ARTICLE 3 - Résultat de l'exercice 2006 Affectation au bilan et approbation du bilan et de l'annexe

Commentaire : le présent article auquel figurent le compte de résultat et le bilan de l'État, a pour objet d'approuver le bilan après affectation du résultat comptable de l'exercice.

Conformément au III de l'article 37 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, la loi de règlement affecte au bilan le résultat comptable de l'exercice, tel qu'il procède du compte de résultat de l'exercice établi à partir des ressources et des charges constatées dans les conditions prévues à l'article 30. Elle approuve le bilan après affectation ainsi que l'annexe.

On note que le compte de résultat et le bilan font l'objet d'analyses détaillées dans le compte général de l'État annexé à la présente loi . Celui-ci comprend, conformément au 7° de l'article 54 de la LOLF décliné dans la norme n° 1 du recueil des normes comptables de l'État, la balance générale des comptes, le compte de résultat (composé du tableau des charge nettes, du tableau des produits régaliens nets et du solde des opérations de l'exercice), le bilan (ou tableau de la situation nette) et ses annexes, comprenant notamment une évaluation des engagements hors-bilan de l'État, ainsi que le tableau des flux de trésorerie.

I. LE COMPTE DE RÉSULTAT DE L'ÉTAT

La présentation du compte de résultat, qui regroupe la totalité des charges et des produits d'un exercice comptable, est scindée en trois tableaux :

1°) le tableau des charges nettes de l'exercice par nature, qui retrace le montant total des charges nettes non couvert par les produits d'activité correspondants de l'exercice ;

2°) le tableau des produits régaliens nets détaillé par catégories (produits fiscaux et autres produits régaliens), qui récapitule les produits issus de l'exercice de la souveraineté de l'État sans contrepartie directe équivalente pour les tiers : produits régaliens nets des obligations de l'État en matière fiscale ainsi que des décisions d'apurement qui remettent en cause le bien fondé des créances sur les redevables (dégrèvements et autres annulations). Ce tableau présente, en outre, le montant des ressources propres du budget de l'Union européenne basées sur le produit national brut et la taxe sur la valeur ajoutée ;

3°) le tableau de détermination du solde des opérations de l'exercice, qui présente la différence entre les charges nettes et les produits régaliens nets.

II. LE BILAN DE L'ÉTAT

De son côté, le bilan de l'État se présente sous la forme d'un tableau de la situation nette qui retrace à la façon d'un bilan d'entreprise, les actifs et les passifs préalablement identifiés et comptabilisés.

Le tableau de la situation nette comprend :

- d'une part, l'actif qui recense les éléments du patrimoine ayant une valeur positive pour l'État : actif immobilisé, actif circulant, trésorerie...

- d'autre part, le passif constitué des obligations à l'égard des tiers qui existent à la date de clôture : dettes financières, dettes non financières, provisions pour risques et charges, trésorerie passive...

Le bilan de l'État fait apparaître une situation nette négative de 593,14 milliards d'euros au 31 décembre 2006 à comparer aux 501,24 milliards d'euros inscrits au bilan d'ouverture.

La dégradation en 2006 de la situation nette de l'État de 92 milliards d'euros s'explique par le fait que l'accroissement du total des passifs inscrits au bilan de l'État en 2006, soit + 18,7 milliards d'euros, s'est accompagnée d'une forte contraction de ses actifs à concurrence de - 73,2 milliards d'euros, mouvement qui reflète principalement le transfert des routes nationales aux départements pour - 67 milliards d'euros, ainsi que la diminution de la trésorerie pour - 25 milliards d'euros.

S'agissant du niveau et du signe de la situation nette, qui est donc très franchement négative, il y a une mise au point à faire : indépendamment même de certaines conventions, qui tendent à sous-estimer certains actifs, il faut rappeler que l'on ne tient pas compte dans ce bilan de la caractéristique essentielle et donc l'actif majeur de l'État, sa capacité à lever l'impôt.

Il convient de rappeler les spécificités des comptes de l'État : selon le compte général de l'État, « au bilan tout d'abord, contrairement à une entreprise, l'État ne dispose pas de capital social. Les produits de l'État sont essentiellement des produits régaliens, qui procèdent pour une grande part de la capacité de l'État à lever l'impôt. La capacité à lever l'impôt pourrait être considérée comme un actif incorporel. Par application des normes de l'État, cet élément n'est pas intégré au bilan de l'État car il n'est pas évaluable, situation que l'on retrouve dans les États étrangers. Enfin, l'État est aussi pourvoyeur de services qui ne dégagent pas en comptabilité de produits mesurables en contrepartie ».

Au surplus, il faut à ce stade rester prudent sur l'interprétation de ces chiffres en raison des incertitudes dont ils sont entachés et qui ont justifié les réserves de la Cour des comptes dans l'accomplissement de sa mission de certification.

III. DES COMPTES CERTIFIÉS PAR LA COUR DES COMPTES MOYENNANT 13 RÉSERVES SUBSTANTIELLES

Pour la première fois, en application du 5° de l'article 58 de la LOLF, la Cour des comptes a procédé à « la certification de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes de l'État accompagnée du compte rendu des vérifications opérées ».

Selon la Cour des comptes, « la certification des comptes se définit comme l'opinion écrite et motivée que formule un organisme indépendant sur la conformité des états financiers d'une entité, dans tous ses aspects significatifs, à un ensemble donné de règles comptables ».

L'article 30 de la LOLF s'inspirant de ce modèle issu du monde de l'entreprise privée pour l'adapter aux spécificités de l'État, a intégré la certification des comptes de l'État dans une réforme budgétaire et comptable d'ensemble. Celle-ci a notamment prévu que la comptabilité générale de l'État soit désormais tenue dans un format et selon des règles aussi proches que possible de celles applicables aux entreprises.

Aux termes des normes internationales d'audit, un certificateur ne peut émettre une opinion sans réserve s'il a identifié des difficultés significatives, quantitativement ou qualitativement. Ces difficultés sont de deux ordres :

- des désaccords sur des ajustements, des reclassements ou des modifications de l'annexe ou sur des divergences chiffrables ou non chiffrables sur des questions de méthode ;

- des limitations dans l'étendue des travaux d'audit, que ces limites soient le fait de circonstances ou d'éléments justificatifs insuffisants ou qu'elles résultent de l'impossibilité d'apprécier la régularité, la sincérité et l'image fidèle des comptes.

La Cour des comptes fait également référence à des « incertitudes relevées du fait soit de limitations, soit d'anomalies non chiffrables », qu'elles aient fait l'objet ou non d'un désaccord avec l'administration. Ce sont l'intensité et la combinaison éventuelle des désaccords, des limitations et des incertitudes qui ont déterminé son choix entre les différentes options qui lui étaient offertes : certification avec réserves, impossibilité de certifier et refus de certifier.

La Cour des comptes a organisé sa mission de certification en deux temps. Elle mène d'abord des vérifications qualifiées d'« intermédiaires » au cours de l'exercice, puis des vérifications dites « finales » après la clôture des comptes et avant leur arrêté définitif.

A ces deux séries de vérifications s'est ajouté, pour ce premier exercice de certification, un examen spécifique du bilan d'ouverture de 2006 .

Qualifié d'« acte fondateur » par la Cour des comptes, dans la mesure où il est le point de départ des écritures de l'exercice 2006 et de tous les exercices ultérieurs, le bilan d'ouverture de 2006 , qui est le premier état financier établi selon les nouvelles règles comptables , a fait l'objet d'une procédure spécifique :

- un premier examen a été mené en septembre 2006, peu de temps après la remise à la Cour des comptes par l'État, d'une première version provisoire de la balance d'ouverture ;

- un second examen a été joint aux vérifications finales sur les comptes de 2006 lorsque le bilan d'ouverture a été définitivement stabilisé.

Sur les comptes de l'exercice 2006 , à l'issue de ses vérifications finales, la Cour des comptes avait formulé 191 observations d'audit 23 ( * ) . Sur les 114 observations débouchant sur des demandes de rectification des comptes, 83 ont été prises en compte par l'administration, en totalité ou en partie. Les observations d'audit chiffrées retenues dans les comptes ont eu pour effet de dégrader la situation nette de 41.922 millions d'euros et le solde 24 ( * ) des opérations de l'exercice de 3.407 millions d'euros.

Au total, compte tenu « à la fois des travaux déjà réalisés par l'administration pour établir le premier compte général de l'État sans avoir bénéficié d'une période transitoire, des informations détaillées contenues dans ce document et des engagements pris pour lever à court ou moyen terme les incertitudes et réduire les limitations et les désaccords qui subsistent, la Cour [des comptes] formule sur le compte général de l'État arrêté au 31 décembre 2006 une certification assortie de 13 réserves substantielles ».

La Cour des comptes note tout d'abord qu'elle a été confrontée à plusieurs limitations qu'elle soient générales ou spécifiques : il y a celles, d'une part, dues aux systèmes d'information financière de l'État qui ne sont pas entièrement adaptés à la nouvelle comptabilité générale, ainsi qu' à la faiblesse des faiblesses des dispositifs de contrôle et d'audit internes , et, d'autre part, celles résultant de limitations spécifiques de moindre importance, telle l'impossibilité d'obtenir dans les délais compatibles avec l'exercice de certification les comptes de 2006 d'une partie des opérateurs de l'État .

Parmi les désaccords et incertitudes , il faut mentionner en premier lieu s'agissant du recensement ou de l'évaluation des actifs de l'État :

- le caractère incomplet du recensement des actifs du ministère de la défense : matériels en opérations extérieures ou situées outre-mer, satellites, missiles nucléaires, etc ;

- l'incertitude de l'évaluation de la valeur des participations de l'État dans ses opérateurs, évaluée dans les comptes de 2006 à 53,7 milliards d'euros ;

- la non mention dans les comptes de certaines immobilisations corporelles particulières de l'État (biens remis en concession, partenariats public-privé ou assimilés) ;

- les approximations dans la méthode d'évaluation du réseau routier national, ayant abouti à valoriser les routes nationales en service à 104,3 milliards d'euros ;

- l'incertitude affectant la valeur du parc immobilier de l'État, estimée au 31 décembre 2006 à 49,1 milliards d'euros ;

- les lacunes dans la détermination des créances fiscales ;

- la sous-évaluation, inchiffrable mais considérable, du passif de l'État en matière de dépenses d'interventions ;

- l'intégration très partielle des comptes des pouvoirs publics.

En second lieu, indépendamment de débats très techniques, on relève d'autres désaccords et incertitudes affectant à la fois des éléments de passifs et d'actifs :

- la prise en compte du compte des opérations de la Compagnie française d'assurance du commerce extérieur (Coface) effectuées avec la garantie de l'État, compte qui représente au 31 décembre 2005 un total de bilan de 17 milliards d'euros, et n'a pas été intégré dans les comptes de l'État alors que celui-ci exerce un contrôle effectif sur la gestion des procédures et effectue chaque année au profit du budget général un prélèvement sur le solde de trésorerie ;

- l'exclusion de la section des fonds d'épargne des comptes de la Caisse des dépôts et consignations du calcul de la participation de l'État dans cet établissement public, ce qui a pour effet de minorer de 7,1 milliards d'euros la valeur des entités non contrôlées par l'État figurant à l'actif de son bilan.

IV. LES PREMIÈRES INTERPRÉTATIONS ÉCONOMIQUES

Sur le plan économique, l'analyse du bilan de l'État permet de dresser un diagnostic plus complet sur sa situation financière :

- les « dettes non financières « de l'État , c'est-à-dire ses dettes à l'égard de tiers (fournisseurs, ménages, entreprises, collectivités territoriales, etc.) s'élevaient à 93 milliards d'euros à fin 2006, en augmentation de près de 20 % sur un an : cet accroissement de 15 milliards d'euros, qui témoigne des retards de paiement de l'État est sensiblement supérieur à la baisse de la dette financière de l'État en 2006 qui s'est élevée à 3,8 milliards d'euros ;

- les « provisions pour risques et charges « sont estimées, de leur côté, à 50 milliards d'euros à la fin 2006, en augmentation de 3 milliards d'euros en un an.

Ces différents passifs sont à surveiller dans la mesure où, tôt ou tard, ils entraîneront pour l'État une charge sans contrepartie.

Sur longue période , et selon les données de comptabilité nationale qui ne sont pas corrigées des modifications de périmètre, la « richesse nette » de l'État , c'est-à-dire la différence entre ses actifs et ses passifs, s'est dégradée, depuis 1995, de 286 milliards d'euros, soit 8,8 points de PIB . Il y a là la conséquence , d'une part, de l'accumulation persistante de déficits élevés qui sont venus gonfler la dette de l'État, d'autre part du fait que la dette n'a pas eu pour contrepartie , à la différence de celle des collectivités territoriales, un effort spécifique en matière d'investissement .

Enfin, on note que la comptabilité générale retrace en annexe au bilan de l'État ses « passifs éventuels ». Ces passifs, qualifiés aussi d'« engagements hors-bilan », sont de nature très diverse et à cet égard porteurs de risques financiers d'importance variable.

Du fait de cet hétérogénéité - il s'agit notamment de garanties d'emprunts de fondement très variable, de contrats de co-financement et notamment les contrats de plan ou les accords de partenariat publics-privés 25 ( * ) , d'engagements de retraite -, ils ne peuvent encore faire l'objet d'une totalisation significative sur le plan économique.

Pour votre rapporteur général, des progrès devront être faits d'année en année, car l'État doit être capable de chiffrer selon une méthode stable et compréhensible ses principaux engagements hors-bilan.

Lors de son examen par l'Assemblée nationale, le présent article a fait l'objet de cinq amendements rédactionnels.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 23 Ces observations tendaient soit à demander des corrections d'anomalies dans les comptes (114 observations) ou dans l'annexe (15 observations), soit à constater une incertitude sur la validité de certains comptes (51 observations), soit encore à faire part à l'administration de limitations dans l'étendue des travaux d'audit (11 observations).

* 24 Par ailleurs, des reclassements qui consistent en des modifications d'imputation comptable sans impact sur le résultat de l'exercice ont été opérés pour un montant total de 9,1 milliards d'euros à l'actif, 77,1 milliards d'euros au passif, 1,05 milliard d'euros au hors-bilan, 10,1 milliards d'euros sur le tableau des produits régaliens nets, auxquelles s'ajoutent des décompensations d'actifs et de passifs et de produits et de charges.

* 25 Les engagements financiers souscrits par l'Etat dans le cadre de procédures contractuelles résultent notamment des contrats de plan Etat-régions (CPER) et des contrats de partenariat public-privé (PPP). Sur la période 2000-2006, les CPER représentaient pour l'Etat des engagements de 19,5 milliards d'euros. A fin 2006, le taux de mise en place de ses crédits a été évalué à 80,7 %. Les procédures contractuelles en cours sur le volet territorial des CPER 2000-2006 continueront d'être mises en oeuvre et s'achèveront au plus tard le 31 décembre 2007.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page