Rapport n° 59 (2006-2007) de M. Dominique LECLERC , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 8 novembre 2006

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N° 59

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 novembre 2006

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Dominique LECLERC,

Sénateur.

Tome IV :

Assurance vieillesse

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Claire-Lise Campion, Valérie Létard, MM. Roland Muzeau, Bernard Seillier, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Daniel Bernardet, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, M. Claude Domeizel, Mme Bernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Annie Jarraud-Vergnolle, Christiane Kammermann, MM. Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mmes Catherine Procaccia, Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, Patricia Schillinger, Esther Sittler, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, François Vendasi, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 e législ . ) : 3362 , 3384, 3388 et T.A. 613

Sénat : 51 et 60 (2006-2007)

Sécurité sociale.


Les propositions de la commission des affaires sociales
pour la branche vieillesse en 2007

Afin de préparer le rendez-vous de 2008 sur la réforme des retraites, la commission a adopté, sur proposition de son rapporteur Dominique Leclerc, dix amendements sur la partie consacrée à la branche vieillesse par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. Ces amendements poursuivent quatre objectifs principaux :

Sécuriser les prochains adossements de régimes spéciaux de retraite sur le régime général en renforçant l'effectivité des principes de transparence et de neutralité qui s'imposent à ces opérations :

- accorder à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav) une clause de révision figurant dans chaque convention d'adossement, similaire à celle obtenue par les régimes complémentaires Agirc et Arrco lors de l'adossement du régime des industries électriques et gazières de 2005 ;

- rendre obligatoire la consultation du conseil d'administration de la Cnav sur les modalités de chaque adossement pour qu'il s'assure du respect du principe de neutralité financière à l'égard de ses assurés sociaux.

Préserver l'esprit de la réforme des retraites de 2003 :

- mettre un terme à l'utilisation, par certains assurés sociaux, du mécanisme de rachat d'années d'études et d'années incomplètes de cotisations pour bénéficier du dispositif des carrières longues. En effet, ces rachats interviennent dans des conditions financières qui pénalisent le régime général ;

- conforter la mise en extinction, d'ici à 2010, des possibilités de mise à la retraite d'office avant soixante-cinq ans. La réforme des retraites de 2003 a été sur ce point vidée de sa substance par les 122 accords de branche signés par les partenaires sociaux.

Favoriser l'emploi des seniors et décourager les dispositifs de préretraite :

- porter à 200 % du Smic le plafond de cumul emploi-retraite applicable aux assurés du régime général ;

- assujettir désormais l'ensemble des préretraites « maison » à la contribution créée en 2003 en faveur du fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Faire de la prospective une priorité de l'assurance vieillesse :

- publier chaque année, à partir de 2008, dans les rapports annuels des caisses de retraite, une estimation sur trente ans de l'évolution de leurs équilibres financiers ;

- renforcer la représentation des parlementaires au sein du Conseil d'orientation des retraites et introduire la possibilité d'y nommer des actuaires.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Après une longue période de statu quo , la réforme des retraites de 2003 a conçu un mécanisme régulier de « clauses de rendez-vous », prévu pour intervenir tous les quatre ans à partir de 2008. Son objectif est d'améliorer le pilotage de l'assurance vieillesse. Ce mode de gouvernance s'inspire de l'exemple de nombreux pays européens qui ont su, bien mieux que la France, faire évoluer leur système de protection sociale par des adaptations successives.

Compte tenu de la poursuite du processus de vieillissement de la population, chacun sait bien qu'il sera indispensable dans deux ans de prendre de nouvelles mesures pour garantir l'avenir du système de retraite par répartition. Mais pas plus que la précédente, la prochaine réforme des retraites ne sera un exercice facile à réaliser. Il convient de s'y préparer dès maintenant.

L'assurance vieillesse se situe aujourd'hui entre deux réformes. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2007 ne constitue pas pour autant un simple texte de transition. Il comporte notamment plusieurs mesures importantes visant à accroître le taux d'activité des seniors. S'y ajoute une disposition concernant les assurés sociaux ayant déjà atteint l'âge de soixante ans et souhaitant prolonger leur activité professionnelle. Le Gouvernement veut leur garantir qu'ils pourront partir en retraite demain, tout en continuant à bénéficier des conditions de liquidation d'aujourd'hui. Le débat qui s'ouvre au Sénat fournira également l'occasion d'apprécier la situation de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav), dont le déficit s'est nettement creusé au cours des deux dernières années.

Dans ce contexte, votre commission entend contribuer à animer le débat public sur les retraites. Et, comme elle a pris l'habitude de le faire depuis le début de cette législature, elle souhaite continuer à agir comme une force de propositions, en se fondant sur quelques principes simples :

- la nécessité de garantir l'équilibre financier des régimes de retraite ;

- la recherche d'une plus grande justice entre les différentes catégories d'assurés sociaux ;

- le souci de l'équité entre les générations, notamment en faveur des jeunes actifs ;

- la promotion de la transparence dans le fonctionnement très complexe de l'assurance vieillesse ;

- la nécessité d'améliorer le pilotage et la gouvernance des régimes de retraite, en particulier dans la fonction publique d'Etat ;

- la simplification des transferts financiers des mécanismes de compensation démographique et la garantie, pour les assurés sociaux du secteur privé, de la neutralité des opérations d'adossement de régimes spéciaux.

Votre commission se félicite d'ailleurs du fait que plusieurs des propositions qu'elle a formulées à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 soient entrées en vigueur. C'est le cas en particulier des garanties supplémentaires de neutralité et de transparence apportées aux opérations d'adossements de régimes spéciaux. A cela, s'ajoutent les dispositions prévoyant respectivement la mise en extinction des possibilités de mise à la retraite d'office avant soixante-cinq ans, ainsi que l'élargissement des modalités du cumul entre un emploi et une retraite pour les assurés sociaux du secteur privé. Ces mesures ont d'abord inspiré le plan national d'action concerté en faveur des seniors, avant d'être reprises par le Gouvernement dans le cadre des articles 54 et 55 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

La question qui se posera dans deux ans sera celle du choix entre un ajustement à court terme ou une réforme structurelle des retraites sur une perspective de long terme. Le principe d'équité entre les générations devrait à lui seul nous conduire à opter en faveur de la solution la plus ambitieuse. Notre système d'assurance vieillesse est en effet menacé par un choc démographique dont nous ne connaissons encore que les prémices. Si les réformes engagées en 1993 et 2003 n'étaient pas poursuivies, de nouvelles inégalités viendraient s'ajouter à celles déjà importantes existant entre les assurés sociaux des secteurs public et privé, sans même parler des ressortissants des régimes spéciaux.

Dans la perspective de la clause de rendez-vous de 2008, il conviendra aussi de traiter en priorité les problèmes de gouvernance de l'assurance vieillesse et de se demander si, comme l'Allemagne en 1992 et la Suède en 1998, notre pays n'aurait pas intérêt à abandonner le système des annuités et à généraliser aux régimes de base le recours à la technique de gestion des points.

I. UN DÉFICIT DE L'ASSURANCE VIEILLESSE EN AUGMENTATION MALGRÉ LA RÉFORME DE 2003

A. UNE DÉGRADATION DES COMPTES PLUS RAPIDE QU'INITIALEMENT ENVISAGÉE

1. Le creusement du déficit de la branche vieillesse

Depuis 2003, le rythme de croissance des dépenses de la Cnav est systématiquement supérieur à celui de ses recettes. Il en résulte logiquement une dégradation sensible de ses équilibres financiers. Son déficit devrait ainsi atteindre 2,36 milliards d'euros en 2006 , avant de s'élever à 3,55 milliards d'euros en 2007 , soit l'équivalent de respectivement 2,8 % et 4 % des prestations versées. Ces niveaux apparaissent d'autant plus significatifs que la Cnav est dépourvue de réserves importantes, ses excédents passés ayant été affectés au fonds de réserve des retraites (FRR), et que le fonds de solidarité vieillesse (FSV) lui doit au total 5,6 milliards d'euros de retards de paiements.

Comptes de la Cnav

(en millions d'euros)

Cnav

2003

%

2004

%

2005

%

2006

%

2007

%

Charges nettes

71.490,7

5,1

74.979

4,9

80.796

7,8

84.796

3,7

88.978

4,9

Produits nets

72.436,5

3,9

75.235

3,9

78.919

4,9

82.435

3,2

85.428

3,6

Résultat

945,9

255

-1.876

- 2.361

- 3.550

Source : Direction de la sécurité sociale - Commission des comptes de la sécurité sociale - Septembre 2006

Cette détérioration des comptes de la branche vieillesse intervient alors même que la situation financière des trois autres branches s'améliore nettement. Sur la base des estimations publiées par la commission des comptes de la sécurité sociale en septembre 2006, le déficit cumulé de la maladie, de la famille et des accidents du travail, qui est déjà revenu de 12,1 milliards à 9,7 milliards d'euros entre 2004 et 2005, ne serait plus que de 7,3 milliards en 2006 et de 5,8 milliards en 2007. La dégradation des équilibres des régimes de retraite « absorbe » donc une bonne partie de l'impact positif du redressement des autres branches.

Comme l'a souligné la présidente de la Cnav 1 ( * ) , ce déficit est de nature structurelle, pour des raisons essentiellement démographiques. Mais le déséquilibre de la vieillesse diffère radicalement de celui des autres branches de la sécurité sociale. Contrairement au risque maladie pour lequel il est possible d'agir sur les dépenses et de pratiquer des déremboursements, ou à la branche famille pour laquelle il est possible de redéployer les prestations, les retraites sont caractérisées par une grande inertie. Outre l'attachement légitime des assurés sociaux au niveau de prestations, il est heureusement impossible sur le plan juridique de revenir sur les pensions déjà liquidées. Dès lors, le déficit de la branche vieillesse apparaît sans doute comme le plus difficile à résorber dans le champ de la protection sociale, pour des raisons tant financières que politiques et sociales.

Evolution des grands équilibres de la Cnav sur la période 2006-2010

(en milliards d'euros courants)

2006

2007

2008

2009

2010

Solde de la Cnav
(PLFSS 2007 - Annexe B scénario économique bas)

- 2,4

- 3,5

- 4,5

- 5,1

- 5,1

Solde de la Cnav
(PLFSS 2007 - Annexe B scénario économique haut)

- 1,9

- 2,4

- 3,5

- 4,1

- 3,8

Il convient en outre de souligner que régime général est sans doute arrivé à maturité, dans la mesure où les plus jeunes cotisants à sa création en 1945, âgés alors de quinze à vingt ans, arriveront dans quelques années au terme de leur retraite. Et comme le soulignent les actuaires, on ne peut dans ce type de situation qu'espérer ralentir ou enrayer la tendance à l'aggravation, mais pas l'inverser. Au total, la croissance du déséquilibre de l'assurance vieillesse est un phénomène relativement lent mais inexorable. Compte tenu, à partir de cette année, du départ en retraite des trente classes d'âge du baby-boom, il est même possible que la Cnav ne soit plus jamais à l'équilibre dans un avenir prévisible.

2. Les appréciations de la Cour des comptes sur la situation du fonds de solidarité vieillesse

Le fonds de solidarité vieillesse (FSV) a pour mission de « concourir au financement des régimes de base » d'assurance vieillesse en leur remboursant les dépenses ne relevant pas de l'effort contributif des assurés. Les dépenses du FSV se répartissent ainsi en trois blocs :

- 19 % au titre des prestations du minimum vieillesse ;

- 34 % pour le remboursement des majorations de pension pour conjoint et pour enfant à charge ;

- 56 % au titre du remboursement aux régimes du manque à gagner résultant de la validation des périodes non travaillées pour les chômeurs préretraités, les volontaires du service national et les anciens combattants.

Longtemps prospère en raison d'une évolution de ses recettes plus favorable que celle de ses dépenses, le FSV a été durement touché par certaines mesures prises sous la précédente législature. Plusieurs recettes lui ont été distraites, afin notamment d'assurer le financement direct ou indirect du Forec 2 ( * ) ou de l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa). Parallèlement, de nouvelles dépenses lui ont été affectées, dont le remboursement de la dette de l'Etat à l'égard des régimes Agirc-Arrco, les allocations de cessation anticipée d'activité (CATS) et les allocations de fin de formation (AFF) mises en place dans le cadre du plan d'aide au retour à l'emploi (Pare). Le FSV connaît ainsi depuis 2001 une situation déficitaire qui a d'abord absorbé la totalité des réserves accumulées depuis sa création en 1993 avant de déboucher sur une accumulation de dettes à un rythme très rapide.

En conséquence, la trésorerie du fonds apparaît aujourd'hui très tendue. Dans la mesure où il n'a pas le droit d'emprunter, le FSV ne peut faire face à toutes ses échéances et est conduit à moduler ou différer le paiement des montants dus (acomptes ou régularisations) aux différents régimes dans le cadre des dispositions conventionnelles conclues avec ces derniers. La Cnav, qui gère le principal régime financé par le FSV, supporte principalement les conséquences de cette situation à hauteur de 5,6 milliards d'euros.

Les comptes du FSV

(en millions d'euros)

2001

2002

2003

2004

2005

2006*

2007*

Recettes

11.566

11.052

12.474

13.363

12.664

13.480

13.958

dont CSG

9.719

9.078

9.297

9.562

9.922

10.503

10.875

dont prélèvement social 2 %

383

350

350

382

388

482

487

dont droits sur les boissons

-

-

-

-

-

-

dont C3S

551

567

921

1.300

200

2400

240

dont versements Cnaf

478

1.004

1.875

1.965

2.087

189

2.290

dont autres et produits financiers

434

15

9

154

67

66

66

Dépenses

11.562

12.405

13.408

14.002

14.668

14.696

14.549

Solde

- 86

- 1.353

- 934

- 639

- 2.005

- 1.216

- 591

Solde cumulé

1.517

- 123

- 1.057

- 1.696

- 3.701

- 4.917

- 5.508

Versement au fonds de réserve pour les retraites

287

-

-

-

-

-

-

( * ) prévisions

Source : CCSS septembre 2006

Dans ses deux rapports de septembre 2005 et de septembre 2006 sur la sécurité sociale, la Cour des comptes a successivement dénoncé le caractère « non conforme au droit » de la situation actuelle, et le fait que « les pouvoirs publics n'ont, en aucune manière, pris la mesure de ce problème ». En l'absence de mesure de redressement, les magistrats financiers ont ainsi préconisé la suppression du FSV et le provisionnement par la Cnav de sa créance, évaluée à 5,6 milliards d'euros.

Prospectives financières du FSV (2006/2009)

(en milliards d'euros)

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Recettes

12,6

13,4

13,9

14,2

14,8

15,4

Dépenses

14,6

14,6

14,5

14,6

14,8

15,4

Solde

- 2,0

- 1,2

- 0,6

- 0,4

0,0

0,0

Source : annexe PLFSS 2007

La situation du FSV demeure donc très délicate, mais ses équilibres financiers se sont nettement améliorés de façon spontanée au cours des derniers mois, en raison du retournement de la conjoncture économique. Ainsi, contrairement à l'année dernière, les prévisions quadriennales du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoient une réduction du déficit, voire un retour à l'équilibre à l'horizon 2009/2010. Cette hypothèse est jugée « optimiste, pour ne pas dire irréaliste » par le premier président de la Cour des comptes 3 ( * ) , mais l'inversion de tendance semble acquise grâce à l'amélioration du marché de l'emploi.

3. Le calendrier et les équilibres financiers de la réforme des retraites de 2003

Outre les travaux du Conseil d'orientation des retraites (COR), plusieurs publications récentes permettent de commencer à apprécier les effets de la loi du 21 août 2003. C'est le cas notamment d'un document de travail 4 ( * ) publié par l'Institut national des études démographiques (Ined) qui estime l'impact à moyen et long terme de la réforme de 2003 à environ un tiers de celui de la réforme de 1993.

Les effets de la réforme de 2003

En s'intéressant particulièrement à l'évolution de l'âge de départ en retraite, les auteurs ont mis en évidence une montée en charge progressive mais relativement rapide, classe d'âge après classe d'âge, des effets de la réforme de 2003. Son impact apparaît particulièrement concentré sur les générations d'assurés sociaux les plus récentes qui sont de loin les plus concernées. Les simulations réalisées montrent en effet que pour les classes d'âge 1940 à 1944, quasiment aucun individu ne sera obligé de décaler son âge de départ à la retraite et que, pour les rares personnes se trouvant dans cette situation, l'impact sera minime (36 jours). En revanche, près de 25 % des assurés sociaux des générations 1955 à 1964 se trouveront dans l'obligation de cesser leur activité en moyenne dix-huit mois plus tard qu'ils ne l'auraient fait avant l'entrée en vigueur de la loi du 21 août 2003.

Toutefois, si l'on considère l'ensemble des personnes composant ces classes d'âges successives, et pas uniquement la proportion d'entre elles effectivement touchée par les effets de la réforme, le décalage moyen de l'âge de départ en retraite apparaît singulièrement faible : 0,1 année pour les générations 1945 à 1954, 0,4 année pour les personnes nées entre 1955 et 1964, et 0,3  année pour le groupe 1965 à 1970.

Modification des comportements de départ en retraite
et âge moyen à la liquidation après la réforme de 2003

( en écart au scénario de référence)

Ensemble

Hommes

Femmes

Total

Personnes concernées
par un décalage

Total

Personnes concernées
par un décalage

Total

Personnes concernées
par un décalage

Générations

Décalage
moyen

%

Décalage
(en années)

Décalage moyen

%

Décalage
(en années)

Décalage
moyen

%

Décalage
(en années)

40 à 44 ans

0,0

0

0,1

0,0

0

0,1

0,0

0

0,0

45 à 54 ans

0,1

10

0,8

0,1

11

0,9

0,1

8

0,8

55 à 64 ans

0,4

25

1,5

0,5

29

1,6

0,3

22

1,3

65 à 70 ans(*)

0,3

23

1,4

0,4

26

1,4

0,3

20

1,3

(*) Départs observés jusqu'en 2030 .

Note de lecture : l'âge moyen de départ à la retraite après réforme 2003 est supérieur à 0,1 an pour les retraités des générations 1945 à 1954 chez les hommes ; et si on ne s'intéresse qu'aux personnes concernées par un décalage, le report est de 0,9.

Source : Modèle de microsimulation Artémis

Selon cette étude, dont les résultats s'appuient sur le modèle de simulation Artémis de la Cnav, les mesures prises en 1993 auraient in fine pour conséquence une baisse du nombre de retraités de 2 % à l'horizon 2030 (17,7 millions au lieu de 18,1 millions). Les dispositions de la loi du 21 août 2003 devraient réduire encore ce chiffre d'environ 400.000 personnes, soit une diminution de 2 % supplémentaires. Néanmoins, l'effet conjugué sur ce point des deux réformes serait relativement faible dans la mesure où la progression du nombre des retraités, attendue entre 2003 et 2030, atteindrait encore 82 % (contre + 86,6 % si les mesures de l'été 1993 n'avaient pas été prises).

Sans la réforme Balladur, la croissance de la pension moyenne aurait été de 38 % entre 2003 et 2030. Les mesures décidées en 1993 ont ramené ce rythme de progression à 17 % et la réforme Fillon de 2003 à 9 %. Cela signifie que le taux de croissance annuel des pensions a fortement ralenti : 1,3 % avant 1993, 0,6 % après 1993 et seulement 0,3 % après 2003. Il convient néanmoins de souligner que les retraites du régime général ne diminuent pas en termes absolus. Par ailleurs, les classes d'âge arrivant aujourd'hui à l'âge de la retraite ont bénéficié en moyenne de meilleures carrières professionnelles que leurs aînés si bien que, malgré l'entrée en vigueur des mesures d'économies prises depuis dix ans, le niveau moyen des pensions liquidées continue à s'accroître.

Les auteurs de l'étude estiment que le gain financier pour le régime général correspondant aux mesures de redressement prises à l'été 1993, s'élèverait, à l'horizon 2030, à 27 milliards d'euros par an. Cela correspond en termes relatifs à une diminution de 23 %, par rapport au scénario théorique de référence fondé sur les règles antérieures à 1993. L'allongement de la durée de cotisation et le changement des modalités de proratisation décidés dans le cadre de la réforme de 2003 permettraient une économie supplémentaire de 9 % en termes relatifs, soit près de 10 milliards d'euros par an en 2030. En définitive, les dépenses de la Cnav à l'horizon 2030 seraient réduites au total de 1,6 point de PIB, dont 1,2 point imputable aux mesures prises en 1993 et 0,4 point aux dispositions de la loi du 21 août 2003.

Le schéma de financement de la réforme de 2003

L'équilibre de la loi du 21 août 2003 reposait initialement sur une combinaison de mesures de redressement accompagnées de nombreuses dépenses nouvelles destinées à rendre la réforme acceptable pour les assurés sociaux. Dès 2004, ces contreparties sociales ont représenté des charges certaines et importantes, tandis que les sources d'économies apparaissaient plus aléatoires tout en s'inscrivant sur un horizon à moyen et long terme. Par exemple, la montée en charge de la décote dans la fonction publique ne sera pas achevée avant 2015. On remarquera aussi que certaines de ces dépenses, notamment celles imputables à la mesure des carrières longues, se sont révélées beaucoup plus élevées que prévu.

Contrairement à ce qui été trop souvent affirmé à tort, la réforme des retraites de 2003 était en réalité graduelle, mesurée et généreuse. De fait, trois mesures seulement correspondent, à elles seules, à la quasi-totalité de la réduction espérée du déficit de l'assurance vieillesse : le prolongement de la durée d'activité des assurés sociaux, la suppression de la proratisation dans le mode de calcul des pensions du régime général et l'alignement, avec seize ans de retard, du mode d'indexation des pensions du secteur public sur celui du secteur privé.

Dès les débats parlementaires des mois de juin et de juillet 2003, on estimait qu'une partie seulement des besoins de financement seraient couverts : un tiers du déficit prévisionnel à l'horizon 2020 pour le secteur privé, près de la moitié pour les régimes du secteur public. Le « bouclage » de l'ensemble devait être assuré par le recours aux excédents futurs de l'assurance chômage. Dans la lignée des débats de la législature précédente, on espérait alors une nette amélioration des comptes de l'Unedic à la faveur du retournement démographique consécutif aux départs en retraite massifs des classes d'âge du baby-boom.

Or, l'Unedic a accumulé plus de 13 milliards d'euros de déficits au cours des dernières années. Ce montant très élevé devrait toutefois commencer à se résorber à partir de cette année. Avec une hypothèse prudente de croissance du PIB de 1,9 % en 2006 et 2 % en 2007, le résultat financier de l'assurance chômage pourrait en effet présenter un excédent de 245 millions d'euros en 2006 et de 2,718 milliards d'euros en 2007, voire de 5,1 milliards d'euros en 2010.

Evolution des résultats financiers de l'assurance chômage depuis 2003

( en millions d'euros)

Situation financière

2003

2004

2005

2006 (P)

2007 (E)

2008 (E)

Recettes

25.784

26.732

27.695

29.267

30.393

31.258

Dépenses

30.067

31.152

30.887

29.022

27.675

26.102

Résultats de l'année (R-D)

- 4.282

- 4.420

- 3.192

245

2.718

5.156

Situation financière au 31/12

- 5.836

- 10.260

- 13.452

- 13.207

- 10.489

- 5.333

(P) : prévisions Source : Unedic

(E) : estimations

Malgré cette nette amélioration liée au retournement de la conjoncture économique, il semble néanmoins probable que l'Unedic ne sera pas avant longtemps en situation de transférer d'importants excédents à la branche vieillesse. La dette actuelle devra d'abord être remboursée. Et il est possible que les partenaires sociaux souhaitent profiter de ces excédents pour améliorer l'indemnisation des chômeurs.

Enfin, le scénario d'un allongement de la durée d'activité et d'un report progressif de l'âge moyen de départ en retraite des assurés sociaux ne s'est pas encore réalisé, même si le Gouvernement a pris cette année d'importantes mesures en ce sens.

B. L'INCIDENCE DES FACTEURS DÉMOGRAPHIQUES

1. Le départ en retraite des baby-boomers

Le choc démographique que représentent les départs en retraite des nombreux baby-boomers d'après guerre, constitue le lointain écho de la « montée des jeunes » évoquée par Alfred Sauvy dans les années 50 et 60. Ce phénomène est d'autant plus brutal qu'il intervient après le répit fourni à l'assurance vieillesse par les classes creuses nées à la fin des années 30 et au début des années 40.

La population atteignant soixante ans et ayant au moins un trimestre validé au régime général est ainsi passée de 670.000 à 850.000 personnes entre 2005 et 2006, soit une progression de 27 %. Le graphique suivant en fournit une illustration saisissante :

Source : Cnav

Il convient toutefois de noter que le dispositif des carrières longues permettra de lisser quelque peu dans le temps cette augmentation brutale. Par ailleurs, les assurés sociaux cessent leur activité professionnelle ou partent en retraite à des âges très variables, allant de cinquante ans à cinquante-cinq ans dans certains régimes spéciaux jusqu'à soixante-cinq ans pour les professions libérales. Mais la tendance de fond est inéluctable.

Evolution des grands équilibres de la Cnav sur la période 2006-2010

(en milliards d'euros courants)

2006

2007

2008

2009

2010

Solde de la Cnav
(PLFSS 2007 - Annexe B scénario économique haut)

- 1,9

- 2,4

- 3,5

- 4,1

- 3,8

Coût des retraites anticipées

1,3

1,8

2,0

2,0

1,9

Coût lié au papy-boom

0,3

1,0

1,8

2,8

3,8

Source : Cnav

Les services de la Cnav se sont efforcés d'isoler l'impact du départ en retraite des baby-boomers dans les comptes du régime général. La croissance spontanée des dépenses imputable à ce seul phénomène est spectaculaire et s'élève à un milliard d'euros supplémentaire par an en 2008, comme en 2009 et en 2010.

2. La déformation structurelle de la pyramide des âges

Le processus de vieillissement de la population française, qui se poursuit régulièrement depuis le milieu des années 60 remet en cause à terme l'équilibre et la pérennité même des régimes de retraite par répartition. Il provoque une inversion de la structure de la pyramide des âges, comme l'illustre le graphique suivant qui projette, à l'échéance 2050, la composition par tranches d'âges de la population française actuelle :

Source : Institut national d'études démographiques-
revue population et sociétés (n° 383 d'octobre 2002)

En 2004, pour la première fois, l'espérance de vie à la naissance a dépassé quatre-vingts ans tous sexes confondus, soit soixante-seize ans et six mois pour les hommes et quatre-vingt-trois ans et dix mois pour les femmes. Le progrès est encore plus visible à l'âge de soixante ans : alors que l'espérance de vie à cet âge était encore proche de son niveau du XIX e siècle au lendemain de la Seconde Guerre mondiale pour les hommes, qui pouvaient espérer vivre au-delà encore treize à quatorze ans, elle atteint désormais vingt et un ans et six mois en 2004, soit six ans de plus qu'en 1954. La progression est similaire quoique plus ancienne, pour les femmes, depuis 1945 : elle s'est élevée à vingt-six ans et six mois en 2004, soit sept ans et huit mois de plus qu'en 1954.

Selon certains démographes, sur sa tendance actuelle, l'espérance de vie des Français pourrait atteindre quatre-vingt-onze ans en 2100 et celle des Françaises quatre-vingt-quinze ans. Comme le note Jacques Vallin de l'Ined, « la baisse sans précédent de la mortalité aux grands âges observée au cours des dernières décennies fait exploser le nombre des plus vieux. Atteindre son centième anniversaire, fait exceptionnel il y a cinquante ans, devient presque banal : en France, par exemple, alors que le nombre des centenaires était estimé à 200 en 1950, l'Insee l'évaluait à 6.840 au 1 er janvier 1998. Dans ses projections fondées sur le recensement de 1990, l'Insee prévoyait 150.000 centenaires en 2050, soit une multiplication par 750 en un siècle ».

Ces évolutions démographiques inédites auront évidemment des conséquences sur les systèmes de retraite. Les dernières estimations de l'Insee publiées cette année font toutefois état de plusieurs éléments favorables. Alors que l'on attendait dès 2007 une baisse de la population active, la croissance du nombre des actifs devrait se poursuivre jusqu'en 2015, puis se stabiliser ensuite jusqu'en 2050 entre 28,2 et 28,5  millions de personnes. L'Insee a par ailleurs révisé à la hausse les projections de population pour la France métropolitaine qui compterait ainsi 70 millions d'habitants en 2050, soit 9,3 millions de plus qu'en 2005.

3. Les données prospectives disponibles à l'horizon 2020 et 2050

Le Conseil d'orientation des retraites (COR) a actualisé en 2005 les données prospectives qu'il avait publiées en 2001. Malgré les réserves et les interrogations qu'inspirent ces nouvelles projections à votre commission, il s'agit des seuls documents existant en cette matière.

Elle constate qu'appréciés sur cette base, les besoins de financement des régimes demeureront importants, tandis que les rapports démographiques convergeront autour d'un cotisant pour un retraité entre 2020 et 2040 . Cette tendance de fond provoquera inévitablement une dégradation des équilibres financiers de toutes les caisses de retraites.

Solde technique* et rapport démographique des différents régimes
à l'horizon 2020, 2040 et 2050

Rapport démographique cotisants/retraités

Solde technique (en millions d'euros)

2003

2020

2040

2050

2003

2020

2040

2050

CNRACL (agents collectivités locales)

3,03

1,60

1,03

0,93

2.820

-584

-7.128

-972

Fonctionnaires de l'Etat

1,72

0,99

0,76

0,76

-3.141

-17.094

-33.754

-40.331

Banque de France

1,42

0,75

0,91

1,10

-12

-322

-244

-79

IEG (EDF-GDF)

1,35

0,93

1,04

0,98

-339

-1.114

-430

-814

Mines

0,08

0,01

0,00

0,00

-1.813

-956

-253

-109

SNCF

0,91

0,91

0,98

0,94

-2.773

-2.951

-2.992

-3.520

Cancava base

1,01

0,81

0,61

0,58

-747

-475

-1.028

-1.522

Non-salariés agricoles

0,34

0,34

0,45

0,59

-7.005

-5.097

-3.340

-2.535

Organic base

0,90

0,65

0,38

0,50

-1.196

-1.636

-1.910

-1.866

CNAVPL
(professions libérales)

3,41

1,55

0,99

0,90

376

311

285

516

Cnav (régime général)

1,73

1,25

0,85

0,78

3.689

-4.262

-39.093

-52.099

Arrco

2,12

1,48

1,03

0,97

4.624

569

-8.081

-8.829

Agirc

2,44

1,73

1,19

1,03

94

-2.922

-4.183

-5.748

Salariés agricoles

0,38

0,33

0,25

0,24

-2.180

-2.280

-2.668

-2.272

Ouvriers d'Etat (FSPOIE)

0,82

0,76

0,78

0,86

-1.126

-941

-770

-696

RATP

1,59

1,19

1,00

0,90

-323

-652

-1.010

-1.387

Enim (marins)

0,58

0,50

0,61

0,65

-867

-784

-555

-507

* Solde technique : total cotisations et transfert du fonds de solidarité vieillesse - total des pensions (en millions d'euros)

Source : Conseil d'orientation des retraites

C. LES BRÈCHES AFFECTANT L'ÉQUILIBRE DE LA LOI DU 21 AOÛT 2003

1. Le coût des carrières longues

L'aggravation du déficit du régime général observé au cours des dernières années s'explique en grande partie par l'ampleur massive des départs anticipés des assurés sociaux intervenant à l'âge de cinquante-six, cinquante-sept ou cinquante-huit ans. Pour la seule Cnav, les dépenses correspondantes se sont élevées successivement à 1,4 milliard d'euros en 2005, à 1,8 milliard d'euros en 2006 et devraient atteindre 2 milliards d'euros en 2007. Ces sommes correspondent aux deux tiers du déficit constaté ou prévisible sur la période.

Les retraites anticipées

Source : Cnav

Le dispositif des longues carrières représentait la principale contrepartie réclamée par les partenaires sociaux pour signer le relevé de décisions du 15 mai 2003. Il semblait d'ailleurs légitime de prendre en compte la spécificité de la situation des personnes ayant commencé à travailler dès quatorze, quinze ou seize ans. Mais il convient de relever qu'au cours des travaux préparatoires qui ont été alors menés, ce dispositif avait été initialement conçu pour bénéficier aux personnes âgées de cinquante-huit et de cinquante-neuf ans. L'ouverture de la mesure aux personnes de cinquante-six et cinquante-sept ans n'avait pas été prévue.

Il en va de même pour la pratique du rachat des années d'études et des années de cotisations incomplètes qui n'avait pas été envisagée par le législateur de 2003. Ce cas de figure concerne aujourd'hui 15 % à 18 % des demandes et porte notamment sur la possibilité de régularisation des périodes d'apprentissage. Or, d'après une étude réalisée par les services de la Cnav, ces personnes bénéficient, en raison d'un barème financier inadapté, de taux de rendement financier exceptionnels pouvant atteindre jusqu'à 65 % par an. Il faut y voir une dérive car l'article 29 de la réforme des retraites prévoit expressément que ces rachats ne peuvent intervenir que « dans des conditions définies par décret garantissant la neutralité financière ». Cela n'est manifestement pas le cas en l'espèce.

Dans ces conditions, il n'est guère surprenant que le dispositif des carrières longues soit attractif et populaire. Le nombre des nouveaux bénéficiaires tend tout juste à se stabiliser, mais à un niveau très élevé : 102.000 en 2005, 105.000 en 2006 et probablement 95.000 en 2007. A partir de la fin de l'actuelle décennie et surtout du début des années 2010, on devrait néanmoins constater une lente décrue en raison de l'allongement de l'obligation scolaire, qui est passée de quatorze à seize ans à partir de la génération 1953.

Le coût des retraites anticipées atteindrait son maximum en 2007

2004

2005

Prévisions

2006

2007

2008

2009

2010

Flux de nouveaux bénéficiaires

112.990

101.910

104.670

94.970

87.190

78 730

69.960

Stock annuel moyen 1

68.350

146.530

192.390

208.930

203.780

181.410

160.010

Coût de la mesure 2
( en millions d'euros courants )

594

1.344

1.805

2.007

2.007

1.855

1.704

1 Nombre de prestataires de droit propre vivants de moins de soixante ans.
2 Masse des pensions de droit propre versées aux prestataires de moins de soixante ans.

Source : Cnav

Sur la base de l'ensemble de ces éléments, on peut se demander si le dispositif des carrières longues sera financièrement soutenable sur la durée. De fait, la large diffusion de cette mesure aboutit en pratique à créer un mécanisme de préretraite inédit au bénéfice de 10 % à 15 % des classes d'âge nées à la fin des années 40. Cette situation nuit aux tentatives engagées parallèlement dans le but d'augmenter le taux d'emploi des seniors.

2. Le faible taux d'emploi des seniors

Parmi les pays d'Europe occidentale, la France est, avec la Belgique, celui dans lequel l'âge moyen de retrait du marché du travail est le plus précoce : cinquante-huit ans, c'est-à-dire presque deux ans de moins que la moyenne de l'Union européenne (59 ans et 11 mois), plus de deux ans et demi avant l'Allemagne (60 ans et 11 mois) et presque quatre ans de moins qu'en Suède (soixante-deux ans).

En 2004, le taux d'emploi des Français entre cinquante-cinq et soixante-quatre ans se situe à 37,3 % 5 ( * ) , c'est-à-dire en dessous de la moyenne des pays de l'Union européenne (41,0 %), mais aussi d'un grand nombre de pays voisins : Allemagne (41,8 %), Pays-Bas (45,2 %), Finlande (50,9 %), Royaume-Uni (56,2 %), Danemark (60,3 %) et Suède notamment (69,1 %).

La loi du 21 août 2003 a marqué une inflexion sensible de la politique publique en matière de cessation précoce d'activité. Mais les possibilités de contourner l'objectif visant à repousser l'âge de départ en retraite des assurés sont très nombreuses par le biais notamment :

- des préretraites publiques : allocations spéciales du fonds national de l'emploi (ASFNE), préretraites progressives, cessation anticipée d'activité de certains travailleurs salariés, cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

- des préretraites d'entreprise ;

- de la dispense de recherche d'activité des chômeurs âgés qui concerne aujourd'hui plus de 400.000 personnes, soit environ 6 % des personnes âgées de cinquante-cinq à soixante-quatre ans ;

- des départs précoces dans la fonction publique.

Le consensus national implicite en faveur des cessations anticipées d'activité perdure largement dans le monde du travail, où l'on ne perçoit guère d'inflexion des comportements individuels et collectifs. Les résistances opposées à la décision des pouvoirs publics de mettre fin d'ici 2010 aux possibilités de mises à la retraite d'office des salariés avant soixante-cinq ans témoignent de la puissance de ce phénomène. L'exemple le plus flagrant peut en être trouvé lors des débats parlementaires de la réforme des retraites. Un amendement avait été alors adopté, en dépit des réserves exprimées par le Gouvernement, pour créer une dérogation et permettre que cette mise à la retraite d'office ait lieu dès l'âge de soixante ans, dès lors qu'une convention ou un accord collectif étendu fixait des « contreparties en termes d'emploi ou de formation professionnelle », sans autre précision.

Trois ans après la promulgation de la loi, pas moins de cent vingt-deux branches professionnelles , dont les plus importantes, ont conclu des accords sur cette base. Par ses proportions, la dérogation a vidé de sa substance les dispositions générales et l'exception est devenue la règle. Huit branches professionnelles au minimum ont même signé des accords dérogatoires en dessous de l'âge de soixante ans , d'une légalité très contestable, voire douteuse.

Afin de sortir de cette impasse, les partenaires sociaux ont signé, le 13 octobre 2005, un accord national interprofessionnel (ANI) relatif à l'emploi des seniors, visant à promouvoir le maintien et le retour à l'emploi des personnes de plus de cinquante ans. Le Gouvernement a ensuite constitué un groupe de travail ad hoc , présidé par Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, pour trouver des réponses à ces questions. Au terme de plusieurs réunions, cette concertation a débouché sur l'élaboration, par les pouvoirs publics, d'un plan national se fixant pour ambition prioritaire de concourir à une augmentation du taux d'emploi des personnes âgées de cinquante-cinq à soixante-quatre ans, de l'ordre de deux points par an sur la période 2006-2010, pour atteindre un taux de 50 % à horizon 2010. Ce plan est fondé sur cinq objectifs rassemblant trente et une actions concrètes.


Contenu du plan national d'action concerté pour l'emploi des seniors 2006-2010

Objectif 1 : Faire évoluer les représentations socioculturelles

- action n° 1 : informer un large public sur les atouts de l'expérience des seniors ;

- action n° 2 : sensibiliser les entreprises à la gestion des âges, à l'accès ou au maintien dans l'emploi des seniors ;

- action n° 3 : renforcer et mieux coordonner l'observation, notamment des bonnes pratiques, en matière d'emploi des seniors ;

- action n° 4 : mobiliser l'ensemble des acteurs de la recherche sur l'enjeu de l'âge au travail.

Objectif 2 : Favoriser le maintien dans l'emploi des seniors

- action n° 5 : généraliser la pratique des entretiens de deuxième partie de carrière et des bilans de compétences ;

- action n° 6 : développer les nouveaux outils de la formation professionnelle à destination des seniors ;

- action n° 7 : déployer une politique contractuelle favorable aux seniors ;

- action n° 8 : accompagner et amplifier le développement des accords de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, en particulier dans les petites et moyennes entreprises (PME) ;

- action n° 9 : améliorer les outils de pilotage de la politique de formation professionnelle ;

- action n° 10 : limiter le recours aux cessations totales anticipées d'activité ;

- action n° 11 : mettre un terme aux accords abaissant l'âge de mise à la retraite d'office ;

- action n° 12 : développer les actions de prévention pour faciliter le maintien en activité des seniors ;

- action n° 13 : réorienter le fonds pour l'amélioration des conditions de travail (FACT) vers les actions traitant de la gestion des âges ;

- action n° 14 : mobiliser le réseau de l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact).

Objectif 3 : Favoriser le retour à l'emploi des seniors

- action n° 15 : accroître l'offre de service de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) en direction des seniors ;

- action n° 16 : développer l'offre de service du service public de l'emploi en matière de qualification professionnelle ;

- action n° 17 : mobiliser les contrats aidés, en particulier le contrat initiative emploi, en faveur de l'emploi des seniors ;

- action n° 18 : refuser la discrimination par l'âge lors du recrutement ;

- action n° 19 : supprimer les freins à l'emploi liés à la contribution Delalande ;

- action n° 20 : adapter le recours aux contrats à durée déterminée à partir de cinquante-sept ans ;

- action n° 21 : encourager la création et la reprise d'entreprise ;

- action n° 22 : développer les nouvelles formes d'emploi ;

- action n° 23 : renforcer l'aide dégressive à l'employeur pour l'embauche de demandeurs d'emploi de plus de cinquante ans ;

- action n° 24 : mettre en place des mécanismes d'intéressement à la reprise d'activité favorables pour les demandeurs d'emploi de plus de cinquante ans.

Objectif 4 : Aménager les fins de carrière

- action n° 25 : développer la pratique du tutorat dans l'entreprise ;

- action n° 26 : anticiper le déroulement de la fin de carrière ;

- action n° 27 : passer à temps partiel tout en continuant à cotiser pleinement pour la retraite ;

- action n° 28 : utiliser le compte épargne-temps pour aménager la fin de carrière ;

- action n° 29 : promouvoir la retraite progressive ;

- action n° 30 : renforcer le caractère incitatif de la surcote ;

- action n° 31 : élargir les possibilités de cumul emploi-retraite pour les bas salaires.

Objectif 5 : Assurer un suivi tripartite dans la durée par l'Etat et les partenaires sociaux

L'enjeu est de première importance. Faute d'une amélioration rapide de la situation, il sera impossible en 2008, si les salariés continuent à cesser dans les faits leur activité professionnelle dès cinquante-sept ou cinquante-huit ans, de convaincre l'opinion publique de la nécessité de continuer à relever l'âge de la retraite.

3. Les négociations sur la pénibilité : un risque très élevé de création d'un nouveau mécanisme de cessation précoce d'activité

La loi du 21 août 2003 a invité les partenaires sociaux à engager, dans un délai de trois ans, « une négociation interprofessionnelle sur la définition et la prise en compte de la pénibilité ». Ces négociations ont débuté le 23 février 2005, mais les discussions en cours ne semblent pas devoir aboutir rapidement à un accord. L'exercice, il est vrai, apparaît fort complexe car il faut tout à la fois prendre en compte la réalité - incontestable - de la pénibilité de certaines activités tout en évitant une définition trop large susceptible de servir d'alibi à de nouveaux dispositifs de cessation précoce d'activité.

La notion même de pénibilité est d'une approche objective difficile. Dans son rapport « pénibilité et retraite », remis au COR en avril 2003, Yves Struillou a ainsi suggéré de retenir « l'espérance de vie sans incapacité », critère qu'il juge à la fois « cohérent et pertinent ».

Le traitement de la pénibilité requiert non seulement une politique de réparation - nécessairement de court terme - visant à compenser ses effets néfastes, mais aussi et surtout une politique plus ambitieuse de prévention, tendant à prévenir l'usure prématurée au travail et à améliorer les conditions de travail des salariés, notamment ceux âgés de plus de cinquante ans.

Les discussions en cours entre les partenaires sociaux sont dans l'impasse depuis de longs mois. Il convient d'ailleurs de se demander si les pouvoirs publics envisagent de tirer les conséquences de cette situation et de prendre acte de l'impossibilité d'un accord.

La prise en compte de la pénibilité, si elle voit finalement le jour, risque en réalité d'être utilisée comme une substitution aux carrières longues. L'observation des vingt dernières années montre en effet que les mécanismes de cessation d'activité se succèdent au fil du temps. Et les tentatives des pouvoirs publics visant à les restreindre aboutissent à des résultats le plus souvent partiels et ambigus. On ne peut s'empêcher de penser, face à ce phénomène, à l'hydre de Lerne dont Héraclès coupa d'abord une tête avant que deux ne repoussent aussitôt.

II. LA FRAGILITÉ DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE AU SEIN DE L'ASSURANCE VIEILLESSE

A. UNE SITUATION TRES VULNÉRABLE SUR LE PLAN INSTITUTIONNEL

1. Des relations complexes et déséquilibrées avec l'Etat

Les interrogations récentes, survenues quand est apparu le sujet de l'avenir des retraites de La Poste, ont mis une nouvelle fois en évidence la fragilité de la situation de la Cnav dans l'architecture du système de protection sociale. La presse avait en effet un temps annoncé qu'il était envisagé d'assurer le bouclage du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 à l'aide d'un versement anticipé de 700 millions d'euros de La Poste, en prévision d'un futur adossement au régime général 6 ( * ) . Il n'en a rien été. Votre rapporteur s'est d'ailleurs publiquement félicité le 28 septembre 2006, ainsi qu'Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, de la décision du Gouvernement de ne pas précipiter les conditions de cette opération.

Mais cet épisode illustre surtout la vulnérabilité du régime général, aussi bien dans ses rapports avec l'Etat, qu'avec les autres régimes sociaux. La gestion et la direction de la Cnav reposent, il est vrai, sur des règles de gouvernance classiques, mais faisant l'objet d'une mise en oeuvre subtile. Malgré les dispositions législatives et réglementaires gouvernant son statut, la caisse entretient dans les faits des relations complexes et déséquilibrées avec la puissance publique.

La Cnav est un établissement public national à caractère administratif disposant de la personnalité juridique et de l'autonomie financière (article L. 222-4 du code de la sécurité sociale). Elle est placée sous le contrôle de l'Etat qui l'exerce par l'intermédiaire des commissaires du Gouvernement. Le législateur lui a confié (article L. 222-1 du même code) la mission d'assurer la gestion de l'assurance vieillesse et d'exercer une action sanitaire et sociale en faveur des assurés sociaux. En conséquence, elle « propose par l'intermédiaire de son conseil d'administration, toute mesure, notamment dans le cadre de l'élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui lui paraît nécessaire pour garantir dans la durée l'équilibre financier de l'assurance vieillesse des travailleurs salariés. »

Son instance dirigeante la plus importante est le conseil d'administration de la caisse qui est composé (article L. 222-5) de trente membres, dont treize représentants des syndicats, treize représentants des employeurs et quatre personnes qualifiées. Ce conseil « règle par ses délibérations les affaires de la caisse soit sur proposition de son président, de ses membres ou du directeur, soit sur l'initiative du ministre chargé de la sécurité sociale. » (article R. 224-1). On retrouve ici une rédaction inspirée, dans un tout autre domaine, de la loi du 5 avril 1884 sur les communes. Le conseil d'administration dispose donc d'une clause générale de compétence, à laquelle s'ajoutent des pouvoirs de délibération en matière budgétaire.

Les services administratifs de la Cnav sont placés sous la responsabilité d'un directeur nommé par décret, pris sur le rapport du ministre chargé de la sécurité sociale, après avis du président du conseil d'administration de l'organisme concerné (article R. 224-6). Il a pour mission d'assurer le fonctionnement de la Cnav sous le contrôle du conseil d'administration, d'exécuter les décisions du conseil d'administration et de préparer les projets de budgets.

Le conseil de surveillance de la Cnav est composé (article R. 228-3). de vingt-sept membres, dont six parlementaires, trois représentants des retraités et des personnes âgées, quatre personnalités qualifiées et douze représentants des organisations oeuvrant dans le domaine économique, sanitaire ou social, désignés par le ministre chargé de la sécurité sociale. Mais il s'agit d'une instance purement consultative (article R. 228-10) qui ne peut qu'émettre des recommandations qui sont rendues publiques.

Malgré ce statut juridique législatif et réglementaire, la question se pose de savoir si l'Etat pourrait imposer à la Cnav une décision désapprouvée par son conseil d'administration. Le régime général est en effet placé sous la tutelle pesante de l'Etat qui intervient parfois de facto dans la gestion des grands équilibres. Ceci explique probablement que, contrairement aux régimes complémentaires, la Cnav n'ait pas été dotée d'une clause de rendez-vous dans les conventions d'adossement qu'elle a signées avec la Caisse des industries électriques et gazières. Votre commission observe également que le régime général n'a jamais demandé au FSV le paiement des frais financiers que lui occasionnent ses retards de paiement.

Le ministère des finances semble en effet considérer que le montant des cotisations prises en charge par l'Etat (1,1 milliard d'euros en 2006) par le fonds de solidarité vieillesse (7,6 milliards d'euros) et les produits de la contribution sociale généralisée, des impôts et taxes affectés (5,9 milliards d'euros), soit au total environ 17,5 % des recettes de la caisse, justifie bien davantage qu'un droit de regard étendu sur sa gestion financière. Lors des débats parlementaires de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, Patrick Devedjian, alors ministre délégué à l'industrie, avait ainsi souligné en ces termes la spécificité du régime général :

« Sur le fond (...) je voudrais souligner que la situation de la Cnav est différente de celle de l'Agirc et de l'Arrco. En effet, la Cnav est un régime par annuités et non par points. Cette caisse ne présente donc pas un équilibre structurel identique à celui de l'Agirc et de l'Arrco, du moins à moyen terme. Il y a participation à un système de compensation avec d'autres régimes : c'est la compensation généralisée. Enfin, s'agissant des ressources, les cotisations en constituent environ les deux tiers dans le cas de la Cnav, contre 100 % dans le cas de l'Agirc et de l'Arrco. Ces différences, on le voit bien, peuvent rendre difficile l'application uniforme de méthodes qui seraient déterminées à l'avance. »

En définitive, l'autonomie toute relative du régime général d'assurance vieillesse n'est confortée que par la force de caractère de sa présidente, Danièle Karniewicz et par l'esprit de responsabilité des membres de son conseil d'administration.

2. La Cnav financeur de dernier ressort de l'Etat providence ?

Le recours au régime général constitue une solution de facilité pour assurer le bouclage des finances sociales, au point parfois de faire de la Cnav la victime naturelle des opérations de régulations budgétaires. Par sa taille - 77,5 milliards d'euros de prestations versées en 2006 - et le nombre de ses cotisants (16 millions de personnes), elle fait en effet légitimement figure de référence pour l'assurance vieillesse.

Répartition du nombre des cotisants entre les différents régimes

La Cnav a bénéficié pendant plusieurs décennies d'un contexte économique et d'un rapport démographique très favorables. Tout au long des Trente Glorieuses, son développement a été assuré par l'extension du salariat, du travail féminin et l'extinction ou le déclin de nombreux autres régimes plus petits.

Dans ce contexte, il n'est guère étonnant, et il n'était pas illégitime, que le régime général ait été mis à contribution par les pouvoirs publics au nom de la solidarité nationale. Mais ces prélèvements ont eu tendance à s'accroître au fil du temps, et la Cnav, qui connaît désormais une situation de déficit structurel, se trouve de moins en moins en position de pouvoir les assumer.

Le régime général est ainsi, et de loin, le principal contributeur au titre des transferts financiers entre les régimes d'assurance vieillesse destinés à compenser les différences de structures démographiques.

Cette situation est le fruit d'une longue histoire. Notre système de retraite par répartition a en effet été fondé à la Libération sur les projets du Conseil national de la résistance prévoyant d'instaurer un régime unifié de sécurité sociale regroupant l'ensemble de la population active. Mais, très rapidement, cette volonté d'unification a été abandonnée.

Dès les années 1960, certains régimes anciens, souffrant déjà de ratios démographiques très dégradés, se sont trouvés dans l'impossibilité de dégager un équilibre financier primaire (couverture des prestations par les cotisations). Il a donc fallu corriger cette différence de moyens, en faisant en sorte que les caisses de retraite disposant de ressources versent une contribution à l'équilibre de celles connaissant des difficultés. La création, en 1974, de la compensation généralisée entre les régimes de base de retraite n'a donc fait que tirer les conséquences, avec un retard de trente ans, de l'impossibilité de construire un régime unique. A ce dispositif s'est ajouté, en 1985, celui de la surcompensation , conçu entre les seuls régimes spéciaux.

Bilan de la compensation et de la surcompensation
pour l'ensemble des régimes en 2005

(en millions d'euros)

Le bilan, pour les cinq dernières années, de la situation des différents régimes de retraite au regard des mécanismes de compensation et de surcompensation fait ressortir des évolutions importantes et singulières. Le régime général apparaît en effet comme le grand perdant de la période 2001/2005 dans la mesure où sa contribution s'est accrue de 932 millions d'euros par an (+ 22,4 %). Inversement, l'Etat, au titre des fonctionnaires civils et militaires ainsi que des ouvriers d'Etat, paie 919 millions d'euros en moins (- 35,3 %).

Les adossements de régimes spéciaux illustrent davantage encore cette situation de financeur de dernier ressort de l'Etat providence. En effet, la Cnav n'est pas demandeur de ces opérations, pour lesquelles elle assume d'ailleurs in fine le risque du calcul définitif des droits d'entrée à l'occasion de la signature des conventions d'adossement, en l'absence de clause de rendez-vous. Votre commission considère que le régime général a rendu en l'espèce un immense service à l'Etat, et plus encore aux entreprises nationales sollicitant l'adossement de leur régime de retraite spécial. La Cnav n'a aucun avantage particulier à espérer dans ces opérations qui se chiffrent en dizaines de milliards d'euros d'engagements futurs.

B. ÉCARTER LA PERSPECTIVE D'UNE NOUVELLE RÉFORME DE LA COMPENSATION DÉMOGRAPHIQUE AU DÉTRIMENT DU RÉGIME GÉNÉRAL

1. Le précédent de 2002

La vulnérabilité intrinsèque de la Cnav explique qu'elle fasse l'objet d'opérations de « tuyauterie budgétaire » ou de la convoitise de certains autres régimes.

Le précédent qu'a constitué la réforme des critères de compensation, intervenue en 2002, pèse encore aujourd'hui largement sur l'équilibre de ses comptes. Lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2002, ses membres avaient découvert, à la lecture du rapport, qu'une modification de grande ampleur des bases de calcul de la compensation généralisée entre régimes de base d'assurance vieillesse avait été décidée, sans avoir donné lieu à la consultation des régimes impliqués . Cette modification consistait à prendre en compte les effectifs de chômeurs pour lesquels le fonds de solidarité vieillesse (FSV) verse une cotisation au régime général et aux régimes des salariés agricoles et à soustraire aux prestations de référence les sommes déjà remboursées par le même FSV. La combinaison de ces modifications aboutissait à ce que le régime général supporte, à lui seul, 98 % de la charge financière de cette modification.

C'est ainsi que la contribution de la Cnav au titre de la compensation s'est accru, depuis cette date, de 800 millions d'euros par an.

2. Le coût potentiel de la demande des instances du Ffipsa

Ce précédent fâcheux pourrait se reproduire à l'avenir.

Les instances dirigeantes du Ffipsa (fonds de financement de la protection sociale agricole) demandent en effet, depuis le mois de juin 2005, que ces mêmes règles de la compensation démographique soient révisées à leur profit. L'objectif est de réduire le déficit très élevé de ce fonds, dont la Cour des comptes a demandé la suppression dans son rapport de septembre 2006 consacré à l'exécution de la loi de financement de la sécurité sociale.

Accéder à une telle demande reviendrait à réaliser de nouveaux transferts massifs au détriment du régime général, alors même que la Cnav non seulement ne dégage plus d'excédents, mais encore accuse un déficit élevé.

Le comité de surveillance du Ffipsa fonde sa demande sur l'une des vingt-deux hypothèses étudiées dans le rapport d'audit établi en 2004 pour la commission de compensation. Il s'agit très précisément de l'option consistant à prendre en compte les durées moyennes d'affiliation cotisées pour le décompte des effectifs de retraités de droit direct.

Cette hypothèse est naturellement particulièrement favorable au régime des exploitants agricoles qui bénéficierait ainsi, d'après les simulations, de 717 millions d'euros supplémentaires par an. A contrario , le régime général verrait sa contribution augmenter de 783 millions d'euros et la CNRACL de 733 millions d'euros. Il s'agit donc bien de mouvements massifs.

3. La position de principe de votre commission

Votre commission n'a jamais contesté la nécessité d'un mécanisme de solidarité entre les régimes de retraite afin de tenir compte des déséquilibres démographiques.

Elle considère toutefois que le système de compensation démographique créé en 1974 est devenu, avec le temps, complexe et inéquitable : certains régimes créditeurs sont amenés à financer, pour les retraités d'autres régimes, des prestations supérieures à celles qu'ils versent à leurs propres retraités.

Au cours des dernières années, elle s'est prononcée contre le détournement de la compensation pour réaliser des opérations de régulation budgétaire, et en faveur tout à la fois de plus de transparence et d'une remise à plat de son mode de calcul. Elle ne peut donc qu'appeler les pouvoirs publics à ne pas donner suite à la demande des instances du Ffipsa, tout en faisant observer que le régime des exploitants agricoles est déjà, et de loin, le principal bénéficiaire de ce système de redistribution.

Votre commission partage totalement les conclusions avancées par Jean-François Chadelat, inspecteur général des affaires sociales, dans son rapport concluant les travaux du groupe de travail relatif au déficit du fonds de financement des prestations sociales agricoles (Ffipsa) qu'il avait la charge d'animer :

« S'agissant de la compensation vieillesse, la variante retenue par le comité de surveillance du Ffipsa est celle qui consiste à tenir compte dans le décompte des retraités de chaque régime des durées moyennes de carrière, alors que la formule actuellement en vigueur décompte l'effectif des retraités sans référence à leur durée de présence dans le régime. (...)

« Dans le cas considéré, la seule donnée disponible dans les systèmes de gestion est la durée dite « validée », car c'est cette durée qui sert au calcul de la pension. Le problème est que cette durée regroupe des périodes de natures diverses : des périodes cotisées, des périodes validées gratuitement (maladie, chômage, etc.), des majorations ou bonifications de durée d'assurance (pour enfants, pour services actifs, etc.). Or les règles d'attribution des validations ou des majorations sont extrêmement différentes d'un régime à l'autre. Par conséquent, si l'on retenait les durées validées, on favoriserait indûment les régimes où les possibilités de validation sont nombreuses et généreuses. Retenir une telle solution serait en contradiction complète avec les principes de base de la loi de 1974 et en opposition à la notion même d'équité, puisqu'elle reviendrait à demander à la compensation de financer des avantages spécifiques à un régime.

« Dans ces conditions, pour tenter d'appliquer cette piste de modification de la compensation, il faudrait prendre en compte les seules durées cotisées, et encore une période cotisée n'a pas la même portée d'un régime à l'autre. Mais, au-delà, cette option se heurte à l'indisponibilité d'obtenir ces valeurs dans les systèmes d'information de nombreux régimes. Le rapport de 2004 indique que les simulations faites sur cette base sont plus qu'approximatives. On ne peut que constater que cette variante n'est pas en mesure de respecter le principe d'équité de la compensation, et que de surcroît des raisons techniques ne permettraient pas son application.

« Dans ces conditions, la mise en oeuvre de cette piste de modification de la compensation ne me parait pas devoir être retenue. »

C. SÉCURISER LE PROCESSUS DE GÉNÉRALISATION DES ADOSSEMENTS DE RÉGIMES SPÉCIAUX

1. Le précédent des industries électriques et gazières

Les nouvelles normes comptables internationales

Le règlement CE 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002, publié au Journal officiel des communautés européennes le 11 septembre 2002, prévoit dans son article 4 que « les sociétés régies par le droit national d'un Etat membre sont tenues de préparer leurs comptes consolidés conformément aux normes comptables internationales ».

En effet, dans le cas d'un régime de retraite d'entreprise, le risque de fermeture brutale ne peut être écarté, par exemple en cas de faillite, comme en attestent divers exemples de fonds de pension d'entreprise étrangers (Maxwell, Enron). Par ailleurs, même si ce risque était exclu, il semble naturel de retrancher la masse de ces droits acquis de la valeur comptable de l'entreprise : un repreneur reprend en effet non seulement les actifs et les dettes explicites de l'entreprise, mais aussi les engagements de retraite vis-à-vis des employés ou anciens employés de la firme et l'équivalent actuariel de ces engagements doit être pris en compte dans le prix de rachat de l'entreprise. Cette comptabilisation est donc prévue par la norme comptable internationale IAS 19 mise au point par l'International Accounting Standard Board (IASB). Cette norme a été définie en 1998, puis adoptée en 2003 par la commission européenne.

Cette nouvelle norme comptable internationale oblige aussi à comptabiliser en provisions au bilan l'intégralité des engagements de retraites. L'objectif est de présenter tous les avantages servis au personnel, c'est-à-dire toutes les formes de contreparties versées par une entreprise en échange des services rendus par ses employés : mutuelle, retraite complémentaire, avantages divers.

Cette présentation comptable a retenu l'option suivant laquelle le coût des avantages versés au personnel doit être comptabilisé au cours de l'exercice pendant lequel l'employé acquiert l'avantage plutôt que lorsqu'il est payé ou en cours de paiement, par exemple lors de la retraite du salarié. Il s'agit d'un changement majeur et lourd de conséquences pour les grandes entreprises publiques à régime de retraite spécial, dans la mesure où elles n'ont jamais eu à provisionner, jusqu'à présent, leurs engagements de retraite et où elles ne disposent pas des fonds propres nécessaires pour y faire face.

L'adossement : une opération complexe

L'adossement sur les régimes de retraite du secteur privé (Cnav et retraites complémentaires Agirc-Arrco) est une technique financière permettant d'élargir le mode de financement et de garantir le paiement des retraites des régimes spéciaux. Elle a été conçue pour les industries électriques et gazières (IEG) et organisée par la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.

Ce schéma jusqu'alors inédit a fondamentalement différé de celui des précédentes intégrations de régimes reposant sur une mise en extinction progressive. Ce type d'opération avait été effectué plusieurs fois au cours des dernières années, essentiellement par les régimes complémentaires Agirc-Arrco, au profit notamment du personnel au sol d'Air France en 1993, des organismes de sécurité sociale en 1994 ou des caisses d'épargne en 1996. Plus encore, l'adossement des IEG n'a pas suivi le modèle appliqué, de manière satisfaisante, à France Télécom en 1996, qui avait reposé sur une prise en charge par l'Etat du coût des retraites des agents publics.

L'adossement est une réforme limitée aux conditions de financement. Le but recherché est en effet de sortir les engagements de retraite du bilan des entreprises publiques concernées, la Cnav, l'Agirc et l'Arrco assurant alors le service des prestations de base et complémentaires, en contrepartie de cotisations employeur et salariée de droit commun et de l'acquittement de droits d'entrée (soulte). L'opération ne doit naturellement pas provoquer la dégradation de la situation financière du régime d'accueil. Le Sénat a d'ailleurs veillé à inscrire, d'abord dans la loi du 9 août 2004, ensuite dans le code de la sécurité sociale, les principes de transparence et de stricte neutralité pour les assurés sociaux des régimes de droit commun .

Dans le cas des IEG, le régime spécial proprement dit (« régime chapeau ») a donc été maintenu : il est financé par une contribution tarifaire sur les activités régulées et, pour le solde, par les entreprises. Toutefois, dans la mesure où le niveau des prestations des assurés sociaux est demeuré inchangé, y compris pour les nouveaux entrants, le coût du régime spécial reste, quoi qu'il en soit, très élevé pour l'entreprise.

Les engagements de retraite des IEG

Au 31 décembre 2005, les engagements au titre du régime spécial de retraite des IEG étaient estimés, avec un taux d'actualisation de 4,25 %, à 95,2 milliards d'euros, contre 88,9 milliards d'euros un an plus tôt.

Ce montant correspond à hauteur de 41 % aux avantages du « régime chapeau » appelés droits spécifiques (39,1 milliards d'euros) et à 59 % aux droits de base (56 milliards d'euros) équivalents aux prestations des régimes de retraite du secteur privé Cnav et Agirc-Arrco.

Les spécificités du régime spécial des IEG en termes de précocité de l'âge de cessation d'activité et de mode de calcul favorable des pensions présentent un « surcoût » par rapport aux régimes de droit commun que la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG) évalue à 19 % de la masse des retraites de l'année 2005, soit plus de 600 millions d'euros par an. Votre commission ne dispose toutefois pas des moyens lui permettant d'évaluer elle-même ces chiffres qui diffèrent sensiblement de la répartition des engagements de retraite entre les droits de base et les droits spécifiques.

2. Les dossiers de la RATP, de la SNCF et de la Poste

La question de l'avenir du financement des régimes spéciaux se pose avant même celle de l'opportunité de réformer leurs niveaux de prestations. Certains petits régimes sont relativement faciles à gérer, comme celui de la chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP) qui a fait l'objet d'une mise en extinction accompagnée d'une intégration pure et simple au régime général en 2005.

Les grands régimes, en revanche, posent manifestement des problèmes de grande ampleur. La Banque de France semble s'orienter vers un alignement progressif sur les règles de droit commun des trois fonctions publiques, sans avoir besoin de recourir à la technique de l'adossement.

Ce cas semble relativement facile à régler par comparaison avec ceux de la RATP, de La Poste et de la SNCF. Ces trois grandes entreprises publiques devraient prochainement faire l'objet à leur tour d'un adossement. Les montants en jeu sont très élevés et la sensibilité des organisations syndicales au sujet des retraites bien connue. Il convient en outre de noter que les pouvoirs publics sont tenus de notifier ces opérations aux autorités communautaires. En pratique, l'Etat est obligé d'engager des discussions approfondies, voire des négociations, avec la direction de la concurrence de la commission européenne qui veille au respect de la libre concurrence et prohibe les aides illicites.

La RATP

Le Gouvernement et la RATP examinent toujours actuellement avec la Cnav les modalités suivant lesquelles la régie devra, à son tour, faire face aux nouvelles obligations des normes comptables IAS 19. Ce dossier semble toutefois au point mort depuis plusieurs mois.

Une soulte devrait être versée par le régime spécial en fonction des droits repris par les régimes de droit commun et les droits du « régime chapeau » feront l'objet d'un financement spécifique. Malgré la proximité de l'échéance de 2008, les négociations semblent actuellement en panne.

Au 31 décembre 2005, les engagements au titre du régime spécial de retraite de la RATP étaient estimés, avec un taux d'actualisation de 4,25 %, à 23,1 milliards d'euros, contre 21,6 milliards d'euros un an plus tôt.

Il répond, selon une étude réalisée en 2003 par un cabinet d'actuaire, pour 38 % aux avantages du « régime chapeau » appelés droits spécifiques et pour 62 % aux droits de base correspondant au niveau de prestation des régimes de retraite du secteur privé (Cnav et Agirc-Arrco).

Les spécificités du régime spécial de la RATP en termes d'âge précoce de cessation d'activité et de mode de calcul favorable des pensions présentent un surcoût par rapport aux régimes de droit commun que l'entreprise évalue à 180 millions d'euros par an, par rapport à un total de 731 millions d'euros versés. A dire vrai, cette évaluation surprend quelque peu votre rapporteur qui ne dispose malheureusement pas des moyens d'en apprécier lui-même la réalité.

La Poste

Le montant des engagements de retraites de La Poste était évalué en 2005, par le ministère des finances, à environ 60 milliards d'euros répartis entre les droits de base, 47 milliards d'euros, et les droits spécifiques correspondant au régime chapeau, 13 milliards d'euros.

La Poste entre également dans le champ d'application des normes comptables internationales IAS 19. Les pouvoirs publics semblent avoir pris la décision de recourir à la méthode de l'adossement, au point d'ailleurs d'avoir un temps envisagé d'amorcer l'opération dès cette année. Or, malgré la proximité de l'échéance de 2007, les échanges techniques préalables aux négociations n'ont pas commencé.

Il convient toutefois de signaler que le dossier de La Poste présentera une différence significative par rapport à celui des IEG. Il ne s'agit pas d'un régime spécial à proprement parler, mais d'une entreprise publique qui comprend 61 % d'agents publics dans son personnel. Et depuis 1997, la quasi-totalité des nouveaux recrutements est intervenue sur la base du code du travail.

La SNCF

Au 31 décembre 2005, les engagements au titre du régime spécial de retraite de la SNCF étaient estimés par l'entreprise publique, avec un taux d'actualisation de 2,5 % hors inflation, entre 105 et 108 milliards d'euros.

Le ministère des finances avait fourni à votre commission, pour la première fois l'an dernier, la valeur correspondante pour 2004 en l'évaluant à 103 milliards d'euros. Jusqu'alors, en effet, la SNCF ne retenait pour sa part que les seuls engagements liés aux prestations supplémentaires accordées par l'entreprise depuis la fixation du taux de cotisation normalisé (1 er janvier 1990) et non prises en charge par l'Etat dans sa contribution d'équilibre, soit un montant compris entre 5,5 milliards d'euros et 6,7 milliards d'euros. Il semble que les questions liées à ces chiffrages soient encore en discussion aujourd'hui.

La SNCF considère que le coût pour l'entreprise des spécificités de son régime de retraite peut être évalué à 513 millions d'euros par an, par rapport à un total de 4,5 milliards d'euros de prestations versées aux assurés sociaux. Votre rapporteur prend acte de ces chiffres qui lui semblent, en première approche, relativement faibles, compte tenu de la précocité de l'âge de départ en retraite des agents de la SNCF. Il en va de même pour la décomposition des engagements de retraite. L'entreprise publique évalue les droits spécifiques à 14 milliards d'euros, soit seulement 13 % des engagements totaux ; les droits de base sont pour leur part estimés à 91 milliards d'euros.

Les pouvoirs publics n'ont pas encore arrêté de décision sur la méthode à employer à la SNCF pour se conformer aux obligations de la norme comptable IAS 19.

3. Le compte à rebours de l'échéance de 2007

La norme comptable IAS 19 sera applicable à la SNCF, à la RATP et à La Poste à compter de l'exercice 2007. Les réponses fournies par la SNCF aux questions posées par votre rapporteur donnent une idée de l'urgence à traiter ce dossier :

« Selon le Règlement européen n° 1606/2002 du 19 juillet 2002, confirmé par l'ordonnance 2004-1382 du 20 décembre 2004, la SNCF doit présenter les comptes consolidés du groupe SNCF selon les normes comptables internationales à partir de l'exercice 2007.

« La première présentation selon les nouvelles normes concernera le premier semestre 2007, dont les comptes devront permettre une comparaison avec le premier semestre 2006 (présentation pro forma en normes comptables internationales).

« La date d'arrêté des comptes du premier semestre 2007 est le 31 août 2007. En cas de non-respect de cette échéance, les comptes 2007 pourraient ne pas être certifiés par les commissaires aux comptes, et la SNCF pourrait alors se voir interdire l'accès aux marchés financiers des obligations. (...)

« Si aucune réforme du financement du régime n'intervient avant le 1 er janvier 2007, la SNCF devra :

« - constituer une provision au passif de son bilan de l'ordre de 9 milliards d'euros et, faute de fonds propres suffisants, présenter alors une situation nette négative ;

« - financer dans son compte de résultat pour les années ultérieures une dotation aux provisions évaluée entre 400 et 150 millions d'euros (selon qu'une intégration de points d'indemnité de résidence est intégrée ou non dans le traitement liquidable), rendant alors insupportable pour l'entreprise le surcoût du régime de retraites par rapport à ses concurrents. »

Pour toutes ces raisons 7 ( * ) , la Cnav juge indispensable de consacrer les prochains mois à mener à terme des travaux très approfondis sur les opérations de La Poste et de la SNCF. Compte tenu de la difficulté avérée de cet exercice et de la nécessité absolue de trouver une issue en 2007, il est, à son sens, impossible d'attendre que les échéances électorales de l'année prochaine soient passées pour ouvrir des négociations.

Elle s'est par ailleurs inquiétée que les négociations engagées avec les pouvoirs publics sur les retraites de la RATP achoppent sur trois points de blocage principaux : la question de la prise en charge des avantages familiaux par le fonds de solidarité vieillesse (FSV), le niveau de la rente garantie des retraités et le taux d'actualisation sur la base duquel la soulte sera calculée.

4. Les critiques de la Cour des comptes

Dans son rapport de septembre 2006 sur la sécurité sociale, la Cour des comptes a consacré de larges développements à la technique d'adossement des régimes de retraite spéciaux.

Sans même se prononcer à ce stade sur le respect du principe de neutralité, elle a formulé des observations très critiques sur les dossiers des industries électriques et gazières. Elle s'est inquiétée notamment des risques significatifs de ces opérations pour le futur et d'une éventuelle pérennisation des avantages spécifiques des assurés sociaux des régimes adossés.

« Les réformes du financement du régime des IEG et du régime de la RATP ont tourné le dos à cette orientation. En laissant inchangés le niveau des droits des affiliés et en adoptant la technique de l'adossement aux régimes de droit commun, elles reviennent à pérenniser les droits spécifiques servis par ces régimes spéciaux. Les régimes spéciaux demeurent ainsi en dehors de l'objectif de convergence des règles applicables au régime général et aux régimes des fonctions publiques et voient même leurs particularités garanties.

« Sans qu'il soit nécessaire a priori de porter un jugement sur la légitimité des avantages particuliers qu'offrent les régimes spéciaux, l'opportunité n'a cependant pas été saisie d'une adaptation des règles relatives à l'acquisition des droits à la retraite.

« Dans cette nouvelle organisation, l'adossement aux régimes de droit commun et la garantie des droits spécifiques sont porteurs de risques de différents types dans le futur :

« - les augmentations futures des taux de cotisation dans les régimes de droit commun se répercuteront automatiquement sur les employeurs et les salariés des régimes adossés ; elles auront un impact direct sur les coûts de production et indirect sur la politique salariale des entreprises publiques ;

- les mesures d'allongement de la durée d'assurance déjà inscrites dans la loi de réforme des retraites de 2003, augmenteront relativement le montant des droits spécifiques dans le futur ;

« - les éventuelles réformes des droits qui pourraient être réalisées dans le futur dans les régimes de droit commun conduiront également à augmenter la part relative des droits spécifiques, du fait de la garantie du montant de la pension ;

« - même en l'absence de toute réforme d'envergure des droits, toute baisse du rendement dans les régimes complémentaires en points Arrco et Agirc augmentera relativement la part des droits spécifiques.

« En revanche, ces réformes n'ont pas touché aux droits des affiliés. L'opportunité n'a pas été saisie d'adapter les règles d'acquisition et de liquidation des droits à la retraite dans ces régimes, comme cela a été fait dans les fonctions publiques lors de la réforme des retraites de 2003. »

Votre rapporteur prend acte de ces observations qui ne manqueront pas de nourrir le débat sur la nécessité de faire évoluer le niveau de prestations de ces régimes, restés à l'écart des réformes de 1993 et de 2003. S'il convient sans soute de raisonner entreprise publique par entreprise publique et de faire preuve de réalisme, la question du statu quo sur les régimes spéciaux pose un problème croissant au regard du principe d'équité entre les assurés sociaux . Au-delà de l'enjeu financier, le risque est grand que la majorité des assurés sociaux français refuse désormais de consentir à d'autres efforts, aussi longtemps que les régimes spéciaux resteront à l'écart des efforts collectifs pour sauvegarder le système de retraite par répartition.

5. Les garanties supplémentaires nécessaires

Ces observations de la Cour des comptes confortent votre commission dans les positions qu'elle a défendues avec constance au cours des dernières années pour garantir la neutralité et la transparence de ces adossements.

Par ailleurs, en dépit de l'obligation d'information préalable du Parlement introduites à l'article 80 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, votre commission continue à n'avoir connaissance de ces opérations qu'à travers la lecture de la presse. Elle proposera donc deux nouvelles mesures visant à sécuriser davantage les prochains adossements :

la première est essentiellement de nature rédactionnelle, mais contribuera utilement au principe de transparence. Il s'agit de prévoir que le conseil d'administration de la Cnav est consulté sur ces adossements, et en évalue les modalités au regard du principe de neutralité financière pour ses assurés sociaux ;

la seconde vise à permettre que le régime général puisse, comme les régimes complémentaires, demander l'intégration d'une clause de rendez-vous plafonnée dans les conventions d'adossement. Il semble en effet difficile d'imaginer que la Cnav prenne le risque de s'engager, irréversiblement, sur le calcul des droits d'entrée non seulement des IEG, mais aussi de la RATP, de La Poste et de la SNCF.

III. QUELS ENSEIGNEMENTS POUR LA PRÉPARATION DE LA PROCHAINE RÉFORME DES RETRAITES ?

A. PARTIR D'UN CONSTAT LUCIDE ET ÉCLAIRÉ

Le processus de sauvegarde du système d'assurance vieillesse nécessitera encore d'importants efforts à l'avenir. Il convient donc de veiller à ne pas entretenir dans l'opinion publique un message trop optimiste.

1. Privilégier une approche réaliste

Aujourd'hui encore, le débat public sur l'avenir des retraites est perturbé par de nombreux arguments servant d'alibis pour justifier le statu quo. La relecture des débats parlementaires de 2003, ainsi que des positions exprimées par la plupart des confédérations syndicales à cette occasion, fait apparaître un très large spectre d'idées fausses ou de manoeuvres dilatoires :

- la contestation de la possibilité même de réaliser des projections à long terme pour évaluer les besoins de financement de l'assurance vieillesse ;

- la mise en avant des efforts déjà demandés aux assurés sociaux à l'occasion des réformes Balladur de 1993 et Fillon de 2003 ;

- l'ampleur des inégalités affectant le système de retraites ;

- l'existence de besoins sociaux insatisfaits, par définition illimités ;

- le renvoi de toute décision sur l'avenir des régimes spéciaux à une hypothétique négociation avec les partenaires sociaux, appelés à trouver un « compromis fructueux » ;

- le refus du catastrophisme ;

- l'affirmation de principe suivant laquelle le « financement relève d'un choix de société » sans plus de précision ;

- l'idée générale que l'harmonisation des retraites doit intervenir par le haut, en s'alignant sur le mieux-disant ;

- l'affirmation suivant laquelle une augmentation des financements est nécessaire et une forte hausse des cotisations semble parfaitement envisageable ;

- la relativisation de l'ampleur des hausses de cotisations intervenues dans le passé ;

- le refus de l'existence même de disparités entre les retraites du secteur privé et celles du secteur public ;

- l'idée que la croissance future de la productivité permettra à elle seule de préserver en grande partie les équilibres des systèmes de retraites.

Il est malheureusement quasiment certain que ces arguments seront de nouveau avancés à l'occasion de la clause de rendez-vous de 2008. Dans un domaine aussi complexe que celui des retraites, il est infiniment plus aisé de développer un argumentaire simpliste, voire populiste, que de défendre des positions argumentées, fondées sur une évaluation réaliste des difficultés.

Là réside d'ailleurs une réelle spécificité française par rapport aux autres pays européens. En Suède, en Allemagne ou Espagne, par exemple, la quasi-totalité des forces politiques est parvenue, au nom de l'intérêt général, à s'entendre sur les bases des réformes de l'assurance vieillesse et à ne pas utiliser la question des retraites comme une arme électorale. Dans notre pays, en revanche, prédominent encore largement des affrontements idéologiques d'un autre temps et un refus largement répandu de voir la réalité en face.

Il est pourtant possible de piloter sur le long terme les grands équilibres des régimes de retraite. Cela suppose de prendre en compte les temps de réaction généralement très longs pour en modifier les paramètres. Il n'est pas rare, en effet, de devoir attendre vingt ans pour percevoir l'impact de certaines mesures. C'est le cas aujourd'hui pour la réforme Balladur de 1993, dont la totalité des effets ne se fera pas sentir avant 2008.

Avec le recul du temps, les mesures les plus efficaces sont celles prises longtemps avant l'apparition des difficultés de financement, qui répartissent l'effort en modifiant le plus grand nombre de leviers possibles et qui mettent à contribution les cotisants comme les retraités.

2. Les interrogations et les réserves soulevées par le troisième rapport du conseil d'orientation des retraites

Assurer l'avenir de l'assurance vieillesse suppose tout à la fois de réaliser des prévisions prudentes, de prendre des mesures courageuses et de les renouveler régulièrement.

Dans la perspective de 2008, les travaux du conseil d'orientation des retraites joueront probablement un rôle décisif dans la préparation de la future réforme. Le COR est en effet une instance de concertation et de débats, indépendante du Gouvernement, rassemblant des techniciens de l'assurance vieillesse, des syndicalistes, des personnalités qualifiées et des parlementaires. Au cours des dernières années, cet organisme a vu son rôle institutionnel sans cesse renforcé, au point de monopoliser presque l'expertise en matière d'assurance vieillesse.

En tant que membre du COR, votre rapporteur apprécie de pouvoir disposer de travaux de qualité dans des domaines très variés. C'est d'ailleurs précisément la raison pour laquelle les attributions de cet organisme ont été élevées au niveau législatif lors de la réforme des retraites de 2003. Pour autant, les responsables politiques doivent pouvoir conserver in fine leur liberté d'appréciation face aux avis des experts.

Malgré les indéniables mérites de cette institution, votre rapporteur regrette de s'être trouvé dans l'impossibilité de faire valoir ses observations à l'occasion de l'examen du projet de rapport sur les prospectives financières de l'assurance vieillesse sur la période 2005 à 2050 8 ( * ) .

Le troisième rapport du conseil d'orientation des retraites, publié le 29 mars 2006, suscite en effet à la fois des interrogations et des réserves.

Les auditions menées par votre rapporteur dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, avaient déjà montré le scepticisme de nombreux interlocuteurs sur les hypothèses retenues pour ces prospectives et les résultats qui en découlent. La question se pose notamment en ce qui concerne l'hypothèse retenue pour l'augmentation de la productivité (1,9 % par an) : choisir ce taux élevé permet certes de limiter la masse des pensions exprimée par rapport au PIB et de réduire les besoins prévisionnels de financement des caisses de retraite dans des proportions considérables, mais il dépasse largement la moyenne récente obtenue par l'économie française (1,1 % par an).

En outre, votre rapporteur s'inquiète particulièrement de l'interprétation qui pourrait être faite des passages de ce rapport du COR sur le taux de remplacement des assurés sociaux. Il est tout à fait préjudiciable d'afficher dans plusieurs tableaux, ainsi que dans les commentaires qui les accompagnent, un taux de remplacement supérieur pour un non-cadre du secteur privé à celui d'un administrateur de la fonction publique territoriale . C'est pourtant ce qui ressort du tableau suivant qui présente, de façon contestable, une projection jusqu'en 2050 :

Taux de remplacement nets à la liquidation à 65 ans et après 40 ans de cotisations, dans l'hypothèse d'indexation sur les prix et à taux de cotisation constants (1)

Génération

1938

1955

1985

Année de liquidation

2003

2020

2050

Non-cadre du secteur privé

Cnav

55,9 %

51,8 %

50,1 %

Arrco

27,6 %

25,0 %

23,3 %

Cnav + Arrco

83,6 %

76,8 %

73,5 %

Cadre du secteur privé

Cnav

26,9 %

23,8 %

23,1 %

Arrco

11,8 %

10,1 %

8,9 %

Agirc

25,4 %

22,8 %

21,2 %

Cnav + Arrco + Agirc

64,1 %

56,7 %

53,2 %

Fonctionnaire avec un taux de prime de 20 % (cas de l'attaché territorial)

CNRACL (*)

68,7 %

67,1 %

66,3 %

RAFP

0 %

1,4 %

2,9 %

CNRACL (*) + RAFP

68,7 %

68,5 %

69,2 %

(1) A partir de 2006

(*) Ou régime de la fonction publique d'Etat pour un fonctionnaire de l'Etat avec un taux de prime de 20 %.

Source : COR, 2005

Ces données risquent d'accréditer l'idée, aux yeux de l'immense majorité de nos concitoyens, que le système de retraite des trois fonctions publiques est globalement moins généreux que le régime général. Cette présentation des choses n'est pas conforme à la réalité et votre rapporteur ne peut accepter que le débat de 2008 sur les retraites s'engage sur ces bases.

Le fait d'accompagner ces hypothèses des éléments techniques sur lesquels elles sont construites n'empêchera pas l'opinion publique et la presse de ne retenir que l'information brute. Le rapport indique d'ailleurs lui-même que ces estimations sont établies en s'intéressant « uniquement à des personnes qui ont connu une carrière continue jusqu'à leur départ à la retraite, sans interruptions liées à des périodes de chômage ou d'inactivité, et qui n'ont été affiliées qu'à un seul régime de base ». Or, la probabilité statistique que cette condition se concrétise est très faible.

Votre rapporteur exprime toutefois son entière confiance au nouveau président du COR, Raphaël Hadas-Lebel, et formule le voeu que cette institution se montre plus réceptive à l'avenir aux observations des parlementaires qui siègent en son sein.

B. ENGAGER UNE RÉFLEXION PRÉALABLE SUR LA PROBLÉMATIQUE DE LA PROCHAINE RÉFORME

1. Analyser l'expérience des autres pays européens

La préservation des équilibres de l'assurance vieillesse renvoie plus largement à la question de la viabilité financière des systèmes de protection sociale des les pays occidentaux. Les équilibres de l'Etat providence, tels qu'ils ont été conçus au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, sont en effet remis en question par l'augmentation des échanges internationaux et par le vieillissement de la population.

Dans ces conditions, il serait sans doute utile de s'inspirer de l'exemple des pays étrangers comparables comme l'Allemagne, l'Italie ou l'Espagne. Le système de retraite italien a ainsi fait l'objet de trois réformes majeures, la réforme Amato de 1992, celle des gouvernements Dini et Prodi entre 1995 et 1997, avant celle de 2004 réalisé par le gouvernement Berlusconi. L'assurance vieillesse allemande a été réformée successivement en 1989, en 1997, en 1998, en 2001 et en 2004. En Espagne, l'accord de 1995 entre les grandes forces politiques, baptisé « pacte de Tolède » sur les grandes orientations de l'assurance vieillesse a été renouvelé en 2003, pour une nouvelle période de cinq ans.

Mais le cas le plus instructif est sans doute celui de la Suède qui fait figure aujourd'hui de référence en Europe en matière de réforme des retraites. La grave crise financière du début des années 90 a en effet conduit les autorités suédoises à remettre à plat l'ensemble de l'édifice. Sous la pression des événements, les changements ont été à la fois rapides et profonds.

L'expérience des pays nordiques 9 ( * ) peut utilement servir à guider l'évolution du modèle social français.

2. Le choix des méthodes à employer

A la lumière de l'expérience de la préparation et de l'adoption de la loi du 21 août 2003, il semblerait utile d'engager une réflexion sur la méthodologie de la prochaine réforme, avant même de songer au contenu qu'elle pourrait avoir.

Remis en perspective, le grand débat national que l'ensemble des acteurs du débat politique, économique et social appelaient de leurs voeux en 2003 s'est révélé très décevant. La discussion s'est rapidement enlisée dans des détails ou des propos généraux dépourvus de substance. La relecture des débats parlementaires, pourtant longs de presque deux mois, constitue un exercice fastidieux. On y trouve très peu informations complémentaires susceptibles d'éclairer la volonté du législateur sur les questions techniques les plus complexes. Le volume de la loi du 21 août 2003 (116 articles) et l'aridité de la matière semblent aussi avoir rebuté l'opinion publique, ainsi que les médias. Et très rapidement les grandes orientations ont été noyées dans un flux de critiques souvent contradictoires.

Engager en 2008 un processus efficace de réforme supposerait, avant d'entrer dans le détail des mesures, de définir au préalable les objectifs et le dosage entre les principales mesures : stabilisation des retraites et/ou augmentation des cotisations et/ou allongement de la durée d'activité.

Il conviendrait également, au vu des enseignements de la réforme de 2003, de colmater les brèches menaçant le plus directement le système de retraite, comme par exemple la persistance de nombreux mécanismes de cessation précoce d'activité, de s'inscrire cette fois dans un processus de long terme et d'introduire des éléments nouveau dans le débat sur les retraites, comme les moyens de donner aux assurés sociaux la possibilité effective de concevoir leur retraite « à la carte ».

Il faudra enfin prendre en compte, dès le départ, les contraintes techniques pour procéder rapidement à la mise en oeuvre de la réforme, et notamment à l'élaboration des mesures d'application. A titre d'illustration, la loi du 21 août 2003 a requis 123 mesures réglementaires, cinq rapports, un renvoi à la loi de finances, et a organisé l'intervention des partenaires sociaux dans plusieurs articles importants. Au total, l'entrée en vigueur de la réforme a nécessité, en trois ans, la publication de soixante dix décrets, ce qui représente un travail considérable de préparation, de concertation, d'information et de mise en oeuvre. A ces contraintes juridiques, il convient d'ajouter la nécessité de disposer, le moment venu, dans toutes les caisses de retraite concernées, d'un personnel formé en nombre suffisant et des outils d'informations nécessaires.

3. Le calendrier et les étapes de la prochaine réforme

Le débat sur la prochaine réforme des retraites n'a pas encore commencé, alors que les orientations des pouvoirs publics seront probablement définies très rapidement dans la deuxième partie de l'année 2007. Votre rapporteur souhaite donc que, dans cette perspective, le Sénat agisse comme une force de proposition, en se fondant notamment sur l'expertise d'universitaires et d'actuaires.

L'équilibre de la réforme dans le temps

La loi Fillon prévoit un réexamen périodique, en 2008 puis tous les quatre ans, de la situation de l'assurance vieillesse. Cette démarche représente un réel progrès par rapport au statu quo antérieur.

Mais, dans le contexte actuel de déficit structurel de l'assurance vieillesse, la première question qui se posera sera celle de savoir si l'on pourra se limiter à de simples ajustements paramétriques. Le second choix à faire concernera l'équilibre de la réforme dans le temps. Lors des débats de 2003, votre rapporteur avait souligné la grande progressivité des changements introduits dans le droit des retraites, notamment en ce qui concerne la fonction publique. Compte tenu des prospectives financières disponibles, il est peu probable cette fois de pouvoir renouveler la même démarche.

La question du dosage des mesures et du calendrier d'entrée en vigueur des dépenses supplémentaires et des mesures d'économies se posera à nouveau. Il conviendra alors d'éviter que ne se reproduise le problème du dispositif des carrières longues, dont le coût, beaucoup plus élevé que prévu, a finalement déséquilibré la réforme dans son ensemble.

Le choix entre les solutions progressives et la méthode du « big bang »

Votre rapporteur estime qu'il conviendra d'engager la prochaine étape de la réforme des retraites avec le souci d'introduire des mesures à effet rapide. En effet, en termes actuariels, retarder de cinq ans l'entrée en vigueur d'une mesure se traduit in fine par un doublement des efforts à accomplir.

Jusqu'à présent, les différentes réformes des retraites réalisées en France ont privilégié une approche progressive, étalée sur longue période, de la gestion des problèmes. A la lumière des difficultés rencontrées pour mener à son terme le dossier des retraites de la RATP ou celui des régimes ASV des professions médicales conventionnées, il faut peut-être réfléchir à l'opportunité de requérir à un autre mode opératoire plus rapide et plus efficace, de type « big-bang » : à une date donnée, on changerait ainsi de système, sur le modèle du passage du franc à l'euro le 1 er janvier 2002.

Ce scénario de réforme éviterait d'avoir à gérer pendant des années des conflits à répétition. En effet, on ne peut envisager de modifier progressivement le système français de retraites par répartition sans risquer de réactiver sans cesse de multiples conflits politiques et sociaux. En outre, la technique des petits pas a pour inconvénient de laisser perdurer un sentiment d'incertitude et d'anxiété pour les partenaires sociaux, les organisations professionnelles, les caisses de retraite, les entreprises et, plus encore, les assurés sociaux.

Mener une réforme structurelle complète présente la difficulté d'être plus complexe à réaliser au départ qu'un ensemble de mesures limitées, assorties de la promesse de dispositions ultérieures plus importantes. Mais l'expérience a montré que les étapes suivantes sont très difficiles à réaliser le moment venu : aussi, la réforme Balladur est intervenue en 1993, mais on a dû renoncer ensuite au plus difficile, en 1995.

C. MODIFIER AU PRÉALABLE LES RÈGLES DE GOUVERNANCE DES RÉGIMES DE RETRAITE DE BASE

L'assurance vieillesse souffre depuis longtemps de graves problèmes de gouvernance, bien plus importants au demeurant que ceux de l'assurance maladie. Cette question n'est pourtant presque jamais évoquée, ni dans le débat public, ni même dans la grande majorité des publications sur les retraites Votre rapporteur estime pour sa part qu'il conviendra en priorité de traiter ce problème à l'occasion de la clause de rendez-vous de 2008.

1. Des règles de gouvernance peu efficaces

La notion de gouvernance ou de régulation des régimes de retraite consiste à choisir les méthodes visant à préserver leur équilibre financier à moyen et long terme. Or, pour certains, les méthodes utilisées en France ne sont pas exemptes de critiques 10 ( * ) :

« La recherche de l'équilibre entre recettes et dépenses des régimes de retraites par répartition présente actuellement les caractéristiques suivantes : elle est morcelée, chaque régime faisant l'objet d'un traitement spécifique, ce qui rend la régulation d'ensemble très difficile ; elle est en permanence hautement politique, et cela dans des conditions défavorables, car pour les régimes par annuités, les ajustements effectués sur les pensions prennent principalement la forme d'une remise en cause, avec portée rétroactive, des règles de calcul des pensions. »

Votre rapporteur considère qu'il est nécessaire de renoncer à promettre aux assurés sociaux une retraite exprimée sur la base de sommes fixes ou de pourcentages déterminés du revenu de fin de carrière. L'économiste Jacques Rueff jugeait d'ailleurs que de telles promesses ne correspondent pas aux réalités de la production, et les qualifiait de « faux droits ». Dans un système par répartition, on prélève au niveau de l'ensemble de l'économie, pour le distribuer, un certain pourcentage des revenus du travail. Or, si le revenu national fluctue moins que les taux d'intérêts ou les profits des entreprises, le montant des richesses redistribuables n'est pas pour autant garanti, et nul n'a le pouvoir de le faire, pas même la puissance publique. Les recettes des régimes de retraite dépendent à court terme de la conjoncture, et sur le long terme de la démographie ainsi que du taux de croissance économique moyen. Les droits à pension devraient donc être attribués avec prudence, en fonction du facteur travail.

A l'inverse de la France, la Suède a mis en place des mécanismes qui permettent de réaliser automatiquement la stabilité financière du régime public par répartition dans le temps. Ce système repose, d'une part, sur la prise en compte de l'allongement de l'espérance de vie dans les modalités de calcul de la pension, d'autre part, sur un « mécanisme automatique d'équilibre » ajustant les paramètres du système dès que, sur le long terme, les engagements dépassent les ressources. Ces ajustements sont réalisés par l'intermédiaire de la valorisation des droits à la retraite. Comme le montre, en France, l'exemple des régimes complémentaires, il conviendrait que ce processus d'adaptation revête un caractère de simple gestion, au lieu de requérir des réformes lourdes au début de chaque législature.

En définitive, la régulation de notre système de retraite aurait besoin de dispositions permettant de faire ce que les Américains appellent « fine tuning », c'est-à-dire d'en modifier les paramètres d'une façon habituelle et simple, sans susciter des manifestations de rue ou des grèves massives. Or, le système des annuités oblige à procéder par révolutions, alors que l'on pourrait faire, chaque année, de simples réglages techniques.

2. Des régimes par annuités devenus irréformables ?

Les réformes de 1993 et de 2003 ont mis en évidence la lenteur des délais de réaction aux changements des paramètres du régime général et des régimes alignés. A la lumière de ces deux précédents, votre rapporteur estime qu'il conviendrait d'engager une réflexion sur la capacité de la technique des annuités à faire face au défi que représente, pour l'Etat providence, le vieillissement de la population.

Le système des annuités, tel qu'il est conçu dans le régime général, utilise les prestations comme variable d'ajustement en permettant de changer les règles du jeu de façon rétroactive aussi longtemps que la pension n'est pas liquidée, et bientôt aussi longtemps que l'assuré n'a pas atteint l'âge légal de la retraite (soixante ans). Mais il s'agit d'une opération politique à haut risque, et non d'un acte de gestion courante. La technique des annuités rend donc tout processus de réforme très délicat. Elle a d'ailleurs été abandonnée par l'Allemagne en 1992, qui lui a préféré le système des points. La Suède, dont la réforme des retraites fait figure de référence en Europe, a remplacé, elle aussi, en 1998, les annuités par des « comptes notionnels ».

Chaque réforme renforce ainsi les tenants du statu quo , suscite de puissantes coalitions d'intérêts corporatistes et rend les évolutions ultérieures de plus en plus difficiles. En outre, l'une des caractéristiques principales de ces opérations consiste à mettre très inégalement à contribution les différentes catégories d'assurés sociaux : certains perdent peu, d'autres beaucoup. Dans ces conditions, on peut même se demander si le système des annuités apparaît suffisamment réformable pour pouvoir faire face au choc démographique attendu.

3. L'intérêt de la généralisation de la technique des points

Votre rapporteur se demande s'il ne serait plus simple et plus efficace de changer de formule, en adoptant la technique des points pour les principaux régimes de base, sans pour autant que ceux-ci n'aient à s'engager dans un processus d'unification manifestement hors de portée à brève échéance.

Cela permettrait d'introduire un autre mode de régulation, basé sur la responsabilité personnelle, donnant une place beaucoup plus large aux choix individuels des assurés sociaux. En effet, la gouvernance des régimes de retraite devrait idéalement reposer sur les mécanismes les plus simples possible, et favoriser, autant que faire se peut, la réalisation automatique des ajustements financiers. Les décisions individuelles des assurés sociaux semblent plus efficaces que les règles de fonctionnement actuelles des grands régimes de base, qui reposent sur un ensemble vaste et complexe de normes, parfois contradictoires entre elles.

La technique de gestion par points des retraites a d'ailleurs largement fait ses preuves à l'Agirc depuis 1947 et à l'Arrco depuis 1961. Elle a été ensuite reproduite par la plupart des régimes complémentaires créés depuis, dans des secteurs aussi divers que le commerce, l'agriculture ou la fonction publique. Le régime de base des professions libérales a également d'adopter cette solution dans le cadre de la réforme du 21 août 2003.

Cette technique apparaît à l'usage particulièrement souple. Elle peut être utilisée aussi bien par les régimes par répartition pure (Arrco, Agirc, Ircantec), que par les régimes en répartition provisionnée, comme le nouveau régime additionnel des fonctionnaires, voire par les régimes financés en capitalisation (Préfon). En outre, les systèmes par points sont par nature contributifs, dans la mesure où le montant de la retraite servie est proportionnel au nombre total de points. Ces mécanismes reflètent donc, pour chaque cotisant, le détail de son activité passée, ainsi que la chronique des taux de cotisation et des salaires d'activité antérieurs. Mais le principe de contributivité peut être modulé par l'introduction de mécanismes de solidarité. Cela passe ou bien par l'attribution de points gratuits sans contrepartie de cotisations salariales, afin de compenser certaines périodes non travaillées (chômage, maladie...), ou bien par la mise en place de majorations de pension en fonction du nombre d'enfants élevés.

Recourir à la technique des points pour gérer un système de retraite par répartition présente de nombreux avantages car elle permet de promouvoir plus de souplesse et d'équité dans le fonctionnement de l'assurance vieillesse. Cette technique est par ailleurs lisible pour les assurés sociaux : il s'agit d'unités de compte comme il en existe en assurance vie, la formule d'épargne longue la plus utilisée par les Français. La technique des points fournit également aux instances dirigeantes de la caisse un ensemble de leviers d'interventions efficaces permettant, par des ajustements annuels, d'assurer sa pérennité sur le long terme.

Il convient enfin de souligner que la technique des points ne remettrait en rien en cause le choix fait, en 1945, en faveur de la répartition.

D. AGIR SUR UN NOMBRE LIMITÉ D'ENJEUX PRIORITAIRES

1. La notion d'équité entre les générations

Il est évident que la notion d'équité entre les générations s'inscrive au coeur des débats de la prochaine réforme des retraites. Il pourrait même s'agir du seul levier susceptible de convaincre l'opinion publique du caractère inéluctable de nouveaux efforts destinés à assurer la pérennité de l'assurance vieillesse.

La retraite par répartition repose en effet sur un contrat social implicite : chaque génération a droit au fait que ses enfants assurent à son bénéfice une retraite correspondant à celle qu'elle a assurée elle-même à ses parents. Ce contrat passé entre les générations 1 (les parents) et 2 (les enfants) engage la génération 3, celle des petits-enfants.

Mais ses termes sont flous dans la mesure où ils ne portent ni sur le taux de remplacement, ni sur le taux de cotisations. Et de plus en plus d'intervenants dans le débat public craignent que l'insuffisance des réformes réalisées jusqu'ici n'entraîne, compte tenu du vieillissement de la population, un transfert de revenu inéquitable entre les différentes générations. Les actifs d'aujourd'hui, au lieu d'épargner, tireraient ainsi une traite sur les actifs de demain et il n'est pas certain que ceux-ci accepteront de reconnaître cette créance. Les mêmes questions se posent d'ailleurs pour la dette publique. Une génération a-t-elle le droit de prendre des engagements démesurés pour la génération suivante ? Et inversement, une génération a-t-elle le droit de renier des engagements pris pour elle si elle les juge inéquitables ?

D'un point de vue économique, voire éthique, on peut considérer qu'une génération a respecté le contrat social si elle a accumulé une quantité de capital productif permettant une évolution satisfaisante du revenu des générations futures. Mais ce critère est difficile à appréhender. Et l'on ne peut que s'inquiéter du ralentissement du rythme de la productivité du travail, passée de 4 % avant 1973, à 1,8 % au cours des trois décennies suivantes, pour ne plus s'élever qu'à 1,1 % depuis la fin des années 1990.

La notion d'équilibre entre les générations se trouve donc placée au coeur du fonctionnement de la retraite par répartition. Compte tenu de l'importance du chômage et des difficultés d'insertion sur le marché du travail, il apparaît indispensable de renforcer la crédibilité de ce système pour les jeunes actifs, précisément en restaurant la pérennité financière de l'assurance vieillesse.

Le COR estime d'une façon assez rassurante que « quel que soit le scénario examiné, on retrouve un résultat maintenant bien connu : aucune génération ne voit son niveau de vie absolu se dégrader par rapport à la précédente, en moyenne ». L'annexe du deuxième rapport 2004 finit toutefois par reconnaître, en des termes très mesurés, que la question de l'équité générationnelle est posée.

« Il existe, en revanche, un risque plus net d'iniquité intergénérationnelle au détriment des générations plus jeunes, non au regard du critère de niveau de vie absolu, mais au regard du critère de niveau de vie relatif, dans le cas où se produirait un fort décrochage dans le long terme entre évolution des salaires et évolution des pensions. Dans ce cas de figure, en effet, seraient défavorisées les générations actives au moment où le rapport de revenu entre actifs et retraités aura été au plus bas, et qui auront été les premières à subir les effets de la baisse du taux de remplacement et de l'indexation moins généreuses des retraites. »

Les conclusions du COR sur le sujet apparaissent d'une extrême prudence et ne fournissent aux décideurs publics strictement aucune indication opérationnelle exploitable. A contrario , on peut aussi considérer que tout le poids des ajustements économiques et sociaux, depuis la fin des Trente Glorieuses, a reposé sur les plus jeunes :

« De cette façon, le salaire relatif (relativement à la moyenne nationale) des différentes classes d'âge met en évidence un retournement profond dans les conditions respectives des classes d'âge : les vingt-six - trente ans voient décliner leur salaire relatif à partir du début des années 1970 ; cinq ans plus tard, c'est au tour des trentenaires de voir fléchir leur niveau relatif, puis au début des années 1990 au tour des quadragénaires de l'époque. Les générations nées dans les années 1940 apparaissent ainsi comme situées systématiquement au sommet d'une vague qui s'écroule pour les puînés. » (...) 11 ( * ) .

Un phénomène aussi important ne pourra rester sans conséquence sur l'avenir des retraites : la question de l'équité entre les générations est clairement posée . On peut même se demander si l'on ne se dirige pas vers une sorte de « guerre des âges ». La perception diffuse de ces phénomènes par l'opinion publique tend à remettre en cause sa vision de l'avenir des retraites.

2. La question des engagements de retraite implicites

La prospective en matière de retraite s'appuie généralement sur des projections de la part relative des retraites dans le PIB, sur des estimations du besoin de financement futur des régimes de retraite, ou encore sur l'évaluation des niveaux de cotisation nécessaires pour équilibrer les comptes de ces régimes à un horizon déterminé. Mais, d'autres approches ont été récemment proposées. Elles reposent sur la notion de « dette implicite » des systèmes de retraite et débouchent sur des montants très variables, mais généralement élevés, allant de quelques dizaines à plusieurs centaines de points de PIB.

La dette « explicite » des administrations publiques correspond à l'ensemble des sommes qu'elles se sont engagées à débourser dans le futur et ce, par contrat ou en vertu de dispositions légales non révisables. A contrario , on entend par dette « implicite », dans le domaine des retraites, l'ensemble des droits qui devront être honorés dans le futur sur la base des règles existantes ou des réformes déjà adoptées.

Votre rapporteur souhaiterait que cette question soit à l'ordre du jour des débats de 2008. Elle a d'ailleurs déjà été soulevée en 2004 par le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances, puis l'année suivante par le rapport Pébereau 12 ( * ) , ainsi que la commission européenne.

Par ailleurs, l'Insee a publié une analyse très complète de cette notion appliquée au cas de la France. Cette étude fournit également des estimations inédites sur les montants de ces engagements 13 ( * ) .

Ainsi par exemple, en utilisant l'une de ces méthodes, celle dite des « droits acquis » en système fermé, on aboutit à un volume d'engagements d'environ 4,5 à 4,8 années de PIB. Ce chiffre repose, il est vrai, sur l'hypothèse conventionnelle de fermeture du système de retraite, obligeant à honorer deux sortes d'engagements à l'égard des assurés sociaux :

le service des pensions des retraités jusqu'à leur décès ou jusqu'au décès de leur conjoint si les réversions existent ;

la quote-part des droits déjà accumulés à la date de fermeture du régime par les cotisants du moment, et ce pour l'ensemble de leur retraite future.

Evaluation des engagements implicites de l'ensemble des régimes de retraite français, selon la méthode des droits acquis

Taux d'actualisation

2 %

3 %

4 %

En milliards d'euros 2005

7.847

6.458

5.419

En années de prestations 2005

36,4

30,0

25,2

En années de PIB 2005

4,7

3,9

3,2

Source : Modèle Destinie, calculs Insee

Didier Blanchet et Jean-François Ouvrard jugent que cette méthode est essentiellement adaptée aux régimes d'entreprise et préconisent plutôt de recourir pour les régimes par répartition à d'autres indicateurs fondés sur la chronique des besoins de financement futurs du régime de retraite considéré.

Ces différentes évaluations, ainsi que les débats en cours sur la meilleure méthode de calcul des engagements de retraite implicite concernent au premier chef les responsables politiques et les comptables nationaux. Mais ces questions ont été également débattues au niveau européen, à l'occasion de la révision des règles du pacte de stabilité et de croissance. Il ne s'agit donc pas d'un débat purement académique limité à une poignée d'experts. L'évaluation des engagements implicites des régimes de retraite revêt d'ores et déjà une importance pratique considérable pour la conduite de la politique économique de notre pays.

3. La notion d'âge légal de la retraite

La question de l'âge légal de départ en retraite, plus encore que celle de son maintien à soixante ans, devrait également faire partie des principaux enjeux des débats de l'année 2008.

De fait, les principales dispositions légales et réglementaires relatives à l'âge de la retraite apparaissent à la fois rigides, complexes et très diverses selon les régimes,  avec :

- un âge légal fixé à soixante ans ;

- la notion de durée d'assurance ;

- le système de la décote ;

- un âge maximum de soixante-cinq ans permettant d'annuler la décote ;

- la création de la surcote ;

- les spécificités du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la pratique généralisée des cessations anticipées d'activité dans le secteur privé ;

- des âges précoces de départ dans les régimes spéciaux.

Cette superposition de mesures, qui pose d'ailleurs des problèmes pour les personnes pluripensionnées, amène les assurés sociaux à liquider leur pension à des âges très différents, voire à pratiquer plusieurs liquidations successives.

Dans la plupart des autres pays européens, l'âge légal se situe assez nettement au dessus de soixante ans. Certains ont même abandonné cette notion au profit d'un système très souple fondé sur un barème actuariel et prévoyant une grande liberté de choix de l'âge de départ à la retraite. Ainsi, les assurés sociaux suédois peuvent liquider leur pension à partir de soixante et un ans et jusqu'à soixante-sept ans, pour ceux qui le souhaitent.

*

* *

Sous réserve des observations qui précèdent et des amendements qu'elle propose dans le tome VI du présent rapport, votre commission vous demande d'adopter les dispositions relatives à l'assurance vieillesse du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 .

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Audition de Mme Danièle KARNIEWICZ, présidente du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav)

Réunie le mercredi 25 octobre 2006 , sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l' audition de Mme Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav).

Après avoir excusé l'absence de M. Dominique Leclerc, rapporteur pour la branche vieillesse, M. Nicolas About, président , a invité Mme Danièle Karniewicz, présidente de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav), à présenter ses observations sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. Il a notamment souhaité savoir si cette caisse connaît déjà une situation de déficit structurel et si le coût, beaucoup plus important que celui prévu initialement, des départs en retraite pour longue carrière permet encore d'envisager l'ajout d'un dispositif de compensation de la pénibilité au travail. Les négociations engagées à ce sujet entre les partenaires sociaux semblent en effet dans l'impasse depuis de nombreux mois.

Mme Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la Cnav, a considéré qu'il est exact de dire que le déséquilibre des comptes de la Cnav présente un caractère structurel. Les personnes appartenant aux premières classes d'âge du baby-boom d'après-guerre sont désormais très nombreuses à pouvoir demander la liquidation de leur pension. Le nombre des départs en retraite s'est ainsi accru de 8 % en 2006 par rapport à 2005.

Les projections tablent pour les prochaines années sur le maintien d'un fort déficit, qui serait compris, en 2010, entre 3,3 milliards d'euros et 5,1 milliards d'euros. Ces estimations ont pourtant été élaborées sur la base d'hypothèses que certains observateurs considèrent comme « optimistes », aussi bien en ce qui concerne la progression de la masse salariale que celle des prestations versées. Ainsi, les prévisions de déficit du régime général pour 2007 reposent sur l'idée d'une modification substantielle des comportements des assurés sociaux, en réponse à la mise en oeuvre du plan national d'action en faveur des seniors : on suppose que 40.000 personnes choisiraient, dès l'année prochaine, de repousser la date de leur départ à la retraite, ce qui n'est pas avéré.

Le creusement récent du déficit du régime général s'explique aussi en grande partie par l'ampleur des départs anticipés des assurés sociaux qui ont commencé précocement leur carrière professionnelle et qui liquident leur pension avant soixante ans. Le déséquilibre des finances de la Cnav est ainsi passé de 1,9 milliard d'euros en 2005, à 2,4 milliards d'euros en 2006 et devrait atteindre 3,5 milliards d'euros en 2007. L'augmentation du coût de la mesure des carrières longues a pesé très fortement sur cette tendance : les dépenses correspondantes se sont élevées à 600 millions d'euros en 2004, à 1,4 milliard d'euros en 2005, à 1,8 milliard d'euros en 2006 et seraient, en 2007, de 2 milliards d'euros.

Les comptes de la Cnav sont affectés par un effet de ciseau entre le rythme de croissance des recettes (+ 4,3 % en 2006 et + 4,6 % estimés en 2007) et celui, sensiblement supérieur, des prestations versées (+ 5,6 % en 2006 et + 5,2 % estimés en 2007). A cela s'ajoute la mise à contribution du régime général au titre de la compensation démographique dont le montant, qui atteint 2,8 milliards d'euros par an, s'est d'ailleurs accru de 800 millions d'euros depuis la réforme des critères intervenue à l'automne 2002. Au total, la croissance des dépenses de la Cnav atteindrait 24 % sur la période 2005/2010, tandis que la progression des recettes serait comprise, selon les hypothèses envisagées, entre 21,2 % et 23,6 %.

Après avoir constaté l'absence de changement des comportements individuels et collectifs dans les entreprises et déploré que les employeurs continuent à utiliser massivement les différents mécanismes de cessation précoce d'activité des salariés, Mme Danièle Karniewicz a indiqué que le nombre des nouveaux bénéficiaires de la mesure des carrières longues tend tout juste à se stabiliser, mais à un niveau très élevé : 102.000 en 2005, 105.000 en 2006 et probablement 95.000 en 2007. Dès l'âge de quarante-cinq ans, beaucoup de salariés ont le sentiment de représenter un fardeau pour les entreprises qui les emploient. Or, voici quelques années encore, ce couperet psychologique ne semblait apparaître qu'à cinquante, voire cinquante-cinq ans. Ce phénomène très sensible explique une tendance générale à l'oeuvre parmi les « seniors » qui consiste à vouloir partir en retraite dès que possible, afin de se prémunir contre les possibles effets de la prochaine réforme des retraites. Ce mouvement d'inquiétude semble gagner le corps social à l'approche de la « clause de rendez-vous » de 2008.

En ce qui concerne le dossier de la pénibilité, les partenaires sociaux ont engagé des négociations nationales en février 2005, conformément à l'article 12 de la réforme des retraites de 2003, mais les discussions ne semblent pas devoir aboutir rapidement à un accord. Il apparaît donc prématuré d'évoquer un futur dispositif destiné à compenser la pénibilité au cours de la carrière professionnelle, d'autant plus que la définition des contours de cette notion pose de redoutables difficultés pratiques et conceptuelles. Pour autant, Mme Danièle Karniewicz a estimé que, compte tenu de l'impact financier déjà élevé de la mesure des carrières longues et du caractère structurel du déficit du régime général, il ne sera sans doute pas possible d'indemniser la pénibilité dans des conditions généreuses. La diminution progressive, à partir du début des années 2010, des effectifs éligibles au dispositif des carrières longues pourrait toutefois donner lieu à des effets de substitution en faveur d'un nouveau dispositif de cessation d'activité, fondé cette fois sur la pénibilité.

Après avoir rappelé l'intérêt constant manifesté par la commission des affaires sociales du Sénat à la question des adossements de régimes spéciaux, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie , a demandé pourquoi le dossier de la Régie autonome des transports parisiens (RATP) n'a toujours pas abouti. Il a également souhaité savoir si la Cnav a reçu des assurances du Gouvernement sur l'abandon du projet consistant à amorcer, dès cette année, l'adossement des retraites de La Poste. Puis il a interrogé la caisse sur la présentation de l'adossement des industries électriques et gazières (IEG) dans son rapport annuel.

Après avoir rappelé que les négociations engagées entre la Cnav, l'Etat et la RATP se sont ouvertes au premier semestre 2005 et que, dès juin 2005, les échanges ont porté sur le montant de la soulte et sur son mode de calcul, Mme Danièle Karniewicz a indiqué que les discussions avec les pouvoirs publics semblent au point mort depuis le mois de juillet dernier. Compte tenu de ce retard qui ne lui est en rien imputable, il est désormais indispensable, pour espérer parvenir à un accord, de remettre à plat l'ensemble des éléments financiers du projet d'adossement.

Les négociations engagées avec les pouvoirs publics achoppent sur trois points de blocage principaux : la question de la prise en charge des avantages familiaux par le fonds de solidarité vieillesse (FSV), le niveau de la rente garantie des retraités et le taux d'actualisation sur la base duquel la soulte sera calculée.

S'agissant des avantages familiaux, elle a estimé que la situation actuelle de sous-financement chronique du FSV, lequel doit au demeurant 5,6 milliards d'euros à la Cnav, interdit désormais de reproduire le schéma de compromis qui avait prévalu in fine pour les IEG. Même si les sommes en jeu apparaissent nettement inférieures dans le cas de la RATP à ce qu'elles étaient pour les IEG, il s'agit d'une question de principe pour le régime général, notamment dans la perspective des opérations ultérieures d'adossement.

Il en va de même pour le niveau de la rente garantie, qui devrait être plus faible pour la RATP que dans le cas des IEG. Cette opération consiste, dans un souci de simplification, à reprendre globalement les droits des retraités du régime adossé, pour éviter d'avoir à reconstituer individuellement leurs carrières professionnelles.

Reconnaissant que cette demande pose très certainement des difficultés à l'Etat, dans la mesure où la nouvelle caisse de retraite du personnel de la RATP serait alors amenée à verser la différence, elle a toutefois estimé que ce problème n'est pas celui des assurés sociaux du régime général.

En ce qui concerne le taux d'actualisation, qui joue un rôle déterminant dans le montant de la soulte, Mme Danièle Karniewicz a indiqué que le niveau retenu il y a deux ans pour les IEG (2,5 %) n'a pas aujourd'hui vocation à être automatiquement reconduit pour la RATP. Des experts financiers et des actuaires préconisent en effet d'utiliser des taux inférieurs, ce qui aboutirait à augmenter sensiblement le montant des droits d'entrée à acquitter par le régime adossé : un écart de quelques dizaines de points de pourcentage se traduit par une différence actuarielle de plusieurs centaines de millions d'euros sur une durée de vingt-cinq ans. Après avoir réaffirmé, comme elle l'avait fait lors de son audition du 21 juin 2006 par la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat, le besoin pour la Cnav de disposer d'une contre-expertise des banques de la place pour être en mesure d'apprécier le taux d'actualisation proposé par le ministère des finances, elle a observé que les calculs de la soulte reposent également sur des hypothèses d'évolution des effectifs du personnel fournies par la RATP que la Cnav se trouve contrainte d'accepter.

Aussi bien pour le dossier de la RATP que pour celui de La Poste, Mme Danièle Karniewicz , a estimé que dès lors que la solution d'un adossement sur le régime général semble le seul schéma envisagé par le ministère des finances, il apparaît indispensable de consacrer les prochains mois à des travaux très approfondis sur ces opérations. Compte tenu de la difficulté avérée de l'exercice et de la nécessité absolue de trouver une solution en 2007, il serait impensable que l'Etat attende, pour ouvrir des négociations, que les échéances électorales de l'année prochaine soient passées.

Après avoir indiqué que la Cnav n'a reçu à ce jour aucun élément chiffré de la part de La Poste, Mme Danièle Karniewicz a rappelé, d'une part, que ce dossier porte sur un montant d'engagements de retraite de 70 milliards d'euros, d'autre part, qu'il ne s'agit pas, en l'espèce, de l'adossement d'un régime de retraite spécial. Cette entreprise publique, dont l'effectif total s'élève à 300.000 personnes, est en effet composée, pour un tiers, de salariés de droit privé et, pour le reste, de fonctionnaires de l'Etat, dont la situation au regard de la retraite est déterminée par le code des pensions civiles et militaires de retraite. Il s'agit donc d'un cas de figure entièrement nouveau par rapport aux précédents des IEG ou de la RATP, nécessitant probablement quatre ou cinq mois de travaux techniques préalables, avant d'être en mesure d'engager des négociations qui seront de toute évidence ardues.

Observant que la puissance publique joue en quelque sorte le rôle de réassureur de La Poste pour les retraites des agents publics, elle a constaté que les relations entre l'Etat et l'entreprise publique évoluent progressivement : La Poste a ainsi déjà été conduite à verser 2 milliards d'euros dans le cadre de la loi de finances pour 2006. Cette opération pourrait être renouvelée à l'occasion de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2006.

Après s'être félicitée que le Gouvernement ait finalement abandonné le projet consistant, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, à amorcer dès cette année l'adossement des retraites de La Poste sur le régime général, par le biais d'une avance d'environ un milliard d'euros, elle a indiqué qu'une telle opération aurait pu coûter un montant équivalent à la Cnav en 2007.

M. Nicolas About, président , a fait valoir sur ce point que M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie, et M. Dominique Leclerc, rapporteur pour la branche vieillesse, se sont prononcés contre une telle perspective, le 28 septembre 2006, dans un communiqué de presse conjoint.

Mme Danièle Karniewicz s'est réjouie de l'implication des sénateurs dans ces dossiers ainsi que de leur très bonne compréhension de la situation du régime général. Elle s'est par ailleurs interrogée sur la nécessité pour la Cnav, à l'instar des régimes complémentaires qui en bénéficient déjà, d'intégrer une clause de rendez-vous dans les conventions d'adossements qui seront signées à l'avenir. Il n'est pas raisonnable d'imaginer que le régime général s'engage, à coup sûr et une fois pour toutes, sur le calcul des droits d'entrée, dans le cadre d'opérations fort complexes avec des durées de projection de vingt-cinq ou trente ans. La possibilité de dresser un premier bilan après quelques années est donc indispensable. Enfin, la Cnav ne saurait admettre que l'Etat veuille lui appliquer un taux d'actualisation différent de celui qui sera utilisé pour les régimes complémentaires Agirc et Arrco.

En réponse à M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie , qui s'interrogeait sur la présentation de l'adossement des IEG dans le rapport annuel de la Cnav, elle a indiqué que l'opération apparaît jusqu'ici globalement équilibrée. Toutefois, les données disponibles ne concernent que la seule année 2005, pour laquelle la Cnav a versé à la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG) un montant de 1.380 millions d'euros de prestations de retraite. En contrepartie, la Cnav a reçu de la CNIEG 816 millions d'euros de cotisations, auxquels s'ajoutent 48 millions d'euros de la part du FSV et 287 millions d'euros au titre de la première partie de la soulte. A première vue, le solde de trésorerie semblerait donc être négatif de 225 millions d'euros pour le régime général. Mais le résultat économique global doit également prendre en compte les intérêts (62 millions d'euros) et les plus-values latentes (178 millions d'euros) au titre de la seconde partie de la soulte, dont la gestion sera assurée par le fonds de réserve des retraites jusqu'en 2020. Au total, le bilan pour 2005 de l'adossement des IEG serait donc globalement positif (+ 37 millions d'euros) pour la Cnav.

Après avoir observé qu'il convient néanmoins d'appréhender sur une longue durée le respect du principe de stricte neutralité financière introduit par le législateur, Mme Danièle Karniewicz a estimé que ces calculs de rentabilité économique sont difficiles à réaliser et présentent un caractère relatif : il est inévitable que des écarts se produisent certaines années.

Constatant au passage que ces estimations ne prennent pas en compte le coût d'opportunité pour le régime général de cet écart de 225 millions d'euros, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie , a estimé à son tour que le bilan d'ensemble de l'opération semble équilibré. Puis il s'est demandé comment, et suivant quel calendrier, la Cnav entend préparer la prochaine réforme des retraites, et quels thèmes de réflexion retiennent plus particulièrement son attention.

Mme Danièle Karniewicz a estimé qu'il est encore un peu trop tôt pour ouvrir ce débat sur la base d'éléments chiffrés. Pour autant, et en s'exprimant à titre personnel, elle a jugé que les assurés sociaux du secteur privé, qui ont déjà réalisé d'importants efforts dans un passé récent, ne pourront consentir à une nouvelle diminution du niveau de leurs retraites. Cette problématique est d'ailleurs encore plus sensible pour les régimes complémentaires que pour les régimes de base. Il conviendra sans doute de réfléchir à une augmentation des ressources de l'assurance vieillesse, par le biais d'une hausse des cotisations, d'une part, et de la recherche de ressources nouvelles, d'autre part. A ce titre, elle s'est prononcée en faveur d'une remise à plat des politiques d'exonération de charges des entreprises, ainsi que de l'élargissement de l'assiette des cotisations à l'intéressement, à la participation et à d'autres formes de rémunération.

Elle s'est inquiétée de voir les assurés sociaux du secteur privé en quelque sorte livrés à eux-mêmes, face à la perspective d'une diminution inexorable du taux de remplacement des régimes de retraite de base et des organismes de retraite complémentaire. La puissance publique donne d'ailleurs l'impression de vouloir repousser, sinon même éluder, les choix douloureux qui s'imposent pour sécuriser le financement des retraites. Le contraste avec les ressortissants d'autres régimes qui, eux, ont la chance de bénéficier de la sollicitude de l'Etat n'en est que plus visible.

Elle a ensuite estimé qu'il n'est plus possible de considérer isolément chaque branche de la sécurité sociale, mais qu'il convient de raisonner globalement sur les conséquences du vieillissement de la population pour l'effort social de la nation dans son ensemble. Il faut dégager des priorités, faire des choix et affecter les ressources disponibles en conséquence.

A la lumière des observations formulées par la Cour des comptes sur la situation actuelle du FSV, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie , s'est interrogé sur le crédit que l'on peut accorder aux garanties apportées par l'Etat. Il en va de même pour les éventuelles clauses de rendez-vous dont la puissance publique pourrait chercher à s'affranchir. En conséquence, il s'est demandé s'il ne conviendrait pas même d'élever au niveau organique, voire constitutionnel, le respect de ces principes.

Après avoir remercié le Sénat pour son soutien, Mme Danièle Karniewicz a rappelé qu'elle entend obtenir de l'Etat le paiement des sommes importantes que le FSV doit au régime général, non seulement en intérêts mais aussi en capital.

* 1 Cf. audition du 25 octobre 2006 de Danièle Karniewicz, présidente de la Cnav - bulletin des commissions du Sénat n° 4 (session ordinaire 2006/2007) p. 57.

* 2 Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale.

* 3 Audition du 11 octobre 2006 de Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes - bulletin des commissions du Sénat n° 2 (session ordinaire 2006/2007).

* 4 Document de travail de l'Ined n° 126 (avril 2005) - L'impact des réformes de 1993 et de 2003 sur les retraites - Thierry Debrard - Anne-Gisèle Privat.

* 5 Cf. l'enquête sur les forces de travail publiée le 8 septembre 2005 par Eurostat.

* 6 Communiqué de presse du 28 septembre 2006.

* 7 Cf. bulletin des commissions du 27 octobre 2006 - Audition de Danièle Karniewicz, présidente de la Cnav, du 25 octobre 2006.

* 8 Cf. bulletin des commissions du Sénat du 1 er avril 2006 (session ordinaire 2006/2007) - communication du 28 mars 2006 de Dominique Leclerc sur les travaux du COR.

* 9 Cf. Faut-il brûler le modèle social français ? Alain Lefebvre, conseiller social à l'ambassade de France en Suède, et Dominique Méda, sociologue - Editions du Seuil, 2006.

* 10 Quelle régulation pour les régimes de retraite par répartition ? Jacques Bichot revue Droit social septembre-octobre 2006.

* 11 Cf. article consacré « aux nouvelles générations devant la panne prolongée de l'ascenseur social » du sociologue Louis Chauvel - Janvier 2006 - Revue de l'OFCE.

* 12 Rapport de Michel Pébereau (14 décembre 2005) : Des finances publiques au service de notre avenir.

* 13 L'économie française, compte et dossiers - les engagements implicites des systèmes de retraite Didier Blanchet et Jean-François Ouvrard - Insee - Juin 2006.

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