Rapport n° 67 (2004-2005) de M. Jean-François HUMBERT , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 17 novembre 2004

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N° 67

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Annexe au procès-verbal de la séance du 17 novembre 2004

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant diverses dispositions relatives au sport professionnel ,

Par M. Jean-François HUMBERT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Jacques Legendre, Serge Lagauche, Jean-Léonce Dupont, Ivan Renar, Michel Thiollière, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Pierre Martin, David Assouline, Jean-Marc Todeschini, secrétaires ; M. Jean-Pierre Bel, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jean-Marie Bockel, Yannick Bodin, Pierre Bordier, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Pierre Chauveau, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Christian Demuynck, Denis Detcheverry, Mme Muguette Dini, MM. Alain Dufaut, Louis Duvernois, Jean-Paul Emin, Hubert Falco, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean-François Humbert, Mme Christiane Hummel, MM. Soibahaddine Ibrahim, Pierre Laffitte, Alain Journet, André Labarrère, Philippe Labeyrie, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Jean-Luc Mélenchon, Mme Colette Melot, MM.Jean-Luc Miraux, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jean-François Picheral, Jack Ralite, Philippe Richert, René-Pierre Signé, Mme Catherine Troendle, MM. André Vallet, Marcel Vidal, Jean-François Voguet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 1758 , 1831 et T.A. 339

Sénat : 29 (2004-2005)

Sports.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le texte dont nous sommes saisis est issu d'une proposition de loi, portant diverses dispositions relatives au sport professionnel , déposée à l'Assemblée nationale le 21 juillet 2004 par MM. Édouard Landrin et Jean-Marie Geveaux, députés.

Ses dispositions s'inscrivent dans le droit fil des recommandations formulées par le « comité de suivi des réformes à mettre en oeuvre pour renforcer la compétitivité et l'attractivité des clubs professionnels français », mis en place dans le prolongement du rapport de M. Jean-Pierre Denis, inspecteur des finances, à qui avait été confié une mission d'analyse de certains aspects du sport professionnel en France.

Adopté à l'Assemblée nationale le 14 octobre dernier et transmis au Sénat le 19 octobre, le présent texte se compose de six articles qui portent respectivement sur :

• la reconnaissance d'une rémunération du droit à l'image dans les sports collectifs ;

• la sécurisation de la situation de travail des sportifs sélectionnés en Equipes de France ;

• la suppression du versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée ;

• la levée de l'interdiction absolue de la multipropriété des sociétés sportives ;

• la participation des sociétés sportives au fonctionnement des fédérations.

Ces dispositions résultent notamment des réflexions menées au sein des groupes de travail des Etats généraux du Sport et concrétisent les engagements pris, lors de leur conclusion, le 8 décembre 2002, par le ministre chargé des sports, en particulier sur certains aspects du sport professionnel.

Votre commission est très attentive aux préoccupations du monde sportif. Elle a d'ailleurs organisé au mois de mars 2004 un colloque consacré aux relations entre le sport, l'argent et les médias.

Elle approuve les dispositions proposées qui devraient permettre d'améliorer la compétitivité de nos clubs sur la scène européenne et donc de conserver nos meilleurs talents.

Elle considère cependant que ce texte n'est qu'une première avancée, nécessaire, mais pas suffisante, sur la voie d'une véritable refonte de la régulation sportive.

Elle appelle notamment de ses voeux une réforme permettant de moraliser et de mieux contrôler la profession d'agent de joueurs.

A. UN ENVIRONNEMENT RENOUVELÉ POUR LE SPORT PROFESSIONNEL

En une vingtaine d'années, l'environnement dans lequel évoluent les sportifs professionnels a connu des transformations majeures, sous la double impulsion de la forte progression des produits de la commercialisation des droits TV et de l'émergence d'un marché sportif européen unique.

Les incidences, tant financières que sportives, ne peuvent être ignorées et nécessitent des adaptations législatives et réglementaires, si l'on veut, d'une part, préserver la compétitivité des clubs sportifs français et, d'autre part, garantir la spécificité fondamentale du droit applicable en France aux activités physiques et sportives, basée sur la solidarité entre sport amateur et sport professionnel.

1. Une situation « explosive » entre le sport et les médias

Lors d'un colloque intitulé « Sports, argent, médias », organisé par la commission des affaires culturelles du Sénat en mars dernier, M. Wladimir Andreff, professeur en sciences économiques à Paris I, qualifiait d'explosif le nouveau rapport qui liait les médias au monde du sport professionnel.

Si , en effet, avec un peu plus de 600 millions d'euros, la contribution des médias au financement du sport en France reste relativement minime par rapport à celle des ménages et des personnes publiques, puisqu'elle ne représente que 2,6 % de la dépense intérieure sportive globale, qui est de l'ordre de 25 milliards d'euros par an, en revanche, pour le sport professionnel, la situation est différente.

Selon M. Wladimir Andreff, en dépit du fait que les recettes télévisuelles soient focalisées sur quelques clubs, les médias, et la télévision en particulier, sont devenus la première source de revenus de certains clubs sportifs professionnels , ceci devant les spectateurs et devant les sponsors, alors qu'il y a vingt ans, la situation était inverse : les médias ne représentaient que 1 ou 2 % du financement total du sport professionnel.

A titre d'exemple, aujourd'hui, le produit des retransmissions télévisées représente plus de 40 % du financement du football professionnel.

Comme le faisait remarquer M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, lors de ce colloque, « la médiatisation croissante des sports professionnels, avec les conséquences financières que cela entraîne, impose une rénovation de certains aspects de la politique des sports ».

C'est notamment l'objet du texte examiné, dont l'une des dispositions majeures, à savoir la reconnaissance d'un droit à l'image collectif, vise à garantir aux sportifs évoluant au sein des équipes engagées dans les compétitions, tant nationales qu'internationales, une part légitime des revenus engendrés par l'exploitation médiatique de l'image de l'équipe.

2. L'émergence d'un marché européen du sport professionnel

L'application au domaine sportif d'un certain nombre de règles issues du droit européen, notamment le principe de libre circulation des personnes, consacré en 1995 dans la décision de la Cour européenne de justice (CEJ) sur le cas de M. Jean-Marc Bosman, -qui a annulé les dispositions du règlement de l'Union européenne de football (UEFA) imposant des quotas de nationalité au sein des clubs- a abouti à mettre les clubs sportifs européens en concurrence sur un grand marché unique.

Ce marché des sportifs professionnels est extrêmement fluide, puisque, d'un point de vue technique, le sportif professionnel, bénéficiant de contrats à durée déterminée d'usage et d'un marché structuré des transferts, peut s'expatrier beaucoup plus facilement qu'un salarié classique.

Il en résulte, selon M. Jean-Pierre Denis 1 ( * ) , des distorsions de concurrence importantes, en défaveur des clubs français : « dans ce contexte, le fossé se creuse progressivement entre les clubs français à vocation européenne et leurs grands concurrents étrangers qui, non seulement ont souvent un poids économique supérieur, mais supportent des charges sociales et fiscales moindres . »

En effet, dans ces conditions, les clubs des grands pays ayant les conditions financières d'emploi les plus favorables ont recruté les meilleurs joueurs.

Or, pour offrir le même salaire net après impôt à un sportif, un club français doit dépenser jusqu'à 60 % de plus que ses principaux concurrents anglais, espagnols ou italiens.

Cette situation a engendré une fuite des talents, qui explique qu'il reste exceptionnel que les clubs professionnels français puissent se hisser au niveau des équipes nationales lors des compétitions internationales.

Ainsi, d'après les informations fournies par la Ligue professionnelle de football, aucun club de foot français n'avait pu participer aux quarts de finale de la Ligue des Champions des cinq éditions ayant précédé la finale de Monaco.

En basket, aucun club français n'a participé aux demi-finales de la compétition européenne au cours des sept dernières éditions.

Les meilleurs basketteurs et handballeurs français ainsi que certains rugbymen et volleyeurs évoluent eux aussi à l'étranger.

3. Un processus en cours de modernisation du droit applicable au sport

Les dispositions du présent texte tendant, d'une part, à supprimer le versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée et, d'autre part, à instituer une rémunération du droit à l'image dans les sports collectifs, s'inscrivent dans un mouvement législatif et réglementaire plus large, qui vise à renforcer la compétitivité des clubs français dans ce contexte européen.

Le présent texte constitue une nouvelle étape dans cette voie, après les premiers aménagements apportés par la loi du 1 er août 2003 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives.

Cette dernière a autorisé, d'une part, les clubs sportifs professionnels à acquérir auprès de l'association support la propriété de leurs dénominations, marques et signes distinctifs qui, à travers le marchandisage, sont une source croissante de financements et d'autre part, les fédérations sportives à céder gratuitement aux clubs professionnels la propriété de tout ou partie des droits d'exploitation audiovisuelle des compétitions organisées par la Ligue professionnelle auxquelles ils participent.

Tendant à amplifier le mouvement d'allègement des charges et de diversification des sources de revenus des clubs, les dispositions du présent texte s'inscrivent, par conséquent, dans un processus plus large de modernisation du droit applicable au sport professionnel.

Cette nécessaire modernisation s'insère, néanmoins, dans un cadre législatif et réglementaire spécifique, basé en France sur le principe de solidarité entre sport amateur et sport professionnel.

B. LA SPÉCIFICITÉ DU DROIT APPLICABLE AU SPORT, GARANTIE DE L'ÉQUITÉ SPORTIVE

Comme le soulignait M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, lors du colloque « Sports, argent, médias », « même si ces évolutions touchent au premier chef le sport professionnel, nous devons prendre garde que les aménagements législatifs qui nous incombent ne remettent pas en cause l'unité du monde sportif et la nécessaire solidarité entre sport professionnel et sport amateur, entre sport de haut niveau et sport de masse . »

1. Une spécificité aujourd'hui reconnue au niveau européen...

Dès décembre 1999, la Commission européenne a reconnu le principe d'« égalité des chances » comme une règle inhérente au sport et un objectif légitime mis en oeuvre par l'UEFA par des moyens considérés proportionnés.

Elle s'était prononcée à propos d'une affaire dans laquelle la Communauté urbaine de Lille s'était vue interdire l'accueil d'un match de Coupe de l'UEFA entre le club de football belge l'Excelsior de Mouscron (qui jouait à domicile) et le FC Metz, sur le fondement du règlement qui disposait que, pour des raisons d'équité sportive, tout club devait jouer les matches à domicile sur son propre terrain (règle dite « at home and away from home »), sauf incompatibilité dûment prouvée.

Considérant qu'il s'agissait en l'espèce d'une question relative à une règle purement sportive -dont l'objet est d'assurer l'égalité des chances (équité) entre clubs-, la Commission avait considéré qu'elle échappait à l'application des règles de concurrence du traité (art. 81 et 82), et avait donc donné raison à l'UEFA.

En indiquant, le 3 juin 2002, qu'elle entendait adopter une position favorable à l'égard des nouvelles règles proposées par l'UEFA concernant la vente centralisée des droits de radiodiffusion et autres droits médiatiques de la Ligue des Champions, la Commission européenne a considéré que le maintien d'une solidarité financière entre les clubs apparaissait également comme un objectif légitime dont la mise en oeuvre par des moyens proportionnés permettait de déroger à l'application des règles de concurrence.

Plus récemment, le décret du 15 juillet 2004 a permis aux ligues professionnelles de commercialiser « à titre exclusif » les droits d'exploitation audiovisuelle et de retransmission en direct ou en léger différé des compétitions ou manifestations sportives.

Cela signifie qu'une même société de programme pourra se voir conférer l'exclusivité de la retransmission d'un match, au terme d'une procédure d'appel à candidature publique et non discriminatoire ouverte à tous les éditeurs ou distributeurs de services intéressés.

Le Conseil de la concurrence a validé ces principes, considérant qu'ils n'étaient ni contraires au principe de libre concurrence ni ne tombaient sous le coup de l'interdiction d'abus de position dominante, réprimé par les traités européens.

Le texte qui est aujourd'hui soumis à l'examen du Sénat s'inscrit dans la logique de reconnaissance de la spécificité des activités physiques et sportives.

En proposant, d'une part, d'exonérer les clubs sportifs du paiement de la taxe de 1 % sur les CDD, le dispositif tire les conséquences de l'usage constant du recours au CDD dans le domaine sportif, secteur dans lequel l'exception est devenue la norme, dans un souci de fidélisation du joueur professionnel.

En créant dans le code du travail une deuxième dérogation relative à l'interdiction du prêt de main d'oeuvre à but lucratif pour les sportifs mis à disposition des sélections internationales, par leur employeur, l'article 2 de la présente proposition de loi consolide une pratique qui ressort des nécessités de la compétition.

2. ... mais qui ne doit pas excéder ce qui est nécessaire à la préservation de l'équité sportive

Les communications de la Commission européenne précitées posent les limites de la reconnaissante de la spécificité sportive, en conditionnant les dérogations à l'application des règles de la concurrence à  leur « mise en oeuvre par des moyens proportionnés ».

Il s'agit de rechercher, en tout état de cause, une stricte adéquation entre le but recherché et les restrictions au droit commun de la concurrence.

La spécificité des règles applicables aux activités physiques et sportives est motivée en France par le double souci de préserver, d'une part, la solidarité entre le sport amateur et le sport professionnel et, d'autre part, l'équité sportive, fondement du bon déroulement des rencontres sportives et des compétitions.

Or, à l'instar de M. Jean-Pierre Denis, il semble à votre rapporteur que l'interdiction faite à « toute personne privée, directement ou indirectement, d'être porteur de titres donnant accès au capital ou conférant un droit de vote dans plus d'une société (...) dont l'objet social porte sur une même discipline sportive » -rédaction actuelle du premier alinéa de l'article 15-1 de la loi du 16 juillet 1984- outrepasse, par son caractère trop général et absolu, l'objectif qui la fonde, à savoir, préserver l'équité sportive.

C'est la raison pour laquelle l'article 4 du texte transmis au Sénat et soumis à votre examen propose de l'assouplir au profit de la prohibition du contrôle par une même personne de plus d'une société sportive dans une même discipline.

Soucieuse de donner la plus large portée à cette interdiction, l'Assemblée nationale a étendu la notion de contrôle d'une entreprise, -défini comme la détention directe ou indirecte de la majorité des parts-, à l'exercice d'une influence dominante, le contrôle commun et l'influence notable sur la gestion et la politique financière.

Ainsi, l'assouplissement d'une règle excédant manifestement le but qu'elle se propose d'atteindre permet la meilleure adéquation entre le respect des principes de droit commun de la concurrence et la préservation de l'équité sportive, règle fondamentale au bon déroulement des compétitions.

C. LES DISPOSITIONS SOUMISES À L'EXAMEN DU SÉNAT

Les dispositions du texte adopté le 14 octobre à l'Assemblée nationale et transmis au Sénat peuvent être formellement classées en deux catégories :

- les dispositions législatives modifiant ou complétant le code du travail ;

- celles complétant la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 telle qu'elle résulte de sa dernière modification par la loi n° 2003-708 du 1 er août 2003.

1. Les dispositions législatives modifiant ou complétant le code du travail

• La rémunération du droit à l'image dans les sports collectifs (article 1 er )

Sous la double impulsion de la forte progression des produits de la commercialisation des droits TV et du choix délibéré des clubs de diversifier leurs recettes pour les élargir aux ressources du sponsoring et à la vente des produits dérivés des marques, la pratique consistant à valoriser l'image de certains sportifs professionnels s'est développée dans des conditions très imparfaites et parfois abusives.

En tout état de cause, cette pratique ne bénéficie à l'heure actuelle qu'à certains joueurs, les plus médiatiques, et à titre individuel.

Afin d'élargir les catégories de joueurs susceptibles de profiter des retombées financières de l'exploitation de l'image véhiculée par l'équipe au sein de laquelle ils évoluent dans la pratique des sports dits collectifs, il est proposé de reconnaître aux sportifs professionnels un droit collectif, lorsqu'ils se trouvent dans une situation comparable à celle des artistes-interprètes, c'est-à-dire qu'ils se « donnent à voir », non seulement à l'occasion de la rencontre à laquelle ils participent, mais aussi grâce à l'exploitation commerciale de leur prestation.

Une première partie de leur rémunération, en dessous d'un seuil conventionnel fixé, serait donc constituée d'un salaire, assujetti aux cotisations du régime général de sécurité sociale (les artistes du spectacle et les mannequins bénéficiant cependant de taux de cotisation fixés à 70 % de celles du régime général).

L'autre partie de la rémunération serait constituée, conformément aux articles L. 762-2 et L. 763-2 du code du travail, sous forme de redevances.

Ces redevances, versées en application du contrat qui lie le professionnel à son employeur, ne seraient pas prises en compte pour le calcul des cotisations de sécurité sociale du régime général, mais seraient soumises à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

Au cours des auditions auxquelles votre rapporteur a pu procéder, il est apparu qu'une ambiguïté rédactionnelle permettait aux entraîneurs des équipes sportives de se considérer comme légitimement bénéficiaires du présent dispositif.

Or, telle n'était pas, semble-t-il, l'intention des différents groupes de travail qui ont réfléchi au sujet, ni des auteurs de la proposition de loi.

Afin de lever cette ambiguïté rédactionnelle, votre rapporteur proposera par conséquent au Sénat d'adopter un amendement tendant à clarifier cette question.

• La sécurisation de la situation de travail des sportifs sélectionnés en équipes de France (article 2)

Dans le secteur professionnel, les sportifs, appelés en sélection et mis à la disposition de l'Equipe de France pour participer aux compétitions internationales, sont par ailleurs salariés des clubs avec lesquels ils participent aux compétitions nationales, leur contrat de travail n'étant pas, selon la pratique actuelle, suspendu pendant la période de sélection.

Cette situation entraîne un risque de qualification en prêt de main d'oeuvre illicite (article L. 125-3 du code du travail), et fragilise, par ailleurs, la situation du sportif, dans la mesure où la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) a systématiquement remis en cause la couverture accident au motif que le lien de subordination sur le joueur n'était plus exercé par le club employeur pendant la période de mise à disposition.

Afin de sécuriser de manière définitive la situation de travail spécifique du sportif sélectionné en Equipe de France et surtout de lui assurer une protection sociale optimale en lui garantissant l'accès au régime d'accident du travail, il est proposé de préciser dans le code du travail que ce joueur est, d'une part, dans une situation dérogatoire ne tombant pas sous le coup de l'interdiction du prêt de main d'oeuvre à but lucratif et, d'autre part, qu'il conserve sa qualité de salarié de l'association sportive pendant cette période.

• La suppression du versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée (article 3)

Il ressort de la pratique sportive que l'argumentation de la précarité et de l'incitation à conclure des contrats à durée déterminée (CDI), qui a motivé l'instauration du prélèvement de 1 % sur les CDD, ne saurait valoir pour le sport professionnel (joueurs professionnels -pro et stagiaires- et entraîneurs).

En effet, l'article L. 122-1-1 du code du travail autorise la qualification de contrats d'usage pour certains CDD pour les emplois « pour lesquels, dans certains secteurs d'activité, défini par décret (...), il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois » .

Or, l'article D. 121-1 du code du travail classe le sport professionnel parmi cette catégorie d'activité.

Les contrats à durée déterminée correspondent aujourd'hui à une exigence des organismes fédéraux : ainsi, si un club n'embauche pas un joueur sous CDD, comme il est prévu dans la charte du football, le contrat ne sera pas homologué par la Ligue.

En conséquence, les clubs professionnels sont justifiés à bénéficier de l'exonération du prélèvement de « 1 % CDD », ce que propose le présent article.

2. Les dispositions visant à compléter la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984

• L'assouplissement de l'interdiction de multipropriété des sociétés sportives (article 4)

L'article 15-1 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, tel qu'il a été modifié par la loi n° 99-1124 du 28 décembre 1999, dispose qu' « il est interdit à toute personne privée, directement ou indirectement, d'être porteur de titres donnant accès au capital ou conférant un droit de vote dans plus d'une société constituée conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 11 et dont l'objet social porte sur une même discipline sportive. Toute cession opérée en violation de ces dispositions est nulle ».

Si le principe d'une interdiction reste considéré comme une mesure indispensable pour préserver l'équité d'une compétition et empêcher des manoeuvres éventuelles pouvant influencer le comportement d'une équipe lors d'une compétition, en revanche, le champ de l'interdiction « absolue » de la multipropriété ne paraît plus adapté aux réalités économiques auxquelles sont confrontées lesdites sociétés sportives.

Aussi, et sans mettre en péril l'équité sportive, une multipropriété limitée est acceptable.

C'est la raison pour laquelle il est proposé de modifier l'alinéa premier de l'article 15-1 afin d'autoriser un actionnaire unique à détenir des titres de plusieurs sociétés sportives relevant d'une même discipline, mais en lui interdisant d'en avoir le contrôle économique, au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce.

• La participation des sociétés sportives au fonctionnement des fédérations sportives (article 5)

L'article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives définit la composition des fédérations sportives.

Tel que modifié par la loi n° 2003-708 du 1 er août 2003, cet article précise que les fédérations sportives réunissent des associations sportives et qu'elles peuvent aussi rassembler des personnes physiques auxquelles elles délivrent des licences, des organismes à but lucratif dont l'objet est la pratique d'une ou plusieurs de leurs disciplines et qu'elles autorisent à délivrer des licences et des organismes qui, sans avoir pour objet la pratique d'une ou plusieurs de leurs disciplines, contribuent au développement d'une ou plusieurs de celles-ci.

Les « organismes à but lucratif » peuvent donc être membres associés, les modalités de leur participation étant fixées par les statuts de la fédération.

La réintégration des sociétés parmi la liste des membres susceptibles d'être représentés au sein des structures fédératives s'inscrit dans ce mouvement, initié sous l'impulsion du ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, tendant à permettre l'association la plus large au sein des fédérations de tous les acteurs impliqués dans la vie d'une discipline sportive.

Cette réintégration va dans le sens du renforcement du lien entre le secteur amateur (associations sportives - article 16) et le secteur professionnel (sociétés sportives commerciales spécifiques - article 11), qui est la marque de l'organisation du sport en France.

Ce faisant, la proposition de loi ne fait que rétablir le droit desdites sociétés, tel qu'il avait déjà été accordé par l'article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 précitée dans sa version antérieure à l'intervention de la loi n° 2000-627 du 6 juillet 2000.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
(article L. 785-1 du code du travail)

Rémunération du droit à l'image collective des sportifs professionnels

Cet article propose de créer dans le titre VIII du livre septième du code du travail, consacré aux « Dispositions relatives à certaines catégories de travailleurs et d'entreprises », un chapitre V nouveau portant sur les sportifs professionnels.

Dans une rédaction qui s'apparente à celle de l'article L. 762-2 du même code qui régit le mode de rémunération des artistes de spectacles, le premier alinéa opère une distinction au sein de la rémunération versée à un sportif professionnel entre une part salariale et une part, qui sera versée sous forme forfaitaire, correspondant à la commercialisation par son club employeur de l'image collective de l'équipe à laquelle il appartient.

Le deuxième alinéa définit les personnes éligibles à ce dispositif , -les sportifs professionnels-, comme les personnes ayant passé avec une société relevant des catégories mentionnées à l'article 11 de la loi n° 84-610 précitée, un contrat de travail dont l'objet principal est la participation à des épreuves sportives.

Le troisième alinéa du texte transmis au Sénat dispose que les modalités de fixation de la part de rémunération afférente à l'image collective sont fixées conventionnellement . La détermination de ce quantum tient notamment compte des recettes de parrainage, de publicité et de marchandisage ainsi que de celles provenant de la cession des droits de retransmission audiovisuelle des compétitions, ces dernières devant logiquement se limiter aux droits hors direct. Le pourcentage maximal correspondant à la part de rémunération de l'image collective est fixé à 30 % de la rémunération brute totale versée par la société au sportif.

L'avant-dernier alinéa fixe un seuil de rémunération en deçà duquel il n'est pas possible de distinguer une part de rémunération au titre de l'image collective. Ce seuil ne peut être inférieur à deux fois le plafond de la sécurité sociale, soit 4 952 euros pour l'année 2004. Il est en effet considéré que ce niveau assez faible de rémunération ne peut en aucune façon correspondre à une part de rétribution de l'image collective et est exclusivement de nature salariale.

Le dernier alinéa dispose que, à défaut d'accord collectif, un décret peut déterminer les modalités de calcul de cette part de rémunération correspondant à la rétribution de l'image collective.

Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté quatre amendements rédactionnels à cet article, notamment afin de supprimer la référence à des accords spécifiques concernant la fixation de la part de rémunération du sportif correspondant à la commercialisation de l'image collective de l'équipe à laquelle il appartient.

Elle a, en effet, considéré que la notion de convention collective suffisait pour permettre de tenir compte des accords reconnus par la jurisprudence comme en tenant lieu en son absence.

Position de votre commission

Votre commission estime que le dispositif proposé, qui doit permettre à la fois la mutualisation des retombées financières issues de l'exploitation de l'image d'une équipe sportive et l'amélioration de la compétitivité des clubs, répond aux préoccupations du monde sportif.

Sous la double impulsion de la forte progression des produits de commercialisation des droits télé -qui atteignent pour certains clubs plus de 50 % de leurs ressources-, et de la volonté des clubs de diversifier leurs recettes, la prise en compte du droit à l'image s'est développée , mais à titre individuel et dans des conditions qui ne semblent pas satisfaisantes.

Dans les conditions actuelles, les clubs y voient un moyen de profiter de la notoriété de certains de leurs joueurs pour soustraire une fraction de leurs rémunérations aux charges sociales, tandis que les joueurs sont tentés de ne pas déclarer les revenus qu'ils perçoivent par ce biais.

Concrètement, actuellement, la seule façon de soustraire la valorisation de l'image d'un joueur au régime social de droit commun consiste à isoler la gestion de ses droits d'image dans une structure ad hoc.

En pratique, les clubs fournissent une partie de la rémunération de leurs joueurs sous forme d'honoraires versés à des sociétés chargées d'exploiter leur image ou constituent directement une société dont la vocation est de gérer l'image de ces joueurs et dont le chiffre d'affaires est essentiellement constitué des versements des sponsors.

Ce montage est toléré par l'administration sociale et fiscale, puisqu'il est envisagé par la circulaire du 28 juillet 1994 précitée dans les termes suivants : « En outre, certains clubs peuvent assurer une partie de la rémunération au joueur, sous forme d'un versement à une société domiciliée en France ou à l'étranger, chargée d'exploiter le droit à l'image de celui-ci ».

Mais cette tolérance ne se justifie que par l'assujettissement des sommes versées aux cotisations de sécurité sociale, le texte de la circulaire étant clair sur ce point : « Ces rémunérations ne sont versées que parce que le club exploite l'image de son salarié dans le cadre courant de ses activités (...) et doivent donc être assujetties à cotisations et à contribution ».

Même si le texte de la circulaire tente d'anticiper les possibilités de détournement de la procédure, en stipulant que « l'existence d'une société écran ne peut faire échec à ce principe », en réalité, les clubs utilisent le plus souvent l'externalisation du versement de la rémunération correspondant au droit à l'image comme un moyen d'échapper au paiement des charges sociales (pour un exemple jurisprudentiel cf. : T.A.S.S de Nantes, 14 janvier 1993, Ass. Football club de Nantes c/URSAFF de Loire Atlantique).

C'est pourquoi l'approche du droit à l'image par le canal d'une société chargée de son exploitation présente aujourd'hui de nombreux inconvénients :

- d'une part, comme le soulignait M. Jean-Pierre Denis dans son rapport, « une parfaite connivence entre les clubs et leurs sponsors pourrait aboutir à un niveau de salaire réduit au minimum, au détriment de la couverture sociale des sportifs » ;

- d'autre part, elle conduit à réserver de fait l'avantage de la formule aux seuls sportifs salariés qui intéressent personnellement les sponsors, c'est-à-dire en France à quelques dizaines de professionnels à très forte notoriété , alors même que la fabrication de l'image est, par construction, collective.

Dans le dispositif proposé, les redevances du droit à l'image seraient clairement identifiées au sein de la rémunération globale des joueurs, permettant de les considérer comme la contrepartie directe d'une prestation d'image autonome.

Cette solution semble plus satisfaisante à la fois pour les clubs, -la part de rémunération correspondante n'étant pas soumise aux prélèvements sociaux-, et pour les sportifs, qui bénéficient, par la fixation d'un seuil à négocier conventionnellement, d'une garantie de couverture sociale minimale.

La proximité de la situation des sportifs professionnels et de celle des artistes-interprètes -tous les deux se donnent en spectacle grâce à leur talent et une exploitation commerciale se développe dans le prolongement de leur prestation, sous la forme de diffusion d'images enregistrées-, explique la rédaction choisie, qui s'apparente à celle de l'article L. 762-2 du code du travail.

L'article L. 762-2 du code du travail dispose en effet que « N'est pas considéré comme salaire la rémunération due à l'artiste à l'occasion de la vente ou de l'exploitation de l'enregistrement de son interprétation (...) :

- dès que la présence de l'artiste n'est plus requise pour exploiter ledit enregistrement ;

- et que cette rémunération n'est en rien fonction du salaire reçu pour la production de son interprétation, exécution ou présentation, mais au contraire fonction du produit de la vente ou l'exploitation dudit enregistrement ».

Il en découle que cette rémunération :

- ne constitue pas un salaire soumis à charges sociales ;

- est imposée dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

Il est donc proposé d'aligner la situation du sportif professionnel sur celle des artistes-interprètes.

Votre commission se félicite que les trois préoccupations exprimées par le monde sportif aient été prises en compte.

En premier lieu, le dispositif ne crée pas de régime dérogatoire, mais aligne la situation des sportifs professionnels sur celle d'une catégorie existante, les artistes-interprètes . Ainsi, sur le plan fiscal, la part de rémunération correspondant au salaire continuera à être soumis à l'ensemble des charges sociales et à l'impôt sur le revenu, tandis que la partie forfaitaire sera imposée au titre des bénéfices non commerciaux.

En second lieu, l'ensemble des sommes versées au sportif qui bénéficiera du dispositif apparaîtront sur sa feuille de salaire : une part salaire et une part forfaitaire, permettant aux différentes instances de contrôle un suivi transparent de l'évolution des rémunérations.

Enfin, les syndicats des joueurs ont été associés à l'élaboration du texte, leur adhésion ayant été acquise grâce à la garantie qui a été donnée que l'intégralité du versement des droits sociaux serait préservée .

Lors de la réunion d'étape du comité de suivi, à laquelle votre rapporteur a pu assister, certains représentants du sport professionnel ont fait part de leurs préoccupations s'agissant de la nature de la rémunération représentative du droit à l'image : n'ayant ni la nature d'un salaire, ni le caractère d'un revenu de l'exercice d'une profession non salariée, elle ne relèvera donc d'aucun régime de sécurité sociale.

Sur le plan fiscal , il semble que, ne provenant pas de l'exercice d'une activité professionnelle, la rémunération de l'exploitation de l'image collective de l'équipe aura pour ses bénéficiaires le caractère d'un revenu non salarial perçu passivement, imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en application de l'article 92 du code général des impôts.

Cela nécessitera une mise à jour de la circulaire interministérielle DSS/AAF/A1/94 n° 60 du 28 juillet 1994 relative à la situation des sportifs au regard de la sécurité sociale et du droit du travail, qu'impliquera l'adoption de cet article.

Il ressort en effet du texte de cette circulaire que « dès lors que les sportifs concernés sont affiliés au régime général de sécurité sociale, l'assiette des cotisations et de la contribution sociale généralisée qui sont dues est constituée (...) par toutes les sommes qui leur sont versées en contrepartie ou à l'occasion de leur activité, notamment les salaires ou gains, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature... ».

Votre commission souhaite dès à présent appeler l'attention du Gouvernement sur ce point, dans la perspective de l'élaboration des décrets d'application.

Enfin, eu égard à la jeunesse des joueurs qui sont concernés par le dispositif et à leur relative inexpérience face à la complexité des procédures administratives et fiscales, l'applicabilité du dispositif est conditionnée par la simplicité de sa mise en oeuvre .

Ceci implique, d'une part, que l'ensemble des sommes versées au joueur soient portées sur un seul document et, d'autre part, que la rémunération forfaitaire versée au titre du droit à l'image collectif ne soit pas soumise à des assujettissements divers, au premier rang desquels celui de la taxe professionnelle.

Sur le premier point, il serait souhaitable , pour simplifier les obligations déclaratives des sportifs, de leur permettre de porter le montant de la rémunération de l'exploitation de l'image collective de leur équipe directement dans leur déclaration de revenu global , sauf option pour l'établissement d'une déclaration catégorielle.

S'agissant de l'assujettissement à la taxe professionnelle, la jurisprudence 2 ( * ) a reconnu que les sommes versées pour la reproduction de l'image constituaient un « accessoire indissociable de sa rémunération salariée » et n'étaient, par conséquent, pas susceptibles d'être qualifiées de contrepartie à une activité professionnelle non salariée.

La situation des sportifs étant en tous points similaires, le même traitement fiscal doit leur être appliqué.

*

* *

Votre commission ne peut que souscrire à la réforme proposée, qui participe à l' allègement des charges pesant sur les clubs sportifs français , sans toutefois faire peser un poids trop lourd sur les plus « petits » d'entre eux, le dispositif excluant en effet les sportifs dont la rémunération est inférieure à deux fois le plafond de la sécurité sociale.

Elle se félicite de la part laissée à la négociation, puisque le taux de 30 % inscrit dans la proposition de loi constitue un plafond, lequel pourra donc être réduit par des accords spécifiques.

Elle s'interroge cependant sur les bénéficiaires du dispositif. Au cours des auditions auxquelles le rapporteur a procédé, il est apparu que l'ambiguïté rédactionnelle permettait aux entraîneurs des équipes sportives de se considérer comme bénéficiaires du dispositif. Or, telle n'était pas, semble-t-il, l'intention des participants aux différents groupes de travail, ni celle des auteurs de la proposition de loi.

Cette situation nécessite une clarification. Votre commission vous propose donc un amendement tendant à lever cette ambiguïté, en restreignant son application aux seuls joueurs employés par les clubs.

Elle vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 2
(Article L. 125-3 du code du travail)

Mise à disposition des sportifs professionnels en sélection nationale

Cet article propose d'insérer un nouvel article L. 785-2 dans le nouveau chapitre V portant sur les sportifs professionnels, créé par l'article 1 er de la présente proposition de loi au sein du titre VIII du livre septième du code du travail. Il prévoit une dérogation aux dispositions de l'article L. 125-3 du même code, qui prohibe les opérations à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d'oeuvre, en cas de mise à disposition d'un sportif professionnel par son club employeur , association ou société sportive, auprès de sa fédération délégataire habilitée par l'article 17 de la loi n° 84-610 précitée à procéder aux sélections nationales.

L'article 17-I de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 modifiée relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives prévoit en effet que chaque fédération sportive délégataire procède aux sélections des équipes participant aux compétitions internationales.

Le texte de cet article dispose, par ailleurs, que, durant le temps de cette mise à disposition, le joueur demeure salarié de son club, association ou société sportive, et conserve à ce titre ses droits sociaux.

Il s'agit, notamment, d'assurer à ces sportifs la garantie d'être indemnisés au titre des accidents du travail, en cas de blessure pendant le match.

Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de codification, afin d'insérer le présent article dans le nouveau chapitre V portant sur les sportifs professionnels, créé par l'article 1 er de la présente proposition de loi au sein du titre VIII du livre septième du code du travail, consacré aux « Dispositions relatives à certaines catégories de travailleurs et d'entreprises ».

L'ensemble des dispositions qui modifient le code du travail et qui sont relatives au sport professionnel seraient ainsi rassemblées dans ce chapitre du code du travail.

Position de votre commission

La situation des sportifs mis à disposition par leur employeur au bénéfice des sélections internationales illustre le décalage existant entre les règles de droit commun et la pratique sportive professionnelle.

Si les clubs considèrent, pour leur part, que la pratique de mise à disposition constitue un manque à gagner, revendiquant même, pour certains, l'ouverture d'un droit à indemnisation, cette pratique est néanmoins prévue dans certaines des conventions qui lient les sociétés sportives à leurs fédérations, comme dans le football.

La convention entre la fédération française de football (FFF) et la Ligue de football professionnel (LFP) dispose ainsi dans son article 13 que : « Les groupements sportifs membres de la LFP sont tenus de mettre leurs joueurs à la disposition de la FFF dans les conditions prévues par les règlements de la FIFA (fédération internationale de Football) et les dispositions des règlements généraux de la FFF pour les rencontres disputées par toutes les sélections nationales dans le cadre du calendrier international fixé par la FIFA . »

Mais, aucune disposition n'aborde la question du statut du sportif mis à disposition, ce qui a pu susciter des interrogations quant à la légalité de cette pratique au regard des dispositions du code du travail précitées, ainsi qu'au regard de la couverture du risque accident du travail.

Le dispositif proposé au présent article vise précisément à sécuriser définitivement la situation du travail spécifique en équipe de France d'un joueur sélectionné et surtout de lui assurer la protection sociale et l'accès au régime d'accident du travail.

Restera toutefois le problème des joueurs étrangers évoluant dans le championnat français et mis à la disposition de leur équipe nationale, relevant des fédérations de pays émergeants.

Votre commission, sensibilisée par les conséquences discriminatoires engendrées par l'absence d'harmonisation des législations, s'accorde néanmoins avec les services du ministère pour considérer qu'il n'appartient pas au législateur français de s'immiscer dans la vie de ces fédérations.

Elle vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 3
(Article L. 931-20 du code du travail)

Exonération de la taxe de 1 % sur les contrats à durée déterminée

Cet article vise à créer un article L. 785-3 dans le nouveau chapitre V portant sur les sportifs professionnels, créé par l'article 1 er de la présente proposition de loi au sein du titre VIII du livre septième du code du travail, afin d'exonérer le secteur d'activité du sport professionnel du paiement de la taxe spécifique de 1 % sur les contrats à durée déterminée, prévue à l'article L. 931-20 du code du travail.

Cette taxe, instituée par la loi n° 90-613 du 12 juillet 1990 pour financer le congé individuel de formation (CIF), a en effet perdu sa raison d'être dans le domaine sportif, secteur d'activité dans lequel il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée (CDI).

La loi du 12 juillet 1990, qui est à l'origine de la taxe, avait pour objet de favoriser la stabilité de l'emploi par l'adaptation du régime des contrats précaires.

Ses dispositions tendaient à faire reculer la proportion d'emplois précaires en facilitant leur transformation en emplois stables et à instituer des mesures protectrices au profit des salariés concernés par ces formes d'emplois à caractère subsidiaire.

Elle vise donc les contrats à durée déterminée (CDD) conclus pour des emplois précaires alors que l'entreprise aurait pu créer un emploi stable donnant lieu à la conclusion d'un contrat à durée indéterminée.

Or, l'article L. 122-1-1 du code du travail autorise la qualification de contrats d'usage pour certains CDD pour les emplois « pour lesquels, dans certains secteurs d'activité, définis par décret (...), il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ».

L'article D. 121-1 du code du travail classe le sport professionnel parmi cette catégorie d'activité.

Les contrats à durée déterminée représentent, par conséquent, aujourd'hui , la norme du sport professionnel qui fait partie des secteurs d'activité visés aux articles L. 122-1-1 et D. 121-2 du code du travail susvisés, pour lesquels la dérogation au droit commun du recours au CDI est admise.

Ainsi, un club qui n'aurait pas conclu un CDD conformément aux conditions prévues par la Charte du Football avec un joueur professionnel ne pourrait faire homologuer ce contrat par la Ligue.

La question de savoir si les joueurs des équipes professionnelles de football, de rugby, de basket ou de tout autre sport collectif occupent des emplois permanents ou des emplois ayant par nature un caractère temporaire au sens de l'article L. 122-1-1 du code du travail est donc définitivement tranchée :

- les joueurs et les entraîneurs sont engagés pour des durées nécessairement limitées et le CDD dit « d'usage » constitue le droit commun des sportifs ;

- la conclusion de plusieurs CDD successifs avec le même club employeur, sans contrainte, notamment de délai minimum entre deux contrats est possible ;

- la durée maximale de 18 mois pour les CDD ne s'applique pas aux CDD « d'usage » aux termes d'une jurisprudence constante.

Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de forme, tendant à déplacer le dispositif examiné pour créer un nouvel article L. 785-3 dans le nouveau chapitre V portant sur les sportifs professionnels, créé par l'article 1 er de la présente proposition de loi au sein du titre VIII du livre septième du code du travail.

Position de votre commission

Tout en étant favorable au dispositif proposé, votre rapporteur souhaite cependant soulever la question du remplacement de la taxe dont le présent article propose la suppression, dont il est utile de rappeler qu'en finançant un dispositif de formation professionnelle, elle participe à l'effort de reconversion des sportifs professionnels au terme de leur carrière sportive .

Le renvoi aux règles de droit commun, selon lesquelles tout employeur doit cotiser en faveur de la formation professionnelle continue des salariés à hauteur de 0,2 % (FONGECIF), ne semble pas être une solution satisfaisante, puisqu'elle revient à remplacer une taxe par une autre taxe.

Interrogés par votre rapporteur, les représentants des principaux syndicats signataires de la Convention nationale du sport ont fait savoir que, dans le cadre des réflexions menées sur le chapitre 12 de la Convention (relatif au sport professionnel), un certain nombre de dispositifs conventionnels élaborés discipline par discipline, tendant à mettre en place des mécanismes de formation permettant au joueur d'envisager une reconversion professionnelle, étaient en phase finale de négociation, comme c'est le cas pour le rugby, par exemple.

C'est également le cas dans le secteur du football professionnel : il s'agit d' « Eurosport Reconversion », qui est un organisme financé par les cotisations des joueurs, les abondements de la Fédération et de la Ligue ainsi que par un reversement des droits de retransmission télévisée des matchs. Il existe depuis 10 ans et présente des résultats satisfaisants.

Il semble donc à votre rapporteur indispensable de laisser aux partenaires sociaux représentatifs au sein de chaque discipline le soin de s'accorder conventionnellement sur le remplacement du dispositif .

Ceci ne semble pas incompatible avec la proposition faite par M. Jean-Pierre Denis, dans son rapport sur certains aspects du sport professionnel, de mettre en place un plan d'épargne pour les sportifs professionnels sur le même modèle que le plan d'épargne interentreprises (PEI) mais en l'adaptant aux problématiques sportives.

Actuellement, le PEI permet au salarié qui désire préparer son avenir de placer l'épargne de son choix dans un fonds, que l'entreprise peut abonder à hauteur de trois fois l'épargne du salarié dans une limite de 2 300 euros annuellement. Cet abondement est versé en franchise de charges sociales.

L'adaptation de ce dispositif au milieu sportif concernerait uniquement les sportifs professionnels de l'entreprise et non les autres catégories de salariés qui ne sont pas confrontées à la même problématique de reconversion.

Elle supposerait une hausse du plafond d'abondement de l'employeur, afin de prendre en compte la spécificité de la brièveté de la carrière d'un sportif professionnel, sachant que les critères de déblocage de l'épargne resteraient ceux du droit commun.

Ainsi, chaque sportif professionnel pourrait bénéficier d'un dispositif commun, libre à chacun de consacrer une part supplémentaire de son salaire dans la perspective de préparer sa reconversion.

Sous réserve des observations qui précèdent, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 4
(Article L. 15-1 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative
à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives)

Assouplissement de la règle d'interdiction de la multipropriété
des sociétés sportives au sein d'une même discipline

Cet article propose de modifier la rédaction du premier alinéa de l'article 15-1 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 précitée, afin de rendre possible l'acquisition par une même personne privée d'une participation minoritaire dans le capital de plusieurs sociétés sportives évoluant au sein de la même compétition, tout en prohibant la détention du contrôle au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce de plus d'une de ces sociétés.

L'interdiction, très générale, faite à « toute personne privée, directement ou indirectement, d'être porteur de titres donnant accès au capital ou conférant un droit de vote dans plus d'une société (...) dont l'objet social porte sur une même discipline sportive » -rédaction actuelle du premier alinéa de l'article 15-1- serait ainsi assouplie au profit de celle de la détention du contrôle de plus d'une société sportive au sein d'une même pratique sportive.

Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à modifier la référence à l'article du code de commerce qui définit la notion de contrôle d'une entreprise, afin de substituer l'article L. 233-16 à l'article L. 233-3, le premier incluant, outre la détention directe ou indirecte de la majorité des parts, l'exercice d'une influence dominante, le contrôle commun et l'influence notable sur la gestion et la politique financière, conformément aux modifications introduites par la loi de sécurité financière adoptée en août 2003.

Cette substitution n'est, par conséquent, pas de pure forme, puisqu'elle renforce les contraintes pesant sur un investisseur qui souhaiterait acquérir des parts dans deux sociétés sportives relevant de la même discipline.

Position de votre commission

Comme le soulignait M. Jean-Pierre Denis dans son rapport, la France a toujours considéré que la propriété, par un même investisseur, de plusieurs clubs sportifs engagés dans des compétitions relevant d'une même discipline, portait préjudice à l'équité sportive. La tentation d'influer sur les résultats des rencontres s'en trouve, en effet, démultipliée.

Si l'interdiction de la multipropriété des clubs sportifs français -qui se rapproche, d'ailleurs, des interdictions en vigueur aux Etats-Unis dans des disciplines où la professionnalisation est très poussée, comme la NBA, la NFL ou NHL-, ne semble pas constituer un obstacle aux performances sportives, son caractère général et absolu suscite pourtant des interrogations quant à, d'une part, sa compatibilité avec le droit communautaire, d'autre part, son effet sur la compétitivité des clubs sportifs.

En ce qui concerne le droit communautaire, l'article 56 du Traité prohibe les restrictions aux mouvements de capitaux entre les Etats membres. L'interdiction de multipropriété constitue, par conséquent, une exception à la règle de liberté d'investissement.

Votre rapporteur tient à souligner que l'assouplissement proposé ne cherche en aucune façon à soumettre intégralement les activités sportives aux règles de la concurrence qui régissent le droit commun des sociétés en Europe. Ce serait, en tout état de cause, se montrer plus exigeant que les institutions communautaires elles-mêmes, dont la position a évolué dans le sens d'une reconnaissance de la spécificité des compétitions sportives.

Il s'agit, en revanche, de se rapprocher de la position européenne qui recherche une stricte adéquation entre le but poursuivi et les restrictions au droit commun de la concurrence.

Or, à l'instar de M. Jean-Pierre Denis, votre commission considère que la législation actuelle excède les normes indispensables pour préserver l'indépendance des clubs et l'intégrité des résultats sportifs .

Cette conviction rejoint la position de la Commission européenne, selon laquelle si, « a priori, l'imposition d'une restriction à la prise de participation dans le capital d'entreprises pratiquant une même discipline sportive pourrait se justifier par une raison impérieuse d'intérêt général (...) » néanmoins « l'interdiction absolue instaurée par l'article 15-1 de [ladite] loi est excessive et disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ».

L'assouplissement proposé paraît d'autant plus approprié qu'il encourage les prises de participation dans le capital des sociétés sportives, à un moment où, comme le soulignait notre collègue M. Yvon Collin dans son rapport sur le football professionnel 3 ( * ) , certains clubs souffrent d'une structure financière fragile.

Certains investisseurs, notamment des groupes de médias, seraient désireux d'accroître leurs possibilités d'engagement dans les clubs professionnels, et n'en sont empêchés que par la règle qu'il s'agit ici d'atténuer.

Il convient, en outre, de rappeler qu'est maintenue l'interdiction faite à un actionnaire privé d'une société sportive de consentir un prêt ou de se porter caution d'une autre société pratiquant le même sport, posée au second alinéa de l'article 15-1.

Il faut, enfin, relever les difficultés tenant au contrôle du respect de la règle d'interdiction, dont l'application semble, par conséquent, problématique.

Un rapport remis au ministre des sports en 2001 à propos de la notion de participation indirecte soulèverait la question de la détention de 56,7 % du capital du Paris Saint Germain (PSG) et de 34 % de celui de l'Olympique Lyonnais (OL) par respectivement les sociétés Canal Plus, filiale de Vivendi et Pathé. Les sociétés Vivendi et Pathé ayant opéré un rapprochement par acquisition de parts, le rapport posait la question de savoir si Vivendi pouvait être considéré comme étant indirectement présent dans le capital de deux clubs professionnels français -question qui n'a pas trouvé de réponse claire depuis.

Votre rapporteur considère, par conséquent, que l'assouplissement de la règle d'interdiction de la multipropriété des clubs sportifs français va dans le sens de la modernisation du droit applicable aux activités sportives, permettant, en outre, au droit français de se rapprocher des règles adoptées par l'Union européenne des associations de football (UEFA).

Le règlement intérieur de cette dernière ne prohibe en effet pas systématiquement la détention de titres de plusieurs sociétés sportives ayant la même activité, mais permet d'exercer un contrôle sur la façon dont est utilisé le pouvoir au sein des structures sociales.

Visant à protéger l'intégrité des compétitions interclubs et l'indépendance des clubs, l'objet des dispositions insérées dans le règlement tend à permettre à l'UEFA de prendre toute mesure, -y compris l'exclusion du club de la compétition-, dans les situations où une même personne serait en mesure d'exercer une influence sur la gestion, l'administration et/ou les activités sportives de plus d'une équipe participant à la même compétition et d'interdire, en particulier aux clubs, de posséder des titres d'un autre club ou d'intervenir plus généralement dans son fonctionnement.

Sa validité a été reconnue par la Commission européenne.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 5
(Article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation
et à la promotion des activités physiques et sportives)

Possibilité pour les fédérations de conférer la qualité de membre
aux sociétés sportives constituées
dans la ou les disciplines qu'elles encadrent

Cet article vise à compléter la liste des entités qui peuvent se voir conférer la qualité de membre d'une fédération, afin d'y réintégrer les sociétés sportives créées en vertu de l'article 11 de la loi n° 84-610 précitée.

En l'état actuel du droit, tel que modifié en dernier lieu par la loi n° 2003-708 du 1 er août 2003, les fédérations sportives peuvent regrouper, outre les associations sportives -qui en forment la base la plus large- les personnes physiques auxquelles elles délivrent directement des licences, les organismes à but lucratif dont l'objet est la pratique d'une ou plusieurs de leurs disciplines et qu'elles autorisent à délivrer des licences ainsi que les organismes qui , sans avoir pour objet la pratique d'une ou plusieurs de leurs disciplines, contribuent au développement d'une ou plusieurs de celles-ci .

La possibilité d'associer des organismes à but lucratif traduit la volonté du ministère d'ouvrir les instances fédérales à l'ensemble des acteurs intéressés par la pratique sportive concernée.

Cet élargissement a été rendu nécessaire par l'adoption de la loi du 8 juillet 2000 dite loi Buffet, dont les dispositions ont exclu de la liste des membres de la fédération les sociétés commerciales qui ont pour objet la pratique d'activités physiques et sportives, au motif que « leurs nouveaux statuts issus de la loi portant diverses mesures relatives à l'organisation d'activités physiques et sportives du 28 décembre 1999, présentant des caractéristiques trop commerciales pour être considérées comme entrant directement dans le cadre de l'objet de ces fédérations » .

L'article 11 de la loi du 16 juillet 1984 prévoit que « toute association sportive affiliée à une fédération sportive régie par le chapitre III du titre 1 er de la présente loi qui participe habituellement à l'organisation de manifestations sportives procurant des recettes d'un montant supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat [1,2 million d'euros] ou qui emploie des sportifs dont le montant total des rémunérations excède un chiffre fixé par décret en Conseil d'Etat [800 000 euros] constitue pour la gestion de ces activités une société commerciale régie par la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales et par les dispositions de la présente loi ».

La forme que la société peut prendre est très encadrée : elle peut se constituer sous forme soit « d'une société à responsabilité limitée en ne comprenant qu'un associé, dénommée entreprise unipersonnelle sportive à responsabilité limitée ; soit d'une société anonyme à objet sportif ; soit d'une société anonyme sportive professionnelle. (...) ».

L'exclusion des sociétés sportives de la vie de la fédération traduit, par conséquent, une attitude de méfiance à l'égard d'organismes fonctionnant sous contrainte financière, qui va à l'encontre des dispositions de la loi du 1 er août 2003, précitée.

Il est, par conséquent, proposé de réintégrer les sociétés sportives créées en vertu de l'article 11 précité dans la liste des membres des fédérations.

Position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

Position de votre commission

Relevant que cette disposition ne fait que conférer aux fédérations une faculté nouvelle et non pas leur imposer une obligation, votre commission considère que la réintégration des sociétés sportives au sein des instances fédératives traduit l'interdépendance effective du sport professionnel et du sport amateur .

Il convient de rappeler, à titre d'exemple, qu'en vertu, d'une part, de la taxe dite « Buffet », qui institue un reversement de 5 % des droits de retransmission télévisée perçus par les clubs professionnels et, d'autre part, du protocole financier conclu par la Ligue de football professionnel, les clubs de football évoluant en ligue 1 et 2 reversent actuellement 30 millions d'euros par an au secteur associatif amateur.

La collaboration des sociétés sportives constitutives des clubs et des associations représentatives du mouvement amateur au sein des structures de décision fédérales semble n'être que la traduction institutionnelle de cette solidarité financière.

Votre commission tient enfin à rappeler qu'il reviendra aux statuts de définir les modalités de cette participation, laissant à chaque instance fédérale le soin d'arbitrer entre les différentes personnes associées et éventuellement, de fixer un seuil de participation permettant de limiter le nombre de voix dont disposeront les sociétés commerciales au sein du comité directeur.

Par conséquent, elle vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 6

Gage de la proposition de loi

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale par amendement du Gouvernement, vise à assurer la recevabilité financière de cette proposition de loi en gageant, par l'augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts (droits sur les tabacs), les pertes de recettes pour l'Etat et les régimes sociaux qui résulteraient de l'application de ses dispositions.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 17 novembre 2004, la commission a examiné le rapport de M. Jean-François Humbert sur la proposition de loi n° 29 (2004-2005), adoptée par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives au sport professionnel .

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Bernard Murat a félicité le rapporteur pour la clarté de sa présentation, sur un sujet qui n'était pas forcément abordable pour des non-initiés.

Il a néanmoins souligné que le véritable problème des joueurs résidait dans le niveau de la fiscalité française, exorbitant par rapport à celui de nos voisins européens. Ayant participé à un colloque sur le thème de « la réglementation européenne et les associations », il a considéré que la discrimination qui en découlait pour les clubs français ne trouverait pas d'issue sans harmonisation fiscale et sociale à l'échelle de l'Union européenne.

Évoquant l'applicabilité aux entraîneurs du dispositif instituant le droit à l'image collectif, il a estimé que ces derniers participaient à la valorisation de l'image de l'équipe, et qu'ils étaient soumis aux mêmes contraintes que les sportifs. Faisant allusion à Arsène Wenger, ancien entraîneur du club d'Arsenal expatrié à l'étranger, il a rappelé que la fuite des talents n'épargnait pas les entraîneurs.

Il a, par conséquent, regretté leur exclusion du dispositif, particulièrement au moment où cette profession offrait aux sportifs professionnels une voie possible de reconversion en fin de carrière.

Il a, enfin, interrogé le rapporteur sur le cas des sportifs dont l'image continuerait à être exploitée, par exemple lors de rediffusions télévisées, mais qui auraient quitté le club et ne bénéficieraient donc plus du droit institué par le dispositif.

Mme Annie David a indiqué qu'en dépit de la clarté de la présentation du rapporteur, le groupe communiste républicain et citoyen ne pourrait approuver la proposition de loi.

Après s'être déclarée favorable à l'article 2 qui vise à sécuriser la situation des joueurs sélectionnés en équipe de France, elle a, en revanche, dénoncé le dispositif du droit à l'image collectif, qu'elle a considéré être un véritable « pillage fiscal » des joueurs, particulièrement ceux qui sont les plus vulnérables.

Elle s'est, de même, interrogée sur les conséquences de la disparition de la taxe de 1 % sur les CDD, et regretté que le texte ne prévoit aucun dispositif de remplacement pour soutenir les structures de reconversion que la taxe était destinée à financer.

Considérant l'assouplissement de l'interdiction de posséder des parts sociales dans deux sociétés sportives d'une même discipline comme une atteinte à l'équité sportive et la réintégration des sociétés sportives dans les structures fédérales comme une nouvelle tentative du sport professionnel d'imposer ses intérêts au sport amateur, elle a indiqué qu'elle se prononcerait contre le texte examiné.

M. Jean-François Picheral a soulevé le problème des agents des joueurs, pour regretter que le texte n'aborde pas ce sujet, pourtant d'une actualité criante. Il a attiré l'attention de la commission sur les diverses malversations occasionnées par les activités de ces intermédiaires, que ses différents interlocuteurs estimaient en grande partie responsables de l'inflation galopante des salaires des joueurs, véritable asphyxie pour les clubs.

Il a estimé qu'une véritable reprise en main était nécessaire, particulièrement concernant les agréments donnés aux agents qui devraient être mieux contrôlés.

Évoquant le cas des entraîneurs sportifs, il a avoué ne pas comprendre leur exclusion du dispositif du droit à l'image collectif.

S'exprimant, enfin, sur la multipropriété des sociétés sportives, il a donné pour preuve des risques d'atteinte à l'équité sportive le cas des casinotiers Partouche, détenteur de titres dans le club de Football de Lille et sollicités par le club Olympique de Marseille, contraints de décliner la proposition à cause de la confusion des intérêts qu'aurait engendrée la rencontre sportive des deux équipes en compétition.

M. Alain Dufaut s'est dit très préoccupé par le trafic d'« argent sale » lié non seulement aux activités des agents de joueurs, mais également à toutes les intermédiations existantes dans le monde du sport professionnel : il a notamment évoqué, à cet égard, le scandale des sommes versées aux clubs sportifs par la société « Canal+ » par l'intermédiaire du groupe SportFive.

Il a estimé que l'importance prise par les agents des joueurs, dont l'influence tendait à dépasser celle des présidents de Clubs, rendait urgente une véritable réforme du système.

Revenant au dispositif examiné, il a estimé que les cinq points constituaient un premier pas dans le bon sens, même s'il s'est interrogé sur l'opportunité de ne pas inclure les entraîneurs parmi les personnes susceptibles de bénéficier du droit à l'image.

M. Serge Lagauche a considéré que le texte ne visait en réalité qu'à satisfaire les intérêts d'un petit nombre, à savoir les sportifs les plus rémunérés, sans véritablement répondre aux préoccupations, pourtant nombreuses, de l'ensemble du monde sportif.

M. Jacques Valade, président , s'est lui aussi inquiété des problèmes posés par les conditions d'exercice de la profession d'agent de joueurs dans notre pays. Il a estimé indispensable que des mesures soient prises pour moraliser cette profession et mieux en contrôler l'accès.

Il a considéré que le texte examiné n'était qu'une première avancée, nécessaire, mais pas suffisante, sur la voie d'une véritable refonte de la régulation sportive en France.

En réponse aux interrogations de ses collègues, M. Jean-François Humbert, rapporteur, a ensuite apporté les précisions suivantes :

- le traité constitutionnel de l'Union, en cours d'approbation, a intégré le sport, conformément aux souhaits exprimés par le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative lors de la conclusion des Etats généraux du sport, parmi les sujets susceptibles d'être discutés au niveau européen ;

- les entraîneurs des équipes sportives restent libres de valoriser leur image à titre individuel, ce que certains d'entre eux ont déjà fait, par ailleurs ;

- la baisse des charges résultant de la mise en oeuvre des différents dispositifs devrait permettre de susciter un cercle vertueux, permettant, à terme, de réduire l'exode des meilleurs joueurs à l'étranger, avec toutes les retombées fiscales induites.

A l'issue de ce débat, la commission a adopté la proposition de loi, sous réserve de l'amendement proposé par son rapporteur, le groupe socialiste s'abstenant et le groupe communiste républicain et citoyen votant contre.

LISTE DES PERSONNALITÉS AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR

- M. Cédric BOUDAREL , salarié de PROVAL et représentant des joueurs de rugby professionnel

- M. Thibaut DAGORNE , représentant du syndicat des entraîneurs de football (UNECATEF) et chargé de développement de Cadrefoot

- M. Philippe DIALO , représentant de l'Union des clubs de football professionnels (UCFP)

- MM. Franck LECLERC et Joël TARDY , représentant la Fédération Nationale des Associations et des Syndicats de Sportifs (FNAS)

- M. Éric MESNILDREY , représentant de la CFE-CGC et également du syndicat des entraîneurs de rugby

- M. Philippe PIAT , représentant de l'Union des clubs de football (UCF)

- M. Denis PROVOST , avocat associé au cabinet FIDAL et conseil de l'UCF

- M. Dominique QUIRION , représentant de l'Union nationale des syndicats autonomes (UNSA)

- M. Frédéric THIRIEZ , Président de la ligue nationale de football professionnel (LFP)

I. TABLEAU COMPARATIF

___

Textes en vigueur

___

Texte adopté

par l'Assemblée nationale

___

Propositions de la Commission

___

Proposition de loi portant diverses dispositions relatives au sport professionnel

Proposition de loi portant diverses dispositions relatives au sport professionnel

Code du travail

Livre VII

Dispositions particulières à certaines professions

Titre VIII

Dispositions relatives à certaines catégories de travailleurs et d'entreprises

Article 1 er

Article 1er

Le titre VIII du livre VII du code du travail est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

Alinéa sans modification

« CHAPITRE V

Division et intitulé

Sans modification

« Sportifs professionnels

« Art. L. 785-1. - N'est pas considérée comme salaire la part de la rémunération versée à un sportif professionnel par une société relevant des catégories mentionnées à l'article 11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, et qui correspond à la commercialisation par ladite société de l'image collective de l'équipe à laquelle le sportif appartient.

« Art. L. 785-1. - Alinéa sans modification

« Pour l'application du présent article, sont seules considérées comme des sportifs professionnels les personnes ayant conclu, avec une société mentionnée à l'alinéa précédent, un contrat de travail dont l'objet principal est la participation à des épreuves sportives.

« Pour l'application...

...sont seuls considérés comme des sportifs professionnels les sportifs ayant conclu...

...sportives.

« Des conventions collectives conclues, pour chaque discipline sportive, entre les organisations représentatives des sportifs professionnels et les organisations représentatives des sociétés employant des sportifs professionnels déterminent les modalités de fixation de la part de rémunération définie au premier alinéa, en fonction du niveau des recettes commerciales générées par l'exploitation de l'image collective de l'équipe sportive et notamment des recettes de parrainage, de publicité et de marchandisage ainsi que de celles provenant de la cession des droits de retransmission audiovisuelle des compétitions.

Alinéa sans modification

« Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas à la part de rémunération inférieure à un seuil fixé par les conventions collectives et qui ne peut être inférieur à deux fois le plafond fixé par décret pris en application de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale.

Alinéa sans modification

« La part de rémunération définie au premier alinéa est fixée par convention collective dans chaque discipline. Elle ne peut toutefois pas excéder 30 % de la rémunération brute totale versée par la société au sportif professionnel.

Alinéa sans modification

« En l'absence d'une convention collective pour une discipline sportive, un décret peut déterminer les modalités de cette part de rémunération dans ladite discipline, dans le respect des conditions édictées par les alinéas précédents. »

Alinéa sans modification

Article 2

Article 2

Le chapitre V du titre VIII du livre VII du code du travail est complété par un article L. 785-2 ainsi rédigé :

Sans modification

« Art. L. 785-2. - Les dispositions de l'article L. 125-3 ne sont pas applicables à l'opération mentionnée à cet article, lorsqu'elle concerne le salarié d'une association ou société sportive mentionnée à l'article 11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, lorsqu'il est mis à disposition de la fédération sportive délégataire concernée en qualité de membre d'une équipe de France dans des conditions définies par la convention conclue entre ladite fédération et la ligue professionnelle qu'elle a constituée, et alors qu'il conserve, pendant la période de mise à disposition, sa qualité de salarié de l'association ou de la société sportive ainsi que les droits attachés à cette qualité. »

Article 3

Article 3

Le chapitre V du titre VIII du livre VII du code du travail est complété par un article L. 785-3 ainsi rédigé :

Sans modification

« Art. L. 785-3. - Le versement prévu par l'article L. 931-20 n'est pas dû en cas de contrat à durée déterminée conclu, en application du 3° de l'article L. 122-1-1, dans le secteur d'activité du sport professionnel. »

Article 4

Article 4

Loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives

Le premier alinéa de l'article 15-1 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives est ainsi rédigé :

Sans modification

Art. 15-1. - Il est interdit à toute personne privée, directement ou indirectement, d'être porteur de titres donnant accès au capital ou conférant un droit de vote dans plus d'une société constituée conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 11 et dont l'objet social porte sur une même discipline sportive. Toute cession opérée en violation de ces dispositions est nulle.

.................................................

« Il est interdit à une même personne privée de détenir le contrôle, au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce, de plus d'une société constituée conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 11 et dont l'objet social porte sur une même discipline sportive. »

Article 5

Article 5

Art. 16. - I. - Les fédérations sportives ont pour objet l'organisation de la pratique d'une ou plusieurs disciplines sportives. Elles sont constituées sous forme d'associations, conformément à la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ou à la loi locale dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. Elles groupent des associations sportives. Ces fédérations sont les fédérations unisports ou multisports, les fédérations affinitaires et les fédérations sportives scolaires et universitaires.

Les fédérations peuvent aussi grouper en qualité de membres, dans des conditions prévues par leurs statuts :

1° Les personnes physiques auxquelles elles délivrent directement des licences ;

2° Les organismes à but lucratif dont l'objet est la pratique d'une ou plusieurs de leurs disciplines et qu'elles autorisent à délivrer des licences ;

3° Les organismes qui, sans avoir pour objet la pratique d'une ou de plusieurs de leurs disciplines, contribuent au développement d'une ou plusieurs de celles-ci.

.................................................

Après le cinquième alinéa (3°) du I de l'article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

Sans modification

« 4° Les sociétés sportives mentionnées à l'article 11. »

Article 6

Article 6

En application de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les pertes de recettes liées à l'application de l'article L. 785-1 du code du travail sont compensées intégralement par le budget de l'Etat aux régimes de sécurité sociale concernés.

Sans modification

* 1 Voir le rapport précité sur « certains aspects du sport professionnel en France ».

* 2 Arrêt du Conseil d'Etat du 29 décembre 2000 C.E. - ministre de l'économie, des finances et de l'industrie c/ Melle Claire Dhelens.

* 3 Rapport d'information n° 336 (2003-2004) de M. Yvon Collin , fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, déposé le 8 juin 2004.

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