ANNEXES

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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

Mayotte

M. Adrien Giraud

sénateur de Mayotte

M. Soibahaddine Ibrahim

sénateur de Mayotte

M. Mansour Kamardine

député de Mayotte

Ministère de l'outre-mer

M. Stéphane Diémert

sous-directeur des affaires politiques, ministère de l'outre-mer

Saint-Martin
et Saint-Barthélemy

M. Pierre Aliotti

conseiller municipal, accompagné de M. Nicolas Maslach, conservateur de la réserve naturelle de Saint-Martin

M. Guillaume Arnell

conseiller général de la Guadeloupe

Mme Gabrielle Louis-Carabin

député de la Guadeloupe

Mme Lucette Michaux-Chevry

sénateur de la Guadeloupe

M. Albert Fleming

maire de Saint-Martin

M. Louis-Constant Fleming

conseiller général de la Guadeloupe, accompagné de MM. Bernard Castagnède et Gérard Larôme

M. Jacques Gillot

sénateur, président du conseil général de la Guadeloupe

M. Victorin Lurel

député, président du conseil régional de la Guadeloupe

M. Bruno Magras

maire de Saint-Barthélemy

M. Daniel Marsin

sénateur de la Guadeloupe

M. Louis Mussington

conseiller régional de la Guadeloupe

Saint-Pierre-et-Miquelon

M. Denis Detcheverry,

sénateur de Saint-Pierre-et-Miquelon, maire de Miquelon - Langlade

M. Gérard Grignon

député de Saint-Pierre-et-Miquelon

TAAF

M. Champon

préfet, administrateur supérieur des TAAF

M. Jean-Pierre Charpentier

président du conseil consultatif

COMPTE-RENDU DE L'AUDITION DE M. FRANÇOIS BAROIN, MINISTRE DE L'OUTRE-MER

Le mardi 3 octobre 2006, la commission a procédé à l' audition de M. François Baroin, ministre de l'outre-mer , sur le projet de loi organique n° 359 (2005-2006) et le projet de loi n° 360 (2005-2006) portant dispositions statutaires et institutionnelles relative à l'outre-mer.

M. François Baroin , ministre de l'outre-mer , a déclaré que le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire répondaient à trois objectifs : la mise en oeuvre des dispositions de la Constitution définissant le nouveau cadre institutionnel et statutaire de l'outre-mer au sein de la République, le respect de la volonté exprimée par les populations de Saint-Barthélemy et Saint-Martin consultées le 7 décembre 2003 sur l'organisation institutionnelle de ces deux îles, et le renforcement de l'État de droit outre-mer, par une clarification des statuts en vigueur et par l'amélioration de la démocratie locale.

S'agissant de l'application des dispositions spécifiques relatives à l'outre-mer adoptées lors de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, il a indiqué qu'elles visaient à moderniser nos institutions afin de renforcer la démocratie de proximité en responsabilisant davantage les élus locaux. Il a précisé que le nouveau cadre constitutionnel ainsi défini apportait aux collectivités françaises d'outre-mer deux garanties essentielles concernant, d'une part, leur appartenance à la République, solennellement consacrée par la désignation nominative de chacune d'elles au sein de la Constitution, et, d'autre part, le principe démocratique fondamental selon lequel aucune évolution statutaire ne peut être conduite sans le consentement des électeurs de la collectivité intéressée.

Il a expliqué que la révision du 28 mars 2003 avait également assoupli le cadre institutionnel et juridique régissant l'ensemble des collectivités d'outre-mer en offrant des possibilités d'adaptation inédites.

Présentant tout d'abord le cas des départements et régions d'outre-mer, il a déclaré que l'article 73 de la Constitution réaffirmait avec force le principe d'identité législative, tout en prévoyant que les lois et règlements pourraient faire l'objet d'adaptations aux caractéristiques et contraintes particulières de chaque collectivité. Il a précisé que cet article permettait aux départements et régions d'outre-mer d'adapter, après y avoir été habilités par la loi, les lois et règlements et de fixer eux-mêmes les règles applicables sur leur territoire dans un nombre limité de matières.

Rappelant que, dans les deux cas, l'habilitation préalable par le législateur ne pourrait intervenir qu'à la demande des assemblées locales, il a souligné que le Parlement demeurait libre de sa décision et pouvait n'accorder qu'une partie de l'habilitation demandée ou revenir sur une habilitation qu'il avait accordée. Il a précisé que comme dans le cas des ordonnances de l'article 38 de la Constitution, l'habilitation pourrait procéder d'un projet de loi spécifique, d'une proposition de loi ou encore d'un amendement à un texte en discussion.

Estimant que l'étendue de ces nouveaux pouvoirs, de nature quasi législative, accordés aux assemblées départementales et régionales appelait un cadre juridique précis, il a indiqué que l'article premier du projet de loi organique visait à prévoir à cette fin :

- que les délibérations relatives aux actes intervenant dans le domaine législatif ou réglementaire devraient être adoptées à la majorité absolue des membres de l'assemblée intéressée ;

- que s'exercerait sur les actes ainsi adoptés un contrôle juridictionnel renforcé assorti d'un effet suspensif, à la demande du représentant de l'État, comme dans le cadre de l'expérimentation de droit commun définie par la loi organique du 1 er août 2003 ;

- que le Parlement garderait toute liberté d'appréciation, non seulement lors de l'examen de la demande d'habilitation, mais aussi en raison de l'impossibilité de recourir au référendum décisionnel local sur les demandes d'habilitation comme sur les délibérations prises en application de l'habilitation.

M. François Baroin , ministre de l'outre-mer , a indiqué que dans le cadre de la mise en oeuvre de la Constitution, les projets de loi organique et ordinaire tendaient à harmoniser les statuts de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon et des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) avec les dispositions issues de la révision du 28 mars 2003, sans altérer les grands équilibres institutionnels de ces collectivités. Il a précisé que pour Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution, l'objectif était de reclasser en loi organique les dispositions statutaires figurant actuellement au sein de la loi ordinaire et d'apporter, à cette occasion, des précisions relatives aux règles de consultation des assemblées locales ainsi qu'aux modalités d'entrée en vigueur des lois et règlements.

Evoquant le statut de Mayotte, il a souligné que toute évolution institutionnelle de cette île supposerait que les électeurs, consultés à l'initiative du Président de la République, expriment leur consentement préalable. Soulignant que le législateur organique ne pouvait donc procéder unilatéralement à une telle réforme, il a considéré qu'il convenait seulement d'inscrire le statut de Mayotte dans le cadre de l'article 74 de la Constitution, dans la continuité de la loi du 11 juillet 2001. Il a indiqué que le projet de loi organique marquait toutefois pour Mayotte un nouveau pas vers le droit commun en faisant évoluer son régime législatif de la spécialité législative vers l'identité assortie d'exceptions qu'impose la situation de l'île en matière de fiscalité, de droit social, de régime foncier et de droit des étrangers.

Il a jugé que ce nouveau statut constituait une étape essentielle dans l'avancée de Mayotte vers le droit commun, conformément au souhait des élus locaux appelant à une évolution vers le statut de département d'outre-mer.

Il a ensuite rappelé que les deux projets de loi tendaient également à tirer les conséquences du choix massivement exprimé par les électeurs de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, lors des consultations du 7 décembre 2003, en faveur de l'accession de ces deux îles au statut de collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution.

Précisant que le Gouvernement s'était fidèlement inspiré, pour la préparation du projet de loi organique, des demandes formulées par les élus, M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, a souligné que la création de ces deux collectivités d'outre-mer était légitime. Il a par ailleurs considéré qu'elle était justifiée au regard de la géographie et de l'organisation administrative, puisque les îles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin ont depuis longtemps suivi un destin différent du reste de l'archipel guadeloupéen, auquel elles n'ont été rattachées que par commodité.

Estimant que les nouveaux statuts devraient permettre de régler enfin la délicate et très ancienne question fiscale, il a précisé que la compétence qui serait accordée en cette matière aux deux nouvelles collectivités ne constituait pas une exception mais reprenait un dispositif déjà appliqué dans toutes les autres collectivités régies par l'article 74 et en Nouvelle-Calédonie.

Il a affirmé que le projet de loi organique mettrait fin, en ce domaine, à l'incompréhension mutuelle et à l'inapplication effective de la législation en organisant une autonomie fiscale pleinement responsable et encadrée par une convention conclue entre chacune des deux futures collectivités d'outre-mer et l'État.

Rappelant que les habitants de Saint-Barthélemy avaient pu croire que leur régime fiscal coutumier était garanti par le traité franco-suédois de rétrocession signé en 1877, alors que l'administration fiscale ne s'intéressait pas à l'île, il a expliqué que la situation juridique était devenue intenable à partir des années 1980, après plusieurs décisions du Conseil d'État revenant sur l'exemption fiscale. Il a estimé qu'il convenait par conséquent de clarifier la situation, non pour assurer le maintien de privilèges, mais pour assurer le respect de la loi et l'exercice des responsabilités locales. Il a indiqué qu'à cet égard l'excellente collaboration entre le ministère de l'outre-mer et le ministère des finances au cours de la préparation du projet de loi organique constituait la meilleure preuve du caractère raisonnable, sérieux et légitime de cette démarche.

Il a affirmé que Saint-Barthélemy et Saint-Martin ne constitueraient pas des « paradis fiscaux », puisque l'État conserverait les compétences en matière de droit pénal, de procédure pénale, de droit bancaire et de droit des sociétés, et que l'ensemble des engagements internationaux en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux auxquels la France a adhéré, seraient applicables de plein droit, comme la réglementation communautaire, dans les deux îles. Il a en outre estimé qu'il n'y aurait pas de risque d'évasion fiscale au détriment de la métropole puisque les personnes ne résidant pas depuis au moins cinq ans à Saint-Barthélemy ou à Saint-Martin resteront soumises à la fiscalité définie par l'État. Il a précisé que ce dispositif préserverait également les deux îles de l'arrivée massive de nouveaux habitants qu'elles ne pourraient accueillir convenablement eu égard à l'exiguïté de leur superficie.

S'agissant de Saint-Martin, M. François Baroin , ministre de l'outre-mer , a considéré que le nouveau statut permettrait également à l'État de mieux assumer son rôle sur place, alors que sa présence ne répondait pas encore aujourd'hui à tous les besoins exprimés, notamment en matière de traitement de la délinquance ou face aux conséquences de l'immigration clandestine. Déclarant que l'évolution statutaire de l'île donnerait à l'État une souplesse accrue pour organiser ses services dans l'objectif d'une plus grande performance et d'une meilleure adaptation à la situation locale, il a jugé que la réforme ne signifierait pas un désengagement de l'État mais au contraire un renforcement de son implication.

Il a estimé que l'évolution statutaire constituerait pour les deux îles un appel à davantage de responsabilités. Rappelant que Saint-Martin rencontrait des difficultés particulières, il a jugé, citant M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, lors du déplacement de la mission d'information de la commission dans les îles du nord de la Guadeloupe, que cette évolution représentait un véritable défi pour des responsables locaux ayant entretenu avec l'État et avec la Guadeloupe une relation ambivalente. Il a indiqué que ces difficultés expliquaient d'ailleurs l'approche prudente et évolutive du projet de loi à l'égard du statut de cette île.

M. François Baroin , ministre de l'outre-mer , a enfin expliqué que les projets de loi organique et ordinaire, en actualisant des statuts parfois anciens, visaient à renforcer l'intelligibilité du droit applicable outre-mer et à apporter aux collectivités intéressées les mêmes garanties en matière de démocratie locale qu'aux collectivités de métropole en leur permettant de recourir à la consultation des électeurs et au référendum local.

Il a souligné le caractère paradoxal des deux projets de loi, dont la présentation quelque peu austère, conséquence de la codification, imposait au Parlement un exercice législatif difficile afin de rendre le droit de l'outre-mer plus lisible et plus moderne. Il a expliqué que le volume relatif des deux textes tenait à la nécessité d'assurer à chaque collectivité un statut propre sans renvoi inutile à d'autres textes, aux contraintes de la codification et à l'obligation de respecter le partage défini par la Constitution entre la loi organique et la loi ordinaire.

Saluant l'important travail réalisé au cours de l'été par le rapporteur de la commission des lois, il a exprimé la volonté d'aboutir à un texte prenant en compte non seulement des améliorations techniques, mais aussi les apports substantiels tirés des nombreuses auditions conduites, afin de recueillir le plus large accord possible.

M. Christian Cointat , rapporteur , rappelant que l'article 3 du projet de loi organique relatif à Mayotte reprenait pour l'essentiel les dispositions de la loi du 11 juillet 2001, a souhaité connaître l'état d'avancement des travaux relatifs à l'établissement d'un état civil, dont est chargée la commission créée par l'ordonnance du 8 mars 2000, ainsi que l'état d'avancement des travaux visant à établir le cadastre.

S'agissant des nouvelles collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, il a demandé au ministre de préciser comment y serait organisée la représentation de l'État, en indiquant si le Gouvernement avait l'intention de nommer un représentant exerçant ses fonctions auprès des deux îles.

Rappelant que lors de son déplacement en décembre 2004 dans les îles du nord, la mission d'information de la commission des lois avait relevé la nécessité d'assurer à Saint-Martin la présence d'un magistrat du parquet et de construire une maison d'arrêt afin de renforcer la lutte contre la délinquance, il s'est interrogé sur le renforcement des moyens alloués au fonctionnement de la justice dans la future collectivité.

Soulignant que Saint-Barthélemy et Saint-Martin appartiennent aujourd'hui à la région de la Guadeloupe, bénéficient de son statut de région ultrapériphérique (RUP) et par conséquent des aides des fonds structurels, il a confirmé que Saint-Barthélemy souhaiterait probablement accéder, après son évolution statutaire, au statut de pays et territoire d'outre-mer (PTOM). Il a jugé que la question du choix du statut européen convenant le mieux à chacune des deux nouvelles collectivités en fonction de leur situation économique et de leurs intérêts particuliers n'était pas anodine puisqu'elle entraînait des conséquences significatives en matière de régime fiscal et douanier et par rapport aux sources de financement européen dont elle pourrait bénéficier.

Il a souhaité savoir quelle serait la situation des deux nouvelles collectivités au regard de l'Union européenne. Il s'est en particulier interrogé sur la nécessité d'engager des négociations alors que devait s'ouvrir début 2007 une nouvelle période de programmation des fonds structurels européens.

Enfin, indiquant que l'article 8 du projet de loi ordinaire tendait à moderniser le régime des TAAF, il a considéré que certaines décisions de l'État pouvaient avoir des conséquences préjudiciables sur les ressources de ce territoire, qui assure son autonomie financière à hauteur de 80 %.

Soulignant que la création du registre international français, mettant progressivement fin au pavillon des Kerguelen, entraînait pour le territoire une perte estimée à près de 900.000 euros par an, il a souhaité savoir si le Gouvernement envisageait d'assurer à l'avenir la stabilité des ressources financières des TAAF.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer , a tout d'abord indiqué que la commission de révision de l'état civil instituée à Mayotte par l'ordonnance du 8 mars 2000 avait rendu, entre son installation en avril 2001 et le 31 décembre 2005, environ 33.000 décisions fixant les noms et prénoms d'autant de personnes soumises au statut civil de droit local. Il a expliqué que ces résultats, nettement inférieurs aux prévisions, étaient dus aux difficultés rencontrées par cette commission, en raison de la nécessité de développer un logiciel spécifique, devenu opérationnel en 2004, et du conflit social suscité à la fin de l'année 2005 par les rapporteurs de la commission souhaitant obtenir une revalorisation de leur rémunération. Il a cependant estimé que deux causes structurelles qui ne pouvaient être anticipées en 2000 étaient venues remettre en cause l'équilibre du projet :

- les délais d'examen des demandes par la commission, qui demeurent trop longs pour les particuliers ;

- la saisine directe de la commission par les personnes concernées, si bien que seuls certains événements familiaux comme le mariage ou la naissance d'un enfant conduisent les Mahorais, en l'absence de toute contrainte, à présenter une demande auprès d'elle.

Il a déclaré ne pas se satisfaire d'une situation confrontant les habitants de Mayotte à des difficultés dans leur vie quotidienne alors que la fixation de leur état civil, tout en garantissant le respect de leur statut particulier, constitue un droit fondamental reconnu notamment par le Pacte international des droits civils et politiques du 19 décembre 1966. Annonçant qu'il envisageait d'entreprendre prochainement à cet égard une réforme législative visant à apporter plus de souplesse et d'efficacité au dispositif, il a souligné qu'une telle réforme devait s'accompagner de moyens administratifs et budgétaires appropriés. Il a ensuite précisé que si la couverture de Mayotte par le plan cadastral était totalement achevée depuis la fin de l'année 2004, il fallait maintenant procéder à la prise en compte progressive du bâti, tout en assurant la maintenance du plan sur les premières communes cadastrées, ces deux éléments constituant un préalable indispensable à la mise en place d'une fiscalité directe locale.

S'agissant de l'organisation de la représentation de l'État à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, M. François Baroin, ministre de l'outre-mer , a indiqué que sous réserve des arbitrages définitifs, celle-ci devait être confiée à un préfet délégué rattaché au préfet de la Guadeloupe. Il a par ailleurs indiqué que le Gouvernement envisageait la création à Saint-Martin d'un tribunal de première instance regroupant les compétences des tribunaux de grande instance et des tribunaux d'instance. Annonçant qu'un juge des enfants devait très bientôt être désigné à Saint-Martin, il a par ailleurs déclaré avoir saisi le ministère de la justice d'une mission immobilière visant à évaluer les investissements nécessaires à la construction d'un palais de justice, d'une prison et d'un centre d'accueil des mineurs.

Considérant que le passage d'une collectivité relevant du régime défini à l'article 73 de la Constitution à celui défini par l'article 74 était avant tout une question d'organisation interne à l'État et donc de souveraineté, il a déclaré qu'il appartenait aux traités de fixer leur champ territorial d'application. Il a expliqué qu'une loi nationale ne pourrait par conséquent donner un statut de RUP à une collectivité d'outre-mer en la transformant en département d'outre-mer et qu'une partie d'un département d'outre-mer ne perdait pas son statut européen de RUP en devenant une collectivité d'outre-mer. Il a affirmé que l'article 299-2 du traité de Rome modifié par le traité d'Amsterdam, faisant référence aux départements d'outre-mer, devait être compris avec une acception géographique et non institutionnelle, embrassant le territoire soumis au statut départemental à la date de la signature du traité. Soulignant que seule une révision des traités pourrait définir une solution différente, il a souligné qu'il appartiendrait aux nouvelles collectivités d'outre-mer de respecter l'acquis communautaire, l'État devant s'en porter garant sous peine de s'exposer à une mise en cause par la commission européenne, par la voie de la procédure du recours en manquement.

Estimant cependant souhaitable que les deux nouvelles collectivités puissent bénéficier de la gestion guadeloupéenne des fonds structurels pour la période 2007-2013, M. François Baroin, ministre de l'outre-mer , a indiqué avoir demandé à ses services d'engager à cette fin des discussions avec la Commission européenne. Il a précisé que la décision de la Commission du 4 août 2006 définissant les régions éligibles aux fonds structurels, alors que Saint-Barthélemy et Saint-Martin faisaient encore partie de la région de la Guadeloupe, permettait de considérer que ces deux collectivités peuvent bénéficier des fonds européens au titre de l'objectif « convergence » pour la période 2007-2013.

Jugeant qu'il conviendrait ensuite de prendre des dispositions en fonction du choix des élus, il a expliqué que l'accession de Saint-Martin au statut de RUP à part entière supposerait des démarches visant à l'intégrer au sein de la liste des régions bénéficiant de l'objectif « convergence » et à modifier le traité. Il a souligné que si les élus de Saint-Martin souhaitaient en revanche mettre en place des dispositifs dérogatoires, conduisant à remettre en cause le statut de RUP au-delà des adaptations autorisées par l'article 299-2 du traité, il leur appartiendrait d'en tirer les conséquences en demandant l'accession de la collectivité au statut de PTOM, qui permettrait une harmonisation institutionnelle avec la partie néerlandaise de l'île. Rappelant qu'à cet égard, rien ne pourrait être décidé sans l'accord de l'État et des 24 partenaires de la France au sein de l'Union européenne, il a jugé constructif le dialogue entretenu avec la Commission européenne.

S'agissant de la situation des Terres australes antarctiques françaises, il a rappelé qu'en leur conférant l'autonomie administrative et financière par la loi de 1955, l'État avait entendu leur garantir une indépendance justifiée par leur statut de territoire d'outre-mer. Il a indiqué que si les TAAF disposaient de ressources propres, l'État leur versait néanmoins une subvention de fonctionnement d'un montant de 5,2 millions d'euros, représentant environ 20 % des ressources du territoire, à laquelle s'ajoutait une subvention d'investissement de 260.000 à 300.000 euros par an. Expliquant que la loi du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français, en supprimant le registre des Kerguelen, visait à enrayer le déclin de la marine marchande française en rendant plus attrayante l'immatriculation des navires sous pavillon français, il a déclaré que le maintien de deux registres distincts aux objectifs contraires n'était pas envisageable.

Considérant que la création du registre international français privait effectivement l'État à compter du 1er janvier 2007 d'environ 900.000 euros de recettes, soit moins de 3 % des recettes ordinaires du territoire, il a affirmé que l'État envisageait la compensation progressive de ces pertes.

Rappelant que la gestion des droits de pêche était réglementée par la loi du 8 juin 1966 sur l'exercice de la pêche maritime et l'exploitation des produits de la mer, soumettant à autorisation toute activité de pêche et de chasse aux animaux marins ou toute exploitation des produits de la mer dans les zones économiques exclusives, il a expliqué que la pêche s'inscrivait également dans le cadre de la réglementation internationale puisque la France appartenait à la commission pour la conservation de la faune et de la flore marine de l'Antarctique (CCAMLR).

Soulignant que la fixation de totaux admissibles de capture (TAC) et leur répartition en quotas établis après avis du Muséum national d'histoire naturelle visait à assurer une exploitation maîtrisée des ressources halieutiques et respectueuses de l'environnement marin ainsi qu'à préserver l'équilibre économique des pêcheries, M. François Baroin, ministre de l'outre-mer , a indiqué que la reconstitution des stocks ne pouvait être envisagée qu'à moyen terme, les quotas étant fixés de façon à concilier la préservation des espèces, les intérêts sociaux économiques et les finances du territoire. Il a enfin souligné les enjeux de la présence française dans ces zones, en particulier à des fins de recherches et de préservation de la biodiversité. Déclarant avoir engagé une mission de réflexion sur la gestion des TAAF et sur les moyens qui leur sont alloués en concertation avec les ministères et les différents organismes chargés d'y intervenir, il a précisé que les conclusions de ces travaux seraient communiquées au Parlement à la faveur de la discussion du projet de loi.

Après avoir rappelé qu'il avait mené en 1997 une mission d'information sur le régime fiscal de Saint-Barthélemy et que la mission avait constaté sur place des dérives liées aux règles fiscales dérogatoires, M. Michel Dreyfus-Schmidt s'est élevé contre les dispositions des projets de loi tendant à créer un statut particulier pour les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a constaté que la révision constitutionnelle relative à l'organisation décentralisée de la République menée en 2003 permettait d'élaborer un statut particulier pour les deux collectivités en cohérence avec leur éloignement de la Guadeloupe et leurs particularités.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer , a estimé que la définition d'un statut particulier pour Saint-Barthélemy et Saint-Martin était possible et attendue par les populations locales. Il a indiqué que l'État s'était longtemps désintéressé des deux îles et que la réforme proposée permettrait une amélioration de sa présence. Il a constaté que les matières législatives sensibles, telles que le droit pénal ou le droit des sociétés demeureraient de la compétence de l'État et que les engagements internationaux de la France continueraient à s'appliquer dans les deux collectivités, évitant ainsi la constitution de « paradis fiscaux ».

En réponse à une question de M. José Balarello , il a précisé que l'État conserverait la maîtrise de la délivrance des licences autorisant l'ouverture de casinos dans les deux collectivités. Il a souligné que le dispositif proposé constituait une avancée en termes de transparence et de rigueur des politiques publiques menées à Saint-Barthélemy et Saint-Martin.

M. Bernard Frimat et Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ont interrogé le ministre sur le calendrier d'examen parlementaire du projet de loi constitutionnelle relatif au corps électoral de Nouvelle-Calédonie.

M. François Baroin, ministre de l'outre-mer , a rappelé que ce projet de loi avait été présenté au conseil des ministres en mars dernier et a précisé qu'il serait examiné par le Parlement avant la fin de la session, conformément aux engagements du Président de la République.

Marquant sa désapprobation à l'encontre des propos tenus par M. Michel Dreyfus-Schmidt, M. Gaston Flosse a estimé que la réforme examinée permettrait à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin de rester dans la République.

Remerciant le ministre pour son exposé, M. Georges Othily s'est interrogé sur la possibilité de résoudre les problèmes de continuité territoriale et d'ambiguïté du régime juridique de la navigation fluviale en Guyane, par voie d'amendements aux projets de loi. Il a également exprimé le souhait de modifier les modalités d'élection des députés européens outre-mer, issues de la réforme électorale de 2003, en rappelant que l'application de la représentation proportionnelle dans une circonscription unique représentant l'outre-mer pour l'élection de trois députés européens avait entraîné de réelles inégalités de représentation. Il a indiqué qu'il comptait aussi proposer l'adaptation à la Guyane de l'article 10 de la loi relative à la prévention de la délinquance en cours de discussion, afin de renforcer les prérogatives du juge administratif pour faire cesser les occupations illégales de terrains privés.

Après avoir noté que les questions posées n'étaient pas directement liées aux projets de loi, M. François Baroin, ministre de l'outre-mer , a indiqué que la résolution des difficultés de continuité territoriale en Guyane nécessitait l'accord de la Commission européenne, car elle imposait des obligations de service public à des entreprises sur un marché concurrentiel, et que l'avis de cette dernière avait été sollicité.

Partageant le constat de M. Georges Othily sur les difficultés juridiques posées par la navigation fluviale en Guyane, il a indiqué qu'une réflexion était en cours au ministère, mais que ces difficultés ne pourraient être résolues par voie d'amendement dans les textes examinés, car ces dispositions risqueraient d'apparaître comme des « cavaliers » législatifs. Il a précisé que toute modification des modalités d'élection des députés européens outre-mer nécessitait par ailleurs une large consultation des élus locaux et de la représentation nationale.

Enfin, il a considéré qu'un amendement pourrait habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires au renforcement en Guyane du dispositif de l'article 10 de la loi relative à la prévention de la délinquance.

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