CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES À LA PRÉVENTION
DES DIFFICULTÉS DES ENTREPRISES
ET À LA PROCÉDURE DE CONCILIATION

La sauvegarde des entreprises en difficulté est d'autant plus efficace que des actions de prévention et de conciliation interviennent rapidement. L'une des critiques qui peut être adressée aux dispositions actuelles du code de commerce est qu'elles ne vont pas assez loin dans ce domaine. Le chapitre premier du titre I du présent projet de loi renforce en conséquence les dispositifs existants. Si les mesures de prévention sont peu modifiées, en revanche, une procédure de conciliation, plus étoffée et plus efficiente, est substituée à l'actuelle procédure de règlement amiable.

Pour autant, il convient de rappeler que les mesures de prévention des difficultés des entreprises ne sont pas uniquement prévues par le code de commerce, ni même nécessairement consacrées dans la loi.

Au niveau réglementaire, existent depuis 1977 des comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises (CODEFI), des comités régionaux de restructuration industrielle (CORRI) ainsi qu'un comité interministériel de restructuration industrielle (CIRRI). Ces structures administratives de l'Etat ont pour vocation à détecter les difficultés des entreprises et à apporter certaines aides financières permettant d'assurer les restructurations nécessaires de leur activité.

En 2003, ces différents services ont détecté près de 1.700 entreprises en difficulté et ont soutenu environ 130.000 emplois.

Ces dispositifs ont d'ailleurs récemment fait l'objet d'une réforme, opérée par une circulaire du premier ministre du 25 novembre 2004 relative à l'action de l'Etat dans la prévention et le traitement des difficultés des entreprises 34 ( * ) . Les comités régionaux de restructuration industrielle sont supprimés, les comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises devenant compétents pour traiter des cas individuels des entreprises de moins de 400 salariés, le comité interministériel de restructuration industrielle exerçant ses prérogatives au-delà de ce seuil. Les missions des CODEFI sont clarifiées : ils sont chargés d'assurer l'accueil et l'orientation des entreprises, de détecter leurs difficultés éventuelles et de leur apporter des appuis grâce à la réalisation d'audits ou de prêts dont la gestion est désormais déconcentrée.

Par ailleurs, une circulaire du ministère de la justice, datée du 6 mars 2003, a créé des commissions d'action publique en matière économique et financière, constituées à la diligence de chaque procureur général dans le ressort de la cour d'appel. Ces commissions ont vocation à regrouper des représentants du Trésor, des services fiscaux, des administrations du travail et de l'emploi, de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, de l'URSSAF ainsi que de la Banque de France.

L'objet de ces commissions est de recueillir des informations permettant de détecter de manière plus précoce les difficultés rencontrées par les entreprises situées dans leur ressort. Ainsi éclairé, le ministère public peut décider d'exercer son pouvoir de saisine du tribunal aux fins d'ouverture d'une procédure collective. Le cas échéant, le travail de ces commissions peut conduire à l'ouverture d'une enquête, notamment si les faits détectés constituent des comportements gravement attentatoires à l'ordre public économique et social, préalable à l'exercice de poursuites pénales.

Avec l'amélioration des dispositifs législatifs de prévention, les entreprises devraient bénéficier des moyens mis à leur disposition pour les aider à surmonter leurs difficultés afin d'assurer la pérennité de leur exploitation et le maintien des emplois.

Article 2
Nouveaux intitulés du titre Ier du livre VI du code de commerce
et du chapitre Ier de ce titre

Avant sa suppression par l'Assemblée nationale, cet article de coordination tendait à modifier les intitulés du titre Ier du livre VI du code de commerce et du chapitre Ier de ce titre afin de prendre en compte la création, par les articles 6 à 9 du projet de loi, d'une procédure de conciliation se substituant à l'actuelle procédure de règlement amiable.

En conséquence, le titre Ier du livre VI du code de commerce devait s'intituler : « De la prévention des difficultés des entreprises et de la procédure de conciliation » et le chapitre Ier de ce titre, quant à lui : « Des groupements de prévention agréés et de la procédure de conciliation ».

En première lecture, cet article a été supprimé par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois, pour tenir compte de l'introduction d'un « tableau II » annexé au projet de loi, décrivant la nouvelle structure du livre VI du code de commerce. Ce nouveau tableau a en outre modifié les intitulés de ces deux divisions :

- le titre Ier s'intitulerait désormais : « De la prévention des difficultés des entreprises » ;

- le chapitre Ier de ce titre serait intitulé : « De la prévention des difficultés des entreprises, du mandat ad hoc et de la procédure de conciliation ».

Votre commission vous propose de maintenir la suppression de l'article 2.

Article 3
(art. L. 611-1 du code de commerce)
Aides des collectivités territoriales aux groupements de prévention agréés

Cet article tend à réécrire la dernière phrase du quatrième alinéa de l'article L. 611-1 du code de commerce afin de préciser que les groupements de prévention agréés peuvent bénéficier des aides des collectivités territoriales. L'Assemblée nationale a apporté une correction rédactionnelle à cet article, à l'initiative de sa commission des lois.

Créés initialement par la loi n° 84-148 du 1 er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises, les groupements de prévention agréés ont pour mission de fournir à leurs adhérents, de façon confidentielle, une analyse des informations économiques, comptables et financières qui leur sont régulièrement transmises par ces derniers. Les conditions de création et les modalités de fonctionnement de ces organes sont définies par le décret n° 85-910 du 27 août 1985 relatif à la création et aux conditions de fonctionnement dans les régions de groupements destinés à la prévention des difficultés des entreprises .

La création de ces organismes a répondu au souci du législateur d'offrir aux petites et moyennes entreprises un moyen de détection de leurs difficultés, notamment lorsqu'elles ne sont pas soumises au dépôt obligatoire de leurs comptes au greffe du tribunal de commerce .

Le dispositif initial a été renforcé par la loi n° 2003-721 du 1 er août 2003 sur l'initiative économique qui a prévu, d'une part, l'extension aux entrepreneurs individuels de la compétence des groupements de prévention -jusque là réservée aux seules personnes morales- et, d'autre part, que l'analyse effectuée par ces groupements concernait également des informations économiques, et non seulement comptables et financières.

Depuis 1984, la loi autorise les groupements de prévention à percevoir des « aides directes et indirectes » des collectivités territoriales. Sont notamment visées par le texte actuel de l'article L. 611-1 les aides apportées par les collectivités territoriales en application « des articles 5, 48 et 66 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 modifiée relative aux droits et libertés des communes des départements et des régions ».

L'octroi à ces groupements de certaines aides publiques peut favoriser la constitution de ces derniers qui, toutefois, n'ont jusqu'ici connu en pratique qu'un succès limité puisque, selon les informations recueillies par votre rapporteur, il existe à l'heure actuelle seulement 12 groupements de prévention agréés. Une vingtaine de groupements seraient cependant en cours de constitution, en attente d'un agrément délivré par l'autorité préfectorale.

Toutefois, la rédaction actuelle de l'article L. 611-1 ne correspond plus à la réalité du droit positif dans la mesure où les dispositions de la loi précitée du 2 mars 1982 ont été codifiées en 1996 au sein du code général des collectivités territoriales. Telle est la raison pour laquelle le présent article tend à supprimer les références à la loi du 2 mars 1982.

Si votre commission juge nécessaire, afin d'assurer la cohérence juridique de ce texte, de supprimer toute référence à la loi précitée du 2 mars 1982, elle constate que la formulation proposée conserve en revanche la distinction entre les aides directes et les aides indirectes des collectivités territoriales. Or, cette présentation des aides publiques ne correspond plus au droit en vigueur, car l'article 1 er de la loi n° 2004-709 du 1 er août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a supprimé cette distinction.

Votre commission vous soumet donc un amendement tendant à supprimer cette distinction pour viser de manière générale l'ensemble des aides susceptibles d'être accordées par les collectivités territoriales.

Elle vous propose en conséquence d'adopter l'article 3 ainsi modifié.

Article 4
(art. L. 611-2 du code de commerce)
Information du président du tribunal de commerce
sur la situation économique et financière du débiteur -
Pouvoir d'injonction en cas d'absence de dépôt des comptes annuels

Cet article tend à modifier les dispositions de l'article L. 611-2 du code de commerce afin de renforcer les pouvoirs d'information du président du tribunal de commerce sur la situation économique et financière du débiteur et de lui confier un pouvoir d'injonction en cas de défaut de dépôt des comptes annuels .

1. Le droit en vigueur

La loi n° 84-148 du 1 er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises, modifiée par la loi n° 94-475 du 10 juin 1994 relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises a institué un dispositif d'alerte et d'information au profit du président du tribunal de commerce. Ce mécanisme a été étendu au président du tribunal de grande instance, à l'égard des personnes morales de droit privé . L'intérêt de ce mécanisme, actuellement prévu à l'article L. 611-2 du code de commerce, est de donner au juge -par ailleurs susceptible de devenir le juge de la procédure collective- les moyens de détecter les éventuelles difficultés que connaîtrait une entreprise située dans son ressort géographique.

Ce dispositif se décline en deux éléments distincts mais complémentaires : la convocation des dirigeants d'une entreprise à l'égard de laquelle des éléments peuvent faire suspecter l'existence de difficultés et le recueil de renseignements permettant d'avoir une information exacte sur la situation économique et financière du débiteur.

- Le pouvoir de convocation du débiteur à un entretien

Compte tenu de la centralisation de certains documents dans les greffes des tribunaux de commerce, il a semblé souhaitable de donner au président du tribunal la possibilité de convoquer les dirigeants d'une entreprise dont certains documents peuvent faire apparaître les difficultés. En vertu de diverses dispositions législatives ou réglementaires, les greffes des tribunaux de commerce sont en effet dépositaires :

- des statuts sociaux ainsi que des éventuelles modifications qui y sont apportées par la suite (changement de raison sociale ou d'objet social, transfert de siège, changement de gérance, etc...) ;

- des comptes annuels des sociétés commerciales . Sont soumises obligatoirement à cette formalité de dépôt l'ensemble des sociétés commerciales 35 ( * ) , ainsi que les sociétés d'exercice libéral. Les comptes annuels doivent être déposés dans le délai d'un mois à compter de la décision de l'assemblée des associés ou actionnaires ayant approuvé les comptes de la société. Les informations ainsi communiquées permettent de donner une vision d'ensemble de l'entreprise, en révélant par exemple la présence de capitaux propres négatifs ou le déséquilibre des comptes sociaux ;

- des inscriptions de privilèges et nantissements effectuées au profit des créanciers du débiteur . Ces garanties d'origine conventionnelle ou légale sont prises sur le patrimoine du débiteur, à la diligence de tout créancier, dans des délais variables selon leur nature et pour une durée pouvant aller jusqu'à dix années renouvelables. L'inscription de certains privilèges, notamment les privilèges généraux de la sécurité sociale et des caisses complémentaires, ainsi que du Trésor public en matière fiscale, fait suite à un incident de paiement de l'entreprise envers son créancier. D'autres inscriptions y sont portées sans rapport avec un incident de paiement antérieur, mais permettent d'avoir une indication sur le volume des dettes contractées par le débiteur qui devront être réglées à une date déterminée.

Le registre des privilèges et nantissements

Tenu par le greffe du tribunal de commerce, le registre des privilèges et nantissements comporte l'inscription de garanties sur le patrimoine du débiteur, à hauteur des sommes dues par ce dernier à certains de ses créanciers titulaires de sûretés. Font notamment l'objet d'une inscription à ce registre, à la diligence des créanciers concernés et sous la responsabilité du greffier :

- le privilège de la sécurité sociale et des caisses complémentaires (article L. 243-5 du code du travail) ;

- le privilège du Trésor public en matière fiscale, portant sur l'ensemble des impositions impayées (article 1929 quater du code général des impôts) ;

- le privilège du vendeur de fonds de commerce (articles L. 141-5 et suivants du code de commerce) ;

- le nantissement du fonds de commerce (articles L. 142-1 et suivants du code de commerce) ;

- le nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement (articles L. 525-1 et suivants du code de commerce) ;

- le nantissement de parts de sociétés civiles (articles 1866 à 1868 du code civil) ;

- les opérations de crédit-bail mobilier (article L. 313-10 du code monétaire et financier ; décret n° 72-665 du 4 juillet 1972 relatif à la publicité des opérations de crédit-bail en matière mobilière et immobilière) ;

- les contrats de location et les contrats de vente assortis d'une clause de réserve de propriété (article L. 621-116 du code de commerce ; décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 relatif au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises) ;

- les protêts et certificats de non-paiement des chèques (articles L. 511-56 et suivants du code de commerce).

Ces informations, détaillées et complémentaires, sont donc de nature à donner au président du tribunal de commerce des informations permettant d'évaluer l'état des dettes d'une entreprise et ses éventuelles difficultés de gestion.

Elles peuvent éventuellement être complétées par des informations provenant d'associés de la société en difficulté, de membres ou représentants de son personnel ou de son commissaire aux comptes , ces deux derniers bénéficiant d'ailleurs, en vertu des dispositions légales, d'un droit 36 ( * ) ou d'un devoir 37 ( * ) d'alerte sur les difficultés rencontrées par leur entreprise. .

Pour le juge, la disponibilité de ces informations apparaît d'une grande utilité. L'une des situations les plus fréquemment évoquées devant votre rapporteur lors de ses auditions est en effet, qu'en pratique, les dirigeants d'entreprise ne perçoivent pas nécessairement à temps l'ampleur de leurs difficultés.

Cet état de fait demeure malgré la mise en place d'instruments destinés à leur permettre de détecter eux-mêmes l'existence de difficultés de nature à compromettre la continuité de l'exploitation. On relèvera ainsi la création, par la Conférence générale des tribunaux de commerce, le Conseil supérieur de l'ordre des experts comptables et la Compagnie nationale des commissaires aux comptes, de centres d'information sur la prévention judiciaire (CIP). Institués par une convention du 21 mai 1999, ces centres offrent notamment aux entreprises des services d'audit gratuits, destinés à donner à leurs dirigeants les moyens de connaître plus précisément leur situation économique et financière pour, le cas échéant, utiliser tous les moyens de prévention disponibles.

L'intervention du président du tribunal de commerce, extérieur à l'entreprise, peut donc contribuer à révéler aux dirigeants la situation économiquement ou financièrement délicate de leur entreprise .

Dans ce cadre, en accord avec l'esprit de l'article L. 611-2 du code de commerce, certains tribunaux de commerce ont, avec l'aide matérielle active de leur greffe, mis en place des cellules de détection et de prévention des difficultés des entreprises. Tel est le cas notamment du tribunal de commerce de Melun dans lequel votre rapporteur s'est rendu, au sein duquel se réunissent, une fois par mois, plusieurs intervenants disposant d'informations complémentaires les unes aux autres, à l'égard des entreprises situées dans le ressort de la juridiction. Cette cellule comprend en général, outre un magistrat consulaire, un représentant du ministère public, le directeur de l'établissement local de la Banque de France, le président de la direction départementale de l'URSSAF, le receveur divisionnaire des impôts, le représentant du trésorier payeur général, ainsi que le greffier de la juridiction. Recoupant les informations détenues par l'ensemble des intervenants, la cellule est susceptible de détecter les entreprises dont les difficultés peuvent justifier une action de prévention initiée par le président du tribunal de commerce.

Sur la base des données recueillies, le président de la juridiction peut, en vertu du premier alinéa de l'article L. 611-2 du code de commerce, décider de convoquer les dirigeants de l'entreprise dont les difficultés ont été détectées, afin d'envisager de concert les mesures propres à redresser la situation.

En 2002, les présidents des tribunaux de commerce ont adressé aux chefs d'entreprises 11.379 convocations. Toutefois, cette pratique n'est pas uniforme dans toutes les juridictions. Selon les chiffres communiqués par la Conférence générale des tribunaux de commerce, seules 39 juridictions consulaires mettent en oeuvre les mesures prévues par l'article L. 611-2, soit seulement 20 % des 189 tribunaux de commerce 38 ( * ) . Les juridictions consulaires de Paris et d'Ile-de-France ont, à elles seules, adressé 53 % du nombre total des convocations. Cette situation résulte en grande partie du fait que la décision de convoquer à un entretien est facultative et laissée à l'appréciation du seul président du tribunal .

Selon les avis recueillis par votre rapporteur, ces convocations, qui se déroulent dans un cadre informel, peuvent activement contribuer à la résorption des difficultés rencontrées par ces entreprises. Outre, le cas échéant, l'effet d'« électrochoc » qu'elle peut induire, cette convocation peut être l'occasion de proposer des pistes d'actions pour redresser l'entreprise.

Première juridiction consulaire par le volume des procédures collectives traitées, le tribunal de commerce de Paris, a ainsi adressé 3.930 convocations aux dirigeants d'entreprises situées dans son ressort, pour la seule année 2003, soit une progression de 40 % par rapport à l'année 2002. Ces convocations ont abouti à la tenue de 2.332 entretiens avec les représentants des entreprises, ce chiffre -qui ne représente que 59 % du nombre de convocations adressées- résultant de la circonstance que la venue à la convocation ne revêt pas un caractère obligatoire : le dirigeant reste en effet libre d'y déférer ou non.

Ces entretiens débouchent dans 62,1 % des cas sur un classement du dossier par le président du tribunal, ce qui démontre la viabilité du système, les entreprises dont les difficultés sont relevées pouvant les redresser hors de toute procédure judiciaire. A l'inverse, en 2003, 20,4 % des entretiens ont conduit à l'ouverture d'office d'une procédure collective à l'encontre du débiteur dont le dirigeant a été convoqué, seuls 1,4 % d'entre eux ayant donné lieu à l'ouverture d'une procédure de règlement amiable.

- Le pouvoir de communication sur l'état économique et financier du débiteur

Dans certaines hypothèses, les données recueillies par le président du tribunal avant l'entretien, puis l'échange avec le dirigeant d'entreprise lors de l'entretien, ne permettent pas d'avoir une vision suffisamment claire et précise de la situation économique et financière de l'entreprise. Telle est la raison pour laquelle le second alinéa de l'article L. 611-2 du code de commerce prévoit que le président du tribunal peut, « à l'issue de cet entretien », obtenir communication d'informations complémentaires auprès d'autres personnes qui seraient à même de lui donner « une exacte information sur la situation économique et financière du débiteur ».

Le président de la juridiction peut ainsi obtenir les renseignements nécessaires à son exacte information de la part du commissaire aux comptes de la société, s'il en a été désigné un, des membres et représentants du personnel de l'entreprise, de l'ensemble des administrations publiques et des organismes de sécurité et de prévoyance sociales, ainsi que des services chargés de la centralisation des risques bancaires et des incidents de paiement, c'est-à-dire les services de la Banque de France. Cette communication intervient, selon le texte, « nonobstant toute disposition législative ou réglementaire contraire ». En conséquence, lors de sa demande d'information, le juge ne peut se voir opposer un refus qui serait fondé, par exemple, sur le secret professionnel ou la confidentialité.

Ces nouvelles informations peuvent jouer un rôle important dans la décision du tribunal d'ouvrir d'office, le cas échéant, une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire immédiate comme l'article L. 621-2 du code de commerce lui en offre actuellement la possibilité.

2. Les modifications apportées par le projet de loi

Le de l'article 4 apporterait une simple modification de nature rédactionnelle puisqu'il tend à transformer le premier alinéa de l'article L. 611-2 du code de commerce en un paragraphe I. Cette modification se justifie par la création d'un paragraphe II au sein de cette dernière disposition, opérée par le 3° du présent article.

Sans remettre en cause l'équilibre général de l'article L. 611-2 du code de commerce, le de cet article aurait pour objet de renforcer les pouvoirs d'information du président du tribunal de commerce afin que ce dernier puisse obtenir des renseignements du commissaire aux comptes, des membres et représentants du personnel, des administrations publiques et des organismes de sécurité et de prévoyance sociales, ainsi que des services chargés de la centralisation des risques bancaires et des incidents de paiement, même dans l'hypothèse où les dirigeants de l'entreprise ne se sont pas rendus à sa convocation.

En effet, à l'heure actuelle, le président ne peut obtenir ces renseignements que si l'entretien a effectivement eu lieu, c'est-à-dire si le dirigeant d'entreprise a accepté de se rendre à la convocation qui lui a été adressée. Cette situation peut donc constituer un frein à la détection des difficultés des entreprises.

Le moment de l'intervention du juge doit être déterminé tout en assurant un équilibre entre, d'une part, la volonté d'assurer au plus tôt la mise en place de mécanismes de prévention et, d'autre part, la nécessité de ne pas dessaisir le chef d'entreprise de ses prérogatives en prévoyant une intervention juridictionnelle à un stade trop précoce. C'est la raison pour laquelle, conformément aux souhaits formulés par l'Office parlementaire d'évaluation de la législation en 2001 39 ( * ) , l'extension des pouvoirs proposée par le présent paragraphe serait subordonnée à la convocation du chef d'entreprise.

La solution ainsi proposée apparaît satisfaisante. Le dirigeant d'entreprise doit, au préalable, être alerté par le juge sur les difficultés qu'il peut rencontrer par le biais de sa convocation à un entretien. Son impossibilité ou son refus de s'y rendre ne doit cependant pas interdire au juge d'agir. En effet, l'intervention du juge est marquée par une nécessité d'ordre public, qui conduit à éviter autant que possible les effets de contagion que les difficultés d'une entreprise déterminée pourraient occasionner auprès d'autres entreprises.

Le de cet article tend à instituer une nouvelle procédure d'injonction au profit du président du tribunal de commerce en cas d'absence de dépôt des comptes annuels des sociétés commerciales .

La lecture des comptes annuels permet, assez rapidement, de détecter les difficultés économiques ou financières que peuvent rencontrer les sociétés. En effet, le dépôt des comptes annuels implique la communication au greffe d'informations nombreuses et diversifiées. Aux termes des articles L. 232-21 à L. 232-23 du code de commerce, les sociétés commerciales doivent communiquer au greffe du tribunal de commerce territorialement compétent les documents suivants :

- le bilan (actif et passif) de la société et le compte de résultat ainsi que, le cas échéant, les comptes consolidés ;

- le rapport de gestion établi par les dirigeants sociaux, éventuellement accompagné du rapport de gestion du groupe et, pour les sociétés anonymes, du rapport sur les conditions de préparation et d'organisation des travaux du conseil et les procédures de contrôle interne ;

- le rapport du commissaire aux comptes sur les comptes annuels et, le cas échéant, les comptes consolidés, complété éventuellement par les observations sur les modifications apportées par l'assemblée des actionnaires ;

- la proposition d'affectation du résultat soumis à l'assemblée des associés ou actionnaires et la résolution d'affectation votée ou la décision d'affectation prise.

Certaines dispositions permettent déjà de sanctionner ou de pallier l'absence de dépôt de ces comptes . D'une part, l'absence de dépôt est punie d'une amende identique à celle prévue pour les contraventions de cinquième classe 40 ( * ) . D'autre part, l'article L. 123-5-1 du code de commerce, issu de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, permet à tout intéressé ou au ministère public de saisir, en référé, le président du tribunal de commerce afin que celui-ci enjoigne, sous astreinte, au dirigeant de déposer ces comptes.

Toutefois, il faut reconnaître que ces dispositifs n'empêchent pas l'absence de dépôt des comptes annuels dans les délais requis par de nombreuses sociétés. Ainsi, selon les chiffres communiqués à votre rapporteur, 50,4 % des sociétés anonymes n'ont pas respecté cette obligation en 2003. Ce chiffre atteint 62,2 % dans les sociétés à responsabilité limitée et même 87,7 % pour les sociétés en nom collectif.

Le 3° du présent article viendrait donc compléter le dispositif actuel en prévoyant un nouveau mécanisme d'injonction , en ajoutant à l'actuel article L. 611-2 un second paragraphe. Ainsi, le président du tribunal pourrait enjoindre aux sociétés commerciales qui n'auraient pas déposé leurs comptes dans les délais prévus par les dispositions légales ou réglementaires en vigueur d'y procéder « à bref délai ».

A la différence du mécanisme d'injonction déjà prévu par l'article L. 123-5-1 du code de commerce, le président du tribunal n'aurait pas à être saisi, au préalable, d'une demande d'injonction par une autre personne . Il agirait de sa propre initiative et, en pratique, grâce aux informations qui lui seraient transmises par le greffe de la juridiction. En effet, le greffier du tribunal de commerce est à même de déterminer quelles sociétés n'ont pas satisfait à cette formalité et, en règle générale, bien qu'aucun texte ne l'impose, procède souvent en pratique à des rappels auprès des dirigeants des sociétés qui ne produisent pas leurs comptes dans les délais prévus. A cet égard, votre commission souhaiterait qu'une pratique plus homogène puisse se rencontrer dans les différentes juridictions commerciales.

Afin de renforcer l'efficacité de ce dispositif, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des lois, le Gouvernement s'en étant remis à la sagesse, l'a assorti d'une astreinte qui pourra être prononcée par le tribunal, à l'instar de ce que prévoit l'article L. 123-5-1 du code de commerce.

En outre, un mécanisme d'intervention du président du tribunal serait institué dans l'hypothèse où, malgré l'injonction, les dirigeants sociaux n'auraient pas déposé leurs comptes. Au terme d'un délai qui serait fixé par décret en Conseil d'Etat, le président pourrait faire application à l'égard de l'entreprise concernée « des dispositions du deuxième alinéa du I » de l'article L. 611-2, tel que modifié par le présent article. En conséquence, il pourrait obtenir communication de renseignements permettant d'évaluer précisément la situation économique et financière de l'entreprise et ce, même en l'absence de convocation préalable à un entretien.

La création de cette nouvelle procédure présente un intérêt certain et devrait permettre de renforcer les mesures de « prévention-détection » prévues par les textes en vigueur. Toutefois, votre commission souligne qu'elle devrait rendre beaucoup moins utiles, en pratique, les dispositions de l'article L. 123-5-1 du code de commerce.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 sans modification.

Article 5
(art. L. 611-3 à L. 611-6 du code de commerce)
Mandat ad hoc - Procédure de conciliation

Cet article a pour objet de substituer à la procédure de règlement amiable une nouvelle procédure dénommée « conciliation », tout en conservant la procédure actuelle du mandat ad hoc . A cet effet, il réécrirait les articles L. 611-3 à L. 611-6 du code de commerce.

Article L. 611-3 du code de commerce
Mandat ad hoc

L'article L. 611-3 du code de commerce, qui traite aujourd'hui à la fois du mandat ad hoc et de la procédure de règlement amiable, serait réécrit afin de limiter son objet au seul mandat ad hoc .

1. Le droit en vigueur

La loi n° 94-475 du 10 juin 1994 sur la prévention et le traitement des difficultés des entreprises a donné une base juridique à une pratique ancienne des tribunaux de commerce, le mandat ad hoc consistant à désigner un mandataire, indépendant des parties, chargé d'aider le dirigeant d'entreprise à résoudre les difficultés qu'il rencontre, notamment avec ses créanciers . De ce point de vue, l'essence du mandat ad hoc est d'apporter une mission d'assistance au débiteur.

Cette consécration législative a conservé la souplesse propre à cette mesure puisque la désignation d'un mandataire ad hoc reste discrétionnaire de la part du président de la juridiction. En particulier, aucun critère d'ouverture n'est exigé. En outre, lui seul détermine l'objet et la durée de la mission qui lui est ainsi confiée. Le cadre de cette mesure de prévention peut donc être librement adapté en fonction de la situation de chaque débiteur.

S'il réussit dans sa tâche d'assistance, le mandataire ad hoc peut contribuer à la conclusion d'un concordat amiable entre le débiteur et ses créanciers. Le contenu de cette convention, régie par le droit commun des obligations, est librement débattu par les parties et peut aboutir à l'abandon par les créanciers d'une partie du montant nominal de leur créance ou, à tout le moins, à l'octroi de délais de paiements permettant d'éviter la cessation des paiements du débiteur.

L'ouverture de ce dispositif n'est pas toujours, à l'heure actuelle, assez sollicitée par les dirigeants. Ainsi, selon la Conférence générale des tribunaux de commerce, 1.400 mandats ad hoc et règlements amiables ont été ouverts en 2004 par les juridictions consulaires, chiffre qui peut être comparé aux 39.463 jugements d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires prononcés en 2003 par les tribunaux de commerce. Néanmoins, statistiquement, l'efficacité du mandat ad hoc -en grande partie due à sa souplesse- est réelle. La Conférence générale des tribunaux de commerce estime ainsi que les procédures de mandat ad hoc et de règlement amiable ouvertes en 2004 ont permis de maintenir près de 150.000 emplois.

2. Les modifications apportées par le projet de loi

Outre le fait que la réécriture de l'article L. 611-3 du code de commerce aurait pour conséquence de limiter l'objet de cette disposition au seul mandat ad hoc , cette modification conduirait également à préciser que la nomination d'un mandataire ad hoc ne peut intervenir qu'« à la demande du représentant de l'entreprise ». Si cette précision est nouvelle, elle ne marque pas de novation réelle du droit en vigueur dans la mesure où, en pratique, les nominations d'un mandataire ad hoc n'interviennent, à l'heure actuelle, qu'à la demande expresse du débiteur.

En revanche, la disjonction dans des dispositions distinctes de la procédure du mandat ad hoc et de la procédure de conciliation, destinée à remplacer le règlement amiable, a fait naître deux interrogations.

En premier lieu, le texte initialement proposé par le présent article ne faisait pas référence à la nature de l'entreprise qui peut bénéficier de la nomination d'un mandataire ad hoc . L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, a partiellement levé ce doute en prévoyant que le tribunal de grande instance peut également être saisi d'une demande d'ouverture d'un mandat ad hoc . En conséquence, cette procédure pourra être mise en oeuvre tant au bénéfice de commerçants ou d'artisans que d'agriculteurs ou d'autres personnes physiques ou morales de droit privé non commerçantes.

En second lieu, aux termes du projet de loi initial, l'absence de référence à la confidentialité lors de cette procédure pouvait soulever des inquiétudes. Le projet de loi prévoyait, en son article 10, que les personnes ayant participé à la conciliation ou en ayant eu connaissance sont tenues à la confidentialité, mais rien n'était prévu en ce qui concerne la procédure du mandat ad hoc . Cette difficulté a opportunément été levée par l'Assemblée nationale par un amendement à l'article 10 du présent projet de loi, permettant de soumettre expressément à la confidentialité la procédure du mandat ad hoc .

Il convient de relever que le texte proposé ne prévoirait aucune faculté de récusation du mandataire ad hoc , contrairement à ce qui prévaudrait pour la conciliation, en application de l'article L. 611-6 tel que rédigé par le présent article. Cette absence peut s'expliquer par le souci de conserver à la procédure de mandat ad hoc sa souplesse et son caractère informel. Dans ces conditions, en l'absence de dialogue possible entre le mandataire ad hoc et le débiteur, ce dernier pourra en obtenir le remplacement en sollicitant du président du tribunal la désignation d'un nouveau mandataire.

Article L. 611-4 du code de commerce
Critères d'ouverture de la procédure de conciliation

L'article L. 611-4 du code de commerce serait réécrit par le présent article afin de définir les critères d'ouverture de la nouvelle procédure de conciliation.

1. Le droit en vigueur

Dans sa rédaction issue de la loi précitée du 10 juin 1994 sur la prévention et le traitement des difficultés des entreprises, l'article L. 611-3 institue une procédure de règlement amiable ayant un objet similaire à celle du mandat ad hoc . Cette procédure permet de désigner un conciliateur pour une période limitée afin de faciliter la conclusion d'un accord entre le débiteur et ses créanciers dans le but d'éviter la cessation des paiements .

Elle est applicable à « toute entreprise commerciale et artisanale ». Cette formulation implique que peuvent solliciter l'ouverture d'une procédure de règlement amiable les commerçants qui ne sont pas inscrits au registre du commerce et des sociétés, ainsi que les artisans non inscrits au répertoire des métiers. Le juge peut donc ouvrir la procédure dès lors qu'il constate l'accomplissement d'actes de commerce par l'entreprise et l'exercice habituel d'une profession commerciale ou, pour les artisans, l'exercice d'une activité appartenant au secteur des métiers par une entreprise comprenant moins de dix salariés.

Sont donc exclues du bénéfice de la procédure les personnes physiques n'ayant pas la qualité d'artisan ou de commerçant, ainsi que les personnes morales non commerciales. Cette exclusion touche, en particulier, les personnes physiques exerçant une profession indépendante non commerciale ou artisanale, ainsi que les entreprises agricoles -personnes physiques ou personnes morales de droit privé-, en raison, pour ces dernières, d'un régime spécifique prévu par les articles L. 351-1 et suivants du code rural.

Contrairement au mandat ad hoc , l'ouverture de la procédure du règlement amiable est subordonnée à la survenance de deux évènements alternatifs :

- l'existence d'une « difficulté juridique, économique ou financière » ;

- l'existence de « besoins ne pouvant être couverts par un financement adapté aux possibilités de l'entreprise ».

En tout état de cause, cette procédure ne peut, à l'heure actuelle, être ouverte si le débiteur est déjà en état de cessation des paiements . Le législateur a en effet estimé, en 1994, que le règlement amiable devait être une mesure de prévention de la cessation des paiements et, qu'en conséquence, il devait cesser lorsque cette dernière était avérée. Rappelons que la cessation des paiements est légalement définie, depuis 1985, comme « l'impossibilité pour l'entreprise de faire face au passif exigible avec son actif disponible », cette formulation, actuellement retenue à l'article L. 621-1 du code de commerce étant reprise sans modification par l'article 99 du présent projet de loi, retranscrivant une formule issue de la jurisprudence de la Cour de cassation 41 ( * ) .

Or, la pratique a montré que si l'édifice juridique ainsi construit présentait une incontestable cohérence intellectuelle, il s'est révélé être, en pratique, un carcan trop rigide. En effet, lorsque survient la cessation des paiements, l'accord intervenu entre le débiteur et ses créanciers dans le cadre du règlement amiable devient caduc, car l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire doit obligatoirement être demandée en vertu de l'actuel article L. 621-1 du code de commerce.

L'existence d'un état de cessation des paiements, difficile à déterminer, n'est pas davantage de nature à faire de cette notion un critère de distinction absolument intangible. Comme le montre la pratique, le règlement amiable est souvent mis en oeuvre alors que le débiteur est, dans les faits, déjà en état de cessation des paiements. Cette situation conduit alors le tribunal de la faillite, après avoir ouvert une procédure de redressement judiciaire, à reporter la date de cessation des paiements à une date antérieure à celle du jugement d'ouverture, comme le lui permet l'actuel article L. 621-7 du code de commerce 42 ( * ) .

En outre, la fixation de la cessation des paiements à une date antérieure au jugement d'ouverture produit des effets juridiques importants et, le cas échéant, défavorables aux créanciers qui auraient accepté d'aménager le règlement de leurs créances dans le cadre d'un accord amiable, éventuellement homologué par le président du tribunal. En effet, un régime de nullités est actuellement organisé par les articles L. 621-107 et suivants du code de commerce qui peut avoir pour conséquence de rendre nuls et non avenus des actes prévus dans l'accord amiable.

2. Les modifications apportées par le projet de loi

Aux termes de la nouvelle rédaction proposée pour l'article L. 611-4 du code de commerce, issue d'un amendement de la commission des lois de l'Assemblée nationale adopté à la suite d'un avis favorable du Gouvernement, une nouvelle procédure de « prévention-traitement » des difficultés des entreprises, prévoyant l'intervention du juge consulaire, se substituerait à l'actuelle procédure de règlement amiable . Elle prendrait le nom de « procédure de conciliation ».

Cette procédure serait applicable, comme en droit positif, à l'ensemble des entreprises commerciales et artisanales, indépendamment de leur inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers. Ses critères d'ouverture seraient sensiblement modifiés par rapport à ceux prévus en matière de règlement amiable. La procédure de conciliation pourrait ainsi être ouverte à deux conditions :

- la présence d'une « difficulté juridique, économique ou financière, avérée ou prévisible » ;

- l'absence d'un état de cessation des paiements « depuis plus de quarante-cinq jours » .

Le dispositif proposé apporterait donc deux novations majeures de nature à rendre plus efficiente l'ancienne procédure de règlement amiable.

D'une part, pour saisir le juge en vue de l'ouverture d'une procédure de conciliation, le débiteur n'aurait plus à attendre qu'une difficulté de nature juridique, économique ou financière soit déjà intervenue . De manière préventive, le dirigeant d'une entreprise pourrait solliciter auprès du président du tribunal de commerce une procédure de conciliation, même s'il est seulement prévisible qu'une difficulté juridique, économique ou financière se fera jour .

La « prévisibilité » des difficultés du débiteur devra ressortir d'éléments factuels que le président du tribunal appréciera au cas par cas lors de sa décision d'ouvrir ou non la procédure de conciliation. A cet égard, la production par le requérant de comptes prévisionnels faisant apparaître des difficultés pourra constituer un élément objectif. Mais cette prévisibilité pourrait résulter d'autres éléments, tels que la perte d'un client important ou des difficultés d'ordre social.

Cet état de fait devrait être de nature à renforcer le pouvoir d'appréciation du juge sur l'opportunité d'ouvrir la procédure, et par là même, sa fonction de conseil auprès des entreprises. Cette possibilité permettra également aux chefs d'entreprises d'anticiper, davantage qu'à l'heure actuelle, les difficultés à venir afin, sinon d'empêcher leur survenance, d'être à même de mieux les traiter le moment venu.

D'autre part, selon le texte proposé, la procédure de conciliation pourrait être ouverte et, le cas échéant, se poursuivre, même en cas de survenance d'un état de cessation des paiements . Cette mesure constituerait une grande avancée sur l'état du droit positif en permettant de supprimer les difficultés liées à l'application de la procédure de règlement amiable. Toutefois, la cessation des paiements étant conservée par l'article L. 631-1 du code de commerce dans sa rédaction proposée par l'article 99 du présent projet de loi comme critère unique d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, le texte proposé pour l'article L. 611-4 du code de commerce prévoit que la procédure de conciliation ne pourrait s'appliquer que si le débiteur est en état de cessation des paiements depuis moins de quarante-cinq jours.

Le choix de cette durée découle de la prise en compte du délai de paiement dans le cadre des relations clients/fournisseurs qui est couramment de trente jours. Ainsi, en retenant un délai de quarante-cinq jours, le projet de loi tente d'éviter que le débiteur ne puisse bénéficier de la procédure de conciliation, en raison d'un simple décalage chronologique. Le choix d'une durée plus longue aurait pu avoir des incidences néfastes sur la célérité des actions à mettre en oeuvre et aurait rendu illusoire la confidentialité de cette procédure, une cessation des paiements ancienne étant davantage de nature à être connue qu'une cessation des paiements très récente.

Si l'on peut partager l'idée de ne pas empêcher l'utilisation de ce mécanisme de prévention après la cessation des paiements, votre commission considère la formulation retenue par le projet de loi ambiguë. En effet, la rédaction proposée fait état de « l'application » de la procédure aux entreprises se trouvant dans l'une des deux situations susvisées, ce qui pourrait laisser penser que la procédure doit immédiatement cesser et être convertie en redressement judiciaire quand la limite de 45 jours est dépassée. Or, tel ne saurait être le cas, dans la mesure où l'article L. 631-4 du code de commerce dans sa rédaction proposée par l'article 100 du projet de loi ne prévoit la transformation de la procédure de conciliation en une procédure de redressement judiciaire que si la conciliation a échoué ou que l'accord n'a pas été homologué par le juge.

Dans ces conditions, votre commission vous propose un amendement tendant à prévoir que la procédure de conciliation « est ouverte » si les deux conditions susvisées sont remplies .

Article L. 611-5 du code de commerce
Application aux personnes morales de droit privé et aux personnes physiques exerçant une profession indépendante

La nouvelle rédaction proposée par l'article L. 611-5 du code de commerce tend à étendre le bénéfice de la nouvelle procédure de conciliation à l'ensemble des personnes morales de droit privé, ainsi qu'aux personnes physiques exerçant une profession indépendante .

1. Le droit en vigueur

Dans sa rédaction actuelle, issue de la loi précitée du 10 juin 1994 sur la prévention et le traitement des difficultés des entreprises, l'article L. 611-5 du code de commerce dispose que le représentant de toute personne morale de droit privé peut saisir le président du tribunal de grande instance afin de bénéficier des mécanismes de « prévention-détection » et de « prévention-traitement » prévus par les articles L. 611-2 à L. 611-5 du code de commerce.

Les mécanismes de prévention et de traitement des difficultés des entreprises ont longtemps été exclusivement réservés, pour des raisons historiques, aux personnes ayant la qualité de commerçant.

Toutefois, il a été reconnu, par la suite, que la qualification juridique d'une entreprise et, en particulier, sa nature commerciale ou non commerciale, ne justifiait pas un traitement plus ou moins favorable dans le cadre des procédures de traitement des difficultés des entreprises. Telle est la raison pour laquelle l'application des dispositifs de prévention, issus de la loi précitée du 1 er mars 1984 sur la prévention et le règlement amiable des entreprises, a été étendue aux personnes physiques ayant la qualité d'artisan, ainsi qu'aux personnes morales de droit privé n'ayant pas la qualité de commerçant. Néanmoins, si les personnes morales de droit privé peuvent bénéficier du dispositif du règlement amiable, le juge compétent est alors le président du tribunal de grande instance qui dispose des mêmes pouvoirs que ceux attribués, dans ce cadre, au président du tribunal de commerce.

L'état du droit actuel laisse cependant hors du champ du droit des procédures collectives deux catégories d'entreprises : les entreprises soumises à un statut de droit public ainsi que les personnes physiques exerçant une activité indépendante non commerciale. Si l'exclusion des personnes publiques peut, compte tenu de leur statut particulier et de l'application des règles de la comptabilité publique, présenter une certaine justification, celle des personnes physiques non commerçantes ou n'ayant pas le statut d'artisan n'obéit en revanche à aucune logique juridique .

Au surplus, l'état du droit présente un caractère discriminatoire même entre les personnes physiques n'ayant pas la qualité de commerçant .

D'une part, les personnes physiques bénéficient, pour leurs dettes non professionnelles, des mécanismes de lutte contre le surendettement et de rétablissement personnel. Depuis la loi n° 98-657 du 28 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre l'exclusion, les particuliers peuvent voir certaines de leurs dettes non professionnelles effacées 43 ( * ) . Ce droit a d'ailleurs été récemment renforcé par les articles 35 et 36 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine qui a institué une procédure dite de « rétablissement personnel » 44 ( * ) .

D'autre part, en application de la loi du 1 er juin 1924 portant introduction des lois commerciales françaises dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, les personnes physiques même non commerçantes domiciliées dans ces départements bénéficient, dans le cadre de la procédure de faillite civile, de la possibilité de voir leurs dettes tant personnelles que professionnelles effacées 45 ( * ) .

Ainsi, en l'état actuel du droit, les personnes physiques exerçant une profession indépendante et non domiciliées dans les départements d'Alsace-Moselle sont les seules à ne pas pouvoir bénéficier de procédures tendant à l'apurement de leurs dettes professionnelles .

2. Les modifications apportées par le projet de loi

Le présent article rendrait la procédure de conciliation applicable , outre à l'ensemble des personnes soumises au droit privé, aux « personnes physiques exerçant une profession indépendante » . Le texte précise que cette dernière catégorie comprendrait les personnes physiques exerçant une « profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ». Cette formulation reprend celle de l'article 1 er de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés de professions libérales soumises à statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participation financière de professions libérales.

Il n'existe pas, à l'heure actuelle, de définition légale de la « profession indépendante ». Toutefois, cette dernière peut être définie par opposition à l'exercice salarié, marqué par une hiérarchie organique et fonctionnelle entre l'employeur et son subordonné. Juridiquement, cette catégorie englobe la catégorie des professions libérales, qui n'en constitue qu'un sous-ensemble, mais le projet de loi a volontairement choisi de mettre en avant l'application des règles nouvelles à ces professions, notamment celles dont le statut est défini par un texte législatif ou réglementaire et celles dont le titre est protégé, c'est-à-dire ne pouvant faire l'objet d'une appropriation par une personne qui ne satisferait pas aux conditions requises pour accéder à cette profession.

Il n'existe pas davantage de définition légale des « professions libérales ». Il s'agit d'une catégorie ouverte qui peut se définir par deux critères : d'une part, l'indépendance d'exercice ; d'autre part, l'existence d'un caractère intellectuel souvent marqué 46 ( * ) . Certaines professions sont réglementées par des textes qui peuvent les doter d'une instance représentative, le cas échéant titulaire de prérogatives de nature disciplinaire.

La rédaction retenue par le texte proposé impliquerait donc l'applicabilité de ces procédures aux officiers ministériels (avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avoués près la cour d'appel, notaires, huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires).

Votre commission se félicite de l'extension de l'application de la procédure de conciliation aux professions indépendantes. Elle souligne d'ailleurs qu'elle s'était déjà prononcée en faveur d'une telle modification lors de l'examen de la loi précitée du 10 juin 1994 relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises 47 ( * ) .

En revanche, les agriculteurs , c'est-à-dire les personnes qui exercent une profession agricole au sens de l'article L. 311-1 du code rural, resteraient hors du champ d'application de la nouvelle procédure de conciliation. Sur ce point, le texte proposé ne fait qu'expliciter l'état du droit positif. En effet, les articles 22 à 28 de la loi n° 88-1202 du 30 décembre 1988 relative à l'adaptation de l'exploitation agricole à son environnement économique et social, désormais repris aux articles L. 351-1 à L. 351-7 du code rural, ont institué un régime particulier de règlement amiable pour les personnes physiques et les personnes morales de droit privé exerçant une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 du même code. Par application de l'adage lex specialis , ce dispositif, qui présente d'ailleurs peu de particularités par rapport à l'actuelle procédure de règlement amiable, s'applique de façon exclusive aux entreprises agricoles non constituées sous forme de sociétés commerciales.

Par souci de précision, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des lois, le Gouvernement s'en étant remis à la sagesse, a cependant complété par un nouvel alinéa le texte proposé pour l'article L. 611-5 du code de commerce afin de mettre davantage en exergue l'inapplicabilité de la procédure de conciliation aux exploitants agricoles et de renvoyer au dispositif spécifiquement prévu à leur égard par le code rural.

Votre commission vous propose trois amendements, le premier pour préciser, par souci de rigueur juridique, que la procédure de conciliation est « applicable » aux professionnels indépendants, les deux autres tendant à assurer la cohérence du texte proposé et à préciser les dispositions du code rural applicables aux agriculteurs .

Article L. 611-6 du code de commerce
Modalités de fonctionnement de la procédure de conciliation

La nouvelle rédaction proposée pour l'article L. 611-6 du code de commerce déterminerait les modalités de fonctionnement de la procédure de conciliation. Le dispositif proposé reprendrait, avec quelques modifications ponctuelles, les dispositions figurant actuellement aux deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 611-3 du code de commerce.

Le premier alinéa du texte proposé préciserait que le président du tribunal est saisi sur requête du débiteur exposant sa situation financière, économique et sociale, les besoins de financement ainsi que les moyens d'y faire face . A l'instar du droit positif, la procédure de conciliation ne pourrait donc être ouverte à l'initiative d'autres personnes que le dirigeant de l'entreprise qui connaît des difficultés. La requête doit permettre au président de la juridiction d'être en possession d'informations suffisantes lui permettant d'apprécier l'opportunité de désigner un conciliateur 48 ( * ) .

Aux termes du deuxième alinéa du texte proposé, modifié par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement en vue de substituer la notion de « débiteur » à celle d'« entreprise », retenue par le texte initial, le président du tribunal conserverait la faculté d' ordonner des mesures complémentaires destinées à parfaire sa connaissance de la situation financière, économique et sociale du débiteur.

En premier lieu, il pourrait faire application à son égard des dispositions du I de l'article L. 611-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 4 du présent projet de loi. De ce fait, il pourrait obtenir communication, auprès du commissaire aux comptes de la société, s'il en a été désigné un, des membres et représentants du personnel de l'entreprise, de l'ensemble des administrations publiques et des organismes de sécurité et de prévoyance sociales, ainsi que des services chargés de la centralisation des risques bancaires et des incidents de paiement, des renseignements lui permettant de lui donner une exacte information sur la situation économique et financière du débiteur.

En second lieu, le président du tribunal disposerait toujours de la faculté de désigner un expert afin de disposer d'un rapport sur la situation économique, sociale et financière de l'entreprise. Le recours à un expert peut en effet s'avérer utile, notamment pour appréhender la situation sociale dans l'entreprise. Selon la rédaction proposée, le juge resterait libre de désigner la personne de son choix et de définir l'étendue et la durée de sa mission. Votre commission insiste pour que l'expert ne se voit pas assigner, en pratique, un délai d'exécution trop long pour l'accomplissement de sa mission, l'ouverture la plus rapide possible de la procédure de conciliation étant souhaitable afin de ne pas compromettre les chances de survie de l'entreprise.

En dernier lieu, comme à l'heure actuelle, le président du tribunal pourrait obtenir des établissements bancaires et financiers tout renseignement de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière du demandeur. Ces informations seraient rendues disponibles sans que ces établissements puissent, en particulier, opposer au président de la juridiction une fin de non-recevoir fondée, par exemple, sur la confidentialité ou le secret professionnel.

Les trois derniers alinéas du texte proposé pour rédiger l'article L. 611-6 du code de commerce définiraient les conditions d'ouverture de la procédure de conciliation et de désignation du conciliateur .

Le troisième alinéa, réécrit par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des Lois avec l'avis favorable du Gouvernement, prévoirait que la procédure de conciliation serait ouverte par le président du tribunal .

Selon le texte proposé, la requête aux fins d'ouverture de la procédure devrait exposer la situation financière, économique et sociale du débiteur, ses besoins de financement, ainsi que les « moyens d'y faire face ».

Votre commission estime que cette rédaction, d'ailleurs reprise du deuxième alinéa de l'article L. 611-3 dans sa rédaction actuelle, pourrait laisser croire que le président du tribunal aurait à apprécier l'opportunité de l'ouverture de la procédure, en tenant compte des moyens envisagés par le débiteur pour sortir de ses difficultés . Or, tel ne saurait être le cas. L'ouverture de la procédure s'imposera au président dès lors que le débiteur satisfait aux conditions de l'article L. 611-4.

Elle vous soumet donc un amendement supprimant l'obligation de faire état des moyens envisagés par le débiteur pour faire face à ses difficultés.

Votre commission estime préférable que cette décision d'ouverture ne puisse pas faire l'objet d'un recours juridictionnel afin d'en conserver la confidentialité et d'éviter un allongement des délais de cette procédure susceptible de causer son échec. Elle vous propose donc par un troisième amendement d'interdire les recours à l'encontre de cette décision. En revanche, un droit de recours contre la décision refusant l'ouverture de la procédure serait maintenu.

L'ouverture de la procédure impliquerait la désignation d'un conciliateur par le président du tribunal , comme le prévoit déjà le dernier alinéa de l'article L. 611-3.

Le texte proposé allongerait d'un mois la durée actuellement impartie par le président du tribunal au conciliateur pour l'exécution de sa mission.

Actuellement limitée à trois mois, cette durée est en pratique apparue trop courte pour assurer la viabilité de la conclusion d'un accord amiable entre le débiteur et ses créanciers. Dans ces conditions, une partie des acteurs des procédures collectives avait réclamé un allongement de ce délai, qui peut pourtant d'ores et déjà faire l'objet d'une prorogation d'un mois sur décision du juge, à la demande du conciliateur.

Votre rapporteur s'était d'ailleurs également prononcé en ce sens lors de l'examen des dispositifs de prévention des difficultés des entreprises par l'Office parlementaire d'évaluation de la législation 49 ( * ) .

Votre commission souligne que, dans ce cadre, un certain équilibre doit être recherché. Le délai d'action du conciliateur doit être suffisant pour lui permettre de connaître la situation économique, financière et sociale de l'entreprise, puis pour tenter de créer les conditions d'un accord amiable entre le débiteur et ses créanciers. Néanmoins, la procédure de conciliation ne doit pas être inutilement longue, car l'ouverture d'une procédure judiciaire -qu'il s'agisse d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire- peut vite se révéler plus appropriée si la situation du débiteur s'aggrave.

Sur ce point, le choix du Gouvernement s'est porté sur un allongement de trois à quatre mois de la durée initiale de la mission de conciliation, la possibilité d'une prorogation pour un mois supplémentaire à la demande du conciliateur étant conservée . Le texte proposé compléterait le droit existant en prévoyant que cette prorogation ne peut intervenir que par décision motivée . Cette motivation sera de nature à éviter que la décision de prorogation soit de pur confort, mais justifiée par le souci de trouver une issue favorable à la procédure.

Lors de son examen à l'Assemblée nationale, le texte initial du projet de loi a été modifié à l'initiative de la commission des lois avec l'avis favorable du Gouvernement, afin de permettre tant au débiteur qu'à ses créanciers de proposer un conciliateur à la désignation du président du tribunal . La rédaction proposée laisserait donc au président de la juridiction toute latitude pour désigner ou non la personne proposée par les parties en qualité de conciliateur.

La mission du conciliateur prendrait fin de plein droit à l'expiration du délai prescrit par le président du tribunal pour l'exercice par le conciliateur de sa mission . Votre commission estime que l'expiration de ce délai devrait également conduire à mettre fin de manière automatique à la procédure de conciliation afin que celle-ci ne se prolonge pas indûment par la désignation de plusieurs conciliateurs différents. Elle vous soumet en conséquence un amendement en ce sens.

Le quatrième alinéa du texte proposé pour l'article L. 611-6 prévoirait un mécanisme d'information au profit du ministère public .

La confidentialité de la procédure de conciliation est une donnée essentielle de sa réussite . En effet, la connaissance prématurée des difficultés d'une entreprise par ses concurrents ou ses clients peut faire perdre à celle-ci le crédit dont elle a nécessairement besoin pour les affronter dans des conditions optimales. Pour autant, la mise en place de mécanismes d'information auprès d'autorités qui peuvent apporter des données d'un grand intérêt pour l'établissement de mesures de redressement est utile.

Le projet de loi initial prévoyait, en ce sens, une information du ministère public par l'intermédiaire de la transmission à son représentant de la décision désignant un mandataire ad hoc ou ouvrant la procédure de conciliation.

La prévention des difficultés des entreprises revêt un caractère d'intérêt public dans la mesure où les difficultés rencontrées par le débiteur peuvent, par un effet de contagion, s'étendre à d'autres entreprises. En outre, le ministère public dispose souvent d'informations qui lui sont propres et peuvent s'avérer importantes au stade où s'engage la conciliation. Cette obligation d'information permettrait ainsi de pallier le fait que le président du tribunal ne peut pas obtenir du parquet les informations dont ce dernier disposerait, le cas échéant, sur la situation du débiteur et qui seraient couvertes par le secret de l'instruction 50 ( * ) .

Le texte proposé prévoyait également initialement que, lorsque le débiteur exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire, ou dont le titre est protégé, la décision désignant le mandataire ad hoc ou ouvrant la procédure de conciliation serait également communiquée à l'ordre professionnel ou à l'autorité compétente dont il relève. Ce mécanisme d'information se justifie par la nécessité de donner, lorsqu'ils existent, aux organes de contrôle et, le cas échéant, de discipline d'une profession réglementée l'ensemble des informations leur permettant de connaître la situation des membres de leur profession.

A l'initiative de sa commission des lois, de M. Pascal Clément et de Mme Anne-Marie Comparini, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a limité ces obligations d'information à la seule procédure de conciliation. En conséquence, la décision par laquelle le tribunal désignerait un mandataire ad hoc ne serait transmise ni au ministère public, ni à l'ordre professionnel ou l'autorité professionnelle concernés .

Le dernier alinéa du texte proposé rendrait possible la récusation du conciliateur. Actuellement, aucune disposition ne règle l'hypothèse d'une contestation par le débiteur portant sur la désignation du conciliateur.

Or, l'existence d'une relation de confiance entre le débiteur et le conciliateur est essentielle pour qu'un accord amiable viable et cohérent puisse se concrétiser. Le droit positif présentait donc une lacune. Prévoir une possibilité de récusation paraît d'autant plus nécessaire que l'article 10 du présent projet de loi instituerait désormais des conditions de compatibilité, de capacité et de garantie professionnelles pour les mandataires ad hoc et conciliateurs. La récusation pourra en particulier venir sanctionner le non-respect de ces conditions.

Cette récusation s'effectuerait dans des conditions et des délais qui seraient fixés par un décret en Conseil d'Etat. Selon les informations fournies par le ministère de la justice, un délai de récusation très court, d'une dizaine de jours, pourrait être envisagé. Les causes de récusation devraient comprendre, au minimum, les cas d'incompatibilités prévus par l'article L. 611-13, dans sa rédaction proposée par l'article 10 du présent projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 5 ainsi modifié.

Article 6
(art. L. 611-7 nouveau du code de commerce)
Mission du conciliateur - Remise de dettes par les créanciers publics - Délais de paiement accordés par le juge -
Suppression de la suspension provisoire des poursuites

Cet article tend à créer un article L. 611-7 du code de commerce afin de préciser la mission du conciliateur, de donner la possibilité aux créanciers publics de remettre certaines de leurs créances à l'encontre du débiteur et de prévoir la faculté pour le juge d'ordonner des délais de paiement . Ce faisant, l'article proposé supprimerait le mécanisme de suspension provisoire des poursuites .

1. Le droit en vigueur

La mission du conciliateur est actuellement définie par les I et II de l'article L. 611-4 du code de commerce. Elle consiste à favoriser le fonctionnement de l'entreprise et à rechercher la conclusion d'un accord avec ses créanciers. A cette fin, le conciliateur est rendu destinataire des informations recueillies antérieurement par le président du tribunal et dispose des résultats de l'expertise éventuellement ordonnée par le juge afin d'obtenir un état clair de la situation économique, financière et sociale du débiteur.

Le règlement amiable se singularise par la faculté offerte au conciliateur de saisir le président du tribunal afin que soit ordonnée la suspension provisoire des poursuites à l'encontre du débiteur 51 ( * ) .

Cette suspension vise à « faciliter la conclusion de l'accord » entre le débiteur et ses créanciers. D'une durée ne pouvant excéder le terme de la mission impartie au conciliateur, elle suspend ou interdit toute action en justice de la part des créanciers dont la créance trouve son origine antérieurement à la décision judiciaire ordonnant cette suspension et ayant pour objet de voir le débiteur condamné au paiement d'une somme d'argent ou d'obtenir la résolution, pour défaut de paiement d'une somme d'argent, d'un contrat le liant au débiteur.

En conséquence, sont sanctionnés par la nullité : le paiement par le débiteur, en tout ou partie, d'une créance quelconque -à l'exception de celles résultant du contrat de travail- née antérieurement à cette décision, le désintéressement des cautions qui acquitteraient des créances nées antérieurement, l'accomplissement de tout acte de disposition étranger à la gestion normale de l'entreprise ainsi que le fait de consentir une hypothèque ou un nantissement. Le président du tribunal peut néanmoins autoriser, au cas par cas, l'accomplissement de tel ou tel de ces actes.

Le débiteur se trouve donc, en cas de suspension des poursuites, dans une situation assez proche de celle qui est la sienne dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire.

Sans doute ce dispositif peut-il constituer une certaine incitation pour les créanciers à parvenir à un accord amiable, dans la mesure où la paralysie collective de leurs actions à l'encontre du débiteur les contraint ainsi à rechercher une issue amiable. Toutefois, en pratique, cette mesure est très peu souvent ordonnée en raison des conséquences néfastes qu'elle peut occasionner. En effet, comme l'avait relevé votre rapporteur dans le cadre des travaux de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation, la suspension des poursuites contribue à rompre la confidentialité devant nécessairement s'attacher à la recherche d'un accord amiable entre le débiteur et ses créanciers et conduit à la judiciarisation d'une procédure d'essence contractuelle, ce qui n'apparaît guère justifié 52 ( * ) .

2. Les modifications apportées par le projet de loi

Dans sa rédaction initiale, le présent article tendait tout d'abord à consacrer la reprise, au sein d'un nouvel article L. 611-7 du code de commerce, des dispositions figurant actuellement aux I et II de l'article L. 611-4 de ce code relatives à la mission et aux moyens du conciliateur .

Aux termes du premier alinéa du texte proposé, la mission du conciliateur consistait à rechercher la conclusion d'un accord entre le débiteur et ses créanciers. La formulation retenue se distinguait donc de celle figurant actuellement à l'article L. 611-4, la mission tendant à « favoriser le maintien du fonctionnement de l'entreprise » étant supprimée. En outre, le conciliateur se voyait expressément reconnaître un pouvoir de proposition en matière de sauvegarde de l'entreprise, de poursuite de l'activité économique et de maintien de l'emploi. Le texte initial précisait par ailleurs que le conciliateur pouvait, pour l'accomplissement de sa mission, obtenir du débiteur tout renseignement utile, ce qui lui permettait de disposer de l'ensemble des informations lui permettant de conseiller au mieux le débiteur et ses créanciers dans l'élaboration d'un accord amiable.

A l'initiative de sa commission des lois et de M. Philippe Houillon, l'Assemblée nationale a, avec l'avis favorable du Gouvernement, réécrit ce dispositif afin de :

-  définir l'identité des parties à l'accord amiable négocié sous l'égide du conciliateur. L'accord serait désormais restreint, outre au débiteur, à ses « principaux créanciers ». Il est certain, en effet, que faute d'une procédure de vérification des créances dans le cadre de la procédure de conciliation, il serait impossible de connaître l'ensemble des créanciers du débiteur et, par conséquent, de parvenir à un accord avec eux, dans leur totalité. En ce sens, la rédaction issue de la première lecture à l'Assemblée nationale apparaît donc plus réaliste, et s'inspire d'ailleurs des dispositions figurant actuellement à l'article L. 351-4 du code rural 53 ( * ) .

Toutefois, à l'inverse, l'accord pourrait être étendu, si le conciliateur « l'estime utile », à « ses cocontractants habituels ». En conséquence, l'accord ne regrouperait plus le débiteur et ses seuls créanciers mais pourrait également concerner des personnes qui, au moment de la procédure, ne détiennent pas nécessairement de créances sur le débiteur. Le cocontractant « habituel » peut, en effet, rentrer dans la catégorie des créanciers et, le cas échéant, des principaux créanciers du débiteur. En revanche, il peut avoir été créancier du débiteur dans le passé et ne plus l'être au moment où se déroule la procédure de conciliation. Etant un cocontractant habituel de l'entreprise, il est cependant probable qu'il redevienne l'un de ses créanciers par la suite, si l'entreprise poursuit son activité ;

- préciser que la mission du conciliateur désigné par le tribunal serait de favoriser le règlement de la situation financière du débiteur par la conclusion d' un accord amiable qui aurait pour objet de prévoir les délais de paiement et les remises de dettes. Cette nouvelle rédaction expliciterait donc et mettrait en exergue l'objet principal de l'accord recherché dans le cadre de la procédure de conciliation, s'inspirant à nouveau des dispositions de l'article L. 351-4 du code rural.

Votre commission estime cependant que cette dernière précision serait de nature à créer certaines difficultés de cohérence juridique .

D'une part, les cocontractants habituels du débiteur n'étant pas nécessairement ses créanciers, ils n'auraient aucune raison de participer à un accord qui n'aurait que pour objet de remettre des dettes et de prévoir des délais de paiements, ces mesures ne pouvant bien entendu exister que dans la mesure où la personne qui les consent est un créancier. D'autre part, l'objet de l'accord de conciliation ne saurait se limiter à organiser des délais de paiement et des remises de dettes. Il doit également être, autant que possible , d'apporter au débiteur l'argent frais qui lui est nécessaire pour sortir de ses difficultés . Au surplus, l'article L. 611-11 du code de commerce, dans sa rédaction proposée par l'article 8 du présent projet de loi, tend à inciter les signataires d'un accord de conciliation à fournir au débiteur de nouveaux apports en trésorerie.

En outre, votre commission estime que l'association des cocontractants habituels du débiteur devrait résulter de considérations plus objectives et ne pas être laissée à la seule discrétion du conciliateur.

Votre commission vous soumet en conséquence un amendement tendant, d'une part, à prévoir que les cocontractants habituels sont, le cas échéant, invités à l'accord et, d'autre part, à supprimer la mention selon laquelle l'objet de l'accord est de prévoir des délais de paiement et des remises de dettes.

Les pouvoirs d'information et de proposition du conciliateur initialement prévus par le projet de loi ont été maintenus sans modification de fond.

De même, reprenant les dispositions figurant actuellement au II de l'article L. 611-4, le troisième alinéa du texte proposé prévoirait la communication par le président du tribunal de l'ensemble des informations dont il dispose, c'est-à-dire de celles qu'il a recueillies en application du I de l'article L. 611-2 dans la rédaction proposée par l'article 4 du projet de loi et du deuxième alinéa de l'article L. 611-6 dans la rédaction issue de l'article 5 du projet de loi. Il en irait de même des conclusions de l'expertise qui aurait été ordonnée par le juge en application de cette dernière disposition.

Le troisième alinéa du texte proposé pour rédiger l'article L. 611-7 introduirait une innovation majeure et attendue en permettant aux créanciers publics de consentir des remises de dettes au cours de la procédure de conciliation .

L'examen de la situation de nombreuses entreprises en difficulté montre que les créances résultant des obligations fiscales ou sociales du débiteur sont souvent les plus importantes dans le passif exigible. En pratique, en effet, le débiteur commence souvent par s'abstenir d'acquitter ses dettes fiscales ou sociales, préférant continuer à régler ses créanciers privés avec qui il est plus directement en contact, au jour le jour, dans le cadre de ses affaires. Cependant, la charge des dettes fiscales ou sociales impayées grossit et peut, en dernier lieu, le conduire à la cessation des paiements pure et simple.

Or, à l'heure actuelle, aucune disposition ne permet aux créanciers publics d'accorder au débiteur des remises de dettes au stade du règlement amiable avec le débiteur.

Certes, il est actuellement possible de consentir au débiteur des délais de paiement pour ses dettes fiscales ou sociales. Le décret n° 97-656 du 30 mai 1997 instituant dans chaque département une commission des chefs des services financiers et des représentants des organismes de sécurité sociale pour l'examen de la situation des créanciers débiteurs retardataires permet ainsi de faire bénéficier le débiteur d'un plan d'apurement échelonné s'appliquant à l'une ou plusieurs de ses dettes. En outre, les créanciers publics parties à ce plan ne peuvent solliciter l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires envers le débiteur qu'après en avoir informé le président de cette commission qui peut décider de suspendre leur action pour un délai de quinze jours, renouvelable une fois 54 ( * ) .

Par ailleurs, la jurisprudence a estimé que le juge pouvait faire usage, même à l'égard des dettes fiscales ou sociales, des possibilités de prorogation des délais offertes par l'article 1844-1 du code civil 55 ( * ) .

Cette situation n'est cependant pas satisfaisante.

En premier lieu, compte tenu de l'importance des dettes fiscales et sociales, il est souhaitable de permettre que certaines d'entre elles puissent être effacées au stade de l'accord amiable. Dans certaines situations, en effet, les remises accordées par les seuls créanciers privés peuvent ne pas suffire à faire sortir le débiteur de ses difficultés tout en maintenant son activité et les emplois qu'elle induit. En second lieu, il n'est pas anormal que les créanciers publics puissent, de façon limitée et mesurée, remettre certaines de leurs créances si une telle mesure peut être de nature à maintenir l'activité de l'entreprise.

Prenant acte de ces remarques, le présent projet de loi autoriserait donc, dans le cadre de la procédure de conciliation, les administrations financières, les organismes de sécurité sociale, les institutions gérant le régime d'assurance chômage prévu par les articles L. 351-3 et suivants du code du travail, ainsi que les institutions régies par le livre IX du code de la sécurité sociale à consentir des remises de dettes au profit du débiteur .

Cette énumération couvrirait l'ensemble des organismes chargés de gérer ou recouvrer les créances de nature fiscale, parafiscale ou sociale détenues sur les entreprises. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, seraient ici notamment visés :

- au titre des « administrations financières » : la direction générale de la comptabilité publique, chargée du recouvrement des impôts locaux et des autres impositions recouvrées par des comptables publics ; l'administration des douanes, chargée des droits de douanes, des accises et de la taxe sur la valeur ajoutée à l'importation ; ainsi que la direction générale des impôts, chargée du recouvrement des autres impôts professionnels (TVA, impôt sur les sociétés, taxe sur les salaires et taxes sur les conventions d'assurance) ;

- au titre des « organismes de sécurité sociale » : l'ensemble des caisses gestionnaires de la sécurité sociale relevant du livre I du code de la sécurité sociale, soit directement, soit par renvoi. Il s'agirait donc des caisses gérant à la fois les régimes de base obligatoires et les régimes complémentaires de retraite rendus obligatoires par la loi. A ce titre, cette référence viserait les divers organismes de recouvrement du régime des salariés, 56 ( * ) du régime des professions indépendantes non agricoles 57 ( * ) , du régime agricole 58 ( * ) et des régimes spéciaux 59 ( * ) ;

- au titre des « institutions gérant le régime d'assurance chômage prévu par les articles L. 351-3 et suivants du code du travail », notamment les associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (ASSEDIC) et l'union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) ;

- au titre des « institutions chargées de la gestion des garanties complémentaires des salarié s » : les institutions de retraite complémentaire des salariés, les institutions de prévoyance et les institutions de gestion de retraite complémentaire. Ces institutions disposant d'une autonomie de gestion administrative et financière par rapport à l'Etat, elles sont ici visées de manière spécifique afin qu'elles soient soumises aux règles de remises prévues par le présent article et trouvent ainsi un fondement juridique exprès leur permettant de les mettre en application.

Ces remises ne pourraient toutefois être accordées que dans les conditions fixées par l'article L. 626-4-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 72 du présent projet de loi. Cette précision implique que, tout comme dans le cadre de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire :

- les créanciers publics ne pourraient accepter des remises de dettes que concomitamment à celles qui seraient accordées par les créanciers privés. Cette exigence est en tous les cas justifiée car il ne conviendrait pas que seuls les créanciers publics, qui gèrent les deniers de la Nation, prennent les mesures destinées à sauver une entreprise si les créanciers privés ne prennent pas des mesures dans le même sens. Elle permettrait en outre d'assurer la compatibilité de ces remises de dettes avec les règles communautaires relatives aux aides d'Etat. En revanche, elle n'impliquerait nullement que les créances remises soient, par leur volume et leur nature, identiques à celles remises par les créanciers privés, chaque créancier demeurant libre de définir la limite de la remise qu'il lui est possible d'octroyer au débiteur ;

- un régime différent s'appliquerait aux sommes dues au titre des impôts directs et au titre des impôts indirects . Ainsi, l'ensemble des impôts directs perçus au profit de l'Etat et des collectivités territoriales ainsi que des produits divers du budget de l'Etat dus par le débiteur pourrait être remis. En revanche, s'agissant des impôts indirects perçus au profit de l'Etat et des collectivités territoriales, seuls les intérêts de retard, majorations, pénalités ou amendes pourraient faire l'objet d'une remise 60 ( * ) .

Le quatrième alinéa du texte proposé instituerait une obligation d'information continue du conciliateur auprès du président du tribunal .

Marquant ainsi le contrôle judiciaire exercé sur le conciliateur lors de l'exercice de sa mission, ce dernier devrait rendre compte de l'état d'avancement de sa mission et formuler toutes observations sur les diligences du débiteur. Cette information pourrait ainsi permettre au juge d'avoir une vue claire de la situation et de l'attitude du débiteur, information qui pourra s'avérer très opportune pour décider de l'ouverture ultérieure, le cas échéant d'office, d'une procédure judiciaire.

Seconde innovation majeure du présent article, le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article L. 611-7 du code de commerce prévoirait la suppression pure et simple du mécanisme de la suspension provisoire des poursuites, suivant en cela la suggestion du rapport de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation 61 ( * ) .

Faisant en quelque sorte double emploi avec la procédure de redressement judiciaire ouverte après la cessation des paiements et peu utilisé dans la pratique, ce dispositif présente en effet plus d'inconvénients que d'avantages dans le cadre de l'élaboration d'un accord amiable. Néanmoins, cette modification de l'état du droit impliquerait que, désormais, aucun obstacle ne pourrait être opposé aux créanciers qui, pendant le déroulement de la conciliation, décideraient d'intenter des actions en justice dans le but d'obtenir un paiement ou d'obtenir la résolution d'un contrat le liant au débiteur pour défaut de paiement.

Cette suppression serait remplacée par la possibilité pour le juge, en cas de poursuite du débiteur par l'un de ses créanciers pendant la procédure de conciliation, « de faire application des articles 1244-1 à 1244-3 du code civil ». Votre commission souligne que l'usage de ces dispositions est déjà prévu par le paragraphe VIII de l'article L. 611-4 du code de commerce dans sa rédaction actuelle. Toutefois, le juge ne peut y recourir qu'une fois l'accord homologué et à l'égard des seuls créanciers qui n'y sont pas parties. Cette disposition serait supprimée par le texte proposé pour insérer l'article L. 611-10 dans le code de commerce.

Inscrit dans le droit général des contrats, l'article 1244-1 du code civil n'est pas spécifique aux procédures collectives. Il permet au juge de :

- reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues par le débiteur à ses créanciers ;

- prescrire , par décision spéciale et motivée, que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

En vertu de l'article 1244-2, l a décision du juge d'octroyer l'une ou l'ensemble de ces mesures a également pour effet de suspendre automatiquement les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le ou les créanciers dont le paiement des créances a fait l'objet des mesures prononcées par le juge 62 ( * ) .

En droit commun, le juge dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour faire application de ces mesures 63 ( * ) . Cette latitude devrait être conservée dans le cadre de la procédure de conciliation, le texte proposé par le présent article précisant seulement que le juge ne pourrait intervenir sur la base de ces dispositions qu'à la demande du débiteur et « après avoir été éclairé par le conciliateur ». Cette formulation devrait impliquer que le conciliateur devrait présenter au président du tribunal un rapport détaillé de la situation, son intervention ne devant pas se limiter à un simple avis limité à l'opportunité de faire application des articles 1244-1 et suivants du code civil.

Il y a cependant lieu de relever que les mesures ordonnées par le juge en vertu des dispositions susvisées n'auront pas une portée absolue . En effet, les créances nées d'un effet de commerce 64 ( * ) , ainsi que les créances salariales 65 ( * ) , ne peuvent être soumises à l'une quelconque de ces mesures. En outre, ces dernières n'ont aucun caractère collectif, car le juge doit statuer à l'occasion de chacune des poursuites intentées par l'un des créanciers.

Le texte proposé initialement disposait enfin que le « juge compétent » pourrait faire application des dispositions susvisées. Cette formulation semblait permettre au débiteur de saisir, le cas échéant, un autre juge que le juge du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance sous le contrôle duquel se déroule la procédure de conciliation. A l'initiative de sa commission des lois, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a utilement consacré la compétence du juge qui a ouvert la procédure pour l'application des délais de paiement prévus par les dispositions précitées du code civil.

Le dernier alinéa du texte proposé par le présent article pour l'article L. 611-7 nouveau du code de commerce définirait l'hypothèse d'une cessation anticipée de la mission du conciliateur .

Le maintien de la procédure de conciliation jusqu'à l'expiration du terme initialement prévu dans la décision de désignation du conciliateur n'est, dans certaines hypothèses, pas justifié. Tel est le cas notamment lorsque le conciliateur constate l'impossibilité de parvenir à un accord amiable entre le débiteur et ses créanciers .

En conséquence, le présent alinéa prévoirait que, dans une telle situation, le conciliateur informe sans délai le président du tribunal de cette impossibilité afin que ce dernier mette fin à sa mission, cette décision étant notifiée au débiteur.

Votre commission vous propose de préciser par amendement que cette décision met également fin à la procédure de conciliation.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 6 ainsi modifié.

Article 7
(art. L. 611-8 à L. 611-10 nouveaux du code de commerce)
Constatation et homologation de l'accord amiable

Cet article a pour objet de définir les conditions de fond permettant l'homologation de l'accord amiable, la procédure applicable ainsi que les effets juridiques du jugement d'homologation . A cet effet, des articles L. 611-8 à L. 611-10 seraient créés dans le code de commerce.

Article L. 611-8 nouveau du code de commerce
Conditions de la constatation ou de l'homologation de l'accord amiable

Le texte proposé pour l'article L. 611-8 nouveau du code de commerce modifierait les conditions de fond permettant de prononcer l'homologation de l'accord amiable .

1. Le droit en vigueur

Les conditions d'homologation de l'accord amiable intervenu entre le débiteur et ses créanciers sont actuellement définies par le paragraphe VIII de l'article L. 611-4 du code de commerce. Cette disposition distingue deux hypothèses :

- lorsque l'accord amiable a été conclu par l'ensemble des créanciers, le président du tribunal est tenu de l'homologuer ;

- lorsque l'accord amiable n'a été conclu que par « les principaux créanciers » du débiteur, le président du tribunal a la faculté de l'homologuer. Il peut en outre décider de faire application à l'égard des créances non incluses dans l'accord des mesures prévues à l'article 1244-1 du code civil.

Il ressort donc de l'état du droit actuel qu' il n'existe pas de condition d'homologation tenant au contenu même de l'accord amiable , le critère retenu par le législateur à l'occasion de la loi précitée du 10 juin 1994 ne s'attachant qu'au nombre des créanciers parties à l'accord . Ce choix avait été critiqué par votre rapporteur dans le cadre des travaux de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation, estimant que « cette disparité de traitement selon que l'accord est passé avec l'ensemble des créanciers ou seulement certains d'entre eux, l'expression maladroite de « principaux créanciers » ne désignant pas ceux dont le montant des créances serait le plus élevé, ne paraît pas justifiée. En effet, le défaut d'unanimité est de nature à rendre l'accord davantage suspect ; aussi cela conduit-il à s'interroger sur la nature et la portée de la procédure d'homologation » 66 ( * ) . Ce régime d'homologation serait opportunément remis en cause par le présent projet de loi.

2. Les modifications apportées par le projet de loi

Le texte proposé pour rédiger l'article L. 611-8 du code de commerce a été profondément modifié par l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement. Il introduirait désormais deux mécanismes juridiques distincts destinés à sécuriser l'accord intervenu au cours de la procédure de conciliation entre le débiteur et ses principaux créanciers.

? Soucieuse d'offrir aux parties à l'accord de conciliation la possibilité de conférer un caractère exécutoire et solennel à leurs engagements réciproques , l'Assemblée nationale a subdivisé le texte proposé pour l'article L. 611-8 en deux paragraphes distincts, dont le premier paragraphe (I) permet au débiteur et à ses créanciers de solliciter du président du tribunal qu'il « constate » l'accord intervenu.

Le président du tribunal devrait être saisi à cet effet par une requête conjointe des parties, ce qui nécessiterait l'accord des créanciers signataires qui renonceraient à bénéficier du régime d'homologation institué par le second paragraphe du présent article.

L'objet de l'intervention du juge serait limité.

En premier lieu, il lui reviendrait seulement de « constater » l'accord intervenu entre les parties. Le président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance n'effectuerait donc qu'un contrôle purement formel sur :

- l'existence d'un accord intervenu entre les parties, sans possibilité d'en examiner le contenu ;

- l'existence d'une déclaration du débiteur certifiant qu'il ne se trouve pas en état de cessation des paiements à la date de la signature de l'accord ou, si la procédure de conciliation a été ouverte après la survenance de celle-ci, que « cette signature y met fin ». Cette déclaration engagerait seulement le débiteur, et toute fausse déclaration serait susceptible d'être sanctionnée sur la base des délits prévus par le code de commerce ou le code pénal.

Votre commission vous propose de préciser, par amendement , que c'est l'accord lui-même et non pas sa signature qui importe pour considérer s'il est mis fin à la cessation des paiements du débiteur .

En second lieu, l'intervention du juge aurait pour conséquence de donner force exécutoire à l'accord amiable . C'est ce caractère qui différencierait l'accord amiable non soumis au juge de l'accord amiable constaté par ce dernier.

En effet, la décision du juge permettra de procéder, le cas échéant, à l'exécution forcée de l'accord dans l'hypothèse où l'une des parties contractantes ne respecterait pas ses obligations contractuelles. Rappelons que, dans le cadre d'un accord non soumis au juge, l'une des parties qui chercherait à faire exécuter par l'un de ses cocontractants les obligations résultant pour lui du contrat devra obtenir, au préalable, une décision de justice constatant l'inexécution et condamnant le cocontractant défaillant à exécuter en nature ou par équivalent la prestation contractuelle. En ce sens, la procédure de « constatation » de l'accord devant le président du tribunal présenterait une plus grande sécurité juridique pour les parties contractantes.

La constatation de l'accord aurait pour autre conséquence de mettre fin, de manière automatique, à la procédure de conciliation.

Différence majeure avec la procédure d'homologation au sens strict, le jugement constatant l'accord intervenu entre le débiteur et ses créanciers ne ferait pas l'objet de mesures de publication, afin de garantir sa confidentialité .

En tout état de cause, l'acte par lequel le président du tribunal donnerait acte de l'accord intervenu ne serait pas susceptible de recours.

? Le second paragraphe (II) de cet article reprendrait, pour l'essentiel, les dispositions qui figuraient initialement dans le projet de loi, en instituant une procédure d'homologation par le tribunal, destinée à produire des effets juridiques sur les tiers .

A la différence de la procédure prévue par le I de cet article, l'homologation de l'accord par le tribunal ne pourrait intervenir qu'à la demande du débiteur , compte tenu de la publicité attachée à cette procédure.

La décision d'homologation , qui ressortit aujourd'hui à la compétence du seul président du tribunal, serait dorénavant prise par le tribunal dans son ensemble . Ainsi, ce serait désormais un organe collégial -formation du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance-, qui statuerait sur l'homologation de l'accord au moyen d'un jugement rendu contradictoirement, et non plus par le biais d'une ordonnance.

Trois conditions cumulatives de fond, ne tenant pas au nombre de créanciers parties à l'accord amiable, seraient désormais imposées pour permettre l'homologation de la convention :

- l'accord obtenu devrait empêcher la cessation des paiements du débiteur ou, si la procédure a été ouverte dans les quarante-cinq jours suivant cet événement, mettre un terme à cette situation. la nouvelle architecture des procédures de traitement des difficultés des entreprises prévue par le présent projet de loi justifie pleinement cette exigence.

En effet, la procédure de conciliation est une procédure de prévention visant à éviter la panne de trésorerie que constitue la cessation des paiements ou, à tout le moins, que cette situation se pérennise pendant plus de quarante-cinq jours. A défaut, il faut renforcer les actions de sauvetage de l'entreprise et ouvrir des procédures de traitement des difficultés telles que le redressement ou la liquidation judiciaires. L'accord amiable qui ne satisferait pas à cette condition de fond serait, au mieux illusoire, au pire inutile, puisqu'il ne permettrait aucunement au débiteur de sortir des difficultés qu'il rencontre ;

- les termes de l'accord devraient être de nature à assurer la pérennité de l'entreprise. Cette condition paraît naturelle, dans la mesure où l'objectif assigné aux procédures de prévention et de traitement des entreprises reste de permettre à celles qui connaissent des difficultés de poursuivre leur activité économique.

Les termes retenus par le projet de loi confèreraient au juge un important pouvoir d'appréciation dont il ne dispose pas, dans cette ampleur, à l'heure actuelle. Il devra en effet analyser si les mesures prévues dans l'accord seront suffisantes pour résoudre les difficultés rencontrées et maintenir l'activité de l'entreprise. A cet effet, le tribunal disposera de l'ensemble des informations sur la situation du débiteur qu'il aura lui-même obtenues sur la base des dispositions des articles L. 611-2 et L. 611-6 dans leur rédaction proposée par le présent projet de loi, ainsi que de celles qu'il se sera fait communiquer, le cas échéant, par le conciliateur. L'expérience de chef d'entreprise des juges consulaires devrait, être de nature à les aider dans cette appréciation ;

- l'accord ne devrait pas « porter atteinte » aux intérêts des créanciers non signataires . Cette exigence s'entendrait indépendamment des mesures de report ou d'échelonnement des dettes, ainsi que des réductions d'intérêt qui auraient pu être accordés, au cours de la procédure de conciliation, par le président du tribunal sur le fondement des articles 1244-1 et suivants du code civil.

La procédure de conciliation n'est pas une procédure « collective » au sens strict, puisqu'elle n'impose pas une discipline générale et unique pour tous les créanciers. Certains peuvent s'engager par voie d'accord amiable avec le débiteur, tandis que d'autres sont tout aussi fondés juridiquement à ne pas traiter contractuellement avec celui-ci. Tant que l'accord n'a pas été homologué, il n'a, en vertu du droit commun des obligations, qu'un effet relatif et, de ce fait, reste inopposable aux tiers. Mais la situation change du fait de l'homologation qui rend alors l'accord opposable à tous les créanciers.

La dernière condition exigée tenterait donc de ménager la situation des créanciers non signataires afin que ceux-ci ne voient pas leur situation totalement dégradée par la signature d'un accord qui aurait pour effet pratique de rendre impossible tout règlement de leurs créances . On doit néanmoins relever que, en vertu du texte proposé pour l'article L. 611-10, un recours en tierce-opposition pourrait être exercé, permettant aux créanciers de contester un accord qui leur serait préjudiciable .

L'examen du respect de cette condition par le tribunal devrait emporter, pour ce dernier, une nouvelle et importante marge d'appréciation. Il devra en effet déterminer, au cas par cas, si les intérêts des créanciers non signataires ne sont pas sacrifiés par l'accord, notamment en examinant si les garanties éventuellement prises par les signataires de l'accord ne sont pas disproportionnées par rapport aux efforts qu'ils auraient consentis, ce qui pourrait être de nature à priver certains créanciers non signataires de leurs sûretés.

Dans l'hypothèse où le tribunal estimerait ces conditions remplies, il aurait alors compétence liée pour homologuer l'accord.

Article L. 611-9 nouveau du code de commerce
Procédure d'homologation

Le texte proposé pour insérer un article L. 611-9 au sein du code de commerce définirait la procédure au terme de laquelle le tribunal de commerce ou le tribunal de grande instance statuerait sur l'homologation .

A l'heure actuelle, l'homologation de l'accord ressortit à la compétence du président du tribunal et fait l'objet d'une publicité limitée, de nature à garantir sa confidentialité. En pratique, l'homologation intervient dans le cabinet du président, en la seule présence du débiteur et des créanciers parties à l'accord.

Le transfert au tribunal de la compétence pour homologuer l'accord prévu par le texte proposé pour l'article L. 611-8 emporte par ailleurs un accroissement de la publicité de cette procédure . En effet, le texte proposé prévoit que le tribunal ne pourrait statuer sur l'homologation qu'après avoir entendu, ou dûment appelé :

- le débiteur ;

- les créanciers parties à l'accord ;

- le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel . Cette participation traduit la volonté de mieux associer les représentants du personnel à l'ensemble des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises , les représentants des salariés étant jusqu'ici absents de la procédure de règlement amiable . Rappelons que la représentation des salariés est organisée, dans les entreprises de 11 à 49 salariés, par des délégués du personnel et, dans les entreprises de 50 salariés et plus, par la constitution d'un comité d'entreprise doté de la personnalité morale ;

- le conciliateur ;

- le ministère public . Cette intervention du ministère public marque à nouveau un renforcement de la présence du ministère public qui, déjà informé -en application de l'article L. 611-6 du code de commerce dans sa rédaction proposée par l'article 5 du présent projet de loi- de l'ouverture de la procédure de conciliation, pourrait ainsi faire connaître au tribunal son avis sur le contenu de l'accord amiable.

Le texte prévoit, en outre, que le tribunal pourrait, à sa discrétion, décider d' entendre « toute autre personne » dont l'audition lui paraîtrait utile. Cette faculté pourrait permettre au tribunal d'entendre, le cas échéant, les créanciers non parties à l'accord qui pourraient invoquer une atteinte à leurs intérêts, l'expert désigné par le tribunal en application du texte proposé pour l'article L. 611-6 ou les salariés eux-mêmes en l'absence d'une institution représentative du personnel.

Néanmoins, pour préserver une certaine confidentialité au contenu de l'accord soumis à l'homologation du tribunal, les personnes susmentionnées seraient entendues en chambre du conseil , à l'instar de ce qui se pratique déjà dans le cadre des procédures de redressement et de liquidation judiciaires.

Une disposition spécifique intéresserait le cas où l'homologation concernerait un accord conclu entre un débiteur exerçant une profession indépendante et ses créanciers. En ce cas, le second alinéa du texte proposé pour l'article L. 611-10 préciserait que l'ordre professionnel ou l'autorité dont relève le débiteur serait également entendu par le tribunal. A l'initiative de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a modifié cette disposition afin de réserver le cas où le débiteur, bien qu'appartenant à une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire, ou dont le titre est protégé, n'est pas soumis au pouvoir disciplinaire d'un ordre ou d'une autorité.

Afin d'éviter tout risque de blocage au cas où l'ordre ou l'autorité professionnelle devrait intervenir à ce stade de la procédure, votre commission vous propose de prévoir, par un amendement de réécriture globale du texte proposé pour l'article L. 611-9, que ces organes sont entendus ou, à défaut, « dûment appelés » par le tribunal lorsqu'il doit statuer sur l'homologation de l'accord et que leur audition a lieu en même temps que les autres personnes appelées en chambre du conseil .

Article L. 611-10 nouveau du code de commerce
Publicité du jugement d'homologation - Effets juridiques

Le texte proposé pour insérer un article L. 611-10 dans le code de commerce déterminerait les conditions de publicité du jugement et les effets juridiques liés à l'homologation de l'accord amiable par le tribunal dans son ensemble. A l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a entièrement réécrit cette disposition.

Le premier alinéa de l'article L. 611-10 préciserait que l'homologation met fin à la procédure de conciliation .

Son deuxième alinéa préciserait les conditions de publicité du jugement d'homologation et de l'accord .

L'accord homologué serait transmis au commissaire aux comptes du débiteur, si ce dernier est soumis au contrôle légal de ses comptes. Rappelons que l'obligation du commissariat aux comptes s'impose tant aux sociétés commerciales 67 ( * ) et groupements d'intérêt économique 68 ( * ) qu'aux associations 69 ( * ) et aux entreprises publiques 70 ( * ) et varie en fonction de seuils de chiffre d'affaires, de bilan et d'effectifs différents pour chaque entité. Cette transmission s'inscrirait dans le renforcement du rôle du commissaire aux comptes dans la vie des entreprises, engagé par la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière.

Seul le jugement homologuant l'accord ferait l'objet d'une mesure de publicité.

Celle-ci s'effectuerait, tout d'abord, par son dépôt au greffe du tribunal de commerce ou du tribunal d'instance ayant prononcé le jugement, où tout intéressé pourrait en prendre connaissance. La seule obligation de dépôt au greffe n'aurait pas signifié qu'il aurait pu être communiqué à tout intéressé, ce dépôt pouvant ne revêtir qu'une fin conservatoire. En outre, le jugement ferait l'objet d'une mesure de publicité spécifique . Selon les informations recueillies par votre rapporteur, il devrait s'agir d'une publication dans un journal d'annonces légales.

L'accord lui-même ne ferait l'objet d'aucun dépôt et d'aucune mesure de publicité, de sorte que son contenu ne serait pas dévoilé aux tiers.

La publicité qui serait ainsi donnée au jugement d'homologation est nouvelle , le paragraphe VIII de l'article L. 611-4 prévoyant actuellement son seul dépôt au greffe de la juridiction et l'article 39 du décret n° 84-148 du 1 er mars 1985 disposant quant à lui que l'accord ne peut être communiqué qu'aux parties . Elle est toutefois justifiée dans la mesure où l'article 10 du présent projet de loi prévoit d'instituer, à l'article L. 611-11 nouveau du code de commerce, un privilège de paiement au profit des créanciers ayant consenti une avance ou un crédit dans le cadre de l'accord homologué. Or, la création de cette priorité implique nécessairement une mesure de publicité à l'égard des tiers qui doivent être informés des conditions dans lesquelles l'actif du débiteur sera, le cas échéant, réalisé pour assurer le paiement de ses créanciers.

En outre, le jugement homologuant l'accord serait susceptible d'un recours en tierce-opposition, ce qui constitue une autre nouveauté du texte . Prévu par l'article 582 du nouveau code de procédure civile, ce recours est ouvert aux tiers qui s'estiment lésés ou menacés d'un préjudice par l'effet d'un jugement auquel ils sont restés étrangers 71 ( * ) . En principe, toute décision judiciaire peut faire l'objet d'un tel recours, sauf si la loi en dispose autrement 72 ( * ) .

Juridiquement, cette précision ne s'imposait donc pas a priori , mais le projet de loi a choisi de la mettre en exergue, l'Assemblée nationale ayant, bien qu'il s'agisse d'une précision à caractère réglementaire par nature, souhaité limiter à dix jours à compter de la mesure de publicité dont fait l'objet le jugement d'homologation le délai de recours en tierce-opposition. Ce délai devrait être de nature à limiter la durée de l'insécurité juridique dont ferait l'objet l'accord homologué.

A l'inverse du jugement homologuant l'accord, le jugement refusant l'homologation ne ferait l'objet , selon le texte, d'aucune publication. Ce choix découle de la volonté de ne pas accentuer la perte de crédit du débiteur. En effet, si l'échec de la conciliation devait être connu, la situation du débiteur à l'égard des tiers, et notamment de ses clients, pourrait être encore aggravée.

Le texte proposé préciserait, en outre, que ce jugement de rejet pourrait faire l'objet d'un appel . Ainsi, les parties à l'accord amiable, qu'il s'agisse du débiteur ou de ses créanciers, pourraient obtenir du juge d'appel qu'il reconsidère la position des premiers juges. Cette possibilité permettrait notamment au juge d'appel d'exercer un contrôle sur l'appréciation faite par le tribunal de commerce ou le tribunal de grande instance sur le respect des trois conditions de fond définies à l'article L. 611-8 du code de commerce, dans la rédaction proposée par l'article 7 du projet de loi.

Les deuxième et troisième alinéas du texte proposé pour rédiger l'article L. 611-10 du code de commerce détermineraient les effets juridiques attachés à l'homologation de l'accord. Ces effets seraient au nombre de quatre.

En premier lieu, l'accord homologué suspendrait toute action en justice ou poursuite individuelle exercée sur les meubles ou immeubles du débiteur dans le but d'obtenir le paiement des créances qui en font l'objet. Cette première conséquence juridique serait la reprise de l'actuel paragraphe IX de l'article L. 611-4 du code de commerce. Elle impliquerait que les créanciers qui ont accepté de conclure un accord voient paralyser leurs droits d'actions en justice tendant à obtenir le paiement des sommes dues par le débiteur et couvertes par l'accord. Cette mesure s'appliquerait en particulier aux mesures de saisies qui pourraient être exercées.

Cette précision a surtout pour conséquence d'interdire aux cautions d'agir contre le débiteur, cette disposition spéciale faisant ainsi échec à l'article 2039 du code civil qui prévoit que la prorogation du terme d'une créance n'est pas opposable à la caution qui peut poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement 73 ( * ) . Il convient donc de noter qu' a contrario , la caution pourrait exercer un recours contre le débiteur en application de l'article 2039 du code civil si l'accord a simplement été « constaté » par le président du tribunal en application du I de l'article L. 611-8 dans sa rédaction issue de l'article 7 du projet de loi.

Par souci de précision, l'Assemblée nationale a entendu expressément limiter le bénéfice de cette suspension à la durée d'exécution de l'accord homologué .

En deuxième lieu, l'homologation aurait pour conséquence de suspendre les délais impartis aux créanciers à peine de déchéance ou de résolution de leurs droits à l'encontre du débiteur. Cette mesure est déjà prévue par le paragraphe IX de l'actuel article L. 611-4 du code de commerce. Elle est la contrepartie de la paralysie des poursuites susmentionnée. En effet, il convient de préserver les droits des créanciers d'une éventuelle inexécution de l'accord ; c'est pourquoi le texte prévoit une suspension des délais dans lesquels leurs actions doivent nécessairement être exercées, l'Assemblée nationale ayant opportunément précisé que cette suspension ne jouerait qu'à l'égard des créanciers parties à l'accord .

En troisième lieu, s'inspirant du dispositif prévu par l'article L. 626-8 du code de commerce dans la rédaction proposée par l'article 77 du présent projet de loi, l'Assemblée nationale a souhaité permettre aux personnes physiques coobligées ou ayant consenti une caution personnelle ou une garantie autonome de se prévaloir des dispositions de l'accord homologué .

Cette nouvelle disposition s'inspire d'une solution récemment dégagée par la chambre commerciale de la Cour de cassation, laquelle a jugé qu'une personne morale ayant souscrit un engagement de caution en faveur du débiteur pouvait se prévaloir des dispositions d'un accord amiable homologué 74 ( * ) , cette jurisprudence pouvant s'expliquer par l'application pure et simple des articles 1287 et 2013 du code civil 75 ( * ) . Toutefois, elle s'en distinguerait par deux éléments :

- d'une part, elle serait étendue aux engagements autonomes qui, en principe, sont indépendants par rapport à l'engagement du débiteur de l'obligation principale ;

- d'autre part, elle ne profiterait qu'aux personnes physiques , à l'exception des personnes morales.

Votre commission craint que la mesure proposée puisse, par un raisonnement a contrario , conduire à renverser la jurisprudence permettant aux personnes morales ayant souscrit un engagement de caution de se prévaloir également des remises et délais consentis par le débiteur principal , alors que la distinction entre personnes physiques et morales n'apparaîtrait pas justifiée. En outre, l'accord demeurant avant tout un engagement contractuel, elle estime qu'il est inopportun de paralyser également le jeu des garanties autonomes.

Aussi vous propose-t-elle un amendement tendant à revenir à la rédaction initiale du projet de loi sur ce point . Le droit commun des sûretés trouveraient donc à s'appliquer.

En dernier lieu, à la suite d'un sous-amendement présenté par M. Arnaud Montebourg, adopté par l'Assemblée nationale contre l'avis de sa commission des lois mais avec l'avis favorable du Gouvernement, l'homologation de l'accord entraînerait la levée de plein droit de toute interdiction d'émettre des chèques prononcée à l'encontre du débiteur résultant du rejet, avant l'ouverture de la procédure de conciliation, d'un chèque pour défaut de provision.

Aux termes de l'article L. 131-73 du code monétaire et financier, le tireur d'un chèque sans provision est en effet privé de la possibilité d'émettre de nouveaux chèques, à moins qu'il ne justifie avoir, par la suite, d'une part, constitué une provision suffisante ou payé le montant du chèque rejeté lors de sa présentation et, d'autre part, réglé une pénalité libératoire. A défaut d'une telle régularisation, cette interdiction court pour une durée de cinq années à compter de la date à laquelle le tiré enjoint au tireur de ne plus émettre de chèques et de remettre ses formules 76 ( * ) . La violation de cette interdiction est punie d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 375.000 euros 77 ( * ) .

Rappelons que, dans le texte initial du projet de loi, le tribunal pouvait décider, de façon discrétionnaire, la suspension d'une interdiction d'émettre des chèques prononcée à l'encontre du débiteur. Le nouveau dispositif devrait permettre d'éviter que les moyens de financement de l'entreprise ne soient entravés à un moment où il est vital qu'elle puisse continuer son activité dans des conditions optimales.

Notons, en outre, que les effets juridiques de l'accord homologué devraient être renforcés par l'impossibilité, prévue par l'article 21 du présent projet de loi, de faire reporter, sauf fraude, la cessation des paiements à une date antérieure à la décision d'homologation.

Le dernier alinéa du texte proposé déterminerait les sanctions applicables en cas d'inexécution des engagements résultant de l'accord homologué , en reprenant intégralement les dispositions figurant actuellement au paragraphe X de l'article L. 611-4 du code de commerce.

Face à l'inexécution de l'accord homologué, le tribunal ayant statué devrait en prononcer la résolution , c'est-à-dire le priver d'effet juridique tant pour le passé que pour l'avenir. Ainsi, les avances ou les délais de paiement qui auraient été consentis par les créanciers parties à l'accord seraient rétroactivement remis en cause et ils recouvreraient leurs droits d'action sur le patrimoine du débiteur.

Le tribunal ne pourrait ainsi statuer qu'après avoir été saisi à cette fin par l'une des parties à l'accord homologué.

Le débiteur serait également déchu de tout délai de paiement qui aurait pu lui être accordé, notamment en application de l'article 1244-1 du code civil.

On peut en outre souligner que le défaut d'exécution d'un engagement financier prévu par l'accord homologué ne devrait plus conduire à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, à titre de sanction. Les dispositions actuelles de l'article L. 621-3 du code de commerce seraient en effet abrogées par le présent projet de loi, en vertu de la table de concordance visée à l'article premier (tableau I) .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 7 ainsi modifié .

Article 8
(art. L. 611-11 nouveau du code de commerce)
Privilège de paiement pour les créanciers ayant consenti au débiteur
un nouvel apport de crédit ou fourni un nouveau bien ou service
- Limitation de la responsabilité pour soutien abusif

Cet article, entièrement réécrit par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des lois avec l'avis favorable du Gouvernement, tend à instituer un privilège pour les créanciers qui auraient consenti un crédit ou une avance au débiteur dans le cadre de l'accord amiable. A cet effet, il insèrerait un article L. 611-11 nouveau dans le code de commerce. En revanche, le dispositif initialement prévu, destiné à limiter les causes de mise en jeu de la responsabilité pour soutien abusif, a été supprimé par l'Assemblée nationale , au profit d'un dispositif nouveau, plus large, figurant à l'article 142 bis du présent projet de loi.

Actuellement, le régime du règlement amiable ne comporte pas d'incitation réelle pour les créanciers à participer au redressement de l'entreprise qui connaît des difficultés. En effet, si une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire s'ouvre après l'échec du règlement amiable, les créanciers ayant accepté de renoncer à certaines de leurs créances ou consenti au débiteur des liquidités nouvelles -ce que la pratique qualifie d'« argent frais » 78 ( * ) - ne bénéficient d'aucun traitement privilégié par rapport aux créanciers qui se sont abstenus d'apporter toute aide au stade amiable.

Le texte proposé pour rédiger l'article L. 611-11 du code de commerce a donc pour but d'inciter les créanciers à participer dès la procédure de conciliation à des mesures permettant de restaurer la situation économique et financière du débiteur. A cette fin, il prévoit d'instituer une priorité de paiement.

1. La création d'un privilège de paiement pour les nouveaux apports en trésorerie consentis et la fourniture de nouveaux biens ou services

Dans sa rédaction initiale, le premier alinéa du texte proposé par le présent article pour l'article L. 611-7 du code de commerce prévoyait le paiement « par privilège à toutes créances nées avant l'ouverture de la conciliation » du montant des « crédit et avance » consentis par les créanciers dans le cadre de l'accord amiable. Rappelons que l'opération de crédit est l'acte par lequel le créancier met à la disposition du débiteur une somme d'argent ou prend, au bénéfice du débiteur, un engagement tel qu'un cautionnement, un aval ou une garantie. L'avance s'analyse comme un paiement partiel effectué préalablement à l'exécution, même fragmentaire, d'une prestation convenue à l'avance.

Le privilège institué par cet article ne tendait donc à couvrir que ces deux types d'actes, à l'exception notamment de simples rééchelonnements de dettes du débiteur, le but recherché par le Gouvernement étant, à juste titre, de récompenser les créanciers qui, dans le cadre de la conciliation, apportent au débiteur « l'argent frais » qui lui est nécessaire pour surmonter ses difficultés.

A l'initiative de sa commission des lois et de son rapporteur, M. Xavier de Roux, l'Assemblée nationale a, avec l'avis favorable du Gouvernement :

- d'une part, limité le champ d'application du privilège créé par cet article aux seuls nouveaux « apports de trésorerie » consentis par les créanciers participant à l'accord de conciliation homologué par le tribunal, afin d'éviter que ce privilège puisse être appliqué à une simple promesse de mise à disposition de fonds ou à une garantie ;

- d'autre part, étendu son champ d'application au prix des nouveaux biens et services qui seraient fournis par les créanciers en application d'un accord homologué par le tribunal.

Le texte proposé instituerait un « privilège » et non une simple « priorité » de paiement. Ce choix terminologique tendrait à tirer les conséquences de la jurisprudence de la Cour de cassation, laquelle a jugé que, dans la mesure où l'article L. 621-32 du code de commerce définissait un ordre des priorités de paiement et non un ordre de privilèges, 79 ( * ) cet ordre ne pouvait être invoqué par les créanciers que dans le cadre de la procédure collective à laquelle il s'applique et ne pouvait donc l'être dans une procédure distincte, même subséquente. 80 ( * ) Dès lors, il serait désormais possible au créancier titulaire du privilège visé par la présente disposition de s'en prévaloir dans le cadre d'une autre procédure que celle au cours de laquelle il l'a acquis .

Il convient de souligner que pourraient seuls bénéficier du privilège susvisé les créanciers parties à un accord homologué dans les conditions qui seraient prévues par le II de l'article L. 611-8 dans sa rédaction issue de l'article 7 du présent projet de loi. Les créanciers qui auraient accepté de ne soumettre au juge l'accord intervenu avec le créancier que pour donner à ce dernier une force exécutoire n'auraient pas accès à ce dispositif. On peut donc penser qu'en pratique les créanciers inciteront fortement le débiteur à accepter de solliciter du tribunal l'homologation de l'accord.

Encore faut-il, selon le texte proposé, que l'octroi de ces liquidités ou de ces biens et services intervienne « en vue d'assurer la poursuite de l'activité de l'entreprise et sa pérennité ». Cette exigence s'explique par le souci des rédacteurs du projet de loi que les nouveaux financements soient affectés au maintien de l'activité et à la pérennité de l'entreprise, et ne servent pas d'autre but. Il appartiendra donc au juge de s'assurer, lors du paiement des créanciers et si des conflits surviennent, que les fonds nouveaux auront bien fait l'objet d'une telle affectation. Pour garantir l'existence de ce privilège, votre commission estime qu'il pourrait être utile que l'accord amiable prévoit expressément l'affectation des sommes versées par les « apporteurs d'argent frais ».

Ce nouveau privilège permettrait à son titulaire de voir sa nouvelle créance réglée avant toutes les autres créances nées avant l'ouverture de la conciliation. La solution s'inspirerait ainsi de celle qui est actuellement prévue -et conservée par le présent projet de loi- à l'égard des créanciers postérieurs au jugement d'ouverture qui bénéficient d'une priorité de paiement par rapport à la plupart des créanciers antérieurs.

En tout état de cause, l'exercice de ce privilège par son titulaire ne pourra s'effectuer que dans les conditions prévues aux articles L. 622-15 et L. 641-13 du code de commerce dans leur rédaction proposée par les articles 34 et 120 du présent projet de loi.

Rappelons que ces dispositions déterminent l'ordre de paiement des créanciers selon la nature des créances qu'ils détiennent sur le patrimoine du débiteur, et en fonction de la procédure judiciaire ouverte. Or, ces dispositions modifieraient la hiérarchie des créances afin d'assurer le paiement des créances bénéficiant du privilège prévu par l'article L. 611-11 dans sa nouvelle rédaction, par priorité aux créances postérieures au jugement d'ouverture, si ces dernières n'ont pas été réglées à l'échéance .

La position des créanciers ayant consenti au débiteur des avances ou des crédits dans le cadre de la procédure de conciliation serait donc particulièrement favorable, puisque leurs créances ne seraient primées que par les créances bénéficiant du super-privilège des salaires et les frais de justice, tant dans le cadre de la procédure de sauvegarde ou de redressement 81 ( * ) qu'au cours de la procédure de liquidation judiciaire 82 ( * ) .

A l'invitation du rapporteur de sa commission des lois et de M. Arnaud Montebourg, l'Assemblée nationale a également souhaité, avec l'avis favorable du Gouvernement, préciser que les créanciers signataires de l'accord homologué ne pourraient en aucune façon bénéficier directement ou indirectement du privilège ainsi institué pour les concours antérieurs à l'ouverture de la procédure de conciliation. Cette précision n'était sans doute pas nécessaire dans la mesure où le privilège ne saurait s'appliquer qu'à des apports nouveaux, ce caractère s'appréciant au jour de la conclusion de l'accord amiable.

Votre commission vous soumet un amendement afin de mettre en exergue que ce privilège ne peut en fait profiter aux créanciers visés par cette disposition qu'en cas d'ouverture d'une procédure collective consécutive à l'échec du règlement des difficultés de l'entreprise dans le cadre de l'accord amiable homologué.

Par un autre amendement , elle vous propose de préciser la rédaction de cet article en prévoyant que les créances bénéficiant du privilège de « l'argent frais » seraient payées selon le rang prévu par le II de l'article L. 622-15 et le II de l'article L. 641-13 du code de commerce . En effet, il ne s'agit pas de soumettre ces créances à la règle du paiement à l'échéance mais de leur faire bénéficier d'un rang privilégié par rapport aux autres créances antérieures, rang moins important que celui qui serait notamment octroyé aux créances par le super-privilège des salariés.

2. La limitation de la mise en jeu de la responsabilité pour soutien abusif

Dans sa rédaction initiale, le présent article prévoyait de faire figurer un second alinéa au texte proposé pour rédiger l'article L. 611-11 du code de commerce afin de limiter la mise en jeu de la responsabilité pour soutien abusif à l'égard des créanciers ayant consenti des avances ou des crédits à l'occasion de l'accord amiable . Cette mesure était destinée à protéger, en particulier, les établissements de crédit -que les auteurs du projet de loi souhaitent voir apporter de l'« argent frais » au débiteur- contre les actions en responsabilité civile qui pourraient être engagées, soit par le débiteur lui-même, soit par ses autres créanciers.

En effet, la responsabilité d'une banque peut être engagée, dans les conditions du droit commun, si cette dernière octroie un nouveau crédit ou maintient un crédit existant à une entreprise « dont la situation est irrémédiablement compromise » 83 ( * ) , cette notion se distinguant de la simple cessation des paiements et impliquant l'absence de toute possibilité raisonnable de redressement. Cette solution jurisprudentielle a d'ailleurs récemment été étendue à des organismes de recouvrement des cotisations sociales 84 ( * ) . Par un concours financier trop prolongé, l'établissement de crédit peut effectivement contribuer à maintenir de manière artificielle l'activité déficitaire du débiteur, causant ainsi un préjudice tant au débiteur qu'à ses créanciers.

Afin d'éviter que les personnes susceptibles d'aider financièrement l'entreprise, mais soucieuses de prévenir toute action contentieuse, s'abstiennent de lui apporter un concours financier alors que sa situation financière pourrait malgré tout être redressée, le texte proposait de limiter la responsabilité à deux hypothèses : la fraude ou le comportement manifestement abusif. Cette limitation ne devait s'appliquer qu' au cas où les concours auraient été consentis au débiteur dans le cadre d'un accord homologué . A contrario , l'action en responsabilité pouvait être exercée dans les conditions du droit commun lorsque le concours aura été apporté dans un accord n'ayant pas fait l'objet d'une homologation.

Ce dispositif a été supprimé par l'Assemblée nationale , à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, au profit de l'insertion d'un nouveau dispositif ayant un objet similaire mais plus circonscrit, inscrit à l'article 142 bis du présent projet de loi, dont le champ d'application couvrirait l'ensemble des procédures du livre VI du code de commerce . Ce régime de responsabilité serait en conséquence désormais défini en tête du titre V de ce livre, relatif aux « responsabilités et aux sanctions » 85 ( * ) .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 8 ainsi modifié.

Article 9
(art. L. 611-12 nouveau du code de commerce)
Effet de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires sur l'accord homologué

Cet article, modifié par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des lois avec l'avis favorable du Gouvernement, a pour objet de déterminer les effets de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire sur l'accord homologué par le tribunal en application du II de l'article L. 611-8 nouveau du code de commerce. A cet effet, un article L. 611-12 serait créé dans le code de commerce.

Le texte proposé pour rédiger l'article L. 611-12 prévoit que l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire mettrait fin à l'accord homologué en application du II de l'article L. 611-8 du code de commerce, dans la rédaction proposée par l'article 7 du présent projet de loi.

Cette solution semble logique dans la mesure où l'ouverture d'une procédure judiciaire postérieurement à l'homologation d'un accord obtenu dans le cadre de la procédure de conciliation marque l'échec des mesures amiables destinées à résoudre les difficultés de l'entreprise.

Elle présuppose en effet que le débiteur, qui a pu échapper à la cessation des paiements ou a pu mettre fin à cette situation grâce à l'accord homologué, connaît de nouvelles difficultés qui, soit sont de nature à le conduire à la cessation des paiements, soit l'ont déjà conduit à une telle situation . En effet, il convient de rappeler que la procédure de sauvegarde ne peut être ouverte, en vertu du texte proposé par l'article 12 du présent projet de loi pour rédiger l'article L. 620-1 du code de commerce, que si le débiteur « justifie de difficultés susceptibles de le conduire à la cessation des paiements ». Les procédures de redressement et de liquidation judiciaires qui seraient désormais organisées par les articles L. 631-1 et L. 640-1 du code de commerce, ne peuvent, quant à elles, être ouvertes qu'en cas de cessation des paiements avérée.

La formulation retenue par le présent article semblerait impliquer qu'il serait mis un terme à l'exécution de l'accord amiable par le seul effet du prononcé du jugement décidant l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation. Toutefois, afin de lever toute ambiguïté et d'éviter que le juge ouvrant une procédure judiciaire de traitement des difficultés n'ait à prononcer formellement la fin de l'accord, votre commission vous propose de préciser par amendement que l'ouverture d'une procédure collective met fin, de plein droit, à l'accord amiable homologué.

Par ailleurs, cette interruption ne serait applicable, dans la rédaction actuelle du texte, qu'à l'égard d'un accord homologué par le tribunal, et non à l'égard d'un accord qui aurait été constaté par le président du tribunal et auquel ce dernier aurait conféré force exécutoire, ainsi que le prévoirait le I de l'article L. 611-8.

Sans doute, pour ce dernier, l'ouverture d'une procédure produirait-elle la même conséquence que sur les autres contrats du débiteur : il deviendrait sans effet compte tenu de la règle de la suspension des poursuites. Toutefois, votre commission estime que, pour des raisons de sécurité juridique et afin d'éviter tout risque de contentieux, il conviendrait de prévoir également l'application de la présente disposition aux accords simplement constatés par le tribunal. Elle vous propose donc d'apporter cette précision dans son amendement.

La rédaction retenue ferait apparaître que la fin de cet accord s'apparenterait, dans son principe, à une résiliation qui aurait cependant des effets rétroactifs à l'égard des seuls créanciers.

La fin de l'accord amiable aurait en effet pour conséquence de faire recouvrer aux créanciers l'intégralité de leurs créances et sûretés . En d'autres termes, l'ouverture d'une procédure judiciaire de traitement des difficultés des entreprises mettrait fin à son exécution tant par le débiteur que par ces créanciers.

Contrairement à la situation prévue par le texte proposé par l'article 7 pour rédiger l'article L. 611-10 du code de commerce, il serait donc mis fin seulement pour l'avenir aux engagements synallagmatiques des parties à l'accord. C'est pourquoi le texte prévoit que les créanciers recouvreront leurs créances et sûretés « déduction faite des sommes perçues » en application de l'accord amiable.

Ce recouvrement se ferait néanmoins « sans préjudice des dispositions prévues à l'article L. 611-11 », ce qui implique que les créanciers qui, dans le cadre de l'accord homologué, auraient consenti un nouvel apport de trésorerie ou auraient fourni un bien ou un service au débiteur afin d'assurer la poursuite de l'activité de l'entreprise et sa pérennité et qui, de ce fait, auraient acquis un privilège de paiement, pourraient alors faire valoir ce dernier, dans l'hypothèse où ils ne pourraient obtenir le recouvrement de leurs créances . Ils seraient alors réglés par priorité à toutes les autres créances nées avant l'ouverture de la conciliation et ce, dans les conditions prévues aux articles L. 622-15 et L. 641-13 du code de commerce dans leur rédaction issue du présent projet de loi consacrés respectivement au redressement et à la liquidation judiciaires.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 9 ainsi modifié.

Article 10
(art. L. 611-13 à L. 611-16 nouveaux du code de commerce)
Statut du mandataire ad hoc et du conciliateur -
Obligation de confidentialité

Cet article, modifié par l'Assemblée nationale, a pour objet de conférer un statut juridique aux mandataires ad hoc et conciliateurs, en définissant notamment un régime d'incompatibilités et en déterminant les conditions de leur rémunération. Il tend également à soumettre l'ensemble des intervenants aux procédures du mandat ad hoc et de conciliation à une obligation de confidentialité . A cet effet, quatre nouveaux articles, numérotés L. 611-13 à L. 611-16 seraient insérés au sein du code de commerce.

Article L. 611-13 nouveau du code de commerce
Régime d'incompatibilités applicable au mandataire ad hoc et au conciliateur

Le texte proposé pour rédiger l'article L. 611-13 du code de commerce instituerait un dispositif d'incompatibilités applicable au mandataire ad hoc et au conciliateur. Il convient en effet d' assurer l'indépendance des personnes chargées d'aider le débiteur et ses créanciers à parvenir à un accord destiné à mettre fin aux difficultés de l'entreprise.

Les dispositions législatives actuelles ne déterminent pas directement le régime des incompatibilités applicables au mandataire ad hoc et au conciliateur. Cependant, les dispositions du code de commerce relatives aux incompatibilités applicables aux administrateurs judiciaires et aux mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises prévoient déjà certaines incompatibilités aux fonctions de mandataire ad hoc ou de conciliateur 86 ( * ) .

Aux termes de l'article L. 811-10 du code de commerce, la qualité d'administrateur judiciaire inscrit sur la liste ne fait pas obstacle à l'accomplissement des missions de mandataire ad hoc et de conciliateur, quand bien même cette activité ne serait pas exercé à titre accessoire. Selon l'article L. 812-8 du même code, la qualité de mandataire judiciaire au redressement et à la liquidation des entreprises inscrit sur la liste ne fait pas non plus obstacle à l'accomplissement des mandats de mandataire ad hoc et de conciliateur et ce, même à titre principal. En revanche, selon ce texte, la même personne ne peut exercer successivement les fonctions de conciliateur puis de mandataire judiciaire au redressement et à la liquidation des entreprises avant l'expiration d'un délai d'un an lorsqu'il s'agit d'une même entreprise.

L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des lois avec l'avis favorable du Gouvernement, a complété ces règles, en prévoyant que les fonctions de mandataire ad hoc ou de conciliateur ne pourraient être exercées :

- par une personne ayant, au cours des vingt-quatre mois précédant sa désignation en cette qualité par le juge, reçu une rémunération ou un paiement, soit de la part du débiteur, soit d'un créancier de celui-ci, soit d'une personne détenant le contrôle du débiteur ou contrôlée par ce dernier au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce.

Aux termes de cette disposition, qui définit le périmètre de consolidation des comptes sociaux, le contrôle exercé sur une entreprise peut être exclusif, résultant soit de la détention directe ou indirecte de droits de vote, soit de la désignation, pendant deux exercices successifs, de la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance d'une société, soit de l'exercice d'une influence dominante à raison de dispositions contractuelles ou statutaires. Le contrôle peut également s'exercer conjointement lorsque les décisions sociales sont prises d'un commun accord par un nombre limité d'associés ou d'actionnaires de la société 87 ( * ) .

Cette incompatibilité s'appliquerait que la rémunération ou le paiement ait été perçu de manière directe ou indirecte par la personne susceptible d'être désignée comme mandataire ad hoc ou conciliateur. Toutefois, elle ne concernerait pas le cas où les sommes perçues seraient liées à l'exécution d'un mandat ad hoc ou d'une mission de conciliation, ou, sous l'empire des dispositions actuelles du code de commerce, d'une mission de règlement amiable.

Désormais, le texte prévoirait, en outre, que la personne désignée par le président du tribunal devrait attester sur l'honneur, lors de l'acceptation de son mandat, qu'elle se conforme aux interdictions susvisées ;

- par un juge consulaire en fonction ou ayant exercé ses fonctions depuis moins de cinq ans . Votre commission approuve cette mesure d'incompatibilité qui est de nature à prévenir les risques de conflits d'intérêts.

Article L. 611-14 nouveau du code de commerce
Obligation d'assurance du mandataire ad hoc et du conciliateur

Avant sa suppression par l'Assemblée nationale, le texte proposé pour l'article L. 611-14 nouveau du code de commerce prévoyait qu' une personne ne pouvait être désignée en qualité de mandataire ad hoc ou de conciliateur sans justifier d'une assurance garantissant sa responsabilité civile et professionnelle pour ce type d'activité.

En application des règles du droit commun de la responsabilité, la personne chargée d'apporter une aide au débiteur et à ses créanciers dans le cadre d'une procédure de mandat ad hoc ouverte en application de l'article L. 611-3 du code de commerce ou d'une procédure de conciliation ouverte en vertu de l'article L. 611-4 du même code doit pouvoir répondre des préjudices que son action peut, le cas échéant, susciter. Cependant, pour qu'en pratique les personnes victimes de dommages puissent en obtenir réparation, il convient que le mandataire ad hoc ou le conciliateur soient assurés contre de tels sinistres. A défaut, en effet, la personne ayant subi un préjudice risquerait de se trouver face à un mandataire ou conciliateur dont le patrimoine ne permettrait pas de réparer intégralement son préjudice.

A l'initiative de sa commission des lois avec le soutien, après quelques hésitations, du Gouvernement, l'Assemblée nationale a cependant supprimé ce dispositif au motif que ce dernier interdirait , en pratique, à d'autres personnes que des administrateurs ou des mandataires au redressement et à la liquidation des entreprises d'être désignées en qualité de mandataire ad hoc ou de conciliateur. En effet, selon M. Xavier de Roux, rapporteur de la commission des lois, avait estimé qu'une telle activité ne serait pas assurable ou que « le prix de l'assurance serait tel que cela reviendrait au même » 88 ( * ) .

Votre commission est sensible à la volonté témoignée d'ouvrir, le cas échéant, à d'autres personnes que des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises les fonctions de conciliateur ou de mandataire ad hoc . Cependant, elle s'interroge a fortiori sur l'opportunité de supprimer toute obligation d'assurance, dès lors que la personne extérieure qui souhaitera assurer une mission de cette nature ne sera couverte par aucune garantie, alors même qu'elle pourrait faire l'objet d'actions en responsabilité lourdes de conséquences financières. Il ne faudrait pas, par ailleurs, que l'absence de toute obligation d'assurance conduise les sociétés d'assurance à ne pas offrir des polices permettant la couverture d'un tel risque.

Cette question doit également être analysée au regard du dispositif d'ouverture du redressement judiciaire à la suite d'un échec d'une procédure de conciliation. Dans une telle hypothèse, en application de l'article L. 631-4 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 100 du présent projet de loi, « lorsque le rapport du conciliateur établit que le débiteur est en cessation des paiements, le tribunal, d'office, se saisit afin de statuer sur l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ».

Pour qu'un tel mécanisme fonctionne valablement , votre commission a souhaité prévoir, à l'article L. 611-7 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'article 6 du projet de loi, que le conciliateur indique précisément, lorsqu'il fait connaître au président du tribunal l'échec de la conciliation, si le débiteur est ou non en état de cessation des paiements. Or, compte tenu de cette obligation, cause de mise en jeu de sa responsabilité, il serait difficilement concevable de ne pas instituer une obligation d'assurance.

Par conséquent, votre commission vous propose de rétablir, par amendement , l'obligation d'assurance initialement prévue, en la restreignant toutefois au seul conciliateur . Ainsi, faute pour la personne pressentie par le tribunal pour être conciliateur de justifier d'une telle assurance, elle ne pourrait être désignée en cette qualité. Cet amendement mettrait notamment en relief le régime de la responsabilité auquel pourrait donner lieu l'exercice de la mission de conciliateur. En outre, la référence à une responsabilité professionnelle serait supprimée dans la mesure où les personnes mandatées par le président du tribunal ne feront pas nécessairement de cette activité leur profession exclusive.

Dans ces conditions, votre commission vous propose de préciser, en s'inspirant de l'article L. 814-4 du code de commerce applicable aux administrateurs judiciaires et aux mandataires au redressement et à la liquidation des entreprises, que l'assurance souscrite est destinée à garantir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile encourue du fait de négligence ou de faute dans l'exercice du mandat du conciliateur .

Article L. 611-15 nouveau du code de commerce
Rémunération du mandataire ad hoc et du conciliateur

Le texte proposé pour insérer l'article L. 611-15 nouveau dans le code de commerce, modifié par l'Assemblée nationale, définirait les modalités de rémunération du mandataire ad hoc et du conciliateur .

Actuellement , les modalités de rémunération du conciliateur sont définies par le dernier alinéa de l'article 37 du décret n° 85-295 du 1 er mars 1985 pris pour l'application de la loi du 1 er mars 1984 précitée selon lequel la rémunération est fixée par le tribunal, en accord avec le demandeur. En revanche, aucune disposition ne définit les conditions de rémunération du mandataire ad hoc .

L'Office parlementaire d'évaluation de la législation, avait, en 2001, constaté les lacunes du droit positif et avait présenté des préconisations qui ont inspiré les modifications initialement proposées par le présent article 89 ( * ) .

Consacrant les modalités de rémunération du mandataire ad hoc et du conciliateur dans la loi, et non plus dans ses décrets d'application, le présent article posait, dans sa rédaction initiale, le principe selon lequel la rémunération de ces deux personnes serait déterminée « en accord avec le débiteur » et ce, « en fonction des diligences strictement nécessaires à l'accomplissement de leur mission ». En conséquence, la rémunération du conciliateur et du mandataire ad hoc devait être définie de manière contractuelle entre ces derniers et le débiteur, le texte prévoyant un principe de stricte proportionnalité entre les diligences à effectuer et la rémunération. L'intervention du juge restait néanmoins prévue, puisqu'à défaut d'accord entre le débiteur et le mandataire ad hoc ou le conciliateur, la rémunération devait être arrêtée par le président du tribunal.

Souhaitant revenir à la pratique actuelle, dans la mesure où il était craint que le débiteur ne soit pas en mesure de discuter les honoraires qui lui seraient proposés par le mandataire ad hoc ou le conciliateur lui-même, l'Assemblée nationale a souhaité, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, laisser au président du tribunal le soin :

- de fixer , lors de leur désignation , les conditions de rémunération du mandataire ad hoc ou du conciliateur ;

- d'arrêter le montant de celle-ci à l'issue de leur mission .

Votre commission vous soumet un amendement tendant à préciser que la rémunération de l'expert qui aura été éventuellement désigné dans le cadre de la procédure de conciliation sera déterminée par le président du tribunal, dans des conditions identiques.

Le texte prévoit que la décision du président du tribunal pourrait faire l'objet d'un recours devant le premier président de la cour d'appel et ce, dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat . Cette précision tend à confirmer la jurisprudence de la chambre commerciale de la Cour de cassation qui a déjà admis un tel recours sur le fondement combiné des articles 714 et 719 du nouveau code de procédure civile 90 ( * ) . Selon les informations recueillies par votre rapporteur, ce délai pourrait, à l'instar du droit commun, s'élever à un mois.

Afin de lever toute ambiguïté sur la compétence exclusive du premier président de la cour d'appel pour connaître des contestations sur les décisions prises en matière de rémunération, votre commission vous soumet un second amendement de nature rédactionnelle .

Article L. 611-16 nouveau du code de commerce
Obligation de confidentialité applicable au mandat ad hoc et à la procédure de conciliation

Aux termes du texte proposé pour l'article L. 611-16 du code de commerce, modifié par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, une obligation de confidentialité serait instituée dans le cadre de la procédure de conciliation et du mandat ad hoc .

Une disposition similaire figure déjà à l'article L. 611-6 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi précitée du 1 er mars 1984, à l'égard de la procédure de règlement amiable. Toutefois, certaines juridictions du fond ont estimé que les participants à la procédure du mandat ad hoc étaient également soumis à cette obligation de confidentialité, jugeant cependant que cette dernière n'avait pas un caractère absolu et pouvait être levée, notamment à la demande du débiteur 91 ( * ) .

Le nouveau texte ne ferait plus référence au « secret professionnel », mais à la « confidentialité ».

L'obligation du secret professionnel est édictée par l'article 226-13 du code pénal qui punit d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire, notamment en raison « d'une mission temporaire » qui lui aurait été confiée. L'obligation de confidentialité est, quant à elle, de nature purement civile. Sa violation ne peut donc donner lieu qu'à l'octroi de dommages et intérêt au profit de la personne à laquelle a causé un préjudice.

Le recours à la notion de confidentialité est lié à une volonté de dépénaliser le droit des affaires, illustrée par les textes les plus récents, tout en assurant une sanction réelle en cas de violation, dans la mesure où les violations du secret professionnel ne sont pas toujours poursuivies. En outre, le recours au secret professionnel dans le cadre de cette procédure est certainement excessif compte tenu des sanctions susceptibles d'être infligées.

Désormais, l'obligation de confidentialité s'appliquerait expressément au mandat ad hoc , ce qui dissipera toute ambiguïté que faisait naître le texte initial du projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 10 ainsi modifié .

Article 11
(art. L. 612-1 à L. 612-4 du code de commerce)
Pouvoirs d'information et d'alerte du commissaire aux comptes
et des représentants du personnel

Cet article tend à modifier les articles L. 612-1 à L. 612-4 du code de commerce afin de renforcer les pouvoirs d'information et d'alerte du commissaire aux comptes et des représentants du personnel de l'entreprise en cas de difficultés .

Le premier paragraphe (I) de cet article modifierait l'article L. 612-1 du code de commerce afin de supprimer par coordination des dispositions abrogées par des textes antérieurs .

En effet, les articles L. 225-219 et L. 242-27 du code de commerce, relatifs, pour le premier, à la liste nationale des commissaires aux comptes et, pour le second, à la sanction applicable aux commissaires aux comptes qui donneraient ou confirmeraient des informations de nature mensongère ou qui s'abstiendraient de communiquer au ministère public les faits délictueux dont ils auraient connaissance, ont été respectivement abrogées par la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière et la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques.

De même, les articles L. 242-25 et L. 242-28 du code de commerce, qui punissaient respectivement le dirigeant social qui n'aurait pas désigné de commissaire aux comptes ou n'aurait pas procédé à sa convocation à l'assemblée générale de la société et le fait pour les dirigeants de faire obstacle aux vérifications ou au contrôle des commissaires aux comptes, ont également été abrogés par la loi précitée du 15 mai 2001.

Votre commission souligne, d'ailleurs, que les dispositions relatives aux commissaires aux comptes devraient prochainement être regroupées au sein du livre VIII du code de commerce, qui ferait lui-même l'objet d'une refonte, dans le cadre d'une ordonnance prise sur le fondement du 2° de l'article 28 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit 92 ( * ) .

Le deuxième paragraphe (II) de cet article tendrait à donner à l'ensemble des représentants du personnel un pouvoir d'information sur la situation économique et financière de l'entreprise en modifiant l'article L. 612-2 du code de commerce.

Aux termes de cette disposition, les entreprises constituées sous forme de personnes morales de droit privé non commerçantes et dépassant un seuil d'effectif salarié ou de chiffre d'affaires défini par décret en Conseil d'Etat sont tenues d'établir certains documents spécifiques : une situation de l'actif réalisable et disponible ainsi que du passif exigible, un compte de résultat prévisionnel, un tableau et un plan de financement 93 ( * ) . Cette obligation, instituée par la loi précitée du 1 er mars 1984, a été motivée par la volonté du législateur de permettre à ces entreprises de disposer d'informations sur leur situation économique et financière qui les mettent à même de s'apercevoir des difficultés éventuellement rencontrées dans le cadre de leur activité.

En effet, le même texte prévoit une communication de ces documents, analysés dans des rapports écrits, à plusieurs organes dont le commissaire aux comptes et le comité d'entreprise. Le commissaire aux comptes est chargé de faire respecter ces obligations. A défaut d'établissement des documents susvisés ou, lorsqu'ils ont été établis, si les informations données par ces derniers appellent des observations de sa part, il doit les signaler dans un rapport adressé au conseil d'administration ou au directoire et communiqué au comité d'entreprise.

Il ressort donc du droit en vigueur que l'information des salariés sur la situation économique et financière des personnes morales de droit privé non commerçantes ne concerne que celles qui sont dotées d'un comité d'entreprise.

L'objet de la modification proposée par le présent article serait de faire bénéficier de cette information tant le comité d'entreprise, s'il en existe un, que les délégués du personnel, dont la désignation est obligatoire dans les entreprises qui comptent entre onze et quarante-neuf salariés . Ainsi, ces délégués obtiendraient également communication du rapport de synthèse des dirigeants sur les données comptables issues des documents établis en vertu de l'article L. 612-2 et sur les observations éventuelles du commissaire aux comptes.

Le troisième paragraphe (III) modifierait l'article L. 612-3 du code de commerce afin de renforcer les pouvoirs d'alerte du commissaire aux comptes et l'information des représentants du personnel en cas de difficultés économiques ou financières rencontrées par l'entreprise.

Issu de la loi précitée du 1 er mars 1984, dans sa rédaction découlant de la loi précitée du 10 juin 1994, l'article L. 612-3 du code de commerce institue un mécanisme d'alerte reposant sur le commissaire aux comptes. Ce dispositif a pour vocation de faire prendre conscience aux organes sociaux des difficultés rencontrées par l'entreprise et de la nécessité de prendre des mesures destinées à les surmonter. Il s'applique aux seules personnes morales de droit privé non commerçantes. Toutefois, une procédure identique est prévue à l'égard des sociétés commerciales par les articles L. 234-1 et L. 234-2 du code de commerce dont les dispositions seraient d'ailleurs modifiées par l'article 182 du présent projet de loi 94 ( * ) .

La procédure d'alerte est déclenchée par le commissaire aux comptes lorsque ce dernier est amené à constater, dans le cadre de sa mission au sein de l'entreprise, « des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation ». Dans cette hypothèse, le commissaire informe les organes dirigeants de ses constatations afin que ceux-ci, ainsi prévenus, lui communiquent le cas échéant les mesures de redressement qu'ils envisagent de prendre.

Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 612-3, à défaut de réponse dans les quinze jours ou si cette dernière n'est pas satisfaisante dès lors que les mesures proposées n'apparaissent pas de nature à assurer la continuité de l'exploitation, le commissaire aux comptes doit inviter, par écrit, les dirigeants à provoquer une délibération sur ce point de « l'organe collégial de la personne morale », c'est-à-dire du conseil d'administration ou du directoire de la société. Le commissaire aux comptes doit être convoqué à cette assemblée et doit informer de la teneur de la délibération le président du tribunal de grande instance. En outre, la délibération est communiquée au comité d'entreprise.

Cet alinéa serait réécrit par le présent article afin d'apporter trois innovations.

D'une part, le délai de quinze jours serait supprimé au profit d'un délai fixé par décret en Conseil d'Etat. Ce transfert ne paraît pas choquant, la fixation de délais de procédure ressortissant en principe au pouvoir réglementaire.

D'autre part, le président du tribunal de grande instance serait rendu destinataire :

- de la copie du document, rédigé par le commissaire aux comptes, destiné à susciter une délibération de l'organe collégial . Cette mesure devrait renforcer l'information dont dispose le juge et qui lui permettra, le cas échéant, de prendre les mesures qu'il estime les plus efficaces pour le redressement de l'entreprise, comme par exemple l'ouverture d'une procédure de redressement ;

- de la délibération de l'organe collégial intervenue à la suite de l'alerte donnée par le commissaire aux comptes . Désormais, le président du tribunal serait donc informé directement de la réaction des organes dirigeants à l'alerte, le commissaire aux comptes n'étant plus débiteur de cette obligation d'information.

Enfin, l'information des représentants des salariés serait élargie puisque, à défaut de constitution d'un comité d'entreprise, les délégués du personnel pourraient recevoir communication de la délibération de l'organe collégial.

Le quatrième alinéa de l'article L. 612-3 du code de commerce prévoit actuellement que, si l'alerte donnée en vertu de l'alinéa précédent n'a pas conduit à la délibération de l'organe collégial de la personne morale ou si, malgré les décisions prises, la continuité de l'exploitation reste compromise, le commissaire aux comptes doit établir un rapport spécial qui devra être présenté lors de la prochaine assemblée générale. Ce rapport est, en outre, communiqué au comité d'entreprise.

Cette disposition serait modifiée par le présent paragraphe afin de prévoir :

- la convocation spéciale d'une assemblée générale . Cette mesure est destinée à informer au plus vite les associés des difficultés rencontrées par la personne morale afin que ces derniers puissent prendre les mesures qui s'imposent. La détermination des conditions et des délais dans lesquels cette assemblée devrait être convoquée serait renvoyée à un décret en Conseil d'Etat. Selon les informations communiquées à votre rapporteur, le délai devrait en tout état de cause être maintenu à quinze jours ;

- la communication aux délégués du personnel , en l'absence de comité d'entreprise, du rapport spécial du commissaire aux comptes .

Le quatrième paragraphe (IV) du présent article procéderait, à l'instar du paragraphe II, à la suppression de références aux dispositions des articles L. 225-219 et L. 242-27 du code de commerce, tous deux abrogés, dans l'article L. 612-4 du même code.

Cette dernière disposition impose notamment la nomination d'un commissaire aux comptes dans les associations ayant reçu annuellement de l'Etat, de ses établissements publics ou des collectivités territoriales une ou plusieurs subventions dont le montant global excède 150.000 euros, en application du décret n° 2001-379 du 30 avril 2001 fixant le montant en euros de la subvention reçue à partir duquel les associations sont soumises à certaines obligations.

Dans ce cas, le commissaire aux comptes dispose d'un mécanisme d'alerte sur les difficultés éventuellement rencontrées par l'association. Cette procédure se différencie cependant de celle applicable dans le cadre des sociétés dans la mesure où, d'une part, le commissaire aux comptes n'a pas une obligation d'alerte, mais seulement une faculté d'en faire usage, et d'autre part, ne dispose pas d'un droit d'alerte auprès du président du tribunal .

Votre commission estime que cette différence de régime n'apparaît guère justifiée et qu'un alignement des dispositions applicables aux associations subventionnées sur celles qui concernent les sociétés permettrait un renforcement des mécanismes de prévention des difficultés de ces personnes morales.

Elle vous soumet en conséquence un amendement tendant à étendre le bénéfice des dispositions de l'article L. 612-3 du code de commerce aux commissaires aux comptes des associations subventionnées.

Par le même amendement, votre commission vous propose d'adopter une mesure de cohérence avec l'article L. 234-4 nouveau du code de commerce, qui serait créé par l'article 182 du présent projet de loi. En effet, cette disposition exclurait l'obligation d'alerte du commissaire aux comptes, dans le cadre des sociétés commerciales, lorsqu'une procédure de sauvegarde ou de conciliation est engagée. Il s'agirait donc de rendre inapplicable le dispositif d'alerte prévu aux articles L. 612-3 et L. 612-4 du code de commerce, lorsqu'une procédure de conciliation ou une procédure de sauvegarde sont en cours.

Par coordination, votre commission vous soumet un second amendement destiné à supprimer le dispositif actuellement prévu à l'article L. 612-4 pour les associations.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 11 ainsi modifié .

* 34 Ce texte est complété par une circulaire du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 26 novembre 2004 relative à l'action de l'Etat dans la prévention et le traitement des difficultés des entreprises.

* 35 Sont tenues au dépôt de leurs comptes annuels : les sociétés à responsabilité limitée, les sociétés anonymes, les sociétés par actions simplifiées, les sociétés en commandite par actions et, sous certaines conditions, les sociétés en nom collectif ainsi que les sociétés en commandite simple (articles L. 232-21 et suivants du code de commerce).

* 36 Pour le commissaire aux comptes, voir les articles L. 234-1 et suivants du code de commerce.

* 37 Pour le comité d'entreprise, voir l'article L. 432-5 du code du travail.

* 38 « La prévention des difficultés des entreprises », Rapport de M. Albert Reins au Congrès national des tribunaux de commerce, Reims, 14 novembre 2003, p. 14.

* 39 Rapport n° 120 Sénat (2001-2002) de M. Jean-Jacques Hyest, sénateur, au nom de l'Office d'évaluation de la législation, p. 18.

* 40 Articles 16 et 53 du décret n° 67-236 du 23 mars 1967 sur les sociétés commerciales.

* 41 Cour de cassation, ch. commerciale, 14 février 1978, Bull. civ. IV, n° 66, p. 53.

* 42 Cour de cassation, ch. commerciale, 14 mai 2002, Bull. civ. IV, n° 87.

* 43 Article L. 331-7-1 du code de la consommation.

* 44 Articles L. 332-5 à L. 332-12 du code de la consommation.

* 45 Articles L. 628-1 et suivants du code de commerce, voir infra, le commentaire de l'article 180 du projet de loi.

* 46 Libéral, in G. Cornu (dir.), « Vocabulaire juridique », Paris, 2000, PUF.

* 47 Rapport n° 303 Sénat (1993-1994) de M. Etienne Dailly au nom de la commission des Lois, p. 36.

* 48 En vertu de l'article 36 du décret n° 85-295 du 1 er mars 1985 pris pour l'application de la loi n° 84-148 du 1 er mars 1984 précitée, le débiteur doit communiquer : un plan de financement prévisionnel, un compte de résultat prévisionnel, un état des créances et des dettes accompagné d'un échéancier et de la liste des principaux créanciers, l'état actif et passif des sûretés et des engagements hors bilan, les comptes annuels, le tableau de financement et, le cas échéant, la situation de l'actif réalisable et disponible ainsi que du passif exigible des trois derniers exercices.

* 49 Rapport précité, p. 27.

* 50 Article 11 du code de procédure pénale.

* 51 Paragraphes III à VII de l'article L. 611-4 du code de commerce.

* 52 Rapport précité, pp. 24-25.

* 53 Article L. 351-4 du code rural : « Le président du tribunal nomme un conciliateur en lui fixant un délai pour l'accomplissement de sa mission ou rend une ordonnance de rejet. Le conciliateur auquel sont communiquées les informations obtenues en application de l'article L. 351-3 a pour mission de favoriser le règlement de la situation financière de l'exploitation agricole par la conclusion d'un accord amiable entre le débiteur et ses principaux créanciers sur des délais de paiement ou des remises de dettes. »

* 54 Article 4 du décret n° 97-656 du 30 mai 1997.

* 55 Cour de cassation, ch. commerciale, 16 juin 1998, Bull. civ. IV n° 193.

* 56 En particulier, les URSSAF, l'ACOSS (agence centrale des organismes de sécurité sociale) et la CNSA (caisse nationale de solidarité pour l'autonomie).

* 57 Telle que la CANAM (caisse nationale d'assurance maladie et maternité des professions non salariées non agricoles), pour la branche « maladie », ou l'ORGANIC (caisse de compensation de l'organisation autonome nationale de l'industrie et du commerce) et de la CANCAVA (caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse artisanale).

* 58 MSA (mutualité sociale agricole).

* 59 Il s'agit, par exemple, de la CNIEG (caisse nationale des industries électriques et gazières) ou de la CNRACL (caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales).

* 60 Voir infra, le commentaire de l'article 72 du présent projet de loi.

* 61 Rapport précité, p. 25.

* 62 L'article 1244-3 du code civil précise en outre que « toute stipulation contraire aux dispositions des articles 1244-1 et 1244-2 est réputée non écrite ».

* 63 Cour de cassation, 2 ème ch. civile, 10 juin 1970, Bull. civ. II, n° 201.

* 64 Article L. 511-81 du code de commerce.

* 65 Cour de cassation, ch. sociale, 18 novembre 1992, Bull. civ. V, n° 555.

* 66 Rapport précité, p. 26.

* 67 Articles L. 223-38 et suivants, L. 225-218 et suivants du code de commerce.

* 68 Articles L. 251-12 et suivants du même code.

* 69 Articles L. 612-1 et suivants du même code.

* 70 Articles 30 et 31 de la loi n° 84-148 du 1 er mars 198 précitée.

* 71 Article 582 du nouveau code de procédure civile : « La tierce opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l'attaque.
Elle remet en question relativement à son auteur les points jugés qu'elle critique, pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit. »

* 72 Article 585 du nouveau code de procédure civile.

* 73 Article 2039 du code civil : « La simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge point la caution, qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement ».

* 74 Cour de cassation, ch. commerciale, 5 mai 2004, Bull. civ. IV, n° 84.

* 75 Article 1287 du code civil : « La remise ou décharge conventionnelle accordée au débiteur principal libère les cautions ; Celle accordée à la caution ne libère pas le débiteur principal ; Celle accordée à l'une des cautions ne libère pas les autres. ». Article 2013 du code civil : « Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses. Il peut être contracté pour une partie de la dette seulement, et sous des conditions moins onéreuses. Le cautionnement qui excède la dette, ou qui est contracté sous des conditions plus onéreuses, n'est point nul : il est seulement réductible à la mesure de l'obligation principale. »

* 76 Article L. 131-78 du code monétaire et financier.

* 77 Article L. 163-2 du code monétaire et financier.

* 78 Ou encore dénommé « new money ».

* 79 Cour de cassation, ch. commerciale, 5 février 2002, Bull. civ. IV, n° 27.

* 80 Cour de cassation, ch. commerciale, 28 juin 1994, Bull. civ. IV, n° 244.

* 81 Voir infra, le commentaire de l'article 34 du présent projet de loi.

* 82 Voir infra, le commentaire de l'article 120 du présent projet de loi.

* 83 Cour de cassation, ch. commerciale, 5 février 1978, JCP éd. G. 1978, II, 19132, note Stoufflet.

* 84 Cour de cassation, ch. commerciale, 10 décembre 2003, JCP éd. G 2004, IV, 1297.

* 85 Voir infra, le commentaire de l'article 142 bis du présent projet de loi.

* 86 Articles L. 811-10 et L. 812-8 du code de commerce.

* 87 Article L. 233-16 du code de commerce : « I.- Les sociétés commerciales établissent et publient chaque année à la diligence du conseil d'administration, du directoire, du ou des gérants, selon le cas, des comptes consolidés ainsi qu'un rapport sur la gestion du groupe, dès lors qu'elles contrôlent de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs autres entreprises ou qu'elles exercent une influence notable sur celles-ci, dans les conditions ci-après définies.

« II.- Le contrôle exclusif par une société résulte :

« 1° Soit de la détention directe ou indirecte de la majorité des droits de vote dans une autre entreprise ;

« 2° Soit de la désignation, pendant deux exercices successifs, de la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance d'une autre entreprise. La société consolidante est présumée avoir effectué cette désignation lorsqu'elle a disposé au cours de cette période, directement ou indirectement, d'une fraction supérieure à 40 % des droits de vote, et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détenait, directement ou indirectement, une fraction supérieure à la sienne ;

« 3° Soit du droit d'exercer une influence dominante sur une entreprise en vertu d'un contrat ou de clauses statutaires, lorsque le droit applicable le permet.

« III.- Le contrôle conjoint est le partage du contrôle d'une entreprise exploitée en commun par un nombre limité d'associés ou d'actionnaires, de sorte que les décisions résultent de leur accord.

« IV.- L'influence notable sur la gestion et la politique financière d'une entreprise est présumée lorsqu'une société dispose, directement ou indirectement, d'une fraction au moins égale au cinquième des droits de vote de cette entreprise. »

* 88 Débats du 3 mars 2005, 2 ème séance, JOAN du 4 mars 2005, p. 1638.

* 89 Rapport précité, p. 29.

* 90 Cour de cassation, ch. commerciale, 17 février 1998, Bull. civ. IV, n° 73.

* 91 Cour d'appel de Paris, 14 ème ch. B, 2 avril 1999, Bull. inf. Cour de cassation, 2000, n° 121.

* 92 Article 28 de la loi n° 2004-1343 : « Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour :

« 1° Inclure dans le code de commerce, en les aménageant, les dispositions législatives instituant des incapacités d'exercer une activité dans le domaine commercial ou industriel ;

« 2° Opérer la refonte des livres II et VIII du code de commerce en ce qu'ils concernent les commissaires aux comptes et intégrer dans le livre VIII du même code les règles applicables aux commissaires aux comptes, en améliorant la formation et le contrôle des commissaires aux comptes ainsi que le fonctionnement du Haut Conseil du commissariat aux comptes et en permettant à celui-ci de négocier et conclure des accords de coopération avec les autorités des autres Etats exerçant des compétences analogues ou similaires ; (...) ».

* 93 Ces seuils sont fixés respectivement à 300 salariés et à 18 millions d'euros par l'article 25 du décret n° 85-295 du 1 er mars 1985.

* 94 Voir infra le commentaire de l'article 182 du présent projet de loi.

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