, s'il estimait nécessaire la comparution du prévenu, pourrait renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour que le procureur procède à une nouvelle citation. Dans cette hypothèse, si le prévenu ne comparaissait pas, il serait jugé contradictoirement si son avocat était présent, par jugement contradictoire à signifier si son avocat était absent. Le tribunal pourrait également renvoyer de nouveau l'affaire en décernant mandat d'arrêt ou mandat d'amener.

Le texte proposé prévoit in fine que lorsque l'avocat du prévenu qui a demandé à être jugé en son absence n'est pas présent au cours de l'audience, le prévenu est jugé par jugement contradictoire à signifier.

Ainsi, toute personne pourra être jugée en son absence si elle le demandait et être défendue par son avocat, quelle que soit la peine encourue . Le tribunal pourrait bien renvoyer l'affaire pour ordonner une nouvelle citation ou décerner mandat d'arrêt, mais le refus de la personne de se présenter ne pourrait plus être sanctionné par le refus d'entendre les conclusions de l'avocat.

Une telle évolution satisfait aux exigences posées par la Cour européenne des droits de l'homme, mais ne peut qu'affaiblir la signification du procès et provoquer l'amertume de victimes, qui attendent parfois beaucoup du débat public. Il reste que le tribunal pourra tenir compte, dans sa décision, du comportement d'un prévenu, qui refuserait à plusieurs reprises de comparaître, tout en mandatant un avocat pour le défendre.

Le paragraphe IV tend à modifier l'article 412, relatif au jugement par défaut. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que si la citation n'a pas été délivrée à la personne du prévenu, et s'il n'est pas établi qu'il ait eu connaissance de cette citation, la décision, en cas de non-comparution du prévenu, est rendue par défaut.

Le présent article tend à réécrire l'article 412 pour prévoir que lorsqu'il n'est pas établi que le prévenu ait eu connaissance de la citation, la décision est rendue par défaut sauf s'il est fait application de l'article 411.

Ainsi, un prévenu, dont il ne serait pas établi qu'il ait eu connaissance de la citation, pourrait demander à être jugé en son absence, son avocat entendu. La personne serait alors jugée contradictoirement.

Dans tous les cas, si un avocat se présentait pour assurer la défense du prévenu, il devrait être entendu. Le texte prévoit que le jugement est alors contradictoire à signifier sauf si le prévenu a lui-même demandé à être jugé en son absence en étant représenté par son avocat ou par un avocat commis d'office, qui a effectivement participé à l'audience. Enfin, le tribunal pourrait renvoyer l'affaire à une audience ultérieure en décernant mandat d'amener ou mandat d'arrêt.

Le paragraphe V tend à insérer dans le code de procédure pénale deux nouveaux articles 412-1 et 412-2.

- Le texte proposé pour l' article 412-1 prévoit que lorsque la citation n'a pas été délivrée à personne et qu'il n'est pas établi que le prévenu ait eu connaissance de la citation, le prévenu non comparant et non représenté ni défendu par un avocat ne peut être condamné à une peine d'emprisonnement ferme ou à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis partiel.

Si une peine d'emprisonnement était susceptible d'être prononcée, le président du tribunal devrait renvoyer l'affaire, le ministère public procédant à une nouvelle citation. Le texte prévoit que le président peut également, lorsque le prévenu est en fuite ou est susceptible de ne pas se présenter volontairement à la nouvelle audience, rendre un jugement de recherche et décerner un mandat d'arrêt après avoir procédé à l'audition des témoins et des experts et entendu la partie civile et son avocat. Dans ce cas, les délais de la prescription de l'action publique deviendraient ceux -plus longs- de la prescription de la peine. Si le prévenu était arrêté à la suite du mandat d'arrêt, il serait fait application des dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale créé par l'article 40 du projet de loi.

Enfin, le texte proposé prévoit qu'après avoir rendu son jugement de recherche, la juridiction peut, à la demande de la partie civile, ordonner toutes mesures provisoires relatives aux dommages et intérêts résultant des faits, notamment le versement d'une indemnité provisoire. La décision serait rendue par défaut.

- Le texte proposé pour l' article 412-2 tend à prévoir une exception aux règles qui viennent d'être énoncées en permettant au procureur de la République, pour les délits punis d'une peine d'emprisonnement, de demander au bâtonnier la désignation d'un avocat pour assurer la défense des intérêts d'une personne en fuite renvoyée devant le tribunal correctionnel. La demande devrait intervenir au moins un mois avant la date de l'audience.

L'avocat serait entendu dans sa plaidoirie et le tribunal pourrait alors rendre un jugement par défaut en prononçant éventuellement une peine d'emprisonnement.

Autant les dispositions qui prévoient que le prévenu absent doit, dans tous les cas, pouvoir être représenté par un avocat qui se présente à l'audience pour assurer sa défense méritent d'être approuvées compte tenu de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, même si elles soulèvent des questions de principe, autant celles qui viennent d'être présentées peuvent susciter des interrogations.

La Cour européenne des droits de l'homme n'a jamais interdit qu'une peine d'emprisonnement soit prononcée à l'encontre d'un prévenu non comparant et non défendu . Elle a seulement exigé qu'en toutes circonstances, l'avocat du prévenu qui se présente pour assurer sa défense soit entendu. Dans son arrêt Poitrimol, la Cour, si elle a condamné la France, a aussi noté que : « La comparution d'un prévenu revêt une importance capitale en raison tant du droit de celui-ci à être entendu que de la nécessité de contrôler l'exactitude de ses affirmations et de les confronter avec les dires de la victime, dont il y a lieu de protéger les intérêts, ainsi que des témoins. Dès lors, le législateur doit pouvoir décourager les abstentions injustifiées ».

Par ailleurs, il est difficile de percevoir l'avantage que représente le dispositif proposé pour les nouveaux articles 412-1 et 412-2. Ce dispositif est beaucoup plus complexe que celui du jugement par défaut, qui ne disparaît pas pour autant totalement (il resterait applicable lorsque la juridiction ne prononce pas de peine d'emprisonnement ou lorsqu'il serait fait application de la procédure permettant au procureur de demander au bâtonnier de désigner un avocat). Pour autant, le nouveau système ne garantit pas mieux que le précédent les droits du prévenu, puisqu'il serait interdit de prononcer une peine d'emprisonnement, mais que la juridiction pourrait néanmoins ordonner des mesures provisoires relatives aux dommages et intérêts et que les délais de la prescription de l'action publique deviendraient ceux de la prescription de la peine.

Enfin, la procédure consistant à permettre au procureur de demander au bâtonnier la désignation d'un avocat pour assurer la défense des intérêts d'une personne en fuite peut susciter quelques interrogations sur la conception du rôle de l'avocat qu'elle sous-tend. Quel pourrait être le rôle d'un avocat qui ignorerait tout de son client, ne l'aurait jamais rencontré, ne saurait rien de ses choix de défense ?

Il semble que les dispositions proposées pour les articles 412-1 et 412-2 du code de procédure pénale soient destinées à faciliter l'extradition en France des personnes recherchées lorsqu'elles sont découvertes à l'étranger. Notre procédure de condamnation par défaut avec possibilité d'opposition pour le condamné serait mal comprise par les autorités des autres pays.

Cette difficulté ne doit pas être négligée. Néanmoins, elle devrait être aisément résolue au sein de l'Union européenne grâce aux progrès de la coopération judiciaire, à l'assistance d'Eurojust, de magistrats de liaison et d'un réseau judiciaire européen. En tout état de cause, la solution proposée paraît présenter plus d'avantages que d'inconvénients.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer le présent paragraphe et de maintenir en conséquence la possibilité de prononcer des peines d'emprisonnement dans un jugement par défaut lorsqu'aucun avocat ne se présente pour assurer la défense du prévenu.

Les paragraphes VI, VII, VIII et IX tendent à procéder à des coordinations.

Le paragraphe VI tend à modifier l'article 416 du code de procédure pénale, relatif à l'audition du prévenu qui ne peut comparaître en raison de son état de santé. Cet article autorise un magistrat, assisté d'un greffier, à entendre le prévenu, éventuellement assisté de son avocat, à son domicile ou à la maison d'arrêt dans laquelle il se trouve détenu. Le débat est alors repris après une nouvelle citation du prévenu et celui-ci peut demander, par lettre adressée au président du tribunal, à être jugé en son absence, conformément aux deux premiers alinéas de l'article 412. Le texte précise que les dispositions de l'article 411 s'appliquent, « quel que soit le taux de la peine encourue . »

Par coordination avec la nouvelle rédaction de l'article 411 proposée par le paragraphe III, qui tend à supprimer la référence aux peines d'emprisonnement inférieures à deux ans, le paragraphe VI tend à faire disparaître, dans l'article 416, le renvoi au quantum de la peine, devenu inutile.

Le paragraphe VII tend à modifier le dernier alinéa de l'article 465 du code de procédure pénale, qui précise les conditions dans lesquelles l'affaire vient devant le tribunal à la suite d'une opposition formée par une personne arrêtée sur mandat d'arrêt.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 465 prévoit que, dans un tel cas, l'affaire doit venir devant le tribunal à la première audience ou au plus tard dans la huitaine du jour de l'opposition, faute de quoi le prévenu est remis en liberté ; le tribunal doit statuer par décision motivée sur le maintien ou la mainlevée du mandat, après avoir entendu le ministère public ; le prévenu peut en tout état de cause former une demande de mise en liberté.

Le présent paragraphe tend à remplacer ces dispositions par un renvoi à l'article 135-2 du code de procédure pénale créé par l'article 40 du présent projet de loi. La personne arrêtée en application du mandat d'arrêt devrait être présentée dans les vingt-quatre heures devant le procureur de la République, qui la traduirait devant le juge des libertés et de la détention. Ce dernier pourrait la placer en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement.

Le paragraphe VIII tend à modifier l'article 498 relatif aux délais d'appel. Il s'agit de prévoir que le délai d'appel de dix jours ne commencera à courir qu'à compter de la signification du jugement :

- pour le prévenu qui a été jugé en son absence, mais après audition d'un avocat qui s'est présenté pour assurer sa défense, sans cependant être titulaire d'un mandat de représentation ;

- pour le prévenu qui aurait demandé à être jugé en son absence lorsque son avocat n'était pas présent.

Enfin, le paragraphe VIII précise que le délai d'appel du jugement contradictoire à signifier, lorsqu'il est fait application de l'article 410, doit s'apprécier sous réserve d'un nouvel article 498-1, que le paragraphe IX du présent article tend à créer.

Le paragraphe X tend à opérer les mêmes modifications dans l'article 568 du code de procédure pénale, relatif aux pourvois en cassation, qui prévoit que les parties ont cinq jours francs après celui où la décision attaquée a été prononcée pour se pourvoir en cassation, tout en prévoyant que le délai ne court qu'à compter de la signification dans certaines situations.

Le paragraphe IX tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 498-1 pour prévoir une règle spécifique en matière d'appel lorsqu'une personne, après avoir eu connaissance d'une citation, a été jugée et condamnée en son absence.

Actuellement, un prévenu cité à personne pour lequel il est établi qu'il a eu connaissance de la citation le concernant dispose d'un délai de dix jours à compter de la signification du jugement, quel qu'en soit le mode, pour faire appel de celui-ci, même s'il n'est pas établi qu'il a eu connaissance de cette signification .

En revanche, lorsque la condamnation est rendue par défaut et qu'il n'est pas établi que le prévenu ait eu connaissance de la signification du jugement, le délai d'opposition est celui de la prescription de la peine.

Le texte proposé pour l'article 498-1 prévoit que, pour un jugement de condamnation à une peine d'emprisonnement ferme ou à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis partiel, rendu dans les conditions prévues à l'article 410, modifié par le présent article, et qui n'a pas été signifié à personne, le délai d'appel ne court à compter de la signification du jugement faite à domicile, à mairie ou à parquet qu'à condition que le prévenu ait eu connaissance de la signification .

Le second alinéa du texte proposé prévoit en effet que lorsqu'il ne résulte pas de l'avis constatant la remise de la lettre recommandée adressée au prévenu lors de la signification à domicile ou à mairie (articles 557 et 558 du code de procédure pénale), soit d'un acte d'exécution quelconque ou de l'avis donné au prévenu à la suite d'un ordre de recherche du parquet (article 560), que le prévenu a eu connaissance de la signification du jugement, l'appel reste recevable, tant en ce qui concerne les intérêts civils que la condamnation pénale, jusqu'à l'expiration des délais de prescription de la peine. Le délai d'appel de dix jours court alors à compter de la date à laquelle le prévenu a eu connaissance de la condamnation.

Votre commission vous soumet deux amendements tendant à prendre en compte non seulement la lettre recommandée adressée au prévenu, mais également le récépissé qui peut être renvoyé en cas d'envoi d'une lettre simple. Depuis 1995, la signification à domicile ou à mairie peut être doublée d'une lettre simple dans laquelle figure un récépissé que le destinataire doit renvoyer à l'huissier.

La situation des personnes non comparantes jugées par jugement contradictoire à signifier est ainsi alignée sur celle des personnes condamnées par défaut.

Après le paragraphe X, votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un paragraphe additionnel, afin de prévoir que les dispositions du nouvel article 498-1 relatif à la signification des jugements, qui diffère le point de départ du délai d'appel à partir du moment où le prévenu a effectivement connaissance de la condamnation, sont également applicables pour les arrêts rendus par la cour d'appel, s'agissant du point de départ du délai de pourvoi en cassation.

Enfin, le paragraphe XI , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à modifier l'article 891, relatif au jugement des délits à Mayotte, pour y apporter une coordination avec les dispositions du présent article.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 58 ainsi modifié .

Article 59
(art. 464 de code de procédure pénale)
Jugement sur les intérêts civils

La loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a complété l'article 464 du code de procédure pénale relatif au jugement sur les intérêts civils, afin de permettre au tribunal correctionnel, après avoir statué sur l'action publique, de renvoyer l'affaire à une date ultérieure pour statuer sur l'action civile, même s'il n'ordonne pas de mesure d'instruction, afin de permettre à la partie civile d'apporter les justificatifs de ses demandes. Le renvoi est de droit lorsqu'il est demandé par les parties civiles. Le tribunal doit alors fixer la date de l'audience à laquelle il sera statué sur l'action civile. La présence du ministère public à cette audience n'est pas obligatoire.

Le présent article tend à compléter ces dispositions pour prévoir qu'à cette audience, le tribunal est composé du seul président siégeant à juge unique .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 59 sans modification.

Article 60
(art. 495 du code de procédure pénale)
Extension du champ d'application de la procédure simplifiée

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a étendu la procédure de l'ordonnance pénale, jusqu'alors réservée aux contraventions, aux délits prévus par le code de la route . Cette procédure simplifiée n'est pas applicable si le prévenu est mineur, si la victime a formulé une demande de dommages et intérêts ou a fait citer directement le prévenu, enfin si le délit a été commis en même temps qu'une contravention ou un délit d'homicide involontaire ou d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne.

Le ministère public ne peut recourir à cette procédure que lorsqu'il résulte de l'enquête que les faits reprochés au prévenu sont établis et que les renseignements concernant la personnalité de celui-ci sont suffisants.

Lorsque les conditions sont réunies, le ministère public communique au président du tribunal le dossier de la poursuite et ses réquisitions. Le président statue sans débat préalable par une ordonnance pénale portant relaxe ou condamnation à une amende, ainsi que, le cas échéant, à une ou plusieurs des peines complémentaires encourues. Le prévenu dispose d'un délai de quarante-cinq jours à compter de la notification pour former opposition, afin que l'affaire fasse l'objet d'un débat contradictoire et public.

Interrogé sur la conformité à la Constitution de ce dispositif, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 29 août 2002 149 ( * ) , a déclaré qu'il n'était pas contraire au principe d'égalité devant la justice.

Le présent article, dans sa rédaction initiale, tendait à étendre le champ de la procédure simplifiée, applicable aux délits prévus par le code de la route, aux contraventions connexes prévues par le même code, ainsi qu'aux délits en matière de réglementation relative aux transports terrestres .

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a proposé d'étendre le dispositif à l'ensemble des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement .

Votre commission est réservée face à une extension aussi massive du champ d'application de cette procédure.

D'une part, l'ordonnance pénale a été conçue pour traiter des infractions extrêmement simples dans leurs éléments constitutifs. Son application à certains délits n'a été décidée qu'il y a quelques mois et aucun bilan de l'application de cette évolution n'est encore disponible.

D'autre part et surtout, s'il est utile que le législateur fournisse aux magistrats une « gamme » de procédures permettant d'améliorer l'efficacité du fonctionnement de la justice, il convient également qu'il détermine précisément l'objet de ces procédures. Si l'ensemble des procédures devient applicable à l'ensemble des délits, il existe un risque d'application hétérogène de la loi selon les juridictions et les situations.

Votre commission estime préférable d'attendre qu'un bilan de l'application de la procédure simplifiée aux délits prévus par le code de la route soit disponible avant d'envisager une modification substantielle du champ d'application de la procédure de l'ordonnance pénale. Cette procédure, rappelons-le, exclut toute présentation de la personne poursuivie devant un magistrat du siège ou du parquet avant que la décision soit prise.

Par un amendement , votre commission vous propose de limiter l'extension de la procédure d'ordonnance pénale aux contraventions connexes prévues par le code de la route et aux délits en matière de réglementation relative aux transports terrestres.

Le paragraphe II tend à compléter l'article 495-3 du code de procédure pénale qui prévoit que l'ordonnance pénale est portée à la connaissance du prévenu par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, pour prévoir qu'elle peut également être portée à la connaissance du prévenu par le procureur de la République, directement ou par l'intermédiaire d'une personne habilitée. Comme l'indique l'étude d'impact du projet de loi, « la notification de la décision par un délégué du procureur -et non uniquement par un huissier comme actuellement- peut en effet permettre à ce dernier de convaincre la personne qu'elle n'a pas intérêt à faire opposition devant le tribunal correctionnel ».

Le paragraphe III , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à insérer dans la section du code de procédure pénale consacrée à la procédure simplifiée un article 495-6-1 pour prévoir que cette procédure n'est applicable ni aux mineurs, ni en matière de délits de presse, de délits d'homicides involontaires, de délits politiques ou de délits dont la procédure de poursuite est prévue par une loi spéciale.

Votre commission ayant décidé de ne pas étendre la procédure simplifiée à l'ensemble des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans, vous propose par un amendement la suppression de ce paragraphe, qui devient sans objet. Les mineurs sont en effet déjà exclus de l'application de cette procédure par l'article 495 du code de procédure pénale.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 60 ainsi modifié.

Article 60 bis
(art. 495-6 du code de procédure pénale)
Citation devant le tribunal d'une personne jugée
par ordonnance pénale

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter l'article 495-6 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que le jugement d'une personne par ordonnance pénale ne fait pas échec aux droits de la partie lésée de citer l'auteur des faits devant le tribunal correctionnel. Dans ce cas, le tribunal statue uniquement sur les intérêts civils si l'ordonnance pénale a acquis la force de chose jugée.

Le présent article tend à prévoir qu'à l'audience sur les intérêts civils, le tribunal est composé du seul président siégeant à juge unique. Il s'agit en pratique d'une coordination avec les dispositions de l'article 59 du présent projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 60 bis sans modification .

Article 61
(art. 495-7 à 495-16 et 520-1 nouveaux du code de procédure pénale)
Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

En 1998, présentant en tant que rapporteur le projet de loi renforçant l'efficacité de la procédure pénale, qui a donné naissance à la procédure de composition pénale, notre excellent collègue M. Pierre Fauchon écrivait : « (...) cette nouvelle forme d'alternative aux poursuites constitue un premier pas vers la mise en oeuvre d'une forme de « plaider coupable ». Votre rapporteur considère que le « plaider coupable » constitue une piste qui ne doit pas être négligée dans la recherche d'une solution à l'engorgement de la justice pénale. Il y voit en outre le germe d'une conception nouvelle, plus humaniste de cette justice .

« Certes, le « plea bargaining », tel qu'il est pratiqué aux Etats-Unis, fait l'objet de certains excès et donne parfois l'impression d'être un véritable marchandage qui ne grandit pas la justice. Faut-il pour autant se priver d'un système dans lequel l'auteur de faits répréhensibles reconnaîtrait sa faute et ferait l'objet d'une sanction immédiate moins grave que celle qu'il encourait en l'absence d'aveu ? Est-il vraiment choquant qu'une personne poursuivie commence à faire amende honorable avant d'être condamnée en reconnaissant les faits qu'elle a commis et en demandant à les réparer, facilitant ainsi l'action de la justice ? Ne s'agit-il pas d'une voie plus conforme à la dignité humaine et, de ce fait, plus éducative et donc plus efficace ? » 150 ( * ) .

L'instauration d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité constitue l'une des novations les plus importantes introduites dans notre droit par le présent projet de loi.

De nombreux pays ont prévu un cadre procédural spécifique pour le traitement des affaires dans lesquelles les faits sont reconnus par la personne poursuivie :

- en Angleterre et au Pays de Galles, au Canada et aux Etats-Unis, le plaider coupable, bien que peu codifié, constitue un élément fondamental de la procédure pénale ;

- dans plusieurs pays d'Europe occidentale, des dispositifs inspirés du plaider coupable ont été mis en oeuvre.

Ces différents systèmes sont présentés en annexe au présent rapport dans une étude de législation comparée élaborée par le service des Etudes juridiques du Sénat.

LE « PLEA BARGAINING » AUX ETATS-UNIS

Aux Etats-Unis, la procédure de plaider coupable est utilisée dans 90 à 95% des affaires. Découragée jusqu'au dix-neuvième siècle, la pratique de la négociation entre le parquet et la défense a commencé à se développer dans les années 1830. Elle est aujourd'hui utilisée au niveau fédéral et dans chacun des Etats fédérés.

L'initiative du plaider coupable peut être prise tant par le procureur que par l'accusé ou son avocat. Le plaider coupable peut intervenir à tout moment de la procédure, y compris pendant la délibération du jury sur la culpabilité.

En acceptant de plaider coupable, un accusé renonce à plusieurs droits reconnus par la Constitution :

- le droit de ne pas être obligé de témoigner contre soi-même ;

- le droit d'être mis en présence des témoins à charge et de les soumettre à un contre-interrogatoire ;

- le droit que sa culpabilité soit établie par un jury populaire ;

- le droit de faire appel.

En échange de la reconnaissance de culpabilité, l'accusé peut espérer obtenir que le procureur renonce à certains chefs d'inculpation, réduisant ainsi la peine encourue. Par ailleurs, dans certaines circonstances, le procureur peut formuler des recommandations de clémence au juge.

L'accord passé entre le procureur et l'accusé doit être présenté au juge en audience publique. Celui-ci vérifie en particulier que la reconnaissance de culpabilité a été faite librement par les accusés. En règle générale, l'accord ne porte pas sur une peine précise, mais prévoit seulement une réduction des chefs d'inculpation. Le juge demeure donc libre de fixer la peine . Toutefois, depuis 1984, la liberté du juge est contrainte par des « sentencing guidelines » qui limitent sa marge de manoeuvre dans le choix de la peine.

La peine n'est pas fixée lors de l'audience de reconnaissance de culpabilité, mais lors d'une audience ultérieure, ce qui permet de procéder aux enquêtes sociales nécessaires avant le prononcé de la peine.

*

Le paragraphe I du présent article tend à insérer une nouvelle section relative à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité dans le chapitre du code de procédure pénale consacré au tribunal correctionnel. Cette nouvelle section comporterait dix articles numérotés 495-7 à 495-16. Votre commission vous soumet un amendement tendant à corriger une erreur matérielle.

Art. 495-7 du code de procédure pénale
Champ d'application

Le texte proposé pour l'article 495-7 du code de procédure pénale définit le champ et les conditions d'application de la nouvelle procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

La nouvelle procédure serait applicable aux personnes déférées devant le procureur de la République et reconnaissant avoir commis un ou plusieurs délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans.

Le procureur de la République pourrait recourir à cette procédure d'office ou à la demande de la personne ou de son avocat. Il ne serait en aucun cas tenu de faire droit à la demande de la personne ou de son avocat.

Afin de favoriser le plus possible l'usage de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de la culpabilité, votre commission vous soumet un amendement tendant à :

- permettre l'application de cette procédure aux délits punis à titre principal d'une peine d'amende ;

- permettre la mise en oeuvre d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité non seulement en cas de défèrement devant le procureur de la République, mais également en cas de citation directe ou de convocation par procès-verbal.

Art. 495-8 du code de procédure pénale
Peines susceptibles d'être proposées

Le texte proposé pour l'article 495-8 tend à définir les modalités pratiques de la procédure.

Le procureur de la République pourrait proposer à la personne reconnaissant les faits qui lui sont reprochés d'exécuter une ou plusieurs des peines principales ou complémentaires encourues, la nature et le quantum de ces peines étant déterminés conformément aux dispositions de l'article 132-24 du code pénal.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 132-24 du code pénal dispose que, dans les limites fixées par la loi, la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. Lorsque la juridiction prononce une peine d'amende, elle détermine son montant en tenant compte également des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.

Il est important de noter que la ou les peines seraient proposées par le procureur de la République et non par la personne ou son avocat. L'initiative demeurerait donc, pour l'ouverture de la procédure comme pour la détermination des peines, entre les mains du ministère public .

Le texte proposé pour l'article 495-8 dispose que lorsqu'est proposée une peine d'emprisonnement, sa durée ne peut être supérieure à six mois. Le procureur pourrait proposer qu'elle soit assortie en tout ou partie du sursis. Il pourrait en outre proposer qu'elle fasse l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues par l'article 722 du code de procédure pénale : placement à l'extérieur, semi-liberté, fractionnement et suspension des preuves, placement sous surveillance électronique, libération conditionnelle.

Une telle précision est importante s'agissant de courtes peines d'emprisonnement, dont il est souhaitable, aussi souvent que possible, qu'elles fassent l'objet d'aménagements.

Par un amendement , votre commission vous propose de porter à un an la durée maximale de la peine d'emprisonnement pouvant être proposée par le procureur de la République. Une telle durée paraît davantage en rapport avec le champ d'application de la nouvelle procédure (délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans) que celle de six mois proposée par le projet de loi.

Votre commission vous soumet également un amendement supprimant une indication redondante ainsi qu'un amendement supprimant la référence à l'article 722 du code de procédure pénale pour la remplacer par une référence à l'article 712-6, par coordination avec des amendements relatifs à l'application des peines qui seront présentés ultérieurement.

Enfin, votre commission vous propose un amendement tendant à préciser que le procureur doit indiquer à la personne, lorsqu'il propose une peine d'emprisonnement ferme, s'il entend qu'elle soit immédiatement mise à exécution ou si la personne sera convoquée devant le juge de l'application des peines pour que soient déterminées les modalités de son exécution.

Le projet de loi initial prévoyait que le montant de la peine d'amende proposée ne pourrait être supérieur à la moitié de l'amende encourue, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a supprimé cette disposition. Par un amendement , votre commission vous propose de la rétablir. Il lui apparaît conforme à la logique de la nouvelle procédure que les peines proposées soient nécessairement plus faibles que les peines normalement encourues.

Le texte proposé pour l'article 495-8 prévoit que les déclarations par lesquelles la personne reconnaît les faits qui lui sont reprochés sont recueillies, et la proposition de peine est faite par le procureur de la République en présence de l'avocat de l'intéressé. Celui-ci devrait pouvoir consulter sur le champ le dossier.

Par un amendement , votre commission vous propose de prévoir que la personne ne peut renoncer à son droit d'être assistée d'un avocat.

La personne pourrait librement s'entretenir avec son avocat, hors la présence du procureur de la République, avant de faire connaître sa décision. Le procureur devrait l'aviser de la possibilité de demander à disposer d'un délai de dix jours avant de faire connaître si elle accepte ou si elle refuse la ou les peines proposées.

Il convient de noter que la nouvelle procédure pourrait modifier substantiellement le rôle de l'avocat. Celui-ci devra en effet conseiller son client sur le niveau des peines proposées par le ministère public. Il conviendra donc que les avocats soient formés à cette nouvelle mission.

Art. 495-9 du code de procédure pénale
Homologation

Le texte proposé pour l'article 495-9 du code de procédure pénale dispose que lorsque la personne accepte la ou les peines proposées, elle est aussitôt présentée devant le président du tribunal de grande instance, saisi par le procureur de la République d'une requête en homologation.

L'Assemblée nationale a prévu que le président du tribunal pourrait déléguer un autre juge pour exercer cette mission.

Le président du tribunal, après avoir entendu la personne et son avocat, pourrait décider d'homologuer la ou les peines proposées par le procureur de la République. A l'initiative de l'Assemblée nationale, le texte précise que le président doit vérifier la réalité des faits et leur qualification juridique.

Le texte initial prévoyait que le président du tribunal entendait la personne et son avocat en audience publique ou, si la personne ou son avocat le demandait, en chambre du conseil. L'Assemblée nationale a estimé préférable que le président du tribunal statue systématiquement en chambre du conseil, l'ordonnance étant en tout état de cause rendue publique en cas d'homologation.

Par un amendement , votre commission vous propose au contraire de prévoir que le président entend la personne et son avocat en audience publique, mais qu'il peut décider, d'office ou à la demande de la personne ou de son avocat, de statuer en chambre du conseil.

La procédure de comparution sur reconnaissance préalable de la culpabilité n'a pas vocation à être une procédure secrète. S'il est important que les propositions faites par le procureur à la personne puissent demeurer confidentielles tant qu'elles n'ont pas été acceptées, il est normal que la procédure d'homologation soit publique.

Le président du tribunal statuerait le même jour par ordonnance motivée.

Art. 495-10 du code de procédure pénale
Délai de réflexion - Placement en détention provisoire

Le texte proposé pour l'article 495-10 du code de procédure pénale tend à définir les règles applicables lorsque la personne demande à bénéficier du délai de réflexion qui doit lui être proposé par le procureur. Dans un tel cas, le procureur de la République pourrait la présenter devant le juge des libertés et de la détention pour que celui-ci ordonne son placement sous contrôle judiciaire ou, à titre exceptionnel et si l'une des peines proposées est égale ou supérieure à deux mois d'emprisonnement ferme, son placement en détention provisoire selon les modalités prévues en matière de comparution immédiate jusqu'à ce qu'elle comparaisse de nouveau devant le procureur de la République.

La nouvelle comparution devrait en toutes hypothèses intervenir dans un délai compris entre dix et vingt jours à compter de la décision du juge des libertés et de la détention. A défaut, il serait mis fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire si l'une de ces mesures avait été ordonnée.

Votre rapporteur s'est beaucoup interrogé sur l'utilité du délai de réflexion prévu dans la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Un délai identique est prévu en matière de composition pénale, mais, dans cette procédure, l'avocat n'est pas nécessairement présent. Pour la nouvelle procédure, l'instauration du délai de dix jours rend la procédure plus complexe puisqu'il est nécessaire de prévoir la possibilité d'un placement en détention provisoire, donc une présentation devant le juge des libertés et de la détention.

Après réflexion, votre rapporteur a cependant estimé que ce délai de réflexion pourrait être utile dans certaines situations et qu'il ne serait vraisemblablement que peu utilisé. Il a donc choisi de proposer son maintien.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

Art. 495-11 du code de procédure pénale
Effets de l'ordonnance d'homologation

Le texte proposé pour l'article 495-11 du code de procédure pénale prévoit que l'ordonnance d'homologation doit être motivée par les constatations :

- que la personne, en présence de son avocat, reconnaît les faits qui lui sont reprochés et accepte la ou les peines proposées ;

- que cette ou ces peines sont justifiées au regard des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur.

L'ordonnance aurait les effets d'un jugement de condamnation . Il s'agit de la principale différence entre cette procédure et la procédure de composition pénale. La composition pénale n'est pas un jugement, même si son exécution éteint l'action publique.

Le projet de loi initial prévoyait que l'ordonnance du président du tribunal était immédiatement exécutoire.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a prévu que l'ordonnance ne serait immédiatement mise à exécution que dans les cas suivants :

- prévenu placé en détention provisoire et peine d'emprisonnement ferme homologuée par le président ;

- placement en semi-liberté ou sous surveillance électronique prévu par l'ordonnance d'homologation comme modalité d'exécution de la peine ;

- renonciation du prévenu à se prévaloir du délai de réflexion après que le procureur lui a proposé une peine d'emprisonnement ferme.

Dans les autres cas, l'ordonnance devrait être transmise au juge de l'application des peines.

Les distinctions opérées par l'Assemblée nationale en matière d'exécution immédiate peuvent susciter quelques interrogations. Elles auraient pour effet d'entraîner l'exécution immédiate des seules décisions comportant une peine d'emprisonnement ferme.

Or, le texte proposé permet au procureur de proposer l'ensemble des peines prévues pour une infraction ainsi que des aménagements de peine . Par un amendement précédent, votre commission a proposé que le procureur soit tenu d'indiquer à la personne s'il entendait que la peine d'emprisonnement soit immédiatement mise à exécution ou si la personne serait convoquée devant le juge de l'application des peines en vue de déterminer les modalités d'exécution de la peine. Par coordination, elle vous propose par un amendement de prévoir que la peine est toujours immédiatement exécutoire, la personne condamnée à une peine d'emprisonnement ferme étant alors soit immédiatement incarcérée soit convoquée devant le juge de l'application des peines.

Le texte proposé pour l'article 495-11 précise in fine que, dans tous les cas, l'ordonnance peut faire l'objet d'un appel de la part du condamné ou du ministère public.

Une telle possibilité d'appel heurte quelque peu la logique dès lors que la condamnation a donné lieu à un accord entre le ministère public et le prévenu et que cet accord a été validé par un juge. On perçoit mal dans quelles hypothèses une telle possibilité pourrait être utilisée.

En Italie, lorsqu'est mise en oeuvre la procédure du « pattegiamento », le seul recours possible est le pourvoi en cassation.

Néanmoins, la suppression de l'appel pourrait être considérée comme contraire à la Constitution. En outre, l'article préliminaire du code de procédure pénale, inséré dans ce code par la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, dispose expressément que « Toute personne condamnée a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction ».

Dans ces conditions, votre commission a estimé souhaitable de maintenir la possibilité d'appel. Elle vous propose néanmoins, par un amendement , de prévoir que le procureur de la République ne peut faire appel qu'à titre incident. Dès lors qu'il aura lui-même proposé une ou plusieurs peines à la personne concernée, il paraît difficile de concevoir que le procureur puisse faire appel à titre principal d'un jugement sur reconnaissance préalable de la culpabilité. En revanche, un appel incident paraît tout à fait souhaitable pour éviter que les personnes condamnées puissent faire appel sans pouvoir encourir une peine plus sévère que celle issue de l'ordonnance d'homologation du président du tribunal.

Art. 495-12 du code de procédure pénale
Échec de la procédure

Le texte proposé pour l'article 495-12 du code de procédure pénale prévoit qu'en cas de refus par la personne d'accepter les peines proposées par le procureur ou en cas de refus d'homologation par le président du tribunal, le procureur remet à la personne une convocation à comparaître devant le tribunal correctionnel ou la traduit sur le champ devant le tribunal correctionnel, conformément à la procédure de comparution immédiate, sauf s'il estime nécessaire d'ouvrir une information. Il pourrait également procéder par la voie de la citation directe.

Art. 495-13 du code de procédure pénale
Préservation des intérêts de la victime

L'une des principales interrogations suscitées par la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité est celle de la place de la victime, compte tenu du caractère très rapide de la procédure.

Le texte proposé pour l'article 495-13 du code de procédure pénale dispose que, lorsque la victime de l'infraction est identifiée, elle est informée sans délai par tout moyen de la procédure. Elle devrait être invitée à comparaître en même temps que l'auteur des faits, accompagnée le cas échéant de son avocat, devant le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui pour se constituer partie civile et demander réparation de son préjudice.

Le président du tribunal devrait statuer sur cette demande, même dans le cas où la partie civile n'aurait pas comparu à l'audience, en application de l'article 420-1 du code de procédure pénale (cet article permet la constitution de partie civile par tout moyen).

La partie civile pourrait faire appel de l'ordonnance dans les conditions de droit commun définies par les articles 498 et 500 (délai de dix jours augmenté de cinq jours lorsqu'une des parties fait appel).

Le projet de loi initial tendait à faire obligation au procureur de proposer au prévenu de réparer le dommage causé en cas d'identification de la victime, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a supprimé ce dispositif dans un souci de simplification.

Le texte proposé pour l'article 495-13 prévoit dans son dernier alinéa que si la victime n'a pu exercer son droit de se constituer partie civile, elle doit être informée par le procureur de la République de son droit de lui demander de citer l'auteur des faits à une audience du tribunal correctionnel statuant sur les seuls intérêts civils. La victime devrait alors être avisée de la date de l'audience, afin de pouvoir se constituer partie civile. Le tribunal, composé d'un seul magistrat, par coordination avec les dispositions de l'article 59 du présent projet de loi, statuerait sur les seuls intérêts civils, au vu du dossier de la procédure.

Art. 495-14 du code de procédure pénale
Sort du procès-verbal

Le texte proposé pour l'article 495-14 du code de procédure pénale dispose qu'à peine de nullité de la procédure, il est dressé procès-verbal des formalités accomplies en application des articles 495-8 à 495-13.

Le texte précise que lorsque la personne n'a pas accepté la ou les peines prononcées ou lorsque le président du tribunal de grande instance n'a pas homologué la proposition du procureur de la République, le procès-verbal ne peut être transmis à la juridiction d'instruction ou de jugement, ni le ministère public ni les parties ne pouvant faire état devant cette juridiction des déclarations faites ou des documents remis au cours de la procédure.

Une telle règle paraît indispensable pour la crédibilité de la nouvelle procédure.

Devant l'Assemblée nationale, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, a défini les contours de la règle posée dans le texte proposé pour l'article 495-14 du code de procédure pénale : « Il est clair que ce qui disparaît du dossier c'est la procédure qui se déroule dans le bureau du procureur, et non à la gendarmerie ou au commissariat de police. C'est cela qui n'est pas transmis en cas de refus de la proposition du procureur de la République ».

Art. 495-15 du code de procédure pénale
Possibilité pour un prévenu cité ou convoqué
de demander l'application de la procédure de comparution
sur reconnaissance préalable de culpabilité

Le texte proposé pour l'article 495-15 du code de procédure pénale tend à permettre au prévenu qui a fait l'objet d'une citation directe ou d'une convocation en justice de demander l'application de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Le prévenu devrait, lui-même ou par l'intermédiaire de son avocat, indiquer par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au procureur de la République qu'il reconnaît les faits qui lui sont reprochés.

Le procureur ne serait en aucun cas tenu de faire droit à la demande du prévenu. S'il décidait d'y faire droit, il convoquerait le prévenu et son avocat ainsi que, le cas échéant, la victime. La citation directe ou la convocation en justice seraient alors caduques sauf si la personne refusait d'accepter les peines proposées ou si le président du tribunal refusait de les homologuer, à condition que l'un de ces refus intervienne plus de dix jours avant la date de l'audience devant le tribunal correctionnel mentionnée dans l'acte de poursuite initial.

Le texte proposé prévoit in fine que le procureur, lorsqu'il refuse de faire droit à la demande d'un prévenu, n'est pas tenu d'en aviser ce prévenu ou son avocat.

Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel.

Art. 495-16 du code de procédure pénale
Infractions exclues de la procédure de comparution
sur reconnaissance préalable de culpabilité

Le texte proposé pour l'article 495-16 du code de procédure pénale dispose que la nouvelle procédure n'est pas applicable :

- aux mineurs de dix-huit ans ;

- en matière de délits de presse ;

- en matière de délits d'homicides involontaires ;

- en matière de délits politiques ;

- en matière de délits dont la procédure de poursuite est prévue par une loi spéciale.

Ces exceptions sont sensiblement les mêmes que celles prévues par l'article 397-6 du code de procédure pénale en ce qui concerne la procédure de comparution immédiate. La nouvelle rédaction de l'article 41-2 du code de procédure pénale proposée par l'article 23 du projet de loi tend à exclure de l'application de la procédure de composition pénale non seulement les infractions commises par des mineurs comme actuellement, mais aussi les délits de presse, les homicides involontaires et les délits politiques.

*

Le paragraphe II du présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 520-1 pour définir les modalités de l'appel d'une ordonnance d'homologation rendue en application de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Le texte proposé pour l'article 520-1 du code de procédure pénale prévoit qu'en cas d'appel d'une ordonnance d'homologation, la cour statue sur le fond sans pouvoir prononcer une peine plus sévère que celle homologuée par le président du tribunal, sauf s'il y a appel formé par le ministère public.

Ces dispositions sont conformes à celles prévues par l'article 513 du code de procédure pénale en cas d'appel des jugements correctionnels, qui interdit d'aggraver le sort de l'appelant, sur le seul appel du prévenu ou de la partie civile.

La seule question que soulèvent ces dispositions est celle des conditions dans lesquelles la cour d'appel statuera au fond, dès lors qu'un premier examen au fond ne sera pas intervenu en première instance.

Par un amendement , votre commission vous propose de prévoir explicitement que la cour d'appel évoque l'affaire avant de statuer sur le fond. Conformément à la décision prise à l'article 495-11, votre commission vous propose en outre de prévoir que la cour ne peut aggraver la situation du prévenu qu'en cas d' appel incident du procureur de la République.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 61 ainsi modifié .

Article 61 bis
(art. 500-1 et 380-11 du code de procédure pénale)
Modalités du désistement de l'appel

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tend à modifier les articles 500-1 et 380-11 du code de procédure pénale, afin de clarifier les conditions du désistement de l'appel en matière correctionnelle comme en matière criminelle.

Le 1° tend à modifier l'article 500-1 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que lorsqu'il intervient dans un délai d'un mois à compter de l'appel, le désistement par le prévenu ou la partie civile de son appel principal entraîne la caducité des appels incidents, y compris celui du ministère public. Dans tous les cas, le ministère public peut toujours se désister de son appel formé après celui du prévenu en cas de désistement de celui-ci.

Le présent article tend à prévoir que le désistement par le prévenu ou la partie civile de son appel principal n'entraîne la caducité des appels incidents que s'il intervient dans les conditions prévues pour la déclaration d'appel (déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée).

De fait, une telle formalité constitue le seul moyen de s'assurer du respect du délai d'un mois prévu pour que le désistement entraîne caducité des appels incidents.

Le présent article tend en outre à compléter l'article 500-1 pour prévoir que le désistement d'appel est constaté par ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels.

Le 2° tend à modifier l'article 380-11 du code de procédure pénale, relatif au désistement d'appel en matière criminelle. Cet article prévoit que l'accusé peut se désister de son appel jusqu'à son interrogatoire par le président de la cour d'assises d'appel.

Il dispose en outre que le désistement d'appel est constaté par ordonnance du président de la cour d'assises.

Le présent article complète cette dernière disposition pour prévoir que le désistement est constaté par le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque celle-ci est saisie aux fins de désigner la cour d'assises d'appel.

Rappelons en effet que l'article 380-1 du code de procédure pénale prévoit qu'en matière criminelle, l'appel est porté devant une autre cour d'assises désignée par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Il est normal que le désistement d'appel soit constaté par le président de la chambre criminelle lorsque la procédure de désignation de la cour d'assises d'appel est en cours.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 61 bis sans modification .

Article 62
(art. 505-1 nouveau du code de procédure pénale)
Filtre des appels par le président de la chambre
des appels correctionnels

Le présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 505-1 pour permettre au président de la chambre des appels correctionnels d'écarter lui-même des appels dépourvus de fondement juridique.

Le texte proposé pour l'article 505-1 dispose que le président de la chambre des appels correctionnels rend d'office une ordonnance de non-admission de l'appel insusceptible de recours :

- lorsqu'il est fait appel après expiration des délais prévus par les articles 498, 500 et 505 du code de procédure pénale (délai de dix jours à compter du prononcé du jugement contradictoire, délai supplémentaire de cinq jours en cas d'appel d'une partie, délai d'appel de deux mois pour le procureur général) ;

- lorsque l'appel est devenu sans objet ;

- lorsque l'appelant s'est désisté de son appel.

Le présent article constitue une simplification bienvenue.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 62 sans modification.

Article 62 bis
(art. 511 du code de procédure pénale)
Nombre et jour des audiences correctionnelles
de la cour d'appel

L'article 511 du code de procédure pénale dispose que le jour et le nombre des audiences correctionnelles sont fixés à la fin de chaque année judiciaire pour l'année judiciaire suivante par ordonnance du premier président prise après avis de l'assemblée général de la cour d'appel.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Jean-Luc Warsmann et Alain Marsaud, tend à modifier l'article 511 pour prévoir que le nombre et le jour des audiences correctionnelles seront désormais fixés par une décision conjointe du premier président et du procureur général, conformément aux dispositions prévues à l'article 57 quater en ce qui concerne le tribunal correctionnel.

Par un amendement , votre commission vous propose, comme elle l'a fait à l'article 57 quater, de prévoir qu'en cas d'impossibilité de parvenir à un accord, la décision est prise par le premier président de la cour d'appel.

Elle vous propose d'adopter l'article 62 bis ainsi modifié .

Article 62 ter
(art. 547 et 549 du code de procédure pénale)
Examen par un juge unique
de l'appel des jugements de police

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Jean-Luc Warsmann et Georges Fenech, tend à prévoir que les appels des contraventions font l'objet d'un examen par un juge unique.

Le paragraphe I tend à compléter l'article 547 du code de procédure pénale qui, dans sa rédaction actuelle, prévoit notamment que l'appel des jugements de police est suivi et jugé dans la même forme que les appels des jugements correctionnels, ce qui implique, aux termes de l'article 510 du code de procédure pénale, que la chambre des appels correctionnels est composée d'un président de chambre et de deux conseillers.

Le présent paragraphe tend à compléter l'article 547 pour prévoir qu'en cas d'appel des jugements de police, la cour est composée du seul président de la chambre des appels correctionnels, siégeant à juge unique.

Le paragraphe II tend à opérer une coordination dans l'article 549 du code de procédure pénale, qui énumère la liste des dispositions qui s'appliquent à la fois à l'appel des jugements correctionnels et à l'appel des jugements de police.

Votre commission est réservée sur le dispositif proposé par le présent article. Elle n'est pas convaincue en effet que la substitution du juge unique à la collégialité -qui s'est avérée indispensable en de nombreuses matières au cours des dernières décennies- soit un gage de qualité des décisions de justice.

La mission de votre commission des lois sur les métiers de la justice s'était interrogée en 2002 sur les moyens de limiter le recours au juge unique. Elle a estimé que pourrait être ultérieurement envisagée dans certains tribunaux une expérimentation permettant de recourir à des assesseurs non professionnels 151 ( * ) .

Jusqu'à présent, aucune décision d'appel n'est soumise à l'examen d'un juge unique. Votre commission n'estime pas souhaitable de recourir à une telle méthode, fût-ce en matière de jugements de police.

Elle vous propose la suppression de l'article 62 ter.

Article 63
(art. 706-71 du code de procédure pénale)
Utilisation de la visioconférence dans la phase de jugement

Dans sa rédaction actuelle, l'article 706-71 du code de procédure pénale dispose notamment que lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction le justifient, l'audition ou l'interrogatoire d'une personne ainsi que la confrontation entre plusieurs personnes peuvent être effectués en plusieurs points du territoire de la République se trouvant reliés par des moyens de télécommunications garantissant la confidentialité de la transmission. Dans les mêmes conditions, la présentation aux fins de prolongation de la garde à vue ou de la retenue judiciaire peut être réalisée par l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle. Il est alors dressé, dans chacun des lieux, un procès-verbal des opérations qui y ont été effectuées.

Ces dispositions résultent de la loi n° 2001-1062 relative à la sécurité quotidienne, complétée par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice.

Dans sa rédaction initiale, le présent article tendait à compléter l'article 706-71 pour prévoir l'application de ses dispositions devant la juridiction de jugement pour l'audition des témoins, des parties civiles et des experts, à condition que la personne poursuivie comparaisse devant la juridiction. Il interdisait donc un jugement à distance du prévenu.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a fortement élargi le champ d'application de l'article 706-71 en prévoyant l'application de la visioconférence :

- aux décisions de prolongation de la détention provisoire (ce dispositif était prévu par le projet de loi initial parmi les dispositions relatives à la criminalité organisée) ;

- au jugement devant le tribunal de police.

Elle n'a en outre posé aucune condition pour que le recours à la visioconférence soit possible.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer l'application de la visioconférence au jugement devant le tribunal de police. Par définition, le prévenu n'est pas détenu et l'on perçoit mal l'apport en termes d'efficacité de la possibilité de le juger par visioconférence. Votre commission n'est en tout état de cause pas favorable à ce que des personnes ou des accusés puissent être jugés sans être présents dans la salle d'audience. Une telle évolution mettrait à mal le principe de l'oralité des débats. Elle propose en outre que le recours à la visioconférence soit réservé aux cas où l'extraction d'un détenu devrait être évitée en raison des risques d'évasion ou de troubles à l'ordre public.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 63 ainsi modifié .

SECTION 2
Dispositions relatives au jugement des crimes
Article additionnel avant l'article 64
(art. 260 et 264 du code de procédure pénale)
Établissement des listes de jurés d'assises

L'article 64 du projet de loi tend à simplifier les conditions de désignation des jurés d'assises.

Par un article additionnel , votre commission vous propose de compléter ces dispositions.

L'article 260 du code de procédure pénale fixe un nombre de jurés qui doivent figurer sur les listes de chaque ressort. Le même article prévoit qu'un nombre plus élevé peut être fixé si le nombre de sessions le justifie. Mais un décret en Conseil d'Etat est alors nécessaire, ce qui constitue une procédure particulièrement lourde.

De même, l'article 264 du code de procédure pénale prévoit que le nombre de jurés figurant sur la liste des jurés suppléants est fixé par un décret en Conseil d'Etat.

Dans un souci de simplification, le présent article additionnel tend à remplacer ces décrets en Conseil d'Etat par des a rrêtés du garde des Sceaux.

Article 64
(art. 267, 288 et 256 du code de procédure pénale)
Simplification des modalités de désignation des jurés

Les conditions de constitution des listes de jurés de cour d'assises sont définies par les articles 259 à 267 du code de procédure pénale.

Il est établi annuellement dans le ressort de chaque cour d'assises une liste du jury criminel. La liste comprend, pour la cour d'assises de Paris, mille huit cents jurés et, pour les autres ressorts de cour d'assises, un juré pour mille trois cents habitants. Le nombre des jurés pour la liste annuelle est réparti proportionnellement au tableau officiel de la population. Cette répartition est faite par commune ou communes regroupées, par arrêté du préfet au mois d'avril de chaque année.

Le maire établit une liste préparatoire des jurés par tirage au sort des noms figurant sur les listes électorales. A partir de ces listes préparatoires et après avoir exclu les personnes ne remplissant pas les conditions légales d'aptitude, une commission présidée par le premier président de la cour d'appel ou le président du tribunal de grande instance, selon le siège de la cour d'assises, procède à un deuxième tirage au sort pour aboutir à une liste annuelle départementale ainsi qu'à une liste spéciale de jurés suppléants.

Trente jours au moins avant l'ouverture des assises, le premier président ou le président du tribunal de grande instance tire au sort au sein de ces listes, en audience publique, les noms des quarante jurés formant la liste de session et ceux des douze jurés suppléants figurant sur la liste spéciale.

Le présent article tend à apporter des simplifications à la procédure d'établissement des listes de jurés d'assises.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 267 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article dispose que le préfet notifie à chacun des jurés l'extrait de la liste de session ou de la liste des jurés suppléants le concernant quinze jours au moins avant le jour de l'ouverture de la session.

La notification mentionne le jour de l'ouverture de la session et la durée prévisible de cette session. Elle contient sommation de se trouver aux jour et heure indiqués.

A défaut de notification à personne, elle est faite à domicile ainsi qu'au maire, qui est alors tenu d'en donner connaissance au juré désigné.

Le présent paragraphe, dans sa rédaction initiale, tendait simplement à attribuer au greffier de cour d'assises la tâche, actuellement assumée par le préfet, de notifier à chacun des jurés l'extrait de la liste de session le concernant.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a préféré réécrire l'article 267. Elle a prévu que la convocation envoyée par le greffier de la cour d'assises devait rappeler l'obligation, pour tout citoyen requis, de répondre à cette convocation sous peine d'être condamné à une amende civile.

Le texte proposé pour l'article 267 prévoit en outre qu'en cas de nécessité, le greffier peut requérir les services de police et de gendarmerie aux fins de rechercher les jurés qui n'auraient pas répondu à la convocation et de leur remettre celle-ci.

Le présent paragraphe tend en outre, à l'initiative de l'Assemblée nationale, à procéder à une coordination dans l'article 266 du code de procédure pénale, qui prévoit les conditions de remplacement sur les listes des jurés ayant satisfait aux réquisitions prévues par l'article 267.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 288 du code de procédure pénale, relatif aux conséquences de l'absence des jurés. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que tout juré qui, sans motif légitime, n'a pas déféré à la citation qui lui a été notifiée, est condamné par la cour à une amende, qui est de 25 euros la première fois, la cour ayant la faculté de la réduire de moitié, de 30 euros la deuxième fois et de 75 euros la troisième fois. La troisième fois, le juré absent est déclaré incapable d'exercer à l'avenir les fonctions de juré.

Le présent paragraphe tend à faire du fait pour un juré de ne pas déférer à sa convocation sans motif légitime un délit puni de 3.750 euros d'amende. Le juré pourrait cependant, dans les dix jours de la signification de cette condamnation faite à sa personne ou à son domicile, former opposition devant le tribunal correctionnel du siège de la cour d'assises. Il devrait alors être rejugé.

L'Assemblée nationale a procédé, au sein de l'article 288, à une coordination avec les modifications qu'elle a apportées à l'article 267.

Le paragraphe III , inséré dans le projet de loi à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, a pour objet de modifier l'article 256 du code de procédure pénale, qui prévoit que sont incapables d'être juré les personnes auxquelles les fonctions de juré sont interdites en vertu de l'article 288 du code de procédure pénale ou de l'article 131-26 du code pénal (personnes interdites des droits civils, civiques et de famille).

Aux termes de la rédaction retenue par l'Assemblée nationale, la condamnation d'un juré -même pour la première fois- pour n'avoir pas déféré à une convocation adressée par le greffier de la cour d'assises vaudrait interdiction d'exercer les fonctions de juré.

Les dispositions du présent article devraient limiter les absences injustifiées de jurés, qui semblent assez nombreuses. Votre commission vous propose d'adopter l'article 64 sans modification .

Article 64 bis
(art. 281 du code de procédure pénale)
Communication des listes de témoins

Dans sa rédaction actuelle, l'article 281 du code de procédure pénale dispose notamment que le ministère public et la partie civile signifient à l'accusé, l'accusé signifie au ministère public et, s'il y a lieu, à la partie civile, vingt-quatre heures au moins avant l'ouverture des débats, la liste des personnes qu'ils désirent faire entendre en qualité de témoins.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à prévoir dans l'article 281 que la liste des personnes que les parties désirent faire entendre en qualité de témoin doit être signifiée « dès que possible et vingt-quatre heures au moins avant l'ouverture des débats ».

Votre commission vous propose d'adopter l'article 64 bis sans modification .

Article additionnel après l'article 64 bis
(art. 307 du code de procédure pénale)
Suspension des débats pour le repos de la partie civile

Dans sa rédaction actuelle, l'article 307 du code de procédure pénale dispose que les débats de la cour d'assises peuvent être suspendus pour le repos des juges ou de l'accusé.

Par un amendement , votre commission vous propose d'insérer dans le projet de loi un article additionnel modifiant l'article 307 pour prévoir que les débats peuvent également être suspendus pour le repos de la partie civile.

Article 65
(art. 308 du code de procédure pénale)
Enregistrement audiovisuel de l'audition des victimes

En 2002, lors de l'examen de la proposition de loi complétant la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes 152 ( * ) , le Sénat, à l'initiative de votre commission des Lois, avait proposé de permettre l'enregistrement audiovisuel de tout ou partie des procès d'assises, afin d'éviter aux victimes de répéter en appel l'ensemble de leur déposition faite en première instance.

Dans son rapport, notre excellent collègue M. Jean-Pierre Schosteck notait que « dans certaines affaires, notamment en matière d'infractions sexuelles, le fait pour les victimes ou certains témoins de devoir répéter à plusieurs reprises, tout au long de la procédure pénale, des faits abominables, peut être particulièrement éprouvant ».

Le Sénat n'avait alors pas été entendu. Votre commission se félicite que le Gouvernement ait décidé de reprendre à son compte cette proposition dans le présent projet de loi.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 308 du code de procédure pénale permet au président de la cour d'assises d'ordonner que les débats fassent l'objet d'un enregistrement sonore. Il prévoit que l'enregistrement peut être utilisé devant la cour d'assises jusqu'au prononcé de l'arrêt. Il peut également être utilisé devant la Cour de cassation saisie d'une demande en révision ou, après cassation ou annulation sur demande en révision, devant la juridiction de renvoi, en ce qui concerne les déclarations faites par des personnes qui ne peuvent plus être entendues. Le présent article tend à permettre au président de la cour d'assises d'ordonner l'enregistrement audiovisuel de la déposition ou de l'audition de la victime ou de la partie civile lorsque ces personnes en font la demande.

Il tend également à permettre l'utilisation de l'enregistrement sonore ou audiovisuel devant la cour d'assises statuant en appel. Naturellement, ce dispositif ne dispensera pas la victime ou la partie civile de comparaître. Il peut simplement éviter, dans certaines situations, que des personnes doivent intégralement redire ce qu'elles ont déjà dit en première instance. Après visionnage de l'enregistrement, la personne pourrait simplement être interrogée de manière plus brève par le président et les parties.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 65 sans modification .

Article 65 bis
(art. 331 du code de procédure pénale)
Déposition des témoins

Dans sa rédaction actuelle, l'article 331 du code de procédure pénale, relatif aux dépositions des témoins devant la cour d'assises , dispose notamment qu'avant de commencer leur déposition, les témoins prêtent serment et que « cela fait, les témoins déposent oralement ».

Cette règle de la déposition orale a pour conséquence que les témoins ne peuvent en principe consulter ou lire des documents pendant l'audience. Dans un arrêt de 1981, la Cour de cassation a cependant estimé que les témoins, s'ils doivent déposer oralement, peuvent toutefois exceptionnellement s'aider de documents si le président les y a autorisés 153 ( * ) .

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter l'article 331 pour prévoir que les officiers de police judiciaire et les magistrats ayant participé à l'enquête ou à l'instruction de l'affaire peuvent consulter des notes au cours de leur audition.

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, M. Jean-Luc Warsmann a ainsi justifié cet amendement. « On nous a en effet signalé des situations quelque peu désagréables : un officier de police judiciaire qui avait participé à une enquête de longs mois auparavant était fortement questionné, si ce n'est mis en porte-à-faux, sur un détail matériel dont il ne se souvenait pas. Il nous a semblé tout à fait légitime de l'autoriser expressément à s'aider de notes . »

Si l'objectif poursuivi est compréhensible, il n'apparaît pas souhaitable de limiter aux seuls officiers de police judiciaire et magistrats la possibilité de consulter des notes. Une telle possibilité peut être utile à d'autres témoins, par exemple aux enquêteurs de personnalité. Par un amendement , votre commission vous propose de prévoir que l'ensemble des témoins peuvent consulter des notes et documents lors de leur déposition, à condition que le président de la cour les y autorise. Afin de respecter le principe de l'oralité des débats, il convient en effet d'éviter que des témoins lisent des textes préparés à l'avance en guise de déposition.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 65 bis ainsi modifié .

Article 65 ter
(art. 339 du code de procédure pénale)
Retrait d'un accusé de la salle d'audience

L'article 339 du code de procédure pénale permet au président de la cour d'assises, avant, pendant ou après l'audition d'un témoin, de faire sortir un ou plusieurs accusés, et de « les examiner séparément sur quelques circonstances du procès . » Dans ce cas, le président a soin de ne reprendre la suite des débats qu'après avoir instruit chaque accusé de ce qui s'est fait en son absence, et ce qui en est résulté.

Dans un arrêt du 29 janvier 2003, la Cour de cassation a estimé que « la faculté prévue par l'article 339 du code de procédure pénale peut s'exercer non seulement à l'occasion de l'audition d'un témoin mais aussi de celle de l'interrogatoire d'un accusé . »

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à consacrer cette jurisprudence, en mentionnant explicitement la possibilité de faire sortir un ou plusieurs accusés avant, pendant ou après l'audition d'un coaccusé.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 65 ter sans modification .

Article 66
(art. 379-2 à 379-6 nouveaux du code de procédure pénale)
Jugement de l'accusé en son absence

Actuellement, les accusés absents lors de leur procès en cour d'assises sont jugés selon la procédure de contumace , définie par les articles 627-21 à 641 du code de procédure pénale.

Lorsque, après une décision de mise en accusation, l'accusé n'a pu être saisi ou ne se représente pas dans les dix jours de la signification qui en a été faite à son domicile ou lorsque, après s'être présenté ou avoir été saisi, il s'est évadé, le président de la cour d'assises rend une ordonnance de se représenter (souvent appelée ordonnance de contumace), qui fait ordre à l'accusé de se présenter dans un délai de dix jours, à défaut de quoi il sera déclaré « rebelle à la loi », suspendu de ses droits civiques et aura ses biens séquestrés.

A l'expiration du délai de dix jours, la cour d'assises peut procéder au jugement du contumax, sans que ce dernier ne puisse se faire représenter et en l'absence de jurés.

La cour se prononce après lecture de la décision de renvoi à la cour d'assises et réquisitions du procureur général, sans qu'aucun témoin ne soit entendu.

En cas de condamnation, les biens du contumax sont maintenus sous séquestre s'ils n'ont pas fait l'objet d'une confiscation et le contumax est incapable d'ester en justice. Seuls le procureur général et la partie civile peuvent se pourvoir en cassation, cette voie de recours étant interdite au contumax.

Si l'accusé est arrêté ou se constitue prisonnier avant la prescription de la peine, l'arrêt et les procédures accomplies depuis l'ordonnance de se représenter sont anéantis de plein droit et l'accusé est jugé par la cour d'assises dans les formes ordinaires.

Cette procédure est unanimement considérée comme archaïque. Elle a été jugée contraire à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la Cour européenne des droits de l'Homme 154 ( * ) .

Le présent article tend à supprimer purement et simplement la procédure de contumace pour lui substituer de nouvelles règles en cas de non-comparution de l'accusé.

Le paragraphe I tend à faire de l'actuel article 380 du code de procédure pénale un article 379-1, de manière à pouvoir introduire le nouveau chapitre du code de procédure pénale relatif aux cas de non-comparution de l'accusé avant les dispositions du code de procédure pénale relatives à l'appel en matière criminelle. Dans ces conditions, le chapitre VIII du titre I du livre II du code de procédure pénale, consacré à l'appel des décisions rendues par la cour d'assises en premier ressort deviendrait un chapitre IX.

Le paragraphe II tend à rétablir dans le titre I (De la cour d'assises) du livre deuxième (Des juridictions de jugement) du code de procédure pénale un chapitre VIII consacré aux cas de non-comparution de l'accusé, composé de cinq articles, numérotés 379-2 à 379-6.

La procédure proposée est très proche de celle prévue par l'article 58 du présent projet de loi en matière correctionnelle. Le texte proposé prévoit que :

- si un avocat n'est pas présent pour assurer la défense des intérêts de l'accusé, le président renvoie le jugement de l'affaire sur le fond à une audience ou à une session ultérieure. Lorsque l'accusé est en fuite ou susceptible de ne pas se présenter à la nouvelle audience, la cour, statuant sans la présence des jurés, peut rendre un arrêt de recherche et décerner mandat d'arrêt contre l'accusé après avoir, le cas échéant, procédé à l'audition des biens et des experts et entendu la partie civile et un avocat. Elle peut, à la demande de la partie civile, ordonner toutes mesures provisoires relatives aux dommages et intérêts (article 379-3) ;

- si un avocat est présent pour assurer la défense des intérêts de l'accusé, la cour peut, après avoir entendu les observations du ministère public, de l'avocat de la partie civile et de l'avocat de l'accusé, décider soit de procéder à l'examen et au jugement de l'affaire, soit de renvoyer le jugement de l'affaire à une audience ou à une session ultérieure. Si elle décide de procéder à l'examen de l'affaire, la cour examine l'affaire et statue sur l'accusation sans l'assistance des jurés, sauf si sont présents d'autres accusés si l'absence de l'accusé a été constatée après le commencement des débats. En cas de condamnation à une peine ferme privative de liberté, il est décerné mandat d'arrêt contre l'accusé (article 372-4 du code de procédure pénale) ;

- lorsqu'une personne mise en accusation est en fuite, le ministère public peut demander au bâtonner la désignation d'un avocat pour assurer la défense des intérêts de l'accusé lors des débats devant la cour d'assises (article 379-5) ;

- si l'accusé condamné dans les conditions prévues par les articles 379-4 et 379-5 est arrêté ou se constitue prisonnier avant que la peine soit éteinte par la prescription, il est procédé à un nouvel examen de l'affaire (article 379-6). Dans ce cas, le mandat d'arrêt vaut mandat de dépôt et l'accusé demeure détenu jusqu'à sa comparution devant la cour d'assises.

Votre commission, qui a formulé des réserves sur la procédure prévue par le projet de loi en cas de non-comparution d'un prévenu devant le tribunal correctionnel, est conduite à formuler les mêmes critiques sur la procédure prévue par le présent article.

Le dispositif proposé a un double mérite : il met fin aux multiples archaïsmes de la procédure de contumace et permet, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, à un avocat présent pour assurer la défense d'un accusé absent d'être entendu par la cour.

Les solutions proposées lorsqu'aucun avocat n'est présent pour défendre l'accusé sont plus contestables. L'arrêt de recherche constitue un acte dont le statut est incertain puisqu'il ne contient pas de peine, mais qu'il permet à la cour d'ordonner des mesures relatives aux dommages et intérêts.

En outre, pour permettre néanmoins, dans certains cas, le prononcé de peines d'emprisonnement ou de réclusion, le texte permet au ministère public de demander au bâtonnier de désigner un avocat, pour défendre un accusé dont il ignore tout.

Par un amendement , votre commission vous propose d'instituer une procédure de défaut criminel , afin de respecter la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme sans toutefois remettre en cause la possibilité de juger une personne en son absence.

Le paragraphe III tend à supprimer le titre Ier bis du livre IV du code de procédure pénale, relatif à la procédure de contumace, ainsi que l'article 270 du même code, qui concerne également cette procédure.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 66 ainsi modifié .

Article 66 bis
(art. 380-1 du code de procédure pénale)
Examen par la chambre des appels correctionnels
de certains appels d'arrêts d'assises

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Georges Fenech, tend à compléter l'article 380-1 du code de procédure pénale, qui pose le principe de l'appel en matière criminelle, pour prévoir l'examen de cet appel par la chambre des appels correctionnels dans trois cas :

- lorsque l'accusé, renvoyé devant la cour d'assises uniquement pour un délit connexe à un crime, est le seul appelant ;

- lorsque tous les condamnés pour crime se sont désistés de leur appel ;

- lorsque l'appel du ministère public d'un arrêt de condamnation ou d'acquittement concerne un délit connexe à un crime et qu'il n'y a pas d'appel interjeté concernant la condamnation criminelle.

Dans de telles hypothèses, il ne paraît effectivement pas nécessaire de respecter tout le formalisme d'un procès d'assises. Néanmoins, votre commission estime préférable que les appels de décisions prononcées par une juridiction compétente en matière criminelle soient portés devant une juridiction ayant la même compétence. En conséquence, elle vous propose, par un amendement , que, dans les cas mentionnés au présent article, l'appel reste porté devant une cour d'assises, mais que, dans un souci de simplification, la cour statue sans l'assistance des jurés.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 66 bis ainsi modifié .

SECTION 3
Dispositions relatives à la Cour de cassation
Article 67
(art. 586, 612-1 et 626-5 du code de procédure pénale)
Suppression d'une amende civile
Extension de la cassation aux parties qui ne se sont pas pourvues Réexamen d'une décision pénale consécutif au prononcé d'un arrêt
de la Cour européenne des droits de l'Homme

Le présent article tend à opérer plusieurs modifications dans les procédures suivies devant la Cour de cassation.

Le paragraphe I a pour objet de supprimer, dans l'article 586 du code de procédure pénale, l'amende civile de 7,5 euros qui peut être prononcée à l'encontre d'un greffier qui n'accomplit pas les formalités qui lui incombent dans le délai de vingt jours à compter d'un pourvoi en cassation.

Le greffier qui reçoit une déclaration de pourvoi en cassation doit coter et parapher les pièces du dossier, y joindre une expédition de la décision attaquée et une expédition de l'acte de pourvoi. Il y joint également la justification de la notification du pourvoi aux autres parties, ainsi que le mémoire qui a pu être déposé par le demandeur dans les dix jours suivant la déclaration de pourvoi. Il doit également dresser un inventaire du tout.

Le paragraphe II tend à compléter l'article 612-1 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit qu'en toute matière, lorsque l'intérêt de l'ordre public ou d'une bonne administration de la justice le commande, la Cour de cassation peut ordonner que l'annulation qu'elle prononce aura effet à l'égard des parties à la procédure qui ne se sont pas pourvues.

Le présent paragraphe tend à compléter ces dispositions pour prévoir que le condamné qui ne s'est pas pourvu et à l'égard duquel l'annulation de la condamnation a été étendue ne peut être condamné à une peine supérieure à celle prononcée par la juridiction dont la décision a été annulée.

Une telle précision a été demandée par la Cour de cassation dans son rapport pour 2000. Un condamné criminel, qui ne s'était pas pourvu et à l'égard duquel avait été étendue l'annulation prononcée à la demande d'un condamné dans la même procédure, a vu sa peine aggravée par la cour d'assises de renvoi.

La chambre criminelle de la Cour de cassation, dans un arrêt du 29 février 2000, a indiqué que la durée de la peine concernant ce condamné ne pouvait pas être plus importante devant la cour de renvoi et a limité la durée de la peine à celle qui avait été prononcée devant la première cour d'assises.

La Cour de cassation a recommandé une évolution législative sur ce point car « en l'état des textes, une telle limitation ne peut être imposée d'emblée à la première juridiction de renvoi car elle heurterait la plénitude de juridiction de celle-ci, d'ailleurs reconnue expressément par la Chambre criminelle dans son arrêt ».

Le présent paragraphe tend donc à mettre fin à une incohérence évidente.

Le paragraphe III tend à compléter les dispositions de l'article 626-5 du code de procédure pénale, relatif à la procédure de réexamen d'une décision pénale à la suite du prononcé d'un arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme.

Cette procédure, créée par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, permet à toute personne reconnue coupable d'une infraction de demander le réexamen d'une décision pénale définitive lorsqu'il résulte d'un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'Homme que la condamnation a été prononcée en violation des dispositions de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

La demande de réexamen est adressée à une commission composée de sept magistrats de la Cour de cassation. Si elle estime la demande justifiée, la commission renvoie l'affaire devant une juridiction de même ordre et de même degré que celle qui a rendu la décision litigieuse ou devant la Cour de cassation si le réexamen du pourvoi du condamné est de nature à remédier à la violation constatée par la Cour européenne des droits de l'Homme.

L'article 626-5 permet à la commission de réexamen ou à la Cour de cassation de prononcer à tout moment la suspension de l'exécution de la condamnation.

Le présent paragraphe vient combler une lacune juridique. En effet, lorsque la commission décide le réexamen de l'affaire sans prononcer de suspension de peine, aucune disposition ne prévoit explicitement le maintien en détention de la personne condamnée ni la durée de cette détention.

Le présent paragraphe tend donc à compléter l'article 626-5 du code de procédure pénale pour prévoir que, hors les cas de suspension de l'exécution de la condamnation, la personne demeure détenue, sans que cette détention puisse excéder la durée de la peine prononcée, jusqu'à la décision de la Cour de cassation ou de la juridiction du fond.

La décision devrait intervenir dans le délai d'un an à compter de la décision de la commission, faute de quoi la personne serait remise en liberté, à moins d'être détenue pour une autre cause.

Le texte prévoit que, dans l'attente de la décision de la Cour de cassation ou de la juridiction du fond, la personne est considérée comme placée en détention provisoire et peut former des demandes de mise en liberté dans les conditions prévues aux articles 148-6 et 148-7 du code de procédure pénale (déclaration au greffe de la juridiction compétente, déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire).

Les demandes de liberté seraient examinées conformément aux articles 148-1 et 148-2 du code de procédure pénale.

L'article 148-2 fixe à la juridiction saisie les délais pour statuer sur les demandes de mise en liberté.

L'article 148-1 prévoit que lorsqu'une juridiction de jugement est saisie, il lui appartient de statuer sur la demande de mise en liberté. En matière criminelle, la cour d'assises n'est compétente que lorsque la demande est formée durant la session au cours de laquelle elle doit juger l'accusé ; dans les autres cas, la demande est jugée par la chambre de l'instruction.

Le présent paragraphe tend à préciser dans l'article 626-5 que lorsque l'affaire a été renvoyée devant l'assemblée plénière de la Cour de cassation, la demande est examinée par la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort de laquelle la juridiction ayant condamné l'intéressé a son siège.

Les dispositions du présent paragraphe sont extrêmement importantes en ce qu'elles doivent permettre d'éviter la libération d'individus dangereux, dont la condamnation doit être réexaminée.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 67 sans modification .

* 145 CEDH - 23 novembre 1993 - Poitrimol c. France.

* 146 CEDH - 23 mai 2000 - Van Pelt c. France

* 147 CEDH - 21 janvier 1998 - Von Geyseghem c. Belgique.

* 148 Cass. crim. - 16 mai 2001.

* 149 Décision n° 2002-461 DC.

* 150 Rapport n° 486 (1997-1998).

* 151 « Quels métiers pour quelle justice ? », rapport n° 345 (2001-2002) présenté par M. Christian Cointat au nom de la mission présidée par M. Jean-Jacques Hyest.

* 152 Devenue loi n° 2002-307 du 4 mars 2002.

* 153 Cass. Crim, 8 janvier 1981.

* 154 CEDH Krombach c/France, 13 février 2001.

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