ARTICLE 38 bis (nouveau)

Aménagement du régime d'exonération des plus-values professionnelles institué par la loi pour le soutien à la consommation et à l'investissement

Commentaire : le présent article, introduit par l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général du budget, précise le régime temporaire d'exonération des plus-values professionnelles, institué par l'article 13 de la loi n° 2004-804 du 9 août 2004 pour le soutien à la consommation et à l'investissement, afin d'éviter certains montages contraires à l'esprit de cette loi.

I. LE DISPOSITIF DE LA LOI POUR LE SOUTIEN A LA CONSOMMATION ET A L'INVESTISSEMENT

L'article 13 de la loi n° 2004-804 du 31 août 2004 pour le soutien à la consommation et à l'investissement a créé un article 238 quaterdecies du code général des impôts (CGI), instituant un régime d'exonération des plus-values professionnelles réalisées entre le 16 juin 2004 et le 31 décembre 2005.

Le cédant, qui doit avoir une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, est :

- soit une entreprise relevant de l'impôt sur le revenu, quel que soit le régime d'imposition sous lequel elle est placée, qu'il s'agisse d'une personne physique ou d'une société de personne ;

- soit une entreprise relevant de l'impôt sur les sociétés, ce qui constitue la principale nouveauté du dispositif, par rapport au régime d'exonération des plus-values institué par l'article 151 septies du code général des impôts et réaménagé par l'article 41 de la loi n° 2003-721 du 1 er août 2003 pour l'initiative économique. Une société soumise à l'impôt sur les sociétés peut bénéficier du régime d'exonération si son capital est entièrement libéré et détenu de manière continue, pour 75 % au moins, par des personnes physiques ou par des sociétés dont le capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques. Il s'agit donc d'entreprises détenues aux trois quarts, de façon directe ou indirecte, par des personnes physiques.

La cession doit porter sur une branche complète d'activité dont la valeur est inférieure à 300.000 euros. L'exonération n'est donc pas susceptible de s'appliquer à la cession isolée d'éléments de l'actif, au contraire de celle prévue par l'article 151 septies . Les plus-values réalisées à l'occasion de la cession de biens immobiliers compris, le cas échéant, dans la branche complète d'activité, ne sont pas concernées par le régime d'exonération institué.

En complément, l'article 14 de la même loi prévoit une exonération des droits de mutation à titre onéreux perçus au profit de l'Etat, à condition que l'acquéreur s'engage à conserver l'activité cédée pendant une durée minimale de cinq ans.

II. L'AMÉNAGEMENT ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

La mesure instituée par la loi précitée pour le soutien à la consommation et à l'investissement vise à favoriser le maintien des activités de proximité, dans les centres-villes ou dans les zones rurales, en levant un obstacle fiscal aux transferts et reprises des petites entreprises. M. Nicolas Sarkozy, alors ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a décrit dans les termes suivants les objectifs de ce dispositif 33 ( * ) :

« Le problème soulevé est considérable. Mesdames, messieurs les sénateurs, la vie d'un commerçant peut se décrire très simplement : une femme ou un homme travaille durement toute sa vie et joue sa retraite, ou plus exactement le confort de celle-ci, sur la vente de son fonds de commerce. Si la vente est bonne, la retraite sera confortable ; si la vente est médiocre, la retraite sera chiche. Telle est la réalité des choses !

« Au moment du départ à la retraite, que se passe-t-il concrètement, s'agissant notamment des commerces de bouche ? Si le commerçant qui part à la retraite reçoit une proposition d'une banque, d'une agence immobilière ou d'une compagnie d'assurances, de 30 % à 40 % supérieure à l'offre que peut lui faire un jeune candidat à l'installation - poissonnier, boulanger, boucher -, il vendra son fonds à la banque, à l'agence immobilière ou à la compagnie d'assurances, c'est-à-dire exactement ce que nous ferions à sa place !

« En proposant l'exonération des plus-values professionnelles et l'exonération des droits de mutation, nous voulons rééquilibrer les forces entre, d'une part, les activités de proximité, et, d'autre part, les compagnies d'assurances, les banques, les agences immobilières, toutes entreprises estimables par ailleurs

Or il est apparu que la mesure risquait d'être utilisée pour la réalisation, en franchise d'impôt, d'opérations de réévaluation ou de refinancement dans lesquelles l'activité serait, en fait, poursuivie directement ou indirectement par le même exploitant.

Afin de prévenir de tels montages, l'Assemblée nationale a introduit, à l'initiative de sa commission des finances, une condition supplémentaire pour l'application de l'exonération prévue par l'article 238 quaterdecies du CGI. Il est proposé d'exclure les cessions de branches complètes d'activité à des sociétés au sein desquelles :

- le cédant et/ou des membres de sa famille (conjoint, ascendants, descendants, frères et soeurs) détiendraient ensemble, directement ou indirectement, plus de 50 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux du cessionnaire ;

- le cédant exercerait, directement ou indirectement, en droit ou en fait, la direction effective de la société, de la personne morale ou du groupement cessionnaire.

Il est également prévu que l'exonération est remise en cause si le cédant se trouve dans l'une ou l'autre des situations susvisées dans les trois années suivant la cession.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La mesure adoptée à l'Assemblée nationale est un aménagement visant à ce que le dispositif d'exonération des plus-values professionnelles institué par la loi précitée pour le soutien à la consommation et à l'investissement s'applique conformément aux objectifs qui lui étaient assignés, et que votre commission avait approuvés, et non comme un facteur d'évasion fiscale dans le cadre de montages ad hoc .

Il faut rappeler, en outre, que les situations visées par le présent dispositif peuvent bénéficier d'autres régimes d'exonération ou de report, prévus par les articles suivants du code général des impôts :

- article 151 septies du CGI : régime d'exonération des plus-values pour les petites entreprises, sous condition de chiffre d'affaires ;

- article 41 du même code : report d'imposition, ou exonération si l'activité est poursuivie pendant au moins cinq ans, en faveur des bénéficiaires d'une transmission à titre gratuit d'entreprise individuelle ;

- article 151 octies du même code : report d'imposition en faveur des exploitants qui procèdent à l'apport en société de leur entreprise individuelle.

Votre commission vous proposera simplement une modification rédactionnelle, visant à éliminer une double négation.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

* 33 JO Débats Sénat, 15 juillet 2004.

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