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Rapport n° 396 (2005-2006) de M. André BOYER , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 14 juin 2006

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N° 396

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 14 juin 2006

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement du Royaume de Norvège et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d' Irlande du Nord relatif à la propriété commune d'un système de sauvetage sous-marin ,

Par M. André BOYER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Serge Vinçon, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, Mme Hélène Luc, M. André Boyer, vice - présidents ; MM. Daniel Goulet, Jean-Guy Branger, Jean-Louis Carrère, Jacques Peyrat, André Rouvière, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mme Paulette Brisepierre, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Hue, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Jacques Pelletier, Daniel Percheron, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Yves Rispat, Josselin de Rohan, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet.

Voir les numéros :

Sénat : 325 (2005-2006)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de l'accord conclu à Bruxelles le 9 décembre 2003 entre la France, la Norvège et le Royaume-Uni, relatif à la propriété commune d'un système de sauvetage sous-marin.

Ce projet a été initié au sein d'un groupe de travail de l'OTAN en 1996, puis il est entré en phase de réalisation à partir de 2003, dans le cadre d'une coopération entre la France, la Norvège et le Royaume-Uni formalisée par un mémorandum d'entente en date du 6 juin 2003. Destiné au secours des sous-marins en difficulté et au sauvetage de leurs équipages, il porte sur la réalisation d'un système complet comprenant un robot de reconnaissance téléopéré, un sous-marin de secours capable d'intervenir jusqu'à 610 mètres de profondeur, ainsi que les éléments permettant de le mettre à l'eau et de le récupérer. Tous ces sous-ensembles seront aérotransportables pour garantir une capacité d'intervention en moins de 72 heures.

Le « NATO Submarine Rescue System » (NSRS) doit entrer en service à la fin de l'année 2006. Il constituera un équipement multinational unique en Europe et permettra notamment à la France, jusqu'à présent dépendante de moyens détenus par d'autres nations, d'acquérir son propre système de sauvetage, même s'il est partagé avec deux autres pays. L'une des particularités du projet tient à ce que sa mise en oeuvre et sa maintenance seront assurées, au profit des trois pays propriétaires, par un opérateur privé - la société britannique Rolls Royce - en charge de sa fabrication.

Votre rapporteur effectuera une présentation de ce programme d'équipement avant d'évoquer les modalités retenues pour son utilisation, et notamment les questions de propriété juridique qui font l'objet de l'accord du 9 décembre 2003.

I. UN PROGRAMME QUI DOTERA LA FRANCE D'UN SYSTÈME DE SAUVETAGE SOUS-MARIN PERFORMANT

Le naufrage du sous-marin nucléaire d'attaque russe « Koursk », survenu le 12 août 2000 par plus de 100 mètres de fond dans la mer de Barents, a illustré dans des conditions particulièrement dramatiques les enjeux liés à la possession de systèmes de sauvetage sous-marins rapidement déployables. En l'occurrence, les diverses tentatives de sauvetage effectuées par des submersibles de secours, russe tout d'abord puis britannique, avaient échoué, ce qui réduisit à néant toute possibilité de venir en aide aux éventuels survivants parmi les 118 hommes d'équipage.

En France, les accidents de même nature remontent à plus de trente ans, avec le naufrage en Méditerranée des sous-marins « Minerve », le 27 janvier 1968, et « Eurydice », le 4 mars 1970. La profondeur des eaux dans les zones où sont survenus ces deux accidents rendaient impossible toute intervention d'un système de sauvetage. Notre pays a cependant développé certains moyens de secours et a conclu avec d'autres partenaires, principalement les Etats-Unis, des accords permettant de bénéficier de l'intervention de leurs propres systèmes.

Le programme tri-national « NATO Submarine Rescue System » (NSRS) dotera pour la première fois la France d'un système de sauvetage capable d'opérer partout dans le monde sous faible préavis et d'évacuer les équipages à une profondeur de l'ordre de 600 mètres.

A. LES SYSTÈMES DE SAUVETAGE SOUS-MARIN EN FRANCE ET DANS LE MONDE

Les sous-marins sont généralement dotés de sas de sauvetage permettant l'évacuation individuelle des hommes d'équipage munis à cet effet de combinaison de survie, mais une telle opération demeure délicate et risquée. Elle est envisageable jusqu'à une profondeur maximale de 180 mètres, les risques augmentant bien entendu avec la profondeur. Au-delà, il faut faire appel à de petits sous-marins de plongée profonde spécialement conçus pour le sauvetage , désignés sous l'appellation générique anglaise de « Deep Submergence Rescue Vehicle » (DSRV).

Acheminé jusqu'au lieu du naufrage à bord d'un navire spécialisé ou fixé au pont d'un autre sous-marin, le sous-marin de secours s'arrime au sas de sauvetage du bâtiment naufragé et permet, en plusieurs voyages, le recueil de l'équipage. La réussite d'une telle opération de secours est tributaire de nombreux facteurs : les délais d'acheminement sur zone , avec généralement la nécessité d'un transport aérien par appareil gros porteur avant l'embarquement du sous-marin de secours par voie maritime ; le positionnement du sous-marin en perdition , ce dernier devant être posé sur le fond sans gîte et assiette excessives, ce qui n'était pas par exemple le cas du « Koursk » ; enfin, le dispositif d'arrimage du bâtiment à secourir doit être compatible avec celui du sous-marin de secours, ce qui est le cas pour les marines de l'OTAN et des pays partenaires.

Si l'on compte dans le monde environ quarante pays employant des sous-marins, seuls quelques pays disposent de systèmes de sauvetage à grande profondeur .

Au sein de l'OTAN, trois pays sont équipés de tels systèmes : les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Italie.

Les Etats-Unis possédaient jusqu'à une date récente deux sous-marins de sauvetage sur la base de San Diego en Californie, mais l'un d'entre eux a été désarmé. Le sous-marin de secours est conçu pour être transporté sur le lieu de l'accident par un sous-marin « mère ». Il peut accueillir jusqu'à 24 hommes d'équipage. Ce système conçu au début des années 1970 n'a jamais été utilisé pour des missions réelles 1 ( * ) . Il est en voie d'être remplacé par un nouvel équipement dont la mise en service est prévue fin 2007. Celui-ci ne serait plus dépendant du transport par un sous-marin « mère » mais pourra être mis en oeuvre à partir de bâtiments d'opportunité affrétés à l'occasion de l'opération.

Le Royaume-Uni possède, basé à Glasgow, un système constitué d'un sous-marin de sauvetage, le LR5, et de tous les moyens associés à sa mise en oeuvre. Celle-ci s'effectue à partir de bâtiments d'opportunité affrétés pour l'occasion. Le LR5 peut intervenir jusqu'à 450 mètres de profondeur. Il a été déployé en août 2000 pour tenter de sauver les survivants du « Koursk ». Le système britannique est également doté d'un moyen d'intervention qui a été déployé le 5 août 2005 au Kamchatka pour désengager avec succès un bathyscaphe de la marine russe pris dans des filets de pêche à 230 mètres de profondeur, en sauvant la vie des 7 membres d'équipage.

L' Italie possède pour sa part un sous-marin de sauvetage mis en oeuvre à partir d'un bâtiment dédié, l'Anteo. Le système, basé à La Spezia, ne peut pas être déployé sans son bâtiment support, ce qui en limite l'emploi aux côtes italiennes.

Parmi les autres pays, la Russie, la Suède, l'Australie, le Japon et la Corée du Sud, possèdent des moyens de sauvetage de sous-marins. Mais ces systèmes sont en majorité dédiés, limités aux eaux territoriales et limités en capacité de déploiement. La Chine et l'Inde sont également en pourparlers pour acquérir des moyens de sauvetage pour leurs sous-marins.

Les moyens d'intervention étant donc relativement peu nombreux, des accords entre marines permettent aux pays non dotés de bénéficier d'une assistance pour les opérations de sauvetage. L'OTAN a bien entendu constitué un cadre privilégié pour cette coopération matérialisée par de nombreux exercices communs. Le dernier en date, l'exercice « Sorbet royal » effectué en juin 2005, a mis en oeuvre les moyens de secours, de soutien et d'assistance médicale d'une douzaine de pays pour tester en conditions réelles les procédures, les personnels et les équipements d'évacuation et de sauvetage.

La France , pour sa part, ne possède pas jusqu'à présent de moyen national pour le sauvetage de ses équipages de sous-marins . Un accord conclu avec l'US Navy lui permet de faire appel, si nécessaire, aux moyens de sauvetage américains . A cet effet, les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) de type « Redoutable » ont été équipés pour jouer le rôle de sous-marin « mère », c'est-à-dire qu'ils peuvent fixer sur leur pont et transporter le sous-marin de secours américain. Le dernier SNLE de ce type, l'Inflexible, doit être retiré du service en 2008 et, en tout état de cause, le système américain actuel sera remplacé fin 2007 par un nouveau type d'équipement.

Il faut toutefois signaler que les sous-marins d'attaque français, par conception, peuvent être ventilés par l'extérieur pour que leur atmosphère puisse être renouvelée en cas d'accident. La France a donc développé un moyen d'intervention sous la mer autour de cette capacité. Elle dispose aujourd'hui d'un système de ventilation par l'extérieur pouvant travailler jusqu'à 250 mètres de profondeur avec un scaphandre atmosphérique pour le raccordement des flexibles de ventilation jusqu'à cette immersion. La sécurité de ce scaphandre est assurée par un véhicule téléopéré qui a été récemment utilisé pour intervenir sur l'épave du « Klein Family » au large de Cherbourg.

L'arrivée en fin de vie du système américain, tout comme celle des deux systèmes européens existants, a fourni l'opportunité de réexaminer la situation française. Une solution européenne s'est dégagée, permettant à la France d'accéder à des moyens extrêmement performants tout en partageant les coûts d'acquisition et de soutien avec deux autres pays.

B. LE PROGRAMME « NATO SUBMARINE RESCUE SYSTEM » (NSRS)

L'idée d'une coopération internationale pour la réalisation d'un nouveau système de sauvetage sous-marin a pris corps à la fin des années 1980 lorsque les trois pays de l'OTAN disposant de tels systèmes, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Italie, ont annoncé des échéances de fin de vie proches pour leurs équipements en service.

Des échanges ont eu lieu à ce sujet au sein du groupe d'experts de l'OTAN sur le sauvetage des sous-marins. Assez logiquement, la possibilité d'un programme pour le développement de systèmes de remplacement a été étudiée au sein de l'OTAN qui a cofinancé, au début des années 1990, une étude de pré-faisabilité destinée à explorer plusieurs dizaines de solutions innovantes pour le sauvetage pressurisé . En effet, l'accident du sous-marin péruvien « Pacocha », survenu en 1989 et dont une partie de l'équipage avait péri par accident de décompression à l'issue d'une évacuation, avait souligné la nécessité d'un transfert sous pression associé à un processus de décompression pour toute opération de sauvetage collectif d'un sous-marin.

Toutefois, le processus n'est pas allé au-delà de ces premières approches au sein des instances de l'OTAN et la phase suivante a été engagée dans le cadre d'une coopération « ad hoc » entre les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l'Italie, rejoints par la France et la Norvège, pour une étude de faisabilité menée de 1996 à 1999. L'Italie et les Etats-Unis, qui avaient toujours exprimé le souhait d'acquérir et de mettre en oeuvre leur propre système, n'ont pas poursuivi le développement en commun. La Turquie s'est montrée intéressée par le projet, mais a finalement renoncé pour des raisons financières.

La réalisation du programme s'est donc poursuivie autour de trois pays , la France , la Norvège et le Royaume-Uni .

Le mémorandum d'entente couvrant les phases de conception , de fabrication et de soutien en service du projet, pour une durée totale de 29 ans , a été signé le 6 juin 2003 . Les financements prévus dans ce mémorandum couvrent tous les travaux qui doivent être effectués au cours de cette phase, dont les principaux sont les suivants :

- conception et réalisation du « NATO Submarine Rescue System » (NSRS) 2 ( * ) ;

- mise en place et maintien d'une capacité optimisée d'exploitation, incluant le soutien en service, du NSRS ;

- recherche de la compatibilité et de l'interopérabilité avec les systèmes de sauvetage exploités par d'autres pays.

Les coûts de réalisation et de soutien, qui se montent à 167,7 millions d'euros sur 29 ans , (aux conditions économiques de 2002) sont répartis à parts égales entre les trois pays partenaires, ce qui représente 55,9 millions d'euros pour la France 3 ( * ) .

Le 28 mai 2004 , un contrat de maîtrise d'oeuvre de 47 millions de livres (environ 70 millions d'euros) a été signé avec Rolls-Royce pour la conception, la réalisation, la mise en oeuvre et le soutien en service du NSRS sur une durée de sept ans après son admission au service actif.

Le NSRS est composé de deux systèmes distincts .

Le premier système concerne la préparation du sauvetage . Il est principalement constitué d'un véhicule téléopéré ( Remote operated vehicle - ROV) dont le but est d'arriver le premier sur le lieu de l'accident. Sur place, il doit expertiser la coque, permettre d'entrer en communication avec les survivants et surtout participer au ravitaillement des survivants par des conteneurs étanches transférés par les sas de sauvetage. Enfin, le robot aurait pour fonction de sauver le sous-marin de sauvetage en attachant une ligne pour le hisser à la surface.

La seconde partie concerne l'opération de sauvetage par elle même. Le sauvetage est réalisé par un sous-marin de poche qui vient se poser sur le dos du sous-marin accidenté pour évacuer les survivants. Long de 10 mètres pour un poids de 27 tonnes, il pourra être aérotransporté jusqu'à la zone concernée (par des avions de transport de type Hercules C-130 ou A400M) puis embarqué avec son équipage sur un navire , civil ou militaire, le plus adéquat, qui servira ainsi de «navire-mère» pour l'opération de sauvetage. Ce sous-marin de poche est associé à un portique de mise à l'eau et de récupération. Des caissons de décompression sont également déployés pour accueillir les rescapés et assurer leur retour à la pression atmosphérique. Le sous-marin de secours pourra évacuer jusqu'à 15 hommes d'équipage par rotation. Ce type d'engin n'est déployé qu'à l'occasion d'exercices ou d'accidents réels. Il doit être prêt à réagir sous douze heures à tout accident de sous-marin et devra arriver sur les lieux 72 heures au maximum après l'accident . Le système est conçu pour pouvoir intervenir par mer de force 6.

Rolls-Royce assure la maîtrise d'oeuvre du système. Bien qu'aucune répartition de la charge industrielle n'ait été fixée a priori, le consortium associe des industriels des trois pays. Le sous-marin de sauvetage et le robot d'intervention sont fabriqués dans le Yorkshire par la société Perry Slingsby, filiale du groupe de services pétroliers français Technip-Coflexip. Le système de mise à l'eau et de récupération est réalisé par la société Engineering Business installée à Newcastle. Les caissons de décompression sont fabriqués par Divex à Aberdeen. L'ensemble est complété par des moyens de poursuite et de positionnement fournis par Kongsberg Maritime en Norvège. L'ensemble des fournitures du groupe Coflexip (fabrication et soutien en service) représente un total de 12 millions de livres (18 millions d'euros).

Dès 2007, le NSRS constituera l'un des deux moyens de sauvetage sous-marin les plus performants au monde, avec le futur système américain, le Submarine Rescue Diving and Recompression System (SRDRS), dont la mise en service est prévue fin 2007. Compte-tenu du haut degré de disponibilité requise, pour respecter les délais d'alerte, une coordination devrait être mise en place avec les Etats-Unis de manière à ce que l'un des deux systèmes soit toujours en mesure d'intervenir et que les plages d'immobilisation pour entretien ne se superposent pas.

II. UN ÉQUIPEMENT TRINATIONAL MIS EN oeUVRE PAR UN OPÉRATEUR PRIVÉ

Novateur sur le plan technique, le programme NSRS l'est également par la solution retenue pour la gestion du nouvel équipement. S'il est désormais courant de prévoir, dans un même contrat, la construction d'un équipement et son soutien en service sur une longue durée, il l'est moins d'étendre la responsabilité du maître d'oeuvre, en l'espèce Rolls-Royce, à la mise en oeuvre de l'équipement lui-même. Le choix effectué par les trois pays partenaires s'apparente donc à un contrat de fourniture de service. On peut observer que l'US Navy a elle aussi recours à un partenariat public-privé pour la mise en oeuvre et le maintien en condition opérationnelle de son système futur, qui seront assurés par une société privée.

A. DES MODALITÉS ORIGINALES DE MISE EN OEUVRE

Le programme NSRS franchit désormais les dernières étapes préalables à sa mise en service.

Au mois d'avril 2006, le robot téléopéré a subi ses essais à la mer au large de Brest. Cette étape était essentielle pour valider le moyen de secours du sous-marin de sauvetage. La mise en service de la capacité initiale de sauvetage sera prononcée fin 2006 , quand le sous-marin de sauvetage aura été essayé à la mer en Ecosse. La mise en service opérationnelle de l'ensemble du système est prévue à la mi-2007 , après une phase de qualification opérationnelle.

Le NSRS sera basé à Faslane, en Ecosse , dans la base navale de la Clyde où sont stationnés les sous-marins de la Royal Navy. L'infrastructure elle-même fait partie du contrat de fourniture , Rolls-Royce ayant proposé cette localisation après avoir intégré dans son consortium Babcock Naval Service qui opère cette base navale sous contrat avec la Royal Navy. Comme les bâtiments appartiennent à cette dernière, seuls les coûts inhérents à l'occupation des locaux (eau, électricité, téléphone...) seront facturés au NSRS. Cette solution représente pour le projet une économie annuelle d'un million de livres, permettant en contrepartie de financer des entraînements de grande envergure et la participation à des exercices de sauvetage internationaux.

Sur le plan matériel, Rolls-Royce , avec le soutien de Babcock Naval Service et des industriels ayant réalisés les éléments du NSRS assurera l'entretien du système , le financement étant réparti à parts égales entre les trois pays partenaires.

Le NSRS est mis en oeuvre par Rolls-Royce et ses sous-traitants . Cela signifie notamment que l'équipage relève de l'opérateur privé , les pays membres se limitant à fournir des personnels et des moyens complémentaires pour les opérations de sauvetage proprement dites, notamment dans le domaine du commandement, des plongeurs et du soutien médical.

Les autorités des trois pays partenaires ont en revanche bien entendu pleine autorité sur les décisions relatives à l'utilisation du NSRS . Ces autorités sont :

- pour la France, la Marine nationale (Etat-major et commandement des forces sous-marines et de la force océanique stratégique) ;

- pour la Norvège, la Marine royale norvégienne ;

- pour le Royaume-Uni, la Marine royale britannique et la « Defence logistic organisation ».

Le mémorandum d'entente du 6 juin 2003, en cours d'amendement sur ce point, autorise a priori et de manière générale l' intervention du NSRS au profit des trois pays membres ainsi que des pays tiers avec lesquels les pays membres auraient collectivement établi des arrangements de sauvetage mutuel. Des discussions ont déjà été initiées avec les Etats-Unis à ce sujet. La mise en oeuvre du NSRS au profit d'autres pays tiers requiert l'autorisation préalable des pays membres.

Pour une opération de sauvetage au profit d'un pays membre du NSRS, les trois pays n'ont pas encore arrêté leur choix entre deux solutions : le partage des coûts d'intervention entre les trois pays membres ou leur imputation au pays demandeur. Pour une opération de sauvetage au profit d'un pays tiers participant à un arrangement de sauvetage mutuel, le dit pays tiers supportera les coûts d'intervention. Pour les autres pays tiers, un remboursement des coûts d'intervention sera demandé.

B. L'ACCORD DU 9 DÉCEMBRE 2003 SUR LA PROPRIÉTÉ JURIDIQUE DU NSRS

L'accord intergouvernemental du 9 décembre 2003 porte exclusivement sur les modalités de la propriété commune du NSRS entre la France, la Norvège et le Royaume-Uni. Il a été signé à Bruxelles par les représentants permanents des trois pays auprès du Conseil de l'Atlantique Nord.

L'article I stipule que les parties possèdent en commun et à parts égales tous les équipements qui composent le NSRS , à savoir le véhicule de sauvetage, le système de lancement et de récupération, la chambre de réception embarquée, les chambres de décompression embarquées et les équipements associés.

Pour chaque contrat à passer pour la conception, la réalisation ou le soutien en service des équipements du NSRS, les parties désigneront l'une d'entre elles en charge de la conclusion et de la gestion de ces contrats qui seront néanmoins soumis à l'approbation préalable des parties (article III). L'aliénation de tout ou partie des équipements, y compris au moyen d'un transfert de propriété à un tiers, est décidée par les parties (article V). En tout état de cause, toute décision relative à l'accord devra être prise à l'unanimité (article II).

L'article IV précise les modalités de règlement des dommages que le NSRS pourrait causer ou subir. Celles-ci sont inspirées des principes retenus par la convention du 19 juin 1951 sur le statut des forces de l'OTAN, dite « SOFA OTAN ». Chaque partie renonce à toute demande d'indemnité en cas de dommage causé par une autre partie. Chaque partie supporte la réparation des dommages qu'elle cause et, s'il n'est pas possible d'établir la responsabilité du dommage, la charge de réparation est répartie à parts égales entre les trois parties. Le même principe est retenu pour les dommages causés aux tiers. Quant aux indemnités reçues en réparation d'un dommage causé par un tiers elles sont réparties à parts égales entre les trois pays.

L'article VI règle les modalités de retrait d'une des parties. Il ne peut intervenir qu'après un préavis écrit d'au moins vingt-quatre mois. L'article VII permet pour sa part l'adhésion d'un nouveau pays au projet, après accord des trois Etats parties initiaux.

CONCLUSION

La sécurité des équipages constitue une préoccupation majeure pour notre marine. La question est particulièrement aiguë en ce qui concerne les équipages de sous-marins. Ceux-ci représentent environ 1 500 hommes affectés à nos 4 sous-marins nucléaires lanceurs d'engins et à nos 6 sous-marins nucléaires d'attaque.

La France ne disposait jusqu'à présent que de moyens d'assistance limités et prévoyait de recourir à des moyens d'évacuation américains pour les accidents survenant à grande profondeur.

L'entrée en service prochaine du NSRS apportera une amélioration notable de notre dispositif de secours. Ce système bénéficiera des technologies les plus modernes et pourra intervenir jusqu'à 610 mètres de profondeur. Stationné en Europe, il sera capable d'intervenir dans des délais extrêmement brefs, augmentant de ce fait les chances de survie des équipages. Enfin, il pourra être mis en oeuvre au profit de pays tiers dépourvus de moyens équivalents.

La coopération avec le Royaume-Uni et la Norvège a permis de partager les coûts, dans le cadre d'un projet novateur confiant le soutien et la mise en oeuvre du système à un opérateur privé.

Compte tenu de ces éléments, votre commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous demande d'adopter le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord conclu à Bruxelles le 9 décembre 2003 entre la France, la Norvège et le Royaume-Uni, relatif à la propriété commune d'un système de sauvetage sous-marin.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport lors de sa séance du 14 juin 2006.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. André Dulait a rappelé que M. Michel Barnier venait de remettre au Président de la Commission européenne un rapport préconisant la création d'une force européenne de protection civile appelée « Europ aid » et visant à instituer un dispositif européen d'assistance et de secours en cas de catastrophe naturelle. Il a estimé que la coopération engagée par la France, la Norvège et le Royaume-Uni, dans le domaine du sauvetage sous-marin, s'intégrait pleinement dans une telle démarche.

Mme Gisèle Gautier a demandé si la France avait du recourir, dans les dernières années, à un système de secours pour ses sous-marins. Elle a également souhaité des précisions sur le coût d'acquisition de ce nouveau système de secours pour la France.

M. Serge Vinçon a demandé si la profondeur maximale d'intervention du NSRS était en rapport avec la capacité de plongée de nos sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE).

M. André Boyer, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- la France n'a pas eu à recourir à des moyens de sauvetage dans les années récentes ; les naufrages de la Minerve en 1968 et de l'Eurydice en 1970 étaient intervenus à des profondeurs telles qu'ils ont entraîné la perte du sous-marin sans aucune possibilité de survie ni de sauvetage ; la capacité de plongée de nos SNLE n'est pas rendue publique, mais la possibilité de faire intervenir le NSRS dépend de la profondeur à laquelle le bâtiment serait échoué ;

- le coût d'acquisition du NSRS pour la France s'élève à 55,9 millions d'euros sur 29 ans, cette période comprenant 4 années de conception et de réalisation et 25 années de soutien en service.

La commission a alors adopté le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la France, la Norvège et le Royaume-Uni relatif à la propriété commune d'un système de sauvetage sous-marin .

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Article unique 4 ( * )

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement du Royaume de Norvège et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la propriété commune d'un système de sauvetage sous-marin, signé le 9 décembre 2003 à Bruxelles et dont le texte est annexé à la présente loi.

ANNEXE 1 - ETUDE D'IMPACT5 ( * )

Cet accord n'entraîne aucune modification de l'ordonnancement juridique interne.

- Etat de droit existant (droit national, droit communautaire) : sans objet pour cet accord.

- Effets de l'accord ou du traité sur l'ordonnancement juridique : aucun.

- Modifications à apporter au droit existant et délais de réalisation : aucun.

* 1 L'US Navy dispose également de deux cloches de sauvetage dont les capacités (immersion, nombre de rescapés, environnement) sont limitées. Ces cloches sont le seul système que les Etats-Unis aient mis en oeuvre avec succès pour le sauvetage d'un sous-marin. Ce sauvetage a eu lieu en 1939, le long des côtes de la Nouvelle Angleterre. L'USS Squalus avait sombré par 40 mètres de fond à cause d'une vanne bloquée ouverte. L'accident a fait 26 victimes et 33 rescapés ont pu être secourus.

* 2 Le NSRS n'est plus un programme OTAN, mais il a conservé son nom de baptême. En pratique, il reste ouvert à la participation d'autres pays de l'OTAN et, au sein de cette dernière, la Conférence des directeurs nationaux d'armement est régulièrement tenue informée de son avancement.

* 3 Les crédits correspondants sont inscrits au budget de la mission « défense » au titre du programme « équipement des forces » (action « équipement des forces navales »). Les premiers crédits ont été inscrits en 2003. Un montant de 5 millions d'euros en crédits de paiement était inscrit pour 2006, le montant des paiements prévus de 2006 à 2012 s'établissant à 16,7 millions d'euros.

* 4 Voir le texte annexé au document Sénat n° 325 (2005-2006)

* 5 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.

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