Rapport n° 301 (2003-2004) de M. Daniel GOULET , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 12 mai 2004

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N° 301

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 12 mai 2004

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant l'approbation de l' accord d' assistance mutuelle douanière entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Malte pour la prévention , la recherche , la constatation et la sanction des infractions douanières ,

Par M. Daniel GOULET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. André Dulait, président ; MM. Robert Del Picchia, Jean-Marie Poirier, Guy Penne, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice - présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Ernest Cartigny, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Paul Dubrule, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Jean Faure, Philippe François, Jean François-Poncet, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Bernard Mantienne, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Jacques Peyrat, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean Puech, Yves Rispat, Roger Romani, Henri Torre, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (12 ème législ.) : 1150 , 1269 et T.A. 227

Sénat : 135 (2003-2004)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

L'accord, signé le 14 novembre 2001, entre la France et Malte, sur l'assistance mutuelle pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières, est consécutif à une demande exprimée par les douanes maltaises en 1994.

Celles-ci souhaitaient voir renforcées leurs compétences par un appui technique français.

Cette demande a abouti à la signature du présent accord, destiné à soutenir ce petit pays dans ses efforts de répression des fraudes douanières.

I. LA SITUATION GÉOGRAPHIQUE DE MALTE EN FAIT UN CARREFOUR DES COURANTS D'ÉCHANGES COMMERCIAUX EN MÉDITERRANÉE

Malte a une très ancienne tradition marchande du fait de sa position sur la voie maritime reliant l'Orient à l'Europe de l'Ouest. Elle constitue une escale pour de multiples cargaisons de conteneurs en provenance de pays exportateurs comme la Chine, ou d'éclatement du trafic maritime comme Chypre. Malte est ainsi le point de passage des principaux opérateurs maritimes mondiaux et, de ce fait, le lieu des trafics clandestins toujours induits par cette multiplicité d'intervenants.

Dans la perspective de sa future adhésion à l'Union européenne, Malte a entrepris une coopération avec la Garde des Finances italienne. Les méthodes des services de la douane maltaise ont été ainsi modernisées. Malte participe également à plusieurs systèmes de surveillance et d'opérations maritimes, dans le cadre du Groupe de Coopération douanière. Elle est également membre de « l'opération SIMBAD », qui porte sur des échanges de renseignements sur les mouvements commerciaux effectués par des crédits européens (programme MEDA).

La proximité, tant géographique qu'économique, avec la France -notre pays est le premier partenaire de l'île, en étant son premier client et son deuxième fournisseur, après l'Italie- a conduit La Valette à entreprendre avec notre pays des négociations en matière d'assistance douanière il y a une dizaine d'années .

La France a d'abord insisté pour que Malte ratifie la convention des Nations Unies de 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants, ce qui a été effectué en 1995.

Les principaux flux illicites en provenance de l'île consistent dans la contrebande de cigarettes, et les articles de contrefaçon fabriqués notamment en Chine.

Ces trafics sont liés à la forte activité maritime de l'île, qui constitue sa principale source de richesses avec le tourisme. Ce pays de 320 km 2 , peuplé de 400 000 habitants, ne dispose en effet d'aucune ressource naturelle. La Valette possède ainsi la première flotte marchande d'Europe, et la quatrième au niveau mondial.

L'entrée dans l'Union européenne, le 1 er mai 2004, n'a été approuvée par les citoyens maltais, par referendum du 8 mars 2003, qu'à 53,65 %, ce qui traduit une certaine crainte de voir atténuer les particularismes auxquels les insulaires sont attachés. Des négociations serrées avec l'Union ont ainsi conduit Malte à bénéficier de pas moins de 77 dérogations à l'acquis communautaire.

Cependant, le gouvernement du Premier ministre Fenech Adami est conscient de la nécessité de renforcer et rationaliser l'action de ses services douaniers. On peut espérer que le présent accord conduira à une coopération active entre les douanes françaises et maltaises, alors que leurs actions communes sont très limitées à l'heure actuelle.

II. UN ACCORD DESTINÉ À FONDER UNE COOPÉRATION BILATÉRALE ACTIVE EN MATIÈRE DOUANIÈRE

Les services compétents français apportent déjà un appui à leurs homologues maltais en matière de formation professionnelle. Cependant, le présent accord apporte l'ensemble des fondements juridiques nécessaires à une coopération opérationnelle qui reste à mettre en oeuvre.

Comme d'autres accords du même ordre récemment signés par la France, ce texte s'inspire d'un accord-type, élaboré dès sa création, en 1953, par le Conseil de coopération douanière, qui regroupait alors dix-sept pays européens. Ce cadre juridique établit les modalités d'une assistance administrative mutuelle en matière douanière. Sous la dénomination modernisée d'Organisation mondiale des douanes (OMD), cet organisme compte aujourd'hui 159 Etats membres représentant plus de 95 % des flux mondiaux de commerce.

Cependant, l'OMD limite son champ d'action au commerce international effectué dans un cadre licite. Son action a donc été complétée par la convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, conclue en 1988.

La France a particulièrement insisté auprès de Malte pour que ce pays ratifie cette convention, avant de conclure le présent accord, ce qui a été fait.

L'accord franco-maltais de 2001 s'inspire donc de ce cadre juridique normalisé au niveau international, et en reprend les principales dispositions.

Ainsi l' article premier s'attache-t-il à définir les notions essentielles évoquées par l'accord, dont celle de législation et d'administration douanières, de « territoire douanier », et celle de « livraison contrôlée ».

L' article 2 fixe le champ d'application de l'accord, et l' article 3 porte sur le contenu de la convention, qui consiste dans l'assistance mutuelle et directe entre les administrations compétentes pour prévenir, rechercher et sanctionner les infractions douanières.

L' article 4 évoque les informations dont la nature conduit à leur échange avec les pays partenaires, et l' article 5 décrit les contrôles spéciaux qui peuvent être effectués à la demande de l'un des Etats par l'administration douanière de l'autre sur son territoire. Les déplacements de personnes, les mouvements de marchandises, les lieux où certaines de ces marchandises sont entreposés en quantités suspectes, les divers moyens de transport routier, ferroviaire, aérien ou autres peuvent ainsi être soumis à des contrôles.

Les articles 6 à 9 constituent les éléments les plus novateurs de la convention. Ainsi est prévue la communication, si elle le requiert, à l'administration partenaire, des résultats des enquêtes menées par l'administration nationale, éventuellement en présence d'agents de l'administration requérante. La méthode des « livraisons » surveillées peut être utilisée, sous contrôle judiciaire, pour identifier les personnes impliquées dans les infractions douanières. Les renseignements obtenus dans le cadre du présent accord peuvent être utilisés comme éléments de preuve lors d'un procès, mais bénéficient de la même confidentialité que celle accordée par l'Etat partenaire aux informations de même nature.

Pour la clarté de leur coopération, les administrations douanières se notifient réciproquement la liste des agents susceptibles d'apporter ou de recueillir des informations.

Les articles 10 à 12 prévoient que les agents de l'administration douanière d'un Etat peuvent comparaître comme témoins ou experts devant un tribunal de l'autre Etat.

Les articles 13 à 15 déterminent les modalités d'application de la convention, notamment par la renonciation des deux parties à toute demande de remboursement de frais. Une commission mixte, composée de représentants de chacune des administrations douanières, est créée pour permettre l'application concrète de la convention ; les différends qui ne peuvent être résolus dans ce cadre le sont par voie diplomatique.

Enfin, il est prévu que la convention ait une durée illimitée, mais puisse être dénoncée par écrit avec un préavis de six mois par chacune des parties.

CONCLUSION

La coopération douanière entre la France et Malte est, pour l'instant, très limitée, sans doute du fait que notre pays n'a décelé aucun flux le menaçant en provenance de cette île. L'essentiel des trafics semble, en effet, se limiter à la contrebande de cigarettes ou de produits de marque contrefaits. Cependant, la répression de ces deux types de fraude constitue désormais une priorité pour les autorités françaises. La ratification du présent accord donnera aux futures actions communes une base juridique claire et normalisée.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a procédé à l'examen du présent rapport lors de sa réunion du 12 mai 2004.

A la suite de l'exposé du rapporteur, la commission, suivant les recommandations de ce dernier, a adopté le projet de loi .

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Malte pour la prévention, la recherche et la sanction des infractions douanières, signé à Malte le 14 novembre 2001, et dont le texte est annexé à la présente loi. 1 ( * )

ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT2 ( * )

- Etat de droit et situation de faits existants et leurs insuffisances.

L'accord du 14 novembre 2001 vise à renforcer l'efficacité des administrations douanières dans la lutte contre les fraudes douanières en instaurant une coopération permettant de faciliter la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières, notamment dans le domaine de la lutte contre le trafic de stupéfiants.

Les infractions douanières impliquent, dans la plupart des cas, des actes préparatoires ou de complicité commis à l'étranger et qui, faute de pouvoir recueillir les éléments permettant d'apporter la preuve juridique de leur existence, risquent de rester impunis dans le pays où ils ont été perpétrés. De plus, la complexité des circuits commerciaux et financiers, ainsi que le développement des échanges internationaux, ont considérablement conduit à la sophistication et à l'accroissement des infractions douanières.

Dès lors, en l'absence de coopération internationale, la lutte contre la fraude douanière donnerait peu de résultats et resterait inefficace. L'échange de renseignements entre administrations douanières, qu'il soit spontané ou transmis à la suite d'une demande, constitue ainsi l'un des instruments privilégiés de la coopération administrative douanière.

En matière de lutte contre les stupéfiants, les livraisons surveillées internationales doivent également permettre d'agir plus efficacement contre les trafics de drogue.

Des dispositions particulières du code des douanes (article 65.6) autorisent l'administration des douanes et droits indirects « sous réserve de réciprocité, à fournir aux autorités qualifiées des pays étrangers tous renseignements susceptibles d'établir la violation des lois et règlements applicables à l'entrée et à la sortie du territoire ».

Ainsi, l'administration des douanes peut-elle, même en l'absence de tout texte international, collaborer avec les autorités qualifiées de pays étrangers. Cependant, le recours à ces dispositions demeure limité aux échanges de documents et d'informations. De plus, elles offrent une faible sécurité juridique, notamment dans le domaine de la protection de la confidentialité des renseignements et informations échangés, contrairement aux conventions d'assistance administrative mutuelle en matière douanière.

C'est pourquoi le recours à des accords internationaux, bilatéraux ou multilatéraux, qui offrent une plus grande garantie juridique et davantage de possibilités de coopération, est jugé préférable.

L'intérêt du présent accord est donc de lutter plus efficacement contre les trafics frauduleux internationaux, et de prendre l'engagement avec l'autre Partie de coopérer étroitement et de manière privilégiée, avec une meilleure sécurité juridique.

- Bénéfices escomptés en matière :

* d'emploi

Les conventions ou accords d'assistance administrative mutuelle en matière douanière permettent de protéger l'économie nationale et européenne et, à ce titre, participent à la défense de l'emploi.

* d'intérêt général

Une plus grande efficacité en matière de lutte contre la fraude permettra également d'assurer une meilleure perception des recettes fiscales de l'Etat et de l'Union européenne, de protéger la sécurité et la santé des citoyens français et européens (notamment en matière de lutte contre la drogue), et de mieux défendre les entreprises françaises et européennes contre les menaces d'irrégularités liées aux changements internationaux.

*financière

Néant, excepté celles mentionnées dans le paragraphe précédent (assurer une meilleure perception des recettes fiscales de l'Etat et de l'Union européenne).

* de simplification des formalités administratives

L'accord évitera la multiplication des demandes ponctuelles d'assistance et les rendra plus aisées.

* de complexité de l'ordonnancement juridique

Néant.

* 1 Voir le texte annexé au document Sénat n° (2003-2004)

* 2 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.

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