TITRE II :

DISPOSITIONS PERMANENTES

I. - MESURES FISCALES

ARTICLE 17

Extension du dispositif de rescrit fiscal aux demandes concernant l'existence d'établissements stables

Commentaire : le présent article a pour objet d'étendre le dispositif de rescrit fiscal aux demandes concernant l'existence d'établissements stables.

I. LA NOTION D'ÉTABLISSEMENT STABLE

Afin d'éviter les doubles impositions ou l'absence d'imposition, l'article 7 du modèle de convention fiscale élaboré par l'OCDE propose une règle de détermination de la compétence des Etats en matière d'imposition des entreprises, selon laquelle les bénéfices d'une société d'un Etat ne peuvent être imposés dans un autre Etat que si elle y dispose d'un établissement stable.

Cette notion d'établissement stable est définie par l'article 5 dudit modèle comme « une installation fixe d'affaires par l'intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité, ou, en l'absence d'une telle installation, toute personne ayant le pouvoir d'engager à titre habituel l'entreprise, sauf s'il s'agit d'un agent bénéficiant d'un statut d'indépendant ». Cet article 5 précise par ailleurs que constituent en principe un établissement stable : un siège de direction, une succursale, un bureau, une usine ou un atelier.

Cela étant, ce même article 5 considère qu'il n'y a pas d'établissement stable notamment s'il est fait usage d'installations aux seules fins de stockage, d'exposition ou de livraison de marchandises appartenant à l'entreprise ; si des marchandises appartenant à l'entreprise sont entreposées aux seules fins de stockage, d'exposition ou de livraison ; si des marchandises appartenant à l'entreprise sont entreposées aux seules fins de transformation par une autre entreprise ; si une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins d'acheter des marchandises ou de réunir des informations, pour l'entreprise ; si une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins d'exercer, pour l'entreprise, toute autre activité de caractère préparatoire ou auxiliaire ; etc.

Comme le suggèrent ces précisions, cette notion d'établissement stable est en pratique relativement difficile à cerner , notamment pour les activités, comme la finance et les services aux entreprises, ne nécessitant pas d'infrastructures physiques importantes, ainsi que pour les entreprises s'implantant progressivement.

En conséquence, la notion d'établissement stable donne lieu à la fois à des redressements conséquents et à une jurisprudence abondante. Cela se traduit par une insécurité juridique particulièrement préjudiciable à l'attractivité du territoire national , car elle peut conduire des entreprises étrangères à s'implanter en France a minima afin d'être certaines que leurs implantations (par exemple des bureaux de représentation) ne puissent être qualifiées d'établissement stable.

II. L'EXTENSION DU DISPOSITIF DE RESCRIT FISCAL AUX DEMANDES CONCERNANT L'EXISTENCE D'ÉTABLISSEMENTS STABLES

Le présent article vise à étendre le dispositif de rescrit fiscal aux demandes concernant l'existence d'établissements stables.

En application des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales (LPF), l'administration fiscale ne peut pas procéder à des rectifications fiscales lorsqu'elle a été préalablement interrogée par le redevable sur la conformité de sa situation :

« Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration .

« Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ».

L'article L. 80 B du LPF précise les modalités d'application de cette garantie et liste également les cas de rescrit , c'est-à-dire ceux où le silence de l'administration, passé un certain délai, vaut accord tacite .

Le présent article propose, pour les demandes adressées à compter du 1 er janvier 2005 , d'étendre le dispositif de rescrit fiscal aux demandes concernant l'existence d'établissements stables, en l'absence de réponse de l'administration fiscale dans un délai de trois mois . Il s'agit d'offrir la possibilité aux opérateurs étrangers, souhaitant réaliser des activités en France mais ne pas s'implanter sous la forme d'une société, d'interroger l'administration fiscale pour obtenir l'assurance qu'ils ne disposent pas d'un établissement stable.

La question posée devrait concerner principalement les filiales 40 ( * ) : la situation de fait présentée par l'entreprise manifeste-t-elle une relation société mère-établissement stable, ou la filiale est-elle indépendante ? Si l'administration ne répond pas dans un délai de trois mois, la filiale pourra prétendre être indépendante.

La garantie décrite précédemment à l'article L. 80 A du LPF serait ainsi applicable : « lorsque l'administration n'a pas répondu dans un délai de trois mois à un contribuable de bonne foi qui a demandé, à partir d'une présentation écrite précise et complète de la situation de fait , l'assurance qu'il ne dispose pas en France d'un établissement stable ou d'une base fixe au sens de la convention fiscale liant la France à l'Etat dans lequel ce contribuable est résident ».

La demande doit ainsi être « écrite , précise et complète » dans l'exposé de la situation de fait. Elle doit être effectuée par un contribuable « de bonne foi » : cette condition n'est pas respectée si celui-ci a menti ou dissimulé certains éléments lorsqu'il a exposé sa situation de fait à l'administration fiscale.

Seuls les contribuables résidant dans un Etat lié à la France par une convention fiscale peuvent bénéficier de cette disposition.

Un décret en Conseil d'Etat doit fixer les modalités d'application du présent article.

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

Votre rapporteur général est très favorable au dispositif ainsi proposé, de nature à accroître la sécurité juridique des investisseurs étrangers.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 18

Renforcement des garanties accordées par la conclusion d'un accord préalable en matière de prix de transfert

Commentaire : le présent article a pour objet d'étendre les garanties offertes au contribuable par la conclusion d'un accord préalable en matière de prix de transfert.

I. LES NOTIONS DE PRIX DE TRANSFERT ET D'ACCORDS PRÉALABLES DE PRIX

A. LA NOTION DE PRIX DE TRANSFERT

Dans son XXII ème rapport relatif à la concurrence fiscale et l'entreprise, le Conseil des impôts expliquait de manière fort claire la notion de prix de transfert :

« Les multinationales sont des ensembles intégrés qui procèdent à de multiples transactions à l'intérieur de leur groupe. A cette occasion, une société filiale peut facturer des biens ou services à sa société-mère, sa société-soeur ou à ses propres filiales : le prix auquel est effectuée cette opération est appelé le prix de transfert .

« Différentes transactions peuvent donner lieu à la fixation d'un prix de transfert. Il peut s'agir de la vente d'un bien corporel, de la réalisation d'une prestation de service ou du versement d'une redevance pour l'usage d'une marque ou d'un brevet.

« Supposons ainsi qu'une société-mère située dans le pays A, où le bénéfice est faiblement taxé, vende des produits à sa filiale qui les commercialise dans le pays B, où les bénéfices sont lourdement taxés. Il est tentant pour le groupe de majorer le prix de vente interne des produits de la mère à la filiale pour localiser la part la plus importante du bénéfice là où l'impôt est le plus faible.

« Il faut préciser que la fixation des prix de transfert n'a pas comme seul objectif la réduction de l'impôt. Elle peut simplement conduire à faire remonter plus rapidement le bénéfice vers la société mère, même si elle est située dans un pays pratiquant un taux d'imposition proche. C'est en particulier le cas pour les firmes américaines.

« Il est parfois très délicat de tracer la frontière entre fraude et optimisation fiscale sur de tels sujets . En effet, la fixation des prix de transfert est relativement aisée lorsqu'ils concernent des biens pour lesquels il existe un marché permettant de disposer de référentiels de comparaison. Elle est beaucoup plus difficile et subjective dans le cas de prestations de services, et plus encore de redevances pour l'utilisation d'une marque ou d'un brevet. Ceci peut laisser une certaine marge d'appréciation ou de manoeuvre aux entreprises pour fixer leurs prix de cession internes à un niveau qui permet une certaine minoration de l'impôt, tout en demeurant dans le cadre de l'optimisation qui ne pourra être contestée ».

En d'autres termes, la détermination par les entreprises multinationales constitue une occasion d'optimisation fiscale souvent très proche de la fraude fiscale.

B. LA COORDINATION FISCALE INTERNATIONALE EN MATIÈRE DE PRIX DE TRANSFERTS

Ce constat a conduit les administrations fiscales à promouvoir le développement de la coordination internationale en matière de contrôle des prix de transfert. Le rapport précité du Conseil des impôts indique ainsi :

« La contestation par une administration fiscale des prix de transfert retenus par une entreprise multinationale débouche, en l'absence de coordination, sur un risque de double imposition de l'entreprise redressée, puisque le pays à l'origine du redressement réintègre dans le bénéfice taxable chez lui des sommes qui ont été par ailleurs taxées dans l'autre pays impliqué dans la transaction considérée. Aussi, la coordination dans ce domaine est-elle ancienne et relativement avancée.

« Le Comité des affaires fiscales de l'OCDE s'est saisi de ce sujet en 1976. Une déclaration a été adoptée par les pays membres sur l'investissement international et les entreprises multinationales, à laquelle des principes directeurs étaient annexés. Cette déclaration a débouché sur une recommandation sur la détermination des prix de transfert entre entreprises associées. Mais c'est en 1995 que la principale avancée en la matière a été réalisée. En effet, c'est à cette date qu'une recommandation invite les pays membres à appliquer pour la détermination des prix de transfert les enseignements d'un rapport publié la même année, qui détaille de façon très complète les objectifs à atteindre et les moyens à mettre en oeuvre à cet effet. Ce rapport de 1995 a été par la suite enrichi de plusieurs contributions successives et forme actuellement un ensemble cohérent. Il prévoit des modèles de convention fiscale entre pays pour la procédure amiable à suivre lors d'un redressement impliquant les prix de transfert afin d'éviter la double imposition. Il propose également plusieurs méthodes pour la détermination d'un prix de transfert juste, centrées autour du principe de pleine concurrence .

« Ce principe est défini dans l'article 9 du modèle de convention fiscale OCDE. Il stipule que « [Lorsque] les deux entreprises [associées] sont, dans leurs relations commerciales ou financières, liées par des conditions convenues ou imposées, qui diffèrent de celles qui seraient convenues entre des entreprises indépendantes, les bénéfices qui, sans ces conditions, auraient été réalisés par l'une des entreprises, mais n'ont pu l'être en fait à cause de ces conditions, peuvent être inclus dans les bénéfices de cette entreprise et imposés en conséquence ».

« La question des prix de transfert fait par ailleurs l'objet d'un forum conjoint entre l'UE et l'OCDE depuis 2002 . Il s'agit d'une initiative de la Commission européenne, approuvée par le Conseil, à laquelle participent les Etats membres et un groupe d'experts émanant du secteur privé. L'objectif de ce forum est de préciser les conditions d'arbitrage en cas de conflit entre Etats sur la répartition d'une assiette fiscale dans le cadre de la fixation de prix de transfert.

« Lors de la négociation dans le cadre tracé par l'OCDE, l'administration fiscale nationale n'est jamais obligée d'arriver à un accord avec l'administration fiscale étrangère, elle doit uniquement s'y « efforcer ». Cela signifie concrètement qu'il peut subsister des cas de double imposition à l'issue de la procédure amiable. Dans l'UE au contraire une convention a été ratifiée, qui prévoit un processus devant en principe aboutir à la suppression de la double imposition. Si la procédure amiable ne parvient pas à supprimer la double imposition dans un délai de deux ans, une commission consultative d'arbitrage peut être réunie, composée d'un président, de deux représentants de chaque autorité compétente et d'un nombre pair de personnalités indépendantes. Ce type de commission ne s'est toutefois réuni qu'une seule fois. Dans les autres cas, l'un au moins des deux Etats concernés dans chaque procédure n'a pas, en pratique, fait diligence pour constituer la commission d'arbitrage.

« Par ailleurs, la procédure amiable rencontre plusieurs types de problèmes concrets. Le premier est lié à ses délais : en moyenne, il faut trois ans et sept mois pour qu'un dossier aboutisse. Un autre problème résulte de l'appréciation différente des paramètres par les deux administrations concernées, tels que le contexte économique ou la stratégie de l'entreprise [...] Une étude réalisée par la Commission fait apparaître que le Royaume-Uni est le pays de l'UE qui est le plus impliqué dans l'ensemble des cas litigieux (26 % des cas intra-européens, 39 % de l'ensemble : années 1996-1999). Il est suivi par la France, l'Allemagne et la Suède [...]. L'étude de la Commission européenne fait apparaître que la France est, avec la Finlande et le Danemark, l'un des pays qui connaît les plus longues durées des procédures amiables, à l'opposé du Luxembourg ou du Royaume-Uni, dont les délais seraient deux à trois fois plus courts ».

C. LES ACCORDS PRÉALABLES DE PRIX (APP)

Comme le relevait également le rapport du Conseil des impôts précité, « même lorsqu'elle agit de bonne foi, une société est soumise à une certaine part d'insécurité juridique, car elle est exposée à un redressement dans un ou plusieurs pays dont les autorités compétentes pourront avoir des points de vue divergents sur la fixation du prix de transfert.

« C'est en vue d'obtenir une assurance a priori de la conformité de sa politique de prix de transfert qu'une société peut solliciter la conclusion d'un accord préalable sur les prix (APP). La conclusion d'un APP n'empêche en rien les services vérificateurs de procéder à des contrôles fiscaux ; cependant, ils sont tenus par les termes de l'APP.

« Les APP s'inscrivent dans le cadre juridique général de la procédure amiable prévue par le modèle de convention fiscale de l'OCDE. En France, le déroulement de la procédure suit plusieurs étapes, incluant la négociation avec l'administration étrangère concernée. La procédure peut durer de un à trois ans.

« Les APP conclus en France sont donc toujours bi- ou multilatéraux , alors que certains pays procèdent à des APP unilatéraux. Ces « rulings » unilatéraux sont des sources de problèmes pour les autres administrations fiscales nationales lorsque des désaccords apparaissent ».

D. LE DROIT FRANÇAIS EN VIGUEUR EN MATIÈRE DE PRIX DE TRANSFERT

Concrètement, les dispositions de notre droit fiscal national en matière de prix de transfert s'articulent autour des articles 57 du code général des impôts et L. 13 B du livre des procédures fiscales.

L'article 57 du code général des impôts , conforme au cadre tracé par l'OCDE, dispose en effet que « pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France. La condition de dépendance ou de contrôle n'est pas exigée lorsque le transfert s'effectue avec des entreprises établies dans un Etat étranger ou dans un territoire situé hors de France dont le régime fiscal est privilégié au sens du deuxième alinéa de l'article 238 A ».

Cet article 57 du CGI n'établit pas de présomption de transfert : la charge de la preuve incombe donc à l'administration, ce qui est en pratique relativement difficile. Celle-ci peut toutefois recourir à l'article L.13 B du livre des procédures fiscales , qui lui permet de demander à l'entreprise faisant l'objet d'une vérification de comptabilité, et à l'égard de laquelle pèse une présomption de transfert de bénéfices, de fournir des documents justificatifs spécifiques des prix de transfert.

En outre, l'administration peut recourir à l'article L. 144 du livre des procédures fiscales, selon lequel les services de contrôle fiscal peuvent utiliser des informations fournies par les pays étrangers dans le cadre de l'assistance administrative internationale, dans les limites évidemment du bon fonctionnement de cette assistance administrative et des coûts induits pour les services fiscaux (par exemple en matière de traductions).

Enfin, l'administration peut dans certains cas extrêmes effectuer des redressements relatifs au transfert de bénéfices à l'étranger sur le fondement de la notion jurisprudentielle d'actes anormaux de gestion.

E. LES PRIX DE TRANSFERTS : UNE SOURCE IMPORTANTE D'INSÉCURITÉ JURIDIQUE POUR LES ENTREPRISES

Les redressements effectués sur la base de l'article 57 et de l'acte anormal de gestion lorsque ce dernier est utilisé pour contester certains résultats des montages internationaux, sont de l'ordre du milliard d'euros par an (987 millions d'euros en 2003, pour 531 redressements notifiés), selon la direction générale des impôts.

A cet égard, notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, estimait que « ce qui est notable, c'est que bien souvent les rectifications de bénéfices ne font pas suite à des comportement de fraude patente, comme l'est par exemple la localisation de 95 % de la marge consolidée dans un État offrant un régime fiscal privilégié sans qu'une telle répartition de la rémunération entre chacune des entités soit justifiable. De nombreux redressements concernent des politiques de prix non pertinentes, s'agissant d'un sujet très complexe, ou contestables par un État. A titre d'exemple, il suffit de rappeler que c'est généralement le siège qui fixe la politique des prix pour toutes les filiales, pour des raisons évidentes de gestion, politique que l'administration où se situe une filiale peut remettre en cause pour cette dernière. Autre exemple, les multinationales n'ajustent pas nécessairement leur politique de prix de transfert après une importante réorganisation (une fusion ou une acquisition), les entités adoptant souvent les lignes de conduite de la partie dominante et s'exposant ainsi parfois à des risques de redressement ».

On peut toutefois relever, à l'instar du rapport précité du Conseil des impôts, que la plupart des redressements ne sont pas contestés, ce qui peut suggérer qu'ils étaient très clairement fondés, voire que les redressements notifiés ne représentent qu'une faible part des abus commis par les entreprises multinationales, et ce d'autant plus que le redressement de certaines entreprises étrangères aisément délocalisables peut être perçu comme délicat.

Quoi qu'il en soit, l'appréciation des prix de transferts est ainsi une source d'insécurité juridique pour les entreprises, et ce, d'autant plus que les accords préalables sur les prix de transfert n'ont en France qu'un fondement réglementaire (l'instruction 4-A-8-99 du 7 septembre 1999) et qu'ils sont à ce jour relativement peu utilisés, seuls dix-sept dossiers relatifs à des APP ayant été conclus à la date du 14 décembre 2004, dont plusieurs multilatéraux (parmi lesquels un dossier relatif au groupe Airbus).

Selon les informations transmises à votre commission des finances, cette procédure, en pratique gérée par une équipe dédiée de la direction générale des impôts, connaîtrait toutefois un succès croissant , le flux les dossiers déposés étant passé de quelques dossiers en 2002 à plus d'une vingtaine en 2004. Cinq dossiers ont été terminés en 2002-2003, et sept autres accords signés à la date du 14 décembre 2004, auxquels s'ajoutent cinq dossiers, déjà conclus à la même date mais en attente de signature. A ces dix-sept dossiers s'ajoutent quatorze autres dossiers en instance.

II. LE RENFORCEMENT DES GARANTIES POUR LE CONTRIBUABLE EN CAS D'ACCORD PRÉALABLE EN MATIÈRE DE PRIX DE TRANSFERT

Le présent article vise ainsi à étendre les garanties offertes au contribuable par la conclusion d'un accord préalable en matière de prix de transfert.

On peut rappeler qu'en application des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales (LPF), l'administration fiscale ne peut pas procéder à des rectifications fiscales lorsqu'elle a été préalablement interrogée par le redevable sur la conformité de sa situation :

« Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration .

« Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ».

L'article L. 80 B du LPF précise le champ d'application de cette garantie .

Le présent article propose ainsi, à compter du 1 er janvier 2005 , d'étendre le dispositif d'accord tacite prévu à l'article L. 80 A du LPF aux prix de transfert pratiqués par les entreprises qui procèdent à des opérations au niveau international : un accord formel devra avoir été conclu préalablement soit avec les autorités compétentes désignées par la convention fiscale bilatérale afin d'éliminer les doubles impositions , soit avec le contribuable lui-même .

La garantie décrite précédemment à l'article L. 80 A du LPF serait donc applicable :

« lorsque l'administration a conclu un accord préalable portant sur la méthode de détermination des prix mentionnés au 2° de l'article L. 13 B 41 ( * ) , soit avec l'autorité compétente désignée par une convention fiscale bilatérale destinée à éliminer les doubles impositions, soit avec le contribuable ».

Contrairement à d'autres procédures de rescrit fiscal, il n'est pas prévu de cas où le silence prolongé de l'administration aurait valeur d'accord tacite . L'administration fiscale conserve ainsi un pouvoir discrétionnaire. D'une part, l'acceptation implicite de tout accord unilatéral aurait pu avoir des conséquences dangereuses. D'autre part, la conclusion d'un accord bilatéral est liée au déroulement de la procédure amiable avec une autorité administrative étrangère.

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

Votre rapporteur général est favorable au dispositif ainsi proposé, de nature à accroître la sécurité juridique des investisseurs sur un sujet juridiquement complexe et source d'un important contentieux.

Il observe que ces dispositions ne sont pas exclusives de l'application éventuelle de pénalité en cas de mauvaise foi, si celle-ci était avérée dans le cadre d'un contrôle. De même, l'entreprise sera sanctionnée si elle ne respecte pas l'accord préalable, des documents à publier chaque année par l'entreprise devant permettre de vérifier que l'entreprise se conforme à ses engagements. Un APP peut être utilisé par l'administration fiscale pour apprécier la réalité de fausses délocalisations et conduire à des opérations de contrôle et à une procédure de redressement.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 40 D'autres cas sont également concernés, telle que la possibilité pour un agent d'être reconnu comme indépendant, ou pour une succursale d'être considérée comme n'ayant pas d'autre finalité que de stocker ou de livrer des marchandises à la société étrangère.

* 41 Aux termes de l'article L. 13 B du LPF, « lorsque, au cours d'une vérification de comptabilité , l'administration a réuni des éléments faisant présumer qu'une entreprise a opéré un transfert indirect de bénéfices , au sens des dispositions de l'article 57 du code général des impôts, elle peut demander à cette entreprise des informations et documents précisant :

« 1° La nature des relations entrant dans les prévisions de l'article 57 du code général des impôts, entre cette entreprise et une ou plusieurs entreprises exploitées hors de France ou sociétés ou groupements établis hors de France ;

« 2° La méthode de détermination des prix des opérations de nature industrielle, commerciale ou financière qu'elle effectue avec des entreprises, sociétés ou groupements visés au 1° et les éléments qui la justifient ainsi que, le cas échéant, les contreparties consenties (...) ».

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