ARTICLE 22

Instauration d'un contrôle fiscal à la demande et d'une procédure de régularisation en cours de contrôle

Commentaire : le présent article a pour objet de mettre en place une procédure permettant aux entreprises petites et moyennes de demander à l'administration d'intervenir pour les aider à satisfaire leurs obligations fiscales. Il est en outre proposé d'étendre la procédure permettant aux entreprises de régulariser leur situation en cas de contrôle fiscal.

I. LE DROIT EXISTANT

A l'issue d'une vérification de comptabilité , l'actuel article L. 62 du livre des procédures fiscales (LPF) établit une procédure de règlement particulier des litiges , réservée aux contribuables de bonne foi et sous réserve que leur chiffre d'affaires ne dépasse pas un certain seuil.

Les dispositions de l'article 62 du LPF permettent de réparer les erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances constatées, moyennant le paiement, outre les « suppléments de droits simples », d'une somme égale au taux de l'intérêt de retard , fixé à 9 % par an pour compenser la perte de trésorerie subie par l'Etat 63 ( * ) :

« A l'issue d'une vérification de comptabilité et pour l'ensemble des impôts sur lesquels porte cette vérification, les contribuables dont le chiffre d'affaires de l'un quelconque des exercices soumis à vérification, ajusté, s'il y a lieu, à une période de douze mois, ne dépasse pas les limites prévues au paragraphe I de l'article 302 septies A du code général des impôts 64 ( * ) , peuvent, à condition de présenter une demande en ce sens avant toute proposition de rectification , réparer, moyennant le paiement de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 du même code, les erreurs ou inexactitudes, omissions ou insuffisances constatées.

« Cette procédure de règlement particulière ne peut être appliquée que si :

« 1° Aucune infraction exclusive de la bonne foi n'a été relevée au cours de la vérification ;

« 2° A l'appui de leur demande, les contribuables déposent des déclarations complémentaires ;

« Les intéressés s'engagent à verser , dans le délai de deux mois suivant la date du dépôt de ces déclarations et selon les modalités fixées par décret les suppléments de droits simples et les intérêts de retard calculés d'après le taux prévu à l'article 1727 précité.

« Si le versement n'est pas effectué dans le délai prévu, les droits simples ainsi que les pénalités prévues à l'article 1729 du code général des impôts sont perçus selon les règles de recouvrement propres à chaque catégorie d'impôts ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le dispositif envisagé au présent article propose, d'une part, d'instaurer une procédure de contrôle fiscal à la demande des contribuables, et d'autre part de modifier le régime de la procédure de régularisation en cas de contrôle.

Le II du présent article précise les dates d'entrée en vigueur de ce nouveau régime :

- pour les demandes de procédures de contrôle fiscal effectuées sur l'initiative du contribuable, à compter du 1 er janvier 2005 ;

- s'agissant de la procédure de contrôle en cas de vérification de comptabilité, pour les contrôles engagés à compter du 1 er janvier 2005 .

A. L'INSTAURATION D'UN CONTRÔLE FISCAL À LA DEMANDE DES ENTREPRISES

Le 1° du I du présent article propose de mettre en place une procédure permettant aux entreprises petites et moyennes de s'assurer du respect de leurs obligations fiscales . Ces nouvelles dispositions seraient codifiées à un nouvel article L. 13 C du LPF.

1. Le champ d'application

Les entreprises concernées sont définies par un double critère de domaine d'activité et de chiffre d'affaires ; il s'agit des « contribuables » :

- « dont le chiffre d'affaires n'excède pas 1,5 million euros , s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement » 65 ( * ) ,

- ou dont le chiffre d'affaires est inférieur ou égal à « 450.000 euros , s'il s'agit d'autres entreprises », relevant par conséquent d'autres domaines d'activité que ceux précédemment mentionnés.

La rédaction proposée est calquée sur celle définissant le régime simplifié des taxes sur le chiffre d'affaires à l'article 302 septies A du code général des impôts (CGI), en retenant toutefois des seuils deux fois plus élevés que ceux fixés pour le régime d'imposition des taxes sur le chiffre d'affaires. La majorité des entreprises françaises satisfont ces critères de taille et d'activité.

2. La procédure envisagée

Les entreprises mentionnées ci-dessus ont la faculté de procéder à un contrôle fiscal à leur demande : elles « peuvent, y compris pour la période ou l'exercice en cours, demander à l'administration, sur certains points précisés dans leur demande, de contrôler les opérations réalisées ». La demande peut ainsi porter non seulement sur un exercice clos, mais également sur l'exercice en cours, ce qui représente une garantie supplémentaire pour le contribuable souhaitant disposer, le plus tôt possible, des informations nécessaires au respect de ses obligations fiscales.

La demande porte « sur certains points précisés » par le contribuable : elle doit donc être ciblée .

L'administration est libre de donner suite ou non à cette demande. En cas d'accord de l'administration, le contribuable est informé des résultats du contrôle - la position adoptée par l'administration fiscale sur chacun des points contrôlés pouvant ensuite lui être opposable - et la situation du contribuable peut, le cas échéant, faire l'objet d'une régularisation , dans le cadre de la procédure de régularisation spontanée proposée par le 2° du I du présent article pour l'article L. 62 du LPF (cf. infra ) :

« Lorsque l'administration a donné suite à cette demande, elle informe le contribuable des résultats de ce contrôle sur chacun de ces points. Les erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances constatées sur ces points dans les déclarations souscrites peuvent être régularisées par le contribuable dans les conditions prévues à l'article L. 62. A défaut, elles font l'objet d'une procédure de rectification ».

Aux termes de l'article 55 du LPF, la procédure de rectification, contradictoire, est engagée « lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts ».

L'article L. 13 C du LPF proposé par le 1° du I du présent article précise enfin que « les opérations réalisées lors de ce contrôle ne constituent pas une vérification de comptabilité au sens de l'article L. 13 » du LPF 66 ( * ) .

Votre rapporteur général rappelle que les opérations de vérification de comptabilité s'inscrivent dans le cadre des procédures de contrôle de l'administration fiscale, conduites à l'initiative de cette dernière.

B. LES NOUVELLES MODALITÉS DE LA PROCÉDURE DE RÉGULARISATION

Le 2° du I du présent article aménage la procédure de régularisation applicable, définie à l'article L. 62 du LPF , en proposant une nouvelle rédaction de cet article du livre des procédures fiscales.

Le champ de la procédure de régularisation est largement étendu :

- il est proposé que celle-ci puisse intervenir « au cours d'une vérification de comptabilité », et non plus à l'issue de cette opération , après qu'une proposition de rectification l'eut clôturée ; en conséquence, cette procédure est qualifiée de « régularisation spontanée », dont le contribuable « fait la demande avant toute proposition de rectification » ;

- toutes les entreprises pourraient bénéficier de ce dispositif, et non plus seulement celles relevant du régime simplifié de liquidation des taxes sur le chiffre d'affaires.

Comme dans le droit existant, la procédure ne peut pas bénéficier aux contribuables de mauvaise foi, pour lesquels des pénalités s'appliquent.

En outre, il est proposé que les rappels régularisés soient assortis d'un intérêt de retard réduit de 50 % (soit 4,5 % par an) , alors que l'intérêt est actuellement calculé au taux plein de 9 % par an.

Par ailleurs, il est désormais fixé à l'article L. 62 un délai de 30 jours pour que le contribuable dépose une déclaration complémentaire. Celui-ci doit « acquitte [r] l'intégralité des suppléments de droits simples et des intérêts de retard au moment du dépôt de la déclaration, ou à la date limite de paiement portée sur l'avis d'imposition en cas de mise en recouvrement par voie de rôle ». Ces modalités transposent les dispositions actuellement applicables au nouveau régime de régularisation spontanée.

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général est favorable aux procédures prévues par le présent article, afin de permettre aux entreprises petites et moyennes de régulariser leur situation fiscale . Il est effectivement souhaitable de cibler ces dispositifs sur les entreprises qui, en raison de leur taille, ne disposent pas nécessairement de l'ensemble des ressources internes pour apprécier la conformité de leur situation aux obligations fiscales qui leur incombent. En outre, les contrôles à la demande du contribuable doivent être relativement simples et rapides, ce qui serait plus difficilement le cas pour des entreprises de plus grande taille.

Il s'agit d'une procédure équilibrée au regard des droits des contribuables et du respect obligatoire des obligations fiscales : l'administration fiscale est libre de donner suite ou non à une demande de contrôle ; la procédure de régularisation ne s'applique pas aux contribuables de mauvaise foi ; elle peut s'appliquer moyennant le paiement des suppléments de droits simples et de la moitié des sommes dues au titre de l'intérêt de retard.

A cet égard, votre rapporteur général se félicite que le paiement de l'intérêt de retard ne s'élève alors qu'à 4,5 % par an, soit un niveau proche de celui du taux d'intérêt légal dont bénéficie le contribuable lorsqu'une somme lui est due par le Trésor public. Cette disposition contribue à harmoniser le coût de trésorerie en cas de créances entre les contribuables et le Trésor public, tout en laissant entière la question du taux de l'intérêt de retard qui n'a pas suivi l'évolution des taux des bons du Trésor à taux fixe 67 ( * ) .

Il s'agit ici d'un premier pas dans le sens d'une réforme que votre rapporteur général appelle de ses voeux depuis de nombreuses années.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 63 L'intérêt de retard et la détermination de son taux sont définis par l'article 1727 du code général des impôts : « le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois et s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé ».

* 64 Le I de l'article 302 septies A du code général des impôts dispose : « Il est institué par décret en Conseil d'Etat un régime simplifié de liquidation des taxes sur le chiffre d'affaires dues par les personnes dont le chiffre d'affaires n'excède pas 763.000 euros, s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement , ou 230.000 euros, s'il s'agit d'autres entreprises . Ces limites s'apprécient en faisant abstraction de la taxe sur la valeur ajoutée et des taxes assimilées ».

* 65 Cette formulation, familière aux professionnels puisqu'elle reprend celle utilisée à l'article 302 septies A du CGI pour le régime simplifié des taxes sur le chiffre d'affaires, vise la fourniture de prestations afférentes au logis, à l'exclusion notamment des opérations d'achat et de vente d'immeubles.

* 66 Le premier alinéa de l'article L. 13 du LPF dispose que « les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ».

* 67 Le taux de l'intérêt de retard a été fixé par la loi à 9 % en 1987, alors que le taux de l'intérêt légal a diminué de 9,50 % à cette date à 3,29 % en 2003.

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