Rapport n° 374 (2004-2005) de M. Didier BOULAUD , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 8 juin 2005

Disponible au format Acrobat (109 Koctets)

N° 374

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 juin 2005

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l' approbation du protocole portant modification de la convention relative aux transports internationaux ferroviaires du 9 mai 1980 (ensemble une annexe),

Par M. Didier BOULAUD,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Serge Vinçon, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert Del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, Mme Hélène Luc, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, Jean-Guy Branger, Jean-Louis Carrère, André Rouvière, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mme Paulette Brisepierre, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, MM. Francis Giraud, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Hue, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Jacques Pelletier, Daniel Percheron, Jacques Peyrat, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Yves Rispat, Josselin de Rohan, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet.

Voir le numéro :

Sénat : 72 (2004-2005)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation du protocole, adopté à Vilnius le 3 juin 1999 par les Etats membres de l'Organisation intergouvernementale pour les transports internationaux ferroviaires, portant modification de la convention relative aux transports internationaux ferroviaires.

L'Organisation intergouvernementale pour les transports internationaux ferroviaires regroupe 42 Etats d'Europe et du pourtour méditerranéen. Elle a pour but d'établir un régime de droit uniforme applicable aux transports des voyageurs, des bagages et des marchandises en trafic international direct entre les Etats membres par voie ferroviaire.

Très vite après l'entrée en vigueur de la convention relative aux transports internationaux ferroviaires, il est apparu que celle-ci n'était plus pleinement adaptée à l'évolution des politiques de transport dans les Etats membres. Un processus de révision a été engagé en 1995 et il a abouti à l'adoption, à Vilnius en 1999, d'un protocole établissant une nouvelle rédaction de la convention et appelé à se substituer à cette dernière. Ce protocole étend le champ d'application de la convention d'origine à de nouveaux domaines et tient compte des compétences communautaires en matière de transport en permettant l'admission de la Communauté européenne à l'organisation internationale.

Votre rapporteur effectuera une brève présentation de l'Organisation intergouvernementale pour les transports internationaux ferroviaires, avant de détailler les modifications apportées par le protocole de Vilnius soumis à l'examen du Sénat.

I. LA COOPÉRATION INTERNATIONALE EN MATIÈRE DE DROIT DES TRANSPORTS FERROVIAIRES

Le droit international des transports ferroviaires a vocation à éliminer les obstacles juridiques ou règlementaires auxquels se heurte le franchissement des frontières en trafic international ferroviaire.

La première convention internationale sur le transport de marchandises par chemins de fer date de 1890. Elle était gérée dans le cadre d'une union administrative dénommée « Union de Berne » prenant la forme de conférences diplomatiques internationales régulières. Les dispositions relatives aux contrats de transport ferroviaire internationaux, tant pour les marchandises que pour les voyageurs, étaient définies par des conventions de durée limitée, renouvelées et révisées périodiquement.

L'Union de Berne fut dotée en 1893 d'un secrétariat administratif permanent : l'Office central des transports internationaux par chemins de fer. Ce dernier était initialement placé sous le contrôle du Conseil fédéral suisse avant de passer, en 1956, sous celui d'un comité administratif constitué de représentants des Etats membres.

En 1980, une conférence de révision a procédé à une réforme fondamentale des deux conventions primitives, celle sur le contrat de transport international ferroviaire des marchandises (CIM) et celle sur le contrat de transport international ferroviaire des voyageurs (CIV). La convention de Berne du 9 mai 1980 a donné naissance à une véritable organisation internationale intergouvernementale : l'Organisation intergouvernementale pour les transports internationaux ferroviaires (OTIF)

A. L'ORGANISATION INTERGOUVERNEMENTALE POUR LES TRANSPORTS INTERNATIONAUX FERROVIAIRES (OTIF)

L'Organisation intergouvernementale pour les transports internationaux ferroviaires (OTIF) existe depuis le 1 er mai 1985, date d'entrée en vigueur de la convention relative aux transports internationaux ferroviaires (COTIF) du 9 mai 1980.

L'Organisation a essentiellement pour but d' établir un régime de droit uniforme applicable aux transports des voyageurs, des bagages et des marchandises en trafic international direct entre les Etats membres et empruntant des lignes ferroviaires, ainsi que de faciliter l'exécution et le développement de ce régime. Ce régime de droit uniforme peut être également appliqué aux transports internationaux empruntant, en sus des lignes ferroviaires, des lignes routières, des lignes maritimes et des lignes de voies navigables intérieures.

L'OTIF comprend actuellement 42 Etats membres en Europe , en Afrique du Nord et au Proche-Orient : Albanie, Algérie, Allemagne, Autriche, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Croatie, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irak, Iran, Irlande, Italie, Lettonie, Liban, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, l'ex-République yougoslave de Macédoine, Maroc, Monaco, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Serbie-Monténégro, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Syrie, République tchèque, Tunisie, Turquie, Ukraine.

On observe qu'en Europe, la plupart des Etats issus de l'Union soviétique ne sont pas membres de l'OTIF, à l'exception de la Lituanie, membre depuis 1995, de la Lettonie, membre depuis 2000 et de l'Ukraine, qui est le 42 ème Etat membre depuis le 1 er janvier 2004. Les différences profondes entre le droit du transport ferroviaire au sein des pays de l'OTIF et celui issu de la période soviétique demeure un obstacle important à l'adhésion de ces pays.

La qualité de membre de l'Irak et du Liban est actuellement suspendue, étant donné que le trafic international ferroviaire avec ces Etats est interrompu.

Le droit uniforme de transport ferroviaire mis en place par l'Organisation s'applique ainsi à environ 240 000 km de lignes de chemin de fer ainsi qu' à plusieurs milliers de km de lignes routières (510 km en trafic de marchandises et 7 000 km en trafic de voyageurs) et de voies navigables (10 000 km en trafic de marchandises et 12 000 km en trafic de voyageurs).

Le siège de l'Organisation est à Berne, un accord de siège ayant été conclu avec la Suisse en 1988.

L' Assemblée générale est l'organe de décision suprême de l'OTIF. Elle se compose de représentants de tous les Etats membres. Elle se réunit en Assemblée ordinaire une fois tous les cinq ans ou à la demande d'un tiers des Etats membres. La dernière Assemblée générale s'est tenue en novembre 2000, la prochaine devant se dérouler à Berne en septembre 2005.

L'OTIF comporte également une commission de révision, qui examine les propositions tendant à modifier la convention, ainsi qu'une commission d'experts pour le transport des marchandises dangeureuses.

Le Comité administratif se compose des représentants de douze Etats membres. Il approuve le programme de travail annuel, le budget, le rapport de gestion et les comptes de l'Organisation. Il contrôle la gestion administrative et financière du secrétariat permanent que constitue l' Office central des transports internationaux ferroviaires (OCTI) .

L'Office central instruit les propositions de modification de la convention et des différents textes qui en découlent. Il tient à jour la liste des lignes auxquelles s'applique le droit uniforme. Il reçoit les communications faites par les Etats membres, notamment celles sur l'inscription de lignes au régime international ou leur radiation, et par les entreprises de transport et les notifie aux autres Etats membres et aux entreprises de transport. Il facilite l'application de la convention, émet à cet effet des avis sur son interprétation, collabore au règlement des litiges par voie d'arbitrage et facilite, entre les entreprises de transport, les relations financières consécutives au trafic international.

B. LE DROIT UNIFORME DES TRANSPORTS INTERNATIONAUX FERROVIAIRES

Le droit uniforme applicable aux transports internationaux ferroviaires ne résulte pas de la convention du 9 mai 1980 elle-même mais de ses deux appendices.

L'appendice A définit les règles uniformes concernant le transport international ferroviaire des voyageurs et des bagages (CIV) .

L'appendice B définit les règles uniformes concernant le transport international ferroviaire des marchandises (CIM) . Il comporte 4 annexes : le règlement concernant le transport international ferroviaire des marchandises dangereuses (RID), le règlement concernant le transport international ferroviaire des wagons de particuliers (RIP), c'est à dire les wagons de marchandises appartenant à des sociétés autres que les chemins de fer, le règlement concernant le transport international ferroviaire des conteneurs (RICo) et le règlement concernant le transport international ferroviaire des colis express (RIEx).

Le droit uniforme s'applique aux lignes ferroviaires ainsi qu'aux lignes routières, maritimes ou sur voies navigable qui sont empruntées en prolongement d'un transport ferroviaire inscrites sur deux listes : la liste CIV pour le transport des voyageurs et la liste CIM pour celui des marchandises.

Les règles uniformes concernant le transport international ferroviaire des voyageurs et des bagages (CIV) comportent des dispositions relatives aux tarifs internationaux, à la forme et aux conditions d'exécution du contrat de transport (information sur les horaires, conditions d'exclusion du transport de certains voyageurs, mentions devant figurer sur les billets, situation des voyageurs sans billet valable, réductions de prix pour les enfants, enregistrement et transport des bagages, modalités de remboursement du transport), à la responsabilité du chemin de fer en cas de mort ou de blessure du voyageur, à sa responsabilité pour les bagages, aux rapports des chemins de fer entre eux.

Les règles uniformes concernant le transport international ferroviaire des marchandises (CIM) comportent des dispositions de même type sur les objets admis ou exclus au transport, sur les tarifs internationaux, sur le contrat de transport, formalisé par l'acceptation par le chemin de fer d'une « lettre de voiture » comportant tous les renseignements nécessaires sur la marchandise et sa destination, sur les délais de livraison maximum, sur le régime de responsabilité et sur les rapports des chemins de fer entre eux.

II. LE PROTOCOLE DE VILNIUS DE 1999 ET LA NOUVELLE CONVENTION RELATIVE AUX TRANSPORTS INTERNATIONAUX FERROVIAIRES

C'est lors de la 3 ème Assemblée générale de l'OTIF, tenue en novembre 1995, qu'a été décidé de lancer le processus de révision de la convention relative aux transports internationaux ferroviaires (COTIF) du 9 mai 1980. Il s'agissait de prendre en compte l'intégration européenne et les profondes transformations dans les politiques de transport des Etats membres.

A. UNE MISE À JOUR JUSTIFIÉE PAR LES ÉVOLUTIONS DES POLITIQUES DE TRANSPORT EN EUROPE

Depuis l'adoption de la COTIF en 1980, le processus d'intégration européen s'est renforcé et la politique des transports s'est libéralisée dans de nombreux Etats membres de l'OTIF. La séparation des chemins de fer de l'administration étatique, leur émancipation juridique en tant qu'entreprises de droit public ou privé, la séparation entre la gestion de l'infrastructure et le transport de voyageurs et de marchandises sont les principales caractéristiques de cette évolution.

Au plan communautaire, la directive 91/440 sur les transports ferroviaires a posé le principe de l'indépendance de gestion des entreprises ferroviaires , celles-ci devant être dotées d'un statut indépendant de l'Etat, gérées selon les principes qui s'appliquent aux sociétés commerciales et pouvant constituer des regroupements avec des entreprises ferroviaires établies dans d'autres États membres.

Elle a également entraîné la séparation entre la gestion de l'infrastructure ferroviaire et l'activité d'exploitation des services de transport , avec pour corollaire l'obligation d'appliquer une redevance d'utilisation non discriminatoire aux entreprises ferroviaires et aux regroupements internationaux qui empruntent l'infrastructure. Elle a prévu, pour les regroupements internationaux, l'octroi de droits d'accès et de transit dans différents États membres sous certaines conditions.

La 3 ème Assemblée générale de l'OTIF, en novembre 1995, a dressé le constat de la nécessité, pour s'adapter aux évolutions en cours, de règles uniformes allant au delà du contrat de transport entre le client et l'entreprise ferroviaire. Elle a préconisé une libéralisation et une modernisation des règles uniformes en matière de transport ferroviaire des marchandises et des voyageurs, la création d'un droit des wagons uniforme, applicable à tous les véhicules ferroviaires, pour distinguer clairement les prescriptions relatives à l'admission technique de ces wagons et leur utilisation en tant que moyen de transport sur la base d'un contrat, ainsi que la création de règles uniformes relatives au contrat d'utilisation de l'infrastructure d'un tiers par des transporteurs divers.

C'est lors de la 5 ème Assemblée générale, à Vilnius en juin 1999, qu'a été adopté le protocole de modification de la COTIF et de ses appendices actuellement soumis à l'approbation du Parlement.

B. LES MODIFICATION ENTRAÎNÉES PAR LE PROTOCOLE DE VILNIUS

Le protocole du 3 juin 1999 portant modification de la Convention relative aux transports internationaux ferroviaires du 9 mai 1980 se présente sous la forme d'un texte de 7 articles auquel est annexé la nouvelle Convention modifiée.

La Convention (COTIF) modifiée comporte pour sa part 45 articles . Y sont annexés :

- le protocole sur les privilèges et immunités de l'OTIF ;

- 7 appendices identifiés par les lettres A à G et portant respectivement sur le transport international ferroviaire des voyageurs (CIV), le transport international ferroviaire des marchandises (CIM), le transport international ferroviaire des marchandises dangereuses (RID), les contrats d'utilisation de véhicules en trafic international ferroviaire (CUV), le contrat d'utilisation de l'infrastructure en trafic international ferroviaire (CUI), l'adoption de prescriptions techniques uniformes applicables au matériel ferroviaire destiné à être utilisé en trafic international (APTU) et l' admission technique de matériel ferroviaire utilisé en trafic international (ATMF).

S'agissant du texte de la Convention elle-même, il a été actualisé.

L'article 2, définissant le but de l'OTIF, a été profondément remanié pour étendre le champ des compétences de l'organisation . Alors que le texte antérieur se limitait à mentionner l'établissement d'un régime de droit uniforme applicable au transport ferroviaire international, la nouvelle convention précise que l'OTIF « a pour but de favoriser, d'améliorer et de faciliter, à tout point de vue, le trafic international ferroviaire », non seulement en établissant des régimes de droit uniforme en matière de contrat de transport, de contrat d'utilisation d'infrastructures et de transport de matières dangereuses, mais également « en contribuant, en tenant compte des intérêts publics particuliers, à la suppression, dans les meilleurs délais, des entraves au franchissement des frontières en trafic ferroviaire international », « en contribuant à l'interopérabilité et à l'harmonisation technique dans le secteur ferroviaire » et « en établissant une procédure uniforme pour l'admission technique de matériel ferroviaire destiné à être utilisé en trafic international ».

Les bases institutionnelles de l'OTIF ont été adaptées ou mises à jour . L'anglais est introduit comme nouvelle langue de travail à côté du français et de l'allemand. Un secrétaire général est élu pour trois ans par l'Assemblée générale, au lieu et place du directeur général actuellement nommé par le comité administratif pour une durée de cinq ans. Deux nouvelles commissions sont créées pour répondre à l'extension du champ de compétence de l'OTIF : la commission de la facilitation ferroviaire, qui étudie les questions visant à faciliter le franchissement des frontières, et la commission d'experts techniques qui adopte les normes ou règles relatives au matériel ferroviaire. Un nouveau système de financement a été défini.

Enfin, la nouvelle COTIF permet l' adhésion des organisations régionales d'intégration économique. Cette adhésion est soumise à l'approbation, par l'Assemblée générale, d'un accord en définissant les modalités.

Ainsi, la Communauté européenne devrait devenir membre de l'OTIF . Elle sera représentée par la Commission, celle-ci pouvant donner mandat à un ou plusieurs Etats membres de la représenter.

La Communauté européenne exercera les droits de vote de ses Etats dans les décisions relatives aux matières de compétence exclusive de la Communauté Il est à noter que la Communauté disposera de 23 voix sur 43, soit la majorité absolue pour les décisions dans lesquelles elle a une compétence exclusive. De ce fait, aucune décision contraire aux règles ou aux intérêts européens ne pourrait être adoptée.

Dans les matières pour lesquelles la Communauté a une compétence partagée, le droit de vote sera exercé selon les cas par les Etats membres ou par la Communauté.

Les différents appendices à la convention ont été revus, notamment pour se mettre en conformité ou en cohérence avec la directive communautaire 91/440 sur les transports ferroviaires. Il était notamment nécessaire d'adapter les règles juridiques existantes de façon à ne pas faire supporter au voyageur ou au client la complexité résultant de la multiplication des intervenants (entreprises de transport, gestionnaires d'infrastructure).

S'agissant des règles uniformes concernant le transport international ferroviaire des voyageurs (CIV) , elles voient leur champ d'application étendu à l'ensemble des lignes ferroviaires, alors qu'elles s'appliquaient seulement aux lignes inscrites par les Etats membres. Des aménagements ont été apportés pour permettre une plus grande souplesse contractuelle sans remettre en cause le droit uniforme, notamment en ce qui concerne la responsabilité. Ainsi, les règles concernant le transport international ferroviaire des voyageurs ne comportent plus d'articles sur l'obligation de transporter, ni sur les tarifs ou les réductions obligatoires pour enfants. Le régime de responsabilité a été actualisé. L'exonération de responsabilité prévue par le texte actuel en cas de comportement anormal des voyageurs a été supprimée. Cette mention pouvait impliquer une exonération de responsabilité dans le cas d'un comportement d'une personne handicapée (physique ou mentale) lié à son handicap mais considéré comme anormal au regard du comportement que l'on peut attendre d'un voyageur non-handicapé. Il a été décidé, sur proposition de l'Autriche et avec le soutien de la France, de remplacer cette notion de « comportement anormal » par celle de « faute » du voyageur.

Des principes analogues ont inspiré la révision des règles uniformes concernant le transport international ferroviaire des marchandises (CIM) . Il s'agissait de se rapprocher du droit de transport applicable à d'autres modes de transport, notamment de la convention relative au contrat de transport international de marchandise par route. Une marge plus importante sera accordée dans la conclusion des accords entre les entreprises ferroviaires et les clients, comme entre les entreprises ferroviaires elles-mêmes. À titre d'exemple, les délais de livraison mentionnés par le texte ne valent qu'à défaut de convention entre le transporteur et l'expéditeur. Le régime de responsabilité solidaire des entreprises ferroviaires participant à un transport a été maintenu.

Le règlement concernant le transport international ferroviaire des marchandises dangereuses (RID) est devenu un appendice à part entière. Son application n'est donc plus subordonnée à l'existence d'un contrat de transport international ferroviaire relevant des règles CIM.

Les règles uniformes concernant les contrats d'utilisation de véhicules en trafic international ferroviaire (CUV) remplacent le règlement concernant le transport international ferroviaire des wagons de particuliers (RIP) qui n'est plus conforme au droit communautaire. Elles traitent essentiellement de la responsabilité respective des divers intervenants.

L'appendice E sur les règles uniformes concernant le contrat d'utilisation de l'infrastructure en trafic international (CUI) constitue un élément entièrement nouveau qui découle directement de la directive communautaire 91/440. Il règle les relations contractuelles et la responsabilité entre le gestionnaire d'infrastructure et l'entreprise ferroviaire.

Enfin, deux autres appendices nouveaux concernent l'adoption de prescriptions techniques uniformes applicables au matériel ferroviaire destiné à être utilisé en trafic international (APTU) et l' admission technique de matériel ferroviaire utilisé en trafic international (ATMF). Ils se placent eux aussi dans la suite logique de la directive communautaire 91/440. L'un de leurs objectifs est, dans le cadre de la concurrence, de ne plus laisser les entreprises ferroviaires décider seules de l'adoption de normes techniques et de l'homologation de matériels. Ces appendices ne confient pas à l'OTIF de compétence en matière de définition des normes, cette définition restant du ressort des organismes compétents en la matière. Les Etats membres de l'OTIF décideront uniquement d'adopter, ou non, en commun des normes existantes.

En ce qui concerne la force obligatoire de la convention et de ses appendices, il faut noter que chaque membre peut déclarer, à tout moment, qu'il n'appliquera pas dans leur intégralité certains appendices à la convention (article 42). Des réserves et des déclarations de ne pas appliquer partiellement certaines dispositions ne sont possibles que si ces réserves sont expressément prévues dans la convention ou ses appendices. Les appendices prévoient également, dans de nombreux cas, la possibilité, pour les contrats de transport ou d'autres conventions, de déroger aux règles minimales de la COTIF.

L'article 4 du protocole de Vilnius dispose que son entrée en vigueur interviendra après le dépôt des instruments de ratification par les deux-tiers des Etats membres à l'époque de la signature, en 1999, soit 27 Etats.

Au 15 mai 2005, 25 Etats avaient ratifié le protocole : Albanie, Algérie, Allemagne, Autriche, Bulgarie, Croatie, Danemark, Espagne, Finlande, Hongrie, Iran, Liechtenstein, Lituanie, l'ex-République yougoslave de Macédoine, Monaco, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Suisse, République tchèque, Tunisie.

C. LA COTIF ET LA POLITIQUE COMMUNAUTAIRE EN MATIÈRE DE TRANSPORTS FERROVIAIRES

Depuis la directive 91/440, qui avait en partie motivé la révision de la COTIF et l'adoption, en 1999, du protocole de Vilnius, de nouvelles évolutions sont intervenues dans la politique communautaire des transports ferroviaires.

Le « premier paquet ferroviaire » , intervenu en 2001 avec les directives 2001/12, 2001/13 et 2001/14, a élargi les droits d'accès aux lignes du réseau ferré national faisant partie du réseau transeuropéen de fret ferroviaire (RTEFF), puis sur l'ensemble du réseau à partir de 2008, pour toute entreprise ferroviaire titulaire d'une licence et souhaitant offrir des services de fret internationaux. Le principe de l'exercice des fonctions d'attribution concernant l'accès au réseau (sillons, certificat de sécurité, licence) à des entités qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transports a été posé. La création d'un organisme de contrôle, compétent pour recevoir tout recours d'entreprises qui s'estimeraient lésées par le document de référence du réseau, la procédure de répartition des sillons, le système de tarification ou le certificat de sécurité, a été prévue.

En 2004 a été adopté le « deuxième paquet ferroviaire » , avec les directives 2004/49, 2004/50 et 2004/51. Elles ont porté sur la sécurité des chemins de fer (institution d'une autorité nationale de sécurité et un organisme permanent d'enquête sur les accidents), sur l'interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen à grande vitesse ainsi que l'interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen conventionnel et sur le développement de chemins de fer communautaires, avec l'ouverture à la concurrence du fret ferroviaire national au 1 er janvier 2007. Au 1 er janvier 2005 a été instituée l'Agence ferroviaire européenne.

Enfin, un « troisième paquet ferroviaire » a été présenté au Conseil des ministres des transports le 9 mars 2004. Il comprend une proposition de directive concernant l'ouverture du marché pour les services de transports international de passagers par chemins de fer, une proposition de directive relative à la certification des conducteurs de locomotives et de trains affectés au transport de passagers et de marchandises dans la Communauté, une proposition de règlement concernant la qualité des services de transport de marchandises par chemins de fer et une proposition de règlement concernant les droits et obligations des passagers en transport ferroviaire international.

Juridiquement, les obligations des Etats en tant que membres des Communautés européennes prévalent sur leurs obligations au titre de la COTIF (article 3 §2). Par ailleurs, les Etats peuvent émettre des réserves ou déclarer ne pas appliquer totalement certaines dispositions.

L'évolution du droit communautaire n'implique donc pas obligatoirement une nouvelle révision de la COTIF mais il est clair que l'adhésion de la Communauté européenne à l'OTIF permettra à la Commission européenne d'y jouer un rôle majeur.

A l'heure actuelle, la Commission ne s'est pas prononcée sur une éventuelle révision de la réglementation issue de la COTIF. Toutefois, on peut relever des divergences entre certains appendices et le droit communautaire. A titre d'exemple, les règles uniformes concernant le contrat d'utilisation de l'infrastructure en trafic international (CUI) prévoit la possibilité de contrats à durée illimitée, à l'inverse du droit communautaire. En matière de transport de voyageurs, la règlementation européenne prévoit une responsabilité quasi illimitée des transporteurs en cas d'accident, alors que la COTIF prévoit des clauses d'exonération. Des différences apparaissent également dans les procédures d'admission des matériels roulants.

CONCLUSION

L'harmonisation juridique et règlementaire constitue une action peu visible mais indispensable pour le développement du transport ferroviaire international. En effet, les obstacles au trafic ferroviaire international doivent être autant que possible levés pour donner au transport ferroviaire, et notamment au fret, une meilleure compétitivité par rapport au transport routier.

L'Organisation intergouvernementale pour les transports internationaux ferroviaires doit jouer à cet égard un rôle important et l'actualisation de sa règlementation, à travers l'adoption du protocole de Vilnius en juin 1999, était nécessaire. L'un des apports de ce protocole sera de permettre l'adhésion de la Communauté européenne à l'Organisation, ce qui devrait se traduire par une synergie accrue entre la politique ferroviaire communautaire et l'action de l'OTIF qui s'étend à d'autres pays du continent européen.

La commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous demande d'adopter le projet de loi autorisant l'approbation de ce protocole.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent rapport lors de sa réunion du mercredi 8 juin 2005.

Suivant les conclusions du rapporteur, elle a adopté le présent projet de loi.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Article unique 1 ( * )

Est autorisée l'approbation du protocole portant modification de la convention relative aux transports internationaux ferroviaires du 9 mai 1980 (ensemble une annexe), adopté à Vilnius le 3 juin 1999, et dont le texte est annexé à la présente loi.

ANNEXE -
ÉTUDE D'IMPACT2 ( * )

I - État de droit existant :

La convention initiale du 9 mai 1980 avait été élaborée dans un contexte où n'existaient, dans les Etats Parties, que des entreprises ferroviaires fortement intégrées, assurant à la fois la gestion des infrastructures et l'exploitation des services ferroviaires, sur la base de droits exclusifs et, bien souvent, en situation de monopole.

L'adoption de la directive communautaire 91/440 a conduit l'OTIF à entamer une révision de la Convention, pour tenir compte des changements politiques, économiques et juridiques intervenus dans un grand nombre d'États membres, qu'ils fassent ou non partie de la Communauté européenne.

La révision a consisté à adapter les règles juridiques existantes (convention pour le transport international de voyageurs, CIV, convention pour le transport international de marchandises, CIM). Cette révision a permis, par exemple, de ne pas faire supporter au voyageur la complexité de la situation résultant de la multiplication du nombre d'intervenants (entreprises de transport, gestionnaires d'infrastructure).

L'arrivée, sur le marché, de nouveaux acteurs, comme les loueurs de wagons ou les gestionnaires d'infrastructures a conduit à créer des règles juridiques concernant les contrats d'utilisation des véhicules et le contrat d'utilisation de l'infrastructure.

En outre, il n'existait pas, en 1999, de règles communautaires relatives à l'interopérabilité des chemins de fer conventionnels. L'OTIF s'est donc dotée d'un cadre juridique pour faire accepter par ses membres des prescriptions techniques uniformes (APTU). Cette formule permettra (sans aucun doute, compte tenu du nombre de voix qui sera bientôt détenu par la Communauté européenne) aux spécifications techniques d'interopérabilité européennes de devenir la norme dans l'ensemble des pays de l'OTIF.

II - Effet du protocole sur l'ordonnancement juridique :

La convention de 1980 aurait inévitablement souffert de son incompatibilité croissante avec le droit communautaire. Le nouvel accord vise précisément à prendre en compte l'évolution du droit communautaire (adoption de la directive 91/440). Elle a d'ailleurs prévu la possibilité, pour les organisations régionales d'intégration économiques telles que la Communauté européenne, de devenir membre à part entière de l'OTIF.

- Articulation avec le droit national :

Ainsi qu'il est dit à l'article 8 §2 de la COTIF « A défaut de stipulation dans la Convention, le droit national est applicable ». Il s'en suit que, pour les domaines couverts par la Convention et dans les cas prévus par elle, la Convention prime sur le droit national. Toutefois, les appendices à la Convention prévoient, dans de nombreux cas, que le droit national ou même des dispositions contractuelles puissent se substituer à certaines dispositions de ces appendices.

Cependant, s'il devait réellement y avoir des conflits entre le droit national de tel Etat membre et le droit de l'OTIF, cet Etat conserve, à tout moment, la possibilité de déclarer qu'il n'appliquerait pas, dans son intégralité, tel appendice de la COTIF (article 42 §1). Cette déclaration aura pour conséquence que l'État concerné ne pourra plus être membre des commissions concernées (article 16 §1). Il pourra néanmoins être invité par le Secrétaire général à participer aux sessions avec voix consultative, en accord avec la majorité des Etats membres de ladite Commission (article 16 §5).

De plus, l'appendice F, par exemple, permet aux Etats de faire des déclarations visant à ne pas appliquer certaines de ses dispositions seulement. Ces réserves sont sans conséquence sur la participation à la commission correspondante.

- Articulation avec le droit communautaire :

Selon l'article 3 §1, les Etats s'engagent à « concentrer leur coopération internationale dans le domaine ferroviaire au sein de l'Organisation ... ». Cependant, les obligations des États en tant que membres des Communautés européennes prévalent sur les obligations de la Convention (article 3 §2). En outre, la déclaration de ne pas appliquer certains appendices et la possibilité d'émettre des réserves, prévue à l'article 42, valent également, en cas d'incompatibilité entre la Convention et le droit communautaire.

III - Modifications à apporter au droit existant :

L'approbation de ce protocole ne nécessite pas la modification de dispositions de notre droit interne.

* 1 Voir le texte annexé au document Sénat n° 72 (2004-2005)

* 2 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.

Page mise à jour le

Partager cette page